1. Sécurité à la chasse : Les accidents liés à la chasse du sanglier
Bernard Boisaubert1, Jean-Charles Gaudin2
1
Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage – Délégation Régionale Nord-Est
2
Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage – Délégation Régionale Alpes Méditerranée
Corse
Résumé
La forte médiatisation des accidents de chasse et notamment ceux survenus lors de battues
au sanglier dans le Midi de la France dans les années 95 ont amené l’ONCFS, la FNC, les
FDC et l’ANCGG à constituer, dès 1996, un groupe informel de réflexions.
A cette date des d’objectifs précis ont été fixés afin de mettre en œuvre une étude technique
des accidents par le biais d’une enquête départementale conduite par les services
départementaux de l’ONCFS. Les synthèses annuelles tirées de ces enquêtes ont permis de
mieux caractériser les accidents et d’apporter, comme l’avait souhaité les partenaires, une
aide pédagogique aux responsables chargés de la formation au sein des services des FDC et
de l’ONCFS.
Les statistiques nationales établies sur 9 années de données montrent une légère tendance à
la diminution des accidents de 1997 à 2006. La gravité reste cependant stable avec en
moyenne par an 16 % d’accidents mortels, 47 % de graves et 37 % de légers. La battue
demeure le mode chasse occasionnant 1 accident sur 2. La chasse au grand gibier est
impliquée dans 54 % des cas et c’est, parmi le grand gibier chassé, le sanglier qui génère
dans 2 tiers des cas les accidents.
Dans ce contexte particulier de la chasse mythique du sanglier et sur la base des 9 années de
données, nous ne constatons pas de corrélation significative entre le tableau de chasse
annuel et le nombre d’accidents. Les accidents surviennent majoritairement dans le Sud de la
France. Les chasseurs postés sont les auteurs d’accidents dans 77 % des cas et le fusil à
canon lisse, certainement le plus utilisé, est représenté dans 66 % des incidents.
Depuis ces 10 dernières années, tous les acteurs liés à la chasse ont poursuivi leurs efforts
afin de réduire les accidents de chasse. Au niveau départemental, les FDC ont optimisé la
formation des jeunes chasseurs et réalisé des stages de recyclage pour les plus anciens. Des
mesures particulières visant à une sécurité plus efficace ont été instaurées dans les
règlements intérieurs des associations et dans certains arrêtés préfectoraux. Les schémas
départementaux de gestion cynégétique ont tous intégré cette problématique. Au niveau
national, les bilans annuels font l’objet de synthèses régionales afin d’apporter des éléments
concrets aux services chargés de la formation. Le mémento « Sécurité à la chasse » à l’usage
des organisateurs est en cours de réactualisation. Enfin le permis de chasser est aujourd’hui
parfaitement encadré, tant sur le plan de l’épreuve que de la formation.
Un gros travail a donc été fourni par toutes les parties concernées mais les circonstances des
accidents sont souvent récurrentes (accidents individuels, mauvaises manipulations de l’arme,
tirs sans identification …). D’importants efforts restent à réaliser par les organismes mais aussi
et surtout par les chasseurs dont le devoir, quelle que soit la situation, est de respecter
strictement toutes les règles de sécurité.
La vigilance reste donc de rigueur sur un dossier aussi sensible.
*
* *
Introduction
En 1995, une forte campagne médiatique met en exergue les accidents de chasse. Elle fait suite à
divers incidents dont certains mortels survenus au cours de chasse au sanglier dans le sud est de la
France.
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2. A la demande de J-M. BALLU, Directeur général de l’ONCFS à cette époque, un plan d’action est
élaboré au niveau national pour contenir et diminuer les accidents survenant en action de chasse.
Un groupe de travail informel rassemblant FNC, ANCGG, ONCFS, FDC et autres personnes est
constitué. Il est décidé de faire le point sur l’existant (des initiatives existent et méritent d’être
évaluées) et de former dans chaque Fédération départementale des chasseurs des « relais sécurité »
chargés de porter le message auprès des responsables de sociétés de chasse, organisateurs de
battues, etc…
Divers « outils » destinés à cette formation sont crées (montage diapositives, mémento à l’attention
des organisateurs de chasse, responsabilité civile et pénale des organisateurs et des auteurs
éventuels d’accidents, brochure ONCFS Sécurité, petit livre vert, etc…).
Des réunions inter-régionales avec théorie et pratique sont organisées au niveau national : le débat
Sécurité est ainsi lancé.
Parallèlement, le groupe convient de suivre en temps réel les accidents et de mettre en œuvre une
enquête permettant de comprendre (et de combattre ultérieurement) les causes les plus fréquentes .
Cette enquête est confiée aux services départementaux de l’ONCFS.
Les Fédérations départementales des chasseurs s’engagent sur ce thème et multiplient les actions de
sensibilisation auprès de leurs adhérents.
La commission nationale se réunit annuellement pour un bilan des résultats. A cette occasion, les
diverses expériences départementales sont partagées.
Ce sont les résultats de l’enquête annuelle qui vont servir de base aux développements suivants.
Evolution globale des accidents au niveau national (statistiques 1997-2006)
Statistiques
Les accidents (toutes gravités confondues) diminuent régulièrement depuis le début de l’enquête : 25
% de baisse enregistrée entre 1997-2000 et 2003-2006 (figure 1).
Suivi du nombre d'accidents de chasse de 1997 à 2006
300
259
250 232
Nombre d'accidents
200 223 201
169
186 167
150 181 168
100
50
0
97/98 98/99 99/00 00/01 01/02 02/03 03/04 04/05 05/06
Saisons de chasse
Figure 1 Nombre d’accidents de chasse enregistrés sur le territoire national entre 1997 et 2006
Même si l’effort doit se poursuivre, les résultats sont spectaculaires au niveau des accidents graves et
mortels : 35 % de baisse enregistrés pendant la même période (figure 2).
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3. E v o lu t io n d e s a c c id e n t s e n f o n c tio n d e la g r a v it é
140
126
120 116
104
100 96
94
Nombre d'accidents 93
84
7876 78
80 75 76
74
67 6868 68
61
60
44
40 40
40
31
27 29
26 25
23
20
0
9 7 /9 8 9 8 /9 9 9 9 /0 0 0 0 /0 1 0 1 /0 2 0 2 /0 3 0 3 /0 4 0 4 /0 5 0 5 /0 6
S a is o n s
M o r te ls G ra v e s L é g e rs
Figure 2 Gravité des accidents enregistrés entre 1997 et 2006
Les modes de chasse
Les accidents pour plus de 50 % surviennent au cours de chasse en battue, cependant dans 17,8 %
des accidents, de chasseurs se sont blessés aux-mêmes (figure 3).
Impact des modes de chasse (9 ans)
60,0 52,1
50,0
40,0
28,7
30,0
%
17,8
20,0
10,0 1,4
0,0
Battue Petit groupe Individuel Affût/Approche
Figure 3 Mode de chasse impliqués dans les accidents de chasse
Les espèces
Au niveau des espèces, les accidents ont lieu lors de chasse au grand-gibier (54,3 %) et surtout lors
de battues organisées pour le sanglier (figure 4).
PROPORTION DES ACCIDENTS SELON LE GIBIER
CHASSE (Moyenne sur 9 ans)
Grand gibier
54,3%
Petit gibier
45,7%
Figure 4 espèce impliquée lors des accidents de chasse
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4. Armes utilisées
Le fusil à canon lisse puisqu’il est sans doute le plus utilisé lors des battues de grand gibier est le plus
fréquemment à l’origine des accidents (60,4 %) et corrélativement c’est la balle qui provoque le plus
d’accidents au niveau des munitions figure 5).
ARME UTILISEE LORS DE L'ACCIDENT (Moyenne sur 9 ans)
Fusil mixte
4,9%
Carabine
34,7%
Fusil
60,4%
MUNITIONS TIREES DANS UN FUSIL LORS DE L'ACCIDENT
90 80,0
80
70
60
50
%
40
30
16,6
20
10 3,4
0
Plomb Balle fusil Chevrotine
Figure 5 Arme utilisée lors des accidents de chasse
Le contexte particulier de la chasse au sanglier
Evolution du nombre d’accidents
Toutes « gravités » confondues, le nombre d’accidents lors des battues organisées pour le sanglier
n’a pas suivi l’évolution du tableau, et est au contraire en baisse depuis 5 années figure 6).
Cette tendance témoigne des efforts de formation et de sensibilisation réalisés.
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5. Evolution du nombre d'accident et du tableau annuel sanglier
600000 70
Tableau 60
Accidents
400000 50
40
30
200000 20
10
0 0
1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004
Tableau 3E+0 3E+0 3E+0 4E+0 4E+0 5E+0 4E+0 4E+0
accidents 66 50 36 62 44 47 40 33
Figure 6 Tableaux annuels de prélèvement de sangliers et nombre d’accidents de chasse
Répartition régionale
Au niveau géographique, l’arc méditerranéen et alpin et le centre constituent les régions ou le taux
moyen d’accidents est le plus élevé.
Répartition des accidents par région administrative
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6. Toutes les régions ont été cependant concernées par un accident au cours des 9 dernières années.
Auteurs des accidents
Les auteurs des accidents survenant lors de la chasse au sanglier sont surtout les postés (77%) et
non pas les traqueurs comme la rumeur le laisse supposer (figure 7).
Auteurs des accidents lors de tirs sur sanglier (moyenne sur 9 ans)
Postés
77%
Traqueurs
23%
Figure 7 Auteurs des accidents survenant lors de chasse au sanglier
50 % des accidents sont dus à des tirs directs, en proportion équivalente aux ricochets.
L’application stricte des règles courantes de tir (identifier avant de tirer, respecter les angles de
sécurité, effectuer des tirs fichants, en fait apprendre à maîtriser ses émotions) est fondamentale.
Les efforts développés pour réduire les accidents
20 à 25 accidents mortels par an, cela est encore trop important, même si globalement la tendance
est à la baisse et notamment pour le sanglier ..la situation pourrait être beaucoup plus grave. Les
résultats obtenus jusqu’alors sont le reflet d’efforts d’information, de sensibilisation et de formations
développées à tous les niveaux.
Niveau départemental
Les initiatives prises dans ce domaine par les Fédérations départementales des chasseurs, les
associations spécialisées et les services de l’ONCFS sont nombreuses : formations des jeunes
chasseurs, recyclage des aînés, instauration de mesures réglementaires sur le thème de la sécurité,
campagnes d’information au niveau des responsables d’associations cynégétiques mais aussi auprès
des autres utilisateurs de la Nature.
Les accessoires de sécurité sont diversifiés et utilisés même quand cela n’est pas réglementairement
obligatoire (gilets, casquettes, bandeaux fluorescents notamment pour les traqueurs).
Des marques de vêtements de chasse ont intégré le concept et vendent des articles adaptés.
Les règles de sécurité sont de plus en plus rappelées au « rond » du matin ; chaque chasseur en
déclinant son identité et en signant le carnet (ou la feuille de battue) engage sa responsabilité.
Les zones traquées sont identifiées (panneaux chasse en cours) sur le terrain, l’information
concernant le calendrier des battues est accessible sur le site internet de la FDC, ou est disponible en
mairie.
Globalement, un gros effort de sensibilisation a été fait et le monde de la chasse a assumé ses
responsabilités.
Niveau national
La communication nationale FNC, ONCFS, ANCGG s’est étoffée et continue à travailler.
Elle analyse l’évolution des résultats fournis par l’enquête accident.
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7. Des projets de ré-actualisation des documents à disposition des gestionnaires et d’outil de
communication sont en cours.
Le thème de la sécurité a été intégré dans la formation et l’examen du permis de chasser que ce soit
au niveau des épreuves théoriques ou pratiques.
Un support éducatif spécifique à la sécurité (maniement des armes) est en cours d’élaboration.
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8. Conclusion
Les accidents surviennent essentiellement lors de battues organisées pour le grand gibier (et
notamment pour le sanglier).
Les circonstances des accidents sont connues et récurrentes (mauvaises identifications avant le tir,
non-respect des angles de sécurité, tir non fichant etc…).
De gros efforts d’information et de sensibilisation ont été faits (et continuent à l’être), à tous les
niveaux que ce soit dans le monde associatif, national, ou au niveau de l’établissement public.
Ces efforts doivent se renouveler et se poursuivre (maintenir un bon niveau de formation et de
responsabilisation de tous les acteurs, sensibiliser les jeunes chasseurs, jouer la transparence des
résultats, etc…).
Il convient de rester vigilant !
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