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Thèse professionnelle – Sylvaine Carrau – ESCP Europe – Nov 2013
« De la baisse de confiance des consommateurs vers un marketing responsable »
COMPTE-RENDU ENTRETIEN DU 11/10/2012 (1H15)
CHU Rennes - Service d’endocrinologie, diabétologie et nutrition
Professeur Fabrice Bonnet
Expertise en : néphropathie diabétique, dyslipidémies, nutrition, endocrinologie, diabétologie
– Recherche en : complications du diabète, épidémiologie, prévention du diabète de type 2,
nouveaux traitements du diabète
Question : J'aurais aimé parler avec vous de l'aspartame, auriez-vous un peu de temps à me
consacrer ?
J’ai un avis sur la question. C’est un sujet passionné. Je donne des cours en nutrition où j’aborde le
sujet. Mais qu’allez-vous en faire parce que vous allez parler à des interlocuteurs qui auront des avis
bien tranchés sur le sujet. Attention à bien garder votre cap !
L’édulcorant est une aide dans une pathologie comme le diabète car il n’y a pas d’élévation de la
glycémie et on garde le goût sucré. C’est important. Manger sucrer fait partie de notre culture.
Pour la population générale, l’intérêt des édulcorants n’est pas évident en termes de santé publique. Il
est assez controversé.
Cela rend service dans les sodas. Le diabétique peut grossir donc c’est un confort dans sa vie
quotidienne.
Je n’ai pas de raison scientifique pour émettre une réserve, une contre-indication pour les diabétiques
ou les femmes enceintes, malgré des études d’Italie qui viennent d’une association qui recherche les
causes du cancer et qui est contre l’aspartame.
Il y a des questions non résolues.
Pour l’étude faite en Suède sur le risque d’accouchement prématuré, il n’y a pas de raison rationnelle
que ce soit uniquement dû aux sodas light.
Ensuite, pour ce qui est de l’obésité, un patient qui consomme beaucoup de boissons sucrées, on va
l’orienter vers les boissons avec des édulcorants.
Les maladies psychologiques, les patients sont souvent très addicts des boissons sucrées donc c’est
intéressant de pouvoir prendre des sodas aux édulcorants.
Dans les aliments ça a moins d’intérêt mais les malades ne peuvent s’en passer.
C’est donc bien une aide pour certains patients.
J’ai lu un article très intéressant sur l’enfant: prise de poids moindre mais effet à court terme. A moyen
terme, le poids remontera quand même mais c’est la difficulté de tous les régimes.
Je parle pour ma communauté, on ne peut pas dire que les édulcorants sont à bannir. Ce n’est pas une
drogue. Attention aux messages des militants.
Il n’y a pas de syndrome de sevrage donc ce n’est pas addictif.
Attention aux scandales ou pseudo scandales dans les reportages où tout est à charge. L’étude avec test
sur les souris où il comparait le sucre et la cocaïne. Attention à la manipulation de l’opinion publique !
C’est la même chose pour les tumeurs et les OGM. Qu’est ce que c’est dangereux !
La souche de souris utilisée pour les tests est une souche qui fait beaucoup de tumeurs. Il aurait même
été éthique d’euthanasier les souris avant la fin de l’étude. Attention aux images chocs !
Thèse professionnelle – Sylvaine Carrau – ESCP Europe – Nov 2013
« De la baisse de confiance des consommateurs vers un marketing responsable »
Les profils psycho sont plus vulnérables. Ils ont besoin de compensation qu’il trouve dans la nourriture
qui leur apporte une certaine stimulation à la dopamine. C’est la même chose pour l’alcool et la
caféine.
Les personnes qui ont des habitudes ne les changent pas facilement. Quelqu’un qui est plutôt « sucré »
gardera cette habitude alimentaire. C’est donc indémontrable de dire que le sucre appelle le sucre. Ce
n’est pas prouvé. On ne peut conclure à un phénomène d’addiction.
Quand on découvre un diabète, certains suppriment totalement le sucre mais c’est rare.
Le problème du light est que le patient peut se sentir déculpabilisé... ce n’est pas que négatif d’ailleurs.
Mais le bénéfice sur la balance est nul. Ce n’est donc que psycho-bénéfique.
Le light est avant tout un argument marketing.
Le consommateur a un sentiment de réassurance en consommant du light. Dans le chocolat light, il y a
moins de sucre mais plus de gras.
Il faut donc faire attention à ne pas égarer les consommateurs et certains profils sont trop
influençables.
L’édulcorant n’est pas un produit d’amaigrissement.
Question : Que pensent vos patients diabétiques des édulcorants?
Je ressens une augmentation de l’inquiétude chez les patients diabétiques. Je les rassure et leur donne
mon aval sur les édulcorants. Leur perception est plus négative et on ressent des réticences plus
qu’avant.
Le sucralose est un édulcorant qui permet une meilleure sécrétion d’insuline quand il est ingéré juste
avant le repas. Ses molécules sont différentes de celles de l’aspartame. Il a un haut pouvoir sucrant et
ses propriétés nutritionnelles sont bénéfiques.
La stévia n’est pas facile à transformer et le goût ne plaît pas à tout le monde. Dans le process de
fabrication, les industriels doivent ajouter du sucre pour palier à ce problème de goût (moitié sucre et
moitié stévia).
Mais les industriels s’orientent vers la stévia parce que leurs consommateurs ont des doutes sur
l’aspartame (sa consommation a d’ailleurs baissé) et c’est plus naturel puisque c’est issu d’une plante.
La stévia a longtemps été bloquée par le lobbying du sucre (sucre de canne et de betterave), le CEDUS,
qui est bien sûr contre les édulcorants.
Dès les années 70, la stévia a été commercialisée au Japon. Les études sont bonnes et on a du recul
maintenant. Cet édulcorant semble bon.
Il faut des études rigoureuses, sur de grandes populations. Il faut regarder le groupe contrôle et faire
attention aux facteurs confondants, avoir des groupes comparables morphologiquement... mais c’est
compliqué à faire.
Les effets secondaires sur les notices de médicaments existent bel et bien mais ne touchent que 2%
environ de la population. Il ne faut donc pas généraliser pour le reste de la population.
Les « anti » édulcorants disent : c’est la preuve que les édulcorants font grossir puisque ce sont les
individus qui consomment des édulcorants qui sont gros !
Quand les études sont passées à la moulinette par les agences sanitaires, on trouve souvent des biais.
Les études doivent être faites par des équipes neutres.
Regardez l’étude OGM qui vient de sortir, il y a un biais parce que le Professeur Séralini est contre les
OGM.
La position la plus sage à avoir est de dire « je ne sais pas ».
L’histoire du doute appartient à la rumeur. Ce n’est pas sain.
Thèse professionnelle – Sylvaine Carrau – ESCP Europe – Nov 2013
« De la baisse de confiance des consommateurs vers un marketing responsable »
Dans le médical, on n’est jamais sûr de rien. Mais il faut quand même prendre des décisions avec les
données que l’on a.
Les gens sont prêts à prendre des risques bien plus grands dans certains de leurs comportements
(comme conduire en état d’ivresse ou rouler trop vite).
C’est choquant d’un point de vue scientifique et l’argumentation n’est pas bonne. Ha mais il y a un
doute !
Si le politique ou l’agence n’interdit pas un produit, c’est qu’il n’y a pas de problème. Et ils doivent faire
leur travail sans pression publique. Aucune agence n’a émis de réserve donc je fais confiance surtout
quand l’agence est européenne parce que si elle nationale, on pourrait peut-être avoir un risque de
manque de déontologie.
Relance : On parle souvent de conflits d’intérêts au sein de l’efsa...
Les bons experts sont sollicités par les industriels mais c’est très regardé. La médiatisation des conflits
d’intérêts peut être positive pour aller vers plus de transparence.
Question : En tant qu’endocrinologue, pouvez m’expliquer le lien avec l’aspartame ? On parle
de l’aspartame comme perturbateur endocrinien.
Il y a une diabolisation de l’aspartame. Non l’aspartame n’est pas un perturbateur endocrinien.
Question : Vous avez participé à un colloque Nutrition en février 2011 (dans le 35). Votre
présentation s’intitulait « Les édulcorants : amis ou ennemis ? ». Alors amis ou ennemis ?
Non à la diabolisation de l’aspartame et non à l’excès de promotion de l’aspartame.
Il est « ami » pour certains patients.
Il faut faire confiance aux agences sanitaires même si on est en droit de s’interroger.
Question : Que pensez-vous du principe de précaution, comme mis en avant par Système U en
juin dernier ?
Le principe de précaution n’enlève pas le doute et on propage la peur.
Je le répète, les édulcorants sont utiles pour le diabète. En tant que clinicien, je me suis posé la
question et 30 cannettes par jour (ce qui correspond à la DJA de l’aspartame) n’est pas atteignable et ce
serait déséquilibré, disproportionné.
Faisons appel au bon sens !
Question : Nous savons aujourd’hui que l’amiante est nocif pour la santé soit après coup. Que
pensez-vous du principe de précaution dans ce contexte ?
Dès qu’il y a un doute suffisant, on retire le produit suspecté. Pour l’amiante, on a constaté une
augmentation des cancers très nette.
Il y a des lobbyings qui sont plus actifs que d’autres.
Le principe de précaution... il y a des risques partout. Ce n’est jamais tout blanc ou tout noir.
En médecine, on est habitué.
Question : Comment peut-on expliquer que des patients déclarent : « je n’ai plus mal aux
jambes depuis que j’ai arrêté l’aspartame » ?
D’un point de vue clinique, cela me semble improbable. C’est pour moi l’effet placebo. Si cela leur a fait
du bien, tant mieux mais scientifiquement ce n’est pas possible.
C’est comme de dire « supprimer tous les produits laitiers de votre alimentation ». Cela déséquilibrerait
Thèse professionnelle – Sylvaine Carrau – ESCP Europe – Nov 2013
« De la baisse de confiance des consommateurs vers un marketing responsable »
vos apports en calcium au risque de vous trouver en carence et de fragiliser vos os. Ne manger que des
légumes créerait des carences.
Question : Pourquoi, selon vous, y a-t-il plus de cancers aujourd’hui ?
On a besoin de coupables.
Notre société a changé. On fait moins d’exercices.
Il y a aussi une production qui utilise des produits chimiques. Les agriculteurs sont plus exposés à ces
produits.
Il y a beaucoup de facteurs à analyser. Beaucoup de recherches sont en cours sur l’analyse croisée de
tous ces facteurs.
Les particules dégagées par le diesel sont aujourd’hui reconnues comme nocives pour la santé
humaine. Il y a eu des études concordantes sur ces particules concernant l’augmentation du risque
d’infarctus. Il ya une incohérence au niveau politique qui a poussé le diesel alors qu’il y avait des études
sérieuses sur les risques liés aux particules.
Question : Que pourriez-vous en déduire sur la nature humaine, dans ce contexte ?
L’Homme a besoin de peurs, de croyances, de combats et il y aura toujours des combats à mener.
Revenons au bon sens. On manque de nuance.
Tous ces groupes de chercheurs pourraient mettre leur énergie en commun sur des sujets qui ont des
études sérieuses et préoccupantes pour la santé humaine, comme le phtalate et le bisphénol A.

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  • 1. Thèse professionnelle – Sylvaine Carrau – ESCP Europe – Nov 2013 « De la baisse de confiance des consommateurs vers un marketing responsable » COMPTE-RENDU ENTRETIEN DU 11/10/2012 (1H15) CHU Rennes - Service d’endocrinologie, diabétologie et nutrition Professeur Fabrice Bonnet Expertise en : néphropathie diabétique, dyslipidémies, nutrition, endocrinologie, diabétologie – Recherche en : complications du diabète, épidémiologie, prévention du diabète de type 2, nouveaux traitements du diabète Question : J'aurais aimé parler avec vous de l'aspartame, auriez-vous un peu de temps à me consacrer ? J’ai un avis sur la question. C’est un sujet passionné. Je donne des cours en nutrition où j’aborde le sujet. Mais qu’allez-vous en faire parce que vous allez parler à des interlocuteurs qui auront des avis bien tranchés sur le sujet. Attention à bien garder votre cap ! L’édulcorant est une aide dans une pathologie comme le diabète car il n’y a pas d’élévation de la glycémie et on garde le goût sucré. C’est important. Manger sucrer fait partie de notre culture. Pour la population générale, l’intérêt des édulcorants n’est pas évident en termes de santé publique. Il est assez controversé. Cela rend service dans les sodas. Le diabétique peut grossir donc c’est un confort dans sa vie quotidienne. Je n’ai pas de raison scientifique pour émettre une réserve, une contre-indication pour les diabétiques ou les femmes enceintes, malgré des études d’Italie qui viennent d’une association qui recherche les causes du cancer et qui est contre l’aspartame. Il y a des questions non résolues. Pour l’étude faite en Suède sur le risque d’accouchement prématuré, il n’y a pas de raison rationnelle que ce soit uniquement dû aux sodas light. Ensuite, pour ce qui est de l’obésité, un patient qui consomme beaucoup de boissons sucrées, on va l’orienter vers les boissons avec des édulcorants. Les maladies psychologiques, les patients sont souvent très addicts des boissons sucrées donc c’est intéressant de pouvoir prendre des sodas aux édulcorants. Dans les aliments ça a moins d’intérêt mais les malades ne peuvent s’en passer. C’est donc bien une aide pour certains patients. J’ai lu un article très intéressant sur l’enfant: prise de poids moindre mais effet à court terme. A moyen terme, le poids remontera quand même mais c’est la difficulté de tous les régimes. Je parle pour ma communauté, on ne peut pas dire que les édulcorants sont à bannir. Ce n’est pas une drogue. Attention aux messages des militants. Il n’y a pas de syndrome de sevrage donc ce n’est pas addictif. Attention aux scandales ou pseudo scandales dans les reportages où tout est à charge. L’étude avec test sur les souris où il comparait le sucre et la cocaïne. Attention à la manipulation de l’opinion publique ! C’est la même chose pour les tumeurs et les OGM. Qu’est ce que c’est dangereux ! La souche de souris utilisée pour les tests est une souche qui fait beaucoup de tumeurs. Il aurait même été éthique d’euthanasier les souris avant la fin de l’étude. Attention aux images chocs !
  • 2. Thèse professionnelle – Sylvaine Carrau – ESCP Europe – Nov 2013 « De la baisse de confiance des consommateurs vers un marketing responsable » Les profils psycho sont plus vulnérables. Ils ont besoin de compensation qu’il trouve dans la nourriture qui leur apporte une certaine stimulation à la dopamine. C’est la même chose pour l’alcool et la caféine. Les personnes qui ont des habitudes ne les changent pas facilement. Quelqu’un qui est plutôt « sucré » gardera cette habitude alimentaire. C’est donc indémontrable de dire que le sucre appelle le sucre. Ce n’est pas prouvé. On ne peut conclure à un phénomène d’addiction. Quand on découvre un diabète, certains suppriment totalement le sucre mais c’est rare. Le problème du light est que le patient peut se sentir déculpabilisé... ce n’est pas que négatif d’ailleurs. Mais le bénéfice sur la balance est nul. Ce n’est donc que psycho-bénéfique. Le light est avant tout un argument marketing. Le consommateur a un sentiment de réassurance en consommant du light. Dans le chocolat light, il y a moins de sucre mais plus de gras. Il faut donc faire attention à ne pas égarer les consommateurs et certains profils sont trop influençables. L’édulcorant n’est pas un produit d’amaigrissement. Question : Que pensent vos patients diabétiques des édulcorants? Je ressens une augmentation de l’inquiétude chez les patients diabétiques. Je les rassure et leur donne mon aval sur les édulcorants. Leur perception est plus négative et on ressent des réticences plus qu’avant. Le sucralose est un édulcorant qui permet une meilleure sécrétion d’insuline quand il est ingéré juste avant le repas. Ses molécules sont différentes de celles de l’aspartame. Il a un haut pouvoir sucrant et ses propriétés nutritionnelles sont bénéfiques. La stévia n’est pas facile à transformer et le goût ne plaît pas à tout le monde. Dans le process de fabrication, les industriels doivent ajouter du sucre pour palier à ce problème de goût (moitié sucre et moitié stévia). Mais les industriels s’orientent vers la stévia parce que leurs consommateurs ont des doutes sur l’aspartame (sa consommation a d’ailleurs baissé) et c’est plus naturel puisque c’est issu d’une plante. La stévia a longtemps été bloquée par le lobbying du sucre (sucre de canne et de betterave), le CEDUS, qui est bien sûr contre les édulcorants. Dès les années 70, la stévia a été commercialisée au Japon. Les études sont bonnes et on a du recul maintenant. Cet édulcorant semble bon. Il faut des études rigoureuses, sur de grandes populations. Il faut regarder le groupe contrôle et faire attention aux facteurs confondants, avoir des groupes comparables morphologiquement... mais c’est compliqué à faire. Les effets secondaires sur les notices de médicaments existent bel et bien mais ne touchent que 2% environ de la population. Il ne faut donc pas généraliser pour le reste de la population. Les « anti » édulcorants disent : c’est la preuve que les édulcorants font grossir puisque ce sont les individus qui consomment des édulcorants qui sont gros ! Quand les études sont passées à la moulinette par les agences sanitaires, on trouve souvent des biais. Les études doivent être faites par des équipes neutres. Regardez l’étude OGM qui vient de sortir, il y a un biais parce que le Professeur Séralini est contre les OGM. La position la plus sage à avoir est de dire « je ne sais pas ». L’histoire du doute appartient à la rumeur. Ce n’est pas sain.
  • 3. Thèse professionnelle – Sylvaine Carrau – ESCP Europe – Nov 2013 « De la baisse de confiance des consommateurs vers un marketing responsable » Dans le médical, on n’est jamais sûr de rien. Mais il faut quand même prendre des décisions avec les données que l’on a. Les gens sont prêts à prendre des risques bien plus grands dans certains de leurs comportements (comme conduire en état d’ivresse ou rouler trop vite). C’est choquant d’un point de vue scientifique et l’argumentation n’est pas bonne. Ha mais il y a un doute ! Si le politique ou l’agence n’interdit pas un produit, c’est qu’il n’y a pas de problème. Et ils doivent faire leur travail sans pression publique. Aucune agence n’a émis de réserve donc je fais confiance surtout quand l’agence est européenne parce que si elle nationale, on pourrait peut-être avoir un risque de manque de déontologie. Relance : On parle souvent de conflits d’intérêts au sein de l’efsa... Les bons experts sont sollicités par les industriels mais c’est très regardé. La médiatisation des conflits d’intérêts peut être positive pour aller vers plus de transparence. Question : En tant qu’endocrinologue, pouvez m’expliquer le lien avec l’aspartame ? On parle de l’aspartame comme perturbateur endocrinien. Il y a une diabolisation de l’aspartame. Non l’aspartame n’est pas un perturbateur endocrinien. Question : Vous avez participé à un colloque Nutrition en février 2011 (dans le 35). Votre présentation s’intitulait « Les édulcorants : amis ou ennemis ? ». Alors amis ou ennemis ? Non à la diabolisation de l’aspartame et non à l’excès de promotion de l’aspartame. Il est « ami » pour certains patients. Il faut faire confiance aux agences sanitaires même si on est en droit de s’interroger. Question : Que pensez-vous du principe de précaution, comme mis en avant par Système U en juin dernier ? Le principe de précaution n’enlève pas le doute et on propage la peur. Je le répète, les édulcorants sont utiles pour le diabète. En tant que clinicien, je me suis posé la question et 30 cannettes par jour (ce qui correspond à la DJA de l’aspartame) n’est pas atteignable et ce serait déséquilibré, disproportionné. Faisons appel au bon sens ! Question : Nous savons aujourd’hui que l’amiante est nocif pour la santé soit après coup. Que pensez-vous du principe de précaution dans ce contexte ? Dès qu’il y a un doute suffisant, on retire le produit suspecté. Pour l’amiante, on a constaté une augmentation des cancers très nette. Il y a des lobbyings qui sont plus actifs que d’autres. Le principe de précaution... il y a des risques partout. Ce n’est jamais tout blanc ou tout noir. En médecine, on est habitué. Question : Comment peut-on expliquer que des patients déclarent : « je n’ai plus mal aux jambes depuis que j’ai arrêté l’aspartame » ? D’un point de vue clinique, cela me semble improbable. C’est pour moi l’effet placebo. Si cela leur a fait du bien, tant mieux mais scientifiquement ce n’est pas possible. C’est comme de dire « supprimer tous les produits laitiers de votre alimentation ». Cela déséquilibrerait
  • 4. Thèse professionnelle – Sylvaine Carrau – ESCP Europe – Nov 2013 « De la baisse de confiance des consommateurs vers un marketing responsable » vos apports en calcium au risque de vous trouver en carence et de fragiliser vos os. Ne manger que des légumes créerait des carences. Question : Pourquoi, selon vous, y a-t-il plus de cancers aujourd’hui ? On a besoin de coupables. Notre société a changé. On fait moins d’exercices. Il y a aussi une production qui utilise des produits chimiques. Les agriculteurs sont plus exposés à ces produits. Il y a beaucoup de facteurs à analyser. Beaucoup de recherches sont en cours sur l’analyse croisée de tous ces facteurs. Les particules dégagées par le diesel sont aujourd’hui reconnues comme nocives pour la santé humaine. Il y a eu des études concordantes sur ces particules concernant l’augmentation du risque d’infarctus. Il ya une incohérence au niveau politique qui a poussé le diesel alors qu’il y avait des études sérieuses sur les risques liés aux particules. Question : Que pourriez-vous en déduire sur la nature humaine, dans ce contexte ? L’Homme a besoin de peurs, de croyances, de combats et il y aura toujours des combats à mener. Revenons au bon sens. On manque de nuance. Tous ces groupes de chercheurs pourraient mettre leur énergie en commun sur des sujets qui ont des études sérieuses et préoccupantes pour la santé humaine, comme le phtalate et le bisphénol A.