A l’occasion du 30ème anniversaire de la Chaire Grande Consommation de l’ESSEC, les experts du cabinet d’audit et de conseil PwC ont imaginé les grandes évolutions du secteur de la distribution et des biens de consommation au cours des trente prochaines années.
2. PRÉFACE DE RÉMY GERIN Page 4
La chaire Grande Consommation en 9 dates Page 8
30 ans de rétrospective Page 10
1985 - Création de la chaire des Produits de Grande Consommation Page 12
1986 - Cent ans de Petit-Beurre Page 14
1987 - La naissance de Bio/Activia Page 16
1988 - Coca-Cola Light en France Page 18
1989 - Tutti Rikiki Maousse Costo Page 20
1990 - Le développement du Hard Discount en France Page 22
1991 - Lancement de Cristaline Page 24
1992 - Lancement d’Absolut en France Page 26
1993 - Pepsico s’installe en France Page 28
1994 - Orangina « Les Hommes bouteilles » Page 30
1995 - Naissance de M&M’s bleu Page 32
1996 - Vote de la loi Galland Page 34
1997 - « Parce que je le vaux bien » Page 36
1998 - Lancement de Gillette Mach 3 Page 38
1999 - Carrefour-Promodès Page 40
2000 - Naissance de la MDD Auchan Page 42
2001 - Amazon participe au décollage du e-commerce en France Page 44
2002 - L’arrivée de l’euro fiduciaire Page 46
2003 - Nouvel élan pour Kusmi Tea Page 48
2004 - La campagne Dove Evolution Page 50
2005 - Nespresso, What else ? Page 52
2006 - Qui est le moins cher ? Page 54
2007 - Lancement de l’iPhone Page 56
2008 - Lancement de Facebook en France Page 58
2009 - La campagne Evian Roller Babies Page 60
2010 - Nouvelle identité packaging Monoprix Page 62
2011 - Lancement d’Aquatube Page 64
2012 - Lancement du forfait Free à 2€ Page 66
2013 - Tweet Actifry Page 68
2014 - Loi Hamon Page 70
2015 - Les 30 ans de la chaire Grande Consommation de l’ESSEC Page 72
Prospective à 30 ans avec pwc Page 74
Introduction Page 76
Nouvelle donne urbaine Page 78
Nouvelle donne environnementale Page 84
Nouvelle donne technologique Page 90
Nouvelle donne démographique Page 98
Nouvelle donne économique Page 102
L’avis de l’expert Page 108
SOM-
MAIRE
3. PRÉ-
FACE
«Daniel Tixier a été mon premier professeur de marketing à
l’ESSEC.
Passés les «bidules d’avenir», cas sur lequel des dizaines
de promotions ont travaillé, Daniel m’a appris à penser et
à agir différemment, et démontré à l’infini qu’il n’y avait
généralement pas que deux options à une alternative. Et
parce que Daniel pensait et agissait différemment, dans le
cadre d’une liberté qui naviguait entre vision et provocation
bienveillante, il a créé en 1985 la Chaire Produits de Grande
Consommation.
Cette Chaire a été la première créée dans une école de gestion
française avec les entreprises de son secteur, générant des
réactions assez violentes, en provenance du milieu des
professeurs de l’enseignement supérieur en général et des
professeurs de nos grandes écoles en particulier, y compris
ceux de l’ESSEC. Je vous livre le verbatim de Daniel : « Nous
avions inventé un mode de financement original qui a
permis de lancer la chaire mais qui présentait un risque de
subordination à l’argent non patrimonial des fondateurs, et
chacun sait que l’argent corrompt, et que donc cela créait un
risque de dépendance de l’intellect - ce qui est proche de la
compromission de l’intelligence bien sûr - envers l’argent
des autres enserré dans la nécessaire maintenance de la
bienveillance de ses octroyeurs. Bref, quelques souvenirs de
quasi accusations de puteries publiques ».
Lorsque nous avons fêté les 25 ans de la Chaire avec Christine
Lagarde à Bercy en 2010, en compagnie de nos amis de
l’industrie et du commerce de grande consommation, Daniel
a alors rappelé que « ce positionnement d’une chaire sur
cette charnière à la fois complice et conflictuelle, en France
notamment, fut alors une première dans le monde de toutes
Rémy Gerin
Directeur exécutif de la
Chaire Grande Consommation
« CetteChaireaété
lapremièrecréée
dansuneécolede
gestionfrançaise
aveclesentreprises
desonsecteur. »
4. PRÉ-
FACE les grandes universités et écoles de gestion et qu’il reste
encore aujourd’hui suffisamment original pour toujours
arrêter l’attention des universités et des universitaires que
nous rencontrons ». En effet, audacieux et visionnaire.
Comme l’était Daniel Tixier.
CetteChaireadonccheminé,danssonoriginalité,embarquant
chaque année une vingtaine d’étudiants, nécessairement
marqués par la personnalité de son titulaire, les expériences
vécues dans les usines de ses partenaires, les visites de
points de vente d’une distribution en pleine mutation, et les
rencontres incroyables que son fondateur provoquait avec des
personnalités improbables. Avec, toujours, au cœur de tout
cela, le consommateur.
Un soir de 2007, au Cnit, et sûrement parce que nous avions
beaucoup cheminé ensemble depuis ma sortie de l’école,
des « Jeudi des Produits de Grande Consommation » aux
Monashees, du cours Carrefour-Danone au Mont Blanc et au
Mont Rose, du projet de créer le « Marché à Terme des Têtes
de Gondole » aux débats infinis avec Olivier Géradon de Vera,
Daniel m’a demandé d’assurer sa succession en me précisant
(pour une fois) qu’il n’y avait, pour moi, pas d’autre option
que celle d’accepter.
Daniel m’a alors confié, avec une bienveillance paternelle,
la mission de poursuivre l’œuvre engagée, en liberté et en
critique, ce dont j’ai peut-être un peu abusé en me disant que
c’est peut-être aussi ce qu’il recherchait.
J’ai donc poursuivi l’œuvre, ajoutant une couleur dont Daniel a
trèsvitereconnulesens:l’intégrationdespréoccupationsRSE
dans nos enseignements, nos séminaires et nos recherches,
et créant des événements s’intégrant parfaitement dans le
cadre des valeurs historiques de l’ESSEC. Tout ceci partant du
principequelaresponsabilitédel’industrieetducommercede
grande consommation à l’égard du monde est très forte, parce
que ce secteur nourrit et fournit au quotidien des dizaines
de millions de foyers, impacte massivement les ressources,
l’environnement, l’écosystème et la bio-diversité, et emploie
directement et indirectement plus d’un million d’hommes et
de femmes en France.
Cette année, la Chaire fête donc ses 30 ans, pour moitié vécus
sur le XXe
siècle, pour moitié sur le XXIe
.
30 ans, le temps d’une génération d’Homme. D’ailleurs, nous
accueillons de plus en plus « les enfants de…»
Alors merci à vous tous, qui nous accompagnez et nous avez
accompagnés dans notre mission de former et développer en
responsabilitélesdirigeantsdesentreprisesetdel’écosystème
de la consommation de demain, de rester un long moment à
nos côtés. Et merci infiniment à Maïlys Vicaire-Toulemonde
et Isabelle Frappat qui, assistées de Françoise Fitamant,
œuvrent tous les jours pour servir la mission de la chaire telle
que Daniel l’a voulue. »
Rémy Gerin
Directeur exécutif de la Chaire Grande Consommation
« Danielm’aalors
confié,avecune
bienveillance
paternelle,lamission
depoursuivrel’œuvre
engagée,enlibertéet
encritique »
5. LA chaire
grande
consommation
EN 9 DATES
1985 2010 2012Création de la
Chaire Grande
Consommation
(Daniel Tixier,
François Dumas,
Sylvain Wibaux...)
25 ans de la
Chaire et 25 idées
pour relancer la
croissance
Premier Grand
Prix ESSEC de
la Distribution
Responsable
2015Les 30 ans de la
Chaire Grande
Consommation
1987Premier séminaire
de la Chaire
2001 20132007Remise des palmes
académiques
au professeur
Daniel Tixier
PREMIER Grand Prix
des Industries de
la Consommation
Responsable.
Lancement de
l’Observatoire ESSEC
de la Distribution
Responsable avec
la FCD et PwC
Création du cours
« relation industrie
commerce », clôture
du cours avec les
PDG de Carrefour
(J.L. Duran) et
Danone (F. Riboud)
2014Prix Daniel Tixier
de l’initiative
consumériste de
l’année
7. 1985CRÉATIONDE
LA CHAIRE
« Et si l’ESSEC formait des
commerçants ? »
17entreprisesfondatricesengagéespendant3ans
pourunedotationannuellede50000Frs.
Distributeurs :Carrefour,ComptoirsModernes,DocksdeFrance,Prisunic,Promodes,Unico,Sasm.
Industriels :Dim,Bel,GénéraleBiscuit,Gillette,JacobsSuchard,Kronenbourg,L’Oréal,Procter&Gamble
Etaussi:DupuySaatchietNielsen
T
el fut sans doute le rêve de Daniel Tixier, pro-
fesseur de Marketing, lorsqu’il proposa d’im-
porter en France l’une des “recettes” les plus
emblématiques des universités américaines :
le financement de chaires
d’enseignement et de recherche
par des grands groupes.
L’ESSEC précurseur.
La première chaire a vu le jour à
l’ESSEC en 1985 sous le nom de
Chaire des Produits de Grande
Consommation (PGC), projet péda-
gogique unique fédérant 17 indus-
triels et distributeurs. Daniel nous
confiait alors : « Je suis convaincu
que la logique de la nécessité des
chaires s’imposera à toutes les
écoles.Ilestsouhaitablequel’ESSEC
reste un modèle de dynamisme et donc un précur-
seur. »
Il flottait un parfum d’excommunication.
Frondeur et subversif ? Il a fallu beaucoup de com-
bativité et de courage pour imposer et développer ce
prototype d’inspiration américaine. Daniel fut im-
médiatement accusé de vouloir « vendre » les étu-
diants aux entreprises, et pendant plus de 15 ans il
aura à faire face à l’indignation de ceux qui défen-
daient leur « éthique » de l’enseignement supé-
rieur. « L’aventure de la Chaire PGC, autour de la-
quelle flottait un parfum d’excommunication, a créé
une sorte de confrérie autour de Daniel, toujours
vivante aujourd’hui. », nous raconte Antoine de St
Affrique (E87). 30 ans après, les chaires sont deve-
nues des éléments incontournables sur les campus
des grandes écoles et universités de pointe...
Un pont audacieux entre industriels, distribu-
teurs, l’école et les étudiants.
La chaire PGC a démarré tout de suite comme un
modèle gagnant-gagnant pour tous, un carrefour où
intervenaient des entités différentes : l’ESSEC, les
17 firmes fondatrices, les élèves, et aussi toute la
communauté extérieure associée aux PGC.
Il restera dans nos mémoires un
tour de table d’acteurs dont les re-
lations étaient, la plupart du temps,
assez épineuses... Un véritable ex-
ploit pour l’époque car industriels
et commerçants ont accepté de se
retrouver dans nos amphithéâtres
pour faire progresser la qualité de
leur pratique sous l’œil passionné
d’étudiants sachant tirer les leçons
de ces relations ! On se souvient
tous des débats passionnés et sans
langue de bois avec Roland Monica
(Jacobs Suchard) ou Antoine Gui-
chard (Casino) !
Nous « les Cobayes » de la promo Zéro : devenus
« des commerçants » ?
Devenir commerçants ? Normal dans une école de
Commerce, non ? Pas tant que cela en 1987… pas un
seul d’entre nous n’a commencé sa carrière dans la
Distribution !
Cependant, cette formation novatrice à l’interface
Producteurs - Distributeurs a permis à tous les étu-
diants de la promo Zéro de faire des belles carrières
dans le secteur des PGC et susciter de l’intérêt pour
rejoindre la Distribution par la suite… Moi-même
dans la Distribution depuis plus de 20 ans, je ne re-
dirai jamais assez « Merci Daniel » pour m’avoir
fait découvrir le Commerce et m’avoir donné l’envie
d’y consacrer ma vie… »
Ilafallubeaucoup
decombativitéetde
couragepourimposer
etdévelopperce
prototyped’inspiration
américaine.
Laurence Paganini
ESSEC 1987 & promo Zéro de la Chaire PGC.
Unilever, Spontex, Carrefour, Marionnaud,
3 Suisses et Kaporal.
RETROSPECTIVE 12
des Produits de Grande Consommation de l’ESSEC
8. 1986CENTANSDE
PETIT-BEURREHistoire d’un produit culte
Création :1846àNantes
LUFrance :sociétédelabrancheBiscuitsdugroupeaméricainMondelezdepuis2007(rachetéeaugroupeDanone)
LamarqueLU :n°1desbiscuitiersfrançais
Principalesmarques :Prince,Petitécolier,Belvita,Pépito,Grany,TUC,Mikado,Cracotte,Barquette,Granola,LaPailled’Or…
Chiffred’affaires :1milliardd’eurosenviron
RETROSPECTIVE 14
L
U est née sous le règne de Louis-Philippe,
lorsqu’en 1846 Jean-Romain Lefèvre épouse
Pauline-Isabelle Utile. Le couple s’installe
à Nantes. Louis, leur fils, va transformer sa
pâtisserie de quartier en un véritable empire
avec l’ambition de créer les meilleurs biscuits du
monde. En 1886, Louis crée le
Petit LU: « Le Petit-Beurre a
52 dents comme 52 semaines,
il a 4 coins comme 4 saisons, et
24 petitstrouscomme24 heures
de la journée ». Le Petit-Beurre
devient alors un produit culte.
En 1986, le véritable Petit-
Beurre de LU fête ses 100 ans
et invite les Français à souffler
ses bougies en s’affichant sur
les murs avec une campagne
publicitaire qui deviendra culte
à son tour.
Célébrant le 1er
chef d’œuvre du
pâtissier visionnaire Lefevre
Utile, cette campagne fait
vibrer le lien qui l’unit aux Français. Jouant sur la
forme unique et iconique du biscuit, la marque
multiplie les clins d’œil à la culture française au
travers d’une dizaine d’affiches plus spirituelles et
savoureuses les unes que les autres. La référence à
l’oreille coupée du maître Van Gogh, l’expression
populaire « Beurré » ou encore « 100 ans et toutes
ses dents », témoigne de l’inspiration du célèbre
publicitaire Jacques Henocq de l’agence Bélier.
La gourmandise et la fantaisie de cette campagne
en font un succès car ce sont des valeurs qui nous
touchent, petits comme grands.
Cette campagne sera aussi l’opportunité pour la
marque LU de réaffirmer son leadership, grignoté à
l’époque par les MDD. LU détourne ainsi la phrase
consacrée de l’estampille à la Française : « LU et
approuvé », pour se présenter
comme un label de qualité.
Ouvrant la voie à une succession
de prix pour LU, elle a été élue
en 2013 la seconde campagne
préférée des Français sur les
40 dernières années.
Encore aujourd’hui LU conti-
nue d’écrire son histoire. La
marque reste présente dans
88% des foyers Français grâce
à une grande variété de biscuits
créatifs, simples et savoureux.
Ses produits, ses communica-
tions à succès et cette belle his-
toire familiale font de la marque
LU, encore en 2014, la marque
préférée des français.
En attendant ses 150 puis ses 200 ans, le véritable
Petit-Beurre de LU reste plus que jamais un élément
immuable du patrimoine français !
« Lagourmandise
etlafantaisiede
cettecampagne
enfontunsuccès
carcesontdesvaleurs
quinoustouchent,
petitscommegrands. »
Pascal Bourdin
Président Western Europe
de Mondelez International
9. 1987LANAISSANCE
DEBIO/ACTIVIAUn lancement qui fait du bien à
l’intérieur et qui se voit à l’extérieur
Danone :21milliardsd’eurosdechiffred’affaires,dont11,8milliardspourlepôleProduitsLaitiersFrais
Activiadanslemonde:2milliardsd’eurosdechiffred’affaires,310potsvendusparseconde,distribuée
dansplusde80pays,1re
marquedeproduitslaitiersfrais
Marchésprincipaux :Etats-Unis,France,Russie,JaponetEspagne
Q
uand Danone lance Bio/Activia en 1987,
c’est en réalité une nouvelle ère qui s’ouvre
pour l’entreprise. Aujourd’hui, Activia est
la première marque pour Danone et incarne
un peu l’histoire de notre entreprise depuis
sa création. La marque est en effet bâtie autour
de trois axes forts : la recherche, le marketing et
l’internationalisation.
La recherche, puisqu’Activia est le fruit de 20 ans
d’études et d’expertise, inscrites dans la droite
lignée des travaux qu’Isaac Carasso, fondateur de
Danone, avait commencés en
1919. Il contient un mélange
unique de bactéries dont
plus de 4 milliards de Bifidus
Actiregularis dans chaque
pot, aidant à réguler le transit
intestinal. Sa signature
sensorielle spécifique, douce
et légèrement crémeuse, permet à la marque de se
distinguer des yaourts classiques.
Le marketing, puisqu’Activia est aujourd’hui une
des marques les plus emblématiques de Danone.
Lancé d’abord sous le nom « Bio » (venant de
« bios », « la vie » en grec, et faisant référence au
Bifidus actif, micro-organisme vivant), le produit
adopte le nom « Activia » en 2006. Le nom alors
évoque l’action des ferments vivants (« acti ») et
le dynamisme (« via »). Mais surtout, la marque se
singularisedès1987surleplanpublicitaire.C’esten
effet la première fois qu’un produit laitier parle de
l’effet qu’il a sur le corps. La campagne télévisuelle
– « Bio de Danone : ce qu’il fait à l’intérieur se voit
à l’extérieur » – est à la fois novatrice, gracieuse et
transgressive. Surtout, elle marque fortement les
esprits. Avec son packaging vert chlorophylle, le
produit tranche clairement en linéaire où tous les
autres produits laitiers sont alors habillés de bleu
ou de blanc. Le succès est immédiat et exponentiel :
aujourd’hui, les ventes d’Activia totalisent plus de 2
milliards d’euros, ce qui représente 1/5 des ventes
du pôle Produits Laitiers Frais de Danone !
L’internationalisation, puisque c’est grâce à Activia
que Danone a pu faire ses premiers pas dans de
nombreux marchés. Ainsi, entre 2004 et 2006,
la marque est lancée dans 22 nouveaux pays. Cette
internationalisation a pu se
faire grâce à une approche
minutieuse intégrant les
goûts locaux : citons l’Activia
cannelle-pomme en Croatie,
au cactus au Mexique, à
l’acérola au Japon. Mais au-
delà des saveurs, c’est toute une
dimensionculturelleliéeauxpratiquesalimentaires
propresàchaquepaysquiestpriseencompte.Ainsi,
Activia se décline en Kefir en Russie, en Laban en
Arabie Saoudite, en version grecque aux Etats-Unis,
en porridge en Pologne…
C’est parce qu’Activia représente les grands
fondements de Danone – la recherche, l’innovation
et le savoir-faire marketing, l’expansion
internationale, l’adaptation culturelle, l’approche
holistique de la santé par l’alimentation, le bon
goût sain – que la marque est si emblématique
aujourd’hui et qu’elle continuera à l’être demain !
Emmanuel Faber,
Directeur Général de Danone
« LARECHERCHE,
LEMARKETING,
L’INTERNATIONALISATION. »
RETROSPECTIVE 16
10. 1988COCA-COLA
LIGHT
EN FRANCENaissance d’une petite sœur…
Développement produit et promotion des marques : The Coca-Cola Company
Embouteillage et distribution : Coca-Cola Entreprise France
Coca Cola Light : 2e
marque sur le marché des soft drinks derrière Coca-Cola
Gamme : 5 déclinaisons (Coca-Cola light, Coca-Cola light sans caféine, Coca-Cola light lemon,
Coca-Cola light lime, Coca-Cola light sango)
A
peine plus d’un siècle après la naissance de
Coca-Cola - cette boisson désaltérante et
rafraîchissante au goût unique et à l’attrait
universel - la famille s’agrandit avec Coca-
Cola light, pionnière des boissons light en
France, sans calories et sans sucres.
Souvenons-nous, en 1988,
nous sommes à une époque où
les femmes veulent « tout » : le
plaisir, la légèreté, le bien-être
et…unesilhouetteimpeccable.
Comme dans la mode, où
elles veulent l’élégance et
la praticité pour mener une
vie épanouissante et active
de femme, de mère et de
professionnelle.
Comme dans la beauté, où elles
veulent allier sophistication
et naturel pour rester elles-
mêmes et séduire en même
temps.
Coca-Cola light prend tout
naturellement la tête de ce
nouveau mode de vie en
devenant le symbole de ces
nouvelles aspirations – bien au-delà de la boisson
délicieuse et pétillante qu’elle est déjà – et forme
avec Coca-Cola, son iconique marque-mère, un duo
irrésistible !
La top modèle Estelle Lefébure participe au
lancement et le succès est immédiat. Comme
beaucoup d’autres univers, le monde de la mode
est conquis par cette nouvelle marque et le symbole
qu’elle représente. Sur les affiches publicitaires et
dans les magazines, nombreuses sont les photos
où les mannequins prennent humoristiquement la
pose avec « leur » Coca-Cola light.
C’estainsiquenaîtl’idéedeconfierlamarqueàd’il-
lustres créateurs comme Karl Lagerfeld, Jean-Paul
Gaultier ou encore Sonia Rykiel pour exprimer sur
des bouteilles et des canettes « Collector » un style
Coca-Cola light résolument lé-
ger bien sûr, mais aussi joyeux,
urbain et tendance.
Et comme il ne faut surtout
pas faire de jaloux en cette
époque de parité, ce succès va
en inspirer un autre. En 2007,
son « alter ego » Coca-Cola
Zéro, boisson au goût Coca-
Cola avec zéro sucres et zéro
calorie, est lancé à destination
des hommes cette fois-ci !
L’élan étant donné, le rythme
des innovations s’accélère
encore et la famille Coca-
Cola s’agrandit à nouveau en
cette année 2015 avec Coca-
Cola Life, boisson à calories
réduites au goût sucré d’origine
naturelle à base de stévia.
Désormais la grande famille Coca-Cola, tout en
offrant à toutes et à tous encore plus de choix, parle
d’une seule voix avec une très belle signature :
« Choisis le Bonheur ».
Dominique Reiniche
Présidente de Coca-Cola jusqu’en 2014
«lemondedelamode
estconquisparcette
nouvellemarqueet
lesymbolequ’elle
représente.C’estainsi
quenaîtl’idéedeconfier
lamarqueàd’illustres
créateurs. »
RETROSPECTIVE 18
11. 1989Tutti rikiki
maoussecostoLa campagne OMO Micro
A
la fin des années 80, OMO, l’inventeur de la
lessive sans savon (1952), leader historique
du marché et créateur des grands codes
lessiviers, n’est plus qu’une vieille marque
oubliée représentant à peine 6 % du marché.
En 1990, Lever et Lintas décident de mettre à
l’antenne un couple de singes parlant un langage
bien étrange pour vanter les vertus de leur lessive :
OMO. Les «Cassandre» sont nombreux à prévoir
l’échec d’une campagne qui
ose transgresser les «sacro-
saintes» règles d’or de la
communication lessivière...
C’est en regardant un film
égyptien lors d’un festival
publicitaire, et en n’ayant nul
besoin de sous-titres pour en
comprendre le sens, que les
créatifs de l’agence LINTAS
réalisent que les spots de
lessive racontent toujours la
même chose : un drame autour
d’un problème de tache, que
les gestes et intonations des
personnages suffisent à faire
comprendre, quelle que soit la langue.
Irrités par cette banalité et par les demandes
récurrentes de l’équipe OMO d’un nouveau
« langage » pour la marque, les créatifs de l’agence
Lintas écrivent un pastiche de film lessivier dans
une langue imaginaire, le Poldomoldave.
Cette langue, mixte de différents langages (français
de la rue, argot, latin, anglais, italien, allemand...)
est assez familière pour être décodable et assez
complexe pour susciter la curiosité, créant un
rapport radicalement innovateur à la marque. Les
créatifs choisissent de mettre en scène des singes,
donnant ainsi naissance à l’une des grandes sagas
publicitaires de l’histoire de la lessive.
Le singe s’avère assez proche de l’homme pour
permettre la projection, mais assez éloigné pour
éviter l’identification et devient au niveau visuel
ce qu’est le Poldomoldave au niveau verbal : une
sorte de point d’équilibre entre une incontestable
distance et une familiarité
certaine.
Décodé a posteriori, ce proces-
sus de projection permet une
véritable «libération» par
rapport aux schémas lessi-
viers classiques. La mise en
scène de situations «hyper-
réalistes» de la vie quotidienne
qui, traitées au premier degré,
seraient insupportables pour
le téléspectateur devient spec-
tacle dans lequel il s’implique
et qu’il prend plaisir à décoder,
jouant avec le langage et s’amu-
sant de la parodie. Et pourtant,
l’argumentation produit n’est pas en reste, bien au
contraire. Cette saga publicitaire devient également
un phénomène culturel : une avalanche de prix pu-
blicitaires, une nuée d’objets et de caricatures, mais
aussi la reprise du Poldomoldave par les enfants et
par la classe politique du moment !
Antoine de Saint-Affrique
President Food Category, Unilever
« cettelangueest
assezfamilièrepour
êtredécodableetassez
complexepoursusciter
lacuriosité,créantun
rapportradicalement
innovateuràlamarque. »
RETROSPECTIVE 20
Impact de la campagne : une progression des ventes de +25% entre 1990 et
1993 (la plus forte du marché) et de la notoriété spontanée de la marque de + 17 pts. OMO
redevient la 3e
marque du marché en 93.
Retour sur investissement de la campagne : x3 vs le leader Ariel.
12. 1990le développement DU
HARD DISCOUNT
en france
Le modèle qui osa défier la
grande surface
Lancement : 1948 en Allemagne par les frères Albrecht, fondateurs d’Aldi.
Part de marché du hard-discount : En France, 12% en 2014 (vs 15% il y a 5 ans).
Principales enseignes : Lidl, Leader Price (Groupe Casino), Aldi, Netto (Groupe Les
Mousquetaires-Intermarché).
L
’année1990estàlafoischarnièreetsymbolique
pour le hard-discount, entre l’ouverture des
premiers Aldi et Lidl dans le nord de la France
l’année précédente, et la reprise d’Euromarché
par Carrefour l’année suivante. Au moment
même où le modèle de la grande surface s’interroge
sur sa pérennité, le voilà menacé par son plus
radical opposé. Alors que pendant des années, les
distributeurs « latins » ont échoué à s’implanter
dans les pays « anglo-saxons » (et notamment
en Allemagne) pendant que ces Anglo-saxons
échouaient pareillement à
s’implanter dans les pays latins
(et notamment en France),
voilà que quelques David
de 800 m² se présentaient
devant les Goliath de 2 500 à
23 000 m², à la fois incrédules
devant tant d’audace et
inquiétés par un Euromarché
chancelant. Disproportion des
surfaces, choc des cultures,
antagonisme des origines. Si
la grande surface est l’enfant
de l’abondance des Trente
Glorieuses, le hard-discount
est né dans la pénurie de
l’Allemagne de l’immédiat
après-guerre. Là où la question fondatrice de la
grande surface sera d’attirer le chaland, la question
fondatrice du hard-discount sera d’achalander (au
sens d’approvisionner) le magasin. Quand la grande
surface consacrera l’essentiel de ses efforts à la
relationavecsesclients,lehard-discounts’investira
d’abord et davantage dans la relation avec ses
fournisseurs. Pour la grande surface, l’attractivité
et la fréquentation des consommateurs sont la
condition indispensable pour atteindre les volumes
qui permettront les prix bas qui alimenteront à leur
tour l’attractivité. Pour le hard-discount, les prix
bas et la qualité obtenus avec les fournisseurs sont la
condition vitale pour faire venir un consommateur
qu’aucune autre attention n’attirera dans des
magasins plus tournés vers l’efficacité logistique
que la performance commerciale. Là où la grande
surface était d’abord orientée vers l’aval, ses
clients, le hard discount était d’abord orienté vers
l’amont, ses fournisseurs. On
notera d’ailleurs avec intérêt
que les enseignes de discount
allemandes qui mentionnaient
le client dans leur vocation
d’enseigne étaient beaucoup
moins performantes que celles
qui ne le mentionnaient pas !
Les 25 années qui ont suivi
semblent avoir démontré qu’il
était plus facile de globaliser
une entreprise orientée amont,
produits et fournisseurs,
qu’uneentrepriseorientéeaval,
clients et services. On pourra
citer pêle-mêle les enseignes
internationales du textile,
Ikea, ou même Costco et Décathlon. Et la récente
réorientation de Lidl vers ses consommateurs
semble bien s’accompagner d’une indépendance
accrue de ses équipes locales.
Georges Ferronnière,
NIELSEN Global Product Leadership Director – Retail
« Làoùlagrande
surfaceétaitd’abord
orientéeversl’aval,
sesclients,lehard
discountétaitd’abord
orientéversl’amont,
sesfournisseurs. »
RETROSPECTIVE 22
13. 1991LANCEMENT
DE CRISTALINE« Cristaline, c’est mon eau. »
Entreprise : Groupe Roxane
Distribution : 1er
intervenant en volume sur les productions d’eau en bouteille.
Production : plus de 4 milliards de bouteilles produites par an.
Cristaline : présence dans plus de 43% des foyers français.
Éric Bousquet
Président Directeur Général
de l’agence Business.
P
ourquoi Cristaline est-elle l’eau préférée
des français ? Parce qu’elle est prélevée dans
son état naturel (17 sources régionales ré-
parties en France) ? Parce qu’elle est mise
en bouteille directement à la source ? Parce
que cela évite des coûts de transport énormes
puisque les bouteilles sont li-
vrées dans leur propre région ?
Sûrement un peu de tout cela…
Le résultat, c’est que plus
d’1 bouteille sur 3 vendue en
GMS est une Cristaline (soit
250 litres par consommateur).
La concurrence boit la tasse à
ce rythme !
Cristaline a été créée en 1991 et
commercialisée l’année suivante
sous l’impulsion de Pierre Pa-
pillaud, aujourd’hui à la tête des
eaux Roxane (St-Yorre, Rozana,
Courmayeur, Thonon…).
La première campagne TV, réalisée par l’agence Bu-
siness, date de 1992 et représentait une Manon des
Sources plus vraie que nature buvant de la Crista-
line à la source en chantonnant, je vous le donne en
mille : « à la claire fontaine » !
Le slogan marquait alors : « Cristaline, ça coule de
source ! » S’ensuivront des films avec Guy Roux
(victime de son succès et de sa « radinerie » légen-
daire) afin de mettre en avant l’économie réalisée
grâce au pack de six bouteilles (« Pour fêter une
victoire,j’offretoujoursunebonnebouteilledeCris-
taline. ») ; malheureusement
pasdeChablis!Unecampagnede
1 400 affiches 4x3 a fait couler...
beaucoup d’encre. « Qui prétend
que l’eau du robinet a bon goût
ne doit pas en boire souvent ! »
On la retrouva même dans un
article en double page dans
le prestigieux Time magazine !
Aujourd’hui le nouveau slogan
« Cristaline, c’est mon eau »
illustre parfaitement les 23 ans
de fidélité entre la marque et
Business.
« Lerésultat,c’est
queplusd’une
bouteillesurtrois
vendueenGMSest
uneCristaline. »
RETROSPECTIVE 24
14. 1992LANCEMENT
D’ABSOLUT
en franceUne icône de la Pop Culture
Propriétaire:GroupePernod-Ricarddepuis2008
Absolut: Troisièmemarquemondialed’alcoolblanc.
Philippe Savinel
President Directeur Général
Pernod et Ricard
L
e succès d’Absolut est indissociable de son suc-
cès aux Etats-Unis.
Issue d’une longue tradition de distillation
qui remonte à 1879, ce n’est qu’un siècle plus
tard, en 1979, que la marque suédoise Absolut
vodka apparaît aux Etats-Unis. Dès lors, la marque
connaît un succès fulgurant lié à la concomitance
de plusieurs facteurs qui contribuent à l’élever en
quelques années au rang d’icône
de la Pop Culture :
- Un flacon original, totalement
transparent, issu de la tradition
pharmaceutique suédoise, en
rupture complète avec les codes
traditionnels des vodkas.
- Un ancrage profond dans la
Création contemporaine au tra-
vers de collaborations avec des
artistes emblématiques (Andy
Warhol, Keith Haring, Ar-
man…), des stars de la photo
(Helmut Newton, Herb Ritts…)
ou de la mode qui vont marquer l’histoire de sa
communication.
-Unecampagnedepublicitéorchestréeparl’agence
TBWA, nourrie de clarté, de simplicité, d’audace
et de créativité, qui charme le paysage publicitaire
mondial et contribue à façonner la success-story de
la marque.
C’est auréolée de ce premier succès américain et
portée par une perméabilité grandissante des mar-
chés aux tendances internationales qu’Absolut se
lance en Europe, et plus spécifiquement en France
en 1992.
A son arrivée sur le marché français, la plateforme
de communication internationale « Absolut Ci-
ties » ne peut-être déployée pour des raisons liées à
l’application de la loi Evin, qui encadre strictement
la communication pour les boissons alcoolisées.
Peu importe, la campagne fran-
çaise sera plus sage… mais tout
aussi emblématique !
L’image américaine étant très
liée aux milieux artistiques et
de la nuit, c’est tout naturelle-
ment que la marque s’installe
en France auprès de ces mêmes
communautés, et notamment au
sein de la communauté gay, une
population festive, très implan-
tée dans le milieu de la nuit et
précurseur en terme de modes et
de tendances.
Dès lors, la voie du succès est ouverte pour Absolut
en France, qui parvient à développer ses volumes et
sa base de consommateurs sans jamais perdre son
statut, son image et son caractère exclusif.
«Peuimporte,la
campagnefrançaise
seraplussage…
maistoutaussi
emblématique ! »
RETROSPECTIVE 26
15. 1993PEPSICO
S’INSTALLE
EN FRANCEL’esprit pionnier… déjà !
2èmegroupeagroalimentairemondial.
Effectifs:600collaborateursenFrance,avecunemoyenned’âgede34ans
Chiffred’affaires: Multipliépar40depuissacréation
LauréatduPalmarèsGreatPlacetoWork®depuis2004.
Charles Bouaziz,
Ancien président BDE ESSEC, 18 ans chez PepsiCo, aujourd’hui
CEO Ontex et président ESSEC Alumni depuis 2012
J
e réalisais une belle carrière chez P&G (oral
caredivisionpharma),toutengardantdesliens
avecl’ESSEC-j’étaisenchargedurecrutement
des jeunes ESSEC. Mais P&G commençait à
développer le marketing global, la machine
étaitgrosse,norméeetprévisible.Jepartisdoncchez
Pepsiettoutlemondequestionnacechoix :lechiffre
d’affaires de Pepsi était à l’époque égal au budget
marketing que je gérais alors chez P&G (15 millions
d’euros), et personne ne connaissait la société en
France. Le hasard faisait pour-
tant que je connaissais Pepsi :
Perrier, leur embouteilleur, est
basé dans le Gard à proximité
de chez moi. « Connecting the
dots », comme dirait Bill Gates…
Pourquoi ce choix ? C’était un
choix entrepreneurial ; la société
était une start up de l’agro-alimentaire ! Nous étions
tous concentrés sur un seul objectif : faire fléchir
Coca-Cola. C’était la lutte du pot de terre contre le
pot de fer. Il fallait être agile, flexible, malin, alerte,
créatif. Tout était permis, et même le droit à l’erreur
était acquis. Nous étions 10 salariés au début… ve-
nant majoritairement de groupes lessiviers et de
l’ESSEC (chère Josée Lasserre – Josie pour les in-
times – du Career Center !). Nous avions donc en
« pré-acquis » communs le rationnel cartésien, la
rigueur marketing, un esprit entrepreneur. La place
était désormais à l’inventivité dans une autonomie et
une liberté d’action totales. Nous étions prêts à tout
pour parvenir à casser le monopole. Insouciants et
utopiques, nous sommes partis à la conquête du far
west avec peu de moyens, beaucoup d’ambitions et
d’énergie… et une bonne dose d’irrévérence !
C’est ainsi que juste avant Noël 1993, nous avons
envoyé à D. Reiniche, alors Directrice Marketing de
Coca-Cola France, un coursier avec un coffret ca-
deau incluant une cannette de Pepsi Light, une de
Cristal Pepsi et une de Pepsi Max, ainsi qu’un bris-
tol lui demandant de deviner lequel de ces produits
nousétionssurlepointdelancersurlemarchéfran-
çais… Nous avons été la première marque de grande
consommation à acheter de l’espace media au ren-
dement. Toutes nos actions étaient en ligne avec
notre signature 100% française : « Think different,
think Pepsi », développée avec
CLM BDDO.
Et si l’aventure fonctionnait c’est
qu’elle avait du sens pour chacun
d’entre nous. Nous y croyions,
vraiment, et nous nous sentions
bien dans cette entreprise qui re-
levait plus de la junior entreprise
ou du BDE (et c’est un ancien président qui parle !)
que de la multinationale. Agence, enseigne, media,
distributeurs (au moins au début) : tous nos parte-
naires regardaient avec bienveillance et intérêt les
troublions que nous étions et s’amusaient à partici-
per à ce projet fou.
Mais lutter contre le pot de fer a une fin. Virgin Cola
est arrivé (momentanément) en France. If you can’t
win the war, change the battlefield. C’est ce que je fis
en intégrant l’activité snacking à celle des boissons,
une première mondiale pour les filiales. Puis sont
arrivés Tropicana, Quaker…
La société est passée de 10 salariés à plus de 600 et
son chiffre d’affaires a été multiplié par 40 depuis sa
création.
L’esprit pionnier a fait ses preuves !
«C’étaitlaluttedu
potdeterrecontre
lepotdefer. »
RETROSPECTIVE 28
16. 1994ORANGINA
« LES HOMMES
BOUTEILLES »Pour que la pulpe ne reste pas en bas…
Lancement:créationdelamarque(alorsbaptiséeNaranjina)en1936,renomméeOranginaen1962.
PerformanceBusiness:500millionsdeconsommateursdansplusde60pays.
LeaderincontestéenFrancedesboissonsauxfruitsgazeuses.Touteslesbouteillesalignéesd’Orangina
consomméesen2011couvriraientplusde4foisletourdelaplanète.
Stanislas de Gramont
CEO de Suntory Beverage and
Food Europe
E
n 1994, la célèbre marque Orangina va bientôt
célébrer ses 60 ans. La marque à la légendaire
petite bouteille ronde, incontournable dans le
paysage des soft drinks, est
alors adorée des Français
pour sa joie de vivre communica-
tive, sa générosité, sa solarité et
son humour un peu déjanté.
De sa teneur en pulpe d’orange
qui crée naturellement un dépôt
au fond de sa bouteille, Orangina
a su faire un véritable atout
concurrentiel, un geste attri-
buable et attribué en communi-
cation : le secouement (« Se-
couez-moiiiiiiiiiiiii »).
Depuis les années 70, Orangina
multiplie les publicités à succès,
expliquant toujours avec une bonne dose d’humour
« qu’une bouteille d’Orangina doit toujours être se-
couée pour bien mélanger la pulpe ».
Le début des années 90 est marqué par le lancement
par la marque du tube de l’été, la célèbre lambada,
qui fera danser toute la France au point de rentrer
dans le TOP 10 des chansons les plus vendues de
tous les temps !
En1994, Orangina fait appel àAlain Chabat pourréa-
liser la suite de sa saga publicitaire.
Alain Chabat, créateur des Nuls (Canal +), est à
l’apogée de sa popularité avec la sortie cette an-
née-là de son film « la Cité de la
peur ». Il réalise pour la marque
la saga des hommes bouteilles
avec une signature devenue cé-
lèbre « Orangina, faut bien se-
couer,sinonlapulpeelleresteen
bas ».
5 films sont lancés en une seule
année : la toupie, le grand huit,
les anneaux, Sirtaki et Sofia. Le
succès est immédiat. Les français
succombent à l’humour irrésis-
tible et contagieux de cette cam-
pagne totalement secouée.
Aujourd’hui encore, 20 ans
après, les consommateurs de la marque se sou-
viennent encore de la campagne comme si c’était
hier… et le secouement est plus que jamais ancré
dans les gènes de la marque.
« 20ansaprès,
lesconsommateurs
delamarquese
souviennentencorede
lacampagnecommesi
c’étaithier… »
RETROSPECTIVE 30
17. 1995NAISSANCEDE
M&M’S®
BLEULe premier bébé-éprouvette du
marketing participatif
MarsChocolat:29marques,17000salariésdans20pays
M&M’s®
:créationen1941,4variétésenFranceaujourd’hui(M&M’s®Peanut,M&M’s®Choco,
M&M’s®CrispyetM&M’s®Intense).
Myriam Cohen-Welgryn
Présidente Directrice Générale –
Mars Petcare & Food France
A
ujourd’hui, pour les consommateurs fran-
çais, la notion de « couleurs » est solidement
et spontanément associée aux M&M’s®
. Cela
n’a pas toujours été le cas. En France, la
marque « qui fond dans la bouche, pas dans
les mains » a longtemps été exclusivement couleur
chocolat ! Elle ne s’appelait d’ail-
leurs pas même M&M’s®
, mais
Treets ! En 1986, signe avant-
coureur d’une grande tendance,
« la globalisation », les billes
chocolatées de Treets changent de
nom et deviennent M&M’s®
…
pour faire comme leurs cousines
américaines !L’occasiondeprendre
des couleurs, de gagner en gaieté
et en différenciation. C’est ainsi
que Rouge, Jaune, Vert et Orange
font leur apparition tandis que
les M&M’s®
deviennent des
mascottes porte-paroles de la
marque.
En 1995, précurseur dans l’art du
marketingparticipatif,lamarque
propose à ses consommateurs de contribuer à la
naissance d’un nouveau M&M’s®
: il suffit de télé-
phoner pour voter et décider si la nouvelle mascotte
sera Bleu, Rose ou Violette. Le 29 mars 1995, 10 mil-
lions de consommateurs dans le monde s’expri-
ment : Bleu recueille 54% des voix et entre officiel-
lement dans la saga M&M’s®
! Une des premières
co-créations avec les consommateurs qui fait un
buzz énorme et est saluée par l’Empire State Buil-
ding dont les couleurs virent au bleu en guise de clin
d’œil à la marque.
M&M’s®
surfe alors sur la vague révélée par cet en-
gouement et lance de nombreuses éditions limitées
qui célèbrent de grandes occasions : couleur pastel
pour Pâques, Vert, Rouge et Blanc pour Noël ou bien
couleur foot, pendant la Coupe
du monde du Brésil. Autant
d’évènements qui renforcent la
pertinence et le lien à la marque
et qui annoncent une nouvelle
tendance : la « customisation » !
Dès 2007, une innovation tech-
nologique permet à la M&M
d’aller jusqu’au bout de cette
tendance:«MyM&M’s®
»permet
désormais de personnaliser ses
M&M’s®
: le consommateur peut
choisir ses couleurs, son mes-
sage et depuis peu sa photo ! La
marque s’ouvre les portes d’un
nouvel univers concurrentiel : le
marché des célébrations. Elle
peut désormais tenir la dragée
haute pendant les baptêmes ou les mariages, en
s’inscrivant avec encore plus de force dans la vie de
ses consommateurs.
Un univers dont Bleu avait annoncé la couleur !
« précurseurdans
l’ artdumarketing
participatif,
lamarquepropose
àsesconsommateurs
decontribuerà
lanaissanced’un
nouvelM&M’s®
»
RETROSPECTIVE 32
18. 1996VOTEDELA
LOI GALLANDQuand le légal se mêle au prix
Gouvernement:JuppéII
Loiadoptéele21juin1996etpromulguéele1er
juillet1996
Dominique de Gramont
Délégué général ILEC 1993/2013
L
es raisons : la mise en chantier d’une loi n’a pas
correspondu à une demande de l’industrie. Au
demeurant, la première fois que nous avons
rencontré le très jeune ministre en charge du
dossier, nous lui avons fait
savoir que nous ne souhaitions
pas qu’une loi intervînt dans nos
affaires, ce qui à nos yeux ne rè-
glerait aucun problème, mais
engendrerait des disputes poli-
tiques, rendant le climat des né-
gociations commerciales encore
plus tendu. À quoi le ministre a
nous répondu que l’ordre d’en-
tamer un processus venait du
plus haut de l’État, en la per-
sonne de Jacques Chirac, nou-
vellement élu à la présidence et
connu pour ne pas porter les
grandes surfaces dans son cœur,
proche d’une paysannerie vent
debout contre le grand com-
merce. Les dés étaient jetés. Il y aurait une loi.
Les conséquences non anticipées : ceux qui atten-
daient qu’un chemin de roses s’ouvrît soudain sous
les pas des professionnels furent déçus, à n’en pas
douter. Du côté de l’ILEC, nous entendions simple-
ment en finir avec la revente à perte, désastreuse
pour les marques, ce qui fut parfaitement obtenu, le
reste sans changement.
Les vertus : les marques obtinrent de maîtriser les
prises d’otages sur leurs produits phares. Quant au
commerce, il put piloter avec grande précision ses
marges, l’essentiel étant obtenu « à l’arrière »,
échappant de ce fait à la concur-
rence. C’est à cette époque que
nos grandes enseignes se lan-
cèrent à l’assaut du vaste monde,
avec le succès que l’on sait.
Les limites : la loi ne résolut pas
les problèmes qui n’étaient pas
dans son objet. Le bras de fer sur
les marges arrières continua, ni
plus ni moins. Une loi consacrée
à des pratiques ne peut avoir
pour ambition de bouleverser le
rapport de force, toujours favo-
rable à l’acheteur en période
d’abondance. Ceux qui avaient
l’illusion d’une telle révolution
en furent pour leurs vains es-
poirs. Ceux qui avaient vendu un
tel dessein à leurs électeurs ou leurs mandants éga-
lement. Point ceux qui avaient deux sous de jugeote,
qu’ils eussent ou non électeurs, mandants, clients
ou fournisseurs.
« Ducôtédel’Ilec,
nousentendions
simplementenfinir
aveclarevente
àperte,désastreuse
pourlesmarques,
cequifut
parfaitementobtenu. »
RETROSPECTIVE 34
19. 1997« PARCEQUE
jelevauxbien »Le tournant historique d’un slogan
devenu légendaire
Jean-Baptiste Dalle
Directeur général Europe Sud CPD – Groupe L’Oréal
«P
arce que je le vaux bien »… Une signa-
ture, un mantra, un leitmotiv qui a su
conquérir toutes les générations à tra-
vers le monde depuis plus de quarante
ans. Créée en 1971 et indissociable de
la marque L’Oréal Paris depuis 1997, cette signature
iconiqueresteprobablementlaplusconnuedel’his-
toire de la publicité et n’a toujours pas pris une ride.
Ce slogan, c’est une jeune Américaine de 23 ans qui
l’a écrit lorsqu’on lui a confié la rédaction du script
de la coloration Préférence pour son lancement sur
le marché américain.
Nous sommes en 1971, à une
époque où les femmes doivent
être belles selon la norme esthé-
tique édictée par l’homme et non
au nom de leur bien-être. Le slo-
gan « Parce que je le vaux bien »
renverse brutalement ces codes
à travers le discours audacieux
d’une femme affirmant qu’elle a
choisi la formule la plus chère au
monde, non parce qu’elle est ar-
rogante mais parce qu’elle veut le
meilleur et qu’elle le vaut bien.
Cette idée, François Dalle l’a im-
médiatementcomprise,convain-
cu que les consommatrices amé-
ricaines devaient percevoir ins-
tantanément la supériorité qualitative de Préfé-
rence. Il a alors conquis le marché américain de la
coloration à domicile et c’est ainsi qu’une formi-
dable stratégie est devenue un slogan légendaire.
1997 symbolise un tournant historique dans l’es-
sor de L’Oréal Paris. Un nouveau souffle est donné
au slogan culte qui devient le « statement » interna-
tional de la marque, traduit dans toutes les langues et
sur tous les marchés.
La revendication féministe via un « Je » individua-
liste cède rapidement la place au dialogue avec un
« Vous»plusaltruiste,quiévolueraensuiteunenou-
velle fois en un « Nous » plus solidaire et inclusif.
Sans jamais imposer un archétype féminin, L’Oréal
Paris a ainsi su offrir à toutes les femmes une vision
valorisée de leur féminité et de l’affirmation de soi.
La signature « Parce que je le vaux bien » est d’au-
tant plus aspirationnelle lorsqu’elle est pronon-
cée par nos égéries. Par leur cha-
risme et leur authenticité, elles
incarnent chacune l’ADN du slo-
ganetlefontrayonnermondiale-
ment.
1997marqueunnouveaumoment
phare pour la marque qui de-
vient le partenaire et maquilleur
officiel du Festival de Cannes.
Depuis maintenant 18 ans,
L’Oréal Paris sublime les plus
belles célébrités foulant le tapis
rouge et contribue ainsi à la ma-
gie de l’évènement en l’illumi-
nant par ces iconiques « Women
of Worth ».
Audacieuse et iconoclaste,
L’Oréal Paris bouscule les car-
cans, repousse les stéréotypes et réinvente la beau-
té au travers d’un slogan révolutionnaire et de per-
sonnalités charismatiques à la beauté plurielle,
qui résonne dans tous les marchés, dans toutes les
cultures, encore et toujours. »
« Sansjamaisimposer
unarchétypeféminin,
L’OréalParisaainsi
suoffriràtoutes
lesfemmesune
visionvaloriséede
leurféminitéetde
l’affirmationdesoi. »
RETROSPECTIVE 36
Groupel’Oréal: 1er
groupecosmétiquemondial,prèsde23milliardd’eurosdechiffred’affairesen
2013,28grandesmarquesinternationales,624brevetsdéposésen2013,77400collaborateurs.
L’OréalParis: créationen1909,1er
marquedebeautédanslemonde,50produitsvenduschaque
secondedanslemonde,prèsde35égériesinternationales.
20. 1998LANCEMENTDE
GILLETTE
MACH3Trois lames à succès
Groupe :Procter&Gamble
Marque :CréationdupremierrasoirparKingC.Gilletteen1901
Portefeuille:14gammesdeproduitsGilletteen2014
Christophe Duron
Vice-President and General Manager -
France, Belgium, Netherlands,
Luxembourg at Procter & Gamble
D
epuis le lancement de son tout premier rasoir
en 1901, l’histoire de Gillette a été jalonnée de
succès qui ont transformé les habitudes de ra-
sage des hommes. Fidèle à sa stratégie de
montée en gamme, Gillette n’a eu de cesse
d’apporter des innovations qui ont bouleversé le
marché du rasage. Le lancement du rasoir Mach3 en
1998 en est une parfaite illustration : premier rasoir
système à trois lames montées
sur ressort, Mach3 est une
prouesse technologique qui a de-
mandé plus de 10 ans de re-
cherche et développement. Dé-
passant tous les scores de
satisfaction consommateurs avec
un taux de 60-70% par rapport
au meilleur produit sur le mar-
ché - du jamais vu dans l’univers
du rasage -, Mach3 devient très
vite un succès planétaire.
Outre une mobilisation sans
précédentdeséquipeseninterne
(plus de 1 000 collaborateurs du monde entier ont
été conviés à une convention d’une semaine à Bos-
ton, aux Etats-Unis, où se situe le siège de Gillette),
les investissements marketing déployés derrière le
lancement sont colossaux et le soutien de la grande
distribution jamais égalé auparavant. La part de
marché de Mach3 décolle immédiatement et le pro-
duit frise rapidement la rupture de stock en magasin,
faisant de Mach3 l’objet de toutes les convoitises.
Appliquant la théorie du « Launch & Leverage »,
suivront ensuite plusieurs lancements qui vien-
dront poursuivre la saga Mach3 avec des éditions li-
mitées et le lancement de Mach3 Turbo en 2002 qui
connaîtra lui aussi un très beau succès commercial
en France et dans le monde.
King Gillette disait : « Nous ces-
serons de fabriquer des rasoirs le
jour où nous n’arriverons pas à
en inventer de meilleurs ». Le
lancement de la série Fusion à
partir de 2006 jusqu’à Fusion
ProGlide Flexball en 2015 prouve
que Gillette n’a pas terminé
d’écrire son histoire…
« Lapartdemarché
deMach3décolle
immédiatementet
leproduitfrise
rapidementlarupture
destockenmagasin. »
RETROSPECTIVE 38
21. 1999carrefour-
promodÈs
La naissance d’un champion français
Création deCarrefour:1959
Filiales :Carrefour,CarrefourMarket,Shopi,SupermarrchésGB,CarrefourBanque,CarrefourVoyages
Effectifs:381227salariésen2014
Chiffred’affaires:84milliardsd’euros en2014
José Luis Duran
Ancien Président du Groupe Carrefour
entre 2005 et 2008
L
e 28 août 1999, Georges Plassat, actuel PDG du
Groupe Carrefour et DG Espagne à l’époque, est
le premier à m’informer du rapprochement
Carrefour/Promodès.
Les deux artisans de l’opération, Daniel Bernard
et Paul-Louis Halley, annoncent le 30 août cet accord
inattendu entre deux icônes de la distribution fran-
çaise. Je rends hommage à ces
deux hommes. Reconnus et
admirés par leurs pairs, ils ont
toujours défendu les valeurs du
respect, de l’exemplarité et de
l’audace.
Lemondedesaffairesapplauditla
naissance de ce géant français,
deuxième groupe mondial de
distribution alimentaire avec
500 000 collaborateurs et 15 000
points de vente dans plus de
20 pays.
Un travail titanesque s’engage
alors, l’ensemble des sujets est
passé au crible pour définir des
processusuniquesàdéployersurlenouvelensemble :
les assortiments, la politique d’achat et de négocia-
tion,lacommunication,lepricing,lamarquepropre,
les réseaux logistiques, etc.
« The show must go on » et les équipes des magasins
sont au service des clients. Les changements d’en-
seignesontexécutésdefaçonmillimétréeen24mois.
Fin2001,l’ensembledeshypermarchéssontbaptisés
« Carrefour », les supermarchés « Champion », les
magasins discount « Dia » et les cash & carry
« PromoCash ». Seule exception : les magasins de
proximité qui se déclinent sous « 8à8 », « Marché
Plus » et « Shopi ».
Un grand nombre d’analyses et d’articles de presse
ont été écrits sur un ton mitigé, voire négatif, chaque
fois que le sujet tournait autour des personnes et des
cultures.Soyonslucides:lemariageentredeséquipes
concurrentes, engagées et fières, ne se fait jamais de
façon ni fluide, ni rapide. Les
nouvelles organisations ont pris
leur rythme de croisière après
plusieurs mois, voire plusieurs
trimestres. La vraie vie, quoi !
Carrefourestaujourd’huiunvéri-
table groupe multi-canal qui
trouve son origine en 1999 (inté-
gration Carrefour/Promodès) :
hypermarchés, supermarchés,
magasins de proximité, magasins
discount, online… au service des
clients. La convergence d’en-
seignes exécutée entre 2006 et
2010 a renforcé la notoriété de la
marque.
Je me considère comme un grand privilégié d’avoir
fait partie de ce moment historique en tant que
Directeur Financier Espagne, puis d’avoir dirigé le
Groupe entre 2005 et 2008.
« lemariageentre
deséquipes
concurrentes,
engagéesetfières,
nesefaitjamaisde
façonnifluide,
nirapide. »
RETROSPECTIVE 40
22. 2000naissance de la
mdd auchanL’envol de l’oiseau
Effectifs:330700 collaborateursdans16pays
Chiffred’affaires :63,0milliardsd’eurossousenseignesen2014
Magasins:1750hypermarchésetsupermarchésintégrésfin2014
Vincent Mignot
Directeur Général Auchan France
L
ongtemps, les marques de distributeurs (MDD),
issues des années 70, n’offraient que peu
devaleurajoutéeau-delàduseulrapportqualité/
prix visé. D’abord sous marques « no-name »
(« Jardine » en conserves
de légumes, « Elea » pour les
produits laitiers, « Peaudouce »
en couches, etc.), elles étaient
majoritairement produites par
de grands industriels soucieux
d’optimiser leurs outils de
production.
Dès 1990, Auchan a souhaité
innover et enrichir ce rôle donné
aux MDD. Portage des attributs
de la marque, vecteur de fidélisa-
tion, vitrine d’innovation, preuve
de discount : le rôle dévolu aux
MDD s’est progressivement
enrichi. Dès 1996, les nouvelles
enseignes fusionnées avec
Auchan (Mammouth, Atac, Jumbo) signaient déjà
leurs MDD, tandis que les études clients montraient
un mécontentement vis-à-vis du manque de trans-
parence d’Auchan dans la signature de ses propres
produits. Émergeait ainsi la nécessité de faire porter
la signature Auchan aux produits de l’enseigne, pour
en faire un facteur de différenciation et de fréquen-
tation plus fort.
Le contexte industriel s’y prêtait avec l’émergence
de nombreux industriels désireux de se spécialiser
dans l’innovation en MDD. En 1997 naissait Auchan
Production, structure supervisant la conception de
produits sains, sûrs et savoureux, de la détection
du besoin client à la validation finale du cahier des
charges des recettes.
Les premiers produits à notre marque sont ainsi
sortis en 2000, avec des partis-pris forts : présence
sur les emballages de l’oiseau-symbole, coordon-
nées du service consommateurs, et visuels de « la
vie des gens » en cohérence avec
la marque Auchan. Puis vinrent
les marques affinitaires, plus
segmentantes, toutes sous la
bannière Auchan : Rik et Rok en
2001, Mmm ! en 2006, Mieux
Vivre en 2007, Sans Gluten et
Invitation au Voyage en 2009,
Baby en 2013, sans oublier la
marque économique Pouce dès
2002….
Les marques Auchan ont ainsi
accompagné les évolutions des
nouveaux besoins, pour passer
récemment dans l’ère de la
co-construction des recettes avec
desclients,sansoublierlesenga-
gements de l’enseigne comme
l’étiquetage en braille toujours incopié sur plus de
1 000 produits. Pour l’avenir, les produits à marque
Auchan seront toujours plus au cœur de notre projet
commercial. 2015 sera d’ailleurs une année de déve-
loppement de nouvelles marques internationales
non alimentaires.
Beaucoup de terrains restent à défricher à condition
de continuer à privilégier l’audace et l’innovation, et
cultiveruneécouteencoreplusfinedesgoûtsetplai-
sirs des consommateurs.
« Émergeaitainsila
nécessitédefaireporter
lasignatureAuchanaux
produitsdel’enseigne,
pourenfaireunfacteur
dedifférenciation
etdefréquentation
plusfort. »
RETROSPECTIVE 42
23. 2001amazon participe
au décollage
du e-commerce
en franceUn jeune acteur déjà bien en vue…
Lancementdusite:1995auxEtats-Unis,2000enFrance
Chiffred’affaires :55milliardsd’eurosdanslemonde,dontprèsd’1milliardenFrance
Effectifs:132600salariésdanslemonde,dont2500enFrance
Amazon.frenFrance:20millionsdevisiteursuniqueschaquemois,126millionsderéférences
Xavier Garambois
Vice-Président Amazon Europe
E
n 2000, le site Amazon.fr est né. « Le bon
moment » selon Jeff Bezos, le fondateur
d’Amazon, dans une interview au Figaro
puisque l’e-commerce est en plein essor à
cette époque dans l’Hexagone. Dès son lance-
ment, l’offre d’achat en ligne
d’Amazon devient accessible à
plus de 160 millions de franco-
phones, où qu’ils se trouvent. La
première réalité ? Développer à
partir du livre d’abord, une offre
en ligne de produits culturels qui
se veut exhaustive. La concur-
rence est déjà bien installée
notamment concernant le livre
mais certains acteurs le diront à
l’époque, l’arrivée d’un acteur de
référence doit permettre d’accélérer le décollage de
la vente en ligne en France. Finalement, comme
l’ont noté les observateurs, l’évolution des habitu-
des des consommateurs en France vers l’achat en
ligne a été plus longue que dans d’autres pays euro-
péens,àcommencerparl’AllemagneetleRoyaume-
Uni par exemple. Il n’en demeure pas moins qu’en
2001,unanaprèssonlancementenFrance,Amazon
est déjà bien installé dans le paysage économique
local. Avec d’autres acteurs, il va participer active-
ment au développement du e-commerce en France
dans les années suivantes.
En 2015, Amazon accueille chaque mois près de
20 millions de visiteurs uniques
surlesiteAmazon.fr,emploieplus
2 500 salariés permanents dans
son bureau parisien et dans
4 centresdedistributionetpropose
plus 126 millions de références
disponiblesdans29 boutiques. Tout
au long de ces 15 années d’exis-
tenceenFrance,Amazonn’aeu de
cesse de mettre le client en tête
de ses priorités ce qui a conduit à
de nombreuses innovations et au
lancement de nouveaux services. Aujourd’hui
comme au premier jour, cette obsession client est
partagée par l’ensemble des collaborateurs d’Ama-
zon en France.
« unanaprèsson
lancementenFrance,
Amazonestdéjàbien
installédanslepaysage
économiquelocal. »
RETROSPECTIVE 44
24. 2002l’arrivée de
L’EURO
fiduciaireTout ça pour ça ?
Dominique de Gramont
Délégué général Ilec 1993/2013
E
n raison de la rapidité voulue du phénomène,
l’introduction de l’euro fiduciaire fut d’abord
perçue comme un formidable défi logistique.
Que ce soit du côté des pouvoirs publics ou des
entreprises, le chantier paraissait pharaonique
par son ampleur, mais aussi atomique par le danger
que constituaient la production, l’entreposage, le
transport et la mise à disposition à l’instant « T » de
quantités de monnaie, telles que la perspective du «
casse du millénaire » faisait trembler ici ou là, de
plaisir ou de peur, c’est selon. Certaines réunions
interministérielles, Pierre Dac ou Pierre Desproges
ramenés parmi les vivants, en
eussent à coup sûr donné des
comptes rendus de nature à
former le socle marratif de la
culture fiduciaire européenne
dont le manque, en ce temps
d’euro triste, nous ruine
aujourd’hui, sans doute plus
encorequ’unéventueldéfautdela
Grèce. Car comment dit-on en
euros : « Avec cent briques t’as
plus rien maintenant » ?
Comme toutefois il est dans la
mémoire génétique de l’inten-
dance de suivre, et rien de plus,
les logisticiens eurent tôt fait de
s’effacer devant les véritables penseurs. Parmi les
impétrants, les macro économistes, véritables
maîtres de l’éon nouveau, déclamèrent le récit du
retour de l’inflation. Point n’était besoin, en effet,
d’être sorti major de l’ESSEC pour imaginer que :
- dès lors que 1 = 6,5596 F, ou encore 1 F = 0,1524€
- il y aurait des ronds à gagner avec les arrondis. Ce
que confirma mollement la suite de l’histoire.
Les intellectuels de la sphère marchande, marque-
teurs et autres gourous entonnèrent alors le grand air
du prix psychologique et de la perte des repères,
devenus dans l’eurolande aussi introuvables que la
cassette d’Arpagon. Pour le coup c’est Deleuze, l’em-
pereurdeladéconstruction,qu’ileûtfalluconvoquer.
Et puis l’euro prit place sans heurt, en temps et en
heure, dans les distributeurs, et rien ne se passa.
Pas plus de crise de la consommation ou de forte
dérive des prix, mis à part celui du petit noir, que de
déconnection majeure en l’an 2000. Rien à signaler.
Alors « Tout ça pour ça ? ». Non, pas tout à fait, au
moins dans le monde de la
consommation. Chacun sait que,
depuis quelques années, dans cet
univers, le coût bas dans l’offre se
tasse : celle des premiers prix, du
maxi-discompte ou des marques
d’enseigne.Sansdouteunphéno-
mène aussi paradoxal, aussi
massif, ne tient-il pas à une seule
cause. Certains cependant y
verront peut-être, entre autres,
l’effet de l’écrasement optique
des prix opéré par la généralisa-
tion de l’affichage des valeurs en
euros. Ce qu’un véritable esprit,
libre et supérieur, tanguero
celeste qui murmurait à l’oreille des chiffres, avait
appelé un « coup d’accordéon ». En sorte que si
Beethoven a composé la musique de l’hymne euro-
péen, c’est à Yvette Horner qu’aurait dû revenir
l’honneur d’enjouer la planète euro qui se languit
aujourd’hui. »
« Lesintellectuelsde
lasphèremarchande,
marqueteursetautres
gourousentonnèrent
alorslegrandairdu
prixpsychologiqueetde
lapertedesrepères. »
RETROSPECTIVE 46
Premièredated’usage:1999(pourlestransactionsfinancièreseuropéennes).
Premièremiseencirculation:1er
janvier2002(soussaformefiduciaire).
Zoneeuro: 19Étatsmembresdel'Unioneuropéenne.
L’euro: 2e
monnaieaumondepourlemontantdestransactions,derrièreledollaraméricain.
25. 2003nouvel élan
pour
KUSMI TEALe pari du luxe
Jean-Noël Kapferer
Conseiller du Président de l’INSEEC,
co-auteur de LUXE OBLIGE
P
eu de gens connaissaient Kusmi Tea avant
2003, même parmi les passants de l’Avenue
Niel à Paris qui ne remarquaient même plus
l’unique boutique de la marque très mal en
point. Mais Sylvain et
Claude Orebi virent tout de suite
l’énorme potentiel de cette
marque pour qui saurait la relan-
cer en séduisant les consomma-
trices urbaines et bobos
d’aujourd’hui. Ils rachetèrent la
marque et la développèrent en
respectant parfaitement une
stratégie de luxe. Certes Kusmi
Tea n’est pas une marque de luxe,
au même titre que Nespresso
non plus. Mais tous deux suivent
les canons de la stratégie de luxe.
Quelles furent les décisions
majeures qui ont fait de Kusmi
tea un succès ? Luxe Oblige !
- Respecter l’héritage : la marque
est née à St Petersbourg en 1867,
maison familiale de Pavel
Michailovitch Kousmichoff. De fait, de nombreux
produits renvoient religieusement cet héritage :
Prince Wladimir, Anastasia, Saint Petersbourg,
dont les recettes sont gardées secrètes depuis plus
d’un siècle.
- Transgresser les codes pour être de son temps :
Kusmi Tea, tel un produit de beauté, lance dès 1967
une innovation disruptive, le mélange Detox, deve-
nu la première référence de la marque, devant
Prince Wladimir. Suivirent BB Detox et Boost qui -
loin des notions génériques habituelles (Thé de
Darjeeling) - installent de nouveaux concepts.
- Investir dans le packaging pour faire de chaque
produit une expérience et surtout capter le marché
du petit cadeau fait à soi-même ou à ses proches.
- Lancer la marque par une
communication discrète, très
socialement sélective : organiser
des évènements pour les seuls
VIP et en même temps utiliser le
levier des blogueuses les plus
influentes, invitées à des soirées
privées. Plus tard en 2013 vien-
dra la publicité TV qui mettra en
scène de façon très créative la
beauté des mélanges.
- Construire une distribution
sélective, ce qui n’empêche pas
d’être dans le flux du passage
GareStLazareouruedesRosiers,
mais aussi d’ouvrir un lieu expé-
rientiel aux Champs Elysées
(CaféKousmichoff).Sansoublier
l’e-commerce.
- Travailler les partenariats et le
co-branding (avec Kiehl’s, la Fashion week, le salon
Who’sNext)etselieraumondedelamode(produits
signés JP Gaultier)
C’est ainsi que partie de rien, prenant son temps, la
marque atteint 50 millions de chiffre d’affaires en
2014 et s’internationalise dans 30 pays.
« SylvainetClaude
Orebivirenttoutde
suitel’énormepotentiel
decettemarque
pourquisauraitla
relancerenséduisant
lesconsommatrices
urbainesetbobos
d’aujourd’hui. »
RETROSPECTIVE 48
CréationdelamaisondethéP.M.Kousmichoff: 1867àStPetersbourg
CréationdelamaisonKusmi-Tea: 1917àParis.
Chiffred’affaires:50millionsd’eurosen2014.
Effectifs: 220salariésen2013.
26. 2004LACAMPAGNE
DOVE
EVOLUTIONFaire rayonner la beauté intérieure
des femmes
Groupe:Unilever
Naissance :CréationdelamarqueDoveen1957
Marque:Dove,5gammesdeproduitspourfemme,etcréationd’unegammepourhommeen2008
Natalie Rastoin
Directeur Général Ogilvy France
et Président OgilvyRed Conseil
L
ongtemps Ogilvy a fait témoigner pour Dove des
femmes directes, spontanées et refusant les
artifices, parlant simplement de leur apprécia-
tion des bénéfices du fameux quart de crème
hydratante. Car Dove est né
d’une véritable innovation
produit : le seul savon de beauté
qui n’assèche pas la peau.
Mais au fil du temps, ces témoi-
gnages perdent de leur impact et
de leur capacité d’implication
face à la montée en puissance
d’une image de la beauté incar-
née par des égéries parfaites,
rendues encore plus parfaites
grâce aux avancées technolo-
giques de traitement de l’image :
c’est l’effet Photoshop !
En 2004, Ogilvy propose de
redémontrer à nouveau l’actuali-
té du point de vue sur la beauté de
Dove : faire rayonner la beauté
personnelle de chaque femme et non pas se plier,
souvent sans espoir, aux dictats des canons de beau-
té reflétés dans les médias.
L’agence lance une étude globale sur la perception
que les femmes ont de leur beauté et découvre le
manque d’estime de soi choquant de la très grande
majorité d’entre elles. Ainsi en France, seules 1%
des femmes se sentent à l’aise d’utiliser le mot «
belle » pour se décrire. C’est de la révolte contre ce
constat qu’est né « Evolution », qui démonte le
piège de l’irréalité de l’idéal de beauté proposé aux
femmes. Le film montre les coulisses du rêve : la
transformation d’une femme
authentiquement jolie en une
créature artificielle dont toutes
les qualités sont augmentées
pour en faire une image de beau-
té physiquement inatteignable.
Posté sur le Net au Canada,
« volution » rencontre un écho
immédiat et rapidement global
(le film est visionné plus de 90
millions de fois sur Internet) qui
montre que Dove touche juste : il
est temps qu’une marque
soutienne les femmes dans leur
estime de soi, et permette à
chacune de se sentir plus belle
pour se réaliser pleinement.
Dove continue depuis à nourrir ce dialogue entamé
avec les femmes, avec la création d’un Fonds Dove
Pour L’Estime de Soi, mais aussi en continuant à
faire parler d’elles avec des films choc, comme par
exemple « Sketches » en 2013.
«Evolutionrencontre
unéchoimmédiatet
rapidementglobal
quimontrequeDove
touchejuste:ilest
tempsqu’unemarque
soutiennelesfemmes
dansleurestimedesoi. »
RETROSPECTIVE 50
27. 2005nespresso
what else ?L’histoire d’un casting réussi…
Création:1986
Société:FilialedugroupeNestlé,présencedans62pays,plusde10500employésdansleMonde
Marque:3typesd’offres(café,machines,services),4millionsdefanssurFacebook
Richard Girardot
Président Directeur Général Nestlé
France (ancien Directeur Général de
Nestlé Nespresso International)
C
rééeen1986,lamarqueNespressofêteraégale-
ment bientôt ses 30 ans. L’année 2005 marque
la fin d’un cycle de son histoire : Nespresso est
bien installée en tant que marque mondiale
grâce à une politique d’innovation et d’inves-
tissements continue et cohérente. Chaque année, de
nouvelles machines sont lancées, la collection des
grands crus s’agrandit tout comme la communauté
des membres du club Nespresso.
Boutiques prestigieuses, séries
limitées, service performant et
programme AAA pour une qualité
durable du café viennent parfaire
une expérience gustative d’un
expresso unique. Il est loin le
temps où l’on demande un simple
café. Ristretto, Arpeggio Capric-
cio sont déjà entrés dans nos vies.
Mais la concurrence reste rude,
TassimoetSenseoontalignéleurs
investissements media sur ceux
de Nespresso, les trois marques
oscillant entre 1,2 et 1,4 millions
d’euros chacune. Nespresso
décide alors d’affirmer son posi-
tionnement haut de gamme en
s’appuyant sur deux événements majeurs : le déve-
loppementd’unenouvellemachine«LeCube »dont
le prix sera 70% plus élevé que celui de sa grande
sœur Essenza et la recherche d’une personnalité qui
puisse incarner la marque mondialement.
Avec l’appui de son agence Mc Cann, Nespresso
éprouve le besoin de se choisir un « ambassadeur
international » et est organisé en 2005 un grand
casting pour déterminer qui pourrait représenter le
raffinement et la subtilité de la marque sans pour
autant la vampiriser. On parle de Monica Bellucci,
Sharon Stone, Brad Pitt. Une vaste étude est menée
avec le cabinet Ipsos. 600 personnes sont interro-
gées, pour moitié membres du Club Nespresso et
pour moitié prospects. Le terrain a lieu en France,
en Suisse et aux Etats-Unis et une personnalité
émerge largement : George Clooney. « Who else ? »
pensons-nous aujourd’hui. Faire
valoir de la marque plus qu’am-
bassadeur, George Clooney
accepte avec élégance et humour
de s’effacer au profit de la vraie
star : un Nespresso. La première
campagne sera lancée en 2006 «
équilibré, un corps puissant,
subtil et agréable, profond et
sensuel, avec une forte person-
nalité riche…très riche. Vous
parlez de Nespresso ? What else ?
» La saga est lancée. Le résultat
est immédiat. Des scores d’agré-
ment qui se hissent à 85%. +28%
de nouveaux « clubs members »
recrutés en France fin 2006,
ainsi qu’une croissance immé-
diate du business qui se confirmera les années
suivantes avec une saga donnant rendez-vous aux
amoureux du « Café Corps et Ame » !...
« Fairevaloirde
lamarqueplus
qu’ambassadeur,George
Clooneyaccepteavec
éléganceethumour
des’effacerauprofit
delavraiestar:un
Nespresso. »
RETROSPECTIVE 52
28. 2006qui est le
moins cher ?Réponse sur www.quiestlemoinscher.com
E.Leclerc:crééeen1949,plusde590magasinsenFrance,94900salariés
Chiffred’affaires :45,7milliardsd’eurosen2014(+0,2 %)dont37milliardsd’euros
horscarburant(+1,4%)
12enseignes:l’Auto,Drive,Brico,Jardi,Voyages,Optique,Manègeàbijoux,Espaceculturel…
Michel Edouard Leclerc
D
ébut 2000, assailli par la surenchère des
promotions et les discours de distributeurs
revendiquant tous d’être les moins chers, le
consommateur était égaré.
E.Leclerc, qui avait plus de 50 ans de prix bas à
sonactif,devaitimpérativementtrouverdesmoyens
nouveaux d’illustrer sa différence.
Il n’était pas possible de publier les
relevés de prix des panélistes indé-
pendants puisque leurs clients (les
distributeurs) s’y opposaient…
même s’ils s’en servaient quoti-
diennement pour étalonner leur
performance.
Ainsi est né « quiestlemoinscher.
com ». Il y en a eu, des obstacles ,
pour tenter de nous faire renoncer. Des pressions
énormes ont été exercées sur les sociétés d’études,
au point qu’il nous a fallu recourir à un cabinet
portugais pour faire les relevés de prix !
Le plus drôle, c’est que Carrefour, farouchement
opposé à nos publicités comparatives (il en avait
pourtant été le précurseur !), était au même moment
en train de lancer en Colombie… un site similaire
au nôtre !
Après plusieurs procès qui ont permis d’affiner
l’outil, l’aventure pouvait enfin commencer.
Dix ans après, « quiestlemoinscher.com » s’est
installédanslequotidiendebeaucoupdeFrançais,a
connu des déclinaisons thématiques (sesoigner-
moinscher.com, lebiomoinscher.com…) et régio-
nales (buscaelmasbarato.com en Espagne,
kilemoinscher.re à La Réunion), tout en s’adaptant
aux innovations technologiques (la borne en maga-
sin, l’appli pour smartphone).
Le drive a amplifié le phénomène, permettant à de
jeunes start up de créer (à moindre frais) leurs
propres comparateurs (qui ont mis
en avant eux aussi notre perfor-
mance prix !).
Pendant ce temps, nous avons fait
évoluer nos publicités. On ne
compare plus les produits, désor-
mais on invite simplement le
consommateur à utiliser le compa-
rateur.
Concurrents, fédérations d’indus-
triels, syndicats d’agriculteurs… tous se sont ligués
pour faire la peau à des comparateurs qui devinrent
l’objet de réunions spéciales au ministère de l’agri-
culture, à Bercy et à l’Assemblée nationale. Jusqu’au
Premierministrefrançaisquifutsommédeprendre
position sur le sujet !
Mais en 2015, il était vain de croire que les consom-
mateurs français renonceraient à leur droit à la
comparaison et à une information transparente en
matière de prix !
« Ilyenaeu,des
obstacles,pour
tenterdenousfaire
renoncer. »
RETROSPECTIVE 54
29. 2007LANCEMENTDE
L’iphoneLe « hub » digital, Alpha et Oméga
du processus d’achat
Développeur:Apple
Fabricant :Foxconn(sous-traitance)
Génération:8e
(iPhone6etiPhone6Plus),
PerformanceBusiness :700millionsd’iPhonevendusdanslemonde
L
e lancement de l’iPhone en 2007 fut une révo-
lution : le grand public découvrait le téléphone
intelligent. L’apogée de cette révolution a sans
doute été la dernière édition du Mobile World
Congress, où les Health Trackers, montres,
voitures et autres objets connectés ont été les vraies
« stars » du salon, et où la téléphonie mobile en
elle-même n’intéressait plus personne…
Ce renversement n’est pas surprenant. Apple n’est
en réalité pas un fabricant de téléphones mais un
fournisseur d’écosystème. En regardant l’usage de
notre iPhone, nous constatons
que seule une infime partie de
notre batterie est consacrée à
nos conversations télépho-
niques. Le reste est avant tout
dédié à Internet ou aux objets
connectés.
L’iPhone est en effet la porte
sur un écosystème de produits
et c’est ce qui nous y rend aussi
accro... iPad, iStore, iCloud
sont autant de barreaux que
nous rajoutons à notre prison
dorée : plus l’écosystème est
riche, plus il est difficile d’en sortir. Et l’annonce du
lancement du Homekit, plateforme destinée à
rendre nos foyers « intelligents », n’est qu’un pas
de plus dans cette direction.
L’iPhone est aussi un cheval de Troie pour les
commerces classiques. Dès son lancement, via
iTunes et l’App Store, c’est une plateforme d’achat à
part entière. Et c’est depuis quelques temps un
moyen de paiement aussi pour les commerces clas-
siques grâce à Square ou Apple Pay.
Quiauraitditen2007qu’onenseraitlàaujourd’hui ?
Mais à présent, l’iPhone contrôle toute la chaîne : de
la recherche d’information sur des produits à leur
acquisition, c’est l’alpha et l’oméga du processus
d’achat. Ce « hub » change dorénavant la donne
dans le monde de la distribution et de la consomma-
tion et met en péril les acteurs classiques. Comment
concurrencer un magasin/porte-
feuille tout le temps dans notre
poche, auquel nous sommes tant
attachés ?
Après la distribution, notre porte-
feuille, ou même notre foyer,
Apple s’attaque aux vêtements
connectés avec l’Apple Watch :
toujours plus proches de nous, et
donc toujours plus pertinents.
L’iPhone, en se plaçant au cœur de
cette logique, bénéficie de poten-
tialités infinies…
« Applen’esten
réalitépasun
fabricantde
téléphonesmais
unfournisseur
d’ écosystème. »
RETROSPECTIVE 56
Albane Gaubert, Étudiante ESSEC Grande
École, promo 29 de la Chaire Grande Consommation.
Nicolas Glady, Accenture Strategic Business
Analytics Chair Holder, Center for Digital Business
Director, ESSEC Business School.
30. 2008lancement de
FACEBOOK
en france…and this journey is 1% finished…
PDG:MarkZuckerberg
Lancement :4février2004àHarvard,puisréseauaccessibleàtousen2006
PerformanceBusiness:1,4milliardd’utilisateursactifs.2e
sitewebleplusconsulté
aumondeaprèsGoogle.
Laurent Solly
Directeur Général Facebook France
E
n octobre 2008, Facebook s’installe en France.
À cette époque, 4 millions de Français visitent la
plateforme tous les mois. Ils n’étaient que
530 000 un an auparavant. Entretemps, Face-
book avait lancé sa version en langue française.
7 ans après, en janvier 2015, ce sont plus d’1,39
milliards d’utilisateurs à travers le monde qui l’uti-
lisent tous les mois, dont 29 millions en France.
Facebook est devenue désormais une application
majoritairement mobile : 85 % des utilisateurs se
connectent via leur téléphone et consultent 14 fois
parjourenmoyenneleur« News-
Feed ». Pour 90 % d’entre eux,
c’est un des rituels du matin,
comme se laver les dents et
prendre son café.
Le « Newsfeed » est un fil d’ac-
tualité intégralement personna-
lisé. C’est, en fait, le magazine
quotidien qui n’appartient qu’à
vous. Vous y découvrez les
nouvelles de votre meilleur ami,
comme vous participez aux
grands mouvements populaires qui font vibrer la
planète. Ainsi, 66 millions de personnes ont
commenté le match Allemagne - Argentine, finale
de la coupe du monde de football en juillet 2014,
générant plus de 200 millions d’interactions.
Fondée en 2004 par Mark Zuckerberg à Harvard, la
mission de la plateforme Facebook est de rendre le
monde plus ouvert et connecté en permettant à
chacun de rentrer en contact avec les gens et les
sujets qu’il aime.
Et pour les marques, Facebook permet alors une
connexion directe avec les consommateurs. Le
réseau social a introduit une révolution majeure
dans leur façon d’échanger avec leurs audiences : le
temps du « one size fits all » laisse désormais la
place au marketing personnalisé à grande échelle.
Une même marque parle maintenant différemment
à Marie, 35 ans, fan de tennis et de nourriture
faite-maison et à Charles, 28 ans, grand amateur de
football et friand de snacking.
Au cours de l’été 2014, Facebook continue de révo-
lutionnerlemarketing,enintroduisantsonnouveau
produit vidéo, qui se lance en auto-play. Cette fonc-
tionnalité a permis à 440 millions de personnes de
découvrir le « Ice Bucket
Challenge » et de réaliser plus de
17 millions de vidéos. En 30
jours, c’est ainsi 100 M$ qui ont
été récoltés au profit de la lutte
contre la maladie de Charcot.
Soit 36 fois plus que l’année
précédente.
Cette innovation bénéficie égale-
ment aux marques : Perrier, en
France, a pu toucher, en une
seule journée, 6,7 millions de
Français de 18 à 49 ans, soit 25 % de la cible. Ce sont
plus de 3,3 millions de vidéos vues qui ont permis
d’engager ces consommateurs avec l’histoire de la
marque.
« Move Fast » est l’un des 5 crédos de l’entreprise,
qui lui a permis de passer d’une simple page web de
profil destinée aux étudiants américains au premier
réseau social mondial en moins de dix ans. Mais,
comme le rappelle son fondateur toujours aux
manettes, « this journey is 1 % finished ».
letempsdu«one
sizefitsall»laisse
désormaislaplaceau
marketingpersonnalisé
àgrandeéchelle.
RETROSPECTIVE 58
31. 2009LACAMPAGNE
EVIAN rOLLER
BABIESEau, crise, couches et patins à roulettes
Sociétéd’exploitation:Société Anonyme des Eaux Minérales d’Evian (SAEME),
filiale du groupe Danone
Evian :Rachetée par BSN (futur Danone) en 1970
Productionannuelle:1,5 milliard de litres, 40 % des ventes se font en France
Michael Aïdan
Head of Digital & VP Digital Brand
Platforms, Groupe Danone
L
e 3 juillet 2009, 93 bébés en patins à roulettes
débarquent sur la toile pour y tisser une choré-
graphiejubilatoiresurunairrapdesannées80.
En 24 heures, un bout de chou tapant du pied en
rythme adossé à une « boom box » déclenche
une vague de clics sans précédent. Près des deux
tiers des gens qui visionnent le film le partagent
avec des amis alors que Facebook et les réseaux
sociaux ne sont qu’embryonnaires. Le phénomène
viral est en marche.
La barre du million de vues est franchie quasi
instantanément, puis celle des 2,
5,10,25,45;letitre de campagne
la plus vue depuis la création
d’internet permet aux Rollerba-
bies d’entrer au Guinness Book
des Records. Plus le nombre de
vues « on-line » augmente, plus
les médias « offline » s’en font
l’écho pour annoncer « la sensa-
tion du web ». En l’espace d’un
week-end, ABC, CBS, NBC et Fox
News la diffusent lors de leur
morning show. NHK et Fuji TV
au Japon, suivis de la plupart des
grandes chaînes de TV
mondiales, leur emboitent le
pas. Alimenté par ce supplément
debuzzetparlestrèsnombreuses
versions créées par les inter-
nautes, le compteur YouTube ne
ralentit pas ce qui vaudra à la campagne le titre de
« never ending campaign ».
Le paradoxe ultime est que cette campagne soit
sortie en plein milieu d’une forte crise qui touche de
plein fouet le secteur des eaux minérales. Et que
l’ensemble du secteur, Évian compris, se soit replié
dans les « messages fondamentaux » de l’hydrata-
tion pour faire revenir les consommateurs à la caté-
gorie. En vain. Ces messages qui parlent au cerveau
et non au cœur ne créent pas l’envie et ne différen-
cient pas les eaux en bouteille de celle qui coule du
robinet. Et c’est là que la magie des bébés roulants et
la fluidité d’internet changent le cours des événe-
ments. Et ce dans le monde entier même si les bébés
Évian dans la piscine de 1998 n’étaient qu’hexago-
naux.
La saga des bébés Évian prend
une nouvelle ampleur. À cette
campagne succèdera celle des
t-shirts « Baby Inside » ; puis en
2013, un nouvel opus, « Baby &
Me », dans lequel les adultes se
regardent dans un miroir pour
voir apparaître les bébés qu’ils
étaient. Un nouveau record est
battu, 100 millions de vues en
40 jours et ce avec une part de
média payant de moins de 10%...
une nouvelle preuve, s’il en était
besoin, qu’à l’ère d’internet et
des réseaux sociaux, le contenu
est roi. Et que le remède anti-
crise pour une marque se situe
bien dans l’hémisphère droit du
cerveau de son audience.
« Prèsdesdeuxtiers
desgensquivisionnent
lefilmlepartagent
avecdesamisalors
queFacebooketles
réseauxsociauxnesont
qu’embryonnaires.
Lephénomèneviralest
enmarche. »
RETROSPECTIVE 60
32. 2010nouvelle
identité
packaging
monoprixDe l’audace pour un quotidien
plus pétillant
Chiffred’affaires:4,3 milliards d’euros en 2013
Actionnaire :Groupe Casino à 100 %
Fréquentation:800 000 clients chaque jour. Plus de 500 magasins dans plus de 200 villes en France
Effectif: 21 000 collaborateurs
Stéphane Maquaire
Président du Groupe Monoprix
L
’engagement de Monoprix en faveur du beau et
du bon, ainsi que sa démarche permanente de
valorisation du quotidien, forment le socle de
son identité de marque. Au travers du renou-
vellement complet de son identité, l’enseigne a
souhaité réaffirmer son posi-
tionnement, son point de vue
unique sur la vie quotidienne et
par conséquent, sur les produits
detouslesjours.Lamarquecœur
de gamme de l’enseigne se devait
d’être l’étendard de Monoprix en
prolongeant ses prises de parole.
Ainsi est rapidement née l’idée
d’étendre l’identité publicitaire
de Monoprix à son packaging,
faisant du produit un véritable
média. Au-delà de sa fonction
première, permettre au produit d’être reconnu,
désiré, acheté, le packaging est un moyen formi-
dable de prolonger la relation en dehors du lieu de
vente, de véhiculer les valeurs de la marque et de
dialoguer avec les clients.
Quand Monoprix a décidé de renouveler sa marque
cœur de gamme en 2010, c’est dans cette optique
que la réflexion s’est engagée. Comment faire de
cette marque propre le fer de lance de notre
promesse ? Comment se démarquer et exprimer
notre positionnement ? Comment rendre beaux ces
produits du quotidien ? Comment prolonger la rela-
tion avec nos clients chez eux, dans leur vie quoti-
dienne ?
Ce sont 2 000 produits qui ont ainsi été individuel-
lement pensés comme des moyens de communica-
tion, dans les codes de nos
campagnes. Les 3 ingrédients de
ce succès ? La clarté de la propo-
sition à travers les mots en
majeur qui valorisent l’aspérité
de la recette ; l’esthétisme du
packaging, inspiré du pop art,
dont les bandes de couleurs
expriment le goût et la qualité
des produits ; la relation tissée
avec les consommateurs grâce à
une petite phrase d’esprit
présente sur chaque produit, qui
fait sourire et donne envie de consommer.
Ces emballages à la fois simples et en rupture totale
avec tous les codes existants permettent de rendre le
produit emblématique de l’état d’esprit de Mono-
prix : l’audace au service de ses clients, pour un
quotidien plus pétillant et plus surprenant.
« lepackagingest
unmoyenformidable
deprolongerla
relationendehors
dulieudevente. »
RETROSPECTIVE 62
33. 2011lancement
d’aquatubeLa fin des rouleaux vides qui traînent !
Société:SCA (Svenska Cellulosa Aktiebolaget)
Lancement :Premier papier toilette Lotus en 1966
PerformanceBusiness: Marque leader en papier toilette avec 37 % de part de marché valeur,
achetée par plus de 40 % des foyers français
Perrine Flipo
Lotus Brand Manager
L
es sujets de dispute au sein d’un couple peuvent
être nombreux et variés… et quand on peut en
éviter certains, c’est tout aussi bien ! Mais quel
est le sujet de chamailleries dont le théâtre
principal se joue aux toilettes ? C’est évidem-
ment le rouleau de papier toilette vide délais-
sé négligemment dans un petit coin (parfois même
pendant plusieurs jours), puisqu’un consomma-
teur sur deux déclare que le tube
est un fort inconvénient. Mais
ne vous énervez pas, Mesdames,
car, en effet, 82 % des femmes
déclarent que ce sont elles qui
le plus souvent remplacent le
tube… Et les hommes, qu’en
font-ils ? 40 % de ceux qui le
laissent à l’abandon déclarent le
faire… par paresse !
Partant de ce constat, la marque
Lotus s’est interrogée sur une
solution intelligente qui pour-
rait améliorer le quotidien des
couples français en les soula-
geant de cette corvée. Après 5 ans
de recherches et de développe-
ment, Lotus a donc mis au point
une technologie unique et a lancé
en 2011 l’innovation Aquatube.
Évidemment comme la plupart des tubes de papier
toilette, Aquatube est recyclable, compostable et
biodégradable… Mais parce qu’il est fait de la même
matière que le papier toilette, il peut en plus se jeter
dans les toilettes : une fois la chasse d’eau tirée, il
se dissout comme le papier toilette. Il n’y a aucun
risque de boucher les canalisations… et le tout avec
un impact neutre sur l’environnement. C’est donc
une vraie petite révolution dans les toilettes des
Français!
Pour accompagner le lancement, il était fondamen-
tal de faire connaître l’innovation et de rassurer les
utilisateurs sur l’efficacité d’Aquatube et l’absence
de risques pour les canalisations. C’est donc un plan
de soutien d’envergure que Lotus
a mis en place. Cela commence
par une saga TV dédiée qui laisse
parler les femmes (toujours avec
humour) sur les bénéfices que
l’innovation leur a apportée…
mais pas seulement, car il y a eu
une avalanche de moyens pour
accompagner ce lancement :
échantillons, communication
digitale, RP, démonstrations en
magasins, promotions… Tous
les moyens ont été mis en œuvre
pour faire de cette innovation un
incontournable… et cela fonc-
tionne puisque, 4 ans après son
lancement, Aquatube est connu
de 90% des Français. Aquatube a
permis à Lotus de recruter et de
fidéliser de nouveaux consom-
mateurs à la marque… et d’en faire le succès qu’on
lui connaît aujourd’hui.
« Après5ansde
recherchesetde
développement,Lotus
adoncmisaupoint
unetechnologie
uniqueetalancé
en2011l’innovation
Aquatube. »
RETROSPECTIVE 64
34. 2012lancement du
forfait
free à 2€
Un des moments-clés de la
révolution du mobile en France
FreeMobile:créée en 2007, 1 638 salariés, 1,6 milliard d’euros de chiffre d’affaires,
9,6 millions d’abonnés
Société-mère :iliad
Jean-Marc Tassetto
Ancien DG Google France, ancien
DG Grand Public SFR, co-fondateur
Coorpacademy
A
u fond, la révolution du mobile, comme toutes
les grandes révolutions techniques ou indus-
trielles, s’est nourrie de moments-clés. Ce
sont autant de dates pivot de l’appropriation
massiveetrapidedumobileparlesindividuset
les entreprises.
Le lancement de l’offre Free mobile à 2 € en janvier
2012 fait définitivement partie de
ces moments et de l’histoire de
cetteindustriedansnotrepays.Et
les économistes nous éclaireront
peut-être un jour enfin quant aux
dégâts collatéraux réels sur
l’emploi, et la vitesse de déploie-
ment des réseaux à très haut-
débit fixe (fibre) et mobile (4G)
d’une régulation européenne très
consumériste et déflationniste.
Une revue rapide de ces dates-
clés nous permet de mesurer la
vitesse à laquelle cette révolution
du mobile s’est propagée avec un
équipement massif des individus
et entreprises et un taux d’équi-
pement souvent supérieur à...
100% dans notre pays. Pour bien comprendre cette
vitesse à l’échelle des deux décennies qui viennent de
s’écouler, il vaut mieux être familier des lois de
Metcalfe et de Moore!
Parmi toutes ces dates, la plus importante est proba-
blement celle de l’internet devenu mobile, comme
Steve Jobs l’a proposé en lançant l’iPhone en juin
2007. Naguère, nous devions nous familiariser avec
l’internet mobile inventé par les opérateurs via leurs
portails ; iMode, OrangeWorld, Vodafone live ont
sans aucun doute préparé l’écosystème des construc-
teurs, des opérateurs, des éditeurs de contenus et des
clients, à l’arrivée du véritable internet sur le mobile.
C’était au fond un premier galop d’essai à l’échelle de
la planète. L’ interopérabilité des SMS en 1999, le
lancement par SFR de la 3G en 2004, les grands
mouvements de la convergence fixe et mobile dès
2005... autant de moments intenses et structurants.
Le téléphone mobile est ainsi
définitivement devenu un termi-
nal personnel, préfiguration des
objets connectés qui vont révolu-
tionner les années à venir. La
réinvention ou la transformation
des acteurs économiques autour
du mobile (Mobilefirst)estdeve-
nu le mantra des grands chantiers
detransformation:lessociétésou
organisations qui aujourd’hui ne
disposent pas de version mobile
de leur site ou d’application sont
en grand danger de disparaître du
champ d’évocation de leurs
clients ou stakeholders-clés.
Mais, au fond, ce qui m’a frappé
dans cette révolution mobile qui
aura marqué nos sociétés, c’est la vitesse à laquelle
tout s’est déroulé. Et cette vitesse n’est rien à côté de
celledelarévolutiondigitalequel’ondécritcommela
3e
révolution industrielle de l’histoire de l’humanité.
C’est pourquoi nous avons beaucoup de chance de
vivre à une époque de transformations majeures, où
de nouveaux mots-clés émergent : horizontal, colla-
boratif, fin des silos. Avec un monde nouveau à envi-
sager.
« Mais,aufond,
cequim’aura
frappédanscette
révolutionmobile,
c’estlavitesseà
laquelletouts’est
déroulé. »
RETROSPECTIVE 66
35. 2013tweet
actifry...ou comment le petit oiseau fait
s’envoler les ventes
Bertrand Neuschwander
Directeur Général Délégué Groupe SEB
L
e 17 février 2013 sur Twitter, Oprah Winfrey, la
célèbre présentatrice américaine suivie par
plus de 16 millions d’abonnés, poste un témoi-
gnage enthousiaste sur Actifry :
« Cette machine T-fal Actifry a changé ma vie.
Et personne ne me paie pour dire ça. »
Ce commentaire avantageux accompagné d’une
photo de la célébrité tenant la
friteuse dans les bras, a largement
été repris et traité dans de
nombreux médias et réseaux
sociaux.
Dans les jours qui suivirent, les
recherches concernant Actifry sur
Google furent multipliées par 10.
L’impact du tweet s’est ressenti en
deux vagues aux États-Unis. Dans
un premier temps, les distribu-
teurs du Groupe ont enregistré un
bond de 17 % des ventes à leurs
clients. Dans un second temps, nos équipes ont été
invitées à participer au très populaire show Good
Morning America et les ventes en ont ponctuelle-
ment été dynamisées. Pour les fêtes de Noël de la
même année, la star américaine mit à nouveau l’Ac-
tifry à l’honneur sur son site internet en la classant
en 7e
position sur sa liste d’objets favoris de 2013.
En France, ce tweet a entraîné une spectaculaire
hausse de l’action SEB en Bourse : en quelques jours
l’action du Groupe prenait plus de 4 %, soit environ
100 millions d’euros !
L’impact en France fut tel qu’Arnaud Montebourg,
ministre du Redressement productif et chantre du
« Made in France », commenta lui
aussi sur Twitter : « La friteuse
sans huile Actifry vantée par Oprah
Winfrey est une innovation Made
in France de Seb, fabriquée à
Is-sur-Tille (21) en Bourgogne. »
La friteuse Actifry s’est déjà
vendue à plus de 6 millions
d’exemplaires et reste un produit
vedette pour le Groupe SEB.
«Cettemachine
T-falActifry
achangémavie.
Etpersonneneme
paiepourdireça. »
RETROSPECTIVE 68
GroupeSEB: 1 300 personnes dans le monde
Chiffred’affaires 4,2 milliards d’euros en 2013
VentesActifry:+ 6 millions d’unités
ImpactduTweet: +17% sur les ventes aux Etats-Unis, +4% sur l’action SEB
36. 2014loi
hamonRedonner du pouvoir au consommateur
Vote:17 mars 2014
ParutionauJournalofficiel :18 mars 2014
deuxpriorités:
-Renforcer la protection des consommateurs
- Renforcer la transparence dans la négociation commerciale et rééquilibrer les relations commerciales entre
fournisseurs et distributeurs (place des CGV dans la négociation, formalisme de la convention unique, régime des prix
et conditions de vente, encadrement des délais de paiement, nouveau régime de sanction)
Benoît Hamon
Ministre chargé de la Consommation et de l’Économie
sociale et solidaire entre 2012 et 2014
Député des Yvelines
Membre de la Commission des Affaires étrangères
E
n prenant mes fonctions de ministre à Bercy,
j’étais animé par la volonté de redonner du
pouvoir économique aux citoyens. Pouvoir d’agir
et d’entreprendre d’un côté, pouvoir de protéger
etdesedéfendred’unautre.
Entièrement consacrée à la vie
quotidiennedesFrançais,laloisur
laconsommationquej’aiconçueet
faite voter était également en
rupture avec certains dogmes
économiques qui faisaient du
consommateur un agent écono-
mique par définition rationnel,
apte à faire valoir ses droits par
lui-même,laissantlemarchélibre
des’autorégulerseul.
Hier comme aujourd’hui, je crois
au rôle de l’État comme garant de
l’ordre public économique. Cette
loi en est une illustration, en
conjuguant renforcement de la
protection des consommateurs
et compétitivité de notre écono-
mie. C’est une loi d’équilibre, cherchant à restaurer
le lien de confiance entre les consommateurs et les
entreprises, au moment où celle-ci était gravement
atteinte à cause d’une affaire de tromperie en
matière alimentaire.
Mesure emblématique, la création d’une action de
groupe « à la française », constitue une étape
importante dans l’évolution des relations entre
consommateurs et producteurs. J’en suis fier, et il
faudra du temps pour en mesurer toute l’efficacité.
Mais la grande diversité et le nombre de proposi-
tions que contient cette loi en font plus générale-
ment un texte qui protège les
consommateurs autant qu’il leur
permetdesedéfendre:nouvelles
mesures pour lutter contre le
surendettement des ménages,
protection dans le cadre de la
vente à distance…
En démocratie, le citoyen ne doit
jamais se résumer au consom-
mateur, mais donner des droits
aux consommateurs permet
également d’offrir à tous les
moyens d’une réelle citoyenneté
économique.
« C’estuneloi
d’équilibre,
cherchantà
restaurerleliende
confianceentreles
consommateurset
lesentreprises. »
RETROSPECTIVE 70
37. 2015les30ansde
lachairegrande
consommation
del’essec
Que célèbre-t-on au juste ?
Juliette JIQUEL, Yasmine LAHSSINI
et Camille RIESCHER-TUCZKIEWICZ,
étudiantes ESSEC, promo 30 de la Chaire Grande Consommation
L
es 30 ans de la Chaire Grande Consommation, ce
sont plus de 700 alumnis aux profils diversifiés.
Ils ont suivi le cursus Grande Ecole ou ont été
admis sur Titre en Mastère spécialisé, venant
d’horizons très différents (Ecoles d’ingénieur,
Droit,SciencesPolitiques…)etdepaysvariés,etsont
toujoursplusnombreuxàêtreattirésparlaChaire:75
candidats cette année !
Ce sont aussi des partenaires prestigieux et particu-
lièrement impliqués qui permettent une relation
privilégiée entre étudiants et
entreprises.
Enfin, la chaire challenge et
accompagne les entreprises pour
une démarche plus responsable.
Elle délivre trois Grands Prix
reconnus : le Grand Prix de la
Distribution Responsable, le
Grand Prix de la Consommation
Responsable ainsi que le Prix
Daniel Tixier de l’initiative
consumériste.
Crééeen1985,laChaireGrandeConsommationfutla
première chaire en France construite sur le modèle
américain d’un enseignement financé par des entre-
prises privées.
Pour rester pionnière, la chaire doit continuer de se
réinventer et de s’adapter aux tendances qui se
dessinent.
A court terme, il sera intéressant d’étendre le spectre
de la chaire à la distribution et à la consommation au
sens large : e-commerce (Amazon), distributeurs
plus premium (Le Bon Marché), nouveaux business
models plus responsables (Alter Eco) et circuits de
distribution spécialisés (Naturalia).
A plus long terme, nous imaginons une chaire très
internationale, avec 80 % d’étrangers (majoritaire-
ment asiatiques).
La chaire sera en partie dématérialisée avec des cours
on-line via hangout (plateforme de visioconférence)
permettant à des intervenants de continents diffé-
rentsdenousfairecours.Celapermettradedécouvrir
les cultures et insights consommateurs d’autres pays.
Les hangouts pourront également être utilisés pour
des intervenants locaux : un cours de 3h sera l’occa-
sion de participer à un « vis ma vie » en suivant la
matinée d’un agriculteur pour
découvrir son quotidien et les
enjeux de son métier.
En plus des visites classiques de
magasins en France, nous pour-
rons, grâce à des Google Goggles
(systèmes de réalité virtuelle)
visiter « en live » un magasin
dans chaque continent, nous
promenerdanslesrayons,etainsi
comparer les modes de distribu-
tion selon les pays.
Les néo-actifs (PDG retraités) pourront faire part de
leursexpériencesenintervenantauprèsdesétudiants
de la Chaire.
Les étudiants ne rendront plus de Powerpoint en
guise de travaux de groupes, mais réaliseront de vrais
prototypes de leurs innovations produits grâce aux
imprimantes 3D et utiliseront la réalité augmentée
pour rendre vivantes leurs idées de campagnes
marketing.
Enfin,lesspeed-avionspermettrontauxétudiantsde
visiter des entreprises situées aux quatre coins du
monde lors de leur semaine de séminaire de Chaire.
« Pourrester
pionnière,lachaire
doitcontinuerdese
réinventer. »
RETROSPECTIVE 72
Prèsde700alumnis
11partenairesd’excellence:Auchan,Carrefour,Danone,FCD,
Ilec,Lesieur,Nielsen,P&G,SCA,GroupeSeb,Unilever