2. 17-160-C-10 Méningites aiguës Neurologie
Tableau I. – Étiologie des méningites aiguës.
• Bactéries
Neisseria meningitidis Staphylococcus epidermidis Acinetobacter baumannii
Streptococcus pneumoniæ Enterococcus faecalis fv;11Salmonella spp.
Hæmophilus influenzæ Propionibacterium acnes Nocardia spp.
Listeria monocytogenes Staphylococcus aureus Mycobacterium tuberculosis
Streptococcus agalactiæ Klebsiella pneumoniæ Brucella spp.
Escherichia coli Pseudomonas æruginosa Mycoplasma spp.
• Méningite bactérienne décapitée
• Virus
Entérovirus Herpès simplex virus 1 et 2
Virus des oreillons VIH1, VIH2 Cytomégalovirus
Adénovirus Poliovirus Epstein-Barr virus
Virus varicelle-zona
• Rickettsies
Rickettsia spp. Ehrlichia spp.
• Spirochètes
Treponema pallidum (syphilis) Borrelia burgdorferi Leptospira spp.
• Champignons
Cryptococcus neoformans Histoplasma capsulatum
Coccidioides immitis Candida spp.
• Parasites
Naegleria fowlei Angiostrongylus cantonensis Strongyloides stercoralis
• Autres syndromes infectieux (dont foyers paraméningés)
Abcès cérébral Mastoïdite Ostéomyélite crânienne
Sinusite Empyème Endocardite
Otite Thrombophlébite Syndromes postviraux
Syndromes postvaccination
• Tumeurs et kystes cérébraux
• Médicaments
Cotrimoxazole, ciprofloxacine, b-lactamines, isoniazide carbamazépine, neuroleptiques, cytosine anti-inflammatoires non stéroïdiens, OKT3,
arabinoside, azathioprine, immunoglobulines polyvalentes
• Maladies systémiques
Lupus érythémateux disséminé Maladie de Behçet Syndrome de Koyanagi-Harada
• Après certaines procédures
Après neurochirurgie Après injection intrathécale
Après injection péridurale Après infiltrations (papaïne)
• Divers
Postconvulsions Néoplasies
Migraine Méningite de Mollaret
VIH : virus de l’immunodéficience humaine.
contexte et des circonstances : arboviroses, virus de la Pneumocoque
chorioméningite lymphocytaire, poliovirus, adénovirus, parvovirus
La méningite à pneumocoque a une incidence annuelle de 1 à
B19.
2/100 000 dans les pays développés, alors qu’elle peut atteindre
jusqu’à 20/100 000 dans les pays en développement. La mortalité
MÉNINGITES AIGUËS BACTÉRIENNES OU PURULENTES des méningites à pneumocoque est d’environ 20 %. Les
¶ Méningites purulentes communautaires complications sont fréquentes (près de 50 % des cas). Certains
sérotypes, retrouvés aussi plus fréquemment au cours des
On estime actuellement que 1 million de nouveaux cas de bactériémies à pneumocoque, sont responsables des méningites
méningites bactériennes communautaires surviennent tous les ans purulentes. On retrouve souvent d’autres sites d’infection : otite
dans le monde. L’incidence annuelle des méningites purulentes moyenne aiguë, mastoïdite, sinusite, pneumonie, endocardite. Les
communautaires en France était estimée à 22,5 cas/million méningites à pneumocoque sont particulièrement graves sur terrain
d’habitants en 1993 [5]. Les pays en développement connaissent à risque : splénectomie ou asplénie fonctionnelle (notamment
l’incidence la plus élevée et la mortalité la plus lourde. (mortalité drépanocytose), alcoolisme, hypogammaglobulinémie, myélome
moyenne de l’ordre de 20 %, dépassant parfois 50 %). En situation multiple, cancer, diabète, insuffisance rénale chronique, cirrhose. Le
communautaire, les germes les plus fréquents restent Neisseria pneumocoque est la bactérie le plus fréquemment retrouvée lors des
meningitidis, Streptococcus pneumoniae, Hæmophilus influenzae, suivis méningites purulentes sur brèche ostéoméningée (volontiers
de Listeria monocytogenes, Escherichia coli et du streptocoque B. récidivantes).
L’incidence de ces différents micro-organismes varie L’augmentation des cas de méningites dus à des souches de
considérablement en fonction de l’âge. Dans les pays développés et pneumocoque de sensibilité diminuée à la pénicilline (PRP)
hors épidémie, chez le nouveau-né, E. coli, L. monocytogenes et le (tableau II) est un problème préoccupant [11]. La fréquence des
streptocoque B sont prépondérants (par ordre de fréquence souches de PRP est inégalement répartie en Europe : 0,8 % en Italie,
croissante). Entre 1 mois et 15 ans, H. influenzae prédomine sur le 5 % en Allemagne, jusqu’à 40 % en Espagne et en Hongrie. En
méningocoque, suivi du pneumocoque. Néanmoins, on peut penser France, l’étude de 1 023 souches de pneumocoque isolées de LCR,
que la fréquence de l’Hæmophilus risque de baisser dans les années de 1987 à 1994, a permis de mettre en évidence 18,1 % de PRP dont
à venir, en conséquence de l’extension du vaccin contre Hæmophilus 49,7 % étaient des souches à haut niveau de résistance. De plus, la
de type B. Chez l’adulte jeune, le pneumocoque devance le fréquence de la résistance augmente progressivement de 1987 (5,7 %
méningocoque. Au-delà de 60 ans, on retrouve surtout le des souches) à 1994 (27,1 % des souches). Parmi les 60 PRP isolés du
pneumocoque, prépondérant sur L. monocytogenes et H. influenzae. LCR en 1994, 35 % sont de résistance à bas niveau à la céfotaxime et
Les agents bactériens autres que H. influenzae, S. pneumoniae et N. 3,3 % sont résistants à haut niveau [23]. Les facteurs de risque de PRP
meningitidis ne représentent que 20 à 30 % des isolements. Certaines sont :
particularités épidémiologiques concernant les principaux micro-
organismes méritent d’être précisées. – l’âge (moins de 15 ans) ;
2
3. Neurologie Méningites aiguës 17-160-C-10
sensibilité diminuée à la pénicilline [14]. Concernant les souches
Tableau II. – Résistance du pneumocoque aux β-lactamines. impliquées dans les méningites, une récente étude française retrouve
S I (BNR) R (HNR) 22 % de souches de sensibilité modérément diminuée à la
pénicilline [50]. Ce phénomène, qui semble s’accroître avec le temps,
Pénicilline G CMI ≤ 0,06 mg/L [0,12-1 mg/L] > 1 mg/L mérite une surveillance rapprochée. À noter de plus la mise en
Amoxicilline évidence très récemment de 11 souches (dont une en France)
Céfuroxime hautement résistantes au chloramphénicol [20].
Céfotaxime
Ceftriaxone CMI ≤ 0,5 mg/L [1-2 mg/L] > 2 mg/L
Imipenem Listeria [4, 14, 37]
Céfépime
Cefpirome
Dans les méningites de l’adulte, il s’agit le plus souvent du
quatrième germe, responsable d’environ 8 % des méningites
S : sensible ; I : intermédiaire ; R : résistant ; CMI : concentration minimale inhibitrice ; BNR : bas niveau de bactériennes avec une incidence annuelle de 0,2/100 000 et une
résistance ; HNR : haut niveau de résistance. Les pneumocoques dits résistants à un antibiotique sont ceux qui sont
I ou R. mortalité de 27 % [4, 14] . La population est essentiellement les
nouveau-nés et les sujets de plus de 60 ans [45]. Environ un tiers des
– l’administration préalable d’antibiotiques notamment de infections à L. monocytogenes sont neuroméningées. De 20 à 36 %
β-lactamines ; des patients sont exempts de pathologie sous-jacente. La présence
d’une leucémie, d’un sida ou d’une greffe rénale multiplie par plus
– l’hospitalisation récente et prolongée ;
de 1 000 le risque de listériose [28]. L’alimentation peut intervenir
– l’immunodépression (dont VIH) ; dans les épidémies (fromage en Suisse) mais aussi dans la survenue
– la provenance d’un pays à haut risque (Espagne, Hongrie) ; de cas sporadiques (consommation de lait non pasteurisé au
Danemark) : ceci justifie une enquête alimentaire, voire
– les professions exposées (crèche, école) ; l’identification précise des souches. Il existe de très rares souches
– l’infection par les sérotypes 14 ou 23. multirésistantes ou résistantes à l’ampicilline in vitro, sans que ce
phénomène n’ait de conséquence clinique. Néanmoins, il faut
Hæmophilus influenzae rappeler que Listeria est naturellement résistante aux
céphalosporines et aux fluoroquinolones. Par ailleurs, il existe
Les souches responsables de méningite purulente sont capsulées, le plusieurs souches résistantes chez d’autres espèces de Listeria
plus souvent de type B (HIB). HIB était l’agent le plus fréquent des (isolées notamment des aliments), ce qui pourrait constituer un
méningites du jeune enfant (hors épidémie). L’incidence générale réservoir de résistance, soulignant un potentiel d’évolution vers la
annuelle est de 1 à 3/100 000. La mortalité est de l’ordre de 5 à 10 %, résistance [14].
plus élevée dans les pays en développement. Les séquelles sont
observées dans 10 à 30 % des cas, la plus fréquente étant la surdité. Autres germes
En termes de résistance aux antibiotiques, le problème principal est
En situation communautaire, les autres germes sont rares. Survenant
celui de la résistance à l’ampicilline qui est actuellement en France
le plus souvent sur un terrain fragilisé ou dans des circonstances
de l’ordre de 40 à 50 % [14]. Cependant, l’introduction dans les pays
particulières, il s’agit surtout d’entérobactéries (diabète, alcoolisme,
développés du vaccin contre HIB a profondément modifié la
sujets âgés, états septicémiques, immunodéprimé, anguillulose
physionomie des méningites purulentes, puisque ce vaccin a permis,
maligne) et du staphylocoque doré (diabète, cancer, insuffisance
dans une étude réalisée aux États-Unis, de diminuer le nombre de
rénale, endocardite associée). La mortalité de ces méningites est en
cas de méningite à Hæmophilus de 94 % entre 1986 et 1995, et de
règle élevée (20 à 50 %), souvent à rattacher au terrain sous-jacent.
déplacer l’âge médian des patients atteints de méningite purulente
de 15 mois à 25 ans [45]. Les conséquences à plus long terme de la ¶ Méningites purulentes nosocomiales
vaccination ne sont pas encore évaluées et vont dépendre de la
qualité de la protection vaccinale : si celle-ci s’atténue avec le temps, C’est une population particulière à ne pas négliger, puisque dans
l’incidence de la méningite à H. influenzae pourrait augmenter chez une étude réalisée à Boston les méningites purulentes nosocomiales
l’adulte. De plus, l’émergence de souche non capsulées invasives représentent jusqu’à 40 % des épisodes de méningites purulentes,
pourrait être favorisée. responsables d’une mortalité de l’ordre de 35 % [17]. Les germes en
cause sont essentiellement des bacilles à Gram négatif (pyocyanique,
Méningocoque entérobactéries), fréquents en postopératoire de neurochirurgie ;
mais aussi des staphylocoques (volontiers S. epidermidis),
En situation non épidémique, le méningocoque est la cause de 10 à particulièrement après mise en place d’un cathéter cérébral
40 % des méningites purulentes, avec une incidence annuelle de intraventriculaire.
0,8/100 000 en France tous âges confondus, de l’ordre de 1 à
5/100 000 dans les pays développés, jusqu’à 20/100 000 dans les
zones arides de l’Afrique sub-saharienne. La mortalité en France est Physiopathologie
de l’ordre de 10 %. Le méningocoque du groupe A est la principale
cause des épidémies. Le sérogroupe B est prédominant en Europe
[10, 43]
(60 % des souches françaises) et donne la majorité des cas MÉNINGITE AIGUË VIRALE
sporadiques ainsi que quelques bouffées épidémiques. La tendance
¶ Phase initiale de l’infection
actuelle est à l’augmentation de la fréquence du sérogroupe C
depuis 1980 (40 % des souches françaises en 1991). Il pourrait être Le virus colonise tout d’abord une des muqueuses de l’organisme,
associé à une proportion plus élevée de purpura fulminans, voire à en fonction de son tropisme (par exemple muqueuse orodigestive
une plus grande létalité [36]. Les déficits de certains facteurs du pour les entérovirus). S’il réussit ensuite à échapper aux mécanismes
complément, les déficits en properdine ou en certaines sous-classes locaux de défense (mécaniques, chimiques, macrophages,
d’immunoglobulines sont des facteurs favorisant la survenue des immunoglobulines [Ig] A sécrétoires), il peut alors se répliquer
méningites à méningocoque [5]. Le risque épidémique est maximal localement au niveau de la porte d’entrée, dans les cellules de la
chez les sujets vivant en communautés fermées (pensionnaires, muqueuse, dans les capillaires lymphatiques et dans les cellules
militaires) puisque les sujets vivant au contact d’un patient atteint endothéliales alentour.
ont un risque 600 à 1 000 fois plus élevé de présenter une infection.
¶ Invasion du système nerveux central
Le méningocoque est une espèce qui reste particulièrement sensible
aux antibiotiques. Néanmoins, certaines souches de méningocoque Le virus dissémine ensuite par voie sanguine (phase de virémie) et
(environ 15 % en France, toutes infections comprises) ont une envahit le parenchyme cérébral en traversant la barrière
3
4. 17-160-C-10 Méningites aiguës Neurologie
hématoméningée par plusieurs mécanismes : infection des cellules méningées, ce qui aboutit à l’adhérence des polynucléaires aux
endothéliales des vaisseaux cérébraux, infection des cellules de la cellules endothéliales, puis à l’afflux des polynucléaires dans le LCR.
glie, traversée de la barrière hématoméningée dans un leucocyte qui Les adhésines en cause appartiennent aux familles des
protège ainsi le virus du système immunitaire, infection des cellules immunoglobulines (ICAM1, ICAM2, PECAM1), des intégrines
épithéliales des plexus choroïdes. Certains virus (Herpès simplex, (Mac1 ou CR3 ou CD11b/CD18, LFA1 ou CD11a/CD18) et des
rage) peuvent atteindre le parenchyme cérébral en remontant les sélectines (L-sélectine ou LAM1, P-sélectine ou GMP140 ou CD62,
trajets nerveux. E-sélectine ou ELAM1). L’IL8 favorise l’activation d’une partie de ce
phénomène. On assiste ensuite à l’altération de la barrière
¶ Dissémination au sein du système nerveux hématoencéphalique qui relève de plusieurs mécanismes :
diminution de son étanchéité médiée surtout par l’IL-1 en synergie
Les virus pénètrent dans l’espace sous-arachnoïdien, via les plexus
avec le TNF, favorisant le relâchement des jonctions serrées des
choroïdes, puis disséminent dans le LCR en infectant les cellules
capillaires cérébraux, libération par les polynucléaires activés in situ
méningées et épendymaires, puis peuvent envahir les cellules
par les cytokines de plusieurs médiateurs (notamment radicaux
cérébrales par contiguïté. Il existe d’autres mécanismes d’invasion
libres). La perméabilité augmentée de la barrière hémato-
du parenchyme cérébral : dissémination extracellulaire entre les
encéphalique permet une exsudation d’albumine responsable de
cellules cérébrales, transport le long des ramifications axonales ou
l’hyperprotéinorachie observée en clinique, et favorise l’afflux de
dendritiques, transport dans les cellules inflammatoires. En réponse
cellules de l’inflammation qui vont contribuer à majorer la réaction
au développement viral, l’organisme développe une réponse
inflammatoire.
immunitaire et inflammatoire spécifique, essentiellement médiée par
les lymphocytes T (immunité cellulaire prédominante). Il en découle
¶ Événements tardifs
la synthèse de différentes cytokines avec une chronologie variable :
l’interleukine (IL)-6 commence à augmenter dans le LCR 24 heures Les événements qui surviennent ultérieurement sont la conséquence
après le début de l’infection virale, l’interféron (IFN)-gamma de l’afflux des polynucléaires et des altérations de la barrière
augmente rapidement à partir du cinquième ou du sixième jour. La hématoencéphalique. L’hypertension intracrânienne est
synthèse d’IL-1-β est fréquente dans le LCR des méningites essentiellement en relation avec l’œdème cérébral, mais peut aussi
aseptiques et est corrélée avec la cellularité. Le tumor necrosis factor compliquer une hydrocéphalie et/ou une augmentation du débit
(TNF)-alpha est rarement retrouvé. sanguin cérébral. L’œdème cérébral est plurifactoriel : vasogénique
Après le développement de la réponse inflammatoire au sein du (altération de la barrière hématoencéphalique), directement
LCR, les altérations de la barrière hématoencéphalique permettent cytotoxique (substances et médiateurs synthétisés par les bactéries
un afflux d’immunoglobulines et de protéines sériques, ainsi qu’une et les polynucléaires neutrophiles), interstitiel (par défaut de
synthèse locale d’immunoglobulines spécifiques du fait de l’afflux résorption du LCR au niveau des villosités arachnoïdiennes pouvant
de lymphocytes B. Une réaction immunitaire normale permet la conduire à une hydrocéphalie). Enfin, l’inflammation méningée peut
guérison. En revanche, c’est en cas de déficit immunitaire que aboutir à de profondes altérations vasculaires sur les vaisseaux
peuvent se développer des infections virales chroniques. méningés, réalisant une véritable vascularite participant à l’anoxie
cérébrale et aux altérations du débit sanguin cérébral.
[38, 41, 55]
MÉNINGITE PURULENTE
Clinique
¶ Colonisation muqueuse et passage dans le LCR
Pour développer une méningite purulente, la bactérie doit être [43, 53]
MÉNINGITE VIRALE
capable d’envahir le LCR, de s’y multiplier et d’y produire une
inflammation. La première étape réside dans la colonisation de la
¶ Présentation générale et signes neurologiques
muqueuse de l’oropharynx par des bactéries devenant, dans
certaines circonstances encore méconnues, invasives (essentiellement Les symptômes généraux et les signes cliniques neurologiques sont
pneumocoque, méningocoque et Hæmophilus). Celle-ci est facilitée semblables quels que soient les virus en cause. Le début de la
par plusieurs mécanismes : pili à la surface des bactéries maladie est aigu, la méningite pouvant être parfois précédée d’une
(méningocoque, Hæmophilus) favorisant la fixation à l’épithélium, phase prodromique pseudogrippale. Le tableau neurologique est
polysaccharide de la capsule (pneumocoque, Hæmophilus), synthèse dominé par le syndrome méningé fébrile. Les céphalées sont
de protéases détruisant les IgA sécrétoires. On assiste ensuite à une intenses ; photophobie, anorexie et nausées sont possibles. La fièvre
phase de bactériémie prolongée, favorisée par l’encapsulation qui est quasi constante, entre 38 et 40 °C, mais peut être masquée par les
permet aux bactéries d’échapper au complément. Les méninges sont antipyrétiques. L’examen retrouve une raideur de nuque à
alors ensemencées par voie hématogène et le LCR est envahi, par l’antéflexion, les signes de Kernig et de Brudzinski peuvent manquer
franchissement de la barrière hématoméningée, par deux en cas d’irritation méningée minime. L’examen neurologique ne
mécanismes principaux : directement au niveau de l’endothélium retrouve pas, en règle générale, de somnolence, de confusion, de
des capillaires méningés ou par franchissement au niveau des plexus convulsions, de coma ou de signes de localisation. Il faut néanmoins
choroïdes. Les mécanismes impliqués dans la spécificité des systématiquement les rechercher, car un tel tableau imposerait
bactéries pour la barrière hématoméningée et dans son d’envisager immédiatement la méningoencéphalite herpétique.
franchissement sont mal connus.
¶ Contexte et signes extraneurologiques
¶ Inflammation méningée et altération
Le contexte peut parfois orienter vers une étiologie virale devant
de la barrière hématoencéphalique
une méningite aiguë : enfant ou adulte jeune, contexte d’épidémie
Une fois qu’elles sont dans le LCR, les bactéries se multiplient dans une collectivité. Certains signes restent peu spécifiques mais
facilement, compte tenu de la faiblesse des mécanismes de défense participent au « cortège viral » : myalgies, conjonctivite, pharyngite,
(concentrations faibles d’immunoglobulines et de complément). Sous bronchite. La présence de signes extraneurologiques doit être
l’influence de plusieurs facteurs de virulence des bactéries recherchée, car elle peut orienter. L’absence de vaccination contre
(lipopolysaccharide, peptidoglycane, acide techoïque), les les oreillons, l’existence d’une parotidite (présente dans 50 % des cas
macrophages des méninges synthétisent in situ des cytokines, un peu avant les signes neurologiques), les douleurs abdominales
essentiellement IL-1 et TNF mais aussi IL-6 et IL-8. Ces cytokines (pancréatite) sont évocatrices d’une méningite ourlienne. Les
vont induire l’expression de plusieurs adhésines à la surface des éruptions cutanées doivent faire évoquer les Entérovirus, HHV6, le
polynucléaires neutrophiles et des cellules endothéliales des veinules CMV, le virus VZV (vésicules diffuses). L’herpangine (vésicules de
4
5. Neurologie Méningites aiguës 17-160-C-10
l’oropharynx postérieur), la présence d’un syndrome main-pied- de troubles de la conscience marqués et rapidement évolutifs, une
bouche ou l’existence d’une pleurodynie évoquent les virus rhinorrhée ou une infection des voies aériennes (otite, sinusite,
Coxsackie. L’existence d’une myopéricardite oriente vers les virus pneumopathie) sont des arguments en faveur du pneumocoque. Un
Coxsackie B. L’existence de facteurs de risque pour le VIH doit faire purpura, voire un purpura fulminans, sont aussi possibles avec le
discuter la méningite de primo-infection, qui peut s’associer à pneumocoque, mais plus rarement qu’avec le méningocoque.
d’autres signes extraneurologiques : pharyngite, rash, adénopathies,
atteinte pulmonaire [31]. Listeria [9, 35, 37]
Les facteurs épidémiologiques en sa faveur sont l’âge (nouveau-né,
MÉNINGITES BACTÉRIENNES AIGUËS âge supérieur à 60 ans), une grossesse, une immunodépression
cellulaire (chimiothérapie, corticothérapie, greffe d’organe,
¶ Présentation générale néoplasies), une notion d’épidémie. Cliniquement, un début
volontiers subaigu, un tableau infectieux plus modéré et une
Le tableau clinique est tout aussi brutal mais plus sévère que dans évolution progressive des signes cliniques sont en faveur de
la méningite virale. Il associe de manière quasi constante un l’étiologie listérienne. L’argument le plus classique en faveur de la
syndrome méningé, des céphalées et de la fièvre au cours d’un listériose réside dans la présence de signes cliniques traduisant une
syndrome infectieux volontiers marqué. Le syndrome méningé est atteinte (volontiers multiple à prédominance unilatérale) des nerfs
souvent évident, mais parfois discret. Les signes de Kernig et de crâniens : paralysies oculomotrices, paralysies faciales périphériques,
Brudzinski ne sont retrouvés que dans environ 50 % des cas : leur troubles de la déglutition, nystagmus, ataxie, syndromes alternes.
absence n’élimine donc pas le diagnostic. À la différence des Néanmoins, ce tableau de rhombencéphalite est loin d’être constant
méningites virales aiguës, les troubles de la conscience sont et d’authentiques listérioses neuroméningées peuvent se présenter
fréquents (environ 70 à 80 %), sous la forme d’une somnolence, d’un sans aucun signe de localisation. Une étude récente ne retrouve des
ralentissement, d’une confusion, voire d’un coma. Beaucoup plus signes de localisation et/ou des convulsions que dans 23 % des cas
rares sont les convulsions (20 à 30 %) et/ou les signes de localisation de listérioses neuroméningées. En revanche, une altération de la
(10 %). Le tableau clinique peut être plus fruste et plus trompeur conscience est fréquente, retrouvée dans 65 % des cas.
aux âges extrêmes de la vie (petits enfants et personnes âgées), ce
qui impose dans ces cas que la ponction lombaire soit réalisée au Hæmophilus
moindre doute devant tout syndrome infectieux mal expliqué. Un Les arguments qui peuvent orienter sont un sujet jeune, souvent âgé
œdème papillaire au fond d’œil n’est retrouvé que dans 1 % des cas. de moins de 5 ans, l’absence de vaccination, l’association otite et
L’examen clinique doit chercher les signes de gravité : état de choc conjonctivite. Un purpura est possible, mais rare.
avec ou sans lésions purpuriques, coma profond, convulsions, signes
neurologiques déficitaires, détresse respiratoire aiguë, anurie. La Autres cas
recherche d’une porte d’entrée, notamment otite, mastoïdite, sinusite
doit être systématique, particulièrement en cas de méningite à Les méningites communautaires à bacilles à Gram négatif sont plus
pneumocoque. fréquentes chez les sujets âgés et/ou immunodéprimés. Une otorrhée
purulente chronique suggérant un cholestéatome doit faire évoquer
¶ Formes cliniques l’association bacilles à Gram négatif et anaérobies [30].
En situation nosocomiale, en particulier après un traumatisme
Méningocoque [35] crânien ou un geste neurochirurgical, le diagnostic clinique peut être
difficile : difficultés d’interprétation des signes neurologiques,
Les facteurs épidémiologiques en sa faveur sont : la survenue nombreuses causes de fièvre. La ponction lombaire sera
hivernale, la notion d’un déficit en complément, la notion systématique au moindre doute. Chez le patient neutropénique, la
d’épidémie. Cliniquement, un début volontiers très brutal, la réaction inflammatoire au sein des méninges est diminuée. La
présence d’un purpura ou d’une atteinte articulaire sont en faveur symptomatologie clinique est volontiers discrète.
du méningocoque.
Le tableau classique du purpura fulminans doit être parfaitement
connu car c’est une urgence absolue. Il s’agit d’une méningite aiguë Diagnostic
avec bactériémie (à méningocoque dans la grande majorité des cas)
caractérisée par un purpura nécrotique rapidement extensif (fig 1) et Devant un tableau clinique de méningite aiguë, l’élément clef du
par un état de choc grave. diagnostic est l’analyse du LCR après ponction lombaire. Les autres
examens complémentaires (imagerie, électroencéphalogramme
Pneumocoque [35] [EEG], autres examens biologiques) peuvent parfois s’avérer
nécessaires ou être intéressants. Les données du LCR normal sont
Les facteurs épidémiologiques en sa faveur sont un terrain
rappelées dans le tableau III.
prédisposant (alcoolisme chronique, asplénie, antécédents de
traumatisme crânien ou de chirurgie de la base du crâne), un ou des
antécédents de méningite. Cliniquement, un début brutal, l’existence MÉNINGITE VIRALE
¶ Analyse du LCR
L’aspect macroscopique est un LCR clair. Il existe souvent une
hypertension, en règle plus modérée que dans les méningites
Tableau III. – Caractéristiques du liquide céphalorachidien (LCR)
normal.
Aspect « eau de roche »
Pression d’ouverture : 5 à 15 mmHg (6,5 à 20 cm d’eau)
Globules blancs < 10/mm3 (5 à 10/mm3 = suspect)
Contamination sanguine : 1 globule blanc pour 700 globules rouges
(si chiffres normaux de globules rouges et blancs dans le sang)
Protéines : 0,15 à 0,40 g/L (possiblement un peu plus élevé chez le sujet âgé)
Glucose : 50 à 60 % de la glycémie
1 Purpura fulminans à méningocoque (photo F Bruneel). Stérile
5
6. 17-160-C-10 Méningites aiguës Neurologie
purulentes. La pléiocytose est en général de l’ordre de 100 à l’immunodéprimé, chez les nouveau-nés prématurés ou les
1 000 globules blancs/mm3. La cellularité peut être plus marquée, ce nourrissons de moins de 4 semaines. Dans moins de 10 % des cas, il
qui peut favoriser la mise en évidence d’un virus, si celle-ci est peut exister une prédominance lymphocytaire : méningites à bacilles
réalisée. Très rarement le compte cellulaire peut être normal (petit à Gram négatif chez le nouveau-né, méningites listériennes [54]. Une
enfant). Au tout début de la maladie, il peut exister une cellularité panachée (moins de 50 % de polynucléaires) est retrouvée
prédominance de polynucléaires neutrophiles non altérés, mais la dans 25 à 50 % des cas de méningites listériennes [7, 37]. Une cellularité
règle est une nette prédominance lymphocytaire. La protéinorachie basse (0 à 20/mm3) en présence de nombreuses bactéries à l’examen
est en règle faiblement augmentée (moins de 1 g/L). La glycorachie direct est un facteur de mauvais pronostic [54]. La glycorachie est le
est le plus souvent normale, parfois faiblement abaissée (jusqu’à plus souvent diminuée, c’est-à-dire inférieure à la moitié de la
25 % des cas au cours de la méningite ourlienne). L’identification du glycémie (théoriquement prélevée 1 heure avant la ponction
virus dans le LCR n’est guère demandée en routine par le clinicien, lombaire). Le rapport glucose LCR/glucose sang est inférieur à 0,31
faute de conséquences précises sur la gestion du malade. dans 70 % des cas de méningites purulentes [54]. La glycorachie peut
Néanmoins, on peut parfois être amené à isoler le virus à partir du néanmoins être normale dans 9 % des cas [22]. Après le début du
LCR (enquêtes épidémiologiques, recherche, grossesse). La mise en traitement, la glycorachie se normalise rapidement en 24 à 48 heures.
évidence du virus après mise en culture est une technique longue. La protéinorachie est augmentée dans tous les cas, le plus souvent
La mise en évidence des antigènes viraux (Entérovirus, Herpès comprise entre 1 et 5 g/L. Elle peut être inférieure à 1 g/L au tout
virus) est une technique aux résultats décevants. Les meilleurs début de la méningite purulente. Elle se normalise lentement et peut
résultats semblent obtenus avec la PCR qui se révèle sensible et parfois rester supérieure à la normale pendant 2 à 4 mois après la
spécifique. L’IFN-α est assez spécifique des infections virales. guérison.
Devant un tableau de méningite aiguë, sa mise en évidence dans le Une étude a montré que chacun des facteurs suivants dans le LCR
LCR est un bon argument pour une origine virale : détectable à un était individuellement prédictif de l’origine bactérienne d’une
taux faible dans un cas sur 56 épisodes de méningite bactérienne, méningite aiguë avec une certitude de 99 % : glucose < 1,89 mmol/L,
tandis qu’il est positif dans le LCR de plus de 60 % des méningites glucose LCR/glucose sang < 0,23 ; protéines > 2,2 g/L ; globules
[42, 51]
virales . blancs > 2 000/mm3 ou polynucléaires neutrophiles > 1 180/mm3 [48].
L’examen bactériologique direct, après coloration par le Gram, est
¶ Autres examens biologiques
positif dans 60 à 90 % des cas (proportionnel à la quantité de germes
Selon le contexte, l’existence d’une inversion de formule ou d’un par mm3 de LCR) avec une spécificité de l’ordre de 100 %. En
syndrome mononucléosique sur la numération formule sanguine, l’absence d’antibiothérapie préalable, la positivité du direct est de
d’une cytolyse hépatique ou d’une hyperamylasémie (oreillons), 75 à 90 % [16]. Selon les principaux germes, une estimation de la
peuvent avoir une valeur d’orientation. La mise en évidence du proportion de cas de méningite purulente à examen direct négatif a
virus au niveau de la gorge ou des selles peut parfois être pratiquée pu être évaluée : pneumocoque (10 à 25 %), Hæmophilus (15 à 30 %),
(épidémies) par culture et/ou PCR. Néanmoins, la présence du virus méningocoque (25 à 50 %), bacilles à Gram négatif (50 %), Listeria
peut poser des problèmes d’interprétation (porteurs sains, (50 à 90 %) [25]. L’examen direct peut être d’interprétation difficile
chronologie de la présence du virus). La sérologie, en montrant dans certains cas : antibiothérapie préalable (sa positivité est alors
classiquement une multiplication par quatre entre le taux des de 40 à 60 %), faible nombre de germes, germes prenant
anticorps sériques à la phase aiguë et la phase de convalescence, naturellement mal le Gram (Hæmophilus). Après culture, la positivité
peut avoir un intérêt rétrospectif ou lors des études est globalement de l’ordre de 73 % [16]. Si la culture est positive, on
épidémiologiques. En cas de suspicion de méningite aiguë de primo- pourra obtenir l’antibiogramme. L’étude de la sensibilité aux
infection au VIH, la recherche de l’antigène p24 dans le sang (voire β-lactamines, systématique en cas de pneumocoque, est réalisée en
dans le LCR) permet un diagnostic rapide. testant la sensibilité à la pénicilline par la technique simple des
disques d’oxacilline, puis en mesurant les concentrations minimales
¶ Imagerie inhibitrices (CMI) par la technique du « E-test » en cas de PRP [11].
La culture du LCR est stérile dans plus de 90 % des cas après 24 à
Le scanner cérébral ou l’imagerie par résonance magnétique 36 heures d’une antibiothérapie correcte, même s’il peut encore
nucléaire (IRMn) ne sont pas indiqués lors d’une méningite aiguë persister quelques cadavres de germes à l’examen direct. La
d’origine virale, si ce n’est en présence de troubles de la conscience, recherche d’antigènes bactériens spécifiques par diverses méthodes
de convulsions ou de signes de localisation. Le premier diagnostic immunologiques est un complément diagnostique intéressant,
suspecté est alors une méningoencéphalite herpétique. notamment en cas d’antibiothérapie préalable. Ces techniques
(coagglutination, agglutination de particules de latex, Elisa [enzyme
linked immuno-assay]) permettent la recherche des antigènes du
MÉNINGITES PURULENTES
méningocoque (sérogroupes A, C, Y, W135), de HIB, du
¶ Analyse du LCR pneumocoque (83 sérotypes), du streptocoque B et de E. coli K1. Les
limites de ces techniques doivent être connues : seuils de détection
Si l’on suspecte une méningite aiguë, les résultats de la ponction variables, résultats médiocres avec le méningocoque B (30 à 55 %)
lombaire doivent être obtenus en urgence, c’est-à-dire en moins de qui est peu immunogène, existence de communautés antigéniques à
30 minutes pour la chimie, la cytologie et la bactériologie. L’aspect l’origine de réactions croisées (notamment méningocoque et E. coli
macroscopique est trouble, classiquement « eau de riz ». La pression K1). Globalement, la sensibilité de cette recherche est de 50 à 90 %,
d’ouverture est élevée, supérieure à 30 cm d’eau dans 40 % des avec une spécificité élevée. Les autres tests diagnostiques ont un
cas [17]. Si la pression est supérieure à 60 cm d’eau, il faut redouter moindre intérêt en routine. Ils peuvent se révéler plus utiles en cas
un œdème cérébral, une hydrocéphalie communicante ou un de méningite aiguë à LCR négatif. Le test au Limulus permet de
processus intracérébral. L’étude cytologique doit être réalisée en mettre en évidence la présence d’endotoxine bactérienne dans le
urgence car 32 % des polynucléaires neutrophiles se lysent après LCR, ce qui traduit indirectement la présence de bactéries à Gram
1 heure à température ambiante [15]. La pléiocytose est marquée, le négatif dans 90 % des cas [16]. La recherche par PCR de génomes
plus souvent de l’ordre de 1 000 à 5 000 globules blancs/mm3, après bactériens est probablement une technique qui se développera dans
coloration par le May-Grünwald-Giemsa, avec une nette l’avenir [16], mais ses performances en termes de sensibilité et de
prédominance des polynucléaires neutrophiles (supérieurs à 80 % spécificité sont encore mal connues et le délai d’obtention des
dans 80 % des cas de méningites purulentes). Dans environ 70 % résultats reste relativement long. Les dosages de cytokines au sein
des cas de méningite listérienne, le nombre de globules blancs est du LCR manquent de spécificité pour avoir un réel intérêt en
compris entre 5 et 1 000/mm3 [37] . Il existe de rares cas où la routine. La détection de procalcitonine dans le LCR et dans le sang
cellularité peut être quasi normale : au tout début de la maladie chez peut aider à l’orientation du diagnostic en se révélant plus élevée
6
7. Neurologie Méningites aiguës 17-160-C-10
lors des méningites bactériennes que lors des méningites virales [16].
Les analyses des taux de lacticodéshydrogénase (LDH) ou de la C
reactive protein (CRP) dans le LCR ne sont pas concluantes.
¶ Autres examens biologiques
La numération formule sanguine peut orienter vers un pyogène si
elle montre une hyperleucocytose. Néanmoins, les globules blancs
peuvent rester normaux comme lors de la listériose, voire être
abaissés lors d’une pneumococcie grave. L’analyse de la CRP sérique
peut avoir une valeur indicatrice mais ne suffit pas au diagnostic :
un taux supérieur à 25 mg/L est retrouvé dans la grande majorité
des méningites purulentes, mais dans 4 % des cas le taux est
inférieur à 25 mg/L, et dans 5 % des cas de méningites virales
prouvées le taux est supérieur à 25 mg/L (adénovirus) [22].
Il ne faut pas négliger les autres examens bactériologiques :
essentiellement les hémocultures, mais aussi la ponction pleurale, le
prélèvement pulmonaire si pneumopathie associée, le prélèvement
de gorge (méningocoque), l’examen cytobactériologique des urines
(ECBU). La recherche d’antigènes solubles peut se faire dans le sang
et les urines avec une positivité de 40 à 89 % selon les germes [16].
Concernant L. monocytogenes, si les cultures du LCR et du sang sont
négatives, le diagnostic peut s’aider de la recherche d’anticorps
sériques (pas d’intérêt dans le LCR), antilistériolysine O (sensibilité
de l’ordre de 60 %, faux positifs possibles avec l’encéphalite herpé-
tique) et/ou de la PCR sur le LCR (seuil de détection : 200 unités
formant colonies/mL, faux positifs) [19].
¶ Examens radiologiques [1, 12]
L’imagerie cérébrale n’a pas d’indication de principe dans 2 Imagerie par résonance magnétique (acquisition T1 après gadolinium) mettant en
l’exploration des méningites purulentes non compliquées de évidence un abcès listérien du tronc cérébral.
l’adulte. L’imagerie sera réalisée dans les circonstances suivantes :
Néanmoins, quand il n’existe pas d’orientation précise, le traitement
– lors de la prise en charge initiale, avant la ponction lombaire mais empirique découle alors de l’analyse de l’ensemble des données
toujours après le début d’une antibiothérapie empirique (cf infra), recueillies. En pratique, deux situations se rencontrent fréquemment.
s’il existe un œdème papillaire et/ou des signes de localisation ; du
fait de l’urgence, il s’agit en général d’un scanner sans, puis avec
injection ; MÉNINGITE AIGUË AVEC TROUBLES
DE LA CONSCIENCE ET LCR CLAIR
– durant l’évolution sous traitement, l’imagerie doit être discutée
en cas d’anomalies neurologiques persistantes (coma prolongé, On discute essentiellement trois causes imposant un traitement
hypertension intracrânienne, convulsions, signes de localisation), de urgent : méningite listérienne, tuberculose neuroméningée et
fièvre prolongée ou d’anomalies du LCR persistantes ; l’IRMn est méningoencéphalite herpétique. Les arguments en faveur d’une
alors plus sensible et souvent plus précocement positive que le étiologie listérienne sont détaillés dans les paragraphes précédents.
scanner ; les anomalies que l’on peut rencontrer sont une Les arguments principaux en faveur des deux autres diagnostics
thrombophlébite cérébrale parfois compliquée d’infarctus veineux sont brièvement rappelés ici.
(angio-IRM), des empyèmes sous-duraux et extraduraux, un abcès
cérébral, un infarctus par obstruction artérielle, une méningite ¶ Méningite tuberculeuse [32, 56, 60]
radiologique, une ventriculite, une labyrinthite ; concernant Les arguments en faveur de la tuberculose sont un terrain à risque,
l’hydrocéphalie et l’œdème cérébral, IRM et scanner se valent ; à des antécédents personnels ou familiaux de tuberculose, un contact
noter que l’IRM est supérieure au scanner concernant l’analyse du avec un sujet tuberculeux, une évolution subaiguë, des signes
tronc cérébral : c’est donc l’examen de choix durant la listériose cliniques d’atteinte basilaire et l’existence d’une tuberculose
neuroméningée avec rhombencéphalite (fig 2) ; extraneurologique (dans 50 à 70 % des cas). L’hyponatrémie est un
– dans les cas de méningites récidivantes (où il faut rechercher une signe classique mais sans spécificité. Le LCR révèle une pléiocytose
brèche ostéoméningée) et quand l’anamnèse peut faire évoquer une modérée en règle entre 5 et 1 000/mm 3 , à prédominance
fistule de LCR (après un traumatisme crânien, si fuite de LCR lymphocytaire (dans 70 à 80 % des cas) ; la glycorachie est souvent
extériorisée, après neurochirurgie ou chirurgie oto-rhino- diminuée mais peut être normale au début ; la protéinorachie est
laryngologique [ORL]), c’est le scanner qui sera le plus performant rarement normale et volontiers élevée (plus de 1 g/L dans 75 % des
pour mettre en évidence la solution de continuité ostéoméningée et cas). L’étude du fond d’œil peut faire le diagnostic s’il retrouve des
en diagnostiquer l’origine (brèches congénitale ou acquise). tubercules de Bouchut. L’imagerie cérébrale est évocatrice quand elle
met en évidence une hydrocéphalie parfois précoce, une méningite
basilaire, des images traduisant un processus ischémique (artérite
Diagnostics différentiels tuberculeuse) situé préférentiellement au niveau des territoires
vascularisés par les artères perforantes.
Les causes de méningite aiguë sont très nombreuses (tableau I). En ¶ Méningoencéphalite herpétique [8, 29, 57, 58]
règle générale, le contexte, l’anamnèse, l’examen clinique détaillé et
l’analyse des résultats de la ponction lombaire vont permettre Les arguments cliniques en faveur d’une méningoencéphalite
d’orienter le diagnostic, puis de le préciser une fois l’ensemble des herpétique sont un syndrome infectieux peu marqué, des signes
résultats obtenus (essentiellement quand l’examen direct et/ou la cliniques évoquant une atteinte frontotemporale (hallucinations
culture du LCR ou d’un site extraneurologique sont positifs). auditives, olfactives ou visuelles, troubles psychiques ou phasiques).
7
8. 17-160-C-10 Méningites aiguës Neurologie
L’absence d’antécédent d’herpès cutané ou de lésion cutanée
simultanée ne permet en aucune façon d’éliminer ce diagnostic. La Suspicion clinique de méningite aiguë
ponction lombaire retrouve une pléiocytose modérée (5 à 1 000
éléments/mm3) à prédominance nette de lymphocytes, la présence
de globules rouges est évocatrice (caractère nécrosant de Œdème papillaire et/ou signes
l’encéphalite), la protéinorachie est peu élevée et la glycorachie est neurologiques de localisation
normale. La présence d’un taux élevé d’IFN dans le LCR oriente
vers une étiologie virale mais n’est pas spécifique. L’EEG peut être
précocement évocateur en montrant des ondes lentes périodiques Non Oui
ou pseudopériodiques de courte périodicité à prédominance
temporofrontale. L’imagerie (scanner et IRM) montre des signes
d’encéphalite nécrosante dans la région temporofrontale, avec une Hémocultures Hémocultures
préférence pour l’IRM qui semble plus précocement anormale et et ponction lombaire
probablement plus sensible. Le diagnostic est actuellement confirmé
par la PCR sur le LCR qui va permettre de mettre en évidence l’acide Antibiothérapie
désoxyribonucléique (ADN) du virus. Cet examen est très sensible LCR compatible empirique
avec une méningite
et spécifique (supérieur à 95 %), mais reste dépendant du soin
bactérienne
apporté au transport et de l’expérience du laboratoire qui traite le
Scanner cérébral en urgence
prélèvement. Dans ce contexte, l’indication de la biopsie cérébrale à
visée diagnostique a quasiment disparu. Coloration de Gram
ou/et antigène Pas de lésion Lésion(s)
¶ Autres diagnostics soluble positif localisée localisée(s)
Causes bactériennes rares
Non Oui
Elles sont évoquées surtout devant un tableau subaigu et un
contexte épidémiologique et/ou clinique particulier : neurosyphilis,
neurobrucellose, maladie de Lyme, rickettsioses, leptospirose Antibiothérapie Antibiothérapie Discuter diagnostics
neuroméningée, méningoencéphalite à Chlamydia ou à mycoplasme. empirique spécifique orientée différentiels
3 Prise en charge initiale d’une méningite aiguë. LCR : liquide céphalorachidien.
Autres méningoencéphalites virales
Elles sont relativement rares et ne relèvent pas, en règle générale, est la précocité du traitement, fondamental lors des méningites
d’un traitement spécifique. purulentes, où il a été proposé d’injecter immédiatement un
antibiotique actif si le LCR était trouble lors de l’examen
Causes non infectieuses macroscopique. Dans le même ordre d’idée, le scanner cérébral peut
être indiqué avant la ponction lombaire, mais il ne sera réalisé
Il s’agit essentiellement des affections néoplasiques, des vascularites qu’après injection d’une antibiothérapie empirique. Dans ce cas,
du système nerveux central, de la maladie de Behçet et des l’éventuelle diminution de la pertinence de l’analyse du LCR est
thrombophlébites cérébrales de nature non infectieuse. Les sans commune mesure avec le risque du retard à l’antibiothérapie
principaux médicaments pouvant induire une méningite aiguë sont occasionné par le scanner, qui peut avoir des conséquences fatales.
listés dans le tableau I.
MÉNINGITE AIGUË VIRALE
MÉNINGITE AIGUË PURIFORME ASEPTIQUE Il n’y a pas d’indication à un traitement antiviral spécifique puisque
Cette dénomination est essentiellement employée dans la littérature l’évolution est spontanément bénigne. En revanche, en cas de
francophone pour décrire la situation relativement fréquente en suspicion de méningoencéphalite herpétique, il faut débuter un
pratique, où le LCR est trouble, à prédominance de polynucléaires traitement par aciclovir (voie intraveineuse) en attendant
neutrophiles, mais avec un examen direct et une culture négatifs. confirmation ou infirmation du diagnostic. Le traitement
Cette situation doit faire évoquer en premier lieu une méningite symptomatique est en règle générale suffisant pour assurer une
bactérienne décapitée par une antibiothérapie préalable, connue ou guérison sans séquelle. Il faut ajuster minutieusement les apports
révélée par un interrogatoire minutieux. Une méningite virale au hydrosodés dans le contexte d’un syndrome inapproprié d’hormone
tout début peut parfois s’associer à une prédominance de antidiurétique et/ou d’un œdème cérébral. En cas de crises
polynucléaires neutrophiles non altérés. Mais le diagnostic convulsives, on pourra utiliser des benzodiazépines et/ou du
différentiel principal réside dans l’existence d’une infection phénobarbital. Le traitement de la fièvre repose sur le paracétamol.
bactérienne paraméningée : abcès cérébral a fortiori s’il se rompt
dans les méninges (abcès proche de la convexité ou d’un ventricule),
MÉNINGITE AIGUË BACTÉRIENNE
empyème sous-dural ou abcès extradural, thrombophlébite septique
cérébrale, sinusite, otite compliquée de mastoïdite. Enfin, une Le traitement repose à la fois sur l’antibiothérapie par voie
méningite aiguë (aseptique ou non), le plus souvent à prédominance intraveineuse et les mesures symptomatiques. La place de la
de polynucléaires, peut parfois compliquer une endocardite corticothérapie, la recherche d’une porte d’entrée et son traitement
bactérienne par différents mécanismes physiopathologiques qui spécifique seront discutés brièvement dans un second temps.
peuvent être intriqués : ensemencement des méninges lors des L’hospitalisation est la règle. Elle se fera initialement en réanimation
bactériémies, microabcès, abcès cérébral constitué, abcès rompu [18]. en cas de troubles de la conscience, signes de localisation, défaillance
respiratoire, choc, purpura extensif ou terrain fragile.
Stratégie initiale et traitement ¶ Antibiothérapie des méningites aiguës bactériennes
L’antibiothérapie est ici une urgence. En cas de purpura fulminans,
elle est immédiate avant tout prélèvement (2 g d’amoxicilline en
STRATÉGIE INITIALE intraveineuse). Sinon, elle est débutée aux urgences juste après la
La prise en charge initiale d’un tableau de méningite aiguë s’appuie ponction lombaire, sans en attendre les résultats : 2 g d’amoxicilline,
sur le schéma détaillé sur la figure 3 [54]. Le point le plus important de céfotaxime ou de ceftriaxone.
8
9. Neurologie Méningites aiguës 17-160-C-10
Tableau IV. – Posologies des principaux antibiotiques utilisés dans le traitement des méningites aiguës bactériennes de l’adulte.
Pénicillines
Pénicilline G 20 à 24 millions d’unités/j en six injections IV
Amoxicilline 150 à 200 mg/kg/j en quatre à six injections IV (jusqu’à 300 mg/kg dans certaines circonstances)
Oxacilline 9 à 12 g/j en six injections IV
Aztréonam 6 g/j en quatre injections IV
Céphalosporines
Céfotaxime 150 à 200 mg/kg en quatre à six injections IV (jusqu’à 300 mg/kg dans certaines circonstances)
Ceftriaxone 70 à 100 mg/kg/j en une à deux injections IV
Ceftazidime 6 à 12 g/j en trois injections IV
Aminosides
Gentamicine 3 mg/kg/j IV
Amikacine 15 mg/kg/j IV
Autres antibiotiques
Cotrimoxazole 6 à 8 ampoules/j en quatre injections IV
Vancomycine 40 mg/kg/j en quatre injections IV de 1 heure ou en continu après une dose de charge de 15 mg/kg
Rifampicine 20 à 30 mg/kg/j en deux injections IV
Fosfomycine 200 mg/kg/j en quatre injections IV
Chloramphénicol 4 à 6 g/j en quatre injections IV
Métronidazole 2g/j en deux-quatre injections IV
Antibiotiques par voie intrathécale/intraventriculaire*
Gentamicine 10-20 mg/24 h
Tobramycine 10-20 mg/24 h
Amikacine 20-50 mg/24 h
Vancomycine 10 à 50 mg/24 h
Amphotéricine B 0,5 à 1 mg/24 h
* Les doses intrathécales doivent être plus proches du chiffre supérieur et les doses intraventriculaires plus proches du chiffre inférieur. IV : intraveineuse.
Tableau V. – Traitement empirique.
Situations Agents suspectés Antibiotiques
Âge 18-60 ans immunocompétent S. pneumoniae 1 - Direct négatif sans orientation étiologique et sans signe de gravité : amoxicilline :
N. meningitidis 200 mg/kg/j ou cefotaxime : 200 à 300 mg/kg/j ou ceftriaxone
2 - Direct négatif mais orientation étiologique :
2-1 - si pneumocoque sensible suspecté :
amoxicilline ou céfotaxime ou ceftriaxone
2-2 - si pneumocoque I ou R suspecté et/ou si signes de gravité :
céfotaxime (200 à 300 mg/kg/j) ou ceftriaxone (70 à 100 mg/kg/j) + vancomycine
2-3 - si Listeria suspectée : amoxicilline + gentamicine ou cotrimoxazole
2-4 - si méningocoque suspecté : amoxicilline ou céfotaxime ou ceftriaxone
3 - Direct positif à cocci à Gram positif et pas de facteurs de risque de pneumocoque
I et R ou signes de gravité : amoxicilline ou céfotaxime ou ceftriaxone
4 - Direct positif à cocci à Gram positif et facteurs de risque de pneumocoque I ou R
ou signes de gravité : céfotaxime ou ceftriaxone + vancomycine
5 - Direct positif à cocci à Gram négatif : amoxicilline
6 - Direct positif à bacilles à Gram positif : amoxicilline + gentamicine
ou cotrimoxazole
Âge > 60 ans ou alcoolisme ou diabète S. pneumoniae 1 - Même démarche que ci-dessus.
ou corticothérapie N. meningitidis 2 - si bacille à Gram négatif suspecté : céfotaxime ou ceftriaxone + aminoside
Listeria
Hæmophilus
Entérobactéries (rare)
Splénectomie S. pneumoniae céfotaxime (200 à 300 mg/kg/j) ou ceftriaxone
H. influenzae
Brèche ostéo-dure-mérienne S. pneumoniae céfotaxime (200 à 300 mg/kg/j) ou ceftriaxone
Postneurochirurgie S. aureus céfotaxime + fosfomycine ± gentamicine
Post-traumatique S. epidermidis (adaptation selon écologie locale et examen direct)
Bacilles à Gram négatif
Valve aortoventriculaire S. aureus vancomycine + rifampicine ou vancomycine + fosfomycine
S. epidermidis
I : intermédiaire ; R : résistant.
de risque de PRP. Le tableau V, sans être exhaustif, schématise les
Principaux antibiotiques [3, 26, 35, 53, 54]
situations les plus fréquentes. En pratique, les problèmes les plus
Ceux-ci sont détaillés avec leurs posologies usuelles (tableau IV). complexes sont posés par le traitement initial des méningites à
pneumocoque (examen direct positif) ou suspectées à pneumocoque
Traitement empirique [3, 26, 35, 53, 54] (examen direct négatif). Chez l’adulte, sur la base des données
L’antibiothérapie de première intention dépend de plusieurs épidémiologiques et pharmacocinétiques, il apparaît raisonnable de
éléments : âge et terrain, circonstances et antécédents, examen proposer dans ce cas, en première intention, l’utilisation d’une
clinique, données de l’examen direct du LCR, présence de facteurs céphalosporine de troisième génération (céfotaxime à la dose de
9
10. 17-160-C-10 Méningites aiguës Neurologie
Tableau VI. – Traitement selon les germes après isolement.
Germes Première ligne Alternatives Commentaires
N. meningitidis amoxicilline céfotaxime durée du traitement : 7 j (si sensibilité dimi-
nuée à la pénicilline, préférer les céphalos-
porines)
S. pneumoniæ amoxicilline (150 à 200 mg/kg/j) céfotaxime (150 à 200 mg/kg/j) durée du traitement : 10 à 14 j (prolongée
CMI amoxicilline ≤ 0,5 µg/L ceftriaxone si réponse lente et/ou souche de sensibi-
lité diminuée)
S. pneumoniæ vancomycine + céfotaxime vancomycine + rifampicine réévaluation clinique et PL à 24-36 H pour
CMI amoxicilline et céphalosporines ou + ceftriaxone documenter l’éradication du pathogène
> 0,5 µg/L
Listeria monocytogenes amoxicilline + gentamicine cotrimoxazole + gentamicine durée du traitement : 21 j
gentamizine pendant 3 à 5 j
H. influenzæ céfotaxime ceftriaxone chloramphénicol durée du traitement : 10 à 14 j
Bacilles à Gram négatif nosocomial céphalosporines (notamment céfépime, cefpirome) ou imipenem + aminoside ou fluoro- selon écologie locale, colonisation anté-
(hors pyocyanique) quinolones ou fosfomycine rieure et antibiogramme
Durée : 14 à 21 j
S. aureus vancomycine + rifampicine céfotaxime + fosfomycine test de sensibilité in vitro nécessaire
ou epidermidis méti-R ou fosfomycine (si sensibilité in vitro) durée du traitement ≥ 21 j
Pseudomonas æruginosa ceftazidime + aminoside actif pénicilline antipyocyanique + aminoside durée du traitement ≥ 21 j
sur pyocyanique aztreonam + aminoside
CMI : concentration minimale inhibitrice.
200 à 300 mg/kg/j ou ceftriaxone à la dose de 70 à 100 mg/kg/j). S’il ¶ Traitement symptomatique
existe des signes de gravité et/ou des facteurs de risque de PRP,
Il est particulièrement important dans les formes graves de
l’association initiale de vancomycine à la céphalosporine est
méningites bactériennes où il est mené en réanimation.
conseillée par le jury de la conférence de consensus française de
1996. La ventilation mécanique après intubation orotrachéale est indiquée
Chez l’enfant (plus de 3 mois), d’autant plus qu’il est jeune (moins en cas de coma profond et/ou de détresse respiratoire. La voie
de 5 ans surtout), la probabilité élevée d’un PRP et la place de nasotrachéale est classiquement contre-indiquée dans les méningites.
l’Hæmophilus conduisent à proposer quasi systématiquement une Il faut traiter l’œdème cérébral et l’hypertension intracrânienne selon
céphalosporine de troisième génération. L’adjonction initiale de les modalités habituelles. Le traitement anticonvulsivant repose sur
vancomycine en cas de suspicion de pneumocoque est systématique. les benzodiazépines et le phénobarbital. La prise en charge d’un état
de choc septique, notamment dans le cas du purpura fulminans,
Traitement selon germes isolés [3, 35, 53, 54, 59] passe tout d’abord par la restauration de l’hypovolémie,
Le traitement initial sera ensuite optimisé et simplifié selon les fréquemment sous-estimée, puis, en l’absence de réponse au
résultats définitifs des prélèvements (tableau VI). Concernant les remplissage vasculaire, par les catécholamines, en s’aidant souvent
méningites à pneumocoque [6], le traitement initial est réévalué et du cathétérisme droit. L’association de perfusions de protéine C à
optimisé à 36 ou 48 heures selon l’évolution clinique et les données l’héparine et à l’hémodiafiltration veinoveineuse continue dans la
microbiologiques (sensibilité à la pénicilline G par la technique du prise en charge des purpura fulminans à méningocoque s’est révélée
disque d’oxacilline et CMI des β-lactamines par le « E test »). La encourageante dans une étude ouverte récente [46]. L’équilibre
réflexion s’aidera des résultats d’une seconde ponction lombaire hydroélectrolytique doit être assuré en prenant garde à maintenir la
réalisée à 48 heures de traitement, si la souche est de sensibilité natrémie autour de 140 mmol/L et en optimisant la glycémie. Le
diminuée à la pénicilline et/ou si l’évolution clinique n’est pas contrôle de l’hyperthermie passe par le paracétamol en
satisfaisante. intraveineuse et les mesures symptomatiques. En cas de purpura, il
Si l’évolution est favorable, l’attitude est fonction de l’étude des CMI faut entourer quelques plaques purpuriques et quelques zones de
à l’amoxicilline et aux céphalosporines : peau saine afin de surveiller l’extension des lésions.
– CMI ≤ 0,5 mg/L à l’amoxicilline : retour à l’amoxicilline ; ¶ Place de la corticothérapie
– CMI > 0,5 mg/L à l’amoxicilline mais ≤ 0,5 mg/L aux Chez l’enfant, les études cliniques montrent que la corticothérapie
céphalosporines de troisième génération : céfotaxime ou ceftriaxone ; (dexaméthasone en intraveineuse) administrée précocement (au
– CMI > 0,5 mg/L aux céphalosporines de troisième génération : mieux avant la première dose d’antibiotique) est efficace dans les
céfotaxime ou ceftriaxone fortes doses + vancomycine ; alternative : méningites à Hæmophilus, en réduisant les séquelles neurologiques
vancomycine + rifampicine. et auditives [27, 44]. En conséquence, la corticothérapie est indiquée
Si l’évolution est défavorable (échec clinique ou succès clinique, mais dans les méningites à Hæmophilus à la posologie de 0,15 mg/kg de
avec persistance de pneumocoque dans le LCR), l’analyse de l’échec dexaméthasone en intraveineuse toutes les 6 heures pendant les 2 à
repose sur un examen clinique détaillé, les données de la deuxième 4 premiers jours. Concernant les autres germes, les données
ponction lombaire avec nouvelle détermination des CMI, un dosage semblent insuffisantes pour proposer des recommandations précises.
des antibiotiques dans le LCR et éventuellement des données Chez l’adulte, il n’existe pas actuellement de preuve définitive de
d’imagerie. En l’absence de facteur simple expliquant l’échec, le l’efficacité de la corticothérapie dans le traitement des méningites
traitement doit être optimisé, mais n’est pas actuellement codifié. purulentes. Compte tenu des différentes données disponibles et des
Les autres molécules disponibles sont l’imipenem, la rifampicine, la études expérimentales, elle peut être néanmoins considérée dans les
fosfomycine. La meilleure association sera choisie en étroite méningites graves (coma, œdème cérébral, hypertension
collaboration entre le clinicien et le microbiologiste. intracrânienne) à pneumocoque et dans les méningites à
Pour les souches de pneumocoque ayant une CMI > 2 mg/L aux Hæmophilus [33, 52, 54]. La dexaméthasone est alors proposée à la
céphalosporines de troisième génération, l’intérêt de celles-ci est posologie de 8 mg toutes les 6 heures pendant 48 heures, en essayant
limité et l’association vancomycine et rifampicine pourrait être d’injecter la première dose avant les antibiotiques. Ces données
proposée. doivent être nuancées par le risque de diminution du passage
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