Mairies communes du Pays de Fouesnant -php a-hujem
Au detour des paroisses - Pays de Fouesnant ch04km
1. Jean VARENNE
LES REGISTRES PAROISSIAUX
DE GOUESNAC’H
(Période 1751-1770)
Dans de précédents numéros de notre Bulletin (n° 10, l ère série et n° 1, 2ème série),
j’avais eu l’opportunité de présenter les commentaires que m’avait suggérés l’examen des
plus anciens registres paroissiaux de Gouesnac’h conservés dans les Archives
Départementales. J’y ajoute aujourd’hui un nouveau volet concernant les vingt années
suivantes, de 1751 à 1770.
Ces registres conservent la trace d’événements familiaux qui risquaient de
demeurer dans l’ombre alors que ces familles constituent le terreau qui a donné naissance à
l’histoire locale.
Ces baptêmes, mariages et sépultures nous fournissent des informations sur les liens
de parenté, le cercle des amis proches de la famille ou du moins de certains d’entre eux,
retenus comme témoins des événements.
Dans l’impossibilité de reconstituer une histoire de ces groupes familiaux, du moins
pour le moment, je me contenterai de relater les faits qui m’ont semblé les plus significatifs
dans le déroulement de la vie familiale des Gouesnachais de ce milieu du 18ème siècle.
REGISTRES DES BAPTEMES
Les autorités ecclésiastiques, par l’entremise des recteurs, tiennent des registres des
baptêmes et non des naissances. A l’époque c’est, en effet, l’administration du sacrement
du baptême qui confère à l’enfant son statut social en rappelant ses liens de parenté, en lui
donnant son nom patronymique ainsi que son prénom qui lui donne son statut de chrétien,
statut confirmé par la désignation de ses parrain et marraine :
7 février 1751 : « a été baptisé Alain, né ce même jour, fils de Pierre CARADEC et
Jeanne COTTEN, ses père et mère, à la métairie de Lanhuron. Parrain a été Alain
LE DIZES de Lès Goenach et marraine Marie RIVOAL de Kerilis » (1er baptême
de l’an 1751).
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2. Délai du baptême
Selon l’habitude, le baptême est toujours administré très rapidement, dans les
heures qui suivent la naissance lorsque l’enfant est venu au monde pendant la nuit ou en
début de matinée. Dans les autres cas la cérémonie est reportée au lendemain, comme
l’indique le baptême ci-dessous :
13 mars 1752 : « Alain BUREL, né le 12, fils de Mathieu et de Marguerite
RICHARD,
au village de Cosforn. Parrain a été Silvestre NEDELEC de Clohar. Marraine a
été Marie NEDELEC de Boutcarvan ».
La tradition veut que le père porte le nouveau-né à l’église où se trouvent les fonts
baptismaux, ce qui n’est pas toujours sans risque pour la vie de l’enfant, surtout en hiver,
même s’il est en bonne santé, le père pouvant être tenté de s’arrêter dans les auberges et
cabarets situés sur son chemin et dans lesquels il est trop heureux d’annoncer la nouvelle
de sa paternité.
Pour la période 1751-1770 le délai de présentation à l’église n’a jamais dépassé
vingt quatre heures.
Enfants illégitimes
Les naissances hors mariage dans la paroisse de Gouesnac’h sont fort peu
nombreuses ; je l’avais déjà noté pour les périodes antérieures à 1751. Les actes de
baptême pour les naissances de ce type sont généralement inscrits avec la mention « né de
père incertain » :
15 octobre 1751 : « baptême de Guillaume, fils de Marguerite C. dont le père est
demeuré jusqu'à présent incertain, la dite C. ne l’ayant voulu nommer, malgré les
demandes éitérées qu’on luy a faites au village de Kernon où elle a accouché, et
aucun homme ne voulant se présenter pour parrain, la seule Jeanne LE SAUX du
dit
Kernon a esté marraine ».
Le registre de 1763 présente l’anomalie qui, à première vue tout au moins jusqu’en
1770, est unique dans la paroisse, d’un baptême inscrit à l’envers par le recteur
KERNEVEZ alors en fonction dans la localité : celui de « Henry, enfant illégitime, né le 23
septembre à Quillouarn ». Cette disposition inhabituelle n’est pas due à une distraction
momentanée du recteur ; elle traduit la difficulté pour l’église d’admettre ces naissances
dont le nombre est tout de même assez limité dans les régions de campagne. Sans doute,
les cas en sont-ils plus nombreux dans les régions portuaires et les grandes villes où les
mouvements de population importants favorisent ce type de naissance. Malgré cette
inscription exceptionnelle, le baptême n’en était pas moins admis, le nouveau chrétien
étant pourvu d’un parrain, Charles SIDIC et d’une marraine, Jeanne BERROU.
Choix du prénom
Un décompte des prénoms donnés aux baptisés fait apparaître une préférence
marquée pour : Marie (48 fois), Yves et François (36), Jeanne (32), Jean (29), Guillaume
(26), Catherine (22), Noël (18), Anne (17), Marguerite et Alain (16), Pierre (14), Françoise
(13), soit 323 attributions pour 412 baptêmes.
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3. Corentin n’est choisi que 6 fois,
chiffre porté à 13 en tenant compte des
Corentine. Apparaissent pour la première fois
semble-t-il Mathias le 24 février 1758 dans la
famille de Jacob DENES et Anne LE
SOUAL de Cosform, nés le même jour, ainsi
qu’Hélène le 22 avril 1759 chez Yves
BOURGOT et Marie LE CLOAREC, née le
21 à Prat-an-Guib.
Le choix de Marie, Anne et
Marguerite (d’Antioche) dont les statues sont
visibles dans les églises de la région
s’explique par le rôle important qui leur est
dévolu : assurer la protection des femmes en
couches. Les futures mères souhaitaient
s’entourer de toutes les garanties possibles
pour que leur enfant vienne au monde dans
les meilleures conditions. Nous constaterons,
en effet, au chapitre des sépultures
qu’incidents et accidents, lors de la
naissance, pouvaient entraîner la mort de
l’enfant ou de la mère ou même des deux à la
fois.
Les patrons de nos vieilles chapelles ont peu de succès, Cado et Barbe ne sont
choisis qu’une fois, Maudet est cité pour la première et, semble-t-il, unique fois sur les
registres sous la graphie Modé, Saint-Herbot, pour sa part, est complètement oublié, le
patronage qu’il exerce sur les bêtes à cornes en serait-il la raison ? Nos trois saints sont
entrés dans les familles suivantes :
8 novembre 1762 : Cado LE DIZET, fils de Jacob et Jeanne BERROU.
Parrain : Jean JAFFRAY. Marraine : Marie TANIOU de Quillouarn
29 janvier 1766 : Barbe NEDELEC, fille de François et Margueritte LE
SAUSSE née
même jour à Kerguenon (Kerguéon)
Parrain : Yves KERRAVEN de Kersaluden. Marraine : Jeanne LE SAUSSE, tante
26 février 1769 : Modé BERRECHOUC, fils de Maurice et Catherine ESTIN, né
même jour à Kergaradec.
Parrain : Yves COTTEN de Feunteun Lédan. Marraine :Magdelaine ESTIN,
tante
de Kerdual
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4. Apparus dès les premières années du 18ème siècle, l’usage des prénoms doubles se
répand peu à peu ; certes, ce n’est pas encore une généralité, seulement une augmentation
significative. Parmi d’autres se découvrent des associations qui deviendront prénoms
uniques liés par un trait d’union, tels Marie-Jeanne, Jean-Pierre, Pierre-Marie, MarieLouise. Si l’on peut y voir l’imitation d’un usage noble déjà adopté par la bourgeoisie, ce
peut être aussi le désir de maintenir dans une famille les prénoms de plusieurs ancêtres.
De quelques baptêmes gemellaires
Dans cet espace de temps, de vingt ans, il a été relevé six naissances de jumeaux :
21 mai 1754 : Corentin et François chez Barthélémy NEDELEC et Anne
CARADEC
à l’Isle
er
1 octobre 1754 : Yves et Jeanne chez Tristan NEDELEC et Catherine LE
CALVEZ
à Treffélen
15 juin 1758 : Catherine et Marie chez Pierre KERAVEN et Marie NEDELEC
à Treffélen
27 novembre 1759 : François et Pierre chez Jean CARADEC et Françoise LE
CAIN
à Keralay
14 janvier 1768 : Marguerite et Allain chez Allain COSQUERIC et Magdeleine
TANNIOU
à Roboliou
19 mars 1770 : Louis et Marie chez Louis BIGER et Marie TOULERASTEL
à Kerouguy
REGISTRES DES MARIAGES
De 1751 à 1770 la situation est, dans l’ensemble, semblable à celle des années
précédentes; le nombre des mariages est, en effet, peu élevé : 87 actes seulement. Si
l’année 1753 est honorable (11) suivie de près par 1755 (9) et 1769 (8), treize années n’ont
pas passé la barre des cinq, 1758, pour sa part, en est restée à l’unité.
Etapes à franchir
La cérémonie de mariage est l’aboutissement d’un processus évolutif dont chaque
étape vient renforcer les liens créés entre deux familles par la future union de leurs enfants.
A l’origine de cette « aventure » il y a la première rencontre des futurs époux. Les
occasions en sont multiples : ce peut être lors de réunions familiales telles que mariages,
baptêmes, veillées qui rassemblent familles et amis, ou au cours de manifestations festives,
telles que pardons, ou encore à l’époque des travaux agricoles qui mobilisent généralement
une main-d'oeuvre abondante.
Il n’en sera pas dit davantage sur cette étape importante qui met en jeu le
coefficient personnel et la psychologie des deux protagonistes. Par contre, arrêtons-nous
sur les phases administratives préalables au mariage.
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5. Formalités préalables
En vue de la cérémonie du mariage, il était nécessaire d’accomplir plusieurs
formalités pour en conforter la validité.
Tout d’abord, il appartenait au prétendant mineur d’obtenir une dispense d’âge sous
forme d’un décret de mariage délivré par l’autorité judiciaire dont dépendait, en matière
domaniale, le lieu de sa résidence. Pour Gouesnac’h , la Cour Royale de Concarneau et les
Cours Seigneuriales du Mur, Henvez et Gueriven d’une part, de Cheffontaines d’autre part,
étaient les juridictions compétentes :
Décret du 2 janvier 1753 émancipant Marie TANIOU, fille mineure de feu
Guillaume
et Jeanne LE PERNEC de Quilihouarn promise à Laurent LALLAISON, fils de
Guillaume et de Marie GUILLOU de Keridré.
Pour les futurs conjoints mineurs, originaires d’une paroisse extérieure, la Cour
compétente restait celle de leur domicile. C’est ainsi que Jean MENDES, fils mineur de
Jean et défunte Catherine LE GOFF de Bodivit (paroisse aujourd’hui disparue), promis à
Marie LE GUILLOU de Kerouchard, obtiendra son décret de la Cour Seigneuriale du
Quéménet (paroisse de Penhars), alors que Marie LE GUILLOU sa promise, également
mineure, obtiendra le sien de la Cour Royale de Concarneau
La situation juridique des futurs mariés étant bien établie, les fiançailles ou
promesses de mariage pouvaient avoir lieu : l’engagement de chacun des futurs était reçu
par le recteur « en face de l’église » en présence des membres de la famille et,
éventuellement, d’amis proches dont les noms figurent au registre.
A noter, aux fiançailles de Jean LE BERRE et Catherine ISTIN, la présence de
« noble homme Charles HERVE, notaire royal (parrain de la fiancée) « qui signe pour son
respect ».
Le futur mariage pouvait alors être porté à la connaissance des paroissiens par la
publication des bans faite au prône de trois grand’messes des dimanches à une semaine
d’intervalle. Cette publicité permettait de faire apparaître éventuellement des motifs
valables d’opposition au mariage.
Les registres de 1762 et 1770 nous révèlent qu’une dispense de deux bans pouvait
être accordée par l’autorité religieuse :
21 février 1762 : à l’annonce du premier ban le recteur François LEROUX avertit
que cette publication valait également pour les deux autres « les partis désirants avoir de la
grandeur »
27 juillet 1770 : premier ban pour le mariage de Laurent ESTIN de Kergaradec
avec
Marie LE CALVEZ « première et dernière publication, après dispense de deux
bans, accordée par Monsieur DU LAURENT, grand vicaire »..
Fiançailles et publication des bans sont des moments importants dans la marche
vers le mariage et sont, en conséquence, inscrits à leur date sur les registres.
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6. Simultanément, avec la dispense d’âge, intervient la dispense de consanguinité qui
doit être sollicitée auprès de l’autorité épiscopale. L’Eglise, en effet, avait dès les 8è-9è s.
mis de l’ordre dans le domaine de la nuptialité pour éviter les mariages entre cousins
jusqu’au 8ème degré. Au 18ème s. la pratique des dispenses autorisait les mariages entre
parents à partir du 4ème degré, ce qui se traduisait dans les actes par la formule « dispense
de quarto gradu ad quartum gradum ».
L’Eglise était même allée plus loin en introduisant, à l’initiative de l’autorité
pontificale, la notion de « parenté spirituelle » selon laquelle était interdite toute union
entre un parrain ou une marraine avec leur filleul ; il en était de même entre frère et sœur
de lait du fait d’avoir têté au même sein.
Le registre des mariages de l’an 1754 porte mention d’une dispense
d’empêchement de consanguinité assortie de l ‘affinité spirituelle accordée à André LE
BERRE et Anne NEDELEC qui se marient le 18 janvier.
Célébration du mariage
Toutes les formalités préalables étant accomplies, le jour de la célébration peut être
fixé. La cérémonie se déroule avec solennité dans l’église paroissiale en présence des
familles et de leurs relations. Le compte rendu, qui en est fait par le recteur, sera inséré au
registre des mariages. Le texte débute par l’exposé de la situation familiale de chacun des
deux époux suivi de l’énumération des décrets et dispenses obtenus, de la constatation que
les trois bannies n’ont révélé aucune opposition. Les intéressés sont alors admis à la
bénédiction nuptiale « après les avoir interrogé et de leur consentement … » ; ce
consentement personnel est, en effet, un élément essentiel voulu par l’Eglise.
Saisons des mariages
L’époque choisie de préférence pour se marier demeure le début et la fin de
l’année : sur 87 célébrations inscrites entre 1751 et 1770, 27 le sont en janvier, 18 en
février, 11 en octobre et 13 en novembre, contre 1 en mars et septembre, 0 en août, ce qui
correspond à la sagesse populaire conservée dans les dictons suivants :
« Qui se marie en mai
C’est la pie qui bat le geai »
« Qui se marie en août
Ses enfants sont morvoux »
Les croyances locales sont en accord avec ces discours populaires : les mariages de
mai, mois de la Vierge Marie, passaient pour être le mois des veuves et ceux d’août le mois
de la pauvreté. En ce qui concerne le mois de Marie, aucune interdiction des mariages ne
semble pourtant avoir été édictée par le clergé. En août les travaux agricoles passent avant
tout et ceux qui les délaisseraient pour préparer des noces courraient à leur ruine.
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7. Mariages manqués
Toutes les promesses de mariage sont-elles parvenues à leur terme ? Il n’a pas été
fait de recherches à ce sujet. Il a été simplement noté que l’une d’entre elles, concernant
Guillaume LE PERNEC de Kersaluden et Marie KERAVEN, suivie des trois bannies
réglementaires des 6, 9 et 16 janvier 1757, avait été brutalement interrompue par le décès
de Guillaume survenu dans la nuit du 6ème jour de février, âgé de 35 ans, la sépulture ayant
eu lieu le 8 février en présence de Laurent LALAISON de Quilihouarn, Yves LE
SEHEDIC, Jean BERTOLOM, Yves LE DISES. Aucune indication n’est donnée sur la
cause du décès, maladie ou accident ; d’une manière générale les recteurs sont muets sur le
sujet.
REGISTRES DES SEPULTURES
De l75l à l770 ces registres comportent 362 inscriptions dont la plupart sont
enregistrées au premier trimestre (111) et en fin d’année (57), le mois d’août étant le
moins chargé (l9). L’année l762, la plus endeuillée, compte 35 décès, suivie de près par
l758 (30) et l766 (29) ; les années les meilleures sont l764 (7) et l765 (9).
En comparant avec les chiffres des baptêmes dont le total est de 4l2 les résultats ne
sont pas négatifs mais plusieurs années sont en déséquilibre au profit des décès :
- l758 : 22 B - 30 S
- l762 : 20 B - 35 S
- l766 : l4 B - 29 S
Notre préoccupation n’étant pas de fournir une étude statistique, ces quelques
chiffres suffiront pour situer les choses.
Les actes de sépultures sont, en général, rédigés comme suit :
ll janvier l751 : Jeanne CLEMENT, âgée d’environ 32 ans, femme d’Allain
COTTEN
du lieu de Kersabiec Bras a été enterrée le l2 dans la nef de l’église
paroissiale en présence d’Allain COTTEN son mari, François
LE SAUX, François LE PROVOST, Guillaume LE CLOAREC,
Jean et François CLEMENT
Enfants anonymes
Il s’agit d’enfants qui n’ont pas été baptisés parce que leur trop faible constitution
ne permettait pas de les transporter jusqu’aux fonts baptismaux de l’église paroissiale, ou
dont les chances de survie après l’accouchement étaient nulles. Ces nouveaux-nés
recevaient des mains de la sage-femme ou d’un membre de la famille l’ondoiement,
substitut du baptême qui devait permettre à leur âme d’accéder aux Limbes à défaut du
Paradis.
La présence d’un médecin n’est jamais signalée ; il est vrai qu’il n’en existait pas
dans la paroisse. Il fallait donc se satisfaire du concours de la sage-femme qui n’avait
aucune formation et dont la compétence ne reposait que sur l’expérience.
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8. Mendiants
Les cahiers de sépulture nous permettent aussi d’avoir connaissance du phénomène
de la mendicité. La mort des mendiants est enregistrée dans la paroisse où ils sont décédés.
Nous en avons deux exemples :
11 septembre 1751 : Ollivier PEREZ, mendiant, âgé de 77 ans environ, décédé dans
un bout de maison à Kervern Bihan a été inhumé le 12
1er octobre 1753 : a été inhumé le corps d’un nommé Yves BRIANT, mendiant,
décédé le 30 septembre dans une grange du village de
Kerrein.
La même situation doit être reconnue à Guillaume B….. de Fouesnant, mari de
Marie L….., âgé d’environ 60 ans, décédé le 11 août 1762 au village de Kersabiec Bras. Le
registre des tutelles de la Cour Royale de Concarneau saisie d’une requête de son épouse
demandant à être instituée tutrice de leurs cinq enfants, indique, en effet, que le père est
« décédé dans la mendicité ».
L’augmentation du nombre des mendiants due surtout à une succession de crise
alimentaire dont étaient victimes les petits fermiers et les ouvriers agricoles (laboureurs,
bêcheurs de terre, journaliers) déjà rendus à la limite de l’extrême pauvreté, faisait que le
mendiant n’était pas une exception dans la société de l’époque et qu’il s’agissait d’une
véritable catégorie sociale dont l’existence était reconnue.
D’ailleurs, le mendiant était généralement bien accueilli par les fermiers qui lui
« réservaient la part du pauvre » et lui laissaient passer la nuit dans une grange ou autre
local dépendant de leur ferme.
Le mot n’est associé à aucun des Gouesnachais figurant sur les registres, sans doute
parce qu’ils allaient montrer leur misère par les chemins d’autres paroisses où ils n’étaient
pas connus, paroisses dans lesquelles, en cas de décès, ils étaient ensevelis puisque les
règlements sur les mendicités en faisaient une obligation pour les paroisses d’accueil.
Lieu de la sépulture
Depuis 1680, date des premiers registres paroissiaux conservés pour Gouesnach, il
était de tradition d’enterrer les morts dans l’église paroissiale. En 1751 il en est toujours
ainsi localement sauf quelques exceptions concernant notamment les corps des pauvres qui
ne pouvaient payer la taxe de sépulture due au Conseil de fabrique, l’inhumation ayant
alors lieu au cimetière qui jadis était situé entre l’église et le presbytère.
Sont ainsi admis dans ce nouvel emplacement :
11 septembre 1751 : Ollivier PEREZ, âgé d’environ 77 ans, décédé dans un
bout de maison à Kervern Bihan, inhumé le 12..
4 janvier 1753 : Noël LAVANAN, 60 ans, décédé dans une maison de
terrasse à Saint-Cado.
Le dépôt du corps au cimetière, qui était l’exception, devient normal à la suite d’un
arrêt du Parlement de Bretagne qui, en 1719, interdit les sépultures dans les églises.
Cependant, l’application en sera retardée jusqu’à ce qu’il soit décidé que les dits
enterrements paieraient les mêmes droits que dans les églises, afin de sauvegarder les
intérêts des Conseils de fabrique.
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9. L’application de ces nouvelles dispositions n’interviendra qu’en l’an 1755, le 3
février exactement, pour les obsèques de Catherine AUTRET, âgée de 21 ans, fille de
Corentin et de Marie LE DIGUIGNET, décédée le 1er dans la maison de son père au
village de Kérilis, autrement dit Le Querlis au Bourg.
Sépultures particulières
Les registres contiennent des actes concernant des situations exceptionnelles,
comme les noyades, que la proximité de l’Odet et ses courants rendent possibles et dont la
nature accidentelle nécessitera l’intervention d’un représentant de l’autorité judiciaire qui
appréciera s’il convient d’autoriser le recteur du lieu à procéder à l’enterrement. Une telle
situation s’est présentée deux fois :
Le 6 février 1752 : « le 4ème jour du mois de février un nommé Alain NEDELEC
reconnu et à nous nommé par Marguerite LE FAOU, sa femme de la ville et paroisse de la
place de Quimper, a esté trouvé sur les côtes de cette paroisse près Saint-Cado, qui eut le
malheur le 3 janvier dernier de tomber de dessus le quay de Quimper à la mer et de se
noyer. Selon qu’il est spécifié dans la permission de Messieurs les Juges de l’Amirauté de
la dite ville de Quimper, laquelle nous a esté portée par la dite Marguerite LE FAOU, son
épouse et ayant vu cette ordonnance rendue le 5 du dit mois de février présente année,
signée Clémensin, nous avons inhumé le cadavre du dit Alain NEDELEC dans le cimetière
de notre église paroissiale en présence de la dite Marguerite LE FAOU, sa femme, de
Vincent LALLAISON, d’Yves LE PROVOST, de Jean JEZEQUELOU, d’Yves LE
DIZES et de plusieurs autres, laquelle inhumation et les cérémonies de l’inhumation ont
esté faites le 6ème dudit mois de février. Signé LE ROUX, prêtre recteur de Gouenach. »
Autre sépulture pour cause de noyade le 7 mars 1761 : « après avoir vu
l’ordonnance du siège royal de l’Amirauté, il est procédé à l’enterrement d’un cadavre
trouvé au Pors ar Guin près Saint-Cado tout défiguré étant depuis longtemps à la mer.
Etaient présents François LE DIVANACH de Kerdianaoué, procureur terrien, Jean
KERAVEN, François NEDELEC de Saint-Cado, qui l’ont enseveli, Jacques LE BEC »
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10. Encore au chapitre des noyades, le 7 février 1760 : « après avoir reçu entre mains
une ordonnance de Messieurs les Juges de l’Amirauté, en datte du 6 feuvrier …ay inhumé,
dans le cimetière de notre église paroissiale, le cadavre d’un homme jeté par la mer à la
coste près du moulin de Lanhuron en cette paroisse, lequel homme montait la gabarre du
sieur du FRENEST, que l’on dit s’appeler Jean LE FACHEC, mari de …(en blanc) ………
demeurant
dit-on en la paroisse de Saint-Mathieu de Quimper »
Autre décès, autre environnement : le 21 juin 1759 celui de François
LALLAISON, « soldat et non marié, au moins à ma connaissance, décédé le 20 au village
de Pontusqué, (aujourd’hui Keranguel) après avoir reçu les sacrements de l’église du sieur
recteur de Clohar m’a-t-on dit. Agé de 42 ans ».
Quelques jours plus tard, le 28 juin1759, il est obtenu des informations sur la
composition du clergé local à l’occasion de la mise en terre de Marie-Anne LE QUELLEC,
fille de Guillaume et Anne KERAVEN de Kerniviniou, autrement Kerbaul, âgée de 2
mois, en présence de Jean LE DIVANACH de Kerdianaoué, Jean PEROS de Keroter,
célébrée par Julien PERICHON, prêtre du Kergos en Clohar, délégué par le recteur LE
ROUX qui était « à donner le jubilé dans la paroisse de Pleuven ».
L’acte du 16 décembre 1763 porte notre attention sur le presbytère de Gouenach où
vient de décéder « demoiselle Marie-Anne KERNEVEZ, originaire de Pluguffan, âgée de
16 ans, fille de Maître Gabriel KERNEVEZ, notaire royal, en présence d’autre Gabriel
KERNEVEZ, de Noël KERNEVEZ, recteur de Gouenach et d’honorable homme Jean
LE PERENNOU (tuteur) » Vraisemblablement cette jeune personne exerçait les fonctions
de gouvernante auprès de son parent.
Une lecture attentive permet parfois de déceler une suite d’événements familiaux
comme les décès à deux mois d’intervalle d’Anne LE GALL , 27 ans, et d’Yves
NEDELEC, 33 ans, de Trefelen, mari et femme (3 mai et 5 juillet 1766).
Nombreux sont les enfants décédés en bas âge (18 dans les jours qui suivent la
naissance et par dizaines avant un an). Par contre, les adultes qui atteignent un âge avancé
sont en nombre plus important qu’on ne pourrait le penser. Quelques exemples : François
CLEMENS de Kerhoreden Bihan, 90 ans, Jean LE QUEFFELEC de Kerroet, 77 ans, Yves
KERAVEN de Kerbaul, 79 ans, Marie GOUIC de la métairie de Lanhuron, 80 ans.
Arrivé au terme de ma réflexion sur ces vingt années de registres paroissiaux, qu’il
me soit permis d’avoir une pensée, par delà les siècles, pour les recteurs qui ont eu la
charge d’établir ces documents qui permettent de restituer une partie de ce qui a été le
présent des Gouesnachais du 18ème siècle : François LE ROUX, en fonction à Gouesnac’h
de 1745 à 1762, assisté de Guillaume DENIC à partir de 1754, auquel a succédé, à partir de
1762, Noël KERNEVEZ qui décédera dans la paroisse en 1773.
Jean VARENNE
NB – Les clichés photographiques sont la propriété de
l’Association « Les Amis du Vieux Gouesnac’h »
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