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UNIVERSITE LOUIS PASTEUR
                           STRASBOURG I
                                1995




                           THESE
                                 présentée à



         L'UFR DES SCIENCES DE LA VIE ET DE LA TERRE


                           pour obtenir le titre de

            DOCTEUR DE L'UNIVERSITE LOUIS PASTEUR

                 domaine : BIOLOGIE MOLECULAIRE


                                     par


                             Alain HEHN


LES GENES 3' PROXIMAUX DU RNA 2 DU VIRUS DES NERVURES JAUNES
        ET NECROTIQUES DE LA BETTERAVE (OU BNYVV) :
LEUR ROLE DANS LA REPLICATION ET LA TRADUCTION DU GENOME
  VIRAL AINSI QUE DANS LE MOUVEMENT DU VIRUS DE CELLULE A
                           CELLULE.

          Soutenue le 27 juin 1995 devant la Commission d'Examen

        Dr. M. LEGRAND                                  Rapporteur interne
        Pr. A. VAN KAMMEN                               Rapporteur externe
        Dr. T. CANDRESSE                                Rapporteur externe
        Dr. K. RICHARDS                                       Examinateur
        Pr. G. JONARD                                   Directeur de Thèse


     Institut de Biologie Moléculaire des Plantes (IBMP-CNRS) Strasbourg
à mes parents,
à Valérie, à Michel
Je voudrais remercier ici, le professeur Jonard qui m'a accordé sa confiance un matin
d'avril 1991 en m'accueillant au sein de son groupe, me donnant ainsi l'opportunité de
réaliser cette thèse.


La recherche est un labyrinthe dans lequel on peut aisément s'égarer. Merci à
messieurs Guilley et Richards, les 2 autres membres du TCB, d'avoir été disponible
pour m'écouter, me conseiller et me diriger efficacement quand il le fallait.


J'aimerai exprimer ma gratitude aux membres du jury : messieurs Candresse, Legrand
et Van Kammen pour avoir accepté de juger ce travail.


Mes remerciements vont tout particulièrement à Salah Bouzoubaa qui, armé de
beaucoup de patience (si, si, beaucoup de patience ! ), a su m'initier à la paillasse et à
la recherche en général.


Merci également à Mme Marbach pour avoir préparé chaque semaine, inlassablement,
ces fameux protoplastes, source de joie et souvent de dépit.


Je tiens a exprimer ma reconnaissance à Mme Fritsch qui, au cours de nos discussions,
m'a permis de mieux comprendre la maturation mais aussi le frame-shift...!


Enfin, je voudrais remercier toutes les personnes qui, de près ou de loin, ont contribué à
faire de cette thèse ce qu'elle est et avec qui j'ai partagé tant de gâteaux, de chocolats et
autre thé à la menthe.
SOMMAIRE


SOMMAIRE.........................................................................................................................1



INTRODUCTION ...............................................................................................................7


                                                   RESULTATS


CHAPITRE 1 : LES PROTEINES EXPRIMEES A PARTIR DU "TRIPLE GENE

BLOCK"             (TGB)          SONT           DIRECTEMENT                     IMPLIQUEES                   DANS           LE
MOUVEMENT DU VIRUS DE CELLULE A CELLULE. ............................................17

I-Etat des connaissances sur les mécanismes de transport des virus. ....................................19

          1-Stratégie utilisée par les tobamovirus. ....................................................................20

          2-Stratégie utilisée par les comovirus, les népovirus et les caulimovirus..................20

          3-Stratégie utilisée par les hordeivirus, les potexvirus et les furovirus......................21

II-Rôle du Triple Gene Block dans le mouvement de cellule à cellule du BNYVV. ............23

          1-Le Triple Gene Block du BNYVV est impliqué dans le mouvement du virus de

          cellule à cellule...........................................................................................................23

          2-Les protéines P42 et P13 du Triple Gene Block sont exprimées à partir de

          RNA subgénomiques. ................................................................................................27

III-Conclusions et perspectives. .............................................................................................28

Publication n°1 : EFFICIENT CELL TO CELL MOVEMENT OF BEET NECROTIC

YELLOW VEIN VIRUS REQUIRES 3' PROXIMAL GENES LOCATED ON RNA 2.....31
Sommaire
______________________________________________________________________
CHAPITRE                2     :    ETUDE             DE       LA        PROTEINE                P14       CODEE             PAR
L'ORF 3' PROXIMALE DU RNA 2 DU BNYVV............................................................ 41

I-Mise en évidence du rôle de la protéine P14 dans le cycle de multiplication du

BNYVV. ................................................................................................................................ 41

          1-Des mutations introduites dans le gène VI du RNA 2 engendrent une

          diminution du taux de réplication des RNA viraux. (publication n°1).....................41

          2-La protéine P14 joue un rôle en cis dans la réplication du RNA 2 et active en

          trans la synthèse de la protéine de coque. (publication n°2) ..................................... 48

          3-Mode d'action de la protéine P14. .......................................................................... 54

II-Mise en évidence de l'importance des résidus cystéines 69, 72, 106 et 109 dans

l'activité de la protéine P14.................................................................................................... 60

          1-Construction de mutants alanine (Giesman-Cookmeyer & Lommel, 1993). .........62

          2-Propriétés biologiques des mutants alanine............................................................62

III-Mise en évidence d'interactions protéine P14-acides nucléiques. .................................... 65

          1-Clonage du gène VI dans le vecteur pET. .............................................................. 65

          2-Purification partielle de la protéine P14 par chromatographie d'affinité sur une

          colonne "Zinc Chelate Affinity Adsorbent" (ZCAA). ............................................... 67
          3-Mise en évidence d'interactions protéine P14-acides nucléiques par la

          technique de "Northwestern" (Gramstat et al, 1990). ................................................69

IV-Conclusion ....................................................................................................................... 69

Publication n°2 : THE SMALL CYSTEIN-RICH PROTEIN P14 OF BEET NECROTIC

YELLOW VEIN VIRUS REGULATES ACCUMULATION OF RNA 2 IN CIS AND

COAT PROTEIN IN TRANS................................................................................................. 73

CHAPITRE 3 : DES RNA 2 DEFECTIFS SONT CAPABLES D'INHIBER LA
REPLICATION DU BNYVV ............................................................................................. 103

          I-Rappel sur les stratégies de lutte antivirale par transgénose : expression de

          séquences dérivées du pathogène............................................................................... 103

          II-Obtention de RNA défectifs artificiels du BNYVV : leur effet sur la

          réplication du virus. ................................................................................................... 109


    2
Sommaire
______________________________________________________________________
                1-Obtention de RNA défectifs.................................................................... 109

                2-Seules les délétions introduites dans le RNA 2 produisent des RNA ayant

                un effet Défectif Interférant........................................................................ 109

                3-Analyse de l'effet DI en fonction de la quantité de RNA DI utilisée et du

                temps. ......................................................................................................... 110

                4-Analyse dans les plantes de l'effet DI des différents mutants du RNA 2.112

          III-Conclusions et perspectives. .................................................................................113

Publication n°3 : ARTIFICIAL DEFECTIVE INTERFERING RNAs DERIVED FROM

RNA 2 OF BEET NECROTIC YELLOW VEIN VIRUS .....................................................115



CHAPITRE 4 : MISE EN EVIDENCE D'UNE ACTIVITE PROTEOLYTIQUE
ASSOCIEE A LA PROTEINE P237 CODEE PAR LE RNA 1 DU BNYVV. ...............125

          I-Les protéases d'origine virale et leurs caractéristiques ............................................127

                1-Généralités sur les protéases. .................................................................. 127

                2-Exemples de protéines virales présentant une activité protéasique ........ 130

          II-Cas du BNYVV......................................................................................................131

                1-Comparaison de séquences avec des domaines protéases d'autres

                phytovirus................................................................................................... 131

                2-Mise en évidence d'une activité protéase associée à la protéine P237.... 134

          III-Conclusions :.........................................................................................................135

CONCLUSION ....................................................................................................................137


                                    MATERIEL ET METHODES


A-AMPLIFICATION,                      EXTRACTION                    ET        MODIFICATIONS                       DE        DNA
PLASMIDIQUE...................................................................................................................141

I-Souches bactériennes, vecteurs de clonage ou d'expression et milieux de culture. ............141

          1-Souches bactériennes .............................................................................................141

          2-Vecteurs .................................................................................................................143


                                                                                                                        3
Sommaire
______________________________________________________________________
          3-Milieux. .................................................................................................................. 146

II-Transformation des souches bactériennes et mise en culture. ........................................... 146

          1-Utilisation de Chlorure de Calcium........................................................................ 146

          2-Transformation par électroporation ........................................................................ 147

          3-Caractérisation des clones par hybridation in situ. ................................................. 148

III-Extraction et analyse de DNA plasmidique......................................................................148

          1-Minipréparation et maxipréparation ....................................................................... 148

          2-Analyse. ..................................................................................................................150

IV-Préparation de DNA plasmidique simple brin uridylé et mutagénèse dirigée selon la

méthode de Kunkel . .............................................................................................................. 152

          1-Culture. ................................................................................................................... 152
          2-Purification du DNA simple brin. ..........................................................................152

          3-Mutagénèse dirigée en utilisant des oligonucléotides modifiés (Zoller & Smith,

          1982). .........................................................................................................................152

V-Techniques de sous clonage par l'utilisation d'enzymes.................................................... 153

          1-Digestion enzymatique. .......................................................................................... 153

          2-Obtention d'extrémités franches. ............................................................................ 154

          3-Déphosphorylation..................................................................................................155

          4-Phosphorylation. ..................................................................................................... 156

          5-Ligation................................................................................................................... 156

VI-Amplification d'un fragment de DNA par la technique de la PCR. .................................157

          1-Principe de la méthode et conditions générales...................................................... 157

          2-Cas particulier du RNA 2 du BNYVV. .................................................................. 158

VII-Purification sur gel d'agarose d'un fragment de DNA obtenu par digestion

enzymatique ou par PCR. ...................................................................................................... 158

          1-Par électroélution....................................................................................................158

          2-Par extraction d'un gel LMP. ..................................................................................159

VIII-Séquençage selon la méthode de Sanger, modifiée pour la T7 DNA polymérase.........159

          1-Séquençage d'un DNA plasmidique. ...................................................................... 159


    4
Sommaire
______________________________________________________________________
           2-Séquençage d'un produit PCR.................................................................................160

IX-Transcription in vitro........................................................................................................161

           1-Obtention de transcrits infectieux du BNYVV.......................................................161

           2-Synthèse de sondes ribonucléiques.........................................................................163

X-Analyse des transcrits par hybridation in situ ....................................................................163

           1-Séparation des RNA par migration sur gel d'agarose en conditions

           dénaturantes................................................................................................................163

           2-Hybridation avec des sondes spécifiques radioactives. ..........................................165

XI-Analyse de la descendance par réverse transcription........................................................166



B-EXPRESSION IN VIVO OU TRADUCTION IN VITRO DES PROTEINES DE
BNYVV .................................................................................................................................167

I-Expression de protéines dans un système bactérien (Studier et al, 1990)...........................167

II-Purification par chromatographie d'affinité sur une colonne ZCAA (Zinc Chelate

Affinity Adsorbent)................................................................................................................167

III-Traduction in vitro dans un système acellulaire de réticulocytes de lapins. .....................168

           1-Préparation du lysat de réticulocytes de lapins. ......................................................168

           2-Traduction des produits de transcriptions...............................................................169

IV-Analyse. ............................................................................................................................169

           1-Par électrophorèse en conditions dénaturantes sur gel de polyacrylamide. ............169

           2-Par immunorévélation après transfert. ....................................................................170

V-Etude de l'activité fixatrice d'une protéine par northwestern. (Gramstat et al, 1990)........173



C-MULTIPLICATION                          DU        VIRUS           DANS           UNE         PLANTE              HOTE           :
CHENOPODIUM QUINOA. ...............................................................................................173

I-Plante hôte. ..........................................................................................................................173

II-Préparation du virus. ..........................................................................................................174

III-Extraction de RNA viraux à partir de feuilles de C. quinoa.............................................174

           1-En présence de tampon "polysome" (Jackson & Larkins, 1976) ...........................174


                                                                                                                        5
Sommaire
______________________________________________________________________
          2- En présence de tampon Tris-Magnésium. .............................................................175

IV-Préparation, inoculation et mise en culture de protoplastes. ............................................176

          1-Préparation des protoplastes (Veidt et al, 1992)..................................................... 176

          2-Infection des protoplastes par des acides nucléiques (RNA de BNYVV ou

          DNA plasmidique) et mise en culture........................................................................ 176

V-Extraction des RNA viraux de protoplastes. ..................................................................... 177

VI-Expression transitoire dans les feuilles de C. quinoa et Nicotiana tabacum. .................. 178


                                                   ANNEXES


Publication n°4 : IDENTIFICATION AND CHARACTERIZATION OF RESISTANCE

TO RHIZOMANIA IN AN ECOTYPE OF BETA VULGARIS SUBSP. MARITIMA. ......... 179

ABREVIATIONS ..................................................................................................................195

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES............................................................................... 199




    6
INTRODUCTION




     C'est en 1959, dans la vallée du Pô (Italie), que Canova décrit pour la première

fois des betteraves malades présentant comme symptômes (1) des feuilles gaufrées avec

des tâches jaunes diffuses le long des nervures (voir figure 1-B) ; (2) un pivot de taille

réduite par rapport à celui d'une plante saine ; (3) une nécrose des anneaux vasculaires

facilement observable lorsque le pivot est coupé transversalement ; et (4) une abondante

barbe "poivre et sel" due à une prolifération anormale et anarchique des radicelles (voir

figure 1-A). Cette dernière observation, la plus caractéristique, donne son nom à la

maladie : la rhizomanie, ce qui signifie étymologiquement "démence des racines" (rhizo

= racines ; mania = folie) (voir figure 1-A). Cette maladie a ensuite été décrite au Japon

en 1965 et fait son apparition en France, plus précisément en Alsace, dans les années 70

(Putz et Vuittenez, 1974). La rhizomanie engendre une perte considérable dans le

rendement en sucre qui passe de 18 à 8%, rendant l'exploitation impropre.

     Dès 1966, Canova suggère que la maladie est due à un champignon du sol :

Polymyxa betae. C'est un champignon inférieur, à zoospores biflagellées, parasite

intracellulaire des racines de betteraves. Il appartient à la classe des Myxomycètes et à

l'ordre des Plasmodiophorales (Chadefaud & Emberger, 1942). Les spores de résistance

se trouvant dans un sol contaminé vont germer et libérer des zoospores qui se déplacent

vers les radicelles d'une betterave, la propulsion se faisant grâce au mouvement

coordonné des 2 flagelles de la zoospore. Lorsque le contact avec une radicelle a lieu,

les flagelles disparaissent et la zoospore déverse son contenu cellulaire dans la cellule

hôte. Après 16 heures, on peut déjà observer un jeune plasmode qui va se différencier en
Introduction
______________________________________________________________________

A




B




Figure 1 : Sym ptômes de la rhizomanie : (A) photo représentant des betteraves saines (à
       gauche) et rhizom aniées (à droite).(Photo fournie par l'INRA de Colm ar). (B) Photo
       montrant les sym ptômes foliaires qui ont donné leur nom au virus.


    8
Introduction
______________________________________________________________________




           Figure 3 : Cycle de Polymyxa betae (d'après Keskin, 1967)




                                             9
Introduction
______________________________________________________________________
zoosporange ou en cystosore (Keskin, 1964 et 1967) (voir figure 3).

        Ce n'est qu'en 1973 que Tamada et Baba démontrent que l'agent responsable de la

rhizomanie est un virus : le beet necrotic yellow vein virus ou virus des nervures jaunes

et nécrotiques de la betterave (encore appelé BNYVV) ; ceci fut confirmé par Fujisawa

et Sugimoto en 1977. Le champignon Polymyxa betae, quant à lui, est seulement

impliqué dans la transmission du BNYVV (Fujisawa & Sugimoto, 1976). Enfin, les

premières études au plan moléculaire furent initiées en 1983 (Putz et al, 1983) et

démarrèrent vraiment en 1985 (Richards et al, 1985).



        Le virus des nervures jaunes et nécrotiques de la betterave est un phytovirus (Putz,

1977) appartenant à la famille des furovirus (fungus rod-shaped virus) (Brunt &
Richards, 1989 ; Brunt, 1991). Son génome est composé de 4 RNA (voir figure 4) de

polarité positive coiffés à leur extrémité 5' et polyadénylés à leur extrémité 3'. Ces 4

RNA sont encapsidés dans des particules virales de taille variable (390 nm, 265 nm, 100

nm et 89 nm) et de symétrie hélicoïdale avec un diamètre constant de 20 nm. Dans

certains isolats japonais, un 5ème RNA, de fonction inconnue, a été décrit (Tamada et al,

1989). Les RNA 1 et 2 sont nécessaires à la réplication, l'encapsidation et le mouvement

de cellule à cellule du virus. Ils sont donc suffisants pour provoquer un processus

infectieux quand ils sont inoculés mécaniquement à des feuilles de Chenopodium

quinoa, une plante hôte (voir figure 2-B). Les RNA 3 et 4 restent cependant essentiels

lors de l'infection naturelle des racines de betterave par l'intermédiaire du champignon

vecteur.

        Le RNA 1 (6746 nt) code pour une protéine de poids moléculaire 237 kDa

renfermant les séquences consensus des méthyltransférase, hélicase (GKS) et

polymérase (GDD) (Bouzoubaa et al, 1987). D'autre part, comme nous le verrons dans

le chapitre IV, la protéine P237 contient une séquence caractéristique des protéases de

type papaïne (Koonin & Dolja, 1993 ; Rozanov et al, 1995) localisée entre le domaine

hélicase et le domaine polymérase. Le RNA 1 est capable de s'autorépliquer lorsqu'il est

inoculé seul à


   10
Introduction
______________________________________________________________________




                                                  P 237
                                              GKS                                              GDD
 RNA 1                       MTR                    HEL            PRO                   POL            AAA
                                              ?              ?               ?




                   P75                        TGB
            CP                                       P13         P14
 RNA 2                               GKS
                                                                        AAA
               UAG                                        15 K
                                        P42


                                                                         RNA Subgénomique




                 P25                                         P31
                         4.6 K
 RNA 3                        AAA     RNA 4                            AAA

                         N




                             Fonctions dans le cycle de multiplication.

                                                                                 Mouvement de
           Réplication               Transmission
                                                                                 cellule à cellule

           Encapsidation
                                     Symptomatologie et                           Régulation de la
                                       amplification du                          réplication et de la
                                     virus dans les racines                          traduction
            Inconnue



  Figure 4 : Organisation génétique du virus des nervures jaunes et nécrotiques de la
  betterave ou BNYVV et fonctions associées aux protéines codées par les différents
  RNA génomiques.




                                                    11
Introduction
______________________________________________________________________
des protoplastes de cellules de mésophylle de C. quinoa (voir figure 5) (Bouzoubaa &

Scheidecker, 1990 ; Gilmer et al, 1992).

        Le RNA 2 (4612 nt) présente une organisation génétique plus complexe avec 6

phases de lecture ouverte (ORF). La première ORF dirige la synthèse de la protéine de

capside (CP) d'un poids moléculaire de 21 kDa. La protéine de translecture de 75 kDa

obtenue par suppression du codon stop UAG de la première ORF (Ziegler et al, 1985 ;

Bouzoubaa et al, 1986), joue un rôle dans l'initiation de l'encapsidation (Schmitt et al,

1992), dans la transmission du virus par le vecteur (Tamada & Kusume, 1991) et a été

visualisée par microscopie électronique à l'une des extrémités des particules virales

(Haeberlé et al, 1994). Les 3 ORF chevauchantes III, IV et V sont regroupées sous le

terme de "triple gene block" (ou TGB). Une organisation génétique analogue a été
décrite pour d'autres furovirus (Herzog et al, 1994 ; Scott et al, 1994) mais également

chez des virus comme les carlavirus, les hordeivirus et les potexvirus (Morozov et al,

1989). Ces 3 ORF du BNYVV codent respectivement pour des protéines potentielles de

poids moléculaire 42, 13 et 15 kDa. La protéine P42 dispose d'une séquence consensus

GKS caractéristique d'une activité NTP-binding souvent associée aux hélicases et a été

mise en évidence, ainsi que la protéine P13, dans les fractions membranaires préparées à

partir de feuilles de C. quinoa infectées par le virus (Niesbach-Klösgen et al, 1990). En

revanche, la protéine P15 n'a pas encore été détectée in planta.            Enfin, l'ORF 3'

proximale du RNA 2 code pour une protéine de 14 kDa riche en cystéine et qui a été

localisée dans la fraction cytosolique de feuilles infectées (Niesbach-Klösgen et al,

1990). Cette protéine, comme nous le verrons ultérieurement (voir chapitre 2), joue un

rôle dans la régulation de l'infection virale.

        Le RNA 3 (1773 nt) code pour une protéine de 25 kDa impliquée dans la

multiplication virale au niveau des racines de betteraves infectées (Koenig et al, 1986 ;

Lemaire et al, 1988 ; Tamada & Abe, 1989) ainsi que dans la symptomatologie au

niveau des feuilles (Jupin et al, 1992). Une étude immunocytochimique récente montre

que la protéine P25 est synthétisée très tôt dans le cycle viral ; de plus elle est détectée à




   12
Introduction
______________________________________________________________________
la fois dans le cytoplasme et dans le noyau des cellules infectées (Haeberlé & Stussi-

Garraud,




                                               13
Introduction
______________________________________________________________________




       Figure 4 : Protoplastes préparés à partir de cellules de mésophylle de
              Chenopodium quinoa dans les conditions décrites dans Matériel et
              méthodes.




  14
Introduction
______________________________________________________________________
1995). Une seconde ORF, l'ORF N, est exprimée lorsque des délétions dans le gène

codant pour la protéine P25 rapprochent l'AUG initiateur de cette petite ORF de la

séquence 5' non codante (Jupin et al, 1990). L'expression de la protéine très hydrophobe

codée par ce gène N entraîne l'apparition de lésions nécrotiques sur les feuilles des

plantes hôtes infectées. Enfin, une troisième ORF a été mise en évidence et code pour

une protéine potentielle de 4,6 kDa qui serait exprimée à partir d'un RNA subgénomique

détecté dans les feuilles infectées et qui est redondant avec les 545 derniers nucléotides

du RNA 3 (Bouzoubaa et al, 1991). Le rôle de ce peptide est actuellement en cours de

caractérisation au laboratoire. Des résultats préliminaires montrent que des délétions

réalisées dans cette ORF inhibent le mouvement à longue distance du virus dans Beta

macrocarpa (Tamada, communication personnelle) alors que des mutations ponctuelles
introduisant des codons de terminaison restent sans effet (Guntz-Lauber, communication

personnelle). Cette observation semble indiquer que c'est la séquence nucléotidique de

ce RNA subgénomique qui est directement impliquée dans ce phénomène de transport à

longue distance et non pas son produit d'expression.

     Le RNA 4 (1467 nt) code pour une protéine de 31 kDa (Bouzoubaa et al, 1985)

qui joue un rôle prépondérant dans la transmission du virus par le vecteur fongique

(Koenig & Burgermeister, 1989 ; Tamada & Abe, 1989).



     Mon travail de thèse a consisté plus particulièrement à caractériser le rôle des

produits des gènes 3' proximaux du RNA 2. Pour cela nous disposions au laboratoire

des clones cDNA complets des 4 RNA viraux (Quillet et al, 1989) permettant d'obtenir

des transcrits infectieux. A partir de ces clones, nous avons construit des mutants

ponctuels ou des mutants de délétion dans l'une ou l'autre des séquences codantes, puis

nous avons étudié in vivo l'effet de ces modifications. Ainsi, dans le premier chapitre,

j'aborderai les problèmes du mouvement du virus de cellule à cellule et je démontrerai

que les protéines codées par les trois cistrons du triple gene block sont impliquées dans

ce processus. Dans le chapitre 2, je présenterai les résultats concernant le rôle de la

protéine P14, codée par l'ORF VI du RNA 2, dans la réplication et dans la traduction du


                                                 15
Introduction
______________________________________________________________________
RNA 2. Le 3ème chapitre traitera des stratégies antivirales qui peuvent être envisagées

pour bloquer la réplication du BNYVV. J'y montrerai comment nous avons obtenu des

RNA défectifs interférants (ou RNA DI) à partir du RNA 2, RNA DI que l'on peut

envisager d'utiliser comme outil de lutte contre ce virus. Enfin dans le chapitre IV, je

décrirai des résultats préliminaires qui permettent d'affirmer que la protéine P237, codée

par le RNA 1, est une polyprotéine susceptible d'être maturée au cours du cycle de

multiplication virale par une activité protéasique associée à cette polyprotéine.




   16
CHAPITRE 1 :

  LES PROTEINES EXPRIMEES A PARTIR DU "TRIPLE GENE
 BLOCK" (TGB) SONT DIRECTEMENT IMPLIQUEES DANS LE
        MOUVEMENT DU VIRUS DE CELLULE A CELLULE.




      L'infection d'une plante par un virus à RNA passe, en général, par quatre étapes

majeures. Dans un premier temps le virus doit pénétrer dans les cellules de l'hôte. Cette

infection peut se faire par inoculation mécanique en provoquant une lésion au niveau

des tissus de la plante ; elle peut également s'établir par l'intermédiaire d'un vecteur
(aphide, nématode, champignon). Quand il est en place, le virus doit pouvoir se

multiplier, multiplication qui sous entend la décapsidation du ou des RNA génomiques

provenant de l'inoculum, leur traduction, leur réplication et finalement l'encapsidation

des RNA néosynthétisés. Dans un troisième temps, le virus est amené à quitter le site

d'infection pour migrer dans les cellules voisines. Finalement quand il atteint les

vaisseaux conducteurs, il va pouvoir infecter le reste de la plante provoquant ainsi une

infection systémique. La spécificité d'infection d'un virus pour un hôte particulier

consiste donc à pouvoir réaliser toutes ces étapes.
Résultats
______________________________________________________________________




            Protéines de
            mouvement                                                Paroi
                                                                   cellulaire
                                                                                   Type
                                                                                   TMV
       Réplication
       du virus                                   ?
                                                 protéines
                                                               ?
                                                 cellulaires
                        RNA viral
                                                                                diffusion de
                       néosynthétisé                       ?                     l'infection
                                                                                    virale




        Protéines de                                                               Type
                           Protéines de
        mouvement                                                                 CPMV
                              coque




   Figure I-1 : Représentation schématique des 2 types de stratégies qui semblent
   se dégager des études effectuées sur le mouvement de cellule à cellule des virus
   de plantes. Le premier mécanisme fait appel à une protéine de mouvement qui
   augmente la limite d'exclusion des plasmodesmes et qui permet une
   linéarisation des RNA viraux qui pourront ainsi diffuser sous forme de
   complexe ribonucléoprotéique. Cette stratégie est adoptée par le TMV. Le
   second mécanisme engendre une modification irréversible des plasmodesmes
   avec la présence de particules virales à l'intérieur de microtubules (c'est le cas
   du CPMV).




  18
Chapitre 1
______________________________________________________________________
      Avant de présenter les résultats obtenus dans l'étude des gènes responsables de la
diffusion du BNYVV, je voudrais rappeler brièvement ce que l'on sait sur les différents
mécanismes de diffusion de cellule à cellule de l'infection virale.




I-Etat des connaissances sur les mécanismes de transport des virus.


      En raison de la présence de la paroi pectocellulosique qui entoure chaque cellule
végétale, les possibilités de mouvement du virus de cellule à cellule sont très restreintes.
Le seul passage possible est représenté par les plasmodesmes qui sont des
communications intercellulaires assurant une continuité cytoplasmique entre 2 cellules
et permettant ainsi des échanges de métabolites. Des études par micro injection de
molécules fluorescentes de taille variable dans les cellules végétales ont permis de
mettre en évidence la limite d'exclusion moléculaire (SEL ou Size Exclusion Limit) des
plasmodesmes. Elle se situe entre 0,7 et 1 kDa ce qui correspond à peu près à un
diamètre de 1,5 à 2 nm. (Goodwin, 1983 ; Tucker, 1982).
      Bien que la SEL soit relativement petite, Esau a montré, dès 1967, la présence de
virus de la jaunisse de la betterave (BYV) au niveau des plasmodesmes de plantes
infectées. Or le diamètre de ces virus à symétrie hélicoïdale est voisin de 10 nm, soit
cinq fois supérieure à la SEL. D'autres virus à symétrie hélicoïdale tels que le potato
virus X (ou PVX) (Allison & Shalla, 1974) et le barley stripe mosaic virus (ou BSMV)
(Mc Mullen et al, 1977), ainsi que des virus à symétrie icosaédrique comme les

lutéovirus (Gill & Chong, 1975 ; D'Arcy & De Zoeten, 1979) et les népovirus (De
Zoeten & Gaard, 1969) ont pu être observés au niveau de ces structures. Compte tenu de
leur SEL, il est évident que les plasmodesmes doivent donc subir des modifications
structurales pour permettre le passage de ces virus (Robards & Lucas, 1990).
      A l'heure actuelle, 2 mécanismes majeurs (figure I-1) semblent être mis en jeu
dans la diffusion de l'infection virale à savoir le mécanisme utilisé par le virus de la
mosaïque du tabac (ou TMV) et d'autres tobamovirus et la stratégie employée par les
comovirus, les népovirus et les caulimovirus.


                                                   19
Résultats
______________________________________________________________________
1-Stratégie utilisée par les tobamovirus.
         Les résultats majeurs ont été obtenus avec le TMV qui fut pendant longtemps le
phytovirus le plus étudié sur le plan physico-chimique et biologique. Il code notamment
pour une protéine de 30 kDa essentielle au mouvement du virus de cellule à cellule
(Leonard & Zaitlin, 1982 ; Meshi et al, 1987). Des études par microscopie électronique
ont permis de montrer que des plantes infectées par ce virus ont des plasmodesmes
ayant une SEL supérieure à celle d'une plante saine. Elle passe de 1,5 nm à 5-6 nm. Des
plantes transgéniques exprimant la protéine P30 de manière constitutive présentent
même une SEL de 6 à 9 nm (Deom et al, 1990 ; Wolf et al, 1989). La protéine P30 a pu
être localisée au niveau de ces plasmodesmes (Ding et al, 1992 ; Atkins et al, 1991 ;
Moser et al, 1988, Tomenius et al, 1987) sans pour autant en modifier la structure
(Shalla et al, 1982). Cette augmentation de la SEL n'est pourtant pas suffisante pour
permettre le passage du TMV d'une cellule à une autre, les particules virales en bâtonnet
ayant un diamètre moyen de 18 nm et l'encombrement moyen d'une molécule de RNA
étant de 10 nm (Gibbs, 1976). La protéine P30 a également la propriété de fixer les
acides nucléiques (Citovsky et al, 1990). Ces propriétés ont donc amené Citovsky et
collaborateurs (1992) à proposer un modèle dans lequel la protéine P30 joue un rôle
double dans le mécanisme de mouvement : (1) elle augmente la SEL des plasmodesmes
d'un facteur 3 à 4 et (2), en se fixant au RNA, elle lui confère une structure déroulée qui
lui permet de passer au travers des plasmodesmes. Ceci sous-entend que le mouvement
de cellule à cellule se fait sous forme de complexe ribonucléoprotéique sans intervention
de la protéine de capside. L'intervention de facteurs cellulaires n'a pas encore été
démontrée pour le moment.



2-Stratégie utilisée par les comovirus, les népovirus et les caulimovirus.
        Ce second mécanisme a été plus particulièrement étudié pour un comovirus : le
cowpea mosaic virus (ou CPMV), un virus à génome bipartite qui exprime son
information sous forme de polyprotéines qui sont ensuite maturées. L'information
génétique de ce virus est portée par 2 RNA génomiques. Le B-RNA dispose de


   20
Chapitre 1
______________________________________________________________________
l'information nécessaire et suffisante à la réplication car il est capable de s'auto répliquer
dans les protoplastes (Goldbach et al, 1980). Par contre, en l'absence du M-RNA, le

virus n'est pas capable d'induire une infection dans la plante. Une analyse détaillée a
montré que non seulement les protéines 48K/58K, dont l'information est portée par la
région 5' terminale du M-RNA, sont nécessaires au mouvement de cellule à cellule
(Rezelman et al, 1982), mais également les protéines de capsides VP37 et VP23. Les
protéines non structurales 48/58 K ont été localisées au niveau de structures tubulaires
dans les plasmodesmes de plantes infectées (Van Lent et al, 1990) : ces structures
modifient les plasmodesmes de façon irréversible et renferment des particules virales.
Ces tubules peuvent également être observées au niveau de la membrane de protoplastes
infectés (Van Lent, 1991). Enfin, plus récemment, grâce à des expériences d'expression
transitoire, il a été possible de démontrer que la protéine de 48 K était, d'une part, la
protéine de mouvement et, d'autre part, la seule protéine virale responsable de la
formation in vivo de ces tubules (Kasteel et al, 1993 ; Wellink et al, 1993). Cependant,

comme dans le cas de la stratégie utilisée par les tobamovirus, la participation de
protéines cellulaires ne peut être exclue à l'heure actuelle.
      La formation de tubules et la présence de particules virales à l'intérieur de ces
structures ont également été observées pour d'autres types de virus comme l'euphorbia
mosaic virus (EMV), un géminivirus (Kim & Lee, 1992), le cauliflower mosaic virus
(CaMV), un caulimovirus (Stussi-Garraud et al, 1994), le tomato spotted wilt virus

(TSWV), un tospovirus (Kormelink, 1994) et le grapevine fanleaf virus (GFLV), un
népovirus (Ritzenthaler et al, 1995).



3-Stratégie utilisée par les hordeivirus, les potexvirus et les furovirus.
      Enfin d'autres virus utilisent une stratégie de mouvement qui nécessite la synthèse
de 3 protéines à partir de 3 gènes regroupés en triple gene block, mais, à l'heure actuelle,
le mécanisme mis en oeuvre n'est pas encore élucidé. Cette stratégie est utilisée par le




                                                   21
Résultats
______________________________________________________________________




   BNYVV
       RNA 1                                                                          A


                     CP
       RNA 2                                                    A

                                             TGB


       RNA 3                             A       RNA 4                 A




   WClMV
                                                                      CP
                                                                                  A


                                                               TGB


   BSMV
       RNA α                                              AA



       RNA ß          CP                                  AA

                                     TGB

       RNA γ                                         AA




   Figure I-2 : Organisation génétique du BNYVV, du WClMV et du BSMV.

                           Domaine hydrophobe
                           Séquence GDD caractéristique des polymérases
                           virales
                           Séquence GKS, site de fixation de nucléotides
                           triphosphates
               CP          Protéine de capside
               TGB         Triple Gene block impliqué dans le mouvement
                           du virus de cellule à cellule
                           Protéine jouant un rôle dans la réplication du virus




  22
Chapitre 1
______________________________________________________________________
BSMV) (Petty et al, 1990), un hordeivirus et le white clover mosaic virus (WClMV)

(Beck et al, 1991), un potexvirus. Le BNYVV fait appel également à un ensemble de 3
gènes pour assurer la fonction de transport. Les ressemblances entres ces 3 virus ne
s'arrêtent pas là ; il faut également noter des homologies de séquences importantes entre
ces protéines, plus particulièrement au niveau des protéines codées par les 2 premiers
gènes du TGB (Figure I-2).




II-Rôle du Triple Gene Block dans le mouvement de cellule à cellule du BNYVV.


      L'inoculation mécanique de feuilles de Chenopodium quinoa par des transcrits du
RNA 1 et du RNA 2 provoque des lésions chlorotiques localisées. Les RNA 1 et 2 du
BNYVV sont donc nécessaires et suffisants aux fonctions de base du virus, à savoir la
réplication, l'encapsidation et le mouvement de cellule à cellule de l'infection virale.
      Les ORF III, IV et V du RNA 2 du BNYVV sont organisées en triple gene block.
La protéine P42 exprimée à partir de l'ORF III renferme une séquence GKS souvent
associée aux hélicases. Les protéines P13 et P15 codées respectivement par les ORF IV
et V contiennent des domaines hydrophobes. Les protéines P42 et P13 ont été localisées
au niveau de fractions membranaires dans des plantes infectées (Niesbach-Klösgen et al,

1990).



1-Le Triple Gene Block du BNYVV est impliqué dans le mouvement du virus de

cellule à cellule.

   a-Construction de mutants du TGB.
      Pour tous les RNA génomiques, nous disposons de clones cDNA complets à partir
desquels il est possible de synthétiser in vitro des transcrits qui se sont révélés être
infectieux lors d'une inoculation mécanique de feuilles de C. quinoa. Partant de ces
constructions, nous avons pu réaliser des modifications au sein des RNA génomiques




                                                   23
Résultats
______________________________________________________________________




                   CP
   RNA 2                                                                           A


                                                      TGB




   mutant H                                                                        A



                    sauvage         ACA CTA GTA GAG
                    mutant          ACA CTA GCT AGT



   mutant I                                                                        A



                                        sauvage        AT AGA G
                                        mutant        AT AAC TCG



   mutant J                                                                        A



                                       sauvage         AGG AAT TCG
                                       mutant        AGG AAT T AA TTC G




Figure I-3 : Localisation des mutations introduites dans le triple gene block (TGB) du
               RNA 2 du BNYVV. Les sites de restriction utilisés pour introduire les
               modifications (Spe I pour le mutant H et Eco RI pour le mutant J) sont
               représentés en rouge. Les nucléotides insérés sont soulignés.



   24
Chapitre 1
______________________________________________________________________
afin de pouvoir étudier le rôle des différents gènes. Par mutagénèse dirigée, nous avons
construit les mutants décrits figure I-3. Pour obtenir le mutant H, nous avons linéarisé le
plasmide pB218 en un site Spe I, puis, par l'utilisation du fragment de Klenow de la
DNA polymérase, ce site a été rempli, générant ainsi, après religation, un plasmide
pB218 ayant une insertion de 4 nucléotides au niveau de l'ORF III. L'utilisation d'un
oligonucléotide mutagène nous a permis d'insérer 4 nucléotides (ACTC) dans le gène IV
et d'obtenir ainsi le mutant I. Enfin, pour construire le mutant J, il nous a fallu faire une
digestion partielle Eco RI du plasmide pBF14 suivie d'un remplissage du site de
restriction par le fragment de Klenow de la DNA polymérase. Après ligation, le clone
obtenu dispose d'une insertion de 4 nucléotides. Pour tous les mutants décrits ci dessus,
l'insertion de 4 nucléotides génère un changement du cadre de lecture, l'apparition d'un
codon stop et donc la synthèse de protéines tronquées non fonctionnelles.



   b-Etude de l'effet des mutations introduites dans le TGB.
      Afin de vérifier si les protéines codées par le TGB jouent un rôle dans la
réplication, les transcrits correspondants à ces différents mutants ont été coinoculés avec
du RNA 1 (nécessaire à la réplication) à des protoplastes de C. quinoa. Après 48 heures
de culture, les RNA totaux ont été extraits puis analysés par hybridation moléculaire en
utilisant des sondes spécifiques des RNA 1 (pB12 : nt 4740 à 6560) et 2 (pB21 : nt 2335
à 3793). Nous avons ainsi pu constater qu'en l'absence des protéines P42 (mutant H),
P13 (mutant I) et P15 (mutant J) fonctionnelles le virus était encore capable de se
répliquer (voir publication 1, figure 4, pistes 2, 3 et 4). Les mutations introduites dans
ces 3 gènes n'altèrent donc pas une structure impliquée en cis dans la reconnaissance par

le complexe de réplication.


      Pour tester l'impact des modifications introduites dans le TGB sur la diffusion de
l'infection virale, les différents mutants ont ensuite été transcrits et coinoculés avec du
RNA 1 à des feuilles de C. quinoa. Une semaine après l'infection, alors qu'il apparaît




                                                   25
Résultats
______________________________________________________________________
des symptômes chlorotiques classiques sur les feuilles inoculées par du RNA 1 et 2
sauvage,




                          P75

                 CP         54 kDa                            P13       P14
   RNA 2                                                                         A   4,6 kb
                                                      P42           P15*

                                                        TGB


                                                      nt 2324-3789
                                                          pB21
           A
                         nt 638 à                                    nt 3949 à
                        2081 ² BB          nt 2078 à                 4481 ² AS
                                          2715 218Bg



                                                            2 sub c              A   0,7 kb
           B                                    2 sub b                          A   1,4 kb
                                2 sub a                                          A   2,6 kb




 Figure I-4 : Localisation (A) des sondes riboprobes utilisées pour la mise en évidence
        des RNA subgénomiques (B). (* le produit d'expression du gène V n'a jamais pu
        être détecté in vivo).




  26
Chapitre 1
______________________________________________________________________
les feuilles inoculées en présence des mutants du TGB ne présentent pas de lésions.
L'analyse par hybridation moléculaire des RNA extraits de ces feuilles ne permet pas de
mettre en évidence de RNA viral (Voir publication 1, figure 2, pistes 3, 4 et 5). On peut
donc conclure que les protéines du TGB sont toutes les 3 essentielles au mouvement de
cellule à cellule de l'infection virale. En absence de mouvement, il est impossible de
détecter une infection qui reste limitée aux seules cellules initialement infectées.



2-Les protéines P42 et P13 du Triple Gene Block sont exprimées à partir de RNA

subgénomiques.
      Pour exprimer des protéines codées par des cistrons internes d'un RNA
génomique, les virus de plantes ont élaboré de nombreuses stratégies comme : (1) le
mécanisme de "terminaison-réinitiation" où les ribosomes, après avoir traduit une ORF
glissent sur le messager jusqu'à ce qu'ils rencontrent un nouvel AUG initiateur (Kozak,
1989) ; (2) le "leaky scanning" où les ribosomes initient la traduction au niveau du
premier AUG, mais également au niveau d'un autre AUG plus en aval si le premier
AUG n'est pas dans un contexte favorable (Kozak, 1989) ; (3) le mécanisme "d'entrée
interne" quand les ribosomes reconnaissent une séquence au sein d'un RNA génomique
(Pelletier & Sonnenberg, 1988) ; (4) la translecture obtenue par suppression d'un codon
stop (Ziegler et al, 1985) ; (5) le changement de cadre de lecture ou frame shift (Brault

& Miller, 1992), enfin (6) l'utilisation de RNA subgénomiques où le gène à exprimer se
trouve localisé à l'extrémité 5' du RNA messager.
      Pour mettre en évidence la présence de RNA subgénomiques correspondant aux
cistrons 3' proximaux du RNA 2, nous avons inoculé des feuilles de C. quinoa ou une
autre plante hôte Tetragonia expansa avec du BNYVV isolat Stras 12 contenant les
RNA 1 et 2. Lorsque les lésions apparaissent, les RNA totaux sont extraits puis analysés
par hybridation moléculaire en utilisant des sondes ribonucléiques correspondant à des
séquences internes du RNA 2 (figure I-4). L'utilisation d'une sonde ∆AS correspondant à
l'extrémité 3' terminale du RNA 2 (nt 3949 à 4481) nous a permis de mettre en évidence
4 bandes ayant une taille de 0,7 kb pour le RNA 2sub c, 1,4 kb pour le RNA 2sub b,


                                                   27
Résultats
______________________________________________________________________
2,6 kb pour le RNA 2sub a et enfin 4,6 kb pour le RNA 2 complet (voir publication 1,
figure 5, piste 4). Lorsque l'on utilise d'autres sondes, seule l'une ou l'autre de ces bandes
apparait après autoradiographie. Ainsi la sonde 218Bg (nt 2078 à 2715) ne révèle que le
RNA 2sub a et le RNA 2. Enfin la sonde ∆BB (nt 638 à 2081) ne s'hybride qu'au RNA
génomique. La taille de ces différents RNA subgénomiques correspond aux tailles
attendues pour des RNA permettant l'expression de la protéine P42 (RNA 2sub a), de la
protéine P13 (RNA 2sub b) et de la protéine P14 (RNA 2sub c).
        Pour la protéine P15, aucun RNA subgénomique n'a pu être mis en évidence. Pour
expliquer cela, 2 hypothèses peuvent être émises : soit la synthèse du RNA
subgénomique est très faible, soit la protéine P15 est exprimée sous forme d'une
protéine de fusion P13-P15. Ceci impliquerait alors un changement de cadre de lecture
de l'ORF IV. Dans ce cas, la synthèse de la protéine P13-P15 se ferait à un taux très
faible, ce qui expliquerait pourquoi elle n'a pas encore pu être détectée in vivo en

utilisant un sérum anti P13.




III-Conclusions et perspectives.


        Nous avons montré dans ce chapitre que les protéines exprimées à partir du TGB
étaient toutes les 3 essentielles au mouvement du virus de cellule à cellule. En leur
absence, l'infection d'une plante ne peut avoir lieu. Nous avons également montré que
l'expression de 2 des 3 protéines au moins se faisait à partir de RNA subgénomiques.
Ces résultats vont dans le sens d'observations faites pour d'autres virus comme le
WClMV, un potexvirus (Beck et al, 1991) et pour le BSMV, un hordeivirus (Petty et al,
1990).
        Des études ont été entreprises au laboratoire, afin de mieux comprendre le rôle de
ces 3 protéines dans le mouvement de cellule à cellule. Les résultats préliminaires
indiquent que la protéine P42 est dotée d'une activité ATP binding à l'image de la
protéine de 58 K codée par le RNA ß du BSMV (Jackson et al, 1991). Enfin, comme
dans le cas de la protéine de coque d'AMV (Baer et al, 1994), il semblerait que


   28
Chapitre 1
______________________________________________________________________
l'extrémité N-terminale de la protéine P42 soit indispensable à l'activité de fixation des
acides nucléiques (C. Bleykasten, communication personnelle). Des études d'interaction
entre les 3 protéines du TGB ont également été initiées en utilisant la technique "double
hybride" (Hope & Struhl, 1986 ; Keegan et al, 1986 ; Ma & Pasthne, 1987). En effet, les

protéines P13 et P42 ont été retrouvées au niveau de fractions membranaires (Niesbach-
Klösgen et al, 1990). Or, seule la protéine P13 est dotée de régions hydrophobes
pouvant faciliter l'ancrage au niveau des membranes. Pour expliquer la colocalisation
membranaire de la protéine P42, on peut donc imaginer des interactions entre cette
protéine et la protéine P13.




                                                 29
Résultats
______________________________________________________________________




  30
Publication n°1




EFFICIENT CELL TO CELL MOVEMENT OF BEET NECROTIC YELLOW

 VEIN VIRUS REQUIRES 3' PROXIMAL GENES LOCATED ON RNA 2


   D. Gilmer, S. Bouzoubaa, A. Hehn, H. Guilley, K. Richards and G. Jonard.




                                  Virology
                                (189, 40-47)


                                   (1992)
Résultats
______________________________________________________________________




  32
Publication n°1
______________________________________________________________________




                                        33
Résultats
______________________________________________________________________




  34
Publication n°1
______________________________________________________________________




                                        35
Résultats
______________________________________________________________________




  36
Publication n°1
______________________________________________________________________




                                        37
Résultats
______________________________________________________________________




  38
Publication n°1
______________________________________________________________________




                                        39
Résultats
______________________________________________________________________




  40
CHAPITRE 2 :




              ETUDE DE LA PROTEINE P14 CODEE PAR
             L'ORF 3' PROXIMALE DU RNA 2 DU BNYVV.




I-Mise en évidence du rôle de la protéine P14 dans le cycle de multiplication du

BNYVV.

1-Des mutations introduites dans le gène VI du RNA 2 engendrent une diminution du

taux de réplication des RNA viraux. (publication n°1)
       Dans le chapitre précédent, nous avons montré que les trois protéines codées par
le TGB sont nécessaires au mouvement à courte distance du virus. Dans ce deuxième
chapitre, nous allons nous intéresser plus particulièrement au rôle de l'ORF 3' proximale
du RNA 2 (encore appelée ORF VI) dans le cycle de multiplication du BNYVV. Cette
ORF code pour une protéine de 14 kDa qui a été localisée par immunochimie au niveau
de la fraction cytosolique (Niesbach-Klösgen et al, 1990) et qui est exprimée à partir
d'un RNA subgénomique, le RNA 2sub c. Pour essayer de mieux comprendre la
fonction de cette protéine dans le cycle de multiplication viral, nous avons utilisé la
même approche
Résultats
______________________________________________________________________




                                                     TGB
                             P75

           RNA 2      CP                                   P13   P14
                                                                       A
                                               P42
                                                           15 kDa




                              nt 4043



                mutant 3722


                           ATG GAG ATC TGG TAG



                              nt 4043      nt 4078



                mutant 4003

                                   GGT TGA TGC



                               nt 4043          nt 4148



                mutant 3992

                                        TGG TAA TTG




       Figure II-1 : Caractéristiques des mutants du RNA 2 n'exprimant pas la
       protéine P14. Les nucléotides introduits dans le génome viral sont
       écrits en rouge. Les codons stop qui apparaissent sont soulignés.




  42
Chapitre 2
_____________________________________________________________________
que précédemment dans l'étude du TGB, à savoir l'introduction de mutations dans l'ORF
VI et l'analyse des conséquences au niveau biologique.



   a-Construction de mutants n'exprimant pas la protéine P14.
       L'introduction de mutations dans la région 3' proximale du RNA 2 pouvait
toucher des séquences impliquées en cis dans la réplication du RNA 2. C'est pourquoi,
pour minimiser ce risque, nous avons multiplié les constructions et réparti les mutations
tout au long de la séquence de l'ORF VI. Deux approches différentes ont été utilisées : la
première a consisté à insérer un linker Bgl II de 10 nucléotides au niveau du site Sma I
situé en position 4331, entraînant ainsi un changement du cadre de lecture (+1) (voir
publication 1, figure 1) et donnant le mutant RNA 2-L. La seconde approche repose sur
l'introduction de mutations ponctuelles (figure II-1) dans un fragment correspondant aux
824 derniers nucléotides du RNA 2 cloné dans le vecteur Bluescribe. Trois mutants ont
ainsi été obtenus : (1) le mutant RNA 2-3722 (voir publication 1, figure 1) où 2
nucléotides ont été insérés en position 4050 ce qui a pour conséquence d'éliminer le
2ème ATG initiateur et d'introduire un changement du cadre de lecture qui entraîne

l'apparition d'un codon stop. (2) Le mutant RNA 2-3992 où la substitution d'un
nucléotide génère un codon stop en position 4148. (3) Le mutant RNA 2-4003 où
l'introduction d'un T en position 4078 fait apparaître un codon de terminaison TAA.
       Toutes ces mutations entraînent soit l'absence de synthèse de protéine P14
(mutant 3722), soit conduisent à la synthèse d'une protéine P14 plus ou moins tronquée
(mutants 3994 et 4003). Le fragment de 824 nt a finalement été réinséré dans le clone
cDNA complet du RNA 2.



   b-Effet in planta des mutations introduites dans le gène VI.
       Pour analyser les effets des mutations introduites dans le gène VI, les différents
mutants ont été transcrits puis coinoculés avec des transcrits du RNA 1 à des feuilles de
C. quinoa. Huit à dix jours après l'infection, on voit apparaître des lésions ayant un




                                                 43
Résultats
______________________________________________________________________
phénotype différent de celui des lésions provoquées par l'isolat sauvage : ces lésions
sont




   44
Chapitre 2
_____________________________________________________________________
A




                     Stras 123                                       Mutant 2-3722




B
                                                  RN       RN       RN
                                                  A        A        A
                                        RN        2-                2-
                                                           2-
                                        A2        37       39       40
                                                  22       92       03

                         RNA 1

                         RNA 2



                                       1      2        3        4




Figure II-2 : Effets des mutations introduites dans le gène VI. (A) Symptômes observés sur
       des feuilles de C. quinoa inoculées avec l'isolat sauvage et le mutant RNA 2-3722
       (B) Analyses par hybridation moléculaire des RNA totaux extraits des feuilles de
       C. quinoa : sur la piste 1 ont été déposés 1/20 des RNA totaux extraits des feuilles
       inoculées avec l'isolat sauvage Stras 123. Les pistes 2, 3 et 4 correspondent
       respectivement à la totalité des RNA extraits de feuilles inoculées par les mutants
       RNA 2-3722, RNA 2-3992 et RNA 2-4003.




                                                  45
Résultats
______________________________________________________________________
petites et nécrotiques en leur centre (figure II-2-A). Afin d'analyser la quantité de RNA
viral présent dans les feuilles inoculées, nous avons prélevé ces lésions ainsi que les
lésions provoquées par les RNA viraux sauvages, en prenant garde de récupérer la
même surface foliaire dans les 2 cas. Les RNA sont extraits en présence de tampon
polysome, comme cela a été décrit dans le chapitre matériel et méthodes. La lecture de
la DO260nm permet d'estimer la quantité de RNA total présent dans l'extrait et 300 ng

sont déposés sur gel d'agarose en conditions dénaturantes. Après transfert sur membrane
de nitrocellulose, les RNA sont analysés par hybridation moléculaire en utilisant des
sondes ribonucléiques spécifiques complémentaires du RNA 1 (pB12 : nt 4740 à 6560)
et du RNA 2 (pB21 : nt 2335 à 3793). Quel que soit le mutant analysé, on peut constater
une forte diminution de la quantité de RNA 2 mutant par rapport au RNA 2 sauvage. La
réplication du RNA 1 est également affectée mais dans des proportions plus faibles
(publication 1, figure 2, pistes 6, 7, 9 et 10, et voir figure II-2, pistes 2, 3 et 4).
        Ces résultats suggèrent donc que la protéine P14 n'est pas essentielle à l'infection
virale mais la favorise, soit en améliorant l'efficacité du mouvement de cellule à cellule,
soit en stimulant la multiplication du virus. Pour discriminer entre ces 2 possibilités,
nous avons inoculé ces mêmes mutants à des protoplastes de C. quinoa.



    c-Mise en évidence du rôle de la protéine P14 dans la réplication du BNYVV et la
    quantité de protéine de capside synthétisée.
        Les transcrits des différents mutants n'exprimant pas la protéine P14 ainsi que les
transcrits du RNA 1 (nécessaire à la réplication) ont été coinoculés à des protoplastes de
C. quinoa. Après 48 heures de culture, nous avons extrait et analysé les RNA totaux par
hybridation moléculaire. Les résultats que nous avons obtenus révèlent une chute
importante de la quantité de RNA 2 et une diminution beaucoup plus faible voire parfois
nulle du signal correspondant au RNA 1 (voir publication 1, figure 4, pistes 5 et 6). Ces
résultats qui sont tout à fait comparables à ceux obtenus sur plantes sont regroupés dans
le tableau II-1 : le pourcentage d'inhibition de la réplication du RNA 2 en absence de
synthèse de protéine P14 peut atteindre 85 à 98 % ; par contre ce pourcentage n'est plus


   46
Chapitre 2
_____________________________________________________________________




                                                  Accumulation par rapport au
                                                       témoin sauvage

     Expérience n°            Mutant                RNA 1             RNA 2

                              2-4003                120 %              13 %
           1                  2-3992                150 %              14 %
                              2-3722                 42 %              2%
                              2-4003                  58 %             2%
           2
                              2-3992                  38 %             7%

           3                  2-4003                  64 %             5%

           4                  2-4003                  37 %             2%




Tableau II-1: Effets des mutations introduites dans le gène VI sur la réplication des
               RNA 1 et RNA 2 de BNYVV.



                                                             Synthèse de
                                           Réplication
                                                             protéine de
                                            du RNA 2
                                                               coque


                  RNA 1 + RNA 2              ++++             ++++

               RNA 1 + RNA 2-4003               +                +
               RNA 1 + RNA 2-4003
                   + RNA 2-F                    +             ++++

               RNA 1 + RNA 2-4003
                    + rep 14                    +              +++

      Tableau II-2 : Bilan des expériences de complémentation démontrant que
             la protéine P14 a une action en cis sur la réplication du RNA 2 et
             en trans sur la synthèse de protéine de capside.



                                                 47
Résultats
______________________________________________________________________




 Figure II-3 : Cinétique de réplication des RNA viraux et de synthèse des protéines
             P14, CP et P42 dans des protoplastes de C. quinoa infectés par l'isolat
             Stras 12 de BNYVV.
             Les prélèvements ont été effectués au bout de 9, 16, 24 et 48 heures
             d'infection et les analyses réalisées par hybridation moléculaire et par
             immunoempreinte pour détecter les RNA viraux (A) et les protéines P14
             (B), CP (C) et P42 (D)




  48
Chapitre 2
_____________________________________________________________________
que de 63 % dans le pire des cas pour le RNA 1. D'autres expériences ont également
montré que la réplication du RNA 3 est peu ou pas affectée par l'absence de protéine
P14.
       L'autre effet significatif des mutations introduites dans l'ORF VI est une
diminution importante de la quantité de protéine de capside synthétisée (tableau II-2 et
publication 2, figure 4-B, pistes 3 et 4) alors que la synthèse de protéine P25 codée par
le RNA 3 n'est pas affectée (publication 2, figure 4-A, pistes 3 et 4). Enfin, pour
expliquer la petite taille des lésions et leur phénotype nécrogène, on peut émettre
l'hypothèse suivante. En absence de protéine P14, les taux de réplication des RNA
viraux et de synthèse de protéine de coque sont considérablement abaissés ce qui peut se
répercuter de manière directe ou indirecte sur la synthèse des protéines de mouvement
du virus, ralentissant ainsi sensiblement le processus infectieux. Cet effet pourrait alors
permettre à la plante de mettre en place un système de défense qui s'apparenterait, dans
ce cas là, à une réaction d'hypersensibilité sévère caractérisée par l'apparition de lésions
nécrotiques.



2-La protéine P14 joue un rôle en cis dans la réplication du RNA 2 et active en trans
la synthèse de la protéine de coque. (publication n°2)
       Avant de décrire les expériences de complémentation qui nous ont permis de
mieux comprendre le mécanisme d'action de la protéine P14 dans la réplication et dans
la traduction du RNA 2, il était intéressant d'étudier la cinétique d'apparition de cette
protéine ainsi que son rôle dans la synthèse de RNA de polarité négative.



   a-Cinétique d'apparition de la protéine P14 lors de l'infection de protoplastes de

   C. quinoa.
       Les cinétiques réalisées avec l'isolat Stras 12 montrent que la protéine P14 peut
être détectée en western blot à partir de 16 heures (figure II-3-B, piste 3). Des études
effectuées en parallèle sur la synthèse de protéine capsidaire et de la protéine P42
révèlent que toutes ces protéines apparaissent en même temps (figure II-3-C et D, piste


                                                  49
Résultats
______________________________________________________________________
3). Cependant au bout de 48 heures de culture, la synthèse de protéine P42 atteint un
maximum alors que les protéines P14 et CP continuent à s'accumuler ; nous avons pu
montrer dans d'autres expériences que l'accumulation de protéine de coque et de
protéine P14 continuait jusqu'au temps 72 heures. Au delà de ce temps, le taux de
mortalité des protoplastes devient trop important pour que les résultats obtenus puissent
être pris en considération. Ces observations suggèrent que la synthèse de protéine P42
est donc régulée différemment des 2 autres protéines étudiées. Des observations
analogues ont été faites par Davies et collaborateurs (1993) en ce qui concerne la
protéine P25 synthétisée à partir de la première ORF du TGB du potato virus X (ou
PVX).



   b-L'absence de protéine P14 a un effet inhibiteur sur la synthèse de RNA (-).
        Après avoir mis en évidence un effet négatif sur la synthèse des brins (+), nous
avons cherché à savoir si l'absence de protéine P14 affectait également la synthèse des
brins (-). Pour cela, les RNA totaux ont été extraits de protoplastes infectés après 36
heures de culture dans les conditions décrites dans le chapitre matériel et méthodes. La
seule modification introduite dans le protocole expérimental consiste à précipiter
l'ensemble des acides nucléiques en présence d'éthanol et d'acétate d'ammonium 2 M.
Nous avons ainsi pu montrer qu'en l'absence de protéine P14, l'effet observé pour les
RNA brin (+) se retrouve au niveau de la synthèse des RNA brins (-) (publication 2,
figure 5-A et B) en provoquant une réduction importante de l'intensité des signaux plus
particulièrement au niveau des brins (-) correspondant au RNA 2.



   c-La protéine P14 agit en cis sur la réplication du RNA 2.
        Dans les expériences décrites ci-dessous, nous avons entrepris de complémenter
l'effet des mutations introduites dans l'ORF VI par l'apport de protéine P14 sauvage. Ces
expériences de complémentation ont été réalisées de 2 façons différentes :




   50
Chapitre 2
_____________________________________________________________________
       - Dans une première série d'expériences, nous avons utilisé le mutant RNA 2-F
(figure II-4) caractérisé par une délétion de 935 nt au niveau de l'ORF II. Ce mutant est
capable de se répliquer dans les protoplastes (voir publication 1, figure 4, piste 1 ;




                         1143                    2077

        RNA 2-F
                                                                                     An


                                                             RNA 2 sub c                 An




                                    382       1688

                          tRep 14                   An




                                           Protéine P14




Figure II-4 : Caractéristiques des transcrits RNA 2 F et tRep 14 exprimant la protéine P14
        dans les expériences de complémentation.

       : Séquences 5' et 3' non codantes du RNA 3.

       : ORF VI dirigeant la synthèse de la protéine P14.

       : Protéine P14.
.




                                                   51
Résultats
______________________________________________________________________




  52
Chapitre 2
_____________________________________________________________________




                   380     linker BamHI   1470
                                                             Bam HI          Bam HI


                                                         +            P14
  promoteur
     T7
               pB6 (²ES)                                       PCR ORF VI
                                                              (+ sites Bam HI)




     Rep 14                                        P14




      tRep 14                               P14                         An




Figure II-5 : Représentation schématique de la construction du clone Rep 14.
       Après amplification par PCR, l'ORF VI du RNA 2 de BNYVV est introduit dans le
       clone cDNA du RNA 3 délété de toute l'information codante (pB6 (²ES).




                                             53
Résultats
______________________________________________________________________
publication 2, figure 1, piste 2) et permet la synthèse d'une protéine P14 native. Les
expériences de complémentation ont consisté à coinoculer le mutant RNA 2-F avec le
RNA 1 et le RNA 2-4003 n'exprimant pas la protéine P14. Ces expériences qui ont été
répétées un grand nombre de fois n'ont jamais permis de déceler une stimulation de la
réplication du RNA 2-4003 (publication 2, figure 1, piste 4) suggérant ainsi que la
protéine P14 ne peut être efficace lorsqu'elle est apportée en trans. Cependant on peut
imaginer une autre explication : la synthèse de protéine P14 à partir du RNA 2-F se
ferait à un taux trop faible pour être efficace dans une action en trans.
        - C'est pourquoi, dans une deuxième série d'expériences, nous avons utilisé un
transcrit exprimant la protéine P14 en grande quantité, le transcrit rep 14 (figure II-4)
correspondant obtenu de la manière suivante (voir figure II-5) : le gène VI a d'abord été
amplifié par PCR en utilisant des amorces contenant les sites de restriction Bam HI.
Après digestion Bam HI, le produit PCR a été introduit dans le clone pB6 (∆ES) entre
les séquences 5' (1 à 380) et 3' (1470 à 1773) non traduites du RNA 3 du BNYVV. Dans
ce clone construit par Isabelle Jupin (Jupin et al, 1990), la séquence virale est placée
sous le contrôle du promoteur T7 . Le produit de transcription rep 14 est capable de se
répliquer dans les protoplastes lorsqu'il est inoculé en présence de transcrits du RNA 1.
De plus ce transcrit est capable d'exprimer efficacement la protéine P14 (publication 2,
figure 3-B, piste 4 et 5). Le transcrit rep 14 a donc été coinoculé avec les RNA 1 et 2-
4003 et, là encore, les résultats de ces expériences de complémentation ne révèlent
aucune stimulation de la réplication du RNA 2-4003 (publication 2, figure 1, piste 6).
On peut donc en conclure que la protéine P14 joue très certainement un rôle en cis sur la
réplication du RNA 2 (voir tableau II-2).



   d-La protéine P14 stimule en trans la synthèse de la protéine de capside.
        Parallèlement à ces analyses par hybridation moléculaire, nous avons recherché
par immunoempreinte la présence de protéine de coque. Nous avons ainsi pu mettre en
évidence une seconde fonction liée à la protéine P14 : indépendamment de l'effet en cis
sur la réplication, la protéine P14 peut stimuler fortement en trans, la synthèse de la


   54
Chapitre 2
_____________________________________________________________________
protéine de coque. En effet, le signal correspondant à la protéine de coque est beaucoup
plus intense en présence de protéine P14 apportée en trans par le transcrit rep 14
(publication 2, figure 3-A, piste 5) qu'en son absence (publication 2, figure 3-A, piste 3)
bien que le taux de réplication du RNA 2-4003 ne soit pas stimulé (publication 2,
figure 2, piste 3 et 6 et tableau II-2).
        Pour expliquer ce résultat, nous avons émis l'hypothèse que la protéine P14 a une
affinité pour une séquence spécifique du RNA 2 et favorise ainsi la traduction de la
protéine capsidaire. C'est pourquoi nous avons entrepris des expériences d'expression
transitoire en bombardant des feuilles de C. quinoa et de Nicotiana tabacum avec 2
types de vecteurs : l'un permet la synthèse de protéine P14 et l'autre renferme la
séquence cible potentielle reconnue par la protéine P14, en l'occurrence la région 5'
terminale de l'un ou l'autre RNA du BNYVV. Cette séquence cible est placée en amont
d'un gène rapporteur permettant de visualiser la stimulation si celle-ci a lieu. Les
caractéristiques de ces vecteurs sont les suivantes :
        - Les vecteurs permettant l'expression de la protéine P14 native ou tronquée ont
été obtenus par insertion de la séquence nucléotidique correspondante dans le plasmide
pMJD 82 (Dowson Day et al, 1994). Pour cela, nous avons amplifié, par PCR, le cistron
de la protéine P14 sauvage ou mutée en utilisant une amorce 5' renfermant le site Nco I
et un oligonucléotide correspondant à l'extrémité 3' du RNA 2. Ce produit PCR a
ensuite été digéré par les enzymes Nco I et Stu I (site naturel localisé en position 4479
du RNA 2) puis inséré dans le vecteur pMJD 82 linéarisé par Nco I et Sma I. Nous
avons ainsi obtenu les vecteurs pMJD-P14 exprimant la protéine P14 sauvage et pMJD-
P14∆1 exprimant une protéine P14 délétée de 30 acides aminés. Ce mutant de délétion
a été obtenu par une digestion à l'exonucléase III générant une délétion de 98 nt (nt
4286-4284) suivie d'une insertion d'un linker de 8 nucléotides permettant de récupérer la
phase de lecture. Lorsque ce mutant du gène VI est introduit dans le RNA 2 et que le
transcrit correspondant est inoculé à des protoplastes, on obtient des résultats analogues
aux résultats obtenus avec les mutants ponctuels RNA 2-3722, -3992 et -4003. Le clone




                                                   55
Résultats
______________________________________________________________________
pMJD-P14∆1 nous a servi de témoin négatif dans les expériences d'expression
transitoire décrites ci-dessous.
        - Les vecteurs renfermant les séquences cibles ont été obtenus par insertion de
produits PCR correspondant aux extrémités 5' non codantes des RNA 2, 3 et 4 du
BNYVV (respectivement les 142, 442 et 377 premiers nucléotides) dans le vecteur
pRT2-syn-LUC : les amplifications PCR ont été effectuées en utilisant des
oligonucléotides renfermant un site Xho I pour l'amorce 5' et un site Nco I pour l'amorce
3'. Après digestion par ces 2 enzymes, les fragments ont été introduits dans le vecteur
rapporteur pRT2-syn-LUC coupé par Xho I et Nco I. Les plasmides recombinants ainsi
obtenus ont été appelés pRT-BN2-LUC, pRT-BN3-LUC et pRT-BN4-LUC. Les

différents plasmides recombinants ont ensuite été cobombardés (un vecteur de type
pMJD avec un vecteur de type pRT) sur des feuilles de C. quinoa et de N. Tabacum
(voir matériel et méthodes). Vingt quatre heures après l'inoculation, la stimulation de
l'activité luciférase a été analysée. Les résultats (publication 2, tableau 2) démontrent
que la protéine P14 est en mesure de stimuler l'activité luciférase dans les 2 types de
feuilles bombardées ; ce facteur de stimulation peut varier de 2,4 à 4,5 . Cependant,
cette stimulation n'est pas spécifique d'une séquence présente dans la région 5' leader du
RNA 2 car elle a lieu quelle que soit la séquence cible utilisée ; même le vecteur
rapporteur renfermant uniquement la cassette de clonage montre une stimulation de
l'activité luciférase en présence de la protéine P14. Cependant, le facteur de stimulation
est plus faible que celui observé lors de la synthèse de protéine CP dans les expériences
de complémentation dans les protoplastes où la protéine P14 est apportée en trans. Il est
clair que ces expériences devront donc être reprises avec des séquences du RNA 2 du
BNYVV allongées au delà de la séquence 5' leader si l'on veut observer une stimulation
beaucoup plus significative.



3-Mode d'action de la protéine P14.
        Pour expliquer les résultats décrits ci dessus, nous avons proposé le modèle
suivant (voir figure II-6) : dans les premiers instants de l'infection, les RNA décapsidés


   56
Chapitre 2
_____________________________________________________________________




                             CP
                             P75


                             5'                               3' Brin plus


                 Brin moins 3'                                   5'
                                                                          Rôle au
                                                                       niveau de la
                                        RNA 2 sub c 5'         3'       réplication
  Rôle au niveau                                                          (en cis)
  de la traduction
                                                             P14
     (en trans)



                                 CP
                                 P75


                                   5'                          3' Brin plus




        Figure II-6 : Modèle permettant d'expliquer le rôle de la protéine P14
                       dans le cycle de multiplication du BNYVV.




                                                57
Résultats
______________________________________________________________________




        Synthèse de RNA brin + et de RNA subgénomiques

                 3'                                                     5'
                                                                             -
               Complexe de
                réplication
                                                                       5'
                 3'
                                                                         -
                                                                         +


        La protéine P14 naissante se fixe au complexe de réplication et reconnait
        une séquence sur le brin + néosynthétisé. Puis elle stimule la synthèse de
        RNA brin -.
                 3'
                -


                      +

               +
                                                         -

       Figure II-7 : Modèle proposé pour expliquer le rôle en cis de la protéine P14
       dans la réplication du RNA 2.




  58
Chapitre 2
_____________________________________________________________________
de polarité positive provenant de l'inoculum, sont traduits permettant, entre autre, la
synthèse de RNA polymérase RNA dépendante. Cette enzyme va permettre la formation
d'un complexe de réplication induisant, à un taux que nous allons qualifier de basal, la
synthèse de RNA de polarité négative. Ces RNA (-) servent ensuite de matrice pour la
formation des RNA complémentaires génomiques et subgénomiques. Puis la protéine
P14 néosynthétisée à partir du RNA 2sub c pourra stimuler en cis la synthèse de
nouveau brin moins à partir desquels se fera une synthèse massive de RNA génomiques.
Cet effet en cis est assez peu courant et mérite que l'on s'y attarde un peu plus : comme
on peut le voir sur la figure II-7, le RNA de polarité négative sert de matrice à la
synthèse de RNA génomique, mais également à la synthèse de RNA subgénomique.
Celui ci pourra être pris en charge, durant sa synthèse par les ribosomes pour initier la
production de protéine P14. Dans ces             conditions,   on   aura   un   couplage
réplication/traduction. La protéine P14 ainsi synthétisée pourra ensuite reconnaître une
séquence spécifique dans la région 3' terminale du RNA brin plus génomique et stimuler
ainsi la synthèse de nouveaux brins de RNA de polarité négative. On peut imaginer que,
durant sa synthèse, un site cryptique de la protéine P14 reconnaît une séquence
spécifique du RNA 2. Le masquage de ce site sur la protéine mature pourrait expliquer
pourquoi la protéine P14 apportée en trans reste sans effet sur la réplication du RNA 2.
       Après avoir stimulé en cis la synthèse de RNA brin moins, la protéine P14 qui
commence à s'accumuler dans la cellule pourra alors induire en trans la synthèse de la
protéine de coque.
       Pour mieux comprendre l'intérêt d'un tel système, il faut se rappeler que la
plupart des virus de plante expriment leur protéine de coque à partir d'un RNA
subgénomique (TMV, AMV, etc...) ou alors par l'intermédiaire d'une polyprotéine
maturée (CPMV, GFLV, etc ...). Ces 2 systèmes permettent une régulation relativement
facile de la production de la CP. Par contre dans le cas du BNYVV, du BSMV, un
hordeivirus ou du TRV, un tobravirus, le cistron codant pour la protéine de coque est
localisé en 5' d'un RNA génomique et sera donc traduit en premier. Si tel est le cas, la
présence de protéine CP dès le début du cycle de réplication devrait favoriser la


                                                 59
Résultats
______________________________________________________________________
réencapsidation                                                     des




  60
Chapitre 2
_____________________________________________________________________




 A



                          10   20   30   40   50    60     70   80   90 100   110 120

     Hydrophilicité
         (KD)



     Probabilité de
        surface




 B

 ATGGGGATGGTAGATAGTTTGTGCGTGTTTGTTGGTCGAGTCATAACTGAGGGATCTGAA
 M G M V D S L C V F V G R V I T E G S E
 AGTGTTGAGGGTGTGGAAAGGTTTTCCATTAAGTTTAGTGAGTGGAAATTGTTCACCATC
 S V E G V E R F S I K F S E W K L F T I
 GCGGTGTTTGTTGAATATCGTGAGTTAGGTGAGAAAGAGTGCAGTTTGAAGGATGCTGGT
 A V F V E Y R E L G E K E C S L K D A G
 AGATTACACTTTAATGTGTCATGTGTGAAATGCTGTCAAAAACTTAAATGCAAGAAACAA
 R L H F N V S C V K C C Q K L K C K K Q
 AATAAAAATCATAGTAAACACGTCCAAAATGGATATTTACGCAAGGTACGTAATTTTTCC
 N K N H S K H V Q N G Y L R K V R N F S
 ATTTTAGGTGTTTGCGGTGATTGTTGTGAGTCTTTTACACTCGCGGACGAAAAACCTCAT
 I L G V C G D C C E S F T L A D E K P H
 GTTATTGTCGATCCTGAGGTGTAA
 V I V D P E V *



      Figure II-8 : Caractéristiques de la protéine P14 codée par l'ORF VI du RNA 2.
              A : Profil d'hydrophilicité selon Kyte & Doolittle (1982) et probabilité de
              surface des acides aminés : ces profils ont été obtenus en utilisant le
              logiciel de prédiction de structure "plotstructure" de UWGCG.
              B : Séquence nucléotidique de l'ORF VI du RNA 2 et structure primaire
              de la protéine P14 correspondante.




                                                   61
Résultats
______________________________________________________________________




  A




  B

                                    K80
                                    K79
                                    C72            C106
                                          Zn
                                    C69            C109
                                                          E118 K119




Figure II-9 : (A) Comparaison de séquence entre l'ORF 6 du RNA 2 du BNYVV et un
                certain nombre de papillomavirus (Koonin et al, 1991). HPV 1a, human
                papilloma virus type 1a ; BPV2, bovine papillomavirus type 2 ; DPV, deer
                papilloma virus ; CRPV, cottontail rabbit papilloma virus. + correspond à des
                acides aminés hydrophobes et * désigne des acides aminés du BNYVV
                faisant partie de la séquence consensus.
                (B) Structure en doigt de zinc hypothétique de la protéine P14 du BNYVV. Les
                acides aminés représentés correspondent aux mutants alanines décrits dans le
                chapitre II, paragraphe III.


   62
Chapitre 2
_____________________________________________________________________
RNA génomiques provenant de l'inoculum et empêcher ainsi la multiplication du virus.
Or, à la lumière des résultats obtenus, le rôle bifonctionnel de la protéine P14
permettrait une régulation temporelle du processus d'infection virale : au début de
l'infection virale, la protéine P14 serait intégralement utilisée pour stimuler la
réplication des RNA viraux ; dans un deuxième temps son accumulation stimulerait la
synthèse de protéine capsidaire et donc l'encapsidation des RNA viraux néosynthétisés.




II-Mise en évidence de l'importance des résidus cystéines 69, 72, 106 et 109 dans

l'activité de la protéine P14.


       La protéine P14 est un polypeptide de 126 acides aminés très riche en cystéines
(8 %) et en lysines (10 %) et dont la séquence est présentée figure II-8-B.
       Bien que codée par une ORF localisée à l'extrémité 3' du RNA 2, la protéine P14
présente très peu d'homologies avec d'autres protéines riches en cystéines également
exprimées à partir d'ORF localisées en 3' de RNA génomiques d'autres phytovirus
comme le BSMV ou encore le TRV. Par contre, des comparaisons de séquences
(Koonin et al, 1991) (figure II-9) montrent une homologie non négligeable entre cette
protéine P14 et la protéine E6 des papillomavirus, une protéine impliquée dans la
transactivation de la transcription du génome viral grâce à la présence d'une structure en
doigt de zinc (Lamberti et al, 1990).
       Avant d'initier une étude fine des acides aminés essentiels à l'activité biologique
de la protéine P14, nous avons effectué des prédictions de structure à l'aide d'un
programme informatique "plotstructure" de UWGCG et les résultats sont décrits figure
II-8-A. L'examen du profil de probabilité des acides aminés d'être en surface de la
protéine P14 (figure II-8-A) révèle l'existence de 2 domaines : ces 2 domaines sont
situés au voisinage des acides aminés 80 et 120, le premier domaine très hydrophile est
encadré de résidus cystéines conservés chez les papillomavirus. Ces observations ainsi
que les résultats déjà obtenus par U. Niesbach-Klösgen (1990) et montrant que la
protéine P14

                                                  63
Résultats
______________________________________________________________________




                 A                             B                 C




   Figure II-10 : Symptômes induits par le mutant RNA 2 (E118-K119) (A), le
           mutant RNA 2 (K79-80) (B) et les mutants RNA 2 (C106-109) ou RNA
           2 (C69-72) (C) inoculés à des feuilles de C. quinoa.




  64
Chapitre 2
_____________________________________________________________________
était capable de fixer le zinc, permettent de proposer, pour cette région très hydrophile
comprise entre les acides aminés 69 et 109, l'existence d'une structure en doigt de zinc
qui est représentée figure II-9-B.



1-Construction de mutants alanine (Giesman-Cookmeyer & Lommel, 1993).
       Pour vérifier l'importance de certains résidus aminés, nous avons entrepris de
construire des mutants ponctuels dans lesquels ces acides aminés sont remplacés par des
alanines. Ces mutations concernent plus précisément des acides aminés supposés en
surface tels que les lysines 79, 80 et 119 et l'acide glutamique 118 (figure II-8) ou alors
des cystéines (69, 72, 106 et 109) potentiellement impliquées dans une structure en
doigt de zinc. Nous avons ainsi obtenus les mutants pB2(C69-72), pB2(C106-109),
pB2(K79-80) et pB2(E118-K119).



2-Propriétés biologiques des mutants alanine.
       Afin de tester l'effet de ces modifications sur la réplication du virus in planta,
nous avons transcrit les différents clones obtenus et nous les avons coinoculés à des
plantes en présence de transcrits correspondant aux RNA 1 et RNA 3. Après une dizaine
de jours d'infection, nous avons observé 3 types de lésions (figure II-10).
       (1) Des lésions de type sauvage, chlorotiques et de grande taille pouvant diffuser
le long des nervures avec le mutant pB2(E118-K119). Ces lésions sont tout à fait
semblables à celles observées avec un isolat sauvage.
       (2) Des lésions chlorotiques de taille beaucoup plus petite avec le mutant
pB2(K79-80).
       (3) Des lésions nécrotiques avec les mutants pB2(C69-72) et pB2(C106-109) ;
ces lésions sont analogues aux lésions obtenues avec les mutants n'exprimant pas la
protéine P14 (figure II-2).
         L'analyse des RNA extraits des lésions révèle une diminution de tous les RNA
viraux dans les lésions de type nécrotique (figure II-11-A, piste 4 et 5) et une diminution



                                                  65
Résultats
______________________________________________________________________




                                   RNA 2 (E118-K119)2 (C106-109)
                                               RNA RNA
                                          RNA 2 (K79-80) 2 (C69-72)
                                RNA 2
            A


                   RNA 1


                   RNA 2




                   RNA 3




            B


                     CP



            C

                     P14



                                1       2           3   4      5


       Figure II-11 : Analyse par hybridation moléculaire des RNA extraits des
       lésions locales provoquées par les mutants alanine (A). les quantités de
       protéine de capside (B) et de protéine P14 (C) présentes dans ces mêmes
       lésions ont été mises en évidence par immunoempreinte.




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  • 1. UNIVERSITE LOUIS PASTEUR STRASBOURG I 1995 THESE présentée à L'UFR DES SCIENCES DE LA VIE ET DE LA TERRE pour obtenir le titre de DOCTEUR DE L'UNIVERSITE LOUIS PASTEUR domaine : BIOLOGIE MOLECULAIRE par Alain HEHN LES GENES 3' PROXIMAUX DU RNA 2 DU VIRUS DES NERVURES JAUNES ET NECROTIQUES DE LA BETTERAVE (OU BNYVV) : LEUR ROLE DANS LA REPLICATION ET LA TRADUCTION DU GENOME VIRAL AINSI QUE DANS LE MOUVEMENT DU VIRUS DE CELLULE A CELLULE. Soutenue le 27 juin 1995 devant la Commission d'Examen Dr. M. LEGRAND Rapporteur interne Pr. A. VAN KAMMEN Rapporteur externe Dr. T. CANDRESSE Rapporteur externe Dr. K. RICHARDS Examinateur Pr. G. JONARD Directeur de Thèse Institut de Biologie Moléculaire des Plantes (IBMP-CNRS) Strasbourg
  • 2.
  • 3. à mes parents, à Valérie, à Michel
  • 4.
  • 5. Je voudrais remercier ici, le professeur Jonard qui m'a accordé sa confiance un matin d'avril 1991 en m'accueillant au sein de son groupe, me donnant ainsi l'opportunité de réaliser cette thèse. La recherche est un labyrinthe dans lequel on peut aisément s'égarer. Merci à messieurs Guilley et Richards, les 2 autres membres du TCB, d'avoir été disponible pour m'écouter, me conseiller et me diriger efficacement quand il le fallait. J'aimerai exprimer ma gratitude aux membres du jury : messieurs Candresse, Legrand et Van Kammen pour avoir accepté de juger ce travail. Mes remerciements vont tout particulièrement à Salah Bouzoubaa qui, armé de beaucoup de patience (si, si, beaucoup de patience ! ), a su m'initier à la paillasse et à la recherche en général. Merci également à Mme Marbach pour avoir préparé chaque semaine, inlassablement, ces fameux protoplastes, source de joie et souvent de dépit. Je tiens a exprimer ma reconnaissance à Mme Fritsch qui, au cours de nos discussions, m'a permis de mieux comprendre la maturation mais aussi le frame-shift...! Enfin, je voudrais remercier toutes les personnes qui, de près ou de loin, ont contribué à faire de cette thèse ce qu'elle est et avec qui j'ai partagé tant de gâteaux, de chocolats et autre thé à la menthe.
  • 6.
  • 7. SOMMAIRE SOMMAIRE.........................................................................................................................1 INTRODUCTION ...............................................................................................................7 RESULTATS CHAPITRE 1 : LES PROTEINES EXPRIMEES A PARTIR DU "TRIPLE GENE BLOCK" (TGB) SONT DIRECTEMENT IMPLIQUEES DANS LE MOUVEMENT DU VIRUS DE CELLULE A CELLULE. ............................................17 I-Etat des connaissances sur les mécanismes de transport des virus. ....................................19 1-Stratégie utilisée par les tobamovirus. ....................................................................20 2-Stratégie utilisée par les comovirus, les népovirus et les caulimovirus..................20 3-Stratégie utilisée par les hordeivirus, les potexvirus et les furovirus......................21 II-Rôle du Triple Gene Block dans le mouvement de cellule à cellule du BNYVV. ............23 1-Le Triple Gene Block du BNYVV est impliqué dans le mouvement du virus de cellule à cellule...........................................................................................................23 2-Les protéines P42 et P13 du Triple Gene Block sont exprimées à partir de RNA subgénomiques. ................................................................................................27 III-Conclusions et perspectives. .............................................................................................28 Publication n°1 : EFFICIENT CELL TO CELL MOVEMENT OF BEET NECROTIC YELLOW VEIN VIRUS REQUIRES 3' PROXIMAL GENES LOCATED ON RNA 2.....31
  • 8. Sommaire ______________________________________________________________________ CHAPITRE 2 : ETUDE DE LA PROTEINE P14 CODEE PAR L'ORF 3' PROXIMALE DU RNA 2 DU BNYVV............................................................ 41 I-Mise en évidence du rôle de la protéine P14 dans le cycle de multiplication du BNYVV. ................................................................................................................................ 41 1-Des mutations introduites dans le gène VI du RNA 2 engendrent une diminution du taux de réplication des RNA viraux. (publication n°1).....................41 2-La protéine P14 joue un rôle en cis dans la réplication du RNA 2 et active en trans la synthèse de la protéine de coque. (publication n°2) ..................................... 48 3-Mode d'action de la protéine P14. .......................................................................... 54 II-Mise en évidence de l'importance des résidus cystéines 69, 72, 106 et 109 dans l'activité de la protéine P14.................................................................................................... 60 1-Construction de mutants alanine (Giesman-Cookmeyer & Lommel, 1993). .........62 2-Propriétés biologiques des mutants alanine............................................................62 III-Mise en évidence d'interactions protéine P14-acides nucléiques. .................................... 65 1-Clonage du gène VI dans le vecteur pET. .............................................................. 65 2-Purification partielle de la protéine P14 par chromatographie d'affinité sur une colonne "Zinc Chelate Affinity Adsorbent" (ZCAA). ............................................... 67 3-Mise en évidence d'interactions protéine P14-acides nucléiques par la technique de "Northwestern" (Gramstat et al, 1990). ................................................69 IV-Conclusion ....................................................................................................................... 69 Publication n°2 : THE SMALL CYSTEIN-RICH PROTEIN P14 OF BEET NECROTIC YELLOW VEIN VIRUS REGULATES ACCUMULATION OF RNA 2 IN CIS AND COAT PROTEIN IN TRANS................................................................................................. 73 CHAPITRE 3 : DES RNA 2 DEFECTIFS SONT CAPABLES D'INHIBER LA REPLICATION DU BNYVV ............................................................................................. 103 I-Rappel sur les stratégies de lutte antivirale par transgénose : expression de séquences dérivées du pathogène............................................................................... 103 II-Obtention de RNA défectifs artificiels du BNYVV : leur effet sur la réplication du virus. ................................................................................................... 109 2
  • 9. Sommaire ______________________________________________________________________ 1-Obtention de RNA défectifs.................................................................... 109 2-Seules les délétions introduites dans le RNA 2 produisent des RNA ayant un effet Défectif Interférant........................................................................ 109 3-Analyse de l'effet DI en fonction de la quantité de RNA DI utilisée et du temps. ......................................................................................................... 110 4-Analyse dans les plantes de l'effet DI des différents mutants du RNA 2.112 III-Conclusions et perspectives. .................................................................................113 Publication n°3 : ARTIFICIAL DEFECTIVE INTERFERING RNAs DERIVED FROM RNA 2 OF BEET NECROTIC YELLOW VEIN VIRUS .....................................................115 CHAPITRE 4 : MISE EN EVIDENCE D'UNE ACTIVITE PROTEOLYTIQUE ASSOCIEE A LA PROTEINE P237 CODEE PAR LE RNA 1 DU BNYVV. ...............125 I-Les protéases d'origine virale et leurs caractéristiques ............................................127 1-Généralités sur les protéases. .................................................................. 127 2-Exemples de protéines virales présentant une activité protéasique ........ 130 II-Cas du BNYVV......................................................................................................131 1-Comparaison de séquences avec des domaines protéases d'autres phytovirus................................................................................................... 131 2-Mise en évidence d'une activité protéase associée à la protéine P237.... 134 III-Conclusions :.........................................................................................................135 CONCLUSION ....................................................................................................................137 MATERIEL ET METHODES A-AMPLIFICATION, EXTRACTION ET MODIFICATIONS DE DNA PLASMIDIQUE...................................................................................................................141 I-Souches bactériennes, vecteurs de clonage ou d'expression et milieux de culture. ............141 1-Souches bactériennes .............................................................................................141 2-Vecteurs .................................................................................................................143 3
  • 10. Sommaire ______________________________________________________________________ 3-Milieux. .................................................................................................................. 146 II-Transformation des souches bactériennes et mise en culture. ........................................... 146 1-Utilisation de Chlorure de Calcium........................................................................ 146 2-Transformation par électroporation ........................................................................ 147 3-Caractérisation des clones par hybridation in situ. ................................................. 148 III-Extraction et analyse de DNA plasmidique......................................................................148 1-Minipréparation et maxipréparation ....................................................................... 148 2-Analyse. ..................................................................................................................150 IV-Préparation de DNA plasmidique simple brin uridylé et mutagénèse dirigée selon la méthode de Kunkel . .............................................................................................................. 152 1-Culture. ................................................................................................................... 152 2-Purification du DNA simple brin. ..........................................................................152 3-Mutagénèse dirigée en utilisant des oligonucléotides modifiés (Zoller & Smith, 1982). .........................................................................................................................152 V-Techniques de sous clonage par l'utilisation d'enzymes.................................................... 153 1-Digestion enzymatique. .......................................................................................... 153 2-Obtention d'extrémités franches. ............................................................................ 154 3-Déphosphorylation..................................................................................................155 4-Phosphorylation. ..................................................................................................... 156 5-Ligation................................................................................................................... 156 VI-Amplification d'un fragment de DNA par la technique de la PCR. .................................157 1-Principe de la méthode et conditions générales...................................................... 157 2-Cas particulier du RNA 2 du BNYVV. .................................................................. 158 VII-Purification sur gel d'agarose d'un fragment de DNA obtenu par digestion enzymatique ou par PCR. ...................................................................................................... 158 1-Par électroélution....................................................................................................158 2-Par extraction d'un gel LMP. ..................................................................................159 VIII-Séquençage selon la méthode de Sanger, modifiée pour la T7 DNA polymérase.........159 1-Séquençage d'un DNA plasmidique. ...................................................................... 159 4
  • 11. Sommaire ______________________________________________________________________ 2-Séquençage d'un produit PCR.................................................................................160 IX-Transcription in vitro........................................................................................................161 1-Obtention de transcrits infectieux du BNYVV.......................................................161 2-Synthèse de sondes ribonucléiques.........................................................................163 X-Analyse des transcrits par hybridation in situ ....................................................................163 1-Séparation des RNA par migration sur gel d'agarose en conditions dénaturantes................................................................................................................163 2-Hybridation avec des sondes spécifiques radioactives. ..........................................165 XI-Analyse de la descendance par réverse transcription........................................................166 B-EXPRESSION IN VIVO OU TRADUCTION IN VITRO DES PROTEINES DE BNYVV .................................................................................................................................167 I-Expression de protéines dans un système bactérien (Studier et al, 1990)...........................167 II-Purification par chromatographie d'affinité sur une colonne ZCAA (Zinc Chelate Affinity Adsorbent)................................................................................................................167 III-Traduction in vitro dans un système acellulaire de réticulocytes de lapins. .....................168 1-Préparation du lysat de réticulocytes de lapins. ......................................................168 2-Traduction des produits de transcriptions...............................................................169 IV-Analyse. ............................................................................................................................169 1-Par électrophorèse en conditions dénaturantes sur gel de polyacrylamide. ............169 2-Par immunorévélation après transfert. ....................................................................170 V-Etude de l'activité fixatrice d'une protéine par northwestern. (Gramstat et al, 1990)........173 C-MULTIPLICATION DU VIRUS DANS UNE PLANTE HOTE : CHENOPODIUM QUINOA. ...............................................................................................173 I-Plante hôte. ..........................................................................................................................173 II-Préparation du virus. ..........................................................................................................174 III-Extraction de RNA viraux à partir de feuilles de C. quinoa.............................................174 1-En présence de tampon "polysome" (Jackson & Larkins, 1976) ...........................174 5
  • 12. Sommaire ______________________________________________________________________ 2- En présence de tampon Tris-Magnésium. .............................................................175 IV-Préparation, inoculation et mise en culture de protoplastes. ............................................176 1-Préparation des protoplastes (Veidt et al, 1992)..................................................... 176 2-Infection des protoplastes par des acides nucléiques (RNA de BNYVV ou DNA plasmidique) et mise en culture........................................................................ 176 V-Extraction des RNA viraux de protoplastes. ..................................................................... 177 VI-Expression transitoire dans les feuilles de C. quinoa et Nicotiana tabacum. .................. 178 ANNEXES Publication n°4 : IDENTIFICATION AND CHARACTERIZATION OF RESISTANCE TO RHIZOMANIA IN AN ECOTYPE OF BETA VULGARIS SUBSP. MARITIMA. ......... 179 ABREVIATIONS ..................................................................................................................195 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES............................................................................... 199 6
  • 13. INTRODUCTION C'est en 1959, dans la vallée du Pô (Italie), que Canova décrit pour la première fois des betteraves malades présentant comme symptômes (1) des feuilles gaufrées avec des tâches jaunes diffuses le long des nervures (voir figure 1-B) ; (2) un pivot de taille réduite par rapport à celui d'une plante saine ; (3) une nécrose des anneaux vasculaires facilement observable lorsque le pivot est coupé transversalement ; et (4) une abondante barbe "poivre et sel" due à une prolifération anormale et anarchique des radicelles (voir figure 1-A). Cette dernière observation, la plus caractéristique, donne son nom à la maladie : la rhizomanie, ce qui signifie étymologiquement "démence des racines" (rhizo = racines ; mania = folie) (voir figure 1-A). Cette maladie a ensuite été décrite au Japon en 1965 et fait son apparition en France, plus précisément en Alsace, dans les années 70 (Putz et Vuittenez, 1974). La rhizomanie engendre une perte considérable dans le rendement en sucre qui passe de 18 à 8%, rendant l'exploitation impropre. Dès 1966, Canova suggère que la maladie est due à un champignon du sol : Polymyxa betae. C'est un champignon inférieur, à zoospores biflagellées, parasite intracellulaire des racines de betteraves. Il appartient à la classe des Myxomycètes et à l'ordre des Plasmodiophorales (Chadefaud & Emberger, 1942). Les spores de résistance se trouvant dans un sol contaminé vont germer et libérer des zoospores qui se déplacent vers les radicelles d'une betterave, la propulsion se faisant grâce au mouvement coordonné des 2 flagelles de la zoospore. Lorsque le contact avec une radicelle a lieu, les flagelles disparaissent et la zoospore déverse son contenu cellulaire dans la cellule hôte. Après 16 heures, on peut déjà observer un jeune plasmode qui va se différencier en
  • 14. Introduction ______________________________________________________________________ A B Figure 1 : Sym ptômes de la rhizomanie : (A) photo représentant des betteraves saines (à gauche) et rhizom aniées (à droite).(Photo fournie par l'INRA de Colm ar). (B) Photo montrant les sym ptômes foliaires qui ont donné leur nom au virus. 8
  • 15. Introduction ______________________________________________________________________ Figure 3 : Cycle de Polymyxa betae (d'après Keskin, 1967) 9
  • 16. Introduction ______________________________________________________________________ zoosporange ou en cystosore (Keskin, 1964 et 1967) (voir figure 3). Ce n'est qu'en 1973 que Tamada et Baba démontrent que l'agent responsable de la rhizomanie est un virus : le beet necrotic yellow vein virus ou virus des nervures jaunes et nécrotiques de la betterave (encore appelé BNYVV) ; ceci fut confirmé par Fujisawa et Sugimoto en 1977. Le champignon Polymyxa betae, quant à lui, est seulement impliqué dans la transmission du BNYVV (Fujisawa & Sugimoto, 1976). Enfin, les premières études au plan moléculaire furent initiées en 1983 (Putz et al, 1983) et démarrèrent vraiment en 1985 (Richards et al, 1985). Le virus des nervures jaunes et nécrotiques de la betterave est un phytovirus (Putz, 1977) appartenant à la famille des furovirus (fungus rod-shaped virus) (Brunt & Richards, 1989 ; Brunt, 1991). Son génome est composé de 4 RNA (voir figure 4) de polarité positive coiffés à leur extrémité 5' et polyadénylés à leur extrémité 3'. Ces 4 RNA sont encapsidés dans des particules virales de taille variable (390 nm, 265 nm, 100 nm et 89 nm) et de symétrie hélicoïdale avec un diamètre constant de 20 nm. Dans certains isolats japonais, un 5ème RNA, de fonction inconnue, a été décrit (Tamada et al, 1989). Les RNA 1 et 2 sont nécessaires à la réplication, l'encapsidation et le mouvement de cellule à cellule du virus. Ils sont donc suffisants pour provoquer un processus infectieux quand ils sont inoculés mécaniquement à des feuilles de Chenopodium quinoa, une plante hôte (voir figure 2-B). Les RNA 3 et 4 restent cependant essentiels lors de l'infection naturelle des racines de betterave par l'intermédiaire du champignon vecteur. Le RNA 1 (6746 nt) code pour une protéine de poids moléculaire 237 kDa renfermant les séquences consensus des méthyltransférase, hélicase (GKS) et polymérase (GDD) (Bouzoubaa et al, 1987). D'autre part, comme nous le verrons dans le chapitre IV, la protéine P237 contient une séquence caractéristique des protéases de type papaïne (Koonin & Dolja, 1993 ; Rozanov et al, 1995) localisée entre le domaine hélicase et le domaine polymérase. Le RNA 1 est capable de s'autorépliquer lorsqu'il est inoculé seul à 10
  • 17. Introduction ______________________________________________________________________ P 237 GKS GDD RNA 1 MTR HEL PRO POL AAA ? ? ? P75 TGB CP P13 P14 RNA 2 GKS AAA UAG 15 K P42 RNA Subgénomique P25 P31 4.6 K RNA 3 AAA RNA 4 AAA N Fonctions dans le cycle de multiplication. Mouvement de Réplication Transmission cellule à cellule Encapsidation Symptomatologie et Régulation de la amplification du réplication et de la virus dans les racines traduction Inconnue Figure 4 : Organisation génétique du virus des nervures jaunes et nécrotiques de la betterave ou BNYVV et fonctions associées aux protéines codées par les différents RNA génomiques. 11
  • 18. Introduction ______________________________________________________________________ des protoplastes de cellules de mésophylle de C. quinoa (voir figure 5) (Bouzoubaa & Scheidecker, 1990 ; Gilmer et al, 1992). Le RNA 2 (4612 nt) présente une organisation génétique plus complexe avec 6 phases de lecture ouverte (ORF). La première ORF dirige la synthèse de la protéine de capside (CP) d'un poids moléculaire de 21 kDa. La protéine de translecture de 75 kDa obtenue par suppression du codon stop UAG de la première ORF (Ziegler et al, 1985 ; Bouzoubaa et al, 1986), joue un rôle dans l'initiation de l'encapsidation (Schmitt et al, 1992), dans la transmission du virus par le vecteur (Tamada & Kusume, 1991) et a été visualisée par microscopie électronique à l'une des extrémités des particules virales (Haeberlé et al, 1994). Les 3 ORF chevauchantes III, IV et V sont regroupées sous le terme de "triple gene block" (ou TGB). Une organisation génétique analogue a été décrite pour d'autres furovirus (Herzog et al, 1994 ; Scott et al, 1994) mais également chez des virus comme les carlavirus, les hordeivirus et les potexvirus (Morozov et al, 1989). Ces 3 ORF du BNYVV codent respectivement pour des protéines potentielles de poids moléculaire 42, 13 et 15 kDa. La protéine P42 dispose d'une séquence consensus GKS caractéristique d'une activité NTP-binding souvent associée aux hélicases et a été mise en évidence, ainsi que la protéine P13, dans les fractions membranaires préparées à partir de feuilles de C. quinoa infectées par le virus (Niesbach-Klösgen et al, 1990). En revanche, la protéine P15 n'a pas encore été détectée in planta. Enfin, l'ORF 3' proximale du RNA 2 code pour une protéine de 14 kDa riche en cystéine et qui a été localisée dans la fraction cytosolique de feuilles infectées (Niesbach-Klösgen et al, 1990). Cette protéine, comme nous le verrons ultérieurement (voir chapitre 2), joue un rôle dans la régulation de l'infection virale. Le RNA 3 (1773 nt) code pour une protéine de 25 kDa impliquée dans la multiplication virale au niveau des racines de betteraves infectées (Koenig et al, 1986 ; Lemaire et al, 1988 ; Tamada & Abe, 1989) ainsi que dans la symptomatologie au niveau des feuilles (Jupin et al, 1992). Une étude immunocytochimique récente montre que la protéine P25 est synthétisée très tôt dans le cycle viral ; de plus elle est détectée à 12
  • 19. Introduction ______________________________________________________________________ la fois dans le cytoplasme et dans le noyau des cellules infectées (Haeberlé & Stussi- Garraud, 13
  • 20. Introduction ______________________________________________________________________ Figure 4 : Protoplastes préparés à partir de cellules de mésophylle de Chenopodium quinoa dans les conditions décrites dans Matériel et méthodes. 14
  • 21. Introduction ______________________________________________________________________ 1995). Une seconde ORF, l'ORF N, est exprimée lorsque des délétions dans le gène codant pour la protéine P25 rapprochent l'AUG initiateur de cette petite ORF de la séquence 5' non codante (Jupin et al, 1990). L'expression de la protéine très hydrophobe codée par ce gène N entraîne l'apparition de lésions nécrotiques sur les feuilles des plantes hôtes infectées. Enfin, une troisième ORF a été mise en évidence et code pour une protéine potentielle de 4,6 kDa qui serait exprimée à partir d'un RNA subgénomique détecté dans les feuilles infectées et qui est redondant avec les 545 derniers nucléotides du RNA 3 (Bouzoubaa et al, 1991). Le rôle de ce peptide est actuellement en cours de caractérisation au laboratoire. Des résultats préliminaires montrent que des délétions réalisées dans cette ORF inhibent le mouvement à longue distance du virus dans Beta macrocarpa (Tamada, communication personnelle) alors que des mutations ponctuelles introduisant des codons de terminaison restent sans effet (Guntz-Lauber, communication personnelle). Cette observation semble indiquer que c'est la séquence nucléotidique de ce RNA subgénomique qui est directement impliquée dans ce phénomène de transport à longue distance et non pas son produit d'expression. Le RNA 4 (1467 nt) code pour une protéine de 31 kDa (Bouzoubaa et al, 1985) qui joue un rôle prépondérant dans la transmission du virus par le vecteur fongique (Koenig & Burgermeister, 1989 ; Tamada & Abe, 1989). Mon travail de thèse a consisté plus particulièrement à caractériser le rôle des produits des gènes 3' proximaux du RNA 2. Pour cela nous disposions au laboratoire des clones cDNA complets des 4 RNA viraux (Quillet et al, 1989) permettant d'obtenir des transcrits infectieux. A partir de ces clones, nous avons construit des mutants ponctuels ou des mutants de délétion dans l'une ou l'autre des séquences codantes, puis nous avons étudié in vivo l'effet de ces modifications. Ainsi, dans le premier chapitre, j'aborderai les problèmes du mouvement du virus de cellule à cellule et je démontrerai que les protéines codées par les trois cistrons du triple gene block sont impliquées dans ce processus. Dans le chapitre 2, je présenterai les résultats concernant le rôle de la protéine P14, codée par l'ORF VI du RNA 2, dans la réplication et dans la traduction du 15
  • 22. Introduction ______________________________________________________________________ RNA 2. Le 3ème chapitre traitera des stratégies antivirales qui peuvent être envisagées pour bloquer la réplication du BNYVV. J'y montrerai comment nous avons obtenu des RNA défectifs interférants (ou RNA DI) à partir du RNA 2, RNA DI que l'on peut envisager d'utiliser comme outil de lutte contre ce virus. Enfin dans le chapitre IV, je décrirai des résultats préliminaires qui permettent d'affirmer que la protéine P237, codée par le RNA 1, est une polyprotéine susceptible d'être maturée au cours du cycle de multiplication virale par une activité protéasique associée à cette polyprotéine. 16
  • 23. CHAPITRE 1 : LES PROTEINES EXPRIMEES A PARTIR DU "TRIPLE GENE BLOCK" (TGB) SONT DIRECTEMENT IMPLIQUEES DANS LE MOUVEMENT DU VIRUS DE CELLULE A CELLULE. L'infection d'une plante par un virus à RNA passe, en général, par quatre étapes majeures. Dans un premier temps le virus doit pénétrer dans les cellules de l'hôte. Cette infection peut se faire par inoculation mécanique en provoquant une lésion au niveau des tissus de la plante ; elle peut également s'établir par l'intermédiaire d'un vecteur (aphide, nématode, champignon). Quand il est en place, le virus doit pouvoir se multiplier, multiplication qui sous entend la décapsidation du ou des RNA génomiques provenant de l'inoculum, leur traduction, leur réplication et finalement l'encapsidation des RNA néosynthétisés. Dans un troisième temps, le virus est amené à quitter le site d'infection pour migrer dans les cellules voisines. Finalement quand il atteint les vaisseaux conducteurs, il va pouvoir infecter le reste de la plante provoquant ainsi une infection systémique. La spécificité d'infection d'un virus pour un hôte particulier consiste donc à pouvoir réaliser toutes ces étapes.
  • 24. Résultats ______________________________________________________________________ Protéines de mouvement Paroi cellulaire Type TMV Réplication du virus ? protéines ? cellulaires RNA viral diffusion de néosynthétisé ? l'infection virale Protéines de Type Protéines de mouvement CPMV coque Figure I-1 : Représentation schématique des 2 types de stratégies qui semblent se dégager des études effectuées sur le mouvement de cellule à cellule des virus de plantes. Le premier mécanisme fait appel à une protéine de mouvement qui augmente la limite d'exclusion des plasmodesmes et qui permet une linéarisation des RNA viraux qui pourront ainsi diffuser sous forme de complexe ribonucléoprotéique. Cette stratégie est adoptée par le TMV. Le second mécanisme engendre une modification irréversible des plasmodesmes avec la présence de particules virales à l'intérieur de microtubules (c'est le cas du CPMV). 18
  • 25. Chapitre 1 ______________________________________________________________________ Avant de présenter les résultats obtenus dans l'étude des gènes responsables de la diffusion du BNYVV, je voudrais rappeler brièvement ce que l'on sait sur les différents mécanismes de diffusion de cellule à cellule de l'infection virale. I-Etat des connaissances sur les mécanismes de transport des virus. En raison de la présence de la paroi pectocellulosique qui entoure chaque cellule végétale, les possibilités de mouvement du virus de cellule à cellule sont très restreintes. Le seul passage possible est représenté par les plasmodesmes qui sont des communications intercellulaires assurant une continuité cytoplasmique entre 2 cellules et permettant ainsi des échanges de métabolites. Des études par micro injection de molécules fluorescentes de taille variable dans les cellules végétales ont permis de mettre en évidence la limite d'exclusion moléculaire (SEL ou Size Exclusion Limit) des plasmodesmes. Elle se situe entre 0,7 et 1 kDa ce qui correspond à peu près à un diamètre de 1,5 à 2 nm. (Goodwin, 1983 ; Tucker, 1982). Bien que la SEL soit relativement petite, Esau a montré, dès 1967, la présence de virus de la jaunisse de la betterave (BYV) au niveau des plasmodesmes de plantes infectées. Or le diamètre de ces virus à symétrie hélicoïdale est voisin de 10 nm, soit cinq fois supérieure à la SEL. D'autres virus à symétrie hélicoïdale tels que le potato virus X (ou PVX) (Allison & Shalla, 1974) et le barley stripe mosaic virus (ou BSMV) (Mc Mullen et al, 1977), ainsi que des virus à symétrie icosaédrique comme les lutéovirus (Gill & Chong, 1975 ; D'Arcy & De Zoeten, 1979) et les népovirus (De Zoeten & Gaard, 1969) ont pu être observés au niveau de ces structures. Compte tenu de leur SEL, il est évident que les plasmodesmes doivent donc subir des modifications structurales pour permettre le passage de ces virus (Robards & Lucas, 1990). A l'heure actuelle, 2 mécanismes majeurs (figure I-1) semblent être mis en jeu dans la diffusion de l'infection virale à savoir le mécanisme utilisé par le virus de la mosaïque du tabac (ou TMV) et d'autres tobamovirus et la stratégie employée par les comovirus, les népovirus et les caulimovirus. 19
  • 26. Résultats ______________________________________________________________________ 1-Stratégie utilisée par les tobamovirus. Les résultats majeurs ont été obtenus avec le TMV qui fut pendant longtemps le phytovirus le plus étudié sur le plan physico-chimique et biologique. Il code notamment pour une protéine de 30 kDa essentielle au mouvement du virus de cellule à cellule (Leonard & Zaitlin, 1982 ; Meshi et al, 1987). Des études par microscopie électronique ont permis de montrer que des plantes infectées par ce virus ont des plasmodesmes ayant une SEL supérieure à celle d'une plante saine. Elle passe de 1,5 nm à 5-6 nm. Des plantes transgéniques exprimant la protéine P30 de manière constitutive présentent même une SEL de 6 à 9 nm (Deom et al, 1990 ; Wolf et al, 1989). La protéine P30 a pu être localisée au niveau de ces plasmodesmes (Ding et al, 1992 ; Atkins et al, 1991 ; Moser et al, 1988, Tomenius et al, 1987) sans pour autant en modifier la structure (Shalla et al, 1982). Cette augmentation de la SEL n'est pourtant pas suffisante pour permettre le passage du TMV d'une cellule à une autre, les particules virales en bâtonnet ayant un diamètre moyen de 18 nm et l'encombrement moyen d'une molécule de RNA étant de 10 nm (Gibbs, 1976). La protéine P30 a également la propriété de fixer les acides nucléiques (Citovsky et al, 1990). Ces propriétés ont donc amené Citovsky et collaborateurs (1992) à proposer un modèle dans lequel la protéine P30 joue un rôle double dans le mécanisme de mouvement : (1) elle augmente la SEL des plasmodesmes d'un facteur 3 à 4 et (2), en se fixant au RNA, elle lui confère une structure déroulée qui lui permet de passer au travers des plasmodesmes. Ceci sous-entend que le mouvement de cellule à cellule se fait sous forme de complexe ribonucléoprotéique sans intervention de la protéine de capside. L'intervention de facteurs cellulaires n'a pas encore été démontrée pour le moment. 2-Stratégie utilisée par les comovirus, les népovirus et les caulimovirus. Ce second mécanisme a été plus particulièrement étudié pour un comovirus : le cowpea mosaic virus (ou CPMV), un virus à génome bipartite qui exprime son information sous forme de polyprotéines qui sont ensuite maturées. L'information génétique de ce virus est portée par 2 RNA génomiques. Le B-RNA dispose de 20
  • 27. Chapitre 1 ______________________________________________________________________ l'information nécessaire et suffisante à la réplication car il est capable de s'auto répliquer dans les protoplastes (Goldbach et al, 1980). Par contre, en l'absence du M-RNA, le virus n'est pas capable d'induire une infection dans la plante. Une analyse détaillée a montré que non seulement les protéines 48K/58K, dont l'information est portée par la région 5' terminale du M-RNA, sont nécessaires au mouvement de cellule à cellule (Rezelman et al, 1982), mais également les protéines de capsides VP37 et VP23. Les protéines non structurales 48/58 K ont été localisées au niveau de structures tubulaires dans les plasmodesmes de plantes infectées (Van Lent et al, 1990) : ces structures modifient les plasmodesmes de façon irréversible et renferment des particules virales. Ces tubules peuvent également être observées au niveau de la membrane de protoplastes infectés (Van Lent, 1991). Enfin, plus récemment, grâce à des expériences d'expression transitoire, il a été possible de démontrer que la protéine de 48 K était, d'une part, la protéine de mouvement et, d'autre part, la seule protéine virale responsable de la formation in vivo de ces tubules (Kasteel et al, 1993 ; Wellink et al, 1993). Cependant, comme dans le cas de la stratégie utilisée par les tobamovirus, la participation de protéines cellulaires ne peut être exclue à l'heure actuelle. La formation de tubules et la présence de particules virales à l'intérieur de ces structures ont également été observées pour d'autres types de virus comme l'euphorbia mosaic virus (EMV), un géminivirus (Kim & Lee, 1992), le cauliflower mosaic virus (CaMV), un caulimovirus (Stussi-Garraud et al, 1994), le tomato spotted wilt virus (TSWV), un tospovirus (Kormelink, 1994) et le grapevine fanleaf virus (GFLV), un népovirus (Ritzenthaler et al, 1995). 3-Stratégie utilisée par les hordeivirus, les potexvirus et les furovirus. Enfin d'autres virus utilisent une stratégie de mouvement qui nécessite la synthèse de 3 protéines à partir de 3 gènes regroupés en triple gene block, mais, à l'heure actuelle, le mécanisme mis en oeuvre n'est pas encore élucidé. Cette stratégie est utilisée par le 21
  • 28. Résultats ______________________________________________________________________ BNYVV RNA 1 A CP RNA 2 A TGB RNA 3 A RNA 4 A WClMV CP A TGB BSMV RNA α AA RNA ß CP AA TGB RNA γ AA Figure I-2 : Organisation génétique du BNYVV, du WClMV et du BSMV. Domaine hydrophobe Séquence GDD caractéristique des polymérases virales Séquence GKS, site de fixation de nucléotides triphosphates CP Protéine de capside TGB Triple Gene block impliqué dans le mouvement du virus de cellule à cellule Protéine jouant un rôle dans la réplication du virus 22
  • 29. Chapitre 1 ______________________________________________________________________ BSMV) (Petty et al, 1990), un hordeivirus et le white clover mosaic virus (WClMV) (Beck et al, 1991), un potexvirus. Le BNYVV fait appel également à un ensemble de 3 gènes pour assurer la fonction de transport. Les ressemblances entres ces 3 virus ne s'arrêtent pas là ; il faut également noter des homologies de séquences importantes entre ces protéines, plus particulièrement au niveau des protéines codées par les 2 premiers gènes du TGB (Figure I-2). II-Rôle du Triple Gene Block dans le mouvement de cellule à cellule du BNYVV. L'inoculation mécanique de feuilles de Chenopodium quinoa par des transcrits du RNA 1 et du RNA 2 provoque des lésions chlorotiques localisées. Les RNA 1 et 2 du BNYVV sont donc nécessaires et suffisants aux fonctions de base du virus, à savoir la réplication, l'encapsidation et le mouvement de cellule à cellule de l'infection virale. Les ORF III, IV et V du RNA 2 du BNYVV sont organisées en triple gene block. La protéine P42 exprimée à partir de l'ORF III renferme une séquence GKS souvent associée aux hélicases. Les protéines P13 et P15 codées respectivement par les ORF IV et V contiennent des domaines hydrophobes. Les protéines P42 et P13 ont été localisées au niveau de fractions membranaires dans des plantes infectées (Niesbach-Klösgen et al, 1990). 1-Le Triple Gene Block du BNYVV est impliqué dans le mouvement du virus de cellule à cellule. a-Construction de mutants du TGB. Pour tous les RNA génomiques, nous disposons de clones cDNA complets à partir desquels il est possible de synthétiser in vitro des transcrits qui se sont révélés être infectieux lors d'une inoculation mécanique de feuilles de C. quinoa. Partant de ces constructions, nous avons pu réaliser des modifications au sein des RNA génomiques 23
  • 30. Résultats ______________________________________________________________________ CP RNA 2 A TGB mutant H A sauvage ACA CTA GTA GAG mutant ACA CTA GCT AGT mutant I A sauvage AT AGA G mutant AT AAC TCG mutant J A sauvage AGG AAT TCG mutant AGG AAT T AA TTC G Figure I-3 : Localisation des mutations introduites dans le triple gene block (TGB) du RNA 2 du BNYVV. Les sites de restriction utilisés pour introduire les modifications (Spe I pour le mutant H et Eco RI pour le mutant J) sont représentés en rouge. Les nucléotides insérés sont soulignés. 24
  • 31. Chapitre 1 ______________________________________________________________________ afin de pouvoir étudier le rôle des différents gènes. Par mutagénèse dirigée, nous avons construit les mutants décrits figure I-3. Pour obtenir le mutant H, nous avons linéarisé le plasmide pB218 en un site Spe I, puis, par l'utilisation du fragment de Klenow de la DNA polymérase, ce site a été rempli, générant ainsi, après religation, un plasmide pB218 ayant une insertion de 4 nucléotides au niveau de l'ORF III. L'utilisation d'un oligonucléotide mutagène nous a permis d'insérer 4 nucléotides (ACTC) dans le gène IV et d'obtenir ainsi le mutant I. Enfin, pour construire le mutant J, il nous a fallu faire une digestion partielle Eco RI du plasmide pBF14 suivie d'un remplissage du site de restriction par le fragment de Klenow de la DNA polymérase. Après ligation, le clone obtenu dispose d'une insertion de 4 nucléotides. Pour tous les mutants décrits ci dessus, l'insertion de 4 nucléotides génère un changement du cadre de lecture, l'apparition d'un codon stop et donc la synthèse de protéines tronquées non fonctionnelles. b-Etude de l'effet des mutations introduites dans le TGB. Afin de vérifier si les protéines codées par le TGB jouent un rôle dans la réplication, les transcrits correspondants à ces différents mutants ont été coinoculés avec du RNA 1 (nécessaire à la réplication) à des protoplastes de C. quinoa. Après 48 heures de culture, les RNA totaux ont été extraits puis analysés par hybridation moléculaire en utilisant des sondes spécifiques des RNA 1 (pB12 : nt 4740 à 6560) et 2 (pB21 : nt 2335 à 3793). Nous avons ainsi pu constater qu'en l'absence des protéines P42 (mutant H), P13 (mutant I) et P15 (mutant J) fonctionnelles le virus était encore capable de se répliquer (voir publication 1, figure 4, pistes 2, 3 et 4). Les mutations introduites dans ces 3 gènes n'altèrent donc pas une structure impliquée en cis dans la reconnaissance par le complexe de réplication. Pour tester l'impact des modifications introduites dans le TGB sur la diffusion de l'infection virale, les différents mutants ont ensuite été transcrits et coinoculés avec du RNA 1 à des feuilles de C. quinoa. Une semaine après l'infection, alors qu'il apparaît 25
  • 32. Résultats ______________________________________________________________________ des symptômes chlorotiques classiques sur les feuilles inoculées par du RNA 1 et 2 sauvage, P75 CP 54 kDa P13 P14 RNA 2 A 4,6 kb P42 P15* TGB nt 2324-3789 pB21 A nt 638 à nt 3949 à 2081 ² BB nt 2078 à 4481 ² AS 2715 218Bg 2 sub c A 0,7 kb B 2 sub b A 1,4 kb 2 sub a A 2,6 kb Figure I-4 : Localisation (A) des sondes riboprobes utilisées pour la mise en évidence des RNA subgénomiques (B). (* le produit d'expression du gène V n'a jamais pu être détecté in vivo). 26
  • 33. Chapitre 1 ______________________________________________________________________ les feuilles inoculées en présence des mutants du TGB ne présentent pas de lésions. L'analyse par hybridation moléculaire des RNA extraits de ces feuilles ne permet pas de mettre en évidence de RNA viral (Voir publication 1, figure 2, pistes 3, 4 et 5). On peut donc conclure que les protéines du TGB sont toutes les 3 essentielles au mouvement de cellule à cellule de l'infection virale. En absence de mouvement, il est impossible de détecter une infection qui reste limitée aux seules cellules initialement infectées. 2-Les protéines P42 et P13 du Triple Gene Block sont exprimées à partir de RNA subgénomiques. Pour exprimer des protéines codées par des cistrons internes d'un RNA génomique, les virus de plantes ont élaboré de nombreuses stratégies comme : (1) le mécanisme de "terminaison-réinitiation" où les ribosomes, après avoir traduit une ORF glissent sur le messager jusqu'à ce qu'ils rencontrent un nouvel AUG initiateur (Kozak, 1989) ; (2) le "leaky scanning" où les ribosomes initient la traduction au niveau du premier AUG, mais également au niveau d'un autre AUG plus en aval si le premier AUG n'est pas dans un contexte favorable (Kozak, 1989) ; (3) le mécanisme "d'entrée interne" quand les ribosomes reconnaissent une séquence au sein d'un RNA génomique (Pelletier & Sonnenberg, 1988) ; (4) la translecture obtenue par suppression d'un codon stop (Ziegler et al, 1985) ; (5) le changement de cadre de lecture ou frame shift (Brault & Miller, 1992), enfin (6) l'utilisation de RNA subgénomiques où le gène à exprimer se trouve localisé à l'extrémité 5' du RNA messager. Pour mettre en évidence la présence de RNA subgénomiques correspondant aux cistrons 3' proximaux du RNA 2, nous avons inoculé des feuilles de C. quinoa ou une autre plante hôte Tetragonia expansa avec du BNYVV isolat Stras 12 contenant les RNA 1 et 2. Lorsque les lésions apparaissent, les RNA totaux sont extraits puis analysés par hybridation moléculaire en utilisant des sondes ribonucléiques correspondant à des séquences internes du RNA 2 (figure I-4). L'utilisation d'une sonde ∆AS correspondant à l'extrémité 3' terminale du RNA 2 (nt 3949 à 4481) nous a permis de mettre en évidence 4 bandes ayant une taille de 0,7 kb pour le RNA 2sub c, 1,4 kb pour le RNA 2sub b, 27
  • 34. Résultats ______________________________________________________________________ 2,6 kb pour le RNA 2sub a et enfin 4,6 kb pour le RNA 2 complet (voir publication 1, figure 5, piste 4). Lorsque l'on utilise d'autres sondes, seule l'une ou l'autre de ces bandes apparait après autoradiographie. Ainsi la sonde 218Bg (nt 2078 à 2715) ne révèle que le RNA 2sub a et le RNA 2. Enfin la sonde ∆BB (nt 638 à 2081) ne s'hybride qu'au RNA génomique. La taille de ces différents RNA subgénomiques correspond aux tailles attendues pour des RNA permettant l'expression de la protéine P42 (RNA 2sub a), de la protéine P13 (RNA 2sub b) et de la protéine P14 (RNA 2sub c). Pour la protéine P15, aucun RNA subgénomique n'a pu être mis en évidence. Pour expliquer cela, 2 hypothèses peuvent être émises : soit la synthèse du RNA subgénomique est très faible, soit la protéine P15 est exprimée sous forme d'une protéine de fusion P13-P15. Ceci impliquerait alors un changement de cadre de lecture de l'ORF IV. Dans ce cas, la synthèse de la protéine P13-P15 se ferait à un taux très faible, ce qui expliquerait pourquoi elle n'a pas encore pu être détectée in vivo en utilisant un sérum anti P13. III-Conclusions et perspectives. Nous avons montré dans ce chapitre que les protéines exprimées à partir du TGB étaient toutes les 3 essentielles au mouvement du virus de cellule à cellule. En leur absence, l'infection d'une plante ne peut avoir lieu. Nous avons également montré que l'expression de 2 des 3 protéines au moins se faisait à partir de RNA subgénomiques. Ces résultats vont dans le sens d'observations faites pour d'autres virus comme le WClMV, un potexvirus (Beck et al, 1991) et pour le BSMV, un hordeivirus (Petty et al, 1990). Des études ont été entreprises au laboratoire, afin de mieux comprendre le rôle de ces 3 protéines dans le mouvement de cellule à cellule. Les résultats préliminaires indiquent que la protéine P42 est dotée d'une activité ATP binding à l'image de la protéine de 58 K codée par le RNA ß du BSMV (Jackson et al, 1991). Enfin, comme dans le cas de la protéine de coque d'AMV (Baer et al, 1994), il semblerait que 28
  • 35. Chapitre 1 ______________________________________________________________________ l'extrémité N-terminale de la protéine P42 soit indispensable à l'activité de fixation des acides nucléiques (C. Bleykasten, communication personnelle). Des études d'interaction entre les 3 protéines du TGB ont également été initiées en utilisant la technique "double hybride" (Hope & Struhl, 1986 ; Keegan et al, 1986 ; Ma & Pasthne, 1987). En effet, les protéines P13 et P42 ont été retrouvées au niveau de fractions membranaires (Niesbach- Klösgen et al, 1990). Or, seule la protéine P13 est dotée de régions hydrophobes pouvant faciliter l'ancrage au niveau des membranes. Pour expliquer la colocalisation membranaire de la protéine P42, on peut donc imaginer des interactions entre cette protéine et la protéine P13. 29
  • 37. Publication n°1 EFFICIENT CELL TO CELL MOVEMENT OF BEET NECROTIC YELLOW VEIN VIRUS REQUIRES 3' PROXIMAL GENES LOCATED ON RNA 2 D. Gilmer, S. Bouzoubaa, A. Hehn, H. Guilley, K. Richards and G. Jonard. Virology (189, 40-47) (1992)
  • 47. CHAPITRE 2 : ETUDE DE LA PROTEINE P14 CODEE PAR L'ORF 3' PROXIMALE DU RNA 2 DU BNYVV. I-Mise en évidence du rôle de la protéine P14 dans le cycle de multiplication du BNYVV. 1-Des mutations introduites dans le gène VI du RNA 2 engendrent une diminution du taux de réplication des RNA viraux. (publication n°1) Dans le chapitre précédent, nous avons montré que les trois protéines codées par le TGB sont nécessaires au mouvement à courte distance du virus. Dans ce deuxième chapitre, nous allons nous intéresser plus particulièrement au rôle de l'ORF 3' proximale du RNA 2 (encore appelée ORF VI) dans le cycle de multiplication du BNYVV. Cette ORF code pour une protéine de 14 kDa qui a été localisée par immunochimie au niveau de la fraction cytosolique (Niesbach-Klösgen et al, 1990) et qui est exprimée à partir d'un RNA subgénomique, le RNA 2sub c. Pour essayer de mieux comprendre la fonction de cette protéine dans le cycle de multiplication viral, nous avons utilisé la même approche
  • 48. Résultats ______________________________________________________________________ TGB P75 RNA 2 CP P13 P14 A P42 15 kDa nt 4043 mutant 3722 ATG GAG ATC TGG TAG nt 4043 nt 4078 mutant 4003 GGT TGA TGC nt 4043 nt 4148 mutant 3992 TGG TAA TTG Figure II-1 : Caractéristiques des mutants du RNA 2 n'exprimant pas la protéine P14. Les nucléotides introduits dans le génome viral sont écrits en rouge. Les codons stop qui apparaissent sont soulignés. 42
  • 49. Chapitre 2 _____________________________________________________________________ que précédemment dans l'étude du TGB, à savoir l'introduction de mutations dans l'ORF VI et l'analyse des conséquences au niveau biologique. a-Construction de mutants n'exprimant pas la protéine P14. L'introduction de mutations dans la région 3' proximale du RNA 2 pouvait toucher des séquences impliquées en cis dans la réplication du RNA 2. C'est pourquoi, pour minimiser ce risque, nous avons multiplié les constructions et réparti les mutations tout au long de la séquence de l'ORF VI. Deux approches différentes ont été utilisées : la première a consisté à insérer un linker Bgl II de 10 nucléotides au niveau du site Sma I situé en position 4331, entraînant ainsi un changement du cadre de lecture (+1) (voir publication 1, figure 1) et donnant le mutant RNA 2-L. La seconde approche repose sur l'introduction de mutations ponctuelles (figure II-1) dans un fragment correspondant aux 824 derniers nucléotides du RNA 2 cloné dans le vecteur Bluescribe. Trois mutants ont ainsi été obtenus : (1) le mutant RNA 2-3722 (voir publication 1, figure 1) où 2 nucléotides ont été insérés en position 4050 ce qui a pour conséquence d'éliminer le 2ème ATG initiateur et d'introduire un changement du cadre de lecture qui entraîne l'apparition d'un codon stop. (2) Le mutant RNA 2-3992 où la substitution d'un nucléotide génère un codon stop en position 4148. (3) Le mutant RNA 2-4003 où l'introduction d'un T en position 4078 fait apparaître un codon de terminaison TAA. Toutes ces mutations entraînent soit l'absence de synthèse de protéine P14 (mutant 3722), soit conduisent à la synthèse d'une protéine P14 plus ou moins tronquée (mutants 3994 et 4003). Le fragment de 824 nt a finalement été réinséré dans le clone cDNA complet du RNA 2. b-Effet in planta des mutations introduites dans le gène VI. Pour analyser les effets des mutations introduites dans le gène VI, les différents mutants ont été transcrits puis coinoculés avec des transcrits du RNA 1 à des feuilles de C. quinoa. Huit à dix jours après l'infection, on voit apparaître des lésions ayant un 43
  • 50. Résultats ______________________________________________________________________ phénotype différent de celui des lésions provoquées par l'isolat sauvage : ces lésions sont 44
  • 51. Chapitre 2 _____________________________________________________________________ A Stras 123 Mutant 2-3722 B RN RN RN A A A RN 2- 2- 2- A2 37 39 40 22 92 03 RNA 1 RNA 2 1 2 3 4 Figure II-2 : Effets des mutations introduites dans le gène VI. (A) Symptômes observés sur des feuilles de C. quinoa inoculées avec l'isolat sauvage et le mutant RNA 2-3722 (B) Analyses par hybridation moléculaire des RNA totaux extraits des feuilles de C. quinoa : sur la piste 1 ont été déposés 1/20 des RNA totaux extraits des feuilles inoculées avec l'isolat sauvage Stras 123. Les pistes 2, 3 et 4 correspondent respectivement à la totalité des RNA extraits de feuilles inoculées par les mutants RNA 2-3722, RNA 2-3992 et RNA 2-4003. 45
  • 52. Résultats ______________________________________________________________________ petites et nécrotiques en leur centre (figure II-2-A). Afin d'analyser la quantité de RNA viral présent dans les feuilles inoculées, nous avons prélevé ces lésions ainsi que les lésions provoquées par les RNA viraux sauvages, en prenant garde de récupérer la même surface foliaire dans les 2 cas. Les RNA sont extraits en présence de tampon polysome, comme cela a été décrit dans le chapitre matériel et méthodes. La lecture de la DO260nm permet d'estimer la quantité de RNA total présent dans l'extrait et 300 ng sont déposés sur gel d'agarose en conditions dénaturantes. Après transfert sur membrane de nitrocellulose, les RNA sont analysés par hybridation moléculaire en utilisant des sondes ribonucléiques spécifiques complémentaires du RNA 1 (pB12 : nt 4740 à 6560) et du RNA 2 (pB21 : nt 2335 à 3793). Quel que soit le mutant analysé, on peut constater une forte diminution de la quantité de RNA 2 mutant par rapport au RNA 2 sauvage. La réplication du RNA 1 est également affectée mais dans des proportions plus faibles (publication 1, figure 2, pistes 6, 7, 9 et 10, et voir figure II-2, pistes 2, 3 et 4). Ces résultats suggèrent donc que la protéine P14 n'est pas essentielle à l'infection virale mais la favorise, soit en améliorant l'efficacité du mouvement de cellule à cellule, soit en stimulant la multiplication du virus. Pour discriminer entre ces 2 possibilités, nous avons inoculé ces mêmes mutants à des protoplastes de C. quinoa. c-Mise en évidence du rôle de la protéine P14 dans la réplication du BNYVV et la quantité de protéine de capside synthétisée. Les transcrits des différents mutants n'exprimant pas la protéine P14 ainsi que les transcrits du RNA 1 (nécessaire à la réplication) ont été coinoculés à des protoplastes de C. quinoa. Après 48 heures de culture, nous avons extrait et analysé les RNA totaux par hybridation moléculaire. Les résultats que nous avons obtenus révèlent une chute importante de la quantité de RNA 2 et une diminution beaucoup plus faible voire parfois nulle du signal correspondant au RNA 1 (voir publication 1, figure 4, pistes 5 et 6). Ces résultats qui sont tout à fait comparables à ceux obtenus sur plantes sont regroupés dans le tableau II-1 : le pourcentage d'inhibition de la réplication du RNA 2 en absence de synthèse de protéine P14 peut atteindre 85 à 98 % ; par contre ce pourcentage n'est plus 46
  • 53. Chapitre 2 _____________________________________________________________________ Accumulation par rapport au témoin sauvage Expérience n° Mutant RNA 1 RNA 2 2-4003 120 % 13 % 1 2-3992 150 % 14 % 2-3722 42 % 2% 2-4003 58 % 2% 2 2-3992 38 % 7% 3 2-4003 64 % 5% 4 2-4003 37 % 2% Tableau II-1: Effets des mutations introduites dans le gène VI sur la réplication des RNA 1 et RNA 2 de BNYVV. Synthèse de Réplication protéine de du RNA 2 coque RNA 1 + RNA 2 ++++ ++++ RNA 1 + RNA 2-4003 + + RNA 1 + RNA 2-4003 + RNA 2-F + ++++ RNA 1 + RNA 2-4003 + rep 14 + +++ Tableau II-2 : Bilan des expériences de complémentation démontrant que la protéine P14 a une action en cis sur la réplication du RNA 2 et en trans sur la synthèse de protéine de capside. 47
  • 54. Résultats ______________________________________________________________________ Figure II-3 : Cinétique de réplication des RNA viraux et de synthèse des protéines P14, CP et P42 dans des protoplastes de C. quinoa infectés par l'isolat Stras 12 de BNYVV. Les prélèvements ont été effectués au bout de 9, 16, 24 et 48 heures d'infection et les analyses réalisées par hybridation moléculaire et par immunoempreinte pour détecter les RNA viraux (A) et les protéines P14 (B), CP (C) et P42 (D) 48
  • 55. Chapitre 2 _____________________________________________________________________ que de 63 % dans le pire des cas pour le RNA 1. D'autres expériences ont également montré que la réplication du RNA 3 est peu ou pas affectée par l'absence de protéine P14. L'autre effet significatif des mutations introduites dans l'ORF VI est une diminution importante de la quantité de protéine de capside synthétisée (tableau II-2 et publication 2, figure 4-B, pistes 3 et 4) alors que la synthèse de protéine P25 codée par le RNA 3 n'est pas affectée (publication 2, figure 4-A, pistes 3 et 4). Enfin, pour expliquer la petite taille des lésions et leur phénotype nécrogène, on peut émettre l'hypothèse suivante. En absence de protéine P14, les taux de réplication des RNA viraux et de synthèse de protéine de coque sont considérablement abaissés ce qui peut se répercuter de manière directe ou indirecte sur la synthèse des protéines de mouvement du virus, ralentissant ainsi sensiblement le processus infectieux. Cet effet pourrait alors permettre à la plante de mettre en place un système de défense qui s'apparenterait, dans ce cas là, à une réaction d'hypersensibilité sévère caractérisée par l'apparition de lésions nécrotiques. 2-La protéine P14 joue un rôle en cis dans la réplication du RNA 2 et active en trans la synthèse de la protéine de coque. (publication n°2) Avant de décrire les expériences de complémentation qui nous ont permis de mieux comprendre le mécanisme d'action de la protéine P14 dans la réplication et dans la traduction du RNA 2, il était intéressant d'étudier la cinétique d'apparition de cette protéine ainsi que son rôle dans la synthèse de RNA de polarité négative. a-Cinétique d'apparition de la protéine P14 lors de l'infection de protoplastes de C. quinoa. Les cinétiques réalisées avec l'isolat Stras 12 montrent que la protéine P14 peut être détectée en western blot à partir de 16 heures (figure II-3-B, piste 3). Des études effectuées en parallèle sur la synthèse de protéine capsidaire et de la protéine P42 révèlent que toutes ces protéines apparaissent en même temps (figure II-3-C et D, piste 49
  • 56. Résultats ______________________________________________________________________ 3). Cependant au bout de 48 heures de culture, la synthèse de protéine P42 atteint un maximum alors que les protéines P14 et CP continuent à s'accumuler ; nous avons pu montrer dans d'autres expériences que l'accumulation de protéine de coque et de protéine P14 continuait jusqu'au temps 72 heures. Au delà de ce temps, le taux de mortalité des protoplastes devient trop important pour que les résultats obtenus puissent être pris en considération. Ces observations suggèrent que la synthèse de protéine P42 est donc régulée différemment des 2 autres protéines étudiées. Des observations analogues ont été faites par Davies et collaborateurs (1993) en ce qui concerne la protéine P25 synthétisée à partir de la première ORF du TGB du potato virus X (ou PVX). b-L'absence de protéine P14 a un effet inhibiteur sur la synthèse de RNA (-). Après avoir mis en évidence un effet négatif sur la synthèse des brins (+), nous avons cherché à savoir si l'absence de protéine P14 affectait également la synthèse des brins (-). Pour cela, les RNA totaux ont été extraits de protoplastes infectés après 36 heures de culture dans les conditions décrites dans le chapitre matériel et méthodes. La seule modification introduite dans le protocole expérimental consiste à précipiter l'ensemble des acides nucléiques en présence d'éthanol et d'acétate d'ammonium 2 M. Nous avons ainsi pu montrer qu'en l'absence de protéine P14, l'effet observé pour les RNA brin (+) se retrouve au niveau de la synthèse des RNA brins (-) (publication 2, figure 5-A et B) en provoquant une réduction importante de l'intensité des signaux plus particulièrement au niveau des brins (-) correspondant au RNA 2. c-La protéine P14 agit en cis sur la réplication du RNA 2. Dans les expériences décrites ci-dessous, nous avons entrepris de complémenter l'effet des mutations introduites dans l'ORF VI par l'apport de protéine P14 sauvage. Ces expériences de complémentation ont été réalisées de 2 façons différentes : 50
  • 57. Chapitre 2 _____________________________________________________________________ - Dans une première série d'expériences, nous avons utilisé le mutant RNA 2-F (figure II-4) caractérisé par une délétion de 935 nt au niveau de l'ORF II. Ce mutant est capable de se répliquer dans les protoplastes (voir publication 1, figure 4, piste 1 ; 1143 2077 RNA 2-F An RNA 2 sub c An 382 1688 tRep 14 An Protéine P14 Figure II-4 : Caractéristiques des transcrits RNA 2 F et tRep 14 exprimant la protéine P14 dans les expériences de complémentation. : Séquences 5' et 3' non codantes du RNA 3. : ORF VI dirigeant la synthèse de la protéine P14. : Protéine P14. . 51
  • 59. Chapitre 2 _____________________________________________________________________ 380 linker BamHI 1470 Bam HI Bam HI + P14 promoteur T7 pB6 (²ES) PCR ORF VI (+ sites Bam HI) Rep 14 P14 tRep 14 P14 An Figure II-5 : Représentation schématique de la construction du clone Rep 14. Après amplification par PCR, l'ORF VI du RNA 2 de BNYVV est introduit dans le clone cDNA du RNA 3 délété de toute l'information codante (pB6 (²ES). 53
  • 60. Résultats ______________________________________________________________________ publication 2, figure 1, piste 2) et permet la synthèse d'une protéine P14 native. Les expériences de complémentation ont consisté à coinoculer le mutant RNA 2-F avec le RNA 1 et le RNA 2-4003 n'exprimant pas la protéine P14. Ces expériences qui ont été répétées un grand nombre de fois n'ont jamais permis de déceler une stimulation de la réplication du RNA 2-4003 (publication 2, figure 1, piste 4) suggérant ainsi que la protéine P14 ne peut être efficace lorsqu'elle est apportée en trans. Cependant on peut imaginer une autre explication : la synthèse de protéine P14 à partir du RNA 2-F se ferait à un taux trop faible pour être efficace dans une action en trans. - C'est pourquoi, dans une deuxième série d'expériences, nous avons utilisé un transcrit exprimant la protéine P14 en grande quantité, le transcrit rep 14 (figure II-4) correspondant obtenu de la manière suivante (voir figure II-5) : le gène VI a d'abord été amplifié par PCR en utilisant des amorces contenant les sites de restriction Bam HI. Après digestion Bam HI, le produit PCR a été introduit dans le clone pB6 (∆ES) entre les séquences 5' (1 à 380) et 3' (1470 à 1773) non traduites du RNA 3 du BNYVV. Dans ce clone construit par Isabelle Jupin (Jupin et al, 1990), la séquence virale est placée sous le contrôle du promoteur T7 . Le produit de transcription rep 14 est capable de se répliquer dans les protoplastes lorsqu'il est inoculé en présence de transcrits du RNA 1. De plus ce transcrit est capable d'exprimer efficacement la protéine P14 (publication 2, figure 3-B, piste 4 et 5). Le transcrit rep 14 a donc été coinoculé avec les RNA 1 et 2- 4003 et, là encore, les résultats de ces expériences de complémentation ne révèlent aucune stimulation de la réplication du RNA 2-4003 (publication 2, figure 1, piste 6). On peut donc en conclure que la protéine P14 joue très certainement un rôle en cis sur la réplication du RNA 2 (voir tableau II-2). d-La protéine P14 stimule en trans la synthèse de la protéine de capside. Parallèlement à ces analyses par hybridation moléculaire, nous avons recherché par immunoempreinte la présence de protéine de coque. Nous avons ainsi pu mettre en évidence une seconde fonction liée à la protéine P14 : indépendamment de l'effet en cis sur la réplication, la protéine P14 peut stimuler fortement en trans, la synthèse de la 54
  • 61. Chapitre 2 _____________________________________________________________________ protéine de coque. En effet, le signal correspondant à la protéine de coque est beaucoup plus intense en présence de protéine P14 apportée en trans par le transcrit rep 14 (publication 2, figure 3-A, piste 5) qu'en son absence (publication 2, figure 3-A, piste 3) bien que le taux de réplication du RNA 2-4003 ne soit pas stimulé (publication 2, figure 2, piste 3 et 6 et tableau II-2). Pour expliquer ce résultat, nous avons émis l'hypothèse que la protéine P14 a une affinité pour une séquence spécifique du RNA 2 et favorise ainsi la traduction de la protéine capsidaire. C'est pourquoi nous avons entrepris des expériences d'expression transitoire en bombardant des feuilles de C. quinoa et de Nicotiana tabacum avec 2 types de vecteurs : l'un permet la synthèse de protéine P14 et l'autre renferme la séquence cible potentielle reconnue par la protéine P14, en l'occurrence la région 5' terminale de l'un ou l'autre RNA du BNYVV. Cette séquence cible est placée en amont d'un gène rapporteur permettant de visualiser la stimulation si celle-ci a lieu. Les caractéristiques de ces vecteurs sont les suivantes : - Les vecteurs permettant l'expression de la protéine P14 native ou tronquée ont été obtenus par insertion de la séquence nucléotidique correspondante dans le plasmide pMJD 82 (Dowson Day et al, 1994). Pour cela, nous avons amplifié, par PCR, le cistron de la protéine P14 sauvage ou mutée en utilisant une amorce 5' renfermant le site Nco I et un oligonucléotide correspondant à l'extrémité 3' du RNA 2. Ce produit PCR a ensuite été digéré par les enzymes Nco I et Stu I (site naturel localisé en position 4479 du RNA 2) puis inséré dans le vecteur pMJD 82 linéarisé par Nco I et Sma I. Nous avons ainsi obtenu les vecteurs pMJD-P14 exprimant la protéine P14 sauvage et pMJD- P14∆1 exprimant une protéine P14 délétée de 30 acides aminés. Ce mutant de délétion a été obtenu par une digestion à l'exonucléase III générant une délétion de 98 nt (nt 4286-4284) suivie d'une insertion d'un linker de 8 nucléotides permettant de récupérer la phase de lecture. Lorsque ce mutant du gène VI est introduit dans le RNA 2 et que le transcrit correspondant est inoculé à des protoplastes, on obtient des résultats analogues aux résultats obtenus avec les mutants ponctuels RNA 2-3722, -3992 et -4003. Le clone 55
  • 62. Résultats ______________________________________________________________________ pMJD-P14∆1 nous a servi de témoin négatif dans les expériences d'expression transitoire décrites ci-dessous. - Les vecteurs renfermant les séquences cibles ont été obtenus par insertion de produits PCR correspondant aux extrémités 5' non codantes des RNA 2, 3 et 4 du BNYVV (respectivement les 142, 442 et 377 premiers nucléotides) dans le vecteur pRT2-syn-LUC : les amplifications PCR ont été effectuées en utilisant des oligonucléotides renfermant un site Xho I pour l'amorce 5' et un site Nco I pour l'amorce 3'. Après digestion par ces 2 enzymes, les fragments ont été introduits dans le vecteur rapporteur pRT2-syn-LUC coupé par Xho I et Nco I. Les plasmides recombinants ainsi obtenus ont été appelés pRT-BN2-LUC, pRT-BN3-LUC et pRT-BN4-LUC. Les différents plasmides recombinants ont ensuite été cobombardés (un vecteur de type pMJD avec un vecteur de type pRT) sur des feuilles de C. quinoa et de N. Tabacum (voir matériel et méthodes). Vingt quatre heures après l'inoculation, la stimulation de l'activité luciférase a été analysée. Les résultats (publication 2, tableau 2) démontrent que la protéine P14 est en mesure de stimuler l'activité luciférase dans les 2 types de feuilles bombardées ; ce facteur de stimulation peut varier de 2,4 à 4,5 . Cependant, cette stimulation n'est pas spécifique d'une séquence présente dans la région 5' leader du RNA 2 car elle a lieu quelle que soit la séquence cible utilisée ; même le vecteur rapporteur renfermant uniquement la cassette de clonage montre une stimulation de l'activité luciférase en présence de la protéine P14. Cependant, le facteur de stimulation est plus faible que celui observé lors de la synthèse de protéine CP dans les expériences de complémentation dans les protoplastes où la protéine P14 est apportée en trans. Il est clair que ces expériences devront donc être reprises avec des séquences du RNA 2 du BNYVV allongées au delà de la séquence 5' leader si l'on veut observer une stimulation beaucoup plus significative. 3-Mode d'action de la protéine P14. Pour expliquer les résultats décrits ci dessus, nous avons proposé le modèle suivant (voir figure II-6) : dans les premiers instants de l'infection, les RNA décapsidés 56
  • 63. Chapitre 2 _____________________________________________________________________ CP P75 5' 3' Brin plus Brin moins 3' 5' Rôle au niveau de la RNA 2 sub c 5' 3' réplication Rôle au niveau (en cis) de la traduction P14 (en trans) CP P75 5' 3' Brin plus Figure II-6 : Modèle permettant d'expliquer le rôle de la protéine P14 dans le cycle de multiplication du BNYVV. 57
  • 64. Résultats ______________________________________________________________________ Synthèse de RNA brin + et de RNA subgénomiques 3' 5' - Complexe de réplication 5' 3' - + La protéine P14 naissante se fixe au complexe de réplication et reconnait une séquence sur le brin + néosynthétisé. Puis elle stimule la synthèse de RNA brin -. 3' - + + - Figure II-7 : Modèle proposé pour expliquer le rôle en cis de la protéine P14 dans la réplication du RNA 2. 58
  • 65. Chapitre 2 _____________________________________________________________________ de polarité positive provenant de l'inoculum, sont traduits permettant, entre autre, la synthèse de RNA polymérase RNA dépendante. Cette enzyme va permettre la formation d'un complexe de réplication induisant, à un taux que nous allons qualifier de basal, la synthèse de RNA de polarité négative. Ces RNA (-) servent ensuite de matrice pour la formation des RNA complémentaires génomiques et subgénomiques. Puis la protéine P14 néosynthétisée à partir du RNA 2sub c pourra stimuler en cis la synthèse de nouveau brin moins à partir desquels se fera une synthèse massive de RNA génomiques. Cet effet en cis est assez peu courant et mérite que l'on s'y attarde un peu plus : comme on peut le voir sur la figure II-7, le RNA de polarité négative sert de matrice à la synthèse de RNA génomique, mais également à la synthèse de RNA subgénomique. Celui ci pourra être pris en charge, durant sa synthèse par les ribosomes pour initier la production de protéine P14. Dans ces conditions, on aura un couplage réplication/traduction. La protéine P14 ainsi synthétisée pourra ensuite reconnaître une séquence spécifique dans la région 3' terminale du RNA brin plus génomique et stimuler ainsi la synthèse de nouveaux brins de RNA de polarité négative. On peut imaginer que, durant sa synthèse, un site cryptique de la protéine P14 reconnaît une séquence spécifique du RNA 2. Le masquage de ce site sur la protéine mature pourrait expliquer pourquoi la protéine P14 apportée en trans reste sans effet sur la réplication du RNA 2. Après avoir stimulé en cis la synthèse de RNA brin moins, la protéine P14 qui commence à s'accumuler dans la cellule pourra alors induire en trans la synthèse de la protéine de coque. Pour mieux comprendre l'intérêt d'un tel système, il faut se rappeler que la plupart des virus de plante expriment leur protéine de coque à partir d'un RNA subgénomique (TMV, AMV, etc...) ou alors par l'intermédiaire d'une polyprotéine maturée (CPMV, GFLV, etc ...). Ces 2 systèmes permettent une régulation relativement facile de la production de la CP. Par contre dans le cas du BNYVV, du BSMV, un hordeivirus ou du TRV, un tobravirus, le cistron codant pour la protéine de coque est localisé en 5' d'un RNA génomique et sera donc traduit en premier. Si tel est le cas, la présence de protéine CP dès le début du cycle de réplication devrait favoriser la 59
  • 67. Chapitre 2 _____________________________________________________________________ A 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120 Hydrophilicité (KD) Probabilité de surface B ATGGGGATGGTAGATAGTTTGTGCGTGTTTGTTGGTCGAGTCATAACTGAGGGATCTGAA M G M V D S L C V F V G R V I T E G S E AGTGTTGAGGGTGTGGAAAGGTTTTCCATTAAGTTTAGTGAGTGGAAATTGTTCACCATC S V E G V E R F S I K F S E W K L F T I GCGGTGTTTGTTGAATATCGTGAGTTAGGTGAGAAAGAGTGCAGTTTGAAGGATGCTGGT A V F V E Y R E L G E K E C S L K D A G AGATTACACTTTAATGTGTCATGTGTGAAATGCTGTCAAAAACTTAAATGCAAGAAACAA R L H F N V S C V K C C Q K L K C K K Q AATAAAAATCATAGTAAACACGTCCAAAATGGATATTTACGCAAGGTACGTAATTTTTCC N K N H S K H V Q N G Y L R K V R N F S ATTTTAGGTGTTTGCGGTGATTGTTGTGAGTCTTTTACACTCGCGGACGAAAAACCTCAT I L G V C G D C C E S F T L A D E K P H GTTATTGTCGATCCTGAGGTGTAA V I V D P E V * Figure II-8 : Caractéristiques de la protéine P14 codée par l'ORF VI du RNA 2. A : Profil d'hydrophilicité selon Kyte & Doolittle (1982) et probabilité de surface des acides aminés : ces profils ont été obtenus en utilisant le logiciel de prédiction de structure "plotstructure" de UWGCG. B : Séquence nucléotidique de l'ORF VI du RNA 2 et structure primaire de la protéine P14 correspondante. 61
  • 68. Résultats ______________________________________________________________________ A B K80 K79 C72 C106 Zn C69 C109 E118 K119 Figure II-9 : (A) Comparaison de séquence entre l'ORF 6 du RNA 2 du BNYVV et un certain nombre de papillomavirus (Koonin et al, 1991). HPV 1a, human papilloma virus type 1a ; BPV2, bovine papillomavirus type 2 ; DPV, deer papilloma virus ; CRPV, cottontail rabbit papilloma virus. + correspond à des acides aminés hydrophobes et * désigne des acides aminés du BNYVV faisant partie de la séquence consensus. (B) Structure en doigt de zinc hypothétique de la protéine P14 du BNYVV. Les acides aminés représentés correspondent aux mutants alanines décrits dans le chapitre II, paragraphe III. 62
  • 69. Chapitre 2 _____________________________________________________________________ RNA génomiques provenant de l'inoculum et empêcher ainsi la multiplication du virus. Or, à la lumière des résultats obtenus, le rôle bifonctionnel de la protéine P14 permettrait une régulation temporelle du processus d'infection virale : au début de l'infection virale, la protéine P14 serait intégralement utilisée pour stimuler la réplication des RNA viraux ; dans un deuxième temps son accumulation stimulerait la synthèse de protéine capsidaire et donc l'encapsidation des RNA viraux néosynthétisés. II-Mise en évidence de l'importance des résidus cystéines 69, 72, 106 et 109 dans l'activité de la protéine P14. La protéine P14 est un polypeptide de 126 acides aminés très riche en cystéines (8 %) et en lysines (10 %) et dont la séquence est présentée figure II-8-B. Bien que codée par une ORF localisée à l'extrémité 3' du RNA 2, la protéine P14 présente très peu d'homologies avec d'autres protéines riches en cystéines également exprimées à partir d'ORF localisées en 3' de RNA génomiques d'autres phytovirus comme le BSMV ou encore le TRV. Par contre, des comparaisons de séquences (Koonin et al, 1991) (figure II-9) montrent une homologie non négligeable entre cette protéine P14 et la protéine E6 des papillomavirus, une protéine impliquée dans la transactivation de la transcription du génome viral grâce à la présence d'une structure en doigt de zinc (Lamberti et al, 1990). Avant d'initier une étude fine des acides aminés essentiels à l'activité biologique de la protéine P14, nous avons effectué des prédictions de structure à l'aide d'un programme informatique "plotstructure" de UWGCG et les résultats sont décrits figure II-8-A. L'examen du profil de probabilité des acides aminés d'être en surface de la protéine P14 (figure II-8-A) révèle l'existence de 2 domaines : ces 2 domaines sont situés au voisinage des acides aminés 80 et 120, le premier domaine très hydrophile est encadré de résidus cystéines conservés chez les papillomavirus. Ces observations ainsi que les résultats déjà obtenus par U. Niesbach-Klösgen (1990) et montrant que la protéine P14 63
  • 70. Résultats ______________________________________________________________________ A B C Figure II-10 : Symptômes induits par le mutant RNA 2 (E118-K119) (A), le mutant RNA 2 (K79-80) (B) et les mutants RNA 2 (C106-109) ou RNA 2 (C69-72) (C) inoculés à des feuilles de C. quinoa. 64
  • 71. Chapitre 2 _____________________________________________________________________ était capable de fixer le zinc, permettent de proposer, pour cette région très hydrophile comprise entre les acides aminés 69 et 109, l'existence d'une structure en doigt de zinc qui est représentée figure II-9-B. 1-Construction de mutants alanine (Giesman-Cookmeyer & Lommel, 1993). Pour vérifier l'importance de certains résidus aminés, nous avons entrepris de construire des mutants ponctuels dans lesquels ces acides aminés sont remplacés par des alanines. Ces mutations concernent plus précisément des acides aminés supposés en surface tels que les lysines 79, 80 et 119 et l'acide glutamique 118 (figure II-8) ou alors des cystéines (69, 72, 106 et 109) potentiellement impliquées dans une structure en doigt de zinc. Nous avons ainsi obtenus les mutants pB2(C69-72), pB2(C106-109), pB2(K79-80) et pB2(E118-K119). 2-Propriétés biologiques des mutants alanine. Afin de tester l'effet de ces modifications sur la réplication du virus in planta, nous avons transcrit les différents clones obtenus et nous les avons coinoculés à des plantes en présence de transcrits correspondant aux RNA 1 et RNA 3. Après une dizaine de jours d'infection, nous avons observé 3 types de lésions (figure II-10). (1) Des lésions de type sauvage, chlorotiques et de grande taille pouvant diffuser le long des nervures avec le mutant pB2(E118-K119). Ces lésions sont tout à fait semblables à celles observées avec un isolat sauvage. (2) Des lésions chlorotiques de taille beaucoup plus petite avec le mutant pB2(K79-80). (3) Des lésions nécrotiques avec les mutants pB2(C69-72) et pB2(C106-109) ; ces lésions sont analogues aux lésions obtenues avec les mutants n'exprimant pas la protéine P14 (figure II-2). L'analyse des RNA extraits des lésions révèle une diminution de tous les RNA viraux dans les lésions de type nécrotique (figure II-11-A, piste 4 et 5) et une diminution 65
  • 72. Résultats ______________________________________________________________________ RNA 2 (E118-K119)2 (C106-109) RNA RNA RNA 2 (K79-80) 2 (C69-72) RNA 2 A RNA 1 RNA 2 RNA 3 B CP C P14 1 2 3 4 5 Figure II-11 : Analyse par hybridation moléculaire des RNA extraits des lésions locales provoquées par les mutants alanine (A). les quantités de protéine de capside (B) et de protéine P14 (C) présentes dans ces mêmes lésions ont été mises en évidence par immunoempreinte. 66