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  AFRIC’ART
Projet culturel et pédagogique : Conférences, concerts
Résidences artistiques de Daouda NDIAYE et Meïssa MBAYE
Disque de Meïssa Mbaye, auteur-compositeur-interprète. Ces textes ont été sé-
lectionnés et traduits par Daouda Ndiaye, poète depuis 2001.




Les textes du « Retour du Pigeon voyageur », dont sont extraits les textes de « Back
to Africa » ont été enregistrés sous le n° 2003. 01. 0071 / à la date du 06/01/2003
à la Société des Gens de Lettres de France, sise Hôtel Massa, 38 rue Faubourg
Saint-Jacques, 75014 Paris).
La durée de validité de la protection du projet « Le retour du pigeon voyageur » par
la Société des Gens de Lettres de France court jusqu’en avril 2014.

Avec l’aimable autorisation de Harold Ober Associates Inc., New York, pour les
textes de Langston Hughes.
Avec l’aimable autorisation du Schomburg Center for Research in Black Culture,
New York, pour le texte de Claude Mc Kay.




                                                              AFRIC’ART           2    3   AFRIC’ART
Introduction :

Le chanteur sénégalais Meïssa M’Baye présente son album “Back To Africa”.                 après. Les voilà regroupés dans ce projet, pour porter le même verbe, histoire de
Tel un retour vers le futur, cet ambitieux projet fait suite à son opus dédié à Leopold   dire que leurs origines transcendent naturellement les questions de langue. Les
Sédar Senghor, “Entre Seine et Sine”. Dans ce sillage « littéraire », il y célèbre        voilà projetés au cœur de l’actualité, par une mise en sons qui remet en perspective
les retrouvailles de cousins séparés par les siècles et les eaux, celles du tragique      et en lumière leurs points de vue, différents mais convergents.
Atlantique noir. Recoudre les coutures et les contours d’une déchirure historique,
retisser les liens dénoués lors de la déportation esclavagiste, ce disque s’inspire du
projet d’anthologie de l’universitaire Daouda Ndiaye. Intitulé “Le retour du pigeon       Pour leur rendre hommage, en paroles et musique, Meïssa a convié autour de ses
voyageur”, ce recueil de textes (traduits en wolof par Daouda Ndiaye) des auteurs         compositions leurs héritiers, tambours africains comme le maître des baguettes
surgis de l’autre côté de l’océan, héritiers d’une diaspora disséminée du Nord au         made in Nigeria Tony Allen ou les balafons sénégalais, et tambours de bouche
Sud de l’Amérique, tous porteurs des fragments d’une mémoire que l’on crut en-            américains comme les slammeurs-rappeurs Mike Ladd, Allonymous et Jayhem,
fouie à tout jamais dans les cales des négriers. Ou plutôt de mémoires d’Afrique,         mais aussi chants gorgés de soul et guitare à la coule, flûte spirituelle et chœurs
puisque cette histoire ne peut s’inscrire dans une lecture univoque, qu’elle est la       dignes des meilleurs gospel, rythmique aux accents latins et harmonique aux élans
somme d’expériences multiples, qu’elle continue de s’écrire aux pluriels de tous          jazz. Tous réunis sous le vocable The Word Masters.
ses subjectifs. « Ce n’est ni une dilution de l’Afrique dans un universalisme abstrait,
ni une fragmentation d’une Afrique se complaisant dans un ghetto. Il s’agit d’une         Jacques DENIS
dynamique culturelle qui ne perd pas son âme » résume Meïssa.



Voilà ce dont parlent tous ces fils d’Afrique, dans le double sens du terme. Cer-
tains ont connu l’esclavage, comme les Etats-Uniens Phillis Wheatley et George
Moses Horton, comme le Péruvien Manuel Gonzalez Prada et le Brésilien Luìs
Gama. D’autres eurent leur heure de gloire comme le premier poète afro-américain
reconnu comme tel Paul Laurence Dunbar et Marcus Garvey, le charismatique
leader de la cause panafricaine, comme aussi l’Américain Langston Hughes et
le Jamaïcain Claude McKay, deux des voix les plus singulières de la Harlem Re-
naissance. D’autres enfin, comme le Cubain Nicolas Guillén et l’Haïtien Jacques
Roumain, ont prolongé les écrits de leurs pairs, pour les inscrire dans la Négritude,
le mouvement littéraire qui prend racines dès les années trente et se prolonge bien




                                                                 AFRIC’ART           4    5         AFRIC’ART
L’objectif principal du projet Mémoires d’Afrique est de faire connaître                   venu en complément du programme scolaire. Ainsi, les étudiants seront amenés à
à un large public les précurseurs de la renaissance poétique né-                           s’exprimer lors des conférences-débats sur différents thèmes et pourront découvrir
gro-africaine, en mettant en valeur la culture traditionnelle mais aus-                    l’usage des instruments traditionnels aux côtés de tendances modernes comme le slam.
si en y introduisant des jeunes talents afin de leur transmettre ces savoirs.
                                                                                           Au final, Mémoires d’Afrique compte susciter le regain d’intérêt pour la poésie
Ces poèmes et l’histoire de leurs auteurs ne sont pas étudiés en tant que                  africaine chez les étudiants, les élèves et le grand public ; la création d’un réseau
tels dans les établissements. Ensuite, il existe une frontière assez mar-                  régional, national et international d’artistes et d’intellectuels voués à la cause de la
quée entre musiciens traditionnels, soit les griots, et la nouvelle génération.            Renaissance Africaine ; le développement d’un public porteur pour la Musique et
Peu d’échanges artistiques interagissent entre eux et ceci pose un problème                la Poésie.
puisque toutes les connaissances se transmettent seulement entre griots.

De plus, on sait que le Sénégal est depuis longtemps une société de l’oralité et
que ce socle de connaissances laisse rarement une trace écrite. Avec la produc-
tion du livret-CD le projet a pour ambition d’agir sur le terrain à un moment don-
né précis, mais également de perdurer dans le temps et de manière matérielle.

L’offre de produits culturels est concentrée dans la région de Dakar ; capitale éco-
nomique et touristique, celle-ci accueille le plus grand nombre de structures cultu-
relles, d’artistes, d’événements… Le souhait de Mémoires d’Afrique sera donc
de se déplacer dans les régions plus reculées du pays. Le message délivré devra
être compris par tous et c’est pour cela que le livret sera publié en wolof, français et
anglais. Le discours employé lors des ateliers pédagogiques sera également adap-
té selon le public participant. L’artiste Meïssa, également médiateur culturel et avant
tout pédagogue, a déjà eu à animer ce genre d’ateliers avec tous genres de publics.

L’éducation et la culture vont de pair et c’est en cela que le projet souhaite in-
tervenir. En effet, le public visé étant majoritairement les jeunes, le projet a pour
vocation de s’inscrire comme un atelier d’apprentissage pédagogique et ludique,




                                                                 AFRIC’ART            6    7          AFRIC’ART
Phillis Wheatley (1753, Sénégal - 1784, Etat-Unis d’Amérique) est reconnue comme la première
                poétesse Afro-Américaine, avec « Poèmes sur divers sujets, religieux et moraux ».
                Son oeuvre reflète son éducation religieuse et classique de la Nouvelle-Angleterre. A l’exception de
                « On being brought from Africa to America » («Déportés d’Afrique en Amérique »), ses poèmes n’ont
                jamais parlé de l’égalité raciale. Largement applaudie pour son travail, elle fut affranchie en 1773, et
                s’éleva vivement contre l’esclavage et le travail asservi

                Elle fut précurseur à de nombreux niveaux : première femme Afro-Américaine à vivre de son écriture;
                première femme écrivain encouragée et financée par un groupe de femmes ; première femme de
                lettres Afro-Américaine accomplie. Elle fut honorée par de nombreux pères fondateurs de l’Amé-
                rique, y compris George Washington. Son livre est de nos jours considéré comme la base de la
                littérature afro-américaine, sa source et son inspiration. Un bâtiment a été nommé en l’honneur de
                Phillis Wheatley à l’Université du Massachusetts, Boston. Elle a également été classée parmi les «
                100 plus grandes Afro-Américaines » par l’érudit Molefi Kete Asante, en 2002.




AFRIC’ART   8   9            AFRIC’ART
My lord                                                       Sang                                   Monseigneur

     Should you my lord, while you peruse my                       Su fekkoon ne sang bi boo jàngee       Si vous deviez, Monseigneur, en
     song                                                          woy wii                                lisant mes vers,
     Wonder from whence my love of freedom                         Dinga jéema xam lu ma booleek          Vous demander d’où me vient mon
     sprung                                                        cofeelug sañ-sañ                       amour de la Liberté,
     Whence flow these wishes for the common                       Bi jur yéene yu baax yi ñépp bokk      D’où naquirent ces vœux pour le
     good                                                          Nga xam ne ku dul boroom xol bu        bien commun
     By feeling hearts alone best understood                       laabiir du ko am                       Que seuls comprennent bien les
     I, young in life, by seeming cruel fate                       Xamal ne, cig ngone, la ma ndogal      cœurs chaleureux,
     Was snatch’d from Afric’s fancy’d happy                       lu nuru lu tar                         Sachez que, toute jeune, un destin
     seat                                                          Këk ak jàmm, ci li nu wax, ci suufus   qui semble cruel
     What spangs excruciating must molest                          Afrig                                  M’arracha à la terre, heureuse, dit-
     What sorrows labor in my parent’s breast ?                    Ndaw metit wu tar ak coono ñaaw        on, d’Afrique ;
     Steel’d was that soul and by no misery                        Yu xotti sama ruuwu bay                Quelle douleur atroce et quels
     mov’d                                                         Boroom xolu xeer bu umpale             tourments affreux
     That from a father seiz’d his babe belov’d                    yërmande                               Déchirent-ils encore l’âme de mon
     Such, such my case, and can I then but                        Moo sàcc bay doomam ju mu sopp         père ?
     pray                                                          Loo looy sama mbir. Na may def ba      C’était un cœur de pierre, ignorant
     Others many never feel tyrannic sway ?                        duma ñaan                              la pitié
                                                                   Ngir ñeneen mucc ci aay-biir yii       Qui ravit à un père son enfant bien
                                                                                                          aimée
                                                                                                          Tel est mon cas. Comment, alors,
                                                                                                          ne prierais-je pas
                                                                                                          Pour que d’autres jamais ne souffrent
                                                                                                          des tyrans ?




MY LORD
                                                  AFRIC’ART   10   11            AFRIC’ART
James Mercer Langston Hughes (1er février 1902 – 22 mai 1967) est un poète, nouvelliste, dra-
                 maturge et éditorialiste américain du XXe siècle. Il fut un acteur majeur dans le mouvement culturel
                 qui a secoué Harlem dans les années 1920, plus communément appelé Renaissance de Harlem et
                 qui verra émerger toute une série d’artistes noirs.

                 Avec la publication de multiples recueils de poésies (le premier en 1926, « The Weary Blues » dont
                 est extrait l’un de ses poèmes les plus célèbres : The Negro speaks of rivers), de pièces de théâtre,
                 d’essais ou encore de scénarios pour le cinéma, Langston dépeint la vie des prolétaires Noirs
                 partagée entre joies, désillusions, espoir…, le tout teinté de jazz et de blues. Il dira plus tard : «J’ai
                 cherché à comprendre et à décrire la vie des Noirs aux États-Unis et, d’une manière éloignée, celle
                 de tout humain». Par son travail, il a cherché à montrer l’importance d’une «conscience noire» et
                 d’un nationalisme culturel qui unit les hommes plutôt que les opposer. Cette fierté a par la suite été
                 reprise par de nombreux hommes de lettres comme Jacques Roumain, Nicolás Guillén, Léopold
                 Sédar Senghor ou encore Aimé Césaire.

                 Dans les années 50-60, la popularité de Hughes parmi les auteurs Afro-Américains a décliné en
                 même temps qu’elle s’est accrue dans le monde. Il lui a été reproché de n’avoir pas modernisé son
                 discours de la «fierté noire» par rapport à l’évolution de la condition des Noirs aux États-Unis qui
                 s’améliorait à cette période. Néanmoins il reste un modèle pour bon nombre d’écrivains.




AFRIC’ART   12   13             AFRIC’ART
The Negro speaks of rivers                                       Dex                                     Le Nègre parle des fleuves

           I’ve known rivers                                                Nit ku ñuul a ngi wax ciy dex           J’ai connu des fleuves
           I’ve known rivers ancient as the world and                       Xam naa ay dex                          J’ai connu des fleuves anciens
           older than                                                       Xam naa ay dex yu màgget na             comme le monde et plus vieux
           The flow of human blood in human veins                           àdduna te gën fee yàgg                  Que le flux de sang humain dans les
           My soul has grown deep like the rivers                           Deret jiy daw ci sidditi doom aadama    veines humaines
           I bathed in the Euphrates when dawns                             Samag ruu daldi xóot ni dex yi          Mon âme est devenue aussi
           were young                                                       Sangu naa ci Efraat ca ngoneg njël yi   profonde que les fleuves
           I look upon the Nile and raised the pyramids                     Tabax naa sama néegu nax ci wetu        Je me suis baigné dans l’Euphrate
           above it                                                         Kongo gi ma yeetal                      quand les aubes étaient neuves
           I heard the singing of the Mississippi when                      Xool naa Niil dellu tabax ca kowam      J’ai bâti ma hutte près du Congo et il
           Abe Lincoln went                                                 bàmmeeli buur ya                        a bercé mon sommeil
           Down to the New Orleans, and I’ve seen                           Dégg naa Woyu Misisipi ba Abaraam       J’ai contemplé le Nil et au-dessus j’ai
           Turn all golden in the sunset                                    Lincoln wàccee                          construit les pyramides
           I’ve known rivers : ancient, dusky rivers                        Nuwel Orleyaan, gis naa fa poto-        J’ai entendu le chant du Mississippi
           My soul has grown deep like the rivers.                          poto buy wal                            quand Abraham Lincoln descendit
                                                                            Soppiku wurus ca marax                  A la Nouvelle Orléans, j’ai vu ses
                                                                            Xam naa ay dex                          nappes boueuses transfigurées
                                                                            Dex yu màgget te nëx                    En or au soleil couchant
                                                                            Samag ruu daldi xóot ni dex yi          J’ai connu des fleuves : des fleuves
                                                                                                                    anciens et ténébreux.
                                                                                                                    Mon âme est devenue aussi


                                                          RIVERS
                                                                                                                    profonde que les fleuves.




        EGRO SPEAKS
                                        OF




THE   N


                                                           AFRIC’ART   14   15            AFRIC’ART
As I grew older                                               Ndekke ni laa màgge               Comme j’ai grandi
                                                                    (Shadow)
      It was a long time ago                                                                          Il y a longtemps
      But it was there then,                                        Loolu yàgg na lool                J’ai presque oublié mon rêve
      In front of me,                                               Daanaka fàtte naa sama gent gii   Mais il était là, puis
      Bright like a sun                                             Waaye batay mi ngi nii            En face de moi,
      My dream                                                      Sama kanam                        Il scintillait comme un soleil
      And the the wall rose,                                        Di nes-nesi ni jant               Mon rêve
      Rose slowly                                                   Sama gent gi                      Et puis le mur s’éleva
      Between me and my dream                                       Noonu rekk miir bi yéeg           S’éleva lentement, peu à peu
      Rose slowly                                                   Di yéeg ndank ndank               Entre moi et mon rêve
      Dimming                                                       Dox sama digganteek gent gi       S’éleva jusqu’à toucher le ciel
      Hiding                                                        Mu yéegati ndank-ndank            Le mur !
      The light of my dream                                         Di lëndëmal ba far nëbb           L’ombre !
      Rose until it touched the sky                                 Leer gi sama gent                 Je suis un Noir
      The wall                                                      Yéeg nab a far laal asamaaan      Je m’allonge dans l’ombre
      Shadow                                                        Wóoy miir bi                      Plus de lumière de mon rêve devant
      I am a black.                                                 Keppaar gi                        moi
      It lie down in the shadow.                                    Man mi ñuul tëdd ci keppaar gi    Au-dessus de moi
      No longer the the light of my dream before                    Ci sama kanam ak li ma tiim       Seul le mur épais
      me                                                            Sama leeerug gent ne mes          Seule l’ombre
      Above me.                                                     Miir bu tal bee fi des
      Only thick wall                                               Akug keppaar
      Only the shadow                                               Loolu yàgg lool
                                                                    Daanka fàtte naa sama gent gi



AS I
     G RE W OL
               DER
                                                   AFRIC’ART   16   17            AFRIC’ART
Homesick blues                                 Pummu ray bi                    Le blues du pays

De railroad bridge’s                           Cii pomu raay bi                Le pont du chemin de fer
A sad song in the air                          La woy wu tiis di jolli         C’est une chanson triste dans l’air
De railroad bridge’s                           Ci pomu raay bi                 Le pont du chemin de fer
A sad song in the air                          woy wu tiisa ngi jolli          C’est une chanson triste dans l’air
Every time de train pass                       Saa su saxaar rombe             Chaque fois qu’un train passe
I wants to go somewhere                        Ma bëgg dem                     Je veux m’en aller dans d’autres
                                               Ca yeneeni gox                  terres
I went down to de station                      Ci pomu raay bi
Ma heart was in ma mouth                       La woy wu tiiss di jolli        Je descendis jusqu’à la gare
Went down to de station                        Waaxu naa bat ci gaar bi        Le cœur sur les lèvres
Heart was in ma mouth                                                          Descendis jusqu’à la gare
Lookin’ for a box car                          Sama xol di waaja genn          Le cœur sur les lèvres
To roll me to de south                         Sama gémmiñ                     Cherchant     un       wagon    de
                                               May wër saxaarug njaay          marchandises
Homesick blues, Lawd,                          Gu ma yóbbu xarfu               Pour m’amener vers le sud
‘S a terrible thing to have                    Ci pomu raay bi
Homesick blues is                              La woy wu tiis di jolli         Le blues du pays, Seigneur,
A terrible thing to have                       Ci pomu raay bi                 C’est triste de l’avoir pris,
To keep from cryin’                            Woy wu tiissa ngi jolli         Le blues du pays, c’est une chose




                                      UES
I opens my mouth an’ laughs                    Ci pomu raay bi                 Terrible de l’avoir pris
                                               La woy wu tiis di jolli         Pour m’empêcher de pleurer



                                B   L
                                                                               J’ouvre ma bouche et je ris.
                                               Tiisum réew Boroom bi




                       CK
                                               Tiis la ci ki mu dal




                    ESI
                                               Tiisum réew Boroom bi
                                               Mbir mu diis la



                   M
                                               Ci ki mu dal



         HO
                                               Ngir ma baña jooy
                                               Damay ubbi
                                               Sama gémmiñ ree
                                               Loolu yàgg lool
                                               Daanka fàtte naa sama gent gi


                              AFRIC’ART   18   19            AFRIC’ART
Luis Gama (1830 - 1882, Brésil) était le fils d’un Portugais et d’une jeune esclave venant du Ghana,
                 connue pour s’impliquer dans de nombreuses rébellions. A l’âge de dix ans, il fut vendu illégalement
                 par son père à un sergent nommé Cardoso qui l’employa comme domestique dans sa ferme.
                 En 1847, un étudiant, accueilli chez Cardoso, devint très vite ami avec Gama, et lui apprit à lire et à
                 écrire. Prenant conscience de l’illégalité de sa condition, Gama s’enfuit à São Paulo, et y étudia le
                 droit à l’Université ; mais il ne termina pas le cursus et travailla ensuite comme avocat non diplômé.
                 Dans les années 1860 il fut journaliste, et fonda la revue Radical Paulistano en 1869 aux côtés de
                 Ruy Barbosa. Il contribua aussi à créer le Parti républicain de São Paulo en 1873. Il libéra plus de
                 mille esclaves à São Paulo, avant de mourir en 1882, victime du diabète.
                 Gama publia en 1859 un livre de poésie, Primeiras Trovas Burlescas de Getulino (Premières Bal-
                 lades Burlesques de Getulino). La plupart des poèmes sont des satires des mœurs de l’aristocratie
                 brésilienne du 19e siècle.




AFRIC’ART   20   21            AFRIC’ART
Minha Mãe                        Sama yaay                                My Mother                               Ma mère

Era mui bela e formosa,          Moo gëna taaru ci jigeéen ju ñuul        She was very beautiful and fair         C’était la plus belle des femmes
Era a mais linda pretinha,       Lingeer la woon ca tàngooru Libi         She was the most beautiful black girl   noires
Da adusta Líbia rainha,          Dellu di jaam bu toskare ci Bresil       Adusta queen of Libya                   Elle était reine dans la chaleur de
E no Brasil pobre escrava!       Céy rabu jinne bu taaru bi               And in Brazilia poor slave !            Lybie
Ela a palmeira singela,          Boroom jëmm ju ñuul ji nu yatt ci xeer                                           Devenue pauvre esclave au Brésil !
Na fulva areia nascida           bu ñuul bi                               Oh Musa Guinea, jetty                   Oh belle muse noire sculptée dans
Nos roliços braços de ébano.     Abal ma sab lekketu urucongo             Granite statue denigrated               le granit
Brandinha a voz sonorosa,        Jàngal ma tëgg ci sa balafon             Before whom the Lion gets rendered      Prête-moi ton « urucongo »
Sentida como a Rolinha,          Sol ma xam-xamu xërëm yi                 Naked fury of atrocious frown ;         Apprends-moi à jouer du balafon
Gemendo triste sozinha,          Yóbbu ma ci yoon yi ànd ak yëkkatiku     Lend me the gurd of urucungo            Insuffle-moi le savoir des fétiches
Ao som da aragem faceira.        Xam-xam bu sës ak mbind jagleelu         Teach me to brandish your marimba       Emmène-moi sur les chemins de
Escuro e ledo o semblante,       ñu ko                                    It inspires me to science candimba      l’élévation
De encantos sorria a fronte,     Janq bu ñuul bi ci tefes                 Pathways lead me high magnitude         La science et l’écriture ne sont pas
— Baça nuvem no horizonte        Baal ma sama saxarit                                                             pour toi, dit-on
Das ondas surgindo à flor.       Suufi Tubaab yi ñu yilif                 Sciences and Letters they are not       La jeune fille noire sur le rivage de la
Se junto à cruz penitente,       Amunu sax sañ-sañu xalaat                for you                                 mer
A Deus orava contrita,                                                    Black girl of the Cost                  Toi qui n’es rien aux yeux du monde
Tinha uma prece infinita                                                  In the land of white man                Excuse-moi, chère amie, nous
Como o dobrar do sineiro,                                                 We haven’t the right to think           n’avons même pas la liberté de
As lágrimas que brotavam,                                                                                         penser
Eram pérolas sentidas,                                                                                            Sur la terre des Blancs qui nous
Dos lindos olhos vertidas                                                                                         dirigent.




                                     MAE
Na terra do cativeiro.




                               MINHA

                                          AFRIC’ART                 22    23            AFRIC’ART
George Moses Horton (1797 – 1883) est le premier esclave d’Amérique à avoir contesté son sta-
                 tut en écrivant des poèmes. Son premier poème, « On Liberty and Slavery » (Liberté et Esclavage),
                 parut en 1829. Il voulut acheter sa liberté et partir au Libéria ; « The Hope of Liberty » (L’Espoir de
                 Liberté), le premier livre publié dans le Sud par un homme noir, ne rapporta presque rien et il dut
                 abandonner ses projets. Cet ouvrage fut réédité en 1837 sous le nom de « Poems by a Slave »
                 (Poèmes d’un Esclave).
                 Horton gagna l’admiration et le soutien d’hommes tels que des gouverneurs, des présidents de l’Uni-
                 versité de Caroline du Nord, des journalistes. En 1845, un journal publia « Les Oeuvres Poétiques de
                 George M. Horton, le barde de couleur de Caroline du Nord ». Il publia en 1865 son troisième livre,
                 « Naked Genius » (Le Génie nu). De style classique, ses œuvres sur la campagne et sur l’esclavage
                 sont émouvantes.




AFRIC’ART   24   25            AFRIC’ART
On liberty and slavery                                   Lu taq ci sañ-sañ ak njaam           De la Liberté et de l’esclavage
                                                               (Xalaas)
      Alas ! and I am born for this,                                                                Hélas ! Ne suis-je donc né
      To wear this slavis chain ?                              Xalaas ! xanaa du dama juddu         Que pour porter cette chaîne
      Deprived of all created bliss,                           Ngir rekk takk ceenug njaam          d’esclave ?
      Through hardship, toil and pain !                        Umpale mépp mbégte ci sos            Privé de toutes les joies de la création
      How long have I in bondage lain,                         Ne ci toskare, coonok naqar          Par la misère, la peine et la douleur !
      And languished to be free !
      Alas ! and must I still complain-                        Bama nekkee jaam ak léegi            Que de temps déjà suis-je en
      Deprived of liberty.                                     Mu ngi bëgg yàgg                     esclavage
                                                               Namm naa moom sama bopp              Et me languis d’être libre !
      Oh, Heaven ! and is the no relief                        Xalaas ! xanaa duma dëkke ci xultu   Hélas ! Faut-il encore que je me
      This side silent grave-                                  Liñ ma xañub sañ-sañ                 plaigne
      To soothe the pain-to quell the grief                                                         Privé de ma liberté ?
      And angish of a slave ?                                  Céy Yàlla, xanaa amoo saafara
                                                               Laata may xam wéetaayu bàmmeel       Oh Ciel ! N’y a-t’il donc point de
                                                               Buy seral samaw metit ngir sippil    remède
                                                               mab coono                            Avant le silence de la tombe
                                                               Ak tiitange gi ci njaam              Pour calmer la douleur, pour apaiser
                                                                                                    la peine
                                                                                                    Et l’angoisse de l’esclave ?




                                    D S L AVERY
                                 AN
ON




           TY
     L IBER

                                              AFRIC’ART   26   27            AFRIC’ART
L’essayiste et poète péruvien Manuel González Prada (6 janvier 1848 - 22 juillet 1918, Lima) fut
                 l’un des polémistes les plus dynamiques de la fin du 19e siècle dans l’Amérique espagnole. Il se
                 battit pour le changement et le progrès et dénonça les vestiges du colonialisme espagnol.
                 Après 1883, il voyagea en Europe. De retour à Lima, il prit immédiatement une place prépondérante
                 dans l’avant-garde de la conscience nationale péruvienne. Des écrivains et des personnalités poli-
                 tiques furent gagnés par sa ferveur révolutionnaire. Il parla avec éloquence non seulement contre
                 la classe aristocratique figée d’où il était issu, mais aussi contre le rejet de l’Indien comme un élé-
                 ment caractéristique de la nation, contre le clergé et l’oligarchie militaire dominante, qu’il considérait
                 comme les sources de nombreux maux chroniques du pays. Il devint le porte-étendard d’une nou-
                 velle génération de Péruviens.
                 Les principaux ouvrages de prose publiés de son vivant sont « Páginas libres » (1894) et « Horas de
                 Jucha » (1908). Après sa mort, plus d’une demi-douzaine de volumes en prose parurent. Ses collec-
                 tions les plus célèbres de poésie sont « Minúsculas « (1901), « Presbiterianas » (1909), et « Exóticos
                 » (1916). D’autres ouvrages importants de sa poésie sont « Trozos de vida » (1933), « Libertarios »
                 (1938), et « Peruanas Baladas » (1939).




AFRIC’ART   28   29             AFRIC’ART
Triolet                                    De la vida                        Triolet                                Triolet

Los bienes y las glories de la vida        Am-am yeek ndami adduna           The property and the glories of life   Les biens et gloires de la vie
O nunca vienen o nos llegan tarde          Dunu àgsi ba mukk mbaa muy lu     Or never come or come to us later      N’arrivent jamais ou très tard,
Lucen de cerca, pasan de corrida           yéex                              Look closely, go to run,               Brillent de près, en courant, passent
Los bienes y las glorias de la vida        Danuy nes-nesi jege romb ne mes   Goods and glories of life              Les biens et gloire de la vie
                                           Am-am yeek ndami adduna           Sad the old man in florida             Triste qui, à la fleur de l’âge,
Triste del hombre que en la edad florida   Tiis la ci gone gu ci manula am   Get live flowers wait !                Tarde à cueillir les fruits de la vie
Coger las flores del vivir aguarde !       Ba man cee taataan dund           The property and the glories of life   Les biens et gloires de la vie
Los bienes y las glorias de la vida                                          Or never come or come to us later      N’arrivent jamais ou très tard
O nunca vienen o nos llegan tarde          Am-am yeek ndami adduna
Para verme con los muertos                 Dunu àgsi ba mukk mbaa muy lu     For me with the dead                   Pour me voir au milieu des morts
Ya no voy al campo santo,                  yéex                              I do not go to the cemetery            Je ne vais plus au cimetière
Busco plazas, no desiertos,                Bu ma bëggee gis sama bop ciy     Seeking seats, no deserts              Places je cherche et non déserts
Para verme con los muertos                 néew                              To see with the dead                   Pour me voir avec les morts
Corazones hay tan yertos !                 Dootuma dem almeer ya             Hearts are so stiff
Almas que hieden tanto !                   Duy mandiŋ ay barb laay wër       They are souls that stinks as !        Il y a des cœurs si glacés !
Para verme con los muertos                 Ngir nekk ci biiri néew           For me with the dead                   Des âmes qui sentent si forts !
Ya no voy al campo santo                   Ndaw xol yu ëmb tiis              I do not go to the cemetry             Pour me voir au milieu des morts
                                           Ruu yuy xeeñ lool                                                        Je ne vais plus au cimetière
                                           Su ma bëgge gis sama bopp ciy
                                           néew
                                           Dootuma dem almeer ya




T RIOL ET
                                                  AFRIC’ART            30    31             AFRIC’ART
Claude McKay (15 septembre 1889 - 22 mai 1948) est un romancier et poète né à la Jamaïque,
                 puis naturalisé américain. Il a fait partie du mouvement littéraire de la Harlem Renaissance ou Renais-
                 sance de Harlem. Il est l’auteur de trois romans : « Home to Harlem » en 1928 (« Ghetto noir »), un
                 best-seller qui lui valut le Harmon Gold Award for Literature, « Banjo » en 1929, et « Banana Bottom
                 » en 1933, un recueil de nouvelles : « Gingertown », en 1932, et deux autobiographies : « A Long
                 Way from Home » en 1937 et « Harlem : Negro Polis » en 1940. Sa poésie, lyrique, nostalgique, et
                 sociale, en fait un auteur majeur de la littérature afro-américaine de la première moitié du vingtième
                 siècle. Il fut un grand voyageur, passant la majeure partie de sa vie entre les États-Unis, l’Europe et
                 le Maroc. Il visita longuement la Russie après la Révolution bolchévique. Marqué par le racisme et la
                 ségrégation, il fut un auteur engagé dans les milieux révolutionnaires, mais il resta toujours critique
                 des appareils politiques. Malade et sans illusion, il se convertit au catholicisme à la fin de sa vie.




AFRIC’ART   32   33            AFRIC’ART
If we must die                                               Bu ñu naree dee                         Si nous devons mourir

        If we must die, let it not be like hogs                      Bu ñu naree dee, bu ñu mel ni           Si nous devons mourir, que ce ne
        Hunted and penned in an inglorious spot                      mbaam-xuux                              soit pas comme des porcs
        While round us bark the mad and hungry                       Yi ñu kar jóor leen ci barab bu suufe   Traqués et parqués en un lieu sans
        dogs                                                         bii                                     gloire
        Making their mock at our accursed lot.                       Te xaj yi xoñoñ ba dof wër ko           Entourés de chiens fous et enragés
        If we must die, oh, let us nobly die,                        Di bow aka kókëli sunu muj gu bon       Aboyant et raillant notre sort maudit
        So that our precious blood may not shed                      Bu ñu naree dee, éy ! nañu dee cig      Si nous devons mourir, ah ! mourons
        In vain ; the even the monsters we defy                      ngor                                    noblement
        Shall be constrained to honour us though                     Na sunu dereer ju sell ji baña tuuru    Que notre sang précieux ne soit
        dead !                                                       ci neen                                 versé en vain
        Oh, Kinsmen ! we must meet the common                        Te njuuma yi nuy tëkku faf di nu        Que les monstres que nous défions
        foe ;                                                        sargal bu ñu dee !                      soient contraints de nous honorer
        Through far outnumbered, let show us                         Ëy sama mbokk yi ! war nanoo song       morts !
        brave,                                                       noon bi nu mbokk                        Oh mes chers frères ! Nous devons
        And for their thousand blows deal one                        Donte ñoo néewle ciy nit, nanu wone     affronter l’ennemi commun
        deathblow !                                                  sunug njambaar                          Bien que nous soyons moins
        What though before us lies the open grave                    Buñ nu dóoree junni yoon nañ leen       nombreux, montrons notre bravoure
        ?                                                            door benn bu leen faat                  Pour leurs mille coups reçus nous
        Like men we’ll face the murderous,                           Bu yabboo ëllëg ñu gasal nu             leur rendrons un coup mortel
        cowardly pack,                                               bàmmeel                                 Qu’importe demain s’ils nous
        Pressed to the wall, dying, but fighting                     Dooni góor, jàkkaarlook gàddu           creusent une fosse commune
        back !                                                       bóomkat yu baqar yi                     En hommes, nous ferons face à ces
                                                                     Wéeru ci taax mi, noyyi, waaye ku nu    lâches assassins,
                                                                     door nu feyyu                           Le dos au mur, expirant, mais nous
                                                                                                             rendrons coup pour coup




IF WE MUST DIE

                                                    AFRIC’ART   34   35            AFRIC’ART
Nicolás Guillén (1904-1989) est le grand nom de la poésie cubaine au vingtième siècle. Issu d’un
                 milieu ouvrier, il fit des études de droit et devint avocat avant de se tourner vers le journalisme. Les
                 traductions de ses oeuvres ont permis à un vaste public de s’initier à la culture afro-cubaine.

                 C’est en 1930 que Guillén publia ses premiers poèmes, « Motivos de son », dans une revue de La
                 Havane. Inspirés de la tradition musicale populaire afro-cubaine, ses textes empruntent leur thème
                 à la vie et au langage des Noirs et des mulâtres de La Havane. Guillén inaugura ainsi ce qui devait
                 fonder l’essentiel de sa poétique, l’appel au respect de la personne humaine et l’éloge du métissage
                 entre les cultures noires et européennes.

                 Il développa ces thèmes dans ses recueils « Sóngoro Cosongo » (1931), « West Indies Limited »
                 (1934), « Elegías » (1948-1958), « La Paloma de vuelo popular » (1958), « Tengo » (1964), où s’affir-
                 mait son refus de l’injustice, de la colonisation et de l’impérialisme.

                 Il lutta en faveur des pauvres et des opprimés. En 1937, il quitta Cuba pour voyager au Mexique,
                 en Amérique du Sud et en Espagne, où il prit part à la guerre civile aux côtés des Républicains.
                 S’étant exilé à Paris après le coup d’état de Batista en 1952, il y revint en 1959, après la révolu-
                 tion castriste. Il fut élu président de l’Union des écrivains et artistes de Cuba en 1961 et proclamé
                 « poète national ».




AFRIC’ART   36   37            AFRIC’ART
Me matan                                   Mematan                           They kill me                           On me tue

Me matan, si no trabajo                    Su ma liggéeyee nu rey ma         They kill me if I am not working       On me tue si je ne travaille
Y si no trabajo, me matan ;                Su ma liggéeyul nu rey ma         And if I work they kill ;              Et si je travaille on me tue ;
Siempre me matan, me matan                 Rey ma la nu dëkke                They kill me always, they kill me      Toujours on me tue
Siempre me matan                           Dañ ma rey dañ ma rey             They kill me always                    Toujours on me tue
Ayer via un hombre mirando,                Démb gis naas waay                Yesterday I saw a man looking,         Hier j’ai vu un homme : il regardait
Mirando el sol que salía                   Mu doon xool                      Watching the sun rising                Il regardait le soleil qui naissait ;
El hombre estaba muy serio,                Mu doon xool jant bi fenk         Yesterday I saw a man watching,        Hier j’ai vu un homme : il regardait,
Porque el hombre no veía.                  Waay si dafa ne woon yàcc         Watching the sun rising,               Il regardait le soleil qui naissait ;
Ay !                                       Ndaxte du woon gis                The man was very serious               Mais l’homme restait impassible,
Los ciegos viven sin ver                   Ax !                              Because he couldn’t see                L’homme, car il ne voyait pas.
Cuando sale el sol,                        Gumba yi dunu gis                 Ay !                                   Aïe,
Cuando sale el sol,                        Jant biy fenk                     Live without seeing the blind          Les aveugles vivent sans voir
Cuando sale el sol                         Jant biy fenk                     When the sun rises                     Le soleil lorsqu’il naît
                                           Jant biy fenk                     When the sun rises                     Le soleil lorsqu’il naît,
Ayer vi a un niño jugando                                                    When the sun rises                     Le soleil lorsqu’il naît !
A que mataba a otro niño :                 Démb gis naag gone
                                                                                                                    Hier, j’ai vu un enfant : il jouait
Hay niños que se parecen                   Gu doon fo
                                                                                                                    A qui tuait un autre enfant ;
A los hombres trabajando                   Di rey beneen moroomam            Yesterday I saw a child playing        Hier j’ai vu un enfant : il jouait
Quién les dira cuando crezcan              Démb gis nab gone                 To kill another child :                A qui tuait un autre enfant ;
Que los hombres son niños                  Gu doon fo                        They are children who seem             Il est des enfants qui ressemblent
Que no lo son                              Di rey beneen moroomam            Men working                            A leurs aînés lorsqu’ils travaillent.
Que no lo son                              Am nay gone yu nurook             Who will tell them when they grow up   Qui leur dira une fois grands
Que no lo son !                            Seeni mag bu nuy liggéey          Those men are not children,            Que les hommes ne sont pas des
                                           Ku leen ne bun u jëmee mag        They are not,                          enfants,
Me       matan,     si   no     trabajo,   Mag ñooñu dunuy gone              They are not                           Pas des enfants
Y si trabajo, me matan :                   Dunuy gone                        They are not !                         Pas des enfants
Siempre me matan, me matan,                Dunuy gone



                                   AN
                                                                                                                    Pas des enfants !
Siempre me matan !                         Dunuy gone


                                  T
                                                                             They kill me if I am not working



                         MA
                                                                                                                    On me tue si je travaille


 M
                                           Su ma liggéeye nu rey ma          And if I work they kill me :           Et si je ne travaille on me tue :



       E
                                           Su ma liggéeyul nu rey ma         They kill me always, they kill me      Toujours on me tue, on me tue,
                                           Rey ma la nu dëkke                They kill me always !                  Toujours on me tue !
                                           Dañma rey dañ ma rey
                                                   AFRIC’ART            38   39             AFRIC’ART
Jacques Roumain (4 juin 1907 - 18 août 1944, Port-au-Prince), fut l’un des écrivains les plus
                 respectés d’Haïti. Petit-fils du président Tancrède Auguste, il fréquenta des écoles catholiques à
                 Port-au-Prince, puis étudia en Belgique, en Suisse, en France et en Allemagne. À vingt ans, il revint
                 en Haïti et fut co-créateur de La Revue Indigène. Il y publia « La proie et l’ombre », « La montagne
                 ensorcelée » et « Les fantômes ».

                 Très actif dans la lutte contre l’occupation américaine d’Haïti (1915-1934), il fut emprisonné en 1933
                 et en 1934 alors qu’il venait de fonder le Parti Communiste Haïtien.

                 De retour d’Europe, il gagna les États-Unis en 1939. Pendant cet exil, il travailla et se lia d’amitié
                 avec de nombreux écrivains et poètes, comme Langston Hughes. Il voyagea beaucoup et séjourna
                 presque un an aux côtés du poète Nicolás Guillén à La Havane. En 1941 il rentra en Haïti et fut in-
                 vesti en 1942 d’une charge de diplomate à Mexico. Il compléta à la même époque deux de ses livres
                 les plus influents : le recueil de poésie « Bois d’Ebène » et le roman « Gouverneurs de la Rosée ».

                 La majorité du travail de Roumain exprime la frustration et la rage d’un peuple qui a été piétiné durant
                 des siècles. Il incluait tous les Haïtiens dans ses écrits, et appelait les pauvres à s’unir contre la
                 misère. Son œuvre continue d’influencer la culture haïtienne et panafricaine en général.




AFRIC’ART   40   41            AFRIC’ART
Guinée                                                          Gine                                    Guinea

     C’est le lent chemin de Guinée                                  Yoon wu yéex a ngi jëm Gine             It’s the long road to Guinea
     La mort t’y conduira                                            Dee la fay jëme                         Death takes you down
     Voici les branches, les arbres, la forêt                        Bànqaas yaa ngi nii, garab yi, àll bi   Here are the boughs, the trees, the
     Ecoute le bruit du vent dans les longs                          Déglul riiru ngelaw li                  forest
     cheveux d’éternelle nuit                                        Ci biir karaw yu gudd yi                Listen to the sound of the wind in its
     C’est le lent chemin de Guinée                                  Ci gudd gu dul dakk                     long hair of eternal night
     Tes pères t’attendent sans impatience                           Yoon wu yéex wi jëm Gine                It’s the long road to Guinea
     Sur la route ils palabrent                                      Dee la fay jëme                         Where your fathers await you without
     Ils t’attendent                                                 Say bay a ngi xaar                      impatience
     Voici où les ruisseaux grelottent                               Ànd ak teey ci tali bi                  Along the way – They talk
     Comme des chapelets d’os                                        Ñu ngay waxtaan                         They wait
     C’est le lent chemin de Guinée                                  Ñung lay xaar                           This is the hour when the streams
     Il ne te sera pas fait de lumineux accueil                      Fii nag la dex yu ndaw yiy pët-pëtee    rattle
     Au pays des hommes noirs                                        Mel ni kurusi yax                       Like beads of bone
     Sous un ciel fumeux, percé de cris                              Yoon wu yéex wi jëm Ginee
     d’oiseaux                                                       Dee la fay jëmee                        It’s the long road to Guinea
     Autour de l’œil du marigot                                      Dun la fa tertu tertu bu neex           No bright welcome will be made for
     Les cils des arbres s’écartent sur la clarté                    Ca réew mu ñuul ma                      you
     pourrissante                                                    Nit ñuul ña dëkkee                      In the dark land of dark men
     Là t’attend au bord de l’eau un paisible                        Te suufas asamaan say saxaar            Under a smoky sky, pierced by the
     village et                                                      Booleek picc yay sab                    cry of birds
     La case de tes pères et la dure pierre                          Li wër bëtu mango gi                    Around the eye of the river
     familiale                                                       Yéeni garab yaa nga fireeku             There, there awaits you beside the
     Où reposer ton front                                            Ci leer giy gilli                       water a quiet village
                                                                     Foo fu ci wetu ndox mi                  And the hut of your fathers, and the



G UINÉE
                                                                     Am na fa dëkkub jàmm                    hard ancestral stone
                                                                     Sa néegu baay yaa ngi lay xaar          When your head will rest at least
                                                                     Ak xeer wu dëggër
                                                                     Wi nga wara teg sa jë
                                                                     Yoon wu yéex a ngii jëm Gine
                                                                     Dee la fay jëmee




                                                    AFRIC’ART   42   43             AFRIC’ART
Paul Laurence Dunbar (1872 - 1906, Dayton, Ohio) fut le premier poète Afro-Américain à recevoir
                 des critiques élogieuses. Il était le seul Afro-Américain de sa classe au lycée de Dayton et, alors qu’il
                 eut souvent du mal à trouver un emploi en raison de sa race, il fut un des meilleurs à l’école.
                 Il écrivit un grand nombre de poèmes en dialecte, de poèmes anglais classiques, d’essais, de
                 romans et de nouvelles. Sa première collection, « Oak and Ivy », fut publiée en 1892. Son deuxième
                 livre, « Majors and Minors », publié en 1895, le propulsa vers la gloire nationale. Après 1902 et
                 jusqu’à sa mort, il produisit douze livres de poésie, quatre livres de nouvelles, une pièce de théâtre
                 et cinq romans.

                 Son travail a souvent abordé les difficultés rencontrées par les membres de sa race et les efforts des
                 Afro-Américains pour réaliser l’égalité en Amérique. Il fut salué tant par les meilleurs critiques littéraires
                 de son temps que par ses contemporains littéraires.




AFRIC’ART   44   45             AFRIC’ART
We wear the mask                                            Nu ngiy wéeye sutura                  Nous portons le masque

   We wear the mask that grins and lies                        Nu ngiy wéeye sutura                  Nous portons le masque qui ment
   It hides our cheeks and shades our eyes                     Sutura siy nëbb li nuy dundee         et grimace
   This debt we pay to human guile                             Dox sunu digganteek yeen bun u        Il dérobe aux regards notre visage et
   With torn and bleeding hearts we smile                      gañaxu                                nos yeux
   And mouth with myriad subtleties                            Sutura siy nëbb sunu kanam ak         C’est là le tribut de la perfidie humaine
   Why should the world be overwise                            sunuy bët                             Le cœur saignant et déchiré, nous
   In counting all our tears and sighs ?                       Loolooy peyooru mbonug doom           sourions
   Nay, let them only see us, while                            aadama                                Et faisons des grimaces avec mille
   We wear the mask                                            Xol bu dog di nàcc nuy muñ            subtilités
   We smile, but, O great Christ, our cries                    Tey gañaxu ci sutura                  A quoi nous servirait d’en dire trop
   To thee from tortured souls arise                           Na fekk buñ nuy xool                  au monde
   We sing, but oh, the clay is vile                           Nu nekk ci géeju sutura               De lui faire dénombrer nos soupirs et
   Beneath our feet, and long the smile                        Nu ngi muñ fu nu tollu                nos larmes ?
   But let the world dream otherwise                           Céy Isaa mu màgg mi                   Mieux vaut seulement qu’on nous
   We wear the mask                                            Sunuy yuuq yaa ngi jolli jëm ci yow   voie seulement pendant que
                                                               Jóge sunu ruu yii nu faagaagal        Nous portons le masque
                                                               Nu ngi woy fu nu tollu, waaye, Ax !   Nous sourions, mais ô Grand Christ,
                                                               Suuf seeka yées sunu suufi tànk       nos cris



WE WEAR T
                                                               Bu nuy dox, ndaw yoon wu gudd !       Montent vers toi de notre âme
                                                               Waaye bàyyileen addinaaki naxem       torturée



         HE M
                                                               Te dés di wéeye sutura                Nous chantons, mais ah ! que la
                                                                                                     terre est ignoble



             ASK
                                                                                                     Sous nos pieds, et long le chemin !
                                                                                                     Mais laissez le monde à ses illusions
                                                                                                     Nous portons le masque.

                                                                                                     Traduction de François Dodat




                                              AFRIC’ART   46   47            AFRIC’ART
Marcus Mosiah Garvey (1887, Jamaïque - 1940, Londres) est un leader noir du XXe siècle, consi-
                 déré comme un prophète par les adeptes du mouvement rastafari. Il est né un an après l’abolition
                 de l’esclavage à Cuba, où la ségrégation raciale et le travail asservi règnent toujours. L’Afrique est
                 en proie à la colonisation européenne à cette époque, mais certains Afro-Caribéens parviennent à y
                 partir. Il devient vite un orateur de premier plan, journaliste, et activiste politique. Précurseur du pana-
                 fricanisme, il se fait le chantre de l’union des Noirs du monde entier à travers son journal The Negro
                 World et le promoteur obstiné du retour des descendants des esclaves noirs vers l’Afrique (ce qu’on
                 appelle le «Back to Africa»).

                 Arrivé aux États-Unis en 1916 où il rencontre tous les mouvements visant à émanciper les Afro-Amé-
                 ricains, il y fonde en 1917 l’Association Universelle pour l’Amélioration de la Condition Noire (United
                 Negro Improvement Association, UNIA, toujours en activité). La devise de cette association était One
                 God! One aim! One destiny! (Un Dieu ! Un But ! Une Destinée!). Il devient un des premiers meneurs
                 importants de la cause noire. Installé à Harlem de 1918 à 1922, Marcus Garvey est mondialement
                 connu.

                 Ne croyant pas que les Afro-Américains pourraient vivre libres et respectés hors d’Afrique, il
                 crée en 1919 la Black Starline, compagnie maritime censée servir son projet de rapatriement, et ses
                 bateaux se préparent à emmener Antillais et Afro-Américains en Afrique. En 1922, après la banque-
                 route de la Black Starline, Garvey est poursuivi par les tribunaux. Emprisonné à Atlanta, il est exilé en
                 1927 en Jamaïque où il devient le grand héros national. Les Jamaïcains écoutent avec beaucoup
                 d’enthousiasme ses meetings et la vie politique de l’île s’en trouve bouleversée. Mais il meurt à
                 Londres sans jamais atteindre l’Afrique.




AFRIC’ART   48   49             AFRIC’ART
Oneness interests                                                  Bokk njariñ                            Afrique
(Extrait d’un discours de 1923)
                                                                   Ku ne xam na ne amul xàjjeek           Chacun sait qu’il n’y a aucune
Everybody knows that there is absolutely                           seen diggante doomi Afrig, juddu       différence entre les Africains
no difference between the native African                           jéeri beek Amerikee bi ak Cembe        natifs d’Afrique, ceux d’Amérique
and the American and the West Indian                               bu ñuul bi bawoo Sowu, bu loolu        et les Nègres Antillais, car nous
Negroes, in that we are descendants                                wéeye nun ñépp bokk Maam mu nu         descendons de la même souche
from one common family stock. It is only                           jógee, ndogal rekk a tax nu réeroo     familiale. C’est seulement par
a matter of accident that we have been                             ku ne wéy saw yoon ci lu ëpp ñetti     accident que nous avons été divisés
divided and kept apart for over three                              xarnu, waaye jamonoy dellu Afrig       et séparés plus de trois siècles
hundred years, but it is felt that when the                        ñëw na, ñu wara ñibbi ci cofeelu nit   durant, mais est venu le moment
time has come for us to get back together,                         ak mbokkam, te Nit ku Ñuul ku doon     pour que nous nous retrouvions
we shall do so in the spirit of brotherly love,                    xaar jamono jii war nan laa dimmëli    ensemble, nous devons le faire
and any Negro who expects that he will be                          nga àggali sa yéene fii ak foo mana    dans l’esprit de l’amour fraternel, et
assisted here, there and anywhere by the                           ne Mbootaayu dunya Gi Taaxaw Ngir      chaque Nègre qui le souhaite devra
Universal Negro Improvement Association                            Yokkute Ñit ku Ñuul dina la taxawu     être soutenu ici, là-bas ou n’importe
to exercise a haughty superiority over the                         ngir nga fonk sa askan te weg lépp     où par l’Association Universelle pour
fellows of his own race, and makes a                               lu tukke saw xeet, Nit ku Ñuul ku      l’Amélioration de la Condition Noire,
tremendous mistake. Such men had better                            yaakaar ne yaa gën sa moroom yaa       tout nègre mu par le sentiment
remain where they are and not attempt to                           ngi ci njuumte gu réy te sula yaboo    d’une supériorité hautaine envers
become in any way interested in the higher                         toog fa nga ne te xam ne bokkoo ci     ses compagnons de même race
development of Africa.                                             ñiy jëmale Afrig kanam.                commet une erreur monumentale.
                                                                                                          De telles personnes feraient mieux
                                                                                                          de rester là où elles sont et ne
                                                                                                          devraient aucunement s’intéresser
                                                                                                          au développement de l’Afrique.




                                                  ER ESTS
         INT
  EN ESS
N                                                 AFRIC’ART   50   51            AFRIC’ART
AFRIC’ART   52

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Projet africart lq

  • 1. 1 AFRIC’ART Projet culturel et pédagogique : Conférences, concerts Résidences artistiques de Daouda NDIAYE et Meïssa MBAYE
  • 2. Disque de Meïssa Mbaye, auteur-compositeur-interprète. Ces textes ont été sé- lectionnés et traduits par Daouda Ndiaye, poète depuis 2001. Les textes du « Retour du Pigeon voyageur », dont sont extraits les textes de « Back to Africa » ont été enregistrés sous le n° 2003. 01. 0071 / à la date du 06/01/2003 à la Société des Gens de Lettres de France, sise Hôtel Massa, 38 rue Faubourg Saint-Jacques, 75014 Paris). La durée de validité de la protection du projet « Le retour du pigeon voyageur » par la Société des Gens de Lettres de France court jusqu’en avril 2014. Avec l’aimable autorisation de Harold Ober Associates Inc., New York, pour les textes de Langston Hughes. Avec l’aimable autorisation du Schomburg Center for Research in Black Culture, New York, pour le texte de Claude Mc Kay. AFRIC’ART 2 3 AFRIC’ART
  • 3. Introduction : Le chanteur sénégalais Meïssa M’Baye présente son album “Back To Africa”. après. Les voilà regroupés dans ce projet, pour porter le même verbe, histoire de Tel un retour vers le futur, cet ambitieux projet fait suite à son opus dédié à Leopold dire que leurs origines transcendent naturellement les questions de langue. Les Sédar Senghor, “Entre Seine et Sine”. Dans ce sillage « littéraire », il y célèbre voilà projetés au cœur de l’actualité, par une mise en sons qui remet en perspective les retrouvailles de cousins séparés par les siècles et les eaux, celles du tragique et en lumière leurs points de vue, différents mais convergents. Atlantique noir. Recoudre les coutures et les contours d’une déchirure historique, retisser les liens dénoués lors de la déportation esclavagiste, ce disque s’inspire du projet d’anthologie de l’universitaire Daouda Ndiaye. Intitulé “Le retour du pigeon Pour leur rendre hommage, en paroles et musique, Meïssa a convié autour de ses voyageur”, ce recueil de textes (traduits en wolof par Daouda Ndiaye) des auteurs compositions leurs héritiers, tambours africains comme le maître des baguettes surgis de l’autre côté de l’océan, héritiers d’une diaspora disséminée du Nord au made in Nigeria Tony Allen ou les balafons sénégalais, et tambours de bouche Sud de l’Amérique, tous porteurs des fragments d’une mémoire que l’on crut en- américains comme les slammeurs-rappeurs Mike Ladd, Allonymous et Jayhem, fouie à tout jamais dans les cales des négriers. Ou plutôt de mémoires d’Afrique, mais aussi chants gorgés de soul et guitare à la coule, flûte spirituelle et chœurs puisque cette histoire ne peut s’inscrire dans une lecture univoque, qu’elle est la dignes des meilleurs gospel, rythmique aux accents latins et harmonique aux élans somme d’expériences multiples, qu’elle continue de s’écrire aux pluriels de tous jazz. Tous réunis sous le vocable The Word Masters. ses subjectifs. « Ce n’est ni une dilution de l’Afrique dans un universalisme abstrait, ni une fragmentation d’une Afrique se complaisant dans un ghetto. Il s’agit d’une Jacques DENIS dynamique culturelle qui ne perd pas son âme » résume Meïssa. Voilà ce dont parlent tous ces fils d’Afrique, dans le double sens du terme. Cer- tains ont connu l’esclavage, comme les Etats-Uniens Phillis Wheatley et George Moses Horton, comme le Péruvien Manuel Gonzalez Prada et le Brésilien Luìs Gama. D’autres eurent leur heure de gloire comme le premier poète afro-américain reconnu comme tel Paul Laurence Dunbar et Marcus Garvey, le charismatique leader de la cause panafricaine, comme aussi l’Américain Langston Hughes et le Jamaïcain Claude McKay, deux des voix les plus singulières de la Harlem Re- naissance. D’autres enfin, comme le Cubain Nicolas Guillén et l’Haïtien Jacques Roumain, ont prolongé les écrits de leurs pairs, pour les inscrire dans la Négritude, le mouvement littéraire qui prend racines dès les années trente et se prolonge bien AFRIC’ART 4 5 AFRIC’ART
  • 4. L’objectif principal du projet Mémoires d’Afrique est de faire connaître venu en complément du programme scolaire. Ainsi, les étudiants seront amenés à à un large public les précurseurs de la renaissance poétique né- s’exprimer lors des conférences-débats sur différents thèmes et pourront découvrir gro-africaine, en mettant en valeur la culture traditionnelle mais aus- l’usage des instruments traditionnels aux côtés de tendances modernes comme le slam. si en y introduisant des jeunes talents afin de leur transmettre ces savoirs. Au final, Mémoires d’Afrique compte susciter le regain d’intérêt pour la poésie Ces poèmes et l’histoire de leurs auteurs ne sont pas étudiés en tant que africaine chez les étudiants, les élèves et le grand public ; la création d’un réseau tels dans les établissements. Ensuite, il existe une frontière assez mar- régional, national et international d’artistes et d’intellectuels voués à la cause de la quée entre musiciens traditionnels, soit les griots, et la nouvelle génération. Renaissance Africaine ; le développement d’un public porteur pour la Musique et Peu d’échanges artistiques interagissent entre eux et ceci pose un problème la Poésie. puisque toutes les connaissances se transmettent seulement entre griots. De plus, on sait que le Sénégal est depuis longtemps une société de l’oralité et que ce socle de connaissances laisse rarement une trace écrite. Avec la produc- tion du livret-CD le projet a pour ambition d’agir sur le terrain à un moment don- né précis, mais également de perdurer dans le temps et de manière matérielle. L’offre de produits culturels est concentrée dans la région de Dakar ; capitale éco- nomique et touristique, celle-ci accueille le plus grand nombre de structures cultu- relles, d’artistes, d’événements… Le souhait de Mémoires d’Afrique sera donc de se déplacer dans les régions plus reculées du pays. Le message délivré devra être compris par tous et c’est pour cela que le livret sera publié en wolof, français et anglais. Le discours employé lors des ateliers pédagogiques sera également adap- té selon le public participant. L’artiste Meïssa, également médiateur culturel et avant tout pédagogue, a déjà eu à animer ce genre d’ateliers avec tous genres de publics. L’éducation et la culture vont de pair et c’est en cela que le projet souhaite in- tervenir. En effet, le public visé étant majoritairement les jeunes, le projet a pour vocation de s’inscrire comme un atelier d’apprentissage pédagogique et ludique, AFRIC’ART 6 7 AFRIC’ART
  • 5. Phillis Wheatley (1753, Sénégal - 1784, Etat-Unis d’Amérique) est reconnue comme la première poétesse Afro-Américaine, avec « Poèmes sur divers sujets, religieux et moraux ». Son oeuvre reflète son éducation religieuse et classique de la Nouvelle-Angleterre. A l’exception de « On being brought from Africa to America » («Déportés d’Afrique en Amérique »), ses poèmes n’ont jamais parlé de l’égalité raciale. Largement applaudie pour son travail, elle fut affranchie en 1773, et s’éleva vivement contre l’esclavage et le travail asservi Elle fut précurseur à de nombreux niveaux : première femme Afro-Américaine à vivre de son écriture; première femme écrivain encouragée et financée par un groupe de femmes ; première femme de lettres Afro-Américaine accomplie. Elle fut honorée par de nombreux pères fondateurs de l’Amé- rique, y compris George Washington. Son livre est de nos jours considéré comme la base de la littérature afro-américaine, sa source et son inspiration. Un bâtiment a été nommé en l’honneur de Phillis Wheatley à l’Université du Massachusetts, Boston. Elle a également été classée parmi les « 100 plus grandes Afro-Américaines » par l’érudit Molefi Kete Asante, en 2002. AFRIC’ART 8 9 AFRIC’ART
  • 6. My lord Sang Monseigneur Should you my lord, while you peruse my Su fekkoon ne sang bi boo jàngee Si vous deviez, Monseigneur, en song woy wii lisant mes vers, Wonder from whence my love of freedom Dinga jéema xam lu ma booleek Vous demander d’où me vient mon sprung cofeelug sañ-sañ amour de la Liberté, Whence flow these wishes for the common Bi jur yéene yu baax yi ñépp bokk D’où naquirent ces vœux pour le good Nga xam ne ku dul boroom xol bu bien commun By feeling hearts alone best understood laabiir du ko am Que seuls comprennent bien les I, young in life, by seeming cruel fate Xamal ne, cig ngone, la ma ndogal cœurs chaleureux, Was snatch’d from Afric’s fancy’d happy lu nuru lu tar Sachez que, toute jeune, un destin seat Këk ak jàmm, ci li nu wax, ci suufus qui semble cruel What spangs excruciating must molest Afrig M’arracha à la terre, heureuse, dit- What sorrows labor in my parent’s breast ? Ndaw metit wu tar ak coono ñaaw on, d’Afrique ; Steel’d was that soul and by no misery Yu xotti sama ruuwu bay Quelle douleur atroce et quels mov’d Boroom xolu xeer bu umpale tourments affreux That from a father seiz’d his babe belov’d yërmande Déchirent-ils encore l’âme de mon Such, such my case, and can I then but Moo sàcc bay doomam ju mu sopp père ? pray Loo looy sama mbir. Na may def ba C’était un cœur de pierre, ignorant Others many never feel tyrannic sway ? duma ñaan la pitié Ngir ñeneen mucc ci aay-biir yii Qui ravit à un père son enfant bien aimée Tel est mon cas. Comment, alors, ne prierais-je pas Pour que d’autres jamais ne souffrent des tyrans ? MY LORD AFRIC’ART 10 11 AFRIC’ART
  • 7. James Mercer Langston Hughes (1er février 1902 – 22 mai 1967) est un poète, nouvelliste, dra- maturge et éditorialiste américain du XXe siècle. Il fut un acteur majeur dans le mouvement culturel qui a secoué Harlem dans les années 1920, plus communément appelé Renaissance de Harlem et qui verra émerger toute une série d’artistes noirs. Avec la publication de multiples recueils de poésies (le premier en 1926, « The Weary Blues » dont est extrait l’un de ses poèmes les plus célèbres : The Negro speaks of rivers), de pièces de théâtre, d’essais ou encore de scénarios pour le cinéma, Langston dépeint la vie des prolétaires Noirs partagée entre joies, désillusions, espoir…, le tout teinté de jazz et de blues. Il dira plus tard : «J’ai cherché à comprendre et à décrire la vie des Noirs aux États-Unis et, d’une manière éloignée, celle de tout humain». Par son travail, il a cherché à montrer l’importance d’une «conscience noire» et d’un nationalisme culturel qui unit les hommes plutôt que les opposer. Cette fierté a par la suite été reprise par de nombreux hommes de lettres comme Jacques Roumain, Nicolás Guillén, Léopold Sédar Senghor ou encore Aimé Césaire. Dans les années 50-60, la popularité de Hughes parmi les auteurs Afro-Américains a décliné en même temps qu’elle s’est accrue dans le monde. Il lui a été reproché de n’avoir pas modernisé son discours de la «fierté noire» par rapport à l’évolution de la condition des Noirs aux États-Unis qui s’améliorait à cette période. Néanmoins il reste un modèle pour bon nombre d’écrivains. AFRIC’ART 12 13 AFRIC’ART
  • 8. The Negro speaks of rivers Dex Le Nègre parle des fleuves I’ve known rivers Nit ku ñuul a ngi wax ciy dex J’ai connu des fleuves I’ve known rivers ancient as the world and Xam naa ay dex J’ai connu des fleuves anciens older than Xam naa ay dex yu màgget na comme le monde et plus vieux The flow of human blood in human veins àdduna te gën fee yàgg Que le flux de sang humain dans les My soul has grown deep like the rivers Deret jiy daw ci sidditi doom aadama veines humaines I bathed in the Euphrates when dawns Samag ruu daldi xóot ni dex yi Mon âme est devenue aussi were young Sangu naa ci Efraat ca ngoneg njël yi profonde que les fleuves I look upon the Nile and raised the pyramids Tabax naa sama néegu nax ci wetu Je me suis baigné dans l’Euphrate above it Kongo gi ma yeetal quand les aubes étaient neuves I heard the singing of the Mississippi when Xool naa Niil dellu tabax ca kowam J’ai bâti ma hutte près du Congo et il Abe Lincoln went bàmmeeli buur ya a bercé mon sommeil Down to the New Orleans, and I’ve seen Dégg naa Woyu Misisipi ba Abaraam J’ai contemplé le Nil et au-dessus j’ai Turn all golden in the sunset Lincoln wàccee construit les pyramides I’ve known rivers : ancient, dusky rivers Nuwel Orleyaan, gis naa fa poto- J’ai entendu le chant du Mississippi My soul has grown deep like the rivers. poto buy wal quand Abraham Lincoln descendit Soppiku wurus ca marax A la Nouvelle Orléans, j’ai vu ses Xam naa ay dex nappes boueuses transfigurées Dex yu màgget te nëx En or au soleil couchant Samag ruu daldi xóot ni dex yi J’ai connu des fleuves : des fleuves anciens et ténébreux. Mon âme est devenue aussi RIVERS profonde que les fleuves. EGRO SPEAKS OF THE N AFRIC’ART 14 15 AFRIC’ART
  • 9. As I grew older Ndekke ni laa màgge Comme j’ai grandi (Shadow) It was a long time ago Il y a longtemps But it was there then, Loolu yàgg na lool J’ai presque oublié mon rêve In front of me, Daanaka fàtte naa sama gent gii Mais il était là, puis Bright like a sun Waaye batay mi ngi nii En face de moi, My dream Sama kanam Il scintillait comme un soleil And the the wall rose, Di nes-nesi ni jant Mon rêve Rose slowly Sama gent gi Et puis le mur s’éleva Between me and my dream Noonu rekk miir bi yéeg S’éleva lentement, peu à peu Rose slowly Di yéeg ndank ndank Entre moi et mon rêve Dimming Dox sama digganteek gent gi S’éleva jusqu’à toucher le ciel Hiding Mu yéegati ndank-ndank Le mur ! The light of my dream Di lëndëmal ba far nëbb L’ombre ! Rose until it touched the sky Leer gi sama gent Je suis un Noir The wall Yéeg nab a far laal asamaaan Je m’allonge dans l’ombre Shadow Wóoy miir bi Plus de lumière de mon rêve devant I am a black. Keppaar gi moi It lie down in the shadow. Man mi ñuul tëdd ci keppaar gi Au-dessus de moi No longer the the light of my dream before Ci sama kanam ak li ma tiim Seul le mur épais me Sama leeerug gent ne mes Seule l’ombre Above me. Miir bu tal bee fi des Only thick wall Akug keppaar Only the shadow Loolu yàgg lool Daanka fàtte naa sama gent gi AS I G RE W OL DER AFRIC’ART 16 17 AFRIC’ART
  • 10. Homesick blues Pummu ray bi Le blues du pays De railroad bridge’s Cii pomu raay bi Le pont du chemin de fer A sad song in the air La woy wu tiis di jolli C’est une chanson triste dans l’air De railroad bridge’s Ci pomu raay bi Le pont du chemin de fer A sad song in the air woy wu tiisa ngi jolli C’est une chanson triste dans l’air Every time de train pass Saa su saxaar rombe Chaque fois qu’un train passe I wants to go somewhere Ma bëgg dem Je veux m’en aller dans d’autres Ca yeneeni gox terres I went down to de station Ci pomu raay bi Ma heart was in ma mouth La woy wu tiiss di jolli Je descendis jusqu’à la gare Went down to de station Waaxu naa bat ci gaar bi Le cœur sur les lèvres Heart was in ma mouth Descendis jusqu’à la gare Lookin’ for a box car Sama xol di waaja genn Le cœur sur les lèvres To roll me to de south Sama gémmiñ Cherchant un wagon de May wër saxaarug njaay marchandises Homesick blues, Lawd, Gu ma yóbbu xarfu Pour m’amener vers le sud ‘S a terrible thing to have Ci pomu raay bi Homesick blues is La woy wu tiis di jolli Le blues du pays, Seigneur, A terrible thing to have Ci pomu raay bi C’est triste de l’avoir pris, To keep from cryin’ Woy wu tiissa ngi jolli Le blues du pays, c’est une chose UES I opens my mouth an’ laughs Ci pomu raay bi Terrible de l’avoir pris La woy wu tiis di jolli Pour m’empêcher de pleurer B L J’ouvre ma bouche et je ris. Tiisum réew Boroom bi CK Tiis la ci ki mu dal ESI Tiisum réew Boroom bi Mbir mu diis la M Ci ki mu dal HO Ngir ma baña jooy Damay ubbi Sama gémmiñ ree Loolu yàgg lool Daanka fàtte naa sama gent gi AFRIC’ART 18 19 AFRIC’ART
  • 11. Luis Gama (1830 - 1882, Brésil) était le fils d’un Portugais et d’une jeune esclave venant du Ghana, connue pour s’impliquer dans de nombreuses rébellions. A l’âge de dix ans, il fut vendu illégalement par son père à un sergent nommé Cardoso qui l’employa comme domestique dans sa ferme. En 1847, un étudiant, accueilli chez Cardoso, devint très vite ami avec Gama, et lui apprit à lire et à écrire. Prenant conscience de l’illégalité de sa condition, Gama s’enfuit à São Paulo, et y étudia le droit à l’Université ; mais il ne termina pas le cursus et travailla ensuite comme avocat non diplômé. Dans les années 1860 il fut journaliste, et fonda la revue Radical Paulistano en 1869 aux côtés de Ruy Barbosa. Il contribua aussi à créer le Parti républicain de São Paulo en 1873. Il libéra plus de mille esclaves à São Paulo, avant de mourir en 1882, victime du diabète. Gama publia en 1859 un livre de poésie, Primeiras Trovas Burlescas de Getulino (Premières Bal- lades Burlesques de Getulino). La plupart des poèmes sont des satires des mœurs de l’aristocratie brésilienne du 19e siècle. AFRIC’ART 20 21 AFRIC’ART
  • 12. Minha Mãe Sama yaay My Mother Ma mère Era mui bela e formosa, Moo gëna taaru ci jigeéen ju ñuul She was very beautiful and fair C’était la plus belle des femmes Era a mais linda pretinha, Lingeer la woon ca tàngooru Libi She was the most beautiful black girl noires Da adusta Líbia rainha, Dellu di jaam bu toskare ci Bresil Adusta queen of Libya Elle était reine dans la chaleur de E no Brasil pobre escrava! Céy rabu jinne bu taaru bi And in Brazilia poor slave ! Lybie Ela a palmeira singela, Boroom jëmm ju ñuul ji nu yatt ci xeer Devenue pauvre esclave au Brésil ! Na fulva areia nascida bu ñuul bi Oh Musa Guinea, jetty Oh belle muse noire sculptée dans Nos roliços braços de ébano. Abal ma sab lekketu urucongo Granite statue denigrated le granit Brandinha a voz sonorosa, Jàngal ma tëgg ci sa balafon Before whom the Lion gets rendered Prête-moi ton « urucongo » Sentida como a Rolinha, Sol ma xam-xamu xërëm yi Naked fury of atrocious frown ; Apprends-moi à jouer du balafon Gemendo triste sozinha, Yóbbu ma ci yoon yi ànd ak yëkkatiku Lend me the gurd of urucungo Insuffle-moi le savoir des fétiches Ao som da aragem faceira. Xam-xam bu sës ak mbind jagleelu Teach me to brandish your marimba Emmène-moi sur les chemins de Escuro e ledo o semblante, ñu ko It inspires me to science candimba l’élévation De encantos sorria a fronte, Janq bu ñuul bi ci tefes Pathways lead me high magnitude La science et l’écriture ne sont pas — Baça nuvem no horizonte Baal ma sama saxarit pour toi, dit-on Das ondas surgindo à flor. Suufi Tubaab yi ñu yilif Sciences and Letters they are not La jeune fille noire sur le rivage de la Se junto à cruz penitente, Amunu sax sañ-sañu xalaat for you mer A Deus orava contrita, Black girl of the Cost Toi qui n’es rien aux yeux du monde Tinha uma prece infinita In the land of white man Excuse-moi, chère amie, nous Como o dobrar do sineiro, We haven’t the right to think n’avons même pas la liberté de As lágrimas que brotavam, penser Eram pérolas sentidas, Sur la terre des Blancs qui nous Dos lindos olhos vertidas dirigent. MAE Na terra do cativeiro. MINHA AFRIC’ART 22 23 AFRIC’ART
  • 13. George Moses Horton (1797 – 1883) est le premier esclave d’Amérique à avoir contesté son sta- tut en écrivant des poèmes. Son premier poème, « On Liberty and Slavery » (Liberté et Esclavage), parut en 1829. Il voulut acheter sa liberté et partir au Libéria ; « The Hope of Liberty » (L’Espoir de Liberté), le premier livre publié dans le Sud par un homme noir, ne rapporta presque rien et il dut abandonner ses projets. Cet ouvrage fut réédité en 1837 sous le nom de « Poems by a Slave » (Poèmes d’un Esclave). Horton gagna l’admiration et le soutien d’hommes tels que des gouverneurs, des présidents de l’Uni- versité de Caroline du Nord, des journalistes. En 1845, un journal publia « Les Oeuvres Poétiques de George M. Horton, le barde de couleur de Caroline du Nord ». Il publia en 1865 son troisième livre, « Naked Genius » (Le Génie nu). De style classique, ses œuvres sur la campagne et sur l’esclavage sont émouvantes. AFRIC’ART 24 25 AFRIC’ART
  • 14. On liberty and slavery Lu taq ci sañ-sañ ak njaam De la Liberté et de l’esclavage (Xalaas) Alas ! and I am born for this, Hélas ! Ne suis-je donc né To wear this slavis chain ? Xalaas ! xanaa du dama juddu Que pour porter cette chaîne Deprived of all created bliss, Ngir rekk takk ceenug njaam d’esclave ? Through hardship, toil and pain ! Umpale mépp mbégte ci sos Privé de toutes les joies de la création How long have I in bondage lain, Ne ci toskare, coonok naqar Par la misère, la peine et la douleur ! And languished to be free ! Alas ! and must I still complain- Bama nekkee jaam ak léegi Que de temps déjà suis-je en Deprived of liberty. Mu ngi bëgg yàgg esclavage Namm naa moom sama bopp Et me languis d’être libre ! Oh, Heaven ! and is the no relief Xalaas ! xanaa duma dëkke ci xultu Hélas ! Faut-il encore que je me This side silent grave- Liñ ma xañub sañ-sañ plaigne To soothe the pain-to quell the grief Privé de ma liberté ? And angish of a slave ? Céy Yàlla, xanaa amoo saafara Laata may xam wéetaayu bàmmeel Oh Ciel ! N’y a-t’il donc point de Buy seral samaw metit ngir sippil remède mab coono Avant le silence de la tombe Ak tiitange gi ci njaam Pour calmer la douleur, pour apaiser la peine Et l’angoisse de l’esclave ? D S L AVERY AN ON TY L IBER AFRIC’ART 26 27 AFRIC’ART
  • 15. L’essayiste et poète péruvien Manuel González Prada (6 janvier 1848 - 22 juillet 1918, Lima) fut l’un des polémistes les plus dynamiques de la fin du 19e siècle dans l’Amérique espagnole. Il se battit pour le changement et le progrès et dénonça les vestiges du colonialisme espagnol. Après 1883, il voyagea en Europe. De retour à Lima, il prit immédiatement une place prépondérante dans l’avant-garde de la conscience nationale péruvienne. Des écrivains et des personnalités poli- tiques furent gagnés par sa ferveur révolutionnaire. Il parla avec éloquence non seulement contre la classe aristocratique figée d’où il était issu, mais aussi contre le rejet de l’Indien comme un élé- ment caractéristique de la nation, contre le clergé et l’oligarchie militaire dominante, qu’il considérait comme les sources de nombreux maux chroniques du pays. Il devint le porte-étendard d’une nou- velle génération de Péruviens. Les principaux ouvrages de prose publiés de son vivant sont « Páginas libres » (1894) et « Horas de Jucha » (1908). Après sa mort, plus d’une demi-douzaine de volumes en prose parurent. Ses collec- tions les plus célèbres de poésie sont « Minúsculas « (1901), « Presbiterianas » (1909), et « Exóticos » (1916). D’autres ouvrages importants de sa poésie sont « Trozos de vida » (1933), « Libertarios » (1938), et « Peruanas Baladas » (1939). AFRIC’ART 28 29 AFRIC’ART
  • 16. Triolet De la vida Triolet Triolet Los bienes y las glories de la vida Am-am yeek ndami adduna The property and the glories of life Les biens et gloires de la vie O nunca vienen o nos llegan tarde Dunu àgsi ba mukk mbaa muy lu Or never come or come to us later N’arrivent jamais ou très tard, Lucen de cerca, pasan de corrida yéex Look closely, go to run, Brillent de près, en courant, passent Los bienes y las glorias de la vida Danuy nes-nesi jege romb ne mes Goods and glories of life Les biens et gloire de la vie Am-am yeek ndami adduna Sad the old man in florida Triste qui, à la fleur de l’âge, Triste del hombre que en la edad florida Tiis la ci gone gu ci manula am Get live flowers wait ! Tarde à cueillir les fruits de la vie Coger las flores del vivir aguarde ! Ba man cee taataan dund The property and the glories of life Les biens et gloires de la vie Los bienes y las glorias de la vida Or never come or come to us later N’arrivent jamais ou très tard O nunca vienen o nos llegan tarde Am-am yeek ndami adduna Para verme con los muertos Dunu àgsi ba mukk mbaa muy lu For me with the dead Pour me voir au milieu des morts Ya no voy al campo santo, yéex I do not go to the cemetery Je ne vais plus au cimetière Busco plazas, no desiertos, Bu ma bëggee gis sama bop ciy Seeking seats, no deserts Places je cherche et non déserts Para verme con los muertos néew To see with the dead Pour me voir avec les morts Corazones hay tan yertos ! Dootuma dem almeer ya Hearts are so stiff Almas que hieden tanto ! Duy mandiŋ ay barb laay wër They are souls that stinks as ! Il y a des cœurs si glacés ! Para verme con los muertos Ngir nekk ci biiri néew For me with the dead Des âmes qui sentent si forts ! Ya no voy al campo santo Ndaw xol yu ëmb tiis I do not go to the cemetry Pour me voir au milieu des morts Ruu yuy xeeñ lool Je ne vais plus au cimetière Su ma bëgge gis sama bopp ciy néew Dootuma dem almeer ya T RIOL ET AFRIC’ART 30 31 AFRIC’ART
  • 17. Claude McKay (15 septembre 1889 - 22 mai 1948) est un romancier et poète né à la Jamaïque, puis naturalisé américain. Il a fait partie du mouvement littéraire de la Harlem Renaissance ou Renais- sance de Harlem. Il est l’auteur de trois romans : « Home to Harlem » en 1928 (« Ghetto noir »), un best-seller qui lui valut le Harmon Gold Award for Literature, « Banjo » en 1929, et « Banana Bottom » en 1933, un recueil de nouvelles : « Gingertown », en 1932, et deux autobiographies : « A Long Way from Home » en 1937 et « Harlem : Negro Polis » en 1940. Sa poésie, lyrique, nostalgique, et sociale, en fait un auteur majeur de la littérature afro-américaine de la première moitié du vingtième siècle. Il fut un grand voyageur, passant la majeure partie de sa vie entre les États-Unis, l’Europe et le Maroc. Il visita longuement la Russie après la Révolution bolchévique. Marqué par le racisme et la ségrégation, il fut un auteur engagé dans les milieux révolutionnaires, mais il resta toujours critique des appareils politiques. Malade et sans illusion, il se convertit au catholicisme à la fin de sa vie. AFRIC’ART 32 33 AFRIC’ART
  • 18. If we must die Bu ñu naree dee Si nous devons mourir If we must die, let it not be like hogs Bu ñu naree dee, bu ñu mel ni Si nous devons mourir, que ce ne Hunted and penned in an inglorious spot mbaam-xuux soit pas comme des porcs While round us bark the mad and hungry Yi ñu kar jóor leen ci barab bu suufe Traqués et parqués en un lieu sans dogs bii gloire Making their mock at our accursed lot. Te xaj yi xoñoñ ba dof wër ko Entourés de chiens fous et enragés If we must die, oh, let us nobly die, Di bow aka kókëli sunu muj gu bon Aboyant et raillant notre sort maudit So that our precious blood may not shed Bu ñu naree dee, éy ! nañu dee cig Si nous devons mourir, ah ! mourons In vain ; the even the monsters we defy ngor noblement Shall be constrained to honour us though Na sunu dereer ju sell ji baña tuuru Que notre sang précieux ne soit dead ! ci neen versé en vain Oh, Kinsmen ! we must meet the common Te njuuma yi nuy tëkku faf di nu Que les monstres que nous défions foe ; sargal bu ñu dee ! soient contraints de nous honorer Through far outnumbered, let show us Ëy sama mbokk yi ! war nanoo song morts ! brave, noon bi nu mbokk Oh mes chers frères ! Nous devons And for their thousand blows deal one Donte ñoo néewle ciy nit, nanu wone affronter l’ennemi commun deathblow ! sunug njambaar Bien que nous soyons moins What though before us lies the open grave Buñ nu dóoree junni yoon nañ leen nombreux, montrons notre bravoure ? door benn bu leen faat Pour leurs mille coups reçus nous Like men we’ll face the murderous, Bu yabboo ëllëg ñu gasal nu leur rendrons un coup mortel cowardly pack, bàmmeel Qu’importe demain s’ils nous Pressed to the wall, dying, but fighting Dooni góor, jàkkaarlook gàddu creusent une fosse commune back ! bóomkat yu baqar yi En hommes, nous ferons face à ces Wéeru ci taax mi, noyyi, waaye ku nu lâches assassins, door nu feyyu Le dos au mur, expirant, mais nous rendrons coup pour coup IF WE MUST DIE AFRIC’ART 34 35 AFRIC’ART
  • 19. Nicolás Guillén (1904-1989) est le grand nom de la poésie cubaine au vingtième siècle. Issu d’un milieu ouvrier, il fit des études de droit et devint avocat avant de se tourner vers le journalisme. Les traductions de ses oeuvres ont permis à un vaste public de s’initier à la culture afro-cubaine. C’est en 1930 que Guillén publia ses premiers poèmes, « Motivos de son », dans une revue de La Havane. Inspirés de la tradition musicale populaire afro-cubaine, ses textes empruntent leur thème à la vie et au langage des Noirs et des mulâtres de La Havane. Guillén inaugura ainsi ce qui devait fonder l’essentiel de sa poétique, l’appel au respect de la personne humaine et l’éloge du métissage entre les cultures noires et européennes. Il développa ces thèmes dans ses recueils « Sóngoro Cosongo » (1931), « West Indies Limited » (1934), « Elegías » (1948-1958), « La Paloma de vuelo popular » (1958), « Tengo » (1964), où s’affir- mait son refus de l’injustice, de la colonisation et de l’impérialisme. Il lutta en faveur des pauvres et des opprimés. En 1937, il quitta Cuba pour voyager au Mexique, en Amérique du Sud et en Espagne, où il prit part à la guerre civile aux côtés des Républicains. S’étant exilé à Paris après le coup d’état de Batista en 1952, il y revint en 1959, après la révolu- tion castriste. Il fut élu président de l’Union des écrivains et artistes de Cuba en 1961 et proclamé « poète national ». AFRIC’ART 36 37 AFRIC’ART
  • 20. Me matan Mematan They kill me On me tue Me matan, si no trabajo Su ma liggéeyee nu rey ma They kill me if I am not working On me tue si je ne travaille Y si no trabajo, me matan ; Su ma liggéeyul nu rey ma And if I work they kill ; Et si je travaille on me tue ; Siempre me matan, me matan Rey ma la nu dëkke They kill me always, they kill me Toujours on me tue Siempre me matan Dañ ma rey dañ ma rey They kill me always Toujours on me tue Ayer via un hombre mirando, Démb gis naas waay Yesterday I saw a man looking, Hier j’ai vu un homme : il regardait Mirando el sol que salía Mu doon xool Watching the sun rising Il regardait le soleil qui naissait ; El hombre estaba muy serio, Mu doon xool jant bi fenk Yesterday I saw a man watching, Hier j’ai vu un homme : il regardait, Porque el hombre no veía. Waay si dafa ne woon yàcc Watching the sun rising, Il regardait le soleil qui naissait ; Ay ! Ndaxte du woon gis The man was very serious Mais l’homme restait impassible, Los ciegos viven sin ver Ax ! Because he couldn’t see L’homme, car il ne voyait pas. Cuando sale el sol, Gumba yi dunu gis Ay ! Aïe, Cuando sale el sol, Jant biy fenk Live without seeing the blind Les aveugles vivent sans voir Cuando sale el sol Jant biy fenk When the sun rises Le soleil lorsqu’il naît Jant biy fenk When the sun rises Le soleil lorsqu’il naît, Ayer vi a un niño jugando When the sun rises Le soleil lorsqu’il naît ! A que mataba a otro niño : Démb gis naag gone Hier, j’ai vu un enfant : il jouait Hay niños que se parecen Gu doon fo A qui tuait un autre enfant ; A los hombres trabajando Di rey beneen moroomam Yesterday I saw a child playing Hier j’ai vu un enfant : il jouait Quién les dira cuando crezcan Démb gis nab gone To kill another child : A qui tuait un autre enfant ; Que los hombres son niños Gu doon fo They are children who seem Il est des enfants qui ressemblent Que no lo son Di rey beneen moroomam Men working A leurs aînés lorsqu’ils travaillent. Que no lo son Am nay gone yu nurook Who will tell them when they grow up Qui leur dira une fois grands Que no lo son ! Seeni mag bu nuy liggéey Those men are not children, Que les hommes ne sont pas des Ku leen ne bun u jëmee mag They are not, enfants, Me matan, si no trabajo, Mag ñooñu dunuy gone They are not Pas des enfants Y si trabajo, me matan : Dunuy gone They are not ! Pas des enfants Siempre me matan, me matan, Dunuy gone AN Pas des enfants ! Siempre me matan ! Dunuy gone T They kill me if I am not working MA On me tue si je travaille M Su ma liggéeye nu rey ma And if I work they kill me : Et si je ne travaille on me tue : E Su ma liggéeyul nu rey ma They kill me always, they kill me Toujours on me tue, on me tue, Rey ma la nu dëkke They kill me always ! Toujours on me tue ! Dañma rey dañ ma rey AFRIC’ART 38 39 AFRIC’ART
  • 21. Jacques Roumain (4 juin 1907 - 18 août 1944, Port-au-Prince), fut l’un des écrivains les plus respectés d’Haïti. Petit-fils du président Tancrède Auguste, il fréquenta des écoles catholiques à Port-au-Prince, puis étudia en Belgique, en Suisse, en France et en Allemagne. À vingt ans, il revint en Haïti et fut co-créateur de La Revue Indigène. Il y publia « La proie et l’ombre », « La montagne ensorcelée » et « Les fantômes ». Très actif dans la lutte contre l’occupation américaine d’Haïti (1915-1934), il fut emprisonné en 1933 et en 1934 alors qu’il venait de fonder le Parti Communiste Haïtien. De retour d’Europe, il gagna les États-Unis en 1939. Pendant cet exil, il travailla et se lia d’amitié avec de nombreux écrivains et poètes, comme Langston Hughes. Il voyagea beaucoup et séjourna presque un an aux côtés du poète Nicolás Guillén à La Havane. En 1941 il rentra en Haïti et fut in- vesti en 1942 d’une charge de diplomate à Mexico. Il compléta à la même époque deux de ses livres les plus influents : le recueil de poésie « Bois d’Ebène » et le roman « Gouverneurs de la Rosée ». La majorité du travail de Roumain exprime la frustration et la rage d’un peuple qui a été piétiné durant des siècles. Il incluait tous les Haïtiens dans ses écrits, et appelait les pauvres à s’unir contre la misère. Son œuvre continue d’influencer la culture haïtienne et panafricaine en général. AFRIC’ART 40 41 AFRIC’ART
  • 22. Guinée Gine Guinea C’est le lent chemin de Guinée Yoon wu yéex a ngi jëm Gine It’s the long road to Guinea La mort t’y conduira Dee la fay jëme Death takes you down Voici les branches, les arbres, la forêt Bànqaas yaa ngi nii, garab yi, àll bi Here are the boughs, the trees, the Ecoute le bruit du vent dans les longs Déglul riiru ngelaw li forest cheveux d’éternelle nuit Ci biir karaw yu gudd yi Listen to the sound of the wind in its C’est le lent chemin de Guinée Ci gudd gu dul dakk long hair of eternal night Tes pères t’attendent sans impatience Yoon wu yéex wi jëm Gine It’s the long road to Guinea Sur la route ils palabrent Dee la fay jëme Where your fathers await you without Ils t’attendent Say bay a ngi xaar impatience Voici où les ruisseaux grelottent Ànd ak teey ci tali bi Along the way – They talk Comme des chapelets d’os Ñu ngay waxtaan They wait C’est le lent chemin de Guinée Ñung lay xaar This is the hour when the streams Il ne te sera pas fait de lumineux accueil Fii nag la dex yu ndaw yiy pët-pëtee rattle Au pays des hommes noirs Mel ni kurusi yax Like beads of bone Sous un ciel fumeux, percé de cris Yoon wu yéex wi jëm Ginee d’oiseaux Dee la fay jëmee It’s the long road to Guinea Autour de l’œil du marigot Dun la fa tertu tertu bu neex No bright welcome will be made for Les cils des arbres s’écartent sur la clarté Ca réew mu ñuul ma you pourrissante Nit ñuul ña dëkkee In the dark land of dark men Là t’attend au bord de l’eau un paisible Te suufas asamaan say saxaar Under a smoky sky, pierced by the village et Booleek picc yay sab cry of birds La case de tes pères et la dure pierre Li wër bëtu mango gi Around the eye of the river familiale Yéeni garab yaa nga fireeku There, there awaits you beside the Où reposer ton front Ci leer giy gilli water a quiet village Foo fu ci wetu ndox mi And the hut of your fathers, and the G UINÉE Am na fa dëkkub jàmm hard ancestral stone Sa néegu baay yaa ngi lay xaar When your head will rest at least Ak xeer wu dëggër Wi nga wara teg sa jë Yoon wu yéex a ngii jëm Gine Dee la fay jëmee AFRIC’ART 42 43 AFRIC’ART
  • 23. Paul Laurence Dunbar (1872 - 1906, Dayton, Ohio) fut le premier poète Afro-Américain à recevoir des critiques élogieuses. Il était le seul Afro-Américain de sa classe au lycée de Dayton et, alors qu’il eut souvent du mal à trouver un emploi en raison de sa race, il fut un des meilleurs à l’école. Il écrivit un grand nombre de poèmes en dialecte, de poèmes anglais classiques, d’essais, de romans et de nouvelles. Sa première collection, « Oak and Ivy », fut publiée en 1892. Son deuxième livre, « Majors and Minors », publié en 1895, le propulsa vers la gloire nationale. Après 1902 et jusqu’à sa mort, il produisit douze livres de poésie, quatre livres de nouvelles, une pièce de théâtre et cinq romans. Son travail a souvent abordé les difficultés rencontrées par les membres de sa race et les efforts des Afro-Américains pour réaliser l’égalité en Amérique. Il fut salué tant par les meilleurs critiques littéraires de son temps que par ses contemporains littéraires. AFRIC’ART 44 45 AFRIC’ART
  • 24. We wear the mask Nu ngiy wéeye sutura Nous portons le masque We wear the mask that grins and lies Nu ngiy wéeye sutura Nous portons le masque qui ment It hides our cheeks and shades our eyes Sutura siy nëbb li nuy dundee et grimace This debt we pay to human guile Dox sunu digganteek yeen bun u Il dérobe aux regards notre visage et With torn and bleeding hearts we smile gañaxu nos yeux And mouth with myriad subtleties Sutura siy nëbb sunu kanam ak C’est là le tribut de la perfidie humaine Why should the world be overwise sunuy bët Le cœur saignant et déchiré, nous In counting all our tears and sighs ? Loolooy peyooru mbonug doom sourions Nay, let them only see us, while aadama Et faisons des grimaces avec mille We wear the mask Xol bu dog di nàcc nuy muñ subtilités We smile, but, O great Christ, our cries Tey gañaxu ci sutura A quoi nous servirait d’en dire trop To thee from tortured souls arise Na fekk buñ nuy xool au monde We sing, but oh, the clay is vile Nu nekk ci géeju sutura De lui faire dénombrer nos soupirs et Beneath our feet, and long the smile Nu ngi muñ fu nu tollu nos larmes ? But let the world dream otherwise Céy Isaa mu màgg mi Mieux vaut seulement qu’on nous We wear the mask Sunuy yuuq yaa ngi jolli jëm ci yow voie seulement pendant que Jóge sunu ruu yii nu faagaagal Nous portons le masque Nu ngi woy fu nu tollu, waaye, Ax ! Nous sourions, mais ô Grand Christ, Suuf seeka yées sunu suufi tànk nos cris WE WEAR T Bu nuy dox, ndaw yoon wu gudd ! Montent vers toi de notre âme Waaye bàyyileen addinaaki naxem torturée HE M Te dés di wéeye sutura Nous chantons, mais ah ! que la terre est ignoble ASK Sous nos pieds, et long le chemin ! Mais laissez le monde à ses illusions Nous portons le masque. Traduction de François Dodat AFRIC’ART 46 47 AFRIC’ART
  • 25. Marcus Mosiah Garvey (1887, Jamaïque - 1940, Londres) est un leader noir du XXe siècle, consi- déré comme un prophète par les adeptes du mouvement rastafari. Il est né un an après l’abolition de l’esclavage à Cuba, où la ségrégation raciale et le travail asservi règnent toujours. L’Afrique est en proie à la colonisation européenne à cette époque, mais certains Afro-Caribéens parviennent à y partir. Il devient vite un orateur de premier plan, journaliste, et activiste politique. Précurseur du pana- fricanisme, il se fait le chantre de l’union des Noirs du monde entier à travers son journal The Negro World et le promoteur obstiné du retour des descendants des esclaves noirs vers l’Afrique (ce qu’on appelle le «Back to Africa»). Arrivé aux États-Unis en 1916 où il rencontre tous les mouvements visant à émanciper les Afro-Amé- ricains, il y fonde en 1917 l’Association Universelle pour l’Amélioration de la Condition Noire (United Negro Improvement Association, UNIA, toujours en activité). La devise de cette association était One God! One aim! One destiny! (Un Dieu ! Un But ! Une Destinée!). Il devient un des premiers meneurs importants de la cause noire. Installé à Harlem de 1918 à 1922, Marcus Garvey est mondialement connu. Ne croyant pas que les Afro-Américains pourraient vivre libres et respectés hors d’Afrique, il crée en 1919 la Black Starline, compagnie maritime censée servir son projet de rapatriement, et ses bateaux se préparent à emmener Antillais et Afro-Américains en Afrique. En 1922, après la banque- route de la Black Starline, Garvey est poursuivi par les tribunaux. Emprisonné à Atlanta, il est exilé en 1927 en Jamaïque où il devient le grand héros national. Les Jamaïcains écoutent avec beaucoup d’enthousiasme ses meetings et la vie politique de l’île s’en trouve bouleversée. Mais il meurt à Londres sans jamais atteindre l’Afrique. AFRIC’ART 48 49 AFRIC’ART
  • 26. Oneness interests Bokk njariñ Afrique (Extrait d’un discours de 1923) Ku ne xam na ne amul xàjjeek Chacun sait qu’il n’y a aucune Everybody knows that there is absolutely seen diggante doomi Afrig, juddu différence entre les Africains no difference between the native African jéeri beek Amerikee bi ak Cembe natifs d’Afrique, ceux d’Amérique and the American and the West Indian bu ñuul bi bawoo Sowu, bu loolu et les Nègres Antillais, car nous Negroes, in that we are descendants wéeye nun ñépp bokk Maam mu nu descendons de la même souche from one common family stock. It is only jógee, ndogal rekk a tax nu réeroo familiale. C’est seulement par a matter of accident that we have been ku ne wéy saw yoon ci lu ëpp ñetti accident que nous avons été divisés divided and kept apart for over three xarnu, waaye jamonoy dellu Afrig et séparés plus de trois siècles hundred years, but it is felt that when the ñëw na, ñu wara ñibbi ci cofeelu nit durant, mais est venu le moment time has come for us to get back together, ak mbokkam, te Nit ku Ñuul ku doon pour que nous nous retrouvions we shall do so in the spirit of brotherly love, xaar jamono jii war nan laa dimmëli ensemble, nous devons le faire and any Negro who expects that he will be nga àggali sa yéene fii ak foo mana dans l’esprit de l’amour fraternel, et assisted here, there and anywhere by the ne Mbootaayu dunya Gi Taaxaw Ngir chaque Nègre qui le souhaite devra Universal Negro Improvement Association Yokkute Ñit ku Ñuul dina la taxawu être soutenu ici, là-bas ou n’importe to exercise a haughty superiority over the ngir nga fonk sa askan te weg lépp où par l’Association Universelle pour fellows of his own race, and makes a lu tukke saw xeet, Nit ku Ñuul ku l’Amélioration de la Condition Noire, tremendous mistake. Such men had better yaakaar ne yaa gën sa moroom yaa tout nègre mu par le sentiment remain where they are and not attempt to ngi ci njuumte gu réy te sula yaboo d’une supériorité hautaine envers become in any way interested in the higher toog fa nga ne te xam ne bokkoo ci ses compagnons de même race development of Africa. ñiy jëmale Afrig kanam. commet une erreur monumentale. De telles personnes feraient mieux de rester là où elles sont et ne devraient aucunement s’intéresser au développement de l’Afrique. ER ESTS INT EN ESS N AFRIC’ART 50 51 AFRIC’ART