1. Cucugnan, dans l’Aude demeure le village du légendaire « Curé
de Cucugnan » d'Alphonse Daudet. Au détour d’un virage, il offre
une vue inattendue dans le paysage sauvage des Corbières.
Le village avec ses anciennes fortifications, l’originalité de
l’église, et le moulin d’Omer réhabilité, invite le visiteur à une
flânerie autour de l’histoire, au gré des ruelles de ce pittoresque
village. (L’histoire du curé de Cucugnan en fin de diaporama).
GPS : 42.850967, 2.600379
2. Blotti aux pieds de Quéribus, le village de Cucugnan (Cucuniano), est mentionné pour la première fois en 951. A la fin du Xe siècle, l'émiettement du
pourvoir carolingien entraîne la multiplication des forteresses sur les hauteurs (Quéribus, Peyrepertuse). En 1111, Peyrepertuse et tout le territoire qui lui
appartient entrent dans le domaine du comte de Barcelone. En 1258, le traité de Corbeil fixe la frontière entre la France et le royaume d' Aragon, dans le
Fenouillèdes. Cucugnan vit désormais dans une zone peu sûre. Le village serait détruit à la fin du XVe siècle. Au XVIe siècle, le nouveau village s'organise au
dessous du village médiéval ruiné. Une porte fortifiée en plein cintre semble attester d'une enceinte villageoise. Une maison "du seigneur" st mentionnée
en 1692 sur les documents d'archives. De nos jours, le pittoresque village de Cucugnan, vit essentiellement de la viticulture et du tourisme. Construit en
amphithéâtre, parcouru de venelles, de rues escarpées, il est dominé par un moulin à vent dit "le moulin d'Omer".
3. Une porte fortifiée en plein cintre confirme l’existence d'une enceinte villageoise.
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9. Le Moulin d'Omer.
Tout en haut du village, le moulin est bâti à même le rocher en pente, au-dessus de trois anciennes aires de battage. Il témoigne d'une polyculture où le blé
tenait une place prépondérante, pour ce village aujourd'hui cerné par les vignes. L'économie locale reposait sur les céréales et l'élevage de chèvres et de
moutons. Le moulin est mentionné pour la première fois sur les documents d'archive en 1692. Il appartient au seigneur de Cucugnan jusqu'à la révolution.
Il est considéré en ruines en 1838.
10. La poutre maîtresse est faite dans un chêne bicentenaire et les multiples parties de sa mécanique sont dans différentes essences; buis, chêne, peuplier, etc.
Les meules horizontales sont en granit. Ses ailes de frêne sont orientées face au vent grâce à un toit pivotant. Elles sont habillées de toile que le meunier
déplie en fonction de la force du vent.
11. Le bâtiment ainsi que le mécanisme ont été réhabilités en 2003. Remis en exploitation en 2006, il reprend vie et moud à nouveau du grain.
12. Au pied du Moulin de Cucugnan remis en service au printemps 2006, Les Maîtres de mon Moulin accueillent les clients dans leur nouveau fournil où pains,
brioches, biscuits et gâteaux en tous genres font retrouver le goût des bonnes choses.
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15. Roland Feuillas, à la fois paysan, meunier et boulanger a remis en fonction l’ancien moulin au sommet du village maîtrise ainsi l’intégralité de la chaîne de
fabrication de son pain. Avec la collaboration de paysans locaux, il a remis en culture d’anciennes variétés de blés abandonnées comme le barbu du
Roussillon.
16. Façonnés entièrement à la main, les produits confectionnés avec les farines du Moulin sont cuits dans un four à bois traditionnel de plus de 30 tonnes et
construit en terre cuite (argile).
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18. Eglise saint Julien et sainte Basilisse.
Avec son original clocher à campanile l'église de Cucugnan se détache dans le ciel. Elle est mentionnée pour la première fois en 136O et est dédiée à Saint
Julien et Sainte Basilisse, deux martyrs orientaux.
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22. A l'intérieur de l'église, la simplicité et la variété du décor enrichissent la sobriété du lieu. De style néo-gothique, le chœur et les chapelles de l'église
accueillent un ensemble de statues en bois du XVIIe dont celle de Sainte Agathe, la patronne du village.
23. La chapelle sud, à droite de l'autel, abrite une statue de la Vierge qui a la particularité d'être représentée enceinte. Elle est en bois polychrome doré et date
du XVIIe siècle. L'originalité de cette représentation a éveillé la curiosité des visiteurs. Aujourd'hui, une exposition sur "Les Vierges en France" est libre et
ouverte à tous à l'intérieur de l'église.
24. La statuette de la Vierge enceinte de Cucugnan est en bois polychrome de la fin du 17ème, d’environ 50 cm de hauteur. Elle est finement sculptée et drapée
d’un manteau aux fins plis retombants. La Vierge tient les mains jointes et appuie ses avant bras sur son ventre rond. Son pied gauche est posé sur la tête
d’un ange qui repose sur un segment de Lune. Un serpent rampe à ses pieds.
25. De son origine, on ne sait pas grand-chose. Mais comme beaucoup de ses pareilles, la représentation rare de ce moment de la féminité lui valut de vivre de
nombreuses tribulations. En 1930, le curé de la paroisse de Cucugnan confie la statue à la Conservation départementale des Antiquités et Objets d’art de
Carcassonne « à cause de son attitude spéciale, en considération de laquelle il ne pouvait en faire étalage à ses paroissiens. » . Quelques années plus tard, il
grêle si fort sur le village que les paroissiens se prirent à la regretter et demandèrent son retour. Sur décision du Conseil Municipal, le Conservateur de
Carcassonne remet la statue à une jeune mariée du village, fille du maire. Par ses soins, le 14 décembre 1945, La Vierge est ramenée au village. Ce retour est
provisoire. En février 1958, la statue part au Château de Lourdes pour prendre place dans une exposition sur les Vierges Pyrénéennes à l’occasion du
centenaire des apparitions de Lourdes. Revenue en l’église de Cucugnan, elle est victime d’un vol en 1981. Elle est récupérée par hasard et par chance, dans
une consigne de la gare de Lille. Depuis, la Vierge enceinte de Cucugnan veille sur son village, dans l’église Saint-Julien-Sainte-Basilisse, couple modèle pour
l’Eglise catholique. Elle est classée Monument Historique depuis le 25 février 1959.
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38. Les vestiges d'un castrum sont encore visibles au-dessus du Moulin d'Omer.
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44. « Et je cheminai… je cheminai ! Quelle battue ! j’ai la chair de poule, rien que d’y songer. Un petit sentier, plein de ronces, d’escarboucles qui luisaient
et de serpents qui sifflaient, m’amena jusqu’à la porte d’argent.
« — Pan ! pan !
« — Qui frappe ! me fait une voix rauque et dolente.
« — Le curé de Cucugnan.
« — De…?
« — De Cucugnan.
« — Ah !… Entrez.
« J’entrai. Un grand bel ange, avec des ailes sombres comme la nuit, avec une robe resplendissante comme le jour, avec une clef de diamant pendue à
sa ceinture, écrivait, cra-cra, dans un grand livre plus gros que celui de saint Pierre…
« — Finalement, que voulez-vous et que demandez-vous ? dit l’ange.
« — Bel ange de Dieu, je veux savoir, — je suis bien curieux peut-être, — si vous avez ici les Cucugnanais.
« — Les ?…
« — Les Cucugnanais, les gens de Cucugnan… que c’est moi qui suis leur prieur.
« — Ah ! l’abbé Martin, n’est-ce pas ?
« — Pour vous servir, monsieur l’ange.
« — Vous dites donc Cucugnan…
« Et l’ange ouvre et feuillette son grand livre, mouillant son doigt de salive pour que le feuillet glisse mieux…
« — Cucugnan, dit-il en poussant un long soupir… Monsieur Martin, nous n’avons en purgatoire personne de Cucugnan.
« — Jésus ! Marie ! Joseph ! personne de Cucugnan en purgatoire ! Ô grand Dieu ! où sont-ils donc ?
« — Eh ! saint homme, ils sont en paradis. Où diantre voulez-vous qu’ils soient ?
« — Mais j’en viens, du paradis…
« — Vous en venez !
!… Eh bien ?
« — Eh bien ! ils n’y sont pas !…… Ah ! bonne mère des anges !…
« — Que voulez-vous, monsieur le curé ? s’ils ne sont ni en paradis ni en purgatoire, il n’y a pas de milieu, ils sont…
« — Sainte croix ! Jésus, fils de David ! Aï ! aï ! aï ! est-il possible ?… Serait-ce un mensonge du grand saint Pierre ?… Pourtant je n’ai pas entendu
chanter le coq !… Aï ! pauvres nous ! comment irai-je en paradis si mes Cucugnanais n’y sont pas ?
« — Écoutez, mon pauvre monsieur Martin, puisque vous voulez, coûte que coûte, être sûr de tout ceci, et voir de vos yeux de quoi il retourne, prenez
ce sentier, filez en courant, si vous savez courir… Vous trouverez, à gauche, un grand portail. Là, vous vous renseignerez sur tout. Dieu vous le donne !
« Et l’ange ferma la porte.
45. « C’était un long sentier tout pavé de braise rouge. Je chancelais comme si j’avais bu ; à chaque pas, je trébuchais ; j’étais tout en eau, chaque poil de
mon corps avait sa goutte de sueur, et je haletais de soif… Mais, ma foi, grâce aux sandales que le bon saint Pierre m’avait prêtées, je ne me brûlai pas
les pieds.
« Quand j’eus fait assez de faux pas clopin-clopant, je vis à ma main gauche une porte… non, un portail, un énorme portail, tout bâillant, comme la
porte d’un grand four. Oh ! mes enfants, quel spectacle ! Là on ne demande pas mon nom ; là, point de registre. Par fournées et à pleine porte, on
entre là, mes frères, comme le dimanche vous entrez au cabaret.
« Je suais à grosses gouttes, et pourtant j’étais transi, j’avais le frisson. Mes cheveux se dressaient. Je sentais le brûlé, la chair rôtie, quelque chose
comme l’odeur qui se répand dans notre Cucugnan quand Éloy, le maréchal, brûle pour la ferrer la botte d’un vieil âne. Je perdais haleine dans cet air
puant et embrasé ; j’entendais une clameur horrible, des gémissements, des hurlements et des jurements.
« — Eh bien ! entres-tu ou n’entres-tu pas, toi ? — me fait, en me piquant de sa fourche, un démon cornu.
« — Moi ? Je n’entre pas. Je suis un ami de Dieu.
« — Tu es un ami de Dieu… Eh ! b… de teigneux ! que viens-tu faire ici ?…
« — Je viens… Ah ! ne m’en parlez pas, que je ne puis plus me tenir sur mes jambes… Je viens… je viens de loin… humblement vous demander… si…
si, par coup de hasard… vous n’auriez pas ici… quelqu’un… quelqu’un de Cucugnan…
« — Ah ! feu de Dieu ! tu fais la bête, toi, comme si tu ne savais pas que tout Cucugnan est ici. Tiens, laid corbeau, regarde, et tu verras comme nous les
arrangeons ici, tes fameux Cucugnanais…
« Et je vis, au milieu d’un épouvantable tourbillon de flamme :
« Le long Coq-Galine, — vous l’avez tous connu, mes frères, — Coq-Galine, qui se grisait si souvent, et si souvent secouait les puces à sa pauvre
Clairon.
« Je vis Catarinet… cette petite gueuse… avec son nez en l’air… qui couchait toute seule à la grange… Il vous en souvient, mes drôles !… Mais
passons, j’en ai trop dit.
« Je vis Pascal Doigt-de-Poix, qui faisait son huile avec les olives de M. Julien.
« Je vis Babet la glaneuse, qui, en glanant, pour avoir plus vite noué sa gerbe, puisait à poignées aux gerbiers.
« Je vis maître Grapasi, qui huilait si bien la roue de sa brouette.
« Et Dauphine, qui vendait si cher l’eau de son puits.
« Et le Tortillard, qui, lorsqu’il me rencontrait portant le bon Dieu, filait son chemin, la barrette sur la tête et la pipe au bec… et fier comme Artaban…
comme s’il avait rencontré un chien.
« Et Coulau avec sa Zette, et Jacques, et Pierre, et Toni…