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Université Charles de Gaulle Semestre 6 
Lille 3 
Licence 3 Culture et Médias 
UFR Deccid 
TD 
NOUVELLES FORMES DE L'ECHANGE CULTUREL 
La reprise et l'interprétation dans le domaine musical 
dirigé par Pierre Grosdemouge 
Carole Péraste
Table des matières 
I.INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 
II.Définir un statut d'artiste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 
II.I.Entre chanteur populaire et artiste innovant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 
II.II.Être authentique : Être un artiste « un vrai », pas un imitateur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 
II.III.Relation à l'argent, un passionné non un mercenaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 
II.IV.L'Habitus d'artiste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 
III.Exister dans un espace collectif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 
III.I.Une équipe de travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 
III.II.Un environnement culturel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 
III.III.Un public . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 
IV.Le besoin de se démarquer : créativité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 
IV.I.Nécessité de se démarquer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 
IV.II.Innover en s'appropriant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 
V.Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 
VI.Annexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 
VI.I.Grille d'entretien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 
VI.II.Transcription entretien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 
VII.Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63 
CP 2/63
I. INTRODUCTION 
Art ou non art ? Aujourd'hui, il est difficile de déterminer dans quelle catégorie se prédestine 
une pratique, et pour pouvoir y parvenir, il faut d'abord se poser les bonnes questions et tenter d'y 
trouver des réponses. Le contexte actuel nous amène à observer l'émergence de nouvelles pratiques 
reconnues comme étant artistiques telles que le graff ou encore la photographie, cela nous permet de 
nous questionner sur la raison pour laquelle elles sont définies comme telles, par qui et selon quels 
critères. Passer d'un statut à un autre suppose des étapes, un processus pour le passage d'un statut 
ordinaire à celui artistique, cette transition se définit par l'expression anglo-saxonne 
artification1,c'est un terme encore peu utilisé dans le domaine artistique, il sera utilisé ici non selon 
sa connotation péjorative mais simplement dans l'idée de la transformation du non art en art. Pour se 
lancer sur ce terrain, il faut s'interroger sur les marges et les limites de la culture, sur ce qui rentre 
dans le champ culturel. Ces interrogations seront à même de nous renseigner sur ce processus 
d'artification mais aussi sur ce qu'il dévoile de la culture sociale. Difficile est de déterminer les 
critères que doit remplir une production ou une pratique pour être considérée, acceptée, reconnue. 
L'histoire des arts a permis de déterminer ce qui, à un moment donné de l'histoire, permettait de 
reconnaître l'art quand il était présent. La créativité, la précision, l'investissement, le 
désintéressement, l'authenticité, la question l'excellence... Aujourd'hui il est plus compliqué de se 
référer à ces critères pointilleux, car la culture sociale a évolué, les pratiques se sont diversifiées, 
multipliées avec le temps et les changements sociaux. 
La musique a depuis longtemps investi le domaine artistique, du moins selon la définition classique 
et commune de l'art. Bien que son statut artistique n'est globalement pas remis en cause, il s'agit tout 
de même d'un univers très vaste qui comporte de nombreux styles et pratiques, de l'instrument à la 
chanson en passant par le mixe et tout autre genre. Ainsi dans ce cadre toutes les pratiques n'y ont 
pas naturellement leur place, il s'agit d'une négociation complexe sur de nombreux points. Ainsi, 
tout n'est pas reconnu selon la même échelle de valeur, au coeur même de ce monde, une hiérarchie 
dans la légitimité des pratiques est établie. Comment ces dernières acquièrent elles un statut plus 
artistique et légitime que d'autres et pourquoi ? Dans cette étude, l'attention sera portée sur la 
1 N, Heinich, R.Shapiro, De l'artification 
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pratique de la reprise et l'interprétation dans le monde musical, et cela à partir d'un entretien mené 
auprès d'un chanteur, interprète de l'artiste Claude François. Dans un premier temps, je partais sur 
l'idée de réfléchir à la légitimité d'une pratique qui n'apporte rien de nouveau, qui ne fait pas preuve 
d'originalité. Autour de cette réflexion je voulais réfléchir sur le lien entre art et originalité, est qu'un 
artiste se doit d'être un créateur. Cette question permet de réfléchir aux qualités requises pour être 
« artiste » à part entière. 
Puis suite à l'entretien, à de nombreuses écoutes et une première réflexion sur le contenu, plus que 
de m'interroger sur la question précise de l'originalité, je me suis interrogée sur qui fait que la 
pratique de la reprise musicale est à même de rentrer dans le champs artiste. Plus simplement, 
Quelle légitimité pour la reprise et l'interprétation musicale dans le monde artistique ? 
Le chanteur interprète apporte une perspective et une position sur ce que serait l'art et quels seraient 
les critères d'appartenance à la sphère artistique, ce qui permettrait de déterminer si oui ou non une 
pratique peut être légitimée. Pour autant dans son discours, est à relever la difficulté qu'il a lui 
même à se définir et définir sa pratique. Trois grands thèmes sont porteurs de son discours et de son 
argumentaire, la question du statut du chanteur, la dimension collective d'une pratique artistique, et 
enfin le thème de l'originalité et du caractère exceptionnel dans l'art. C'est donc dans cet ordre que 
nous tenterons de réfléchir sur la pratique de la reprise musicale. 
CP 4/63
Dans cette étude, il s'agit d'un chanteur interprète, Noël La Gioia, ayant un statut d'intermittent, il 
côtoie fréquemment le milieu de la musique puisqu'il possède une équipe de travail, agent, 
producteur, arrangeur, il se produit dans différents dispositifs scéniques. Parallèlement, il a une 
activité professionnelle à plein temps dans un hôtel type village vacances, il y travaille de nuit ce 
qui lui permet de s'investir de façon entière dans sa carrière artistique. Il se décrit comme étant à la 
limite du basculement dans la sphère professionnelle du métier, il cherche à prouver son identité 
d'artiste en argumentant ce qui fait de lui un artiste à part entière. 
Faire de l'art ou être artiste n'est pas quelque chose de naturel mais résulte d'un processus constant 
et qui dépend en même temps du contexte historique et social, l'artiste d'aujourd'hui ne l'aurait pas 
forcément été il y a vingt ans par exemple. Il rejoint dans cette perspective, celle de Nathalie 
Heinich2 qui entend par artification, « ensemble des processus cognitif, sémantique, institutionnel, 
économique, affectif [...]aboutissant à faire franchir à un objet, à l’oeuvre, à une personne, l'auteur, 
la frontière entre non art et art. ». Pour Noël, prétendre se situer dans le champ artistique c'est 
d'abord posséder le statut d'artiste, faire partie d'un collectif, d'une unité mais c'est aussi se 
démarquer, montrer son côté unique et exceptionnel. 
II. Définir un statut d'artiste 
Définition ouverte de l'Unesco dans sa Recommandation relative à la condition de l'artiste (adoptée 
à Belgrade, le 27 octobre 1980) : 
« On entend par artiste toute personne qui crée ou participe par son interprétation à la 
création ou à la recréation d'oeuvres d'art, qui considère sa création artistique comme un 
élément essentiel de sa vie, qui ainsi contribue au développement de l'art et de la 
culture, et qui est reconnue ou cherche à être reconnue en tant qu'artiste, qu'elle soit liée 
ou non par une relation de travail ou d'association quelconque. » 
Pour définir une pratique qu'elle soit artisanale, artistique, professionnelle ou amatrice il est 
nécessaire de déterminer le statut de celui qui la pratique. Au cours de l'histoire, la définition du 
statut, passant de celui d'artisan pointilleux attaché à la précision et aux canons du moment, 
travaillant souvent sous les instructions d'un commanditaire (peinture et portrait) à l'artiste fou, 
dérangé dont les amateurs sont attirés par la bizarrerie, l'innovation, le désordre et commencent à 
vouloir toucher le génie. Ces transformations de statut sont à penser en même temps que la relation 
du praticien avec son activité, le fait qu'il soit par exemple, rémunéré ou qu'il travaille pour 
2 Nathalie Heinich, Roberta Shapiro (dir.), De l’artification. Enquêtes sur le passage à l’art, Paris, EHESS, coll. « Cas 
de figure », 2012, 336 p. 
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quelqu'un en particulier, qu'il s'y emploie par plaisir ou par vocation. Ainsi lors du basculement dans 
le champ de l'art, on observe un basculement des objets, de l'action, mais aussi des personnes. C'est 
ainsi qu'il est nécessaire de requalifier les choses, d'autant plus qu'aujourd'hui nombreux sont ceux 
qui postulent au statut d'artiste. 
II.I. Entre chanteur populaire et artiste innovant 
Dans le cas de Noël, il est difficile de déterminer son statut dans le monde musical, certes il se 
définit en terme d'artiste mais parfois aussi en tant que « chanteur populaire », « showman », 
« chanteur professionnel » ou encore, « passionné ». 
D'un côté, dans son discours il s'attache à la dimension populaire de sa pratique, le bien qu'il 
éprouve à faire plaisir aux gens, à les rassembler, à leur proposer ce qu'ils aiment. C'est ce 
qu'observait Perrenoud lors de son enquête sur les musicos, il explique que les musicos cherchaient 
« à se faire plaisir autant qu'à faire plaisir au gens ». Cet aspect de la pratique est à penser comme 
quelque chose qui apparaît nécessaire au bien être du musicien ou du chanteur. De cette manière, 
Noël insiste sur le côté vocationnel de sa pratique, « il ne peut pas s'empêcher de... », « quelque 
chose de viscéral ». 
D'un autre côté, il parle de sa pratique comme un investissement, un travail. Un artiste qui cherche 
qui travaille ses morceaux, qui tente de faire du nouveau, de se démarquer. Il s'est mis après quelque 
temps à écrire ses chansons même si, à l'heure actuelle la majorité d'entre elles « restent au fond 
d'un tiroir ». Il sait qu'il ne doit pas faire l'unanimité mais, il garde tout de même comme ambition 
de rassembler le maximum de monde mais désormais avec ses propre productions. 
Il se range dans des catégories, il s'attribue des statuts différents, qui changent en fonction du 
dispositif socio-esthétique dans lequel il se situe. Perrenoud3 qui étudie le cas des musicos explique 
que « plus que le genre musical, c'est le type de dispositif socio-esthétique dans lequel on est 
engagé[...] qui constitue le vecteur le plus puissant. » (Perrenoud, 2008:105). Le lieu où se produit 
l'artiste va permettre de lui attribuer une identité parfois plus prestigieuse à un endroit qu'un autre. Il 
peut être auteur, créateur dans certains contextes et simple exerçant dans d'autres lieux. 
Pour autant, pour affirmer sa légitimité et son statut dans le monde de l'art, il s'attache à sa 
nomination officielle d'auteur, étant inscrit à la Sasem. « je suis quand même 
enregistré à la Sasem j'ai un numéro de congé spectacle ce qui est 
3 Marc Perrenoud, Les musicos au miroir des artisans du bâtiment, Ethnologie française1/2008 (Vol. 38), p. 101-106. 
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quand même obligatoire pour être heu avoir heu comment je veux 
dire le congé de droit sur les chansons qu'on écrit et qu'on 
produit comme moi et heu mais je travaille dans un statut 
professionnel avec un esprit professionnel avec un contexte 
professionnel ». Il reste attaché à sa nomination officielle et au côté sérieux de sa pratique, il 
insiste sur le fait d'avoir laissé tomber le côté « chanteur de salle de bain ». 
II.II. Être authentique : Être un artiste « un vrai », pas un imitateur 
Le chanteur distingue, l'artiste qui a un « don », de celui qui travaille, affirmant que le premier 
aurait une légitimité plus naturelle en tant qu'artiste. Savoir faire quelque chose comme ça, comme 
quelque chose de présent en soi, et qu'on aurait qu'à exprimer sans effort. C'est ainsi qu'il insiste sur 
la distance qu'il met avec les imitateurs notamment ceux, imitant le défunt chanteur Claude 
François. Il met en avant le naturel de sa voix, et se défend de faire tout travail sur celle-ci, c'est 
ainsi, qu'il dénigre quelque peu celui qui s'acharne à faire quelque chose qui n'est pas naturel et 
spontané, authentique. Être artiste c'est rester fidèle à sa pratique, il ne ferait pas tout pour devenir 
un chanteur célèbre. 
« moi je trouve ça entre guillemets assez pathétique moi c'est 
mon point de vue donc voilà heu mais moi ma démarche, on m'a 
proposé, on m'a proposé il y a une quinzaine d'années, un 
producteur qui m'a proposé, je chantais je faisais une première 
partie au casino de Dunkerque, j'avais chanté en première partie 
de Herbert Léonard et je tombe sur un producteur qui me dit moi je 
veux bien te prendre parce que tu as la voix. Je t'ai vu chanter 
c'est pas mal ce que tu fais, mais je, je voudrais monter un show 
Claude François avec toi, il faudra que tu mettes une perruque 
blonde parce que tu n'as pas le physique de Claude François, bien, 
bien, bien, bien pour moi parce que si en plus...c'est un bonheur 
pour moi parce que je n'ai pas du tout le physique ça c'est, là on 
peut pas nier le contraire là je veux dire heu bon et il m'a dit 
heu à l'époque moi je peux te faire tourner dans le France voire 
même en Europe pour faire un grand show Claude François avec des 
danseuses et tout mais il va falloir que tu apprennes à danser, 
que tu mettes une perruque blonde, un costume paillettes et tout, 
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je veux dire non, j'ai dit non alors je suis passé peut être à 
côté de bien des choses mais je serai pas là aujourd'hui j'en suis 
persuadé. Je serai pas là aujourd'hui. » 
Il insiste qu'il n'en viendrait pas à faire n'importe quoi. Prétendre avoir le statut d'artiste nécessite 
selon Noël un minimum de transparence d'authenticité. Ainsi il marque la différence entre 
l'imitation et la reprise ou l'interprétation. « Je trouve ça pathétique ça c'est mon 
point de vue mais ces gens là ont le droit de vivre, le droit de 
chanter le droit de monter sur une scène de faire entre guillemets 
le pitre c'est leur problème » 
II.III.Relation à l'argent, un passionné non un mercenaire 
Le rapport à l'argent lui aussi peut jouer un rôle dans le statut d'un artiste, celui qui joue avec un 
certain désintérêt ou celui qui cherche le profit. Dans le cadre de la pratique de Noël, il ne s'agit pas 
d'une question financière même si l'argent qu'il gagne est selon lui un dû au regard de 
l'investissement qu'il met dans sa pratique. Pour autant, un artiste n'a selon lui pas à se préoccuper 
de cette question et cela pour deux raisons, soit il est : 
1. artiste amateur et il joue et se produit pour le plaisir, ou même parfois par « nécessité 
viscérale », 
2. il a dépassé le cap de l'amateurisme et il doit laisser cette question à ceux qui sont 
concernés c'est à dire le producteur. De cette manière il peut se donner entièrement à son 
art. 
De manière plus générale, sans parler d'amateurisme ou de professionnalisme, l'artiste pour Noël est 
celui qui est passionné. 
II.IV.L'Habitus d'artiste 
Dans le cadre de cet entretien Noël a conscience de ce qui est attendu dans le domaine de l'art 
reconnu, ainsi il joue dans les diverses catégories qu'il cite, se mettant dans la peau d'un chanteur 
populaire par exemple. Pour pouvoir se positionner dans ces cases, il a dû se faire sa place. Pour 
intégrer le cadre artistique il faut se créer un statut d'artiste. Perrenoud4 explique que « fluctuer dans 
le métier (côtoyer des dispositifs, des pratiques, cours de chant, communication musicale), côtoyer 
4 Marc Perrenoud, Les musicos au miroir des artisans du bâtiment, Ethnologie française1/2008 (Vol. 38), p. 101-106 
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des espaces à fort capital culturel permet de construire des identités différentes. » Cela permet de se 
constituer un habitus d'artiste. 
III. Exister dans un espace collectif 
Il y a nécessité de se situer du point de vue du statut pour savoir dans quel cadre évoluer, celui 
de l'art ou celui de ce qui n'est pas de l'art. Mais pour acquérir le statut d'artiste ou de pratique 
artistique, il faut évoluer au sein d'un environnement qui vous amène à le devenir. Nous parlions 
précédemment de l'influence des dispositif socio-esthétique, mais il y a aussi l'environnement 
humain et institutionnel qui a beaucoup d'influence. C'est ce dont parle Noël quand il évoque la 
nécessité d'évoluer dans un collectif. 
Noël insiste sur le fait que si il en est arrivé là aujourd'hui5 c'est bien grâce à l'équipe qui 
l'entoure. « ça reste un métier où il faut prendre et laisser et surtout 
un métier où il faut surtout bien se structurer en tant 
qu'artiste, déjà avoir une base. ». Pour lui il faut à la fois réunir trois choses : le 
talent, la chance, et la rencontre avec les bonnes personnes. Il est lucide sur le fait que des milliers 
de personnes en France chantent bien, voire mieux que lui mais ces personnes, n'ont pas toujours 
réuni ces trois facteurs, dans son cas il a réussi . 
III.I. Une équipe de travail 
Pour pouvoir s'investir sur la partie purement pratique de la chanson, il s'est équipé d'une équipe de 
travail : un agent, un producteur, un arrangeur et des danseuses. « surtout ce qui faut 
c'est avoir un structure comme j'ai une maison de production, une 
petite structure de production mais qui est sérieuse qui met les 
moyens heu compétents ». il considère presque sa pratique comme une oeuvre collective. 
Plus que chanter, il produit un show sur scène il ne s'agit pas que de sa voix mais aussi 
l'arrangement fait par son collègue ou les chorégraphies de ses danseuses qui viennent apporter 
leurs touches. Ainsi chacun se doit de trouver sa place dans son équipe. Cette notion de nécessité de 
l'apport de chacun est à rapprocher de la notion de de « solidarité mécanique » de Durkheim. Il 
s'agit bien d'un travail collectif, il a besoin de l'avis de chacun avant d'entreprendre chaque projet. 
5 Noël interprète de « Comme d'habitude » en duo avec Benoît Poolvoerde dans le film Podium 
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Ce travail d'équipe lui est d'autant plus nécessaire maintenant qu'il souhaite se singulariser en se 
lançant avec ses propres textes et ses propres fonds musicaux. En effet toute activité artistique à une 
dimension intrinsèquement collective, il y a toujours une de « redevabilité » entre les acteurs dans la 
mesure où l'un et l'autre donne des conditions de possibilité et d' « effectuation » du travail (A.Blanc 
et A.Pessin,2004:144). Une personne étant très douée, si elle n'est pas entourée par les bonnes 
personnes, risque de passer à côté de la réussite artistique et ne serait pas à même d'exploiter 
totalement son potentiel. L'artiste selon Noël doit être capable d'exposer son savoir faire, ce dernier 
en a conscience : 
« pour grandir, jpeux pas grandir tout seul, jpeux pas grandir tout 
seul dans mon coin tout ça et je sentais qu'avec Emmanuel Vallois 
il y avait quelque chose, jme suis dit je sais que c'est quelqu'un 
de sérieux dans le métier et jme suis dit ça, ça peut être ma 
famille dans la musique » 
Une attitude humble et professionnelle serait de rendre compte de l'entreprise collective mise en 
place lors de la sortie d'un album ou à la fin d'un concert. 
« on est jamais seul autour de ça on doit toujours quelque chose à 
quelqu'un quand on a une part personnelle de réussite ça c'est 
obligatoire ça faut jamais l'oublier. » c'est bien ce sur quoi il insiste en 
expliquant qu'il a conscience de l'impact qu'à eu son idole Claude François. Avec lucidité, il ajoute 
que sans lui il n'en serait peut être pas là aujourd'hui. Ne jamais oublier à ceux qui vous permettent 
d'y arriver. 
C'est ce qu'il regrette de la part de certains musiciens célèbres le manque de partage des retombées 
médiatiques, il note justement cette faille à l'âme d'artiste, dénonçant parallèlement le besoin de tirer 
la couette de son côté. Il prend justement exemple du binôme Fred Rister et Bob David Ghetta 
« c'est lui (Fred Rister)qui depuis sept ans a fait le plus de 
tubes de David Ghetta, les Black Eyes Peas c'est Fred Rister parce 
qu'on parle toujours de David Ghetta, David Ghetta c'est celui 
qu'on voit sur la scène devant des milliers de gens en train de 
mixer et tout mais celui qui travaille sur les platines sur les 
ordinateurs en amont c'est Fred Rister c'est à dire bon Fred 
Rister a lui porte quatre vingt pour cent du travail », selon lui on ne 
parle pas assez de lui et David Ghetta n'insisterait pas non plus pour reconnaître publiquement tout 
le travail produit par son binôme. 
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III.II.Un environnement culturel 
Évoluer dans un environnement culturel permet de s'inscrire dans le champ culturel de sa pratique, 
c'est ce qu'observe Boltanski lors de son enquête sur les Bande-dessinées. 
« mon producteur le seul chanteur qu'il produit c'est moi parce que 
ben il a sa troupe c'est un homme de théâtre, c'est un homme de 
théâtre de comédie c'est un c'est un artiste réussi à par entière ». 
évoluer dans un environnement artistique permet aux pratiquants d'acquérir plus de légitimité et de 
se constituer un habitus d'artiste. Le producteur de Noël La Gioia n'appartient pas au domaine de la 
musique mais à celui du théâtre, pour autant il est à même d'accompagner la carrière de Noël et 
parallèlement lui apporter une dimension plus théâtrale qui lui est utile lors de ses représentations 
scéniques. L'équipe de travail du chanteur s'est constituée notamment par ce système de réseau, 
c'était une connaissance de son agent, ainsi les choses se sont faites naturellement. 
Pour parler de lui et prouver la légitimité de sa place dans le monde de l'art, il n'hésite pas à évoquer 
les rencontres qu'il a pu faire, lors de l'entretien il me parle de sa collaboration avec Fred Rister, de 
ses représentations dans des salles fameuses, ou son enregistrement dans un studio réputé. C'est de 
cette manière, en faisant des références à des lieux mythiques, qu'il est en mesure de rendre compte 
de son « poids » culturel. 
Son expérience aussi très médiatisée avec sa participation au film Podium réalisé en 2004 par Yann 
Moix, lui permet d'affirmer sa place et son état de confort dans le milieu, il peut ainsi faire référence 
à des personnes prisées. 
De plus les connaissances qu'il a pu développer lui permette aujourd'hui de commencer un autre 
style de carrière mais toujours dans le domaine musical. Il intègre une comédie musicale, dirigée 
par son actuel producteur, il en est même le personnage principal. Il effectue comme l'énumération 
de sa réserve culturelle, proche de l'idée d'un répertoire des objets et des dispositifs développée par 
Thévenot et Boltanski. Un inventaire qui contribuerait à objectiver la grandeur d'une personne, dans 
le cas ici, d'un artiste6. 
Comme il aime le préciser, ce sont bien les rencontres qu'il a faites (rencontre avec son producteur 
alors qu'il donnait des cours de chant dans le même établissement que lui) ou l'appel inopiné d'une 
boite de production de film (pour l'enregistrement pour Podium), qui lui ont permis d'évoluer et de 
6 Boltanski Luc, Thévenot Laurent. De la justification. Les économies de la grandeur. Gallimard, 1991 
CP 11/63
remplir plus de salle, se faire connaître et apprécier. Son environnement artistique lui a permis de se 
constituer un public qui régulier, intéressé, et qui, plus que de s'intéresser aux reprises de Claude 
François, devient curieux de ce que peut faire « lui » Noël La Gioia. 
III.III. Un public 
Pour qu'on puisse parler d'une pratique artistique ou d'un artiste en tant que tels, il faut d'abord que 
l'activité soit reconnue et destinée à quelqu'un. 
« on a la chance de pouvoir exister heu artistiquement heu grâce 
aux gens, grâce au public parce que faut pas oublier que quand on 
est dans une salle sur une scène si personne n'était dans la 
salle, on y serait pas si les gens n'achetaient pas vos places, 
les places de spectacle voilà moi c'est humilité respect pour heu 
les gens surtout dans le contexte actuel » 
Noël insiste sur la dimension sociale et humaine de sa pratique. Pour lui faire de l'art c'est d'abord 
interpeller quelqu'un. Il y a un bien la notion de relation, de transmission. 
Noël qui est en cours de construction de sa carrière, il parle du travail important pour constituer son 
public. Un public qu'il essaie de fidéliser au cours de ses représentations dans la région. Mais il 
essaie aussi de l'élargir, en s'appuyant sur une communication via les réseaux sociaux notamment. 
Les commentaires de ses spectateurs sont selon lui sa récompense après chaque spectacle comme 
s'il avait fait quelque chose de bien. 
Pour faire évoluer sa carrière il a besoin de faire évoluer son public. Puisqu'il est à un moment de sa 
carrière où il souhaiterait davantage exposer ses propres productions, il ne cherche plus à 
rassembler des fans de Claude François, mais des gens qui s'intéressent réellement à ce qu'il 
propose d'autre. 
CP:selon vous vos spectateurs viennent à vos shows pour vous ou 
pour profiter d'un instant avec Claude François ? 
NL:nan les gens heu je dirais que je dirais que je suis en train 
d'inverser la tendance des gens viennent de plus en plus pour me 
voir et moi heu comment je veux dire heu oui les gens viennent de 
plus en plus pour heu ben pour moi jvais dire on dira ça comme ça 
en toute humilité 
CP 12/63
Il ajoute que c'est un travail de fond, de persuader les gens qu'ils ne vont pas voir Claude François 
mais bien Noël La Gioia. 
Intéresser, les faire adhérer à sa pratique, c'est rendre cette dernière véritable voire autonome, ce 
sera une pratique qui intéresse les gens soit en les touchant soit en les interpellant. C'est ainsi que le 
chanteur ne se satisfait plus uniquement des « Je fais un bond de vingt ans en arrière » mais 
souhaite désormais des commentaires sur les arrangements qu'il a apporté à quelques titres ou 
mieux des commentaires sur ses propres textes. 
Comme l'explique Boltanski dans son étude sur les bande-dessinées, la pratique gagne en légitimité 
quand elle arrive à se créer un appareil, des moyens d'être jugé, apprécié. L'évolution du public est 
possible certes avec un travail mais aussi en fonction du contexte et de l'environnement social par 
exemple. Noël note qu'aujourd'hui le public amateur de musique est en attente de nouveauté, de 
créativité et cela en fait dans tous les domaines artistiques. Ainsi il a conscience que pour capter 
l'attention du public il se doit de s'adapter, mais il doit aussi travailler à conserver son public actuel 
et trouver un moyen de de le faire évoluer. 
Pour qu'un public soit conquis il lui faut trouver ce qu'il y a d'unique dans la pratique ou dans les 
oeuvres, c'est ainsi qu'eux même ils seront amenés à s'intéresser plus précisément à la pratique ou à 
l'artiste lui même (histoire, carrière...) 
IV. Le besoin de se démarquer : créativité 
Après une vingtaine d'années à ne faire qu'interpréter les chansons de son idole, Noël s'est rendu 
compte de la nécessité, s'il veut passer au stade supérieur, de se faire connaître lui pour se qu'il fait. 
C'est autonomisation, ce détachement s'est déroulé en plusieurs étapes. 
« de dix neuf vingt ans et jusque trente cinq ans c'était quasiment 
oui lui rendre hommage et maintenant que je suis plus centré sur 
heu une démarche plus personnelle je veux dire j'en reviens 
toujours à ça il y a malgré tout dans mes chansons et quand 
j'interprète des chansons de Claude François sur scène que je 
réorchestre comme je le dis pour apporter ma touche personnelle il 
y a toujours cet hommage parce que c'est quelqu'un qui a touché ma 
vie qui m'a touché personnellement et donc je suis jamais resté 
insensible et je le suis toujours je veux dire heu c'est tout 
CP 13/63
maintenant ma musique elle a évolué moi Claude François des 
chansons de Claude François heu ça fait heu vingt ans que j'en ai 
plus écouté » 
D'abord la volonté dans un premier temps de rendre hommage à celui qui lui a permis d'entrer dans 
le monde de la musique, ensuite il y eut la période où Noël commençait à personnaliser ses 
morceaux en les arrangeant, remaniant pour être plus « dans le temps », il s'est séparé peu à peu du 
modèle de départ. 
IV.I. Nécessité de se démarquer 
Pour être un « artiste », il ne suffit pas d'être un chanteur parmi d'autres, Noël ne se contente plus 
d'être « l'interprète de... », il veut désormais être connu pour lui même. C'est uniquement de cette 
manière qu'il pourra prétendre à un statut d'artiste. C'est un besoin d'être reconnu personnellement, 
il ne s'agit pas selon lui d'arrogance mais, d'un besoin naturel. Il ne suffit pas de bien reproduire, 
cette qualité c'est ce qu'on attendait avant d'un bon artisan, reproduire correctement. Mais 
aujourd'hui le chanteur se pose la question de comment singulariser ma pratique pour qu'on puisse 
me reconnaître, moi Noël Lagoia. En effet, cette réflexion peut être envisager comme la question de 
la signature, dans l'art. Heinich affirme la nécessité dès lors où un artiste (elle traite surtout du 
domaine de la peinture) se singularise, d'associer la signature à ses oeuvres. Dans le cas de la reprise 
musicale, Noël s'attache à l'idée qu'il ne s'agit pas du nom sur l'album mais d'une marque de 
fabrique à attacher à ses productions, une touche personnelle qui permettront au public de 
reconnaître ses interprétations. 
Il y a un besoin en tant qu'artiste de se sentir autonome indépendant capable de s'émanciper de ce à 
quoi on est attaché. Écrire ses propres chansons c'est faire preuve de capacités créatrices. « quand 
on est interprète heu bon on est que la copie en fait de gens 
connus tandis que quand on arrive avec ses oeuvres on devient 
créateur ». 
Interpréter les titres des autres ça ne dure qu'un temps, le temps de se lancer, qu'on puisse parler de 
vous, mais cela ne serait que temporaire, le chanteur affirme qu'on ne peut pas baser une carrière 
uniquement sur cette pratique, il reste lucide sur le sujet. Il parle de la reprise comme un outil un 
tremplin qui peut aider à se faire connaître puis reconnaître. Il illustre ses propos en s'appuyant sur 
les chanteurs français qui ont commencé en effectuant des reprises comme Amel Bent ou encore 
CP 14/63
Nolwenn Leroy. Par ces exemples, il insiste sur la difficulté de percer, en proposant ses propres 
morceaux, rares sont ceux qui sont capables de se lancer avec leur production, ça ne vient qu'après 
et encore. 
Noël explique que désormais il est un compositeur libre, en disant cela il crée un paradoxe avec les 
propos qu'il a pu dire auparavant. Il est tiraillé entre être maître de ses productions, capable de 
proposer ce que, lui veut, capable de créer à partir de ses propres envies et inspirations et tout 
compte fait répondre parallèlement à l'attente de ce que les gens veulent, en faisant « l'unanimité », 
en jouant sur ce qui « marche » aujourd'hui (son électro). Il dit être à la fois libre de créer ce que 
bon lui chante mais il reste tout de même attaché aux canons du moment. Ainsi peut on vraiment 
dire qu'il s'agit d'un créateur ? C'est le phénomène qu'observe Heinich, qui note l’ambivalence entre 
l’impératif de singularité, avec une volonté d'être exceptionnel et l’impératif de communauté 
puisque l’artiste s'inspire de ses fréquentations, de ce qui l'entoure et de ce que font les autres7. 
Dans le milieu de la reprise et de l'interprétation, beaucoup de chanteurs regrettent les réflexions du 
type « même pas capable de nous proposer quelque chose de nouveau », « aucune originalité », « on 
va l'entendre combien de fois ». Pour autant, il affirme que ce qui peut faire la différence entre un 
simple interprète et un chanteur créateur c'est sa capacité à rendre une interprétation « sienne ». 
C'est là où se trouve toute la différence. 
IV.II.Innover en s'appropriant 
Il ne s'agit pas de faire du nouveau pour faire du nouveau. L'innovation n'oblige pas à tout 
reprendre, innover c'est aussi avoir un idée nouvelle, ingénieuse. 
« faire en sorte de chiper un peu comme ça à gauche à droite des 
morceaux de les réunir de les mixer ensemble d'apporter des choses 
et plus ou moins des mélodies moi je trouve que c'est tout à fait 
de la création parce que même si c'est heu des morceaux heu voilà 
chiper à gauche à droite c'est quand même du boulot c'est un 
7 Anthony Glioner, Ce que la littérature fait à la sociologie de l’art. Remarques à propos de L’Élite 
artiste de Nathalie Heinich, Paris, Gallimard, « Bibliothèque des sciences humaines », 2005, 384 p. 
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travail de montage de mixage c'est du travail de, donc c'est quand 
même à la base de la création faut faut avoir eu l'idée de le 
faire donc déjà c'est créatif » 
Réemployer, se servir de ce qui existe déjà, c'est parfois plus complexe que de parti de zéro. « Faire 
du neuf avec du vieux » voilà la devise de ces chanteurs interprètes. Ils dévoilent leurs capacité à 
réinventer. Ce genre de pratique, ne fait pas l'unanimité, certains félicitent cette ingéniosité et 
d'autres font le procès de la « dénaturation » de l’oeuvre originale. Pour Noël, il ne s'agit pas de 
vouloir prendre la place de l'artiste original ou faire mieux mais faire sien. 
« je reprends ces chansons là et c'est deux vieux succès de Claude 
François mais qui ont été totalement réorchestrés par mon 
arrangeur avec nos touches personnelles et voilà de manière à ce 
que les gens quand ils vont écouter ces deux reprises connaissent 
les chansons ceux qui connaissent pas vont découvrir comme si 
c'était une nouvelle oeuvre et les fans de Claude François les gens 
de ma génération qui connaissent ce répertoire là vont dire ah oui 
ces deux chansons là on les connaît on les connaît bien pourtant 
c'est pas les plus connus du répertoire de Claude François parce 
que là aussi c'est l'intérêt de faire en sorte que ça soit une 
redécouverte avec des sons nouveaux des sons actuels et ma voix » 
De Certeau qui réfléchit sur la question du « braconnage », observe l'emploi, l'appropriation 
d'un l'objet, l'apport personnel que chacun en fait. Il envisage l'objet culturel comme un 
« appartement un loué » où une personne passe et y pose ses bagages, un lieu où chacun serait à 
même d'y apporter une transformation, sa transformation. 
"Les lecteurs sont des voyageurs ; ils circulent sur les terres d’autrui, nomades braconnant à 
travers les champs qu’ils n’ont pas écrits, ravissant les biens d’Égypte pour en jouir. L’écriture 
accumule, stocke, résiste au temps par l’établissement d’un lieu et multiplie sa production par 
l’expansionnisme de la reproduction". 8 (De Certeau, 1990:252) 
Ce passage est adaptable à toute forme d'objet culturel. Les objets culturels ne sont pas 
intouchables, s'y attaquer ne signifie pas forcément leur enlever de la valeur, cela peut parfois même 
leur en attribuer. 
8 Michel de Certeau, L'invention du quotidien, tome I, 1990 : 252 
CP 16/63
Ainsi, malgré la vision parfois pessimiste de sa pratique, avec son côté temporaire, il y trouve 
tout de même de l'avenir dans la mesure où dans le contexte actuel, il existe beaucoup d'outils pour 
exploiter le réemploi, l'actualisation, la création à partir d'une matière première. Même si le mixe ou 
le sample existent depuis longtemps, aujourd'hui il est possible d'aller plus loin dans la démarche, 
c'est pourquoi Noël félicite ces initiatives. Pour autant, il n'est pas vraiment sûr que cela s'applique 
au domaine du chant en tant que tel, il s'agirait plutôt du domaine du son, du beat. 
CP 17/63
V. Conclusion 
Réfléchir sur la place de la reprise musicale dans le champ artistique, ne doit pas se limiter à 
s'interroger uniquement sur des questions figées comme le statut, l'aspect authentique ou 
l'originalité d'une pratique ou de la personne l'exerçant. Ces points sont à penser à travers les 
rapports entre des gens, il ne s'agit pas de penser ou de parler en terme de valeur ou de chercher à 
évaluer la pratique avec des critères spécifiques mais l'envisager à travers les relations entre des 
personnes, à travers la réception qu'en font les gens. C'est ainsi que Nathalie Heinich entreprend de 
réfléchir, et d'établir ce qu'est de faire de la sociologie de l'art, en s'arrêtant sur ce que des oeuvres 
comme des pratiques « font aux gens ». 
Une pratique comme la reprise musicale interroge en réalité davantage d'autres domaines, tous 
ceux liés ou s'appuyant sur l'appropriation, l'interprétation, et l'usage d'un matériau existant. Le 
poids de ces styles de pratiques, dans le champ artistique, n'est pas quelque chose d'acquis en soi, 
malgré l'appartenance au domaine musical. Leur place est à négocier continuellement auprès des 
acteurs, des institutions, du public... Cela est d'autant plus complexe dans la mesure où les 
négociations se font aussi par rapport aux autres pratiques musicales, elles, totalement légitimées. 
Une enquête comme celle conduite avec Noël Lagoia permet d'observer de nombreuses 
contradictions dans le discours, des difficultés à soi même s'envisager ou se ranger selon qui et 
selon quoi. Pour établir la position d'une pratique culturelle, il est intéressant d'observer plusieurs 
discours, plusieurs façon de vivre, de pratiquer son activité. Se pencher sur l'histoire de l'art, 
l'évolution des statuts, de l'investissement de la politique publique dans ce domaine mais aussi la 
redéfinition permanente de la culture, de ses limites, des enjeux et processus qui se jouent à sa 
frontière. 
L'important dans ce genre d'étude étant toujours de réfléchir, d'observer les phénomènes en 
cours et de non pas chercher à les expliquer et à déterminer quelque chose de stable. L'art s'envisage 
comme une pratique sociale, dès lors où il y a rapport ou relation entre des personnes, il ne faut pas 
s'attendre à quelque chose de binaire, « ceci est de l'art et ça, ça ne l'est pas », il s'agit d'un domaine 
en constante évolution. La sociologie de l'art nous permet de nous interroger sur ce qui se déroule 
entre les deux, et sur les acteurs en jeu. 
Les éléments évoqués dans le cas de la reprise musicale peuvent être interrogés par rapport à 
bien d'autres domaines, tellement que cela nous amène à nous demander si aujourd'hui tout ne serait 
CP 18/63
pas à même d'être qualifié comme art ? Toute pratique qui aurait quelconque démarche et qui 
permettrait de réfléchir sur les points développés dans cette étude, pourrait-elle alors appartenir 
légitimement au champ artistique ? La possibilité du passage du non art à l'art annonce-t-il le début 
d'un processus sans fin ? 
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VI.Annexes 
VI.I. Grille d'entretien 
Hypothèse de travail : 
L'art doit-il obligatoirement rimer avec création et originalité ? 
Puis, 
Quelle légitimité pour la reprise, les interprétations ? 
Introduction 
➢ Présentation de l'enquêteuse 
➢ Présentation de l'enquêté (âge ; formation ; emploi actuel ; état civil; situation de couple) 
➢ Décrivez-moi tout d'abord votre pratique musicale. 
Trajectoire de vie de l'enquêté et de sa pratique 
➢ Quand avez-vous commencé à chanter ? 
➢ Quand vous êtes vous rendu compte du « don vocal » que vous avez ? Et depuis quand 
l'exploitez-vous ? 
➢ Avez-vous eu une formation musicale ? Si oui, quelle était-elle(cours de chant, solfège...) ? 
➢ Quelle place tient votre pratique dans votre vie quotidienne (temps de répétition, 
déplacement...) ? 
➢ Comment s'est faite la transition entre une pratique à titre d'amateur et celle plus 
professionnelle ? 
➢ Quelle est la position de votre entourage vis-à-vis de votre pratique ? 
CP 20/63
➢ Au départ vous expliquiez que vous travailliez de nuit dans l'hôtellerie, cela laisse penser que la 
musique reste à l'état de hobbie, extra-professionnel. Qu'en pensez vous ? Est-ce techniquement 
possible de construire une carrière à côté ? 
➢ Vous évoquiez au départ que vous vous étiez mis à composer quelques morceaux, quand et 
pourquoi avez-vous ressenti le besoin, de créer et de produire vos propres créations ? 
➢ De quelle ordre est la motivation de votre pratique (financier, artistique?) 
➢ Quand vous vous produisez, qui se charge de votre rémunération ? 
Critères de définition de l'art 
➢ Vous qualifiez-vous plutôt comme chanteur professionnel ou comme artiste ? 
➢ Selon vous, quelle serait la différence entre ces deux notions ? 
➢ « Le très grand est celui dont les imitations sont légitimes, dignes, supportables, et qui n'est pas 
détruit ni déprécié par elles ni elles par lui. » Paul Valéry.Que pensez-vous de cette citation ? 
➢ Est-il déjà arrivé durant votre parcours de rencontrer des gens qui n'approuvait pas ou une 
reconnaissait pas votre pratique ? Connaissez vous leurs raisons, leurs points de vue ? 
➢ Dans la presse qui vous concerne, vous refusez qu'on parle d'imitation, à propos de votre voix, 
vous précisez qu'elle est naturelle, absolument pas forcée. Pouvez-vous m'expliquer en quoi cela 
vous semble important à préciser ? 
➢ Selon vous, le fait qu'elle soit naturelle le attribue plus de mérite que si elle était travaillée ? 
➢ Dans le monde artistique que pensez-vous de l'interprétation, de la reproduction par rapport à la 
création ? 
➢ Selon vous, peut-on rapprocher les pratiques suivantes : 
 interprétation de chanson 
 mix de plusieurs musiques et sons existants 
Selon vous, les deux se valent-elles ou l'une serait plus légitime que l'autre ? 
➢ De manière générale que pensez-vous de la remix culture ( de nouvelles pratiques qui réutilisent 
des produits existants pour innover, comme le sample par exemple ) ? 
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➢ A votre avis, aujourd'hui la reconnaissance est-elle équivalente que l'on fasse du remix, de 
l'appropriation d'objets traditionnels ou qu'on compose ses propres productions ? 
➢ Dans votre cas, qualifiez-vous votre activité comme une pratique artistique ? 
➢ Quelle définition donnez-vous de l'art aujourd'hui ? Que placeriez vous d'une part dans la 
pratique artistique dite légitime et d'autre part dans celle non légitime ? 
➢ Où vous situez-vous ? 
➢ Que pensez-vous de la notion de « culture légitime » ? 
Reconnaissance 
➢ En chantant du Claude François, votre but est-il plus de lui rendre hommage comme on peut le 
lire dans la presse ou est-il question d'une reconnaissance personnelle de votre « don vocal » ? 
➢ Comment souhaitez-vous qu'on parle de vous dans la sphère artistique ? 
➢ Pour s'élever dans la sphère musicale il faut que le travail soit reconnu. Pour vous, de qui 
attendez-vous cette reconnaissance ( des professionnels, du public, des fans de Claude François) ? 
➢ Selon vous, vos spectateurs viennent à vos shows pour vous ou pour profiter d'un instant avec 
Claude François ? 
➢ En ce qui concerne votre public, s'agit-il d'un public fidèle qui vous suit ou vos représentations 
brassent un public varié ? 
➢ Lors de vos représentations, à quel titre êtes vous sollicité (animateur de salle) ? 
➢ Pour vous, la réussite musicale est liée au nombre d'album vendu, ou à la question de 
reconnaissance par les grands ? 
➢ Après quelques recherches sur vous sur le web, on peut constater que vous travaillez sur votre 
communication : un compte Twitter, une page officielle sur Facebook, des vidéos sur diverses 
plate-formes,. Cela est en vue de vous créer un public ou davantage pour chercher des contrats ? 
➢ Quelle image de vous et de votre pratique pensez-vous renvoyer aux autres ? 
➢ Selon vous, les internautes participent ils à votre notoriété et votre reconnaissance ? 
➢ Quel poids et légitimité attribuez-vous à des « like », des « partages », des commentaires ? 
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VI.II. Transcription entretien 
avec Noël La Gioia le 6 mars après midi dans un café: 106minutes 
CP:Alors, on va commencer par heu, par heu l'introduction on va 
dire, donc donc je vais vous demander de vous présenter, 
rapidement, donc votre âge, état civil formation, allez y... 
NL : Alors moi,déjà je m'appelle Noël Lagoia, mon nom d'artiste 
est « Noël Lagoia », L.A.G.O.I.A ça c'est mon nom d'artiste parce 
que mon nom heu mon vrai nom si on veut dire c'est L.A plus loin 
G.I.O.I.A. Donc à l'époque quand j'ai sorti mon premier album 
hommage heu que j'ai sorti après le, je parle pas trop vite ça 
va ? 
CP : Non non allez y ça va aller 
NL :après le après le film Podium heu, je suis tombé sur heu une 
équipe heu une équipe de producteurs, qui me ont heu réalisé mon 
album et qui m'ont dit que « La Gioia » ça va être difficile à 
prononcer dans l'immédiat heu dans l'écriture heu bon on va donc 
on va heu ils ont voulu raccourcir mon nom et heu coller parce que 
L.A plus loin G.I.O.I.A et la c'est LAGOIA L.A.G.O.I.A qui est 
plus facile à prononcer donc du coup maintenant c'est devenu comme 
ça c'est resté comme ça et en pseudo comme un pseudo 
CP : Ah ok très bien 
NL : voilà, je suis déclaré comme ça , dans le système etc etc 
CP : ok très bien, maintenant 
NL : Donc j'ai 54 ans 
CP : 54 ans 
NL : Je vais les avoir 
CP : ok 
NL : on va dire que je les ai et puis heu ben je suis marié, j'ai 
cinq enfants, j'ai deux petits enfants alors voilà et puis ben 
voilà ça c'est le côté privé on va dire 
CP : Alors heu maintenant je voulais une heu description gro 
globale de votre pratique musicale
NL : Alors moi je suis à la base, je suis auteur compositeur 
interprète 
CP: hmm hmm 
NL : voilà donc heu qu'est ce qu'il faut que je raconte, un peu 
mon parcours ? Ou heu ? 
CP : oui si possible 
NL : Alors mon parcours, ça fait plus de trente ans que je chante 
heu que je pratique la scène et puis heu dans heu ben je chante en 
orchestre j'ai fait heu de l'orchestre à mes débuts, j'ai fait heu 
trois orchestres en tout et pour tout et puis ensuite ben pour 
partir travailler seul, heu je veux dire en solo, ben on va dire 
il y a une vingtaine d'années que je suis en solo, j'ai commencé à 
faire mes propres heu compositions mes propres chansons, ça fait 
une petite vingtaine d'années et puis après ben avoir fait le 
film, ma participation dans le film Podium 
CP : c'était quand ça ? 
NL : ça c'était en 2005, la sortie du film était le 11 mars 2005 
CP : hmm hmm 
NL : et moi si vous voulez j'ai enregistré le le duo « Comme 
d'habitude » pour l film avec Benoît Poolvoerde c'était en octobre 
en décembre 2002 
CP : ah oui 
NL : oui oui on avait enregistré quasiment deux ans avant donc en 
studio sur Paris et donc j'ai travaillé deux jours avec Benoît 
Poolveorde pour ce duo, ce duo qui fait heu je veux dire qui fait 
partie d'une voire de la scène mythique du film parce que je ne 
sais pas si vous vous souvenez dans la scène du film heu quand on 
voit, je sais pas vous avez vu Podium non ? 
CP : non je ne l'ai pas vu 
NL : celles et ceux qui auront vu, il y a une scène, c'est la 
scène culte, on peut dire ça comme ça, heu ya un duo entre Claude 
François et Bernard Frédéric qui est interprété par Benoît 
Poolveorde qui est un comment je vais dire un fan de Claude 
François dans le film et il y a un jeu virtuel qui est entamé 
CP 24/63
entre Claude François et Benoît Poolveorde et dans ce duo si vous 
voulez ya Moix,le réalisateur du film qui cherchait une voix heu 
pour chanter justement ce duo avec Benoit Poolveorde qu'il a du 
reconstituer toute la scène, c'est une scène culte du film qu'il a 
reconstitué parti d'un enregistrement heu d'un show avec Petula 
Clark . Ce show avec Petula clark a été enregistré en, dans les 
années soixante heu attendez dans les années soixante dix c'est 
sûr et donc il a du reconstituer cette scène et heu comme la bande 
musicale il n'avait pas les droits pour l'utiliser, il a du 
reconstituer la bande musicale pour faire une castration avec Jean 
Claude Petit qui est un des grands grands compositeurs français et 
qui est un très grand musicien très connu d'ailleurs sur la 
planète et donc c'est lui qui était chargé de reconstituer toute 
la partie orchestre de « Comme d'habitude » et Yann Moix 
recherchait une voix de Claude François alors il avait fait passer 
des casting sur Paris donc voilà et moi en envoyant mes cd dans 
des à l'époque j'avais enregistré des maquettes que j'envoyais 
régulièrement dans des maisons de disque heu et c'est Yann Moix 
qui ai tombé sur cette maquette par l'intermédiaire d'un ami 
apparemment ça s'est passé comme ça. 
CP:ah oui ce n'est pas vous directement qui.. 
NL:non non non non j'ai pas j'ai même pas passé de casting dans ah 
oui oui oui c'est une histoire folle comme je dis c'est une 
histoire bénie des dieux et ça m'est tombé dessus comme ça et un 
soir d'octobre en octobre deux mille deux heu j'étais j'étais chez 
moi il était vingt heure et j'ai eu je reçois un coup de téléphone 
et c'était la directrice des films Fidélité à l'époque qui 
m'appelait heu pour me dire que ben voilà il recherchait une voix 
pour faire heu un enregistrement de « Comme d'habitude » et qu'ils 
avaient écouté mon cd et que Yann Moix et le co-producteur du film 
à l'époque voulait m'entendre voire me rencontrer , écouter 
quelqu'un sur un cd et l'entendre chanter en live en direct , je 
veux dire bon on on peut bidouiller si on peut dire, donc voilà 
c'est parti comme ça, je suis parti sur Paris en décembre deux 
CP 25/63
mille deux et je suis rentré en studio deux jours dans un studio 
mythique à Suresnes d'ailleurs, c'est à Suresnes , même pas à 
Paris c'est dans le 94 et qui s'appelle le studio Guillaume Tell 
où bon Dieu toutes les stars internationales ont enregistré, c'est 
un énorme studio à Suresnes 
CP : Guillaume ? 
NL : Guillaume Tell, T E deux L, ça c'est à Suresnes, voilà je 
suis rentré deux jours en décembre deux mille deux pour 
enregistrer. 
CP : Ok alors déjà vous avez répondu à certaines de mes questions, 
donc je vous demandais quand vous aviez commencé à chanter, vous 
me disiez que ça faisait à peu près trente ans 
NL : oui une trentaine d'années pour dire sérieusement avant je 
chantonnais 
CP mais par contre je voulais savoir 
NL : j'étais plus chanteur de salle de bain à l'époque 
CP : donc par rapport à votre formation musicale , vous me parliez 
d'orchestre mais est ce que vous aviez pris des 
NL:j'ai eu une formation musicale , j'ai fait quatre ans de 
musique en école de musique donc voilà tout ce qui est solfège ça 
c'est, j'ai pas vraiment la pratique d'un instrument parce que 
j'ai arrêté trop tôt mais on va dire je pianote on va dire ça 
comme ça mais de là à aller plus loin ça serait vraiment 
extrapoler et dire que bon, mais par contre oui j'ai une base 
musicale, je sais lire une partition donc de ce côté là 
CP : ok et maintenant je voudrais savoir depuis quand en fait heu 
votre rapport directement avec Claude François parce que bon 
NL : (rire) c'est une histoire , comment je vais dire j'ai j'étais 
tout petit quand j'étais petit je regardais, c'était le boom des 
années soixante soixante dix et donc ben mes parents regardaient 
c'étaient la grande époque ben des shows des Carpentier, vous 
n'avez pas connu mais c'était des grandes grandes émissions où 
tous les artistes se réunissaient heu toutes les stars à l'époque 
Claude François, Mike Brant, Michel Sardou, Sylvie Vartan fin 
CP 26/63
voilà, c'était vraiment des émissions magnifiques et puis donc moi 
j'étais baigné déjà par tous tous ces artistes et bon déjà une 
attirance plus particulière pour la musique et et Claude François 
a toujours attiré mon attention parce que ce ce showman qu'on 
voyait fin déjà avec des claudettes et tout il était avant-gardiste, 
ça attirait toujours plus mon attention et puis heu je 
devais avoir une douzaine d'années et je pour être bien précis 
j'ai été je jouais au football à Grande-Synthe donc j'étais à 
l'époque je devais être pupille ce qu'on appelait pupille à 
l'époque , je devais avoir une douzaine d'années, allez onze ans 
et mon club de foot chaque année heu avait un genre faisait un 
genre de banquet un truc comme ça et invitait un artiste et cette 
année là, fin je me souviens plus l'année mais je devais avoir 
onze ans ou douze ans heu comme ça de tête je ne sais plus en 
quelle année mais enfin ça devait être dans les années soixante 
quatorze soixante quinze un truc comme ça, oui que je ne dise pas 
de bêtise , ça doit être ça oui un truc comme ça donc ils invitent 
Claude François au Palais du Littoral à Grande-synthe, scène où 
d'ailleurs j'ai chanté en septembre dernier donc j'ai foulé les 
planches que mon idole a foulé il y a bien des années et donc 
Claude François est invité et tout ce qui est je veux dire et tout 
nous qui faisions parti du club de football on avait donc des 
places dans la salle et heu à l'époque les places n'étaient pas 
numérotées donc c'était les premiers qui rentraient qui 
s'installaient et comme nous on était là pour donner un coup de 
main même si on était des gamins on donnait un coup de main à la 
mise en place on faisait des petits trucs et donc on était placé 
au premier rang et donc heu j'étais heu pour raconter une petite 
anecdote que je raconte souvent heu tout le premier rang était 
pris parce que je sais plus, je suis parti quelque part je sais 
plus ce que je faisais et puis je reviens au premier rang et 
toutes les places étaient prises par mes petits copains et en fin 
de compte j'étais vache j'étais dégueulasse maintenant je le dis 
parce que je vais voir un de mes petits copains et je lui dis : 
CP 27/63
« il y a ta maman là-bas qui t'appelle » alors il me fait, je m'en 
rappelle comme quoi il y a des trucs qui arrivent comme ça, c'est 
possible car les parents étaient derrière et nous on avait réussi 
à être placé devant donc je lui dis « si si ta mère est là-bas 
elle t'appelle » il me dit non je lui dit « si si vas y sinon elle 
va t'engueuler » un truc comme ça donc je monte un truc et puis je 
lui ai piqué sa place et quand il est revenu il me dit « t'as pris 
ma place » mais non non non on se battait pour être au premier 
rang, j'ai usurpé sa place j'avoue que maintenant que c'était pas 
très sympa de ma part donc c'était la petite anecdote et quand 
j'ai vu Claude François sur scène à l'époque la scène était à à 
deux mètres quoi, j'ai vu et contrairement à, c'était de 
l'hystérie dans la salle, c'était de la folie, je veux dire ce 
gars-là ses concerts ce qui donnait c'est ce qu'on voit dans les 
images c'était de l'hystérie totale et contrairement à tous ceux, 
j'étais dans ma dans ma bulle et j'ai été scotché pendant plus 
d'une heure trente j'étais devant et je crois que je devais avoir 
les yeux comme ça (écarquillés), yavait plus un mot qui sortait de 
ma bouche j'ai été illuminé et quand j'ai vu je l'ai vu sur scène 
j'ai dit « c'est ça que je veux faire je veux faire comme lui plus 
tard » et le déclic est venu là j'en suis persuadé , j'en suis 
persuadé et c'est là que je me suis mis à chantonner à écouter à 
commencer à je vais pas dire commencer à travailler ma voix parce 
que j'ai jamais travaillé ma voix si mais quand même je veux dire 
j'ai jamais cherché déjà des gens me posent la question « est ce 
que vous êtes un imitateur ? » oui donc voilà on va dire que 
grosso modo le déclic artistique dans ma tête il est venu de là 
c'est là, j'avais onze ans douze ans de mémoire c'était ça onze 
ans douze ans ah ouais ouais ouais c'est énorme quoi je veux dire 
CP : je voudrais faire la distinction peut être heu vous disiez je 
regardais et je me suis dis c'est ça que je veux faire, c'est ça 
que je VEUX faire ou c'est vraiment par rapport à ce qu'il fait ou 
à sa personne ? 
CP 28/63
NL : non moi quand j'ai vu sur scène Claude François j'ai vu ce 
que c'était que de donner et de faire ce de chanter de monter sur 
scène devant des gens et de chanter heu je calculais pas à savoir 
jme dis pas je veux faire ça jveux faire tout comme lui je me suis 
mis dans la tête je veux être u chanteur jveux jveux jveux être 
sur scène jveux chanter voilà c'est ça c'est ça et sans sans 
jpense pas jpense pas que dans mon esprit à cette époque là je me 
suis dit je veux faire comme lui jveux lui ressembler et je veux 
être Claude François non non non je veux être un artiste voilà 
voilà. Je veux être un artiste 
CP:Enfin là, par exemple je ne connais pas particulièrement Claude 
François heu mais heu là c'est même plus que chanter j'ai 
l'impression parce que c'est une performance enfin d'après ce qu 
j'ai entendu de vous c'est pas chanter c'est vraiment une 
dimension de show en général. 
NL : ah oui oui oui 
CP : c'est ce qu'on entend par artiste en fait. Ok et donc vous 
parlez d'une voix que vous ne travaillez pas qui était naturelle 
donc depuis quand vous êtes vous rendu compte de ce don vocal on 
va dire ? 
NL:c'est venu très très tôt parce que finalement heu quand quand 
j'ai commencé bon je veux dire je devais avoir quoi je devais 
avoir peut être avoir dix neuf vingt ans quand je me suis mis 
vraiment à chanter devant des gens avant ben c'était chanter dans 
la salle de bain et fin je veux dire chanter devant sa glace 
voilà, c'est ça finalement et j'ai commencé vraiment à chanter 
devant les gens, dans des cafés, dans des terrasses dans des repas 
de famille et tout ben je devais avoir dix neuf vingt ans donc on 
me disait c'est incroyable t'as un timbre de voix qui fait penser, 
et c'est venu de là mais il y a une, je dis souvent dans mes 
interviews, jamais je j'ai travaillé ma voix pour dire que, 
d'ailleurs ce que je précise bien toujours dans dans mes heu, j'ai 
pas la voix de Claude François attention, moi, c'est ça 
l'important parce que heu comment je vais dire moi, c'est ça le 
CP 29/63
paradoxe c'est que je ne suis pas un imitateur je ne fais pas 
parti des gens qui imitent Claude François, je ne fais pas parti 
des gens qui parodient Claude François qui le caricaturent moi 
tout ce qui est sosie qui mettent des costumes paillettes qui 
prennent des danseuses et qui font un show Claude François, bon 
personnellement ça ne m'intéresse pas, c'est pas ma démarche dans 
la musique car comme je dis bien au départ dans mes interviews, à 
la base je suis auteur compositeur et interprète et ma démarche 
dans le métier c'est de faire aussi ma propre musique mes propres 
oeuvres mes chansons par lesquelles je vais essayer entre 
guillemets d'être connu. Donc heu là est l'importance et comme je 
dis toujours, je n'ai pas la voix de Claude François et on me dit 
depuis longtemps elle s'en rapproche, moi j'apporte le distinguo 
elle s'en rapproche, je n'ai pas la voix de Claude François et 
ceux qui disent j'ai la voix de, j'ai la voix de, ce n'est pas 
vrai. Je veux dire moi, j'ai rencontré des, j'ai pas rencontré des 
gens mais on m'a dit heu ya des sosies qui se qui se disaient 
dépassant le maître entre guillemets, c'est à dire ils étaient 
même mieux que Claude François, ils chantaient même mieux que 
Claude François, je me dis bon, ça n'engage que eux, ça n'engage 
que leur parole mais je veux dire pour moi je trouve ça entre 
guillemets assez pathétique moi c'est mon point de vue donc voilà 
heu mais moi ma démarche, on m'a proposé, on m'a proposé il y a 
une quinzaine d'années, un producteur qui m'a proposé, je chantais 
je faisais une première partie au casino de Dunkerque, j'avais 
chanté en première partie de Herbert Léonard et je tombe sur un 
producteur qui me dit moi je veux bien te prendre parce que tu as 
la voix je t'ai vu chanter c'est pas mal ce que tu fais mais je je 
voudrais monter un show Claude François avec toi mais il faudra 
que tu mettes une perruque blonde parce que je n'ai pas le 
physique de Claude François, bien, bien, bien, bien pour moi parce 
que si en plus. C'est un bonheur pour moi parce que je n'ai pas du 
tout le physique ça c'est, là on peut pas nier le contraire là je 
veux dire heu bon et il m'a dit heu à l'époque moi je peux te 
CP 30/63
faire tourner dans le France voire même en Europe pour faire un 
grand show Claude François avec des danseuses et tout mais il va 
falloir que tu apprennes à danser, que tu mettes une perruque 
blonde, un costume paillettes et tout, je veux dire non, j'ai dit 
non alors je suis passé peut être à côté de bien des choses mais 
je serai pas là aujourd'hui j'en suis persuadé.Je serai pas là 
aujourd'hui. 
CP : ok très bien, heu maintenant je voudrais savoir quelle place 
votre pratique prend dans votre vie quotidienne par rapport aux 
répétitions aux déplacements etc ? 
NL:heu j'ai un bonheur, j'ai un bonheur c'est parce que Muriel 
pourra en parler, c'est que j'ai déjà une responsable, parce que 
pour le moment j'en vis pas professionnellement, ça devient de 
plus en plus serré entre mon job parce que moi je considère que 
mon emploi de réceptionniste de veilleur de nuit à l'hôtel c'est 
un job hein c'est pas un métier, c'est quelque chose que n'importe 
qui peut faire hein je veux dire il y a pas eu de formation 
spécifique, c'est un job qui est là pour pour justement ben je 
dirais parfaire, ben vivre, payer les factures hmm voilà heu 
artistiquement je suis je suis entre, le cul entre deux chaises on 
va dire ça comme ça, je suis entre pratiquement sur le point de 
pouvoir basculer et heu donc là pour le moment c'est, il y a 
quelque chose qui est en train de se mettre en place, parce que là 
j'ai un producteur depuis heu maintenant heu deux ans, c'est 
important dans la vie d'un artiste et quand on dit producteur, un 
vrai producteur 
CP : c'est à dire ? 
NL : ben vous savez il il y a des producteurs qui se baladent avec 
heu, pour dire de schématiser grosso modo, il y a le producteur 
qui heu c'est l'image classique avec le gros cigare et la 
mallette, et je veux dire et qui est pas plus producteur que vous 
et moi et je crois qu'il y a un producteur pour moi un vrai 
producteur qui se balade pas avec sa petite sacoche, avec des 
billets dans la poche,je veux dire mais un producteur c'est 
CP 31/63
quelqu'un qui s'engage, qui ne promet rien mais que quand il a une 
idée derrière la tête pour son artiste heu quand il l'appelle 
c'est pour lui dire voilà telle date tel jour telle heure tu es 
sur cette scène là, tel projet, c'est ça c'est ça c'est ça c'est 
du concret, c'est pas du style on va faire ci on va faire ça parce 
que les paroles parfois ne vont pas spécifiquement avec les actes 
et c'est pour ça que je dis il y a producteur et producteur. 
CP : [et par contre je ne sais]comment on distingue le producteur 
de l'agent ? 
NL: [et la dans ce métier c'est malheureusement].Ben le producteur 
c'est celui qui va miser de l'argent sur un artiste admettons 
comme là mon producteur me produit, mon spectacle mon album c'est 
lui qui va qui va prendre en charge financièrement tout ce qui est 
affiche flyers, communication, heu heu bon ben là en l'occurrence 
mon single qui va sortir ben heu la pochette heu les 
enregistrements avec mon arrangeur, les frais de studio ça ça 
c'est le producteur.le producteur s'engage mise sur l'artiste bien 
sûr et il récupère et c'est normal,c'est lui qui a la prise de 
risque donc c'est normal qu'après tout ce qui est le fruit, le lui 
revient directement dans la poche. Après après il y a des contrats 
au niveau de de la vente des disques, bon autant de pourcentages 
de cachet sur les heu les concerts, la recherche c'est aussi mon 
producteur donc voilà et après lui l'agent le rôle de l'agent lui 
lui ben là l'agent artistique lui est là pour promouvoir l'artiste 
donc voilà lui trouver, des radios, des interviews, le placer sur 
tel plateau tv, le placer dans telles radios, interviews, ça c'est 
le rôle de l'agent, lui l'agent est là pour s'occuper de tout ce 
qui est promotionnel. 
CP : Comment se sont faits les premiers contacts avec eux ? 
NL:là le fait que j'ai rencontré mon producteur que je connaissais 
mais bon heu lui, son réseau d'agent est devenu mon agent heu donc 
voilà après c'est une question de voilà de connaissance de voilà, 
donc c'est un réseau 
CP 32/63
CP : comment s'est fait le passage d'une pratique plutôt d'amateur 
à celle plus professionnelle ? 
NL:écoutez quand on est j'dirais, des tas de gens chantent en 
France, il y a de très très très belles voix je veux dire, il faut 
se faire voir et puis il y a le contexte de la chance je veux dire 
ça c'est parce que comme je dis énormément de gens chantent bien 
mais le facteur chance n'est pas toujours. C'est un comment je 
vais c'est une réunion de trois choses c'est à dire,il faut avoir 
le talent,il faut avoir la chance et rencontrer les bonnes 
personnes au bon moment et faut que ces trois ingrédients là 
soient se réunissent en même temps parce qu'on peut très bien 
rencontrer avoir la chance et pas avoir le talent, avoir le talent 
mais pas avoir de chance et avoir de la chance mais ne pas 
rencontrer les bonnes personnes au bon moment il faut que tout ça 
soit vraiment une osmose, il faut vraiment que ces trois 
ingrédients là prennent comme une mayonnaise je veux dire, une 
mayonnaise sans l'huile on la fait pas sans l’oeuf on la fait pas , 
sans la moutarde non plus, si on met ces trois là on fait la 
mayonnaise. 
CP : Ceux sont plutôt les gens qui vous ont dit tu as la voix pour 
faire ça tu le peux ou c'est vous ? 
NL:c'est une motivation personnelle parce que dans ce métier là, 
il faut pas se leurrer il y a des gens qui sont sincères qui vont 
vous dire heu c'est bien ce que tu fais, continues, on croit en 
toi vas y et ça c'est important ça fait partie d'une petite 
minorité de gens après ya beaucoup de gens qui vont vous dire 
c'est très bien ce que tu fais et qui ne vont pas le penser une 
seconde heu les trois quarts des choses qu'ils pensent de ce 
qu'ils me disent en tout cas, et donc voilà après ça reste un 
métier où il faut prendre et laisser et surtout un métier où il 
faut surtout bien bien se structurer en tant qu'artiste déjà avoir 
une base moi ma base c'est depuis longtemps c'est ma famille c'est 
mon épouse qui m'a connu heu quand on avait seize dix sept ans heu 
qui m'a connu dans la musique qui a toujours partagé ma 
CP 33/63
passion,qui m'a toujours soutenu quand j'ai eu des moments de 
difficultés heu de doutes parce que dans une carrière on sent que 
ça prend pas parfois l'impression que ce qu'on fait ça n'intéresse 
personne que ça ne sert à rien et ben dans ces cas là je veux dire 
heu là c'est mon épouse en l'occurrence qui m'a toujours dit ça 
ira un jour continue, bosse travaille et pis voilà je veux dire et 
après un petit réseau de gens, d'amis mais surtout ce qui faut 
c'est avoir une structure comme j'ai une maison de production, une 
petite structure de production mais qui est sérieuse qui met les 
moyens heu compétents et heu il faut des fois pas grand chose pour 
que comme je disais que la mayonnaise prenne, il faut pas 
simplement faire partie de comme Universal Music, je veux dire 
heu, il y a des petites productions comme la mienne comme celle 
dont je fais partie dont je suis le seul chanteur parce que bon 
mon producteur le seul chanteur qu'il produit c'est moi parce que 
ben il a sa troupe c'est un homme de théâtre, c'est un homme de 
théâtre de comédie c'est un c'est un artiste réussi à par entière 
et heu moi quand je suis allé le voir il y a deux ans je me suis 
dis voilà Emmanuel Vallois, voilà du théâtre des Insolites voilà 
je lui ai dit qui, qu'il me connaissait parce que je chantais heu 
tous les six mois chez lui et donnais un cours de chant et je suis 
allé le voir ya deux ans, jme suis dit que ma carrière artistique 
il me disait que c'est bien ce que tu fais continues continues et 
jme suis dit mais pour grandir jpeux pas grandir tout seul jpeux 
pas grandir tout seul dans mon coin tout ça et je sentais qu'avec 
Emmanuel Vallois il y avait quelque chose jme suis dit je sais que 
c'est quelqu'un de sérieux dans le métier et jme suis dit ça ça 
peut être ma famille dans la musique et je suis allé le voir j'ai 
pris un rendez vous avec lui je lui ai dit voilà Emmanuel tu me 
connais tu sais ce que je fais sur scène tu as la réalité de ce 
que je peux faire je voudrais évoluer grandir mais j'ai besoin 
d'une structure d'un producteur, je lui ai dit est ce que tu peux 
me produire il m'a dit oui Noël moi je vais te produire tu es le 
seul chanteur tu es le seul artiste que je vais m'occuper je vais 
CP 34/63
prendre, et voilà c'est comme ça et depuis deux ans les choses 
sont faites voilà mis bout à bout parce qu'il connaît mon parcours 
CP: quelle est la position de votre entourage, vous me parliez de 
votre femme, mais votre entourage plus large par rapport à votre 
pratique? 
NL: leur investissement? S'ils m'accompagnent c'est ça? 
CP: oui, voilà. 
NL: oui mais carrément, bon j'ai cinq enfants comme je vous le 
disais au début et mes petits enfants c'est trop tôt pour 
s'apercevoir que leur papi chante mais ça viendra mais heu mes 
enfants ont toujours baigné par mes répétitions parce que je 
travaille continuellement ma voix, parce que bon c'est un muscle 
qu'il faut toujours gardé en activité on va dire ça comme ça comme 
un sportif de haut niveau on va dire ça comme ça haut niveau sans 
prétention mais heu donc ils ont toujours été baigné heu par la 
musique hein heu ça a toujours été très musical à la maison mais 
bon ils n'ont pas pour autant vraiment la fibre, une de mes filles 
aime la musique mais n'a pas ce côté heu viscéral c'est ça 
viscéral par ce que pour monter sur scène faut avoir ça dans ses 
entrailles ah oui oui il faut avoir ça dans les tripes je veux 
dire si si on n'a pas cette heu cette heu comment je veux dire 
cette heu si on n'a pas ça c'est viscéral ça c'est il faut l'avoir 
ça 
CP:quand vous étiez plus jeune comment réagissait votre famille 
notamment vos parents? 
NL: moi j'ai jamais eu comment je vais dire des parents qui ont 
été très je vais pas dire convaincu je vais pas dire ça parce que 
j'étais jeune déjà et que bon quand on est jeune comment dire ses 
parents mais si si je veux être chanteur ils m'ont ouais bon bon 
ben commence continue à travailler à l'époque on en reparlera ça 
n'a jamais vraiment été pris comme un truc heu je vais dire heu 
sérieux à la base donc heu bon c'est rien heu on a ses rêves, il 
faut croire en ses rêves pas tous les réaliser parce qu'autrement 
sinon à un moment on en n'a plus (rire)il faut croire en ses rêves 
CP 35/63
les plus tenaces et puis se dire heu je veux y arriver jveux faire 
ça et je vais arriver à comment je veux dire, heu comment je veux 
dire c'est des buts des buts qu'on se fixe et on se dit faut que 
j'y arrive voilà ou autrement bon ça plus quoi j'ai pas eu des 
parents qui ont été enthousiasmés ou convaincus de ce que je 
voulais faire et pis bon à l'époque moi même je pouvais pas savoir 
que mon destin ma vie aurait bifurqué comme ça. 
CP: le fait qu'ils aient pas été forcément derrière vous ne vous a 
pas tellement.. 
NL:pas du tout, parce que j'ai toujours été très déterminé et heu 
passionné voilà et pis déjà pour monter sur une scène il faut être 
un passionné faut être un passionné déjà il faut aimer les gens 
surtout parce que comme je le disais tout à l'heure c'est un 
métier de contact c'est un métier de communication et si on n'aime 
pas les gens si on n'a rien à dire aux gens on ne monte pas sur 
une scène on n'a rien à y foutre d'ailleurs on va laver des 
voitures heu je sais pas mais on n'a rien à foutre sur une scène 
donc si on n'a rien à faire à passer aux gens voilà. 
CP: vous m'avez parlé de votre rencontre avec Claude François, 
vous vous êtes mis à chanter sérieusement vers 20ans, vous 
précisiez aussi que vous étiez auteur compositeur avant tout. Est 
ce qu'avant même de chanter, d'interpréter vous composiez déjà? À 
partir de quand et pourquoi cela vous est venu de commencer à 
composer pour vous? 
NL:j'ai heu comment je veux dire j'ai j'étais pas parti à la base 
pour heu bon à la base j'étais simplement parti pour être heu un 
interprète finalement et puis heu quand j'ai commencé à quitter 
l'orchestre heu l'orchestre que j'ai quitté c'était en que je dise 
pas de bêtise heu je me souviens plus d'ailleurs heu non c'est pas 
le dernier orchestre que j'ai fait parce que heu j'ai refais de 
l'orchestre après mais j'avais déjà commencé à écrire et à 
composer une dizaine d'années, il y a je veux dire il y a il y a 
quasiment une vingtaine d'années que j'ai que je me suis mis à 
écrire et à composer des chansons qui sont restées plus au moins 
CP 36/63
dans les tiroirs et puis mais elles étaient là et puis heu et puis 
ben heu on va dire une dizaine d'années j'ai sorti, j'ai sorti, 
j'ai sorti le premier disque que j'avais sorti que j'avais écrit 
et composé et qui s'appelait « L'enfant des étoiles » et qui 
rendait hommage à une petite fille qui est décédée d'un accident 
de voiture d'un ami qui était l'ancien directeur ben de Sportica 
donc qui était Hervé Beddelem qui a perdu sa petite fille dans un 
accident de voiture et heu ça m'avait ça m'avait ému comme tout le 
monde a été ému ici, et heu et pis heu ça a duré un mois deux mois 
dans mon esprits et pis heu jme suis dit je suis ému par ce fait 
comme beaucoup de gens alors je vais écrire une chanson pour lui 
rendre hommage et pis cette chanson est restée des mois dans un 
tiroir et pis c'est mon épouse à l'époque qui connaissait l'épouse 
d'Hervé Beddelem et qui lui a dit ben Noël il a écrit une chanson, 
ce serait bien que tu l'écoutes et puis cette chanson là est née 
comme ça et puis mais ça a mis quasiment un an parce que c'était 
frais aussi dans leur tête donc heu et pis sans sans sans que ce 
soit par la force des choses et comme je dis souvent dans la vie 
quand on essaie de forcer des choses généralement on n'y arrive 
pas ou les choses ne se passent pas correctement mais quand les 
choses sans que vous vous y attendiez c'est là, comme Podium on me 
téléphone à vingt heure un soir d'octobre deux mille deux, au 
courant de rien je ne savais même pas qu'il y avait un film qui 
était en construction, je reçois un coup de fil de la production 
jme suis dit, quand mon épouse est rentrée, elle travaillait à 
l'époque, elle rentrait tout de même assez tard, quand elle est 
rentrée je lui ai dit écoute mais pince moi sur le coup 
honnêtement je croyais que c'était une connerie, une bêtise, je me 
suis dit il y a quelqu'un qui me fait marcher, j'ai du mettre une 
paire d'heure pour m'en remettre je me suis dit c'est pas possible 
qu'est ce qu'il m'arrive mais ça ça n'arrive qu'une fois dans la 
vie enfin bon après si ça arrive deux fois on se pose des 
questions mais tant mieux (rire)donc voilà. 
CP 37/63
CP: je vais encore insister sur ma question mais pourquoi cette 
envie d'écrire de produire finalement? 
NL:parce que déjà de part mes, ma formation heu musicale, donc heu 
rapidement jme suis dit fin il y avait ce besoin d'écrire, j'avais 
besoin d'écrire,jme suis dit je vais me mettre à écrire mes 
propres chansons, parce que c'est bien de toujours chanter celles 
des autres, j'étais un interprète je ne chantais pas que Claude 
François mais quasiment que ça mais je chantais d'autres 
interprètes Sardou, Johnny, voilà mais après jme suis dit moi j'ai 
envie d'écrire mes propres chansons composer mes chansons et faire 
aussi découvrir aux gens que moi aussi j'ai des choses à dire et 
que pis voilà j'ai envie de de d'être un artiste aussi à part 
entière c'est à dire donc c'est une manière aussi de dire au 
public ben moi aussi j'ai mon style et c'est aussi m'apporter un 
style parce que bon quand on est interprète heu bon on est que la 
copie en fait de gens connus tandis que quand on arrive avec ses 
oeuvres on devient créateur et moi je pense que de toute façon 
c'est ce que les gens aiment découvrir des nouvelles choses je 
veux dire bon maintenant combien de monde musical actuellement on 
en est plus à la reprise toutes les grandes vedettes de maintenant 
que ce soit je veux dire heu c'est beaucoup de reprises on entend 
des choses nouvelles mais les trois quarts des gens quand on dit 
les émissions de télé-réalité Star Academy ça n'existe plus mais 
enfin maintenant c'est beaucoup, ce ne sont que des reprises bon 
après ceux qui arrivent à tirer leur épingle du jeu du style 
Nolwenn Leroy Amel Bent tout ça et puis après avoir leur propre 
identité et créé leurs propres chansons et bon je veux dire yen a 
pas beaucoup, donc on n'est plus dans un système de reprise, donc 
jme suis dit maintenant ce qui faut, moi j'aime bien écouter des 
chansons, des nouvelles et il y a aussi des très belles reprises 
moi même j'en fais donc bon c'est tout on s'accommode de ça mais 
je pense que pour interpeller le public et les gens c'est ça c'est 
la création qui est importante 
CP 38/63
CP: j'avais compris mais je vais tout de même poser la question, 
quelle est la motivation de votre pratique? 
NL:Artistique bien sûr je fais pas ça pour l'argent 
CP:Qui se charge de votre rémunération lors de vos prestations? 
NL: ça ben ça c'est mon producteur, il gère, il me dit Noël je 
t'envoie chanter je vais dire à Marseille heu tu chantes le vingt 
juillet je dis n'importe quoi le vingt mars, tu chantes à 
Marseille telle salle tel endroit, à vingt heure tu as une heure 
une heure trente de prestation heu, le contrat c'est le producteur 
qui le gère avec l'organisateur là bas là rémunération c'est mon 
producteur. Mon producteur se fait payer par l'organisateur et moi 
après. 
CP: on va maintenant changer de thème on va envisager ce qui est 
définition de l'art. Parfois on parle de chanteur professionnel 
parfois on parle d'artiste, dans votre cas de quoi parlez vous? 
NL: ben je suis je deviens de plus en plus chanteur professionnel 
parce que même si j'ai un statut d'amateur parce 
qu'automatiquement je ne suis pas un professionnel parce que ce 
n'est pas ma rémunération principale je veux dire bon on peut 
considérer que je suis un amateur mais j'ai un je suis quand même 
enregistré à la sasem j'ai un numéro de congé spectacle ce qui est 
quand même obligatoire pour être heu avoir heu comment je veux 
dire le congé de droit sur les chansons qu'on écrit et qu'on 
produit comme moi et heu mais je travaille dans un statut 
professionnel avec un esprit professionnel avec un contexte 
professionnel donc heu voilà 
CP: sinon quelle distinction faites vous entre justement artiste 
et chanteur professionnel? 
NL:je dirais on peut être artiste amateur et artiste 
professionnel, pour moi je dirais que ça n'a pas de comment je 
veux dire je fais pas de distinction quand on est un artiste un 
artiste peut être professionnel ou amateur pour moi comment je 
vais pouvoir définir ma pensée, c'est pas parce qu'on est 
professionnel qu'on est plus performant plus reconnu moi très 
CP 39/63
personnellement moi il y a des gens donc qui sont chanteurs ou 
chanteuses professionnel(les) heu je veux dire heu qui ben je vois 
pas ce qu'ils font sur une scène quoi je veux dire honnêtement moi 
au moins je suis pas j'ai pas la plus belle voix du monde des gens 
chantent mille fois mieux que moi je veux dire mais bon heu mais 
pour moi il y a des fois des gens que je vois qui sont amateurs 
mais on se demande ce qu'ils foutent heu en tant qu'amateurs pour 
moi artiste pour moi artiste ça n'a pas de dénomination amateur ou 
professionnel pour moi t'es un artiste c'est tout. Je fais pas la 
distinction pour moi si on me dit telle personne ben tu vois elle 
chante oui mais elle est pas professionnelle je dirais ben en tout 
cas je m'en fous je m'en fous de savoir qu'entre deux elle est je 
sais pas ben réceptionniste dans un hôtel ou médecin ou je sais 
pas ou qu'importe travaille en usine, et pis que sa passion c'est 
de monter sur scène le week-end pour moi c'est une artiste. 
Professionnel amateur pour moi ça n'a rien à voir. Un artiste 
c'est quelqu'un qui monte sur une scène amateur ou professionnel 
pour moi c'est un artiste, je ne fais pas de distinction. 
CP: je vais maintenant vous citer un passage de Paul Valéry, puis 
vous me donnerez votre avis sur le sujet: « Le très grand est 
celui dont les imitations sont légitimes, dignes, supportables,et 
qui n'est pas détruit ni déprécié par elle ni elle par lui. » . 
qu'en pensez vous? 
NL:Je suis tout à fait d'accord dès lors qu'on touche à une 
reprise admettons heu si elle est laissée dans l'esprit je vais 
pas dire amélioré pas pas détruite pas saccagée dès lors qu'on 
touche à une oeuvre et qu'on la respecte qu'on la reproduit à sa 
sauce finalement. On peut pas mélanger l'artiste et ce que font 
les autres de ses productions, on ne peut pas déprécier ce qu'il 
est et ce qu'il a fait par ça, c'est pour ça même qu'il arrive 
d'avoir mal pour ce très grand qui voit tout ce qu'il a fait entre 
guillemets appauvri 
CP:avez vous rencontré durant votre carrière des gens qui ne 
reconnaissait pas, ou n'approuvait pas votre pratique? 
CP 40/63
NL:moi je pense que, comme je le disais tout à l'heure il y a des 
gens qui savent flatter, donc des gens qui flattent qui sont 
sincères, des gens qui flattent qui ne le sont pas du tout parce 
que c'est un système de jalousie, l'être humain est fait comme ça. 
Mais clairement je n'ai jamais eu de gens qui m'ont dit ce que tu 
fais c'est nul arrêtes toi ou tu nous casses les oreilles ou 
quelque chose comme ça maintenant oui la chose qui faut bien 
savoir c'est que quand on est un artiste comme moi qui monte sur 
scène, il peut pas plaire à tout le monde hein et que les goûts et 
les couleurs, il y a certainement des gens qui n'aiment pas ma 
voix, qui n'aiment pas mes prestations sur scène ça c'est une 
évidence même mais heu bon c'est tout quand on, quand moi je sais 
que je ressors d'une salle de spectacle d'un concert ou d'un gala 
j'ai fait une prestation moi l'essentiel c'est que le maximum de 
gens qui sortent de là se sont dit j'ai passé un bon moment on n'a 
même pas vu le temps passer on a passé deux heures dans une salle 
mais bon sang il est déjà cette heure là et qu'on a passé un bon 
moment maintenant ça ne peut pas être l'unanimité c'est pas 
possible, on ne peut pas faire l'unanimité dans ce cas il n'y 
aurait plus d'enjeux d'ailleurs si on arrive à convaincre tout le 
monde il n'y a plus rien d'intéressant on va dire donc heu oui 
inéluctablement des gens n'aiment pas ce que je fais, n'apprécient 
pas ce que je fais c'est tout mais me l'avoir dit en face non je 
peux pas dire, mais je sais pertinemment que c'est le cas c'est 
évident heureusement d'ailleurs que je plais pas à tout le monde. 
CP: selon vous est ce que ce qui plaît et fait l'unanimité prouve 
de la qualité d'une production ou inversement, prenons l'exemple 
de la musique classique et de Beethoven par exemple, il est 
reconnu, il fait l'unanimité ce qu'il a fait ceux sont des chefs 
d'oeuvre pourtant ça ne plaît pas à tout le monde, a contrario une 
musique ordinaire que tout le monde écoute est ce un gage de 
qualité? 
CP 41/63
NL:ben le truc c'est que c'est quand même quelqu'un qui qui a 
chamboulé le monde musicale de son époque qui a laissé des traces 
et des oeuvres indélébiles 
cP: dès lors où on laisse des traces ça voudrait [dire que...] 
NL: [c'est c'est des oeuvres]c'est quand même des oeuvres qui à 
l'époque étaient déjà modernes je veux dire pour son époque quoi 
qu'on en dise Mozart Beethoven tout ça étaient des gens avant-gardistes 
aussi parce que si on arrive encore à les jouer dans des 
opéras encore maintenant que les orchestres symphoniques ou heu 
continuent à jouer des oeuvres heu de ces légendaires compositeurs 
c'est que quelque part ils ont plu à un maximum de gens maintenant 
bien évidemment, ils ont plu à un maximum de gens, ils font 
presque l'unanimité mais ne font pas l'unanimité même Schubert 
même Mozart même Beethoven la musique classique moi j'aime bien 
j'aime tous les styles musicaux mais il y a des gens qui sont très 
électro très techno Beethoven Mozart pour eux c'est heu c'est une 
autre planète. Moi j'écoute de tout, j'aime tout ce qu'il se fait 
dans la musique, tous les styles, j'écoute tout. J'aime tout mais 
j'aime pas tout dans tout on va prendre le cas du rap il y a des 
morceaux de rap qui sont sublimes qui sont très biens et d'autres 
morceaux qui m'agacent pas par rapport au texte bon pareil pareil 
pour la variété pareil pour le rock,j'aime bien la musique électro 
j'aime bien la techno, il y a des choses que j'aime bien qu'on 
peut mettre dans une chanson, mais j'aime pas tout dans l'électro 
et la techno mais ça ne remet pas en cause comment je veux dire 
heu ce style musical bon il y a des artistes qui sont comment je 
pourrais dire ça ça remet pas en cause oui heu. Ne pas aimer ne 
remet pas en cause le talent de l'artiste non plus après pour 
répondre à la question des lors où quelque chose remporte 
l'attention et l'adhésion d'un certain nombre on peut considérer 
qu'il y a de la qualité déjà simplement au fait de faire consensus 
auprès de gens qui aiment la musique. 
CP 42/63
CP: dans la presse, vous refusez qu'on parle d'imitation quand on 
parle de votre voix,vous précisez qu'elle est naturelle absolument 
pas forcée 
NL: jpeux pas refuser jpeux pas interdire quelqu'un de dire heu 
vous êtes un imitateur ou est ce que vous imitez c'est normal 
c'est je dirais depuis que je chante c'est entre guillemets un 
point d'interrogation bon pour certaines personnes qui sont un peu 
heu interpellées par heu la voix et pas parce qu'il y a beaucoup 
de gens qui connaissent ma voix et c'est pour ça c'est que je lis 
parfois mais ils ne connaissent pas mon visage et c'est pour ça 
qu'on est en train de développer toute une image artistique, ça se 
travaille ça une image mais je n'ai jamais interdit à personne de 
me poser la question après à moi de développer et de convaincre 
CP: mais en quoi est ce important de le préciser, est ce que ça 
signifie que le fait qu'elle soit naturelle lui attribue plus de 
valeur de légitimité que si elle était travaillée? 
NL:si j'avais eu heu si j'avais travaillé ma voix ben de toute 
façon on a un timbre, le timbre de la voix c'est comme l'empreinte 
l'empreinte c'est comme heu, je veux dire ça n'appartient qu'à une 
personne c'est pour ça que comme je disais tout à l'heure je n'ai 
pas la voix de Claude François et ceux qui disent j'ai la voix de, 
j'ai la voix de, j'ai la voix de, c'est pas vrai le timbre de voix 
c'est comme une empreinte ça appartient qu'à un seul comme l'Adn, 
on a un adn qui ne correspond pas, chacun a son adn, chacun a son 
empreinte, le timbre de la voix c'est pareil c'est pour ça que je 
dis on ne peux pas ceux qui disent on m'a raconté, moi je connais 
pas, moi le monde des imitateurs tout ça je ne connais pas, je ne 
fréquente pas ces gens là parce que justement c'est la paradoxe 
entre eux et moi moi je dis rien je critique pas hein il y a des 
gens qui montent sur scène qui font Claude François,moi c'est très 
bien pour eux, ils gagnent leur vie avec ça moi je ne vois pas 
d'inconvénients moi c'est leur truc, moi personnellement je trouve 
ça pathétique ça c'est mon point de vue mais ces gens là on le 
droit de vivre, le droit de chanter le droit de monter sur une 
CP 43/63
scène de faire entre guillemets le pitre c'est leur problème moi 
je je remet certainement pas en cause ce truc là. Des fois on m'a 
même raconté que certains se disaient plus doués que leur idole, 
quand on en arrive là moi je pense que faut peut être aller 
consulter quand même déjà et heu après comment pourrais je dire 
moi moi j'ai la voix, c'est tout c'est une nature comme ça qui 
fait que j'aurai très bien pu avoir avoir une voix qui 
ressemble... 
CP:Vous pouvez comprendre que c'est assez marrant car déjà vous 
avez une voix proche de celle de Claude François, vous chantez du 
Claude François donc forcément les gens... 
NL: il peut il peut avoir confusion dans le genre, mais heu que 
comment je pourrais expliquer ça, c'est un destin c'est une vie, 
c'est comme ça si j'en suis là c'est aussi grâce à lui puisque 
finalement, j'existe parce qu'il a existé, c'est une certitude 
parce que comme ma voix, comme sur scène quand je l'ai vu comme je 
disais j'avais onze ans douze ans à Grande-Synthe qui m'a vraiment 
donné ce déclic mais après on me dira mais oui mais vous vous êtes 
imprégné de lui vous avez travaillé votre voix, vous avez fait 
pour lui ressembler mais non non le truc est là et donc ça ça peut 
semer une ambiguïté un doute mais bon pas du tout c'est tout moi 
même je ne cherche même pas à savoir, j'en suis arrivé là 
aujourd'hui là avec vous à donner un entretien pour votre projet 
j'en suis arrivé là sans calculer sans chercher voilà comme je dis 
voilà c'est comme ça c'est comme ça. 
CP: mais on doit tout de même admettre le travail et 
l'investissement de ces personnes qui elles perfectionnent 
travaillent réellement leur voix 
NL: comme les imitateurs? 
Cp: oui par exemple, 
NL: un imitateur doit passer des heures et des heures entières à 
essayer de trouver la voix qui ressemblent le plus possible à la 
personne qu'il veut imiter bon et en plus là quand on devient 
imitateur il y a aussi le côté visuel aussi donc heu le côté 
CP 44/63
gestuel heu des gens que qui cherchent à imiter parce qu'il y a le 
vocal il y a le visuel tandis que moi j'ai jamais cherché à être 
heu mais moi comme je l'ai dit ma démarche sur la scène c'est moi 
mon style les gens qui viennent me voir sur scène ils ont un 
chanteur avec une identité et qui n'a rien à voir avec Claude 
François les gens quand les gens viennent me voir sur scène quand 
ils ressortent maintenant ils me disent mais quelle belle voix 
vous avez qu'est ce que vous chantez bien, on aime bien cette 
chanson mais jamais ils vont me dire ah ça ressemble à Claude 
François ça ça m'a fait penser à Claude François jamais j'arrive 
avec du travail parce que ça a été du travail de dire à convaincre 
les gens que à cinquante quatre ans quasiment de dire que ben non 
vous allez voir Noël Lagoia et vous allez pas voir Claude 
François, vous allez écouter du Claude François 
CP:dans le monde artistique que pensez vous de l'interprétation, 
de la reproduction par rapport à la création? 
NL:ben moi je dis toujours réinterpréter c'est dans un sens rendre 
hommage à l'interprète à des créateurs à des auteurs à des 
compositeurs si je parle du milieu musical heu comme quelqu'un qui 
reproduirait un tableau ou heu c'est rendre hommage à son créateur 
je dirais bon c'est heu et après c'est vrai que moi 
personnellement je pense que quand on a un don quelconque c'est de 
susciter la création c'est de susciter chez les gens le fait de 
voir des choses nouvelles je veux dire moi mon tour de chant qui 
fait vingt quatre chansons fait quasiment heu la moitié de 
reprises et la moitié quasiment de création fin je veux dire donc 
heu voilà je veux dire heu 
CP : que pensez vous de l'un par rapport à l'autre, ont ils autant 
de légitimité selon vous ? 
NL:oui oui ils ont la même légitimité dans un tour de chant j'ai 
comment je vais dire j'ai autant de plaisir à chanter mes reprises 
et mes interprétations parce que mes reprises sont bien choisies 
je n'interprète pas n'importe quel titre, n'importe quelle 
chanson, je choisis et heu bon voilà déjà c'est donner du plaisir 
CP 45/63
de les chanter, de les rechanter, et pis après ya toujours le fait 
d'avoir créé ses propres chansons et comment je vais dire c'est 
toujours plus c'est plus pétillant de faire écouter ce qu'on fait 
soi-même aux gens après on fait des reprises et tout, les gens 
apprécient apprécient moins mais les deux ont leur légitimité. Moi 
quand je fais des reprises je réorchestre ça veut dire que je 
réorchestre les reprises pour apporter du son nouveau une 
interprétation nouvelle en respectant la structure de la chanson 
l'identité de la chanson c'est une manière de respecter ceux qui 
ont créé heu ces oeuvres hein c'est ça donc c'est déjà un certain 
respect par rapport à ça et puis apporter sa touche personnelle 
parce que si c'est simplement rechanter heu les chansons tout 
bêtement une version karaoké ça n'a pas vraiment d'intérêt. 
CP : c'est donc la différence entre imitation et interprétation 
NL : ah oui carrément c'est toujours apporter sa touche 
personnelle j'en reviens toujours à ça c'est à dire que dans une 
reprise les gens connaissent la chanson mais si on arrive avec un 
son nouveau avec un rythme nouveau moi j'ai repris très 
dernièrement, dans mon nouveau single qui va arriver j'ai dit 
single mais c'est pas un single c'est un CD quoi puisqu'il y a 
trois titres dessus il y a une chanson que j'ai écrite et composée 
et il y a deux reprises de vieux standards de Claude François 
parce que la voix qui fait en sorte que je reprends ces chansons 
là et c'est deux vieux succès de Claude François mais qui ont été 
totalement réorchestrés par mon arrangeur avec nos touches 
personnelles et voilà de manière à ce que les gens quand ils vont 
écouter ces deux reprises connaissent les chansons ceux qui 
connaissent pas vont découvrir comme si c'était une nouvelle oeuvre 
et les fans de Claude François les gens de ma génération qui 
connaissent ce répertoire là vont dire ah oui ces deux chansons là 
on les connaît on les connaît bien pourtant c'est pas les plus 
connus du répertoire de Claude François parce que là aussi c'est 
l'intérêt de faire en sorte que ça soit une redécouverte avec des 
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CP 46/63
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La reprise et l'interprétation dans le domaine musical

  • 1. Université Charles de Gaulle Semestre 6 Lille 3 Licence 3 Culture et Médias UFR Deccid TD NOUVELLES FORMES DE L'ECHANGE CULTUREL La reprise et l'interprétation dans le domaine musical dirigé par Pierre Grosdemouge Carole Péraste
  • 2. Table des matières I.INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 II.Définir un statut d'artiste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 II.I.Entre chanteur populaire et artiste innovant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 II.II.Être authentique : Être un artiste « un vrai », pas un imitateur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 II.III.Relation à l'argent, un passionné non un mercenaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 II.IV.L'Habitus d'artiste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 III.Exister dans un espace collectif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 III.I.Une équipe de travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 III.II.Un environnement culturel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 III.III.Un public . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 IV.Le besoin de se démarquer : créativité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 IV.I.Nécessité de se démarquer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 IV.II.Innover en s'appropriant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 V.Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 VI.Annexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 VI.I.Grille d'entretien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 VI.II.Transcription entretien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 VII.Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63 CP 2/63
  • 3. I. INTRODUCTION Art ou non art ? Aujourd'hui, il est difficile de déterminer dans quelle catégorie se prédestine une pratique, et pour pouvoir y parvenir, il faut d'abord se poser les bonnes questions et tenter d'y trouver des réponses. Le contexte actuel nous amène à observer l'émergence de nouvelles pratiques reconnues comme étant artistiques telles que le graff ou encore la photographie, cela nous permet de nous questionner sur la raison pour laquelle elles sont définies comme telles, par qui et selon quels critères. Passer d'un statut à un autre suppose des étapes, un processus pour le passage d'un statut ordinaire à celui artistique, cette transition se définit par l'expression anglo-saxonne artification1,c'est un terme encore peu utilisé dans le domaine artistique, il sera utilisé ici non selon sa connotation péjorative mais simplement dans l'idée de la transformation du non art en art. Pour se lancer sur ce terrain, il faut s'interroger sur les marges et les limites de la culture, sur ce qui rentre dans le champ culturel. Ces interrogations seront à même de nous renseigner sur ce processus d'artification mais aussi sur ce qu'il dévoile de la culture sociale. Difficile est de déterminer les critères que doit remplir une production ou une pratique pour être considérée, acceptée, reconnue. L'histoire des arts a permis de déterminer ce qui, à un moment donné de l'histoire, permettait de reconnaître l'art quand il était présent. La créativité, la précision, l'investissement, le désintéressement, l'authenticité, la question l'excellence... Aujourd'hui il est plus compliqué de se référer à ces critères pointilleux, car la culture sociale a évolué, les pratiques se sont diversifiées, multipliées avec le temps et les changements sociaux. La musique a depuis longtemps investi le domaine artistique, du moins selon la définition classique et commune de l'art. Bien que son statut artistique n'est globalement pas remis en cause, il s'agit tout de même d'un univers très vaste qui comporte de nombreux styles et pratiques, de l'instrument à la chanson en passant par le mixe et tout autre genre. Ainsi dans ce cadre toutes les pratiques n'y ont pas naturellement leur place, il s'agit d'une négociation complexe sur de nombreux points. Ainsi, tout n'est pas reconnu selon la même échelle de valeur, au coeur même de ce monde, une hiérarchie dans la légitimité des pratiques est établie. Comment ces dernières acquièrent elles un statut plus artistique et légitime que d'autres et pourquoi ? Dans cette étude, l'attention sera portée sur la 1 N, Heinich, R.Shapiro, De l'artification CP 3/63
  • 4. pratique de la reprise et l'interprétation dans le monde musical, et cela à partir d'un entretien mené auprès d'un chanteur, interprète de l'artiste Claude François. Dans un premier temps, je partais sur l'idée de réfléchir à la légitimité d'une pratique qui n'apporte rien de nouveau, qui ne fait pas preuve d'originalité. Autour de cette réflexion je voulais réfléchir sur le lien entre art et originalité, est qu'un artiste se doit d'être un créateur. Cette question permet de réfléchir aux qualités requises pour être « artiste » à part entière. Puis suite à l'entretien, à de nombreuses écoutes et une première réflexion sur le contenu, plus que de m'interroger sur la question précise de l'originalité, je me suis interrogée sur qui fait que la pratique de la reprise musicale est à même de rentrer dans le champs artiste. Plus simplement, Quelle légitimité pour la reprise et l'interprétation musicale dans le monde artistique ? Le chanteur interprète apporte une perspective et une position sur ce que serait l'art et quels seraient les critères d'appartenance à la sphère artistique, ce qui permettrait de déterminer si oui ou non une pratique peut être légitimée. Pour autant dans son discours, est à relever la difficulté qu'il a lui même à se définir et définir sa pratique. Trois grands thèmes sont porteurs de son discours et de son argumentaire, la question du statut du chanteur, la dimension collective d'une pratique artistique, et enfin le thème de l'originalité et du caractère exceptionnel dans l'art. C'est donc dans cet ordre que nous tenterons de réfléchir sur la pratique de la reprise musicale. CP 4/63
  • 5. Dans cette étude, il s'agit d'un chanteur interprète, Noël La Gioia, ayant un statut d'intermittent, il côtoie fréquemment le milieu de la musique puisqu'il possède une équipe de travail, agent, producteur, arrangeur, il se produit dans différents dispositifs scéniques. Parallèlement, il a une activité professionnelle à plein temps dans un hôtel type village vacances, il y travaille de nuit ce qui lui permet de s'investir de façon entière dans sa carrière artistique. Il se décrit comme étant à la limite du basculement dans la sphère professionnelle du métier, il cherche à prouver son identité d'artiste en argumentant ce qui fait de lui un artiste à part entière. Faire de l'art ou être artiste n'est pas quelque chose de naturel mais résulte d'un processus constant et qui dépend en même temps du contexte historique et social, l'artiste d'aujourd'hui ne l'aurait pas forcément été il y a vingt ans par exemple. Il rejoint dans cette perspective, celle de Nathalie Heinich2 qui entend par artification, « ensemble des processus cognitif, sémantique, institutionnel, économique, affectif [...]aboutissant à faire franchir à un objet, à l’oeuvre, à une personne, l'auteur, la frontière entre non art et art. ». Pour Noël, prétendre se situer dans le champ artistique c'est d'abord posséder le statut d'artiste, faire partie d'un collectif, d'une unité mais c'est aussi se démarquer, montrer son côté unique et exceptionnel. II. Définir un statut d'artiste Définition ouverte de l'Unesco dans sa Recommandation relative à la condition de l'artiste (adoptée à Belgrade, le 27 octobre 1980) : « On entend par artiste toute personne qui crée ou participe par son interprétation à la création ou à la recréation d'oeuvres d'art, qui considère sa création artistique comme un élément essentiel de sa vie, qui ainsi contribue au développement de l'art et de la culture, et qui est reconnue ou cherche à être reconnue en tant qu'artiste, qu'elle soit liée ou non par une relation de travail ou d'association quelconque. » Pour définir une pratique qu'elle soit artisanale, artistique, professionnelle ou amatrice il est nécessaire de déterminer le statut de celui qui la pratique. Au cours de l'histoire, la définition du statut, passant de celui d'artisan pointilleux attaché à la précision et aux canons du moment, travaillant souvent sous les instructions d'un commanditaire (peinture et portrait) à l'artiste fou, dérangé dont les amateurs sont attirés par la bizarrerie, l'innovation, le désordre et commencent à vouloir toucher le génie. Ces transformations de statut sont à penser en même temps que la relation du praticien avec son activité, le fait qu'il soit par exemple, rémunéré ou qu'il travaille pour 2 Nathalie Heinich, Roberta Shapiro (dir.), De l’artification. Enquêtes sur le passage à l’art, Paris, EHESS, coll. « Cas de figure », 2012, 336 p. CP 5/63
  • 6. quelqu'un en particulier, qu'il s'y emploie par plaisir ou par vocation. Ainsi lors du basculement dans le champ de l'art, on observe un basculement des objets, de l'action, mais aussi des personnes. C'est ainsi qu'il est nécessaire de requalifier les choses, d'autant plus qu'aujourd'hui nombreux sont ceux qui postulent au statut d'artiste. II.I. Entre chanteur populaire et artiste innovant Dans le cas de Noël, il est difficile de déterminer son statut dans le monde musical, certes il se définit en terme d'artiste mais parfois aussi en tant que « chanteur populaire », « showman », « chanteur professionnel » ou encore, « passionné ». D'un côté, dans son discours il s'attache à la dimension populaire de sa pratique, le bien qu'il éprouve à faire plaisir aux gens, à les rassembler, à leur proposer ce qu'ils aiment. C'est ce qu'observait Perrenoud lors de son enquête sur les musicos, il explique que les musicos cherchaient « à se faire plaisir autant qu'à faire plaisir au gens ». Cet aspect de la pratique est à penser comme quelque chose qui apparaît nécessaire au bien être du musicien ou du chanteur. De cette manière, Noël insiste sur le côté vocationnel de sa pratique, « il ne peut pas s'empêcher de... », « quelque chose de viscéral ». D'un autre côté, il parle de sa pratique comme un investissement, un travail. Un artiste qui cherche qui travaille ses morceaux, qui tente de faire du nouveau, de se démarquer. Il s'est mis après quelque temps à écrire ses chansons même si, à l'heure actuelle la majorité d'entre elles « restent au fond d'un tiroir ». Il sait qu'il ne doit pas faire l'unanimité mais, il garde tout de même comme ambition de rassembler le maximum de monde mais désormais avec ses propre productions. Il se range dans des catégories, il s'attribue des statuts différents, qui changent en fonction du dispositif socio-esthétique dans lequel il se situe. Perrenoud3 qui étudie le cas des musicos explique que « plus que le genre musical, c'est le type de dispositif socio-esthétique dans lequel on est engagé[...] qui constitue le vecteur le plus puissant. » (Perrenoud, 2008:105). Le lieu où se produit l'artiste va permettre de lui attribuer une identité parfois plus prestigieuse à un endroit qu'un autre. Il peut être auteur, créateur dans certains contextes et simple exerçant dans d'autres lieux. Pour autant, pour affirmer sa légitimité et son statut dans le monde de l'art, il s'attache à sa nomination officielle d'auteur, étant inscrit à la Sasem. « je suis quand même enregistré à la Sasem j'ai un numéro de congé spectacle ce qui est 3 Marc Perrenoud, Les musicos au miroir des artisans du bâtiment, Ethnologie française1/2008 (Vol. 38), p. 101-106. CP 6/63
  • 7. quand même obligatoire pour être heu avoir heu comment je veux dire le congé de droit sur les chansons qu'on écrit et qu'on produit comme moi et heu mais je travaille dans un statut professionnel avec un esprit professionnel avec un contexte professionnel ». Il reste attaché à sa nomination officielle et au côté sérieux de sa pratique, il insiste sur le fait d'avoir laissé tomber le côté « chanteur de salle de bain ». II.II. Être authentique : Être un artiste « un vrai », pas un imitateur Le chanteur distingue, l'artiste qui a un « don », de celui qui travaille, affirmant que le premier aurait une légitimité plus naturelle en tant qu'artiste. Savoir faire quelque chose comme ça, comme quelque chose de présent en soi, et qu'on aurait qu'à exprimer sans effort. C'est ainsi qu'il insiste sur la distance qu'il met avec les imitateurs notamment ceux, imitant le défunt chanteur Claude François. Il met en avant le naturel de sa voix, et se défend de faire tout travail sur celle-ci, c'est ainsi, qu'il dénigre quelque peu celui qui s'acharne à faire quelque chose qui n'est pas naturel et spontané, authentique. Être artiste c'est rester fidèle à sa pratique, il ne ferait pas tout pour devenir un chanteur célèbre. « moi je trouve ça entre guillemets assez pathétique moi c'est mon point de vue donc voilà heu mais moi ma démarche, on m'a proposé, on m'a proposé il y a une quinzaine d'années, un producteur qui m'a proposé, je chantais je faisais une première partie au casino de Dunkerque, j'avais chanté en première partie de Herbert Léonard et je tombe sur un producteur qui me dit moi je veux bien te prendre parce que tu as la voix. Je t'ai vu chanter c'est pas mal ce que tu fais, mais je, je voudrais monter un show Claude François avec toi, il faudra que tu mettes une perruque blonde parce que tu n'as pas le physique de Claude François, bien, bien, bien, bien pour moi parce que si en plus...c'est un bonheur pour moi parce que je n'ai pas du tout le physique ça c'est, là on peut pas nier le contraire là je veux dire heu bon et il m'a dit heu à l'époque moi je peux te faire tourner dans le France voire même en Europe pour faire un grand show Claude François avec des danseuses et tout mais il va falloir que tu apprennes à danser, que tu mettes une perruque blonde, un costume paillettes et tout, CP 7/63
  • 8. je veux dire non, j'ai dit non alors je suis passé peut être à côté de bien des choses mais je serai pas là aujourd'hui j'en suis persuadé. Je serai pas là aujourd'hui. » Il insiste qu'il n'en viendrait pas à faire n'importe quoi. Prétendre avoir le statut d'artiste nécessite selon Noël un minimum de transparence d'authenticité. Ainsi il marque la différence entre l'imitation et la reprise ou l'interprétation. « Je trouve ça pathétique ça c'est mon point de vue mais ces gens là ont le droit de vivre, le droit de chanter le droit de monter sur une scène de faire entre guillemets le pitre c'est leur problème » II.III.Relation à l'argent, un passionné non un mercenaire Le rapport à l'argent lui aussi peut jouer un rôle dans le statut d'un artiste, celui qui joue avec un certain désintérêt ou celui qui cherche le profit. Dans le cadre de la pratique de Noël, il ne s'agit pas d'une question financière même si l'argent qu'il gagne est selon lui un dû au regard de l'investissement qu'il met dans sa pratique. Pour autant, un artiste n'a selon lui pas à se préoccuper de cette question et cela pour deux raisons, soit il est : 1. artiste amateur et il joue et se produit pour le plaisir, ou même parfois par « nécessité viscérale », 2. il a dépassé le cap de l'amateurisme et il doit laisser cette question à ceux qui sont concernés c'est à dire le producteur. De cette manière il peut se donner entièrement à son art. De manière plus générale, sans parler d'amateurisme ou de professionnalisme, l'artiste pour Noël est celui qui est passionné. II.IV.L'Habitus d'artiste Dans le cadre de cet entretien Noël a conscience de ce qui est attendu dans le domaine de l'art reconnu, ainsi il joue dans les diverses catégories qu'il cite, se mettant dans la peau d'un chanteur populaire par exemple. Pour pouvoir se positionner dans ces cases, il a dû se faire sa place. Pour intégrer le cadre artistique il faut se créer un statut d'artiste. Perrenoud4 explique que « fluctuer dans le métier (côtoyer des dispositifs, des pratiques, cours de chant, communication musicale), côtoyer 4 Marc Perrenoud, Les musicos au miroir des artisans du bâtiment, Ethnologie française1/2008 (Vol. 38), p. 101-106 CP 8/63
  • 9. des espaces à fort capital culturel permet de construire des identités différentes. » Cela permet de se constituer un habitus d'artiste. III. Exister dans un espace collectif Il y a nécessité de se situer du point de vue du statut pour savoir dans quel cadre évoluer, celui de l'art ou celui de ce qui n'est pas de l'art. Mais pour acquérir le statut d'artiste ou de pratique artistique, il faut évoluer au sein d'un environnement qui vous amène à le devenir. Nous parlions précédemment de l'influence des dispositif socio-esthétique, mais il y a aussi l'environnement humain et institutionnel qui a beaucoup d'influence. C'est ce dont parle Noël quand il évoque la nécessité d'évoluer dans un collectif. Noël insiste sur le fait que si il en est arrivé là aujourd'hui5 c'est bien grâce à l'équipe qui l'entoure. « ça reste un métier où il faut prendre et laisser et surtout un métier où il faut surtout bien se structurer en tant qu'artiste, déjà avoir une base. ». Pour lui il faut à la fois réunir trois choses : le talent, la chance, et la rencontre avec les bonnes personnes. Il est lucide sur le fait que des milliers de personnes en France chantent bien, voire mieux que lui mais ces personnes, n'ont pas toujours réuni ces trois facteurs, dans son cas il a réussi . III.I. Une équipe de travail Pour pouvoir s'investir sur la partie purement pratique de la chanson, il s'est équipé d'une équipe de travail : un agent, un producteur, un arrangeur et des danseuses. « surtout ce qui faut c'est avoir un structure comme j'ai une maison de production, une petite structure de production mais qui est sérieuse qui met les moyens heu compétents ». il considère presque sa pratique comme une oeuvre collective. Plus que chanter, il produit un show sur scène il ne s'agit pas que de sa voix mais aussi l'arrangement fait par son collègue ou les chorégraphies de ses danseuses qui viennent apporter leurs touches. Ainsi chacun se doit de trouver sa place dans son équipe. Cette notion de nécessité de l'apport de chacun est à rapprocher de la notion de de « solidarité mécanique » de Durkheim. Il s'agit bien d'un travail collectif, il a besoin de l'avis de chacun avant d'entreprendre chaque projet. 5 Noël interprète de « Comme d'habitude » en duo avec Benoît Poolvoerde dans le film Podium CP 9/63
  • 10. Ce travail d'équipe lui est d'autant plus nécessaire maintenant qu'il souhaite se singulariser en se lançant avec ses propres textes et ses propres fonds musicaux. En effet toute activité artistique à une dimension intrinsèquement collective, il y a toujours une de « redevabilité » entre les acteurs dans la mesure où l'un et l'autre donne des conditions de possibilité et d' « effectuation » du travail (A.Blanc et A.Pessin,2004:144). Une personne étant très douée, si elle n'est pas entourée par les bonnes personnes, risque de passer à côté de la réussite artistique et ne serait pas à même d'exploiter totalement son potentiel. L'artiste selon Noël doit être capable d'exposer son savoir faire, ce dernier en a conscience : « pour grandir, jpeux pas grandir tout seul, jpeux pas grandir tout seul dans mon coin tout ça et je sentais qu'avec Emmanuel Vallois il y avait quelque chose, jme suis dit je sais que c'est quelqu'un de sérieux dans le métier et jme suis dit ça, ça peut être ma famille dans la musique » Une attitude humble et professionnelle serait de rendre compte de l'entreprise collective mise en place lors de la sortie d'un album ou à la fin d'un concert. « on est jamais seul autour de ça on doit toujours quelque chose à quelqu'un quand on a une part personnelle de réussite ça c'est obligatoire ça faut jamais l'oublier. » c'est bien ce sur quoi il insiste en expliquant qu'il a conscience de l'impact qu'à eu son idole Claude François. Avec lucidité, il ajoute que sans lui il n'en serait peut être pas là aujourd'hui. Ne jamais oublier à ceux qui vous permettent d'y arriver. C'est ce qu'il regrette de la part de certains musiciens célèbres le manque de partage des retombées médiatiques, il note justement cette faille à l'âme d'artiste, dénonçant parallèlement le besoin de tirer la couette de son côté. Il prend justement exemple du binôme Fred Rister et Bob David Ghetta « c'est lui (Fred Rister)qui depuis sept ans a fait le plus de tubes de David Ghetta, les Black Eyes Peas c'est Fred Rister parce qu'on parle toujours de David Ghetta, David Ghetta c'est celui qu'on voit sur la scène devant des milliers de gens en train de mixer et tout mais celui qui travaille sur les platines sur les ordinateurs en amont c'est Fred Rister c'est à dire bon Fred Rister a lui porte quatre vingt pour cent du travail », selon lui on ne parle pas assez de lui et David Ghetta n'insisterait pas non plus pour reconnaître publiquement tout le travail produit par son binôme. CP 10/63
  • 11. III.II.Un environnement culturel Évoluer dans un environnement culturel permet de s'inscrire dans le champ culturel de sa pratique, c'est ce qu'observe Boltanski lors de son enquête sur les Bande-dessinées. « mon producteur le seul chanteur qu'il produit c'est moi parce que ben il a sa troupe c'est un homme de théâtre, c'est un homme de théâtre de comédie c'est un c'est un artiste réussi à par entière ». évoluer dans un environnement artistique permet aux pratiquants d'acquérir plus de légitimité et de se constituer un habitus d'artiste. Le producteur de Noël La Gioia n'appartient pas au domaine de la musique mais à celui du théâtre, pour autant il est à même d'accompagner la carrière de Noël et parallèlement lui apporter une dimension plus théâtrale qui lui est utile lors de ses représentations scéniques. L'équipe de travail du chanteur s'est constituée notamment par ce système de réseau, c'était une connaissance de son agent, ainsi les choses se sont faites naturellement. Pour parler de lui et prouver la légitimité de sa place dans le monde de l'art, il n'hésite pas à évoquer les rencontres qu'il a pu faire, lors de l'entretien il me parle de sa collaboration avec Fred Rister, de ses représentations dans des salles fameuses, ou son enregistrement dans un studio réputé. C'est de cette manière, en faisant des références à des lieux mythiques, qu'il est en mesure de rendre compte de son « poids » culturel. Son expérience aussi très médiatisée avec sa participation au film Podium réalisé en 2004 par Yann Moix, lui permet d'affirmer sa place et son état de confort dans le milieu, il peut ainsi faire référence à des personnes prisées. De plus les connaissances qu'il a pu développer lui permette aujourd'hui de commencer un autre style de carrière mais toujours dans le domaine musical. Il intègre une comédie musicale, dirigée par son actuel producteur, il en est même le personnage principal. Il effectue comme l'énumération de sa réserve culturelle, proche de l'idée d'un répertoire des objets et des dispositifs développée par Thévenot et Boltanski. Un inventaire qui contribuerait à objectiver la grandeur d'une personne, dans le cas ici, d'un artiste6. Comme il aime le préciser, ce sont bien les rencontres qu'il a faites (rencontre avec son producteur alors qu'il donnait des cours de chant dans le même établissement que lui) ou l'appel inopiné d'une boite de production de film (pour l'enregistrement pour Podium), qui lui ont permis d'évoluer et de 6 Boltanski Luc, Thévenot Laurent. De la justification. Les économies de la grandeur. Gallimard, 1991 CP 11/63
  • 12. remplir plus de salle, se faire connaître et apprécier. Son environnement artistique lui a permis de se constituer un public qui régulier, intéressé, et qui, plus que de s'intéresser aux reprises de Claude François, devient curieux de ce que peut faire « lui » Noël La Gioia. III.III. Un public Pour qu'on puisse parler d'une pratique artistique ou d'un artiste en tant que tels, il faut d'abord que l'activité soit reconnue et destinée à quelqu'un. « on a la chance de pouvoir exister heu artistiquement heu grâce aux gens, grâce au public parce que faut pas oublier que quand on est dans une salle sur une scène si personne n'était dans la salle, on y serait pas si les gens n'achetaient pas vos places, les places de spectacle voilà moi c'est humilité respect pour heu les gens surtout dans le contexte actuel » Noël insiste sur la dimension sociale et humaine de sa pratique. Pour lui faire de l'art c'est d'abord interpeller quelqu'un. Il y a un bien la notion de relation, de transmission. Noël qui est en cours de construction de sa carrière, il parle du travail important pour constituer son public. Un public qu'il essaie de fidéliser au cours de ses représentations dans la région. Mais il essaie aussi de l'élargir, en s'appuyant sur une communication via les réseaux sociaux notamment. Les commentaires de ses spectateurs sont selon lui sa récompense après chaque spectacle comme s'il avait fait quelque chose de bien. Pour faire évoluer sa carrière il a besoin de faire évoluer son public. Puisqu'il est à un moment de sa carrière où il souhaiterait davantage exposer ses propres productions, il ne cherche plus à rassembler des fans de Claude François, mais des gens qui s'intéressent réellement à ce qu'il propose d'autre. CP:selon vous vos spectateurs viennent à vos shows pour vous ou pour profiter d'un instant avec Claude François ? NL:nan les gens heu je dirais que je dirais que je suis en train d'inverser la tendance des gens viennent de plus en plus pour me voir et moi heu comment je veux dire heu oui les gens viennent de plus en plus pour heu ben pour moi jvais dire on dira ça comme ça en toute humilité CP 12/63
  • 13. Il ajoute que c'est un travail de fond, de persuader les gens qu'ils ne vont pas voir Claude François mais bien Noël La Gioia. Intéresser, les faire adhérer à sa pratique, c'est rendre cette dernière véritable voire autonome, ce sera une pratique qui intéresse les gens soit en les touchant soit en les interpellant. C'est ainsi que le chanteur ne se satisfait plus uniquement des « Je fais un bond de vingt ans en arrière » mais souhaite désormais des commentaires sur les arrangements qu'il a apporté à quelques titres ou mieux des commentaires sur ses propres textes. Comme l'explique Boltanski dans son étude sur les bande-dessinées, la pratique gagne en légitimité quand elle arrive à se créer un appareil, des moyens d'être jugé, apprécié. L'évolution du public est possible certes avec un travail mais aussi en fonction du contexte et de l'environnement social par exemple. Noël note qu'aujourd'hui le public amateur de musique est en attente de nouveauté, de créativité et cela en fait dans tous les domaines artistiques. Ainsi il a conscience que pour capter l'attention du public il se doit de s'adapter, mais il doit aussi travailler à conserver son public actuel et trouver un moyen de de le faire évoluer. Pour qu'un public soit conquis il lui faut trouver ce qu'il y a d'unique dans la pratique ou dans les oeuvres, c'est ainsi qu'eux même ils seront amenés à s'intéresser plus précisément à la pratique ou à l'artiste lui même (histoire, carrière...) IV. Le besoin de se démarquer : créativité Après une vingtaine d'années à ne faire qu'interpréter les chansons de son idole, Noël s'est rendu compte de la nécessité, s'il veut passer au stade supérieur, de se faire connaître lui pour se qu'il fait. C'est autonomisation, ce détachement s'est déroulé en plusieurs étapes. « de dix neuf vingt ans et jusque trente cinq ans c'était quasiment oui lui rendre hommage et maintenant que je suis plus centré sur heu une démarche plus personnelle je veux dire j'en reviens toujours à ça il y a malgré tout dans mes chansons et quand j'interprète des chansons de Claude François sur scène que je réorchestre comme je le dis pour apporter ma touche personnelle il y a toujours cet hommage parce que c'est quelqu'un qui a touché ma vie qui m'a touché personnellement et donc je suis jamais resté insensible et je le suis toujours je veux dire heu c'est tout CP 13/63
  • 14. maintenant ma musique elle a évolué moi Claude François des chansons de Claude François heu ça fait heu vingt ans que j'en ai plus écouté » D'abord la volonté dans un premier temps de rendre hommage à celui qui lui a permis d'entrer dans le monde de la musique, ensuite il y eut la période où Noël commençait à personnaliser ses morceaux en les arrangeant, remaniant pour être plus « dans le temps », il s'est séparé peu à peu du modèle de départ. IV.I. Nécessité de se démarquer Pour être un « artiste », il ne suffit pas d'être un chanteur parmi d'autres, Noël ne se contente plus d'être « l'interprète de... », il veut désormais être connu pour lui même. C'est uniquement de cette manière qu'il pourra prétendre à un statut d'artiste. C'est un besoin d'être reconnu personnellement, il ne s'agit pas selon lui d'arrogance mais, d'un besoin naturel. Il ne suffit pas de bien reproduire, cette qualité c'est ce qu'on attendait avant d'un bon artisan, reproduire correctement. Mais aujourd'hui le chanteur se pose la question de comment singulariser ma pratique pour qu'on puisse me reconnaître, moi Noël Lagoia. En effet, cette réflexion peut être envisager comme la question de la signature, dans l'art. Heinich affirme la nécessité dès lors où un artiste (elle traite surtout du domaine de la peinture) se singularise, d'associer la signature à ses oeuvres. Dans le cas de la reprise musicale, Noël s'attache à l'idée qu'il ne s'agit pas du nom sur l'album mais d'une marque de fabrique à attacher à ses productions, une touche personnelle qui permettront au public de reconnaître ses interprétations. Il y a un besoin en tant qu'artiste de se sentir autonome indépendant capable de s'émanciper de ce à quoi on est attaché. Écrire ses propres chansons c'est faire preuve de capacités créatrices. « quand on est interprète heu bon on est que la copie en fait de gens connus tandis que quand on arrive avec ses oeuvres on devient créateur ». Interpréter les titres des autres ça ne dure qu'un temps, le temps de se lancer, qu'on puisse parler de vous, mais cela ne serait que temporaire, le chanteur affirme qu'on ne peut pas baser une carrière uniquement sur cette pratique, il reste lucide sur le sujet. Il parle de la reprise comme un outil un tremplin qui peut aider à se faire connaître puis reconnaître. Il illustre ses propos en s'appuyant sur les chanteurs français qui ont commencé en effectuant des reprises comme Amel Bent ou encore CP 14/63
  • 15. Nolwenn Leroy. Par ces exemples, il insiste sur la difficulté de percer, en proposant ses propres morceaux, rares sont ceux qui sont capables de se lancer avec leur production, ça ne vient qu'après et encore. Noël explique que désormais il est un compositeur libre, en disant cela il crée un paradoxe avec les propos qu'il a pu dire auparavant. Il est tiraillé entre être maître de ses productions, capable de proposer ce que, lui veut, capable de créer à partir de ses propres envies et inspirations et tout compte fait répondre parallèlement à l'attente de ce que les gens veulent, en faisant « l'unanimité », en jouant sur ce qui « marche » aujourd'hui (son électro). Il dit être à la fois libre de créer ce que bon lui chante mais il reste tout de même attaché aux canons du moment. Ainsi peut on vraiment dire qu'il s'agit d'un créateur ? C'est le phénomène qu'observe Heinich, qui note l’ambivalence entre l’impératif de singularité, avec une volonté d'être exceptionnel et l’impératif de communauté puisque l’artiste s'inspire de ses fréquentations, de ce qui l'entoure et de ce que font les autres7. Dans le milieu de la reprise et de l'interprétation, beaucoup de chanteurs regrettent les réflexions du type « même pas capable de nous proposer quelque chose de nouveau », « aucune originalité », « on va l'entendre combien de fois ». Pour autant, il affirme que ce qui peut faire la différence entre un simple interprète et un chanteur créateur c'est sa capacité à rendre une interprétation « sienne ». C'est là où se trouve toute la différence. IV.II.Innover en s'appropriant Il ne s'agit pas de faire du nouveau pour faire du nouveau. L'innovation n'oblige pas à tout reprendre, innover c'est aussi avoir un idée nouvelle, ingénieuse. « faire en sorte de chiper un peu comme ça à gauche à droite des morceaux de les réunir de les mixer ensemble d'apporter des choses et plus ou moins des mélodies moi je trouve que c'est tout à fait de la création parce que même si c'est heu des morceaux heu voilà chiper à gauche à droite c'est quand même du boulot c'est un 7 Anthony Glioner, Ce que la littérature fait à la sociologie de l’art. Remarques à propos de L’Élite artiste de Nathalie Heinich, Paris, Gallimard, « Bibliothèque des sciences humaines », 2005, 384 p. CP 15/63
  • 16. travail de montage de mixage c'est du travail de, donc c'est quand même à la base de la création faut faut avoir eu l'idée de le faire donc déjà c'est créatif » Réemployer, se servir de ce qui existe déjà, c'est parfois plus complexe que de parti de zéro. « Faire du neuf avec du vieux » voilà la devise de ces chanteurs interprètes. Ils dévoilent leurs capacité à réinventer. Ce genre de pratique, ne fait pas l'unanimité, certains félicitent cette ingéniosité et d'autres font le procès de la « dénaturation » de l’oeuvre originale. Pour Noël, il ne s'agit pas de vouloir prendre la place de l'artiste original ou faire mieux mais faire sien. « je reprends ces chansons là et c'est deux vieux succès de Claude François mais qui ont été totalement réorchestrés par mon arrangeur avec nos touches personnelles et voilà de manière à ce que les gens quand ils vont écouter ces deux reprises connaissent les chansons ceux qui connaissent pas vont découvrir comme si c'était une nouvelle oeuvre et les fans de Claude François les gens de ma génération qui connaissent ce répertoire là vont dire ah oui ces deux chansons là on les connaît on les connaît bien pourtant c'est pas les plus connus du répertoire de Claude François parce que là aussi c'est l'intérêt de faire en sorte que ça soit une redécouverte avec des sons nouveaux des sons actuels et ma voix » De Certeau qui réfléchit sur la question du « braconnage », observe l'emploi, l'appropriation d'un l'objet, l'apport personnel que chacun en fait. Il envisage l'objet culturel comme un « appartement un loué » où une personne passe et y pose ses bagages, un lieu où chacun serait à même d'y apporter une transformation, sa transformation. "Les lecteurs sont des voyageurs ; ils circulent sur les terres d’autrui, nomades braconnant à travers les champs qu’ils n’ont pas écrits, ravissant les biens d’Égypte pour en jouir. L’écriture accumule, stocke, résiste au temps par l’établissement d’un lieu et multiplie sa production par l’expansionnisme de la reproduction". 8 (De Certeau, 1990:252) Ce passage est adaptable à toute forme d'objet culturel. Les objets culturels ne sont pas intouchables, s'y attaquer ne signifie pas forcément leur enlever de la valeur, cela peut parfois même leur en attribuer. 8 Michel de Certeau, L'invention du quotidien, tome I, 1990 : 252 CP 16/63
  • 17. Ainsi, malgré la vision parfois pessimiste de sa pratique, avec son côté temporaire, il y trouve tout de même de l'avenir dans la mesure où dans le contexte actuel, il existe beaucoup d'outils pour exploiter le réemploi, l'actualisation, la création à partir d'une matière première. Même si le mixe ou le sample existent depuis longtemps, aujourd'hui il est possible d'aller plus loin dans la démarche, c'est pourquoi Noël félicite ces initiatives. Pour autant, il n'est pas vraiment sûr que cela s'applique au domaine du chant en tant que tel, il s'agirait plutôt du domaine du son, du beat. CP 17/63
  • 18. V. Conclusion Réfléchir sur la place de la reprise musicale dans le champ artistique, ne doit pas se limiter à s'interroger uniquement sur des questions figées comme le statut, l'aspect authentique ou l'originalité d'une pratique ou de la personne l'exerçant. Ces points sont à penser à travers les rapports entre des gens, il ne s'agit pas de penser ou de parler en terme de valeur ou de chercher à évaluer la pratique avec des critères spécifiques mais l'envisager à travers les relations entre des personnes, à travers la réception qu'en font les gens. C'est ainsi que Nathalie Heinich entreprend de réfléchir, et d'établir ce qu'est de faire de la sociologie de l'art, en s'arrêtant sur ce que des oeuvres comme des pratiques « font aux gens ». Une pratique comme la reprise musicale interroge en réalité davantage d'autres domaines, tous ceux liés ou s'appuyant sur l'appropriation, l'interprétation, et l'usage d'un matériau existant. Le poids de ces styles de pratiques, dans le champ artistique, n'est pas quelque chose d'acquis en soi, malgré l'appartenance au domaine musical. Leur place est à négocier continuellement auprès des acteurs, des institutions, du public... Cela est d'autant plus complexe dans la mesure où les négociations se font aussi par rapport aux autres pratiques musicales, elles, totalement légitimées. Une enquête comme celle conduite avec Noël Lagoia permet d'observer de nombreuses contradictions dans le discours, des difficultés à soi même s'envisager ou se ranger selon qui et selon quoi. Pour établir la position d'une pratique culturelle, il est intéressant d'observer plusieurs discours, plusieurs façon de vivre, de pratiquer son activité. Se pencher sur l'histoire de l'art, l'évolution des statuts, de l'investissement de la politique publique dans ce domaine mais aussi la redéfinition permanente de la culture, de ses limites, des enjeux et processus qui se jouent à sa frontière. L'important dans ce genre d'étude étant toujours de réfléchir, d'observer les phénomènes en cours et de non pas chercher à les expliquer et à déterminer quelque chose de stable. L'art s'envisage comme une pratique sociale, dès lors où il y a rapport ou relation entre des personnes, il ne faut pas s'attendre à quelque chose de binaire, « ceci est de l'art et ça, ça ne l'est pas », il s'agit d'un domaine en constante évolution. La sociologie de l'art nous permet de nous interroger sur ce qui se déroule entre les deux, et sur les acteurs en jeu. Les éléments évoqués dans le cas de la reprise musicale peuvent être interrogés par rapport à bien d'autres domaines, tellement que cela nous amène à nous demander si aujourd'hui tout ne serait CP 18/63
  • 19. pas à même d'être qualifié comme art ? Toute pratique qui aurait quelconque démarche et qui permettrait de réfléchir sur les points développés dans cette étude, pourrait-elle alors appartenir légitimement au champ artistique ? La possibilité du passage du non art à l'art annonce-t-il le début d'un processus sans fin ? CP 19/63
  • 20. VI.Annexes VI.I. Grille d'entretien Hypothèse de travail : L'art doit-il obligatoirement rimer avec création et originalité ? Puis, Quelle légitimité pour la reprise, les interprétations ? Introduction ➢ Présentation de l'enquêteuse ➢ Présentation de l'enquêté (âge ; formation ; emploi actuel ; état civil; situation de couple) ➢ Décrivez-moi tout d'abord votre pratique musicale. Trajectoire de vie de l'enquêté et de sa pratique ➢ Quand avez-vous commencé à chanter ? ➢ Quand vous êtes vous rendu compte du « don vocal » que vous avez ? Et depuis quand l'exploitez-vous ? ➢ Avez-vous eu une formation musicale ? Si oui, quelle était-elle(cours de chant, solfège...) ? ➢ Quelle place tient votre pratique dans votre vie quotidienne (temps de répétition, déplacement...) ? ➢ Comment s'est faite la transition entre une pratique à titre d'amateur et celle plus professionnelle ? ➢ Quelle est la position de votre entourage vis-à-vis de votre pratique ? CP 20/63
  • 21. ➢ Au départ vous expliquiez que vous travailliez de nuit dans l'hôtellerie, cela laisse penser que la musique reste à l'état de hobbie, extra-professionnel. Qu'en pensez vous ? Est-ce techniquement possible de construire une carrière à côté ? ➢ Vous évoquiez au départ que vous vous étiez mis à composer quelques morceaux, quand et pourquoi avez-vous ressenti le besoin, de créer et de produire vos propres créations ? ➢ De quelle ordre est la motivation de votre pratique (financier, artistique?) ➢ Quand vous vous produisez, qui se charge de votre rémunération ? Critères de définition de l'art ➢ Vous qualifiez-vous plutôt comme chanteur professionnel ou comme artiste ? ➢ Selon vous, quelle serait la différence entre ces deux notions ? ➢ « Le très grand est celui dont les imitations sont légitimes, dignes, supportables, et qui n'est pas détruit ni déprécié par elles ni elles par lui. » Paul Valéry.Que pensez-vous de cette citation ? ➢ Est-il déjà arrivé durant votre parcours de rencontrer des gens qui n'approuvait pas ou une reconnaissait pas votre pratique ? Connaissez vous leurs raisons, leurs points de vue ? ➢ Dans la presse qui vous concerne, vous refusez qu'on parle d'imitation, à propos de votre voix, vous précisez qu'elle est naturelle, absolument pas forcée. Pouvez-vous m'expliquer en quoi cela vous semble important à préciser ? ➢ Selon vous, le fait qu'elle soit naturelle le attribue plus de mérite que si elle était travaillée ? ➢ Dans le monde artistique que pensez-vous de l'interprétation, de la reproduction par rapport à la création ? ➢ Selon vous, peut-on rapprocher les pratiques suivantes :  interprétation de chanson  mix de plusieurs musiques et sons existants Selon vous, les deux se valent-elles ou l'une serait plus légitime que l'autre ? ➢ De manière générale que pensez-vous de la remix culture ( de nouvelles pratiques qui réutilisent des produits existants pour innover, comme le sample par exemple ) ? CP 21/63
  • 22. ➢ A votre avis, aujourd'hui la reconnaissance est-elle équivalente que l'on fasse du remix, de l'appropriation d'objets traditionnels ou qu'on compose ses propres productions ? ➢ Dans votre cas, qualifiez-vous votre activité comme une pratique artistique ? ➢ Quelle définition donnez-vous de l'art aujourd'hui ? Que placeriez vous d'une part dans la pratique artistique dite légitime et d'autre part dans celle non légitime ? ➢ Où vous situez-vous ? ➢ Que pensez-vous de la notion de « culture légitime » ? Reconnaissance ➢ En chantant du Claude François, votre but est-il plus de lui rendre hommage comme on peut le lire dans la presse ou est-il question d'une reconnaissance personnelle de votre « don vocal » ? ➢ Comment souhaitez-vous qu'on parle de vous dans la sphère artistique ? ➢ Pour s'élever dans la sphère musicale il faut que le travail soit reconnu. Pour vous, de qui attendez-vous cette reconnaissance ( des professionnels, du public, des fans de Claude François) ? ➢ Selon vous, vos spectateurs viennent à vos shows pour vous ou pour profiter d'un instant avec Claude François ? ➢ En ce qui concerne votre public, s'agit-il d'un public fidèle qui vous suit ou vos représentations brassent un public varié ? ➢ Lors de vos représentations, à quel titre êtes vous sollicité (animateur de salle) ? ➢ Pour vous, la réussite musicale est liée au nombre d'album vendu, ou à la question de reconnaissance par les grands ? ➢ Après quelques recherches sur vous sur le web, on peut constater que vous travaillez sur votre communication : un compte Twitter, une page officielle sur Facebook, des vidéos sur diverses plate-formes,. Cela est en vue de vous créer un public ou davantage pour chercher des contrats ? ➢ Quelle image de vous et de votre pratique pensez-vous renvoyer aux autres ? ➢ Selon vous, les internautes participent ils à votre notoriété et votre reconnaissance ? ➢ Quel poids et légitimité attribuez-vous à des « like », des « partages », des commentaires ? CP 22/63
  • 23. VI.II. Transcription entretien avec Noël La Gioia le 6 mars après midi dans un café: 106minutes CP:Alors, on va commencer par heu, par heu l'introduction on va dire, donc donc je vais vous demander de vous présenter, rapidement, donc votre âge, état civil formation, allez y... NL : Alors moi,déjà je m'appelle Noël Lagoia, mon nom d'artiste est « Noël Lagoia », L.A.G.O.I.A ça c'est mon nom d'artiste parce que mon nom heu mon vrai nom si on veut dire c'est L.A plus loin G.I.O.I.A. Donc à l'époque quand j'ai sorti mon premier album hommage heu que j'ai sorti après le, je parle pas trop vite ça va ? CP : Non non allez y ça va aller NL :après le après le film Podium heu, je suis tombé sur heu une équipe heu une équipe de producteurs, qui me ont heu réalisé mon album et qui m'ont dit que « La Gioia » ça va être difficile à prononcer dans l'immédiat heu dans l'écriture heu bon on va donc on va heu ils ont voulu raccourcir mon nom et heu coller parce que L.A plus loin G.I.O.I.A et la c'est LAGOIA L.A.G.O.I.A qui est plus facile à prononcer donc du coup maintenant c'est devenu comme ça c'est resté comme ça et en pseudo comme un pseudo CP : Ah ok très bien NL : voilà, je suis déclaré comme ça , dans le système etc etc CP : ok très bien, maintenant NL : Donc j'ai 54 ans CP : 54 ans NL : Je vais les avoir CP : ok NL : on va dire que je les ai et puis heu ben je suis marié, j'ai cinq enfants, j'ai deux petits enfants alors voilà et puis ben voilà ça c'est le côté privé on va dire CP : Alors heu maintenant je voulais une heu description gro globale de votre pratique musicale
  • 24. NL : Alors moi je suis à la base, je suis auteur compositeur interprète CP: hmm hmm NL : voilà donc heu qu'est ce qu'il faut que je raconte, un peu mon parcours ? Ou heu ? CP : oui si possible NL : Alors mon parcours, ça fait plus de trente ans que je chante heu que je pratique la scène et puis heu dans heu ben je chante en orchestre j'ai fait heu de l'orchestre à mes débuts, j'ai fait heu trois orchestres en tout et pour tout et puis ensuite ben pour partir travailler seul, heu je veux dire en solo, ben on va dire il y a une vingtaine d'années que je suis en solo, j'ai commencé à faire mes propres heu compositions mes propres chansons, ça fait une petite vingtaine d'années et puis après ben avoir fait le film, ma participation dans le film Podium CP : c'était quand ça ? NL : ça c'était en 2005, la sortie du film était le 11 mars 2005 CP : hmm hmm NL : et moi si vous voulez j'ai enregistré le le duo « Comme d'habitude » pour l film avec Benoît Poolvoerde c'était en octobre en décembre 2002 CP : ah oui NL : oui oui on avait enregistré quasiment deux ans avant donc en studio sur Paris et donc j'ai travaillé deux jours avec Benoît Poolveorde pour ce duo, ce duo qui fait heu je veux dire qui fait partie d'une voire de la scène mythique du film parce que je ne sais pas si vous vous souvenez dans la scène du film heu quand on voit, je sais pas vous avez vu Podium non ? CP : non je ne l'ai pas vu NL : celles et ceux qui auront vu, il y a une scène, c'est la scène culte, on peut dire ça comme ça, heu ya un duo entre Claude François et Bernard Frédéric qui est interprété par Benoît Poolveorde qui est un comment je vais dire un fan de Claude François dans le film et il y a un jeu virtuel qui est entamé CP 24/63
  • 25. entre Claude François et Benoît Poolveorde et dans ce duo si vous voulez ya Moix,le réalisateur du film qui cherchait une voix heu pour chanter justement ce duo avec Benoit Poolveorde qu'il a du reconstituer toute la scène, c'est une scène culte du film qu'il a reconstitué parti d'un enregistrement heu d'un show avec Petula Clark . Ce show avec Petula clark a été enregistré en, dans les années soixante heu attendez dans les années soixante dix c'est sûr et donc il a du reconstituer cette scène et heu comme la bande musicale il n'avait pas les droits pour l'utiliser, il a du reconstituer la bande musicale pour faire une castration avec Jean Claude Petit qui est un des grands grands compositeurs français et qui est un très grand musicien très connu d'ailleurs sur la planète et donc c'est lui qui était chargé de reconstituer toute la partie orchestre de « Comme d'habitude » et Yann Moix recherchait une voix de Claude François alors il avait fait passer des casting sur Paris donc voilà et moi en envoyant mes cd dans des à l'époque j'avais enregistré des maquettes que j'envoyais régulièrement dans des maisons de disque heu et c'est Yann Moix qui ai tombé sur cette maquette par l'intermédiaire d'un ami apparemment ça s'est passé comme ça. CP:ah oui ce n'est pas vous directement qui.. NL:non non non non j'ai pas j'ai même pas passé de casting dans ah oui oui oui c'est une histoire folle comme je dis c'est une histoire bénie des dieux et ça m'est tombé dessus comme ça et un soir d'octobre en octobre deux mille deux heu j'étais j'étais chez moi il était vingt heure et j'ai eu je reçois un coup de téléphone et c'était la directrice des films Fidélité à l'époque qui m'appelait heu pour me dire que ben voilà il recherchait une voix pour faire heu un enregistrement de « Comme d'habitude » et qu'ils avaient écouté mon cd et que Yann Moix et le co-producteur du film à l'époque voulait m'entendre voire me rencontrer , écouter quelqu'un sur un cd et l'entendre chanter en live en direct , je veux dire bon on on peut bidouiller si on peut dire, donc voilà c'est parti comme ça, je suis parti sur Paris en décembre deux CP 25/63
  • 26. mille deux et je suis rentré en studio deux jours dans un studio mythique à Suresnes d'ailleurs, c'est à Suresnes , même pas à Paris c'est dans le 94 et qui s'appelle le studio Guillaume Tell où bon Dieu toutes les stars internationales ont enregistré, c'est un énorme studio à Suresnes CP : Guillaume ? NL : Guillaume Tell, T E deux L, ça c'est à Suresnes, voilà je suis rentré deux jours en décembre deux mille deux pour enregistrer. CP : Ok alors déjà vous avez répondu à certaines de mes questions, donc je vous demandais quand vous aviez commencé à chanter, vous me disiez que ça faisait à peu près trente ans NL : oui une trentaine d'années pour dire sérieusement avant je chantonnais CP mais par contre je voulais savoir NL : j'étais plus chanteur de salle de bain à l'époque CP : donc par rapport à votre formation musicale , vous me parliez d'orchestre mais est ce que vous aviez pris des NL:j'ai eu une formation musicale , j'ai fait quatre ans de musique en école de musique donc voilà tout ce qui est solfège ça c'est, j'ai pas vraiment la pratique d'un instrument parce que j'ai arrêté trop tôt mais on va dire je pianote on va dire ça comme ça mais de là à aller plus loin ça serait vraiment extrapoler et dire que bon, mais par contre oui j'ai une base musicale, je sais lire une partition donc de ce côté là CP : ok et maintenant je voudrais savoir depuis quand en fait heu votre rapport directement avec Claude François parce que bon NL : (rire) c'est une histoire , comment je vais dire j'ai j'étais tout petit quand j'étais petit je regardais, c'était le boom des années soixante soixante dix et donc ben mes parents regardaient c'étaient la grande époque ben des shows des Carpentier, vous n'avez pas connu mais c'était des grandes grandes émissions où tous les artistes se réunissaient heu toutes les stars à l'époque Claude François, Mike Brant, Michel Sardou, Sylvie Vartan fin CP 26/63
  • 27. voilà, c'était vraiment des émissions magnifiques et puis donc moi j'étais baigné déjà par tous tous ces artistes et bon déjà une attirance plus particulière pour la musique et et Claude François a toujours attiré mon attention parce que ce ce showman qu'on voyait fin déjà avec des claudettes et tout il était avant-gardiste, ça attirait toujours plus mon attention et puis heu je devais avoir une douzaine d'années et je pour être bien précis j'ai été je jouais au football à Grande-Synthe donc j'étais à l'époque je devais être pupille ce qu'on appelait pupille à l'époque , je devais avoir une douzaine d'années, allez onze ans et mon club de foot chaque année heu avait un genre faisait un genre de banquet un truc comme ça et invitait un artiste et cette année là, fin je me souviens plus l'année mais je devais avoir onze ans ou douze ans heu comme ça de tête je ne sais plus en quelle année mais enfin ça devait être dans les années soixante quatorze soixante quinze un truc comme ça, oui que je ne dise pas de bêtise , ça doit être ça oui un truc comme ça donc ils invitent Claude François au Palais du Littoral à Grande-synthe, scène où d'ailleurs j'ai chanté en septembre dernier donc j'ai foulé les planches que mon idole a foulé il y a bien des années et donc Claude François est invité et tout ce qui est je veux dire et tout nous qui faisions parti du club de football on avait donc des places dans la salle et heu à l'époque les places n'étaient pas numérotées donc c'était les premiers qui rentraient qui s'installaient et comme nous on était là pour donner un coup de main même si on était des gamins on donnait un coup de main à la mise en place on faisait des petits trucs et donc on était placé au premier rang et donc heu j'étais heu pour raconter une petite anecdote que je raconte souvent heu tout le premier rang était pris parce que je sais plus, je suis parti quelque part je sais plus ce que je faisais et puis je reviens au premier rang et toutes les places étaient prises par mes petits copains et en fin de compte j'étais vache j'étais dégueulasse maintenant je le dis parce que je vais voir un de mes petits copains et je lui dis : CP 27/63
  • 28. « il y a ta maman là-bas qui t'appelle » alors il me fait, je m'en rappelle comme quoi il y a des trucs qui arrivent comme ça, c'est possible car les parents étaient derrière et nous on avait réussi à être placé devant donc je lui dis « si si ta mère est là-bas elle t'appelle » il me dit non je lui dit « si si vas y sinon elle va t'engueuler » un truc comme ça donc je monte un truc et puis je lui ai piqué sa place et quand il est revenu il me dit « t'as pris ma place » mais non non non on se battait pour être au premier rang, j'ai usurpé sa place j'avoue que maintenant que c'était pas très sympa de ma part donc c'était la petite anecdote et quand j'ai vu Claude François sur scène à l'époque la scène était à à deux mètres quoi, j'ai vu et contrairement à, c'était de l'hystérie dans la salle, c'était de la folie, je veux dire ce gars-là ses concerts ce qui donnait c'est ce qu'on voit dans les images c'était de l'hystérie totale et contrairement à tous ceux, j'étais dans ma dans ma bulle et j'ai été scotché pendant plus d'une heure trente j'étais devant et je crois que je devais avoir les yeux comme ça (écarquillés), yavait plus un mot qui sortait de ma bouche j'ai été illuminé et quand j'ai vu je l'ai vu sur scène j'ai dit « c'est ça que je veux faire je veux faire comme lui plus tard » et le déclic est venu là j'en suis persuadé , j'en suis persuadé et c'est là que je me suis mis à chantonner à écouter à commencer à je vais pas dire commencer à travailler ma voix parce que j'ai jamais travaillé ma voix si mais quand même je veux dire j'ai jamais cherché déjà des gens me posent la question « est ce que vous êtes un imitateur ? » oui donc voilà on va dire que grosso modo le déclic artistique dans ma tête il est venu de là c'est là, j'avais onze ans douze ans de mémoire c'était ça onze ans douze ans ah ouais ouais ouais c'est énorme quoi je veux dire CP : je voudrais faire la distinction peut être heu vous disiez je regardais et je me suis dis c'est ça que je veux faire, c'est ça que je VEUX faire ou c'est vraiment par rapport à ce qu'il fait ou à sa personne ? CP 28/63
  • 29. NL : non moi quand j'ai vu sur scène Claude François j'ai vu ce que c'était que de donner et de faire ce de chanter de monter sur scène devant des gens et de chanter heu je calculais pas à savoir jme dis pas je veux faire ça jveux faire tout comme lui je me suis mis dans la tête je veux être u chanteur jveux jveux jveux être sur scène jveux chanter voilà c'est ça c'est ça et sans sans jpense pas jpense pas que dans mon esprit à cette époque là je me suis dit je veux faire comme lui jveux lui ressembler et je veux être Claude François non non non je veux être un artiste voilà voilà. Je veux être un artiste CP:Enfin là, par exemple je ne connais pas particulièrement Claude François heu mais heu là c'est même plus que chanter j'ai l'impression parce que c'est une performance enfin d'après ce qu j'ai entendu de vous c'est pas chanter c'est vraiment une dimension de show en général. NL : ah oui oui oui CP : c'est ce qu'on entend par artiste en fait. Ok et donc vous parlez d'une voix que vous ne travaillez pas qui était naturelle donc depuis quand vous êtes vous rendu compte de ce don vocal on va dire ? NL:c'est venu très très tôt parce que finalement heu quand quand j'ai commencé bon je veux dire je devais avoir quoi je devais avoir peut être avoir dix neuf vingt ans quand je me suis mis vraiment à chanter devant des gens avant ben c'était chanter dans la salle de bain et fin je veux dire chanter devant sa glace voilà, c'est ça finalement et j'ai commencé vraiment à chanter devant les gens, dans des cafés, dans des terrasses dans des repas de famille et tout ben je devais avoir dix neuf vingt ans donc on me disait c'est incroyable t'as un timbre de voix qui fait penser, et c'est venu de là mais il y a une, je dis souvent dans mes interviews, jamais je j'ai travaillé ma voix pour dire que, d'ailleurs ce que je précise bien toujours dans dans mes heu, j'ai pas la voix de Claude François attention, moi, c'est ça l'important parce que heu comment je vais dire moi, c'est ça le CP 29/63
  • 30. paradoxe c'est que je ne suis pas un imitateur je ne fais pas parti des gens qui imitent Claude François, je ne fais pas parti des gens qui parodient Claude François qui le caricaturent moi tout ce qui est sosie qui mettent des costumes paillettes qui prennent des danseuses et qui font un show Claude François, bon personnellement ça ne m'intéresse pas, c'est pas ma démarche dans la musique car comme je dis bien au départ dans mes interviews, à la base je suis auteur compositeur et interprète et ma démarche dans le métier c'est de faire aussi ma propre musique mes propres oeuvres mes chansons par lesquelles je vais essayer entre guillemets d'être connu. Donc heu là est l'importance et comme je dis toujours, je n'ai pas la voix de Claude François et on me dit depuis longtemps elle s'en rapproche, moi j'apporte le distinguo elle s'en rapproche, je n'ai pas la voix de Claude François et ceux qui disent j'ai la voix de, j'ai la voix de, ce n'est pas vrai. Je veux dire moi, j'ai rencontré des, j'ai pas rencontré des gens mais on m'a dit heu ya des sosies qui se qui se disaient dépassant le maître entre guillemets, c'est à dire ils étaient même mieux que Claude François, ils chantaient même mieux que Claude François, je me dis bon, ça n'engage que eux, ça n'engage que leur parole mais je veux dire pour moi je trouve ça entre guillemets assez pathétique moi c'est mon point de vue donc voilà heu mais moi ma démarche, on m'a proposé, on m'a proposé il y a une quinzaine d'années, un producteur qui m'a proposé, je chantais je faisais une première partie au casino de Dunkerque, j'avais chanté en première partie de Herbert Léonard et je tombe sur un producteur qui me dit moi je veux bien te prendre parce que tu as la voix je t'ai vu chanter c'est pas mal ce que tu fais mais je je voudrais monter un show Claude François avec toi mais il faudra que tu mettes une perruque blonde parce que je n'ai pas le physique de Claude François, bien, bien, bien, bien pour moi parce que si en plus. C'est un bonheur pour moi parce que je n'ai pas du tout le physique ça c'est, là on peut pas nier le contraire là je veux dire heu bon et il m'a dit heu à l'époque moi je peux te CP 30/63
  • 31. faire tourner dans le France voire même en Europe pour faire un grand show Claude François avec des danseuses et tout mais il va falloir que tu apprennes à danser, que tu mettes une perruque blonde, un costume paillettes et tout, je veux dire non, j'ai dit non alors je suis passé peut être à côté de bien des choses mais je serai pas là aujourd'hui j'en suis persuadé.Je serai pas là aujourd'hui. CP : ok très bien, heu maintenant je voudrais savoir quelle place votre pratique prend dans votre vie quotidienne par rapport aux répétitions aux déplacements etc ? NL:heu j'ai un bonheur, j'ai un bonheur c'est parce que Muriel pourra en parler, c'est que j'ai déjà une responsable, parce que pour le moment j'en vis pas professionnellement, ça devient de plus en plus serré entre mon job parce que moi je considère que mon emploi de réceptionniste de veilleur de nuit à l'hôtel c'est un job hein c'est pas un métier, c'est quelque chose que n'importe qui peut faire hein je veux dire il y a pas eu de formation spécifique, c'est un job qui est là pour pour justement ben je dirais parfaire, ben vivre, payer les factures hmm voilà heu artistiquement je suis je suis entre, le cul entre deux chaises on va dire ça comme ça, je suis entre pratiquement sur le point de pouvoir basculer et heu donc là pour le moment c'est, il y a quelque chose qui est en train de se mettre en place, parce que là j'ai un producteur depuis heu maintenant heu deux ans, c'est important dans la vie d'un artiste et quand on dit producteur, un vrai producteur CP : c'est à dire ? NL : ben vous savez il il y a des producteurs qui se baladent avec heu, pour dire de schématiser grosso modo, il y a le producteur qui heu c'est l'image classique avec le gros cigare et la mallette, et je veux dire et qui est pas plus producteur que vous et moi et je crois qu'il y a un producteur pour moi un vrai producteur qui se balade pas avec sa petite sacoche, avec des billets dans la poche,je veux dire mais un producteur c'est CP 31/63
  • 32. quelqu'un qui s'engage, qui ne promet rien mais que quand il a une idée derrière la tête pour son artiste heu quand il l'appelle c'est pour lui dire voilà telle date tel jour telle heure tu es sur cette scène là, tel projet, c'est ça c'est ça c'est ça c'est du concret, c'est pas du style on va faire ci on va faire ça parce que les paroles parfois ne vont pas spécifiquement avec les actes et c'est pour ça que je dis il y a producteur et producteur. CP : [et par contre je ne sais]comment on distingue le producteur de l'agent ? NL: [et la dans ce métier c'est malheureusement].Ben le producteur c'est celui qui va miser de l'argent sur un artiste admettons comme là mon producteur me produit, mon spectacle mon album c'est lui qui va qui va prendre en charge financièrement tout ce qui est affiche flyers, communication, heu heu bon ben là en l'occurrence mon single qui va sortir ben heu la pochette heu les enregistrements avec mon arrangeur, les frais de studio ça ça c'est le producteur.le producteur s'engage mise sur l'artiste bien sûr et il récupère et c'est normal,c'est lui qui a la prise de risque donc c'est normal qu'après tout ce qui est le fruit, le lui revient directement dans la poche. Après après il y a des contrats au niveau de de la vente des disques, bon autant de pourcentages de cachet sur les heu les concerts, la recherche c'est aussi mon producteur donc voilà et après lui l'agent le rôle de l'agent lui lui ben là l'agent artistique lui est là pour promouvoir l'artiste donc voilà lui trouver, des radios, des interviews, le placer sur tel plateau tv, le placer dans telles radios, interviews, ça c'est le rôle de l'agent, lui l'agent est là pour s'occuper de tout ce qui est promotionnel. CP : Comment se sont faits les premiers contacts avec eux ? NL:là le fait que j'ai rencontré mon producteur que je connaissais mais bon heu lui, son réseau d'agent est devenu mon agent heu donc voilà après c'est une question de voilà de connaissance de voilà, donc c'est un réseau CP 32/63
  • 33. CP : comment s'est fait le passage d'une pratique plutôt d'amateur à celle plus professionnelle ? NL:écoutez quand on est j'dirais, des tas de gens chantent en France, il y a de très très très belles voix je veux dire, il faut se faire voir et puis il y a le contexte de la chance je veux dire ça c'est parce que comme je dis énormément de gens chantent bien mais le facteur chance n'est pas toujours. C'est un comment je vais c'est une réunion de trois choses c'est à dire,il faut avoir le talent,il faut avoir la chance et rencontrer les bonnes personnes au bon moment et faut que ces trois ingrédients là soient se réunissent en même temps parce qu'on peut très bien rencontrer avoir la chance et pas avoir le talent, avoir le talent mais pas avoir de chance et avoir de la chance mais ne pas rencontrer les bonnes personnes au bon moment il faut que tout ça soit vraiment une osmose, il faut vraiment que ces trois ingrédients là prennent comme une mayonnaise je veux dire, une mayonnaise sans l'huile on la fait pas sans l’oeuf on la fait pas , sans la moutarde non plus, si on met ces trois là on fait la mayonnaise. CP : Ceux sont plutôt les gens qui vous ont dit tu as la voix pour faire ça tu le peux ou c'est vous ? NL:c'est une motivation personnelle parce que dans ce métier là, il faut pas se leurrer il y a des gens qui sont sincères qui vont vous dire heu c'est bien ce que tu fais, continues, on croit en toi vas y et ça c'est important ça fait partie d'une petite minorité de gens après ya beaucoup de gens qui vont vous dire c'est très bien ce que tu fais et qui ne vont pas le penser une seconde heu les trois quarts des choses qu'ils pensent de ce qu'ils me disent en tout cas, et donc voilà après ça reste un métier où il faut prendre et laisser et surtout un métier où il faut surtout bien bien se structurer en tant qu'artiste déjà avoir une base moi ma base c'est depuis longtemps c'est ma famille c'est mon épouse qui m'a connu heu quand on avait seize dix sept ans heu qui m'a connu dans la musique qui a toujours partagé ma CP 33/63
  • 34. passion,qui m'a toujours soutenu quand j'ai eu des moments de difficultés heu de doutes parce que dans une carrière on sent que ça prend pas parfois l'impression que ce qu'on fait ça n'intéresse personne que ça ne sert à rien et ben dans ces cas là je veux dire heu là c'est mon épouse en l'occurrence qui m'a toujours dit ça ira un jour continue, bosse travaille et pis voilà je veux dire et après un petit réseau de gens, d'amis mais surtout ce qui faut c'est avoir une structure comme j'ai une maison de production, une petite structure de production mais qui est sérieuse qui met les moyens heu compétents et heu il faut des fois pas grand chose pour que comme je disais que la mayonnaise prenne, il faut pas simplement faire partie de comme Universal Music, je veux dire heu, il y a des petites productions comme la mienne comme celle dont je fais partie dont je suis le seul chanteur parce que bon mon producteur le seul chanteur qu'il produit c'est moi parce que ben il a sa troupe c'est un homme de théâtre, c'est un homme de théâtre de comédie c'est un c'est un artiste réussi à par entière et heu moi quand je suis allé le voir il y a deux ans je me suis dis voilà Emmanuel Vallois, voilà du théâtre des Insolites voilà je lui ai dit qui, qu'il me connaissait parce que je chantais heu tous les six mois chez lui et donnais un cours de chant et je suis allé le voir ya deux ans, jme suis dit que ma carrière artistique il me disait que c'est bien ce que tu fais continues continues et jme suis dit mais pour grandir jpeux pas grandir tout seul jpeux pas grandir tout seul dans mon coin tout ça et je sentais qu'avec Emmanuel Vallois il y avait quelque chose jme suis dit je sais que c'est quelqu'un de sérieux dans le métier et jme suis dit ça ça peut être ma famille dans la musique et je suis allé le voir j'ai pris un rendez vous avec lui je lui ai dit voilà Emmanuel tu me connais tu sais ce que je fais sur scène tu as la réalité de ce que je peux faire je voudrais évoluer grandir mais j'ai besoin d'une structure d'un producteur, je lui ai dit est ce que tu peux me produire il m'a dit oui Noël moi je vais te produire tu es le seul chanteur tu es le seul artiste que je vais m'occuper je vais CP 34/63
  • 35. prendre, et voilà c'est comme ça et depuis deux ans les choses sont faites voilà mis bout à bout parce qu'il connaît mon parcours CP: quelle est la position de votre entourage, vous me parliez de votre femme, mais votre entourage plus large par rapport à votre pratique? NL: leur investissement? S'ils m'accompagnent c'est ça? CP: oui, voilà. NL: oui mais carrément, bon j'ai cinq enfants comme je vous le disais au début et mes petits enfants c'est trop tôt pour s'apercevoir que leur papi chante mais ça viendra mais heu mes enfants ont toujours baigné par mes répétitions parce que je travaille continuellement ma voix, parce que bon c'est un muscle qu'il faut toujours gardé en activité on va dire ça comme ça comme un sportif de haut niveau on va dire ça comme ça haut niveau sans prétention mais heu donc ils ont toujours été baigné heu par la musique hein heu ça a toujours été très musical à la maison mais bon ils n'ont pas pour autant vraiment la fibre, une de mes filles aime la musique mais n'a pas ce côté heu viscéral c'est ça viscéral par ce que pour monter sur scène faut avoir ça dans ses entrailles ah oui oui il faut avoir ça dans les tripes je veux dire si si on n'a pas cette heu cette heu comment je veux dire cette heu si on n'a pas ça c'est viscéral ça c'est il faut l'avoir ça CP:quand vous étiez plus jeune comment réagissait votre famille notamment vos parents? NL: moi j'ai jamais eu comment je vais dire des parents qui ont été très je vais pas dire convaincu je vais pas dire ça parce que j'étais jeune déjà et que bon quand on est jeune comment dire ses parents mais si si je veux être chanteur ils m'ont ouais bon bon ben commence continue à travailler à l'époque on en reparlera ça n'a jamais vraiment été pris comme un truc heu je vais dire heu sérieux à la base donc heu bon c'est rien heu on a ses rêves, il faut croire en ses rêves pas tous les réaliser parce qu'autrement sinon à un moment on en n'a plus (rire)il faut croire en ses rêves CP 35/63
  • 36. les plus tenaces et puis se dire heu je veux y arriver jveux faire ça et je vais arriver à comment je veux dire, heu comment je veux dire c'est des buts des buts qu'on se fixe et on se dit faut que j'y arrive voilà ou autrement bon ça plus quoi j'ai pas eu des parents qui ont été enthousiasmés ou convaincus de ce que je voulais faire et pis bon à l'époque moi même je pouvais pas savoir que mon destin ma vie aurait bifurqué comme ça. CP: le fait qu'ils aient pas été forcément derrière vous ne vous a pas tellement.. NL:pas du tout, parce que j'ai toujours été très déterminé et heu passionné voilà et pis déjà pour monter sur une scène il faut être un passionné faut être un passionné déjà il faut aimer les gens surtout parce que comme je le disais tout à l'heure c'est un métier de contact c'est un métier de communication et si on n'aime pas les gens si on n'a rien à dire aux gens on ne monte pas sur une scène on n'a rien à y foutre d'ailleurs on va laver des voitures heu je sais pas mais on n'a rien à foutre sur une scène donc si on n'a rien à faire à passer aux gens voilà. CP: vous m'avez parlé de votre rencontre avec Claude François, vous vous êtes mis à chanter sérieusement vers 20ans, vous précisiez aussi que vous étiez auteur compositeur avant tout. Est ce qu'avant même de chanter, d'interpréter vous composiez déjà? À partir de quand et pourquoi cela vous est venu de commencer à composer pour vous? NL:j'ai heu comment je veux dire j'ai j'étais pas parti à la base pour heu bon à la base j'étais simplement parti pour être heu un interprète finalement et puis heu quand j'ai commencé à quitter l'orchestre heu l'orchestre que j'ai quitté c'était en que je dise pas de bêtise heu je me souviens plus d'ailleurs heu non c'est pas le dernier orchestre que j'ai fait parce que heu j'ai refais de l'orchestre après mais j'avais déjà commencé à écrire et à composer une dizaine d'années, il y a je veux dire il y a il y a quasiment une vingtaine d'années que j'ai que je me suis mis à écrire et à composer des chansons qui sont restées plus au moins CP 36/63
  • 37. dans les tiroirs et puis mais elles étaient là et puis heu et puis ben heu on va dire une dizaine d'années j'ai sorti, j'ai sorti, j'ai sorti le premier disque que j'avais sorti que j'avais écrit et composé et qui s'appelait « L'enfant des étoiles » et qui rendait hommage à une petite fille qui est décédée d'un accident de voiture d'un ami qui était l'ancien directeur ben de Sportica donc qui était Hervé Beddelem qui a perdu sa petite fille dans un accident de voiture et heu ça m'avait ça m'avait ému comme tout le monde a été ému ici, et heu et pis heu ça a duré un mois deux mois dans mon esprits et pis heu jme suis dit je suis ému par ce fait comme beaucoup de gens alors je vais écrire une chanson pour lui rendre hommage et pis cette chanson est restée des mois dans un tiroir et pis c'est mon épouse à l'époque qui connaissait l'épouse d'Hervé Beddelem et qui lui a dit ben Noël il a écrit une chanson, ce serait bien que tu l'écoutes et puis cette chanson là est née comme ça et puis mais ça a mis quasiment un an parce que c'était frais aussi dans leur tête donc heu et pis sans sans sans que ce soit par la force des choses et comme je dis souvent dans la vie quand on essaie de forcer des choses généralement on n'y arrive pas ou les choses ne se passent pas correctement mais quand les choses sans que vous vous y attendiez c'est là, comme Podium on me téléphone à vingt heure un soir d'octobre deux mille deux, au courant de rien je ne savais même pas qu'il y avait un film qui était en construction, je reçois un coup de fil de la production jme suis dit, quand mon épouse est rentrée, elle travaillait à l'époque, elle rentrait tout de même assez tard, quand elle est rentrée je lui ai dit écoute mais pince moi sur le coup honnêtement je croyais que c'était une connerie, une bêtise, je me suis dit il y a quelqu'un qui me fait marcher, j'ai du mettre une paire d'heure pour m'en remettre je me suis dit c'est pas possible qu'est ce qu'il m'arrive mais ça ça n'arrive qu'une fois dans la vie enfin bon après si ça arrive deux fois on se pose des questions mais tant mieux (rire)donc voilà. CP 37/63
  • 38. CP: je vais encore insister sur ma question mais pourquoi cette envie d'écrire de produire finalement? NL:parce que déjà de part mes, ma formation heu musicale, donc heu rapidement jme suis dit fin il y avait ce besoin d'écrire, j'avais besoin d'écrire,jme suis dit je vais me mettre à écrire mes propres chansons, parce que c'est bien de toujours chanter celles des autres, j'étais un interprète je ne chantais pas que Claude François mais quasiment que ça mais je chantais d'autres interprètes Sardou, Johnny, voilà mais après jme suis dit moi j'ai envie d'écrire mes propres chansons composer mes chansons et faire aussi découvrir aux gens que moi aussi j'ai des choses à dire et que pis voilà j'ai envie de de d'être un artiste aussi à part entière c'est à dire donc c'est une manière aussi de dire au public ben moi aussi j'ai mon style et c'est aussi m'apporter un style parce que bon quand on est interprète heu bon on est que la copie en fait de gens connus tandis que quand on arrive avec ses oeuvres on devient créateur et moi je pense que de toute façon c'est ce que les gens aiment découvrir des nouvelles choses je veux dire bon maintenant combien de monde musical actuellement on en est plus à la reprise toutes les grandes vedettes de maintenant que ce soit je veux dire heu c'est beaucoup de reprises on entend des choses nouvelles mais les trois quarts des gens quand on dit les émissions de télé-réalité Star Academy ça n'existe plus mais enfin maintenant c'est beaucoup, ce ne sont que des reprises bon après ceux qui arrivent à tirer leur épingle du jeu du style Nolwenn Leroy Amel Bent tout ça et puis après avoir leur propre identité et créé leurs propres chansons et bon je veux dire yen a pas beaucoup, donc on n'est plus dans un système de reprise, donc jme suis dit maintenant ce qui faut, moi j'aime bien écouter des chansons, des nouvelles et il y a aussi des très belles reprises moi même j'en fais donc bon c'est tout on s'accommode de ça mais je pense que pour interpeller le public et les gens c'est ça c'est la création qui est importante CP 38/63
  • 39. CP: j'avais compris mais je vais tout de même poser la question, quelle est la motivation de votre pratique? NL:Artistique bien sûr je fais pas ça pour l'argent CP:Qui se charge de votre rémunération lors de vos prestations? NL: ça ben ça c'est mon producteur, il gère, il me dit Noël je t'envoie chanter je vais dire à Marseille heu tu chantes le vingt juillet je dis n'importe quoi le vingt mars, tu chantes à Marseille telle salle tel endroit, à vingt heure tu as une heure une heure trente de prestation heu, le contrat c'est le producteur qui le gère avec l'organisateur là bas là rémunération c'est mon producteur. Mon producteur se fait payer par l'organisateur et moi après. CP: on va maintenant changer de thème on va envisager ce qui est définition de l'art. Parfois on parle de chanteur professionnel parfois on parle d'artiste, dans votre cas de quoi parlez vous? NL: ben je suis je deviens de plus en plus chanteur professionnel parce que même si j'ai un statut d'amateur parce qu'automatiquement je ne suis pas un professionnel parce que ce n'est pas ma rémunération principale je veux dire bon on peut considérer que je suis un amateur mais j'ai un je suis quand même enregistré à la sasem j'ai un numéro de congé spectacle ce qui est quand même obligatoire pour être heu avoir heu comment je veux dire le congé de droit sur les chansons qu'on écrit et qu'on produit comme moi et heu mais je travaille dans un statut professionnel avec un esprit professionnel avec un contexte professionnel donc heu voilà CP: sinon quelle distinction faites vous entre justement artiste et chanteur professionnel? NL:je dirais on peut être artiste amateur et artiste professionnel, pour moi je dirais que ça n'a pas de comment je veux dire je fais pas de distinction quand on est un artiste un artiste peut être professionnel ou amateur pour moi comment je vais pouvoir définir ma pensée, c'est pas parce qu'on est professionnel qu'on est plus performant plus reconnu moi très CP 39/63
  • 40. personnellement moi il y a des gens donc qui sont chanteurs ou chanteuses professionnel(les) heu je veux dire heu qui ben je vois pas ce qu'ils font sur une scène quoi je veux dire honnêtement moi au moins je suis pas j'ai pas la plus belle voix du monde des gens chantent mille fois mieux que moi je veux dire mais bon heu mais pour moi il y a des fois des gens que je vois qui sont amateurs mais on se demande ce qu'ils foutent heu en tant qu'amateurs pour moi artiste pour moi artiste ça n'a pas de dénomination amateur ou professionnel pour moi t'es un artiste c'est tout. Je fais pas la distinction pour moi si on me dit telle personne ben tu vois elle chante oui mais elle est pas professionnelle je dirais ben en tout cas je m'en fous je m'en fous de savoir qu'entre deux elle est je sais pas ben réceptionniste dans un hôtel ou médecin ou je sais pas ou qu'importe travaille en usine, et pis que sa passion c'est de monter sur scène le week-end pour moi c'est une artiste. Professionnel amateur pour moi ça n'a rien à voir. Un artiste c'est quelqu'un qui monte sur une scène amateur ou professionnel pour moi c'est un artiste, je ne fais pas de distinction. CP: je vais maintenant vous citer un passage de Paul Valéry, puis vous me donnerez votre avis sur le sujet: « Le très grand est celui dont les imitations sont légitimes, dignes, supportables,et qui n'est pas détruit ni déprécié par elle ni elle par lui. » . qu'en pensez vous? NL:Je suis tout à fait d'accord dès lors qu'on touche à une reprise admettons heu si elle est laissée dans l'esprit je vais pas dire amélioré pas pas détruite pas saccagée dès lors qu'on touche à une oeuvre et qu'on la respecte qu'on la reproduit à sa sauce finalement. On peut pas mélanger l'artiste et ce que font les autres de ses productions, on ne peut pas déprécier ce qu'il est et ce qu'il a fait par ça, c'est pour ça même qu'il arrive d'avoir mal pour ce très grand qui voit tout ce qu'il a fait entre guillemets appauvri CP:avez vous rencontré durant votre carrière des gens qui ne reconnaissait pas, ou n'approuvait pas votre pratique? CP 40/63
  • 41. NL:moi je pense que, comme je le disais tout à l'heure il y a des gens qui savent flatter, donc des gens qui flattent qui sont sincères, des gens qui flattent qui ne le sont pas du tout parce que c'est un système de jalousie, l'être humain est fait comme ça. Mais clairement je n'ai jamais eu de gens qui m'ont dit ce que tu fais c'est nul arrêtes toi ou tu nous casses les oreilles ou quelque chose comme ça maintenant oui la chose qui faut bien savoir c'est que quand on est un artiste comme moi qui monte sur scène, il peut pas plaire à tout le monde hein et que les goûts et les couleurs, il y a certainement des gens qui n'aiment pas ma voix, qui n'aiment pas mes prestations sur scène ça c'est une évidence même mais heu bon c'est tout quand on, quand moi je sais que je ressors d'une salle de spectacle d'un concert ou d'un gala j'ai fait une prestation moi l'essentiel c'est que le maximum de gens qui sortent de là se sont dit j'ai passé un bon moment on n'a même pas vu le temps passer on a passé deux heures dans une salle mais bon sang il est déjà cette heure là et qu'on a passé un bon moment maintenant ça ne peut pas être l'unanimité c'est pas possible, on ne peut pas faire l'unanimité dans ce cas il n'y aurait plus d'enjeux d'ailleurs si on arrive à convaincre tout le monde il n'y a plus rien d'intéressant on va dire donc heu oui inéluctablement des gens n'aiment pas ce que je fais, n'apprécient pas ce que je fais c'est tout mais me l'avoir dit en face non je peux pas dire, mais je sais pertinemment que c'est le cas c'est évident heureusement d'ailleurs que je plais pas à tout le monde. CP: selon vous est ce que ce qui plaît et fait l'unanimité prouve de la qualité d'une production ou inversement, prenons l'exemple de la musique classique et de Beethoven par exemple, il est reconnu, il fait l'unanimité ce qu'il a fait ceux sont des chefs d'oeuvre pourtant ça ne plaît pas à tout le monde, a contrario une musique ordinaire que tout le monde écoute est ce un gage de qualité? CP 41/63
  • 42. NL:ben le truc c'est que c'est quand même quelqu'un qui qui a chamboulé le monde musicale de son époque qui a laissé des traces et des oeuvres indélébiles cP: dès lors où on laisse des traces ça voudrait [dire que...] NL: [c'est c'est des oeuvres]c'est quand même des oeuvres qui à l'époque étaient déjà modernes je veux dire pour son époque quoi qu'on en dise Mozart Beethoven tout ça étaient des gens avant-gardistes aussi parce que si on arrive encore à les jouer dans des opéras encore maintenant que les orchestres symphoniques ou heu continuent à jouer des oeuvres heu de ces légendaires compositeurs c'est que quelque part ils ont plu à un maximum de gens maintenant bien évidemment, ils ont plu à un maximum de gens, ils font presque l'unanimité mais ne font pas l'unanimité même Schubert même Mozart même Beethoven la musique classique moi j'aime bien j'aime tous les styles musicaux mais il y a des gens qui sont très électro très techno Beethoven Mozart pour eux c'est heu c'est une autre planète. Moi j'écoute de tout, j'aime tout ce qu'il se fait dans la musique, tous les styles, j'écoute tout. J'aime tout mais j'aime pas tout dans tout on va prendre le cas du rap il y a des morceaux de rap qui sont sublimes qui sont très biens et d'autres morceaux qui m'agacent pas par rapport au texte bon pareil pareil pour la variété pareil pour le rock,j'aime bien la musique électro j'aime bien la techno, il y a des choses que j'aime bien qu'on peut mettre dans une chanson, mais j'aime pas tout dans l'électro et la techno mais ça ne remet pas en cause comment je veux dire heu ce style musical bon il y a des artistes qui sont comment je pourrais dire ça ça remet pas en cause oui heu. Ne pas aimer ne remet pas en cause le talent de l'artiste non plus après pour répondre à la question des lors où quelque chose remporte l'attention et l'adhésion d'un certain nombre on peut considérer qu'il y a de la qualité déjà simplement au fait de faire consensus auprès de gens qui aiment la musique. CP 42/63
  • 43. CP: dans la presse, vous refusez qu'on parle d'imitation quand on parle de votre voix,vous précisez qu'elle est naturelle absolument pas forcée NL: jpeux pas refuser jpeux pas interdire quelqu'un de dire heu vous êtes un imitateur ou est ce que vous imitez c'est normal c'est je dirais depuis que je chante c'est entre guillemets un point d'interrogation bon pour certaines personnes qui sont un peu heu interpellées par heu la voix et pas parce qu'il y a beaucoup de gens qui connaissent ma voix et c'est pour ça c'est que je lis parfois mais ils ne connaissent pas mon visage et c'est pour ça qu'on est en train de développer toute une image artistique, ça se travaille ça une image mais je n'ai jamais interdit à personne de me poser la question après à moi de développer et de convaincre CP: mais en quoi est ce important de le préciser, est ce que ça signifie que le fait qu'elle soit naturelle lui attribue plus de valeur de légitimité que si elle était travaillée? NL:si j'avais eu heu si j'avais travaillé ma voix ben de toute façon on a un timbre, le timbre de la voix c'est comme l'empreinte l'empreinte c'est comme heu, je veux dire ça n'appartient qu'à une personne c'est pour ça que comme je disais tout à l'heure je n'ai pas la voix de Claude François et ceux qui disent j'ai la voix de, j'ai la voix de, j'ai la voix de, c'est pas vrai le timbre de voix c'est comme une empreinte ça appartient qu'à un seul comme l'Adn, on a un adn qui ne correspond pas, chacun a son adn, chacun a son empreinte, le timbre de la voix c'est pareil c'est pour ça que je dis on ne peux pas ceux qui disent on m'a raconté, moi je connais pas, moi le monde des imitateurs tout ça je ne connais pas, je ne fréquente pas ces gens là parce que justement c'est la paradoxe entre eux et moi moi je dis rien je critique pas hein il y a des gens qui montent sur scène qui font Claude François,moi c'est très bien pour eux, ils gagnent leur vie avec ça moi je ne vois pas d'inconvénients moi c'est leur truc, moi personnellement je trouve ça pathétique ça c'est mon point de vue mais ces gens là on le droit de vivre, le droit de chanter le droit de monter sur une CP 43/63
  • 44. scène de faire entre guillemets le pitre c'est leur problème moi je je remet certainement pas en cause ce truc là. Des fois on m'a même raconté que certains se disaient plus doués que leur idole, quand on en arrive là moi je pense que faut peut être aller consulter quand même déjà et heu après comment pourrais je dire moi moi j'ai la voix, c'est tout c'est une nature comme ça qui fait que j'aurai très bien pu avoir avoir une voix qui ressemble... CP:Vous pouvez comprendre que c'est assez marrant car déjà vous avez une voix proche de celle de Claude François, vous chantez du Claude François donc forcément les gens... NL: il peut il peut avoir confusion dans le genre, mais heu que comment je pourrais expliquer ça, c'est un destin c'est une vie, c'est comme ça si j'en suis là c'est aussi grâce à lui puisque finalement, j'existe parce qu'il a existé, c'est une certitude parce que comme ma voix, comme sur scène quand je l'ai vu comme je disais j'avais onze ans douze ans à Grande-Synthe qui m'a vraiment donné ce déclic mais après on me dira mais oui mais vous vous êtes imprégné de lui vous avez travaillé votre voix, vous avez fait pour lui ressembler mais non non le truc est là et donc ça ça peut semer une ambiguïté un doute mais bon pas du tout c'est tout moi même je ne cherche même pas à savoir, j'en suis arrivé là aujourd'hui là avec vous à donner un entretien pour votre projet j'en suis arrivé là sans calculer sans chercher voilà comme je dis voilà c'est comme ça c'est comme ça. CP: mais on doit tout de même admettre le travail et l'investissement de ces personnes qui elles perfectionnent travaillent réellement leur voix NL: comme les imitateurs? Cp: oui par exemple, NL: un imitateur doit passer des heures et des heures entières à essayer de trouver la voix qui ressemblent le plus possible à la personne qu'il veut imiter bon et en plus là quand on devient imitateur il y a aussi le côté visuel aussi donc heu le côté CP 44/63
  • 45. gestuel heu des gens que qui cherchent à imiter parce qu'il y a le vocal il y a le visuel tandis que moi j'ai jamais cherché à être heu mais moi comme je l'ai dit ma démarche sur la scène c'est moi mon style les gens qui viennent me voir sur scène ils ont un chanteur avec une identité et qui n'a rien à voir avec Claude François les gens quand les gens viennent me voir sur scène quand ils ressortent maintenant ils me disent mais quelle belle voix vous avez qu'est ce que vous chantez bien, on aime bien cette chanson mais jamais ils vont me dire ah ça ressemble à Claude François ça ça m'a fait penser à Claude François jamais j'arrive avec du travail parce que ça a été du travail de dire à convaincre les gens que à cinquante quatre ans quasiment de dire que ben non vous allez voir Noël Lagoia et vous allez pas voir Claude François, vous allez écouter du Claude François CP:dans le monde artistique que pensez vous de l'interprétation, de la reproduction par rapport à la création? NL:ben moi je dis toujours réinterpréter c'est dans un sens rendre hommage à l'interprète à des créateurs à des auteurs à des compositeurs si je parle du milieu musical heu comme quelqu'un qui reproduirait un tableau ou heu c'est rendre hommage à son créateur je dirais bon c'est heu et après c'est vrai que moi personnellement je pense que quand on a un don quelconque c'est de susciter la création c'est de susciter chez les gens le fait de voir des choses nouvelles je veux dire moi mon tour de chant qui fait vingt quatre chansons fait quasiment heu la moitié de reprises et la moitié quasiment de création fin je veux dire donc heu voilà je veux dire heu CP : que pensez vous de l'un par rapport à l'autre, ont ils autant de légitimité selon vous ? NL:oui oui ils ont la même légitimité dans un tour de chant j'ai comment je vais dire j'ai autant de plaisir à chanter mes reprises et mes interprétations parce que mes reprises sont bien choisies je n'interprète pas n'importe quel titre, n'importe quelle chanson, je choisis et heu bon voilà déjà c'est donner du plaisir CP 45/63
  • 46. de les chanter, de les rechanter, et pis après ya toujours le fait d'avoir créé ses propres chansons et comment je vais dire c'est toujours plus c'est plus pétillant de faire écouter ce qu'on fait soi-même aux gens après on fait des reprises et tout, les gens apprécient apprécient moins mais les deux ont leur légitimité. Moi quand je fais des reprises je réorchestre ça veut dire que je réorchestre les reprises pour apporter du son nouveau une interprétation nouvelle en respectant la structure de la chanson l'identité de la chanson c'est une manière de respecter ceux qui ont créé heu ces oeuvres hein c'est ça donc c'est déjà un certain respect par rapport à ça et puis apporter sa touche personnelle parce que si c'est simplement rechanter heu les chansons tout bêtement une version karaoké ça n'a pas vraiment d'intérêt. CP : c'est donc la différence entre imitation et interprétation NL : ah oui carrément c'est toujours apporter sa touche personnelle j'en reviens toujours à ça c'est à dire que dans une reprise les gens connaissent la chanson mais si on arrive avec un son nouveau avec un rythme nouveau moi j'ai repris très dernièrement, dans mon nouveau single qui va arriver j'ai dit single mais c'est pas un single c'est un CD quoi puisqu'il y a trois titres dessus il y a une chanson que j'ai écrite et composée et il y a deux reprises de vieux standards de Claude François parce que la voix qui fait en sorte que je reprends ces chansons là et c'est deux vieux succès de Claude François mais qui ont été totalement réorchestrés par mon arrangeur avec nos touches personnelles et voilà de manière à ce que les gens quand ils vont écouter ces deux reprises connaissent les chansons ceux qui connaissent pas vont découvrir comme si c'était une nouvelle oeuvre et les fans de Claude François les gens de ma génération qui connaissent ce répertoire là vont dire ah oui ces deux chansons là on les connaît on les connaît bien pourtant c'est pas les plus connus du répertoire de Claude François parce que là aussi c'est l'intérêt de faire en sorte que ça soit une redécouverte avec des sons nouveaux des sons actuels et ma voix et ma voix. CP 46/63