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Responsabilité sociétale
Développement durable
Responsabilité sociale
Environnement
S é c u r i t é
Q u a l i t é
Ethique
ISSN0767-9432
LL’’èèrree dduu nnuumméérriiqquuee,, vveerrss
uunn nnoouuvveeaauu bbuussiinneessss
mmooddeell......
Innovation et
métamorphose
numérique.
page 6
La dématéria-
lisation au
cœur de la
modernisation
de l’Etat.
page 21
N°252 Mai 2014LA REVUE DES MANAGERS ET DES ORGANISATIONS RESPONSABLES
L’ère du numérique, vers un nouveau business
model...
Stratégie et Management
64
25
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29
66
Dossier : L’ère du numérique, vers un nou-
veau business model...
SOMMAIRE
N°252 • MAI 2014
Edito
La révolution numérique : une lame de fond
sociétale qui marquera l’histoire de l’humanité.
Rencontre avec ...
Philippe Letellier.
Métamorphose numérique et innovation.
Actualités
Cybersécurité : partenariat stratégique entre
Alcatel-Lucent et Thales.
L’IRT Jules Verne se dote d’un Conseil
Scientifique.
4 6
6
9
9
11
21
9
Sélection du mois
Tendances
Philippe Letellier, Directeur de l’innovation
à l’Institut Mines-Télécom..
L’Internet des objets.
La dématérialisation.
La dématérialisation au cœur de la
démarche de modernisation de l’Etat.
Les conséquences de la dématérialisation dans
les rapports judiciaires et dans les relations avec
l’administration.
Nouveaux rôles de la Fonction SI à l’ère du
numérique.
Natifs numériques et évolution des
organisations : une exploration.
Internet des objets : la gestion de projet.
Internet des objets : le business model.
Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 3
Rencontre avec...
43
52
N° 252 - MAI 2014
JEAN-LUC LAFFARGUE
Aujourd’hui le numérique est au cœur de tous les processus et en particulier celui de l’inno-
vation : Internet et les réseaux sociaux, la géolocalisation, les smart grids, les MOOC, les objets
connectés et intelligents, les jeux, le design numérique, l’impression 3D, les robots… le numé-
rique nous entraine dans un véritable « big bang ». Avec lui, l’ère du tout connecté est en route.
En quelques années, l’économie numérique a explosé et va encore plus révolutionner notre
façon de communiquer, de consommer, de travailler, de nous soigner, de vivre et de penser.
Parler de société numérique signifie que tous les aspects de la vie sociale, l’économie, l’orga-
nisation du travail, les relations interindividuelles, la culture, les loisirs… se trouvent concernés
par cette transformation de nos modes de communication et d’information, créant un mou-
vement sociétal d’un autre type par la modification de notre rapport aux autres et au monde.
Cette transformation va concerner également la structure cognitive de l’individu à la fois dans
son fonctionnement et dans ses rapports avec la société.
Les nouveaux usages en ligne, les nouvelles technologies de l’information et de la communi-
cation font avancer l’homo-numericus avec une rapidité prodigieuse accélérant encore plus
les changements et laissant sur son passage les gouvernants, managers, acteurs économiques
qui, souvent dépassés, n’ont pas compris que le monde est devenu interdépendant et surtout
interconnecté. Cette véritable mutation numérique est transversale ; elle n’est pas une écono-
mie à part, mais bien au contraire, elle irrigue tous les domaines d’activité et tous les acteurs
de l’économie.
Nous parlons de 50 à
80 milliards d’objets
connectés d’ici une di-
zaine d’années. Il est
vrai que potentielle-
ment tout est connec-
table.
L’enjeu n’est pas seulement la création de machines dites intelligentes, tels que les systèmes
embarqués, la conception d’exosquelettes ou de robots humanoïdes, mais de mettre au point
des systèmes intelligents où les machines, les usines comprenant les machines et les produits
issus des usines, communiquent entre eux. C’est vrai également pour la « ville numérique »
ou « ville intelligente ».
Le monde artificiel avec ses réalités virtuelles est en marche : c’est le cyberespace où nous al-
lons devoir nous projeter. Cette mutation favorise et entraîne à la fois une évolution des modes
de management et de la culture de l’entreprise.
Au fil des âges, toutes les technologies ont apporté leur cortège de bouleversements auxquels
il a fallu s’habituer, mais aussi maitriser, contrôler, réguler… et à chaque révolution, le temps
dont l’homme dispose pour cette adaptation ne relève pas que de son temps individuel, celui
que chacun de nous doit pouvoir gérer mais il relève d’un temps commun, celui que s’octroie
la société pour relever ce défi sociétal et culturel. Se pose alors les questions de gouvernance
et des rôles de chacun dans toutes ces démarches ainsi qu’une inévitable réflexion sur les effets
secondaires et indésirables induits. Cette métamorphose peut être bienfaitrice, si elle est au
service de l’humain, mais aussi encore plus prédatrice, si sa seule mission est d’attiser les ap-
pétits du marché dans sa logique de marchandisation du monde.
Cette métamorphose exponentielle due au numérique ne risque-t-elle pas de laisser encore
plus d’humains sur le bord du chemin ? Alors allons-nous profiter de toutes ces opportunités
pour, en maîtrisant notre évolution numérique, maîtriser tout simplement notre destin avec
conscience, responsabilité et éthique ?
Nous ne sommes pas dans un « avatar » idéologique, nous devons construire « l’économie de
marché » qui satisfera les besoins vitaux des neuf milliards d’humains qui vivront demain sur
notre planète. Dans ce contexte, on doit se poser la question : qu’apportera et quelle sera la
contribution du numérique au développement humain ?
Au-delà du flot de détails intimes que nous livrons volontairement ou non sur les réseaux so-
ciaux ou les différents sites, le moindre indice de notre comportement est traqué. Ces méta-
données constituent un gisement de renseignements sur nos besoins, nos envies. Ce sont des
La révolution numérique : une lame de fond
sociétale qui marquera l’histoire de l’humanité.
E D I T O R I A L
Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com4
milliards d'informations qui permettent de nous ficher, de prévoir nos comportements et d'an-
ticiper nos désirs. Cette vaste collecte numérique intéresse les géants d'Internet qui détiennent
plus de 80 % des données personnelles mondiales et qui sont devenues la « poule aux œufs
d’or » de ces entreprises. Dès lors, il faut penser la sécurisation des données et des échanges.
L’apparition du « Cloud computing », de l’ « Open Data » ou du « Big Data » représente un
nouvel Eldorado pour un certain secteur économique par essence mercantile, sans éthique et
sans solidarité humaniste qui transforme depuis des décennies notre monde en un gigantesque
marché et qui fait de chaque minute de la vie une occasion de produire et de consommer de la
valeur marchande. Attention à ne pas perdre nos finalités humaines dans ce tourbillon verti-
gineux, tant en vitesse qu’en volume.
Cette transition, ce saut dans un nouvel espace, n’est pas sans danger, mais tellement porteur
d’espérances pour des projets sensés, pour construire de nouvelles solidarités et pour aspirer
à une société authentiquement inclusive.
Avec toutes les avancées de la science (génétique, biologie, nanotechnologies, neurosciences,
etc.) et des apports technologiques pourrions-nous entrevoir des objets matériels avec un cer-
tain degré de conscience ? C’est le domaine de l’intelligence artificielle.
Déjà, des « organismes digitaux » (comme les avidiens) sont capables de se reproduire, d’évo-
luer et même de dormir ou de coopérer… le monde, aujourd’hui modelé par les avancées de
la science et des apports technologiques, se caractérise par l’émergence de nouvelles formes
sociétales, de complexité croissante.
Afin de réaliser un développement soutenable tout en recherchant l’amélioration de la qualité
de vie, trois principes serviront de fils conducteurs. Tout d’abord le principe de responsabilité
orientée vers le futur lointain avec deux obligations : préserver la nature en nous, ce qui com-
mande de respecter l’identité spécifique de l'être humain ; préserver la nature autour de nous,
ce qui implique d’inventer une économie écologique afin de protéger la biosphère. De ce pre-
mier principe de responsabilité découle celui de la solidarité envers les générations futures et
envers le monde présent. Elle devra servir de guide dorénavant à nos orientations et aux choix
des technologies à promouvoir. Eradication de la pauvreté et de son "mal-être" et "mal-vivre",
prévention de la conflictualité naissant de l’ignorance, des déséquilibres, des frustrations, de
l'intolérance, de l’injustice, approfondissement de l’intelligence de la nature en vue de sa sau-
vegarde sont à inscrire à l’agenda de cette éthique. Le troisième principe sur lequel fonder la
dynamique de la science est celui de la précaution. La fin des certitudes, l’accroissement de la
complexité dû entre autres à la multiplication des acteurs, les risques encourus du fait même
des nouveaux champs ouverts par la science exigent de gérer ses potentialités avec discerne-
ment et prudence.
Le numérique et ses applications doivent impérativement se fonder sur une éthique du futur
et contribuer au monde que nous désirons pour demain. Il requiert un nouveau leadership
managérial pour donner du sens à cette métamorphose en marche et à notre entrée dans le
monde de la connexion permanente. Il ne nous restera plus qu’à réfléchir ou espérer acquérir
la « richesse temporelle », celle qui correspond à un état dans lequel on dispose de suffisam-
ment de temps pour faire ce que l’on doit faire et au temps qui nous reste après avoir tout fait.
La culture numérique n’est donc pas réservée aux geeks ; elle correspond à un phénomène so-
ciétal puissant où tout s’accélère autour de nous sans pour autant savoir où nous allons et pour
quelles finalités. Cette civilisation numérique doit être avant tout celle de l’Homme averti et
de bon sens où des objets, des robots vont devenir des entités quasi-animales ou quasi-hu-
maines avec une certaine capacité cognitive, une part de conscience, une forme de vie artificielle
intelligente…
Le numérique n’est que le moyen d’atteindre des objectifs, suivre des directions, répondre à
des questions. Il n’y a pas de fatalité. Seul l’homme doit conduire et raisonner son destin, pré-
parer le monde de demain, ce qui demande un approfondissement des champs de l’éthique et
de la morale. Ce qui est possible n’est pas forcément souhaitable.
Une altérité scientifique et technologique qui peut nous aider à nous (re)penser.
Nous sommes face à la meilleure ou la pire chose qui puisse arriver à l’humanité, mais surtout
à l’orée d’une période qui va marquer l’histoire de l’humanité.
E D I T O R I A L
Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 5
RENCONTRE AVEC...
... Philippe Letellier
Métamorphose numérique et innovation.
L’Institut Mines-Télécom se situe au centre de la métamor-
phose numérique.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
L’Institut Mines-Télécom se situe fondamentalement au
cœur de l’écosystème de l’innovation, fait de grandes entre-
prises, de PME et d’équipes de recherche. Toutes les problé-
matiques sociétales d’aujourd’hui que sont le numérique, les
transitions énergétiques et écologiques demandent des cher-
cheurs capables de travailler de façon ouverte et transdisci-
plinaire. Parallèlement aux activités de recherche
disciplinaire, objet d’un consensus au niveau mondial, l’Ins-
titut travaille au lancement de programmes multidiscipli-
naires pour répondre aux besoins de la société concernant
la ville, les réseaux numériques, l’énergie du futur, la santé,
les risques et la sécurité et l’entreprise du futur. Il fait égale-
ment preuve d’initiatives scientifiques sur des thématiques
originales comme la coévolution homme-machine, la créa-
tion industrielle, l’imaginaire et le design, la coévolution in-
dustrie et environnement.
Les recherches menées au sein des écoles de l’Institut Mines-
Télécom conjuguent trois objectifs en synergie : mener des
recherches au meilleur niveau académique, apporter un
concours déterminant au développement économique et
contribuer à l’excellence, à la pertinence et à la dynamique
des programmes de formations d’ingénieurs et de mana-
geurs. Cette spécificité se traduit dans le contenu des forma-
tions, dans le choix des thématiques de recherche, dans
l’intensité de la recherche partenariale, ainsi que par des ac-
tions de soutien au développement des start-up, PME et ETI.
L’Institut Mines-Télécom est un établissement public ratta-
ché au ministère du redressement productif, dédié à l’ensei-
gnement supérieur, à la recherche et à l’innovation dans les
domaines de l’ingénierie et du numérique. Toutes les écoles
rattachées à l’Institut répondent à des besoins industriels et
sont engagées dans une mission de développement écono-
mique. La bonne imbrication de leurs activités d’enseigne-
ment, de recherche et d’innovation est donc capitale pour
répondre à ces besoins.
Qu’est-ce qui caractérise le plus ce développement numé-
rique ?
Ce qui caractérise le plus cette évolution du numérique est
la notion d’accélération du monde et des transformations
qui l’accompagnent, caractéristique de notre société mo-
derne, mais aussi les fortes perturbations qu’elle engendre
sur nos organisations et sur notre modèle économique. Le
numérique accélère tout autour de nous. L’économie numé-
rique accélère le rythme de l’innovation. Nous sommes à un
moment historique où il suffit de réunir quelques personnes
autour d’une table pour faire émerger trois ou quatre projets
innovants avec un véritable intérêt pour les marchés.
L’économie numérique se caractérise par son intensité d’in-
novation : le progrès technique est l’un des facteurs de cette
intensité, Internet et son modèle économique sont un autre
facteur d’innovation.
Le développement de l’économie numérique est porteur de
progrès mais peut aussi mettre à rude épreuve les économies
des grands Etats industrialisés ou « mettre à genou » cer-
taines entreprises ; l’ industrie musicale qui a perdu 60% de
sa valeur en est un exemple…
Il est nécessaire d’accompagner cette transition et de faire en
sorte que ses gains de productivité se traduisent par le dé-
veloppement organique de nouvelles activités créatrices
d’emploi sur le territoire. Il suffit d’observer comment cette
économie du numérique accélère la diffusion des nouveaux
biens et services, comment elle mobilise des investissements
massifs et comment elle peut conduire à des positions do-
minantes. Personne n’est protégé. Le numérique s’intéresse
au client, à ses intimités, à ses désirs, à ses modes de vie, tous
les besoins sont impactés. La priorité d’une entreprise nu-
mérique est d’avoir une relation privilégiée avec ses utilisa-
teurs.
Dans ce contexte, comment vous situez-vous ? Qu’appor-
tez-vous au tissu économique ?
Qualitique n°252- Mai 2014 - www.qualitique.com6
Qualitique
Philippe Letellier, Directeur de l’innovation à
l’Institut Mines-Télécom.
Qualitique
Philippe Letellier
Philippe Letellier
Qualitique
RENCONTRE AVEC...
Les écoles de l’Institut Mines-Télécom sont classées parmi
les toutes premières grandes écoles en France. Leurs activi-
tés, tournées vers les acteurs économiques en matière de for-
mations d’ingénieurs, managers, masters et docteurs, de
travaux de recherche et d’innovation, sont reconnues au ni-
veau national et international pour leur excellence.
Toutes les écoles de l’Institut Mines-Télécom sont engagées
dans des projets structurants, impulsés par les pouvoirs pu-
blics, notamment les pôles de compétitivité, clusters,
grappes d’entreprises, plateformes R&D, pôles scientifiques,
pôles d’excellence et autres associations contribuant au dé-
veloppement économique local. Elles investissent toutes
pour insuffler à leurs diplômés une solide culture interna-
tionale, avec une partie significative du cursus effectuée à
l’étranger, et la possibilité offerte d’obtenir des doubles di-
plômes. Ces diplômés pourront ainsi être le support du dé-
veloppement international de l’entreprise qui les
embauchera.
L’institut Mines-Télécom représente une force de recherche
de plus de 4000 chercheurs et nous sommes partenaire des
entreprises du CAC 40 et de plus de 200 PME.
L’Institut Mines-Télécom est actif au sein des alliances na-
tionales de programmation de la recherche Allistene (l’al-
liance des sciences et technologies du numérique), Aviesan
(l’alliance pour les sciences de la vie et de la santé) et Athena
(l’alliance nationale des sciences humaines et sociales). Par
ailleurs, la qualité et l’intensité de sa recherche partenariale
sont reconnues par deux labels instituts Carnot dès 2006, re-
nouvelés en 2011. Le label Carnot a pour vocation la re-
cherche partenariale : conduite de travaux de recherche
menés par des laboratoires publics en partenariat avec des
acteurs socio-économiques, principalement des entreprises
en réponse à leurs besoins. Notons que chaque année, une
centaine de start-up sortent des incubateurs des écoles du
réseau de l’Institut Mines-Télécom.
Les perspectives de développement des entreprises obligent
à « jouer collectif ». Nous sommes au cœur des interactions
créatrices de valeur. Notre neutralité est aussi un atout pour
fédérer des alliances autour d’un projet.
Et sur le plan européen et international ?
Aujourd’hui, les frontières disparaissent. Le e-business n’est
plus national, il nécessite une vision globale, il n’est pas ré-
servé aux multinationales.
Pourquoi une vision internationale ? Pour au moins deux
raisons.
Premièrement, si on développe un business avec une vision
uniquement nationale, on est presque certain que cette idée
a germé ailleurs. Et si cet « ailleurs » a une vision internatio-
nale, le « business national » sera purement et simplement
éliminé du marché. En effet, pour durer il faut se positionner
en tête, au plus comme troisième acteur du marché ; le cin-
quième sera évincé. La structuration du marché est très ra-
pide et les compétiteurs sont féroces…
Deuxièmement, lorsque l’on « pousse » une innovation,
nous ne sommes jamais certain qu’elle satisfera le marché
local, particulièrement en France. Donc il est intéressant et
impératif de tester d’autres marchés. Ce n’est pas toujours
évident et là encore l’Institut Mines-Télécom possède de
nombreux atouts pour aider les entreprises à accéder et à se
développer à l’international grâce :
- au partage de réseaux innovants en Europe ;
- à la recherche, à travers les partenariats structurés
et les consortiums internationaux ;
- à l’innovation, à travers les projets collaboratifs eu-
ropéens public-privé et l’accompagnement de PME dans
leur développement à l’international avec la création de
hubs d’écoles en Amérique, en Asie (exemple de Shanghai
en Chine).
En conclusion, quels sont les grands changements induits
par le développement du numérique ?
Le monde a changé. C’est une évidence qu’il va falloir main-
tenant intégrer. Ce monde hyper-connecté avec les big-data,
open data, etc. vont redessiner notre économie. Ce nouveau
monde numérique qui creuse des « traces » partout sur nos
comportements, nos modes de vies, nos besoins, est le
monde rêvé de tout commerçant. Il peut ainsi accéder aux
données personnelles et obtenir toutes sortes de renseigne-
ments sur les centres d’intérêts de son client ou futur client…
tout ceci devient possible grâce à ces « traces » et aux puis-
sances de calcul actuelles et qui sont nécessaires à l’analyse
et au croisement des différentes données que l’on peut re-
cueillir un peu partout.
L’autre tendance est la « servisation » : nous vendons de plus
en plus un service et de moins en moins le produit. Prenons
l’exemple de Michelin, entreprise de production centenaire.
Aujourd’hui, la communication ne se fait plus sur le produit
(le pneu), mais plus sur les kilomètres effectués. C’est un
changement de spécification du produit qui bouscule l’en-
semble des entreprises traditionnelles. Nous passons d’un
business modèle produit à un business modèle service. Les
machines intelligentes arrivent, nous allons de plus en plus
payer pour un usage et de moins en moins pour un produit.
L’univers « low-cost » ajoute une pression supplémentaire
sur nos entreprises traditionnelles.
Le virage numérique de notre société va permettre de « re-
battre » les cartes.
Un exemple très récent avec l’essor des voitures de tourisme
avec chauffeur (VTC) et du covoiturage qui, par l’Internet
mobile, détruit le modèle économique des taxis, mais permet
un enrichissement de l’offre de transport et, dans le cas du
covoiturage, une utilisation plus rationnelle de la voiture in-
dividuelle…
Dans cette course, même si personne n’est épargné, per-
sonne n’a gagné mais personne n’a perdu !
Et n’oublions pas que l’optimisme est un vecteur d’innova-
tion.
Qualitique n°252- Mail 2014 - www.qualitique.com 7
Philippe Letellier
Philippe Letellier
Qualitique
Qualitique
Philippe Letellier
ACTUALITÉS
Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com8
Cybersécurité : partenariat stratégique entre
Alcatel-Lucent et Thales
Dans le cadre du partenariat stratégique conclu entre
Thales et Alcatel-Lucent, Thales acquerrait les activités Ser-
vices de Cybersécurité et les activités Sécurité des Com-
munications d’Alcatel-Lucent, qui offrirait des solutions
de bout en bout pour la sécurisation des réseaux de télé-
communications.
Le partenariat entre les deux entreprises répond à l’objectif
stratégique, affiché par Alcatel-Lucent dans le cadre de son
plan de transformation Shift, de renforcer le volet cybersé-
curité de son offre pour les réseaux de télécommunication.
Pour Alcatel-Lucent, il s’agit d’offrir des solutions de bout
en bout hautement sécurisées, alliant son expertise des
fonctionnalités de sécurité intégrée dans les produits de té-
lécommunication et les services proposés par Thales.
Pour Thales, il s’agit de faire croître ses activités dans les
secteurs porteurs de la cybersécurité et de consolider le sa-
voir-faire et l’expertise de ses équipes, déjà au meilleur ni-
veau mondial dans ce domaine.
Ce partenariat ne deviendra effectif qu’après la consulta-
tion des instances représentatives du personnel, la signa-
ture des accords définitifs et l’obtention des autorisations
nécessaires.
« Cet accord concrétise un partenariat stratégique entre deux
grands groupes mondiaux, proches par leurs racines, et nous fera
bénéficier d’une approche partagée et cohérente des enjeux de la
cybersécurité », indique Jean-Bernard Lévy, Président-direc-
teur général de Thales.
« Venant après les partenariats passés avec Qualcomm et Intel,
ce nouveau partenariat stratégique avec Thales vient illustrer
une nouvelle fois la stratégie d’Alcatel-Lucent visant à se repo-
sitionner comme spécialiste des réseaux IP, du Cloud et des tech-
nologies d'accès à très haut débit sécurisés. La cybersécurité est
un sujet stratégique pour les réseaux et nos clients : Alcatel-Lu-
cent se renforce en tant qu’acteur majeur des réseaux sécurisés.
En nous alliant avec Thales pour les services associés, nous al-
lons offrir à nos clients une expertise globale de classe mondiale
dans les domaines de la cybersécurité et de la sécurité des com-
munications », commente Michel Combes, directeur général
d’Alcatel-Lucent.
L’IRT Jules Verne se dote d’un Conseil
Scientifique.
La première réunion du Conseil Scientifique de l’IRT Jules
Verne s’est tenue le mardi 29 avril 2014. Composé de 12 scien-
tifiques de haut niveau, tant au plan national qu’international,
il est présidé par M. Alain BRAVO, Délégué Général de l’Aca-
démie des Technologies.
Instance de proposition, de consultation et d’évaluation, le
Conseil Scientifique s’intéressera à l’IRT Jules Verne dans
toutes ses dimensions et exercera ses missions dans le cadre
de ses stratégies de recherche, d’innovation et de formation.
Les deux piliers de son action seront :
- l’évaluation des différentes stratégies de l’IRT et no-
tamment sa feuille de route scientifique et technologique et
son déroulement (maturation technologique, transfert indus-
triel, valorisation) ;
- l’apport d’expertise scientifique et de recommanda-
tions prospectives.
Désignés par le conseil d’administration pour une durée de 3
ans, et issus de domaines scientifiques et techniques divers et
provenant d’horizons très variés, mais en cohérence avec les
filières couvertes par l’IRT et son positionnement technolo-
gique et scientifique, les membres du Conseil Scientifique de
l’IRT Jules VERNE sont :
Olivier ALLIX, CNRS, Vice-Directeur du LMT (Laboratoire
Mécanique et Technologie de Cachan).
Olivier APPERT, IFPEN (Institut Français du Pétrole et des
Energies Nouvelles), Président.
Nadège BOUQUIN, ANRT (Agence Nationale de la Re-
cherche et de la Technologie), Directrice adjointe de FutuRIS
(plateforme prospective du système français de recherche et
d’innovation).
Alain BRAVO, Académie des Technologies, Délégué Général.
Andreas BÜTER, FRAUNHOFER, General Manager de la
Fraunhofer Alliance Lightweight Structures.
George CHRYSSOLOURIS, Université de Patras, Professeur, Di-
recteur du LMS (Laboratory for Manufacturing Systems and Au-
tomation), Administrateur de l’EFFRA (European Factories of the
Future Research Association).
Jacques DHELLEMMES, SCILAB ENTERPRISES, Président.
Clément FORTIN, CRIAQ (Consortium de recherche et d'innova-
tion en aérospatiale au Québec), Président.
Véronique MICHAUD, EPFL (Ecole Fédérale Polytechnique de
Lausanne), Professeur au Laboratoire des Technologies des Compo-
sites et Polymères.
Bruno MORTAIGNE, DGA (Direction Générale de l’Armement),
Responsable du domaine scientifique «Matériaux » à la MRIS (Mis-
sion pour la Recherche et l’Innovation Scientifique).
François PIERROT, CNRS, Directeur du LIRMM (Laboratoire
d’Informatique, de Robotique et de Microélectronique de Montpel-
lier).
Laszlo TOTH, Université de Lorraine, Professeur, Directeur du LA-
Boratoire d'Excellence DAMAS (Design des Alliages Métalliques
pour Allègement de Structures).
DDOOSSSSIIEERR
L’Internet des objets.
La dématérialisation.
La dématérialisation au coeur de la démarche de
modernisation de l’Etat.
Les conséquences de la dématérialisation dans
les rapports judiciaires et dans les relations avec
l’administration.
Nouveaux rôles de la Fonction SI à l’ère du
numérique.
Natifs numériques et évolution des organisations :
une exploration.
Internet des objets : la gestion de projet.
Internet des objets : le business model.
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Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 9
L’Internet des objets.
Depuis 1965 les technologies de l’information et des télé-
coms n’ont cessé de se développer à des rythmes conformes
aux lois de Moore. Du côté des entreprises, des institutions
et des états, les besoins sont multiples et souvent centrés au-
tour de la rationalisation des processus et des coûts.
Mais depuis une trentaine d’années le numérique bouleverse
nos modes de vie et nos usages en s’imposant dans tous les
domaines, de notre habitat à l’accès à la connaissance en
passant par les transports, la gestion de l’énergie et plus ré-
cemment encore par les multiples possibilités de connexions
sans fil …
C’est ainsi que dans un premier temps la dématérialisation
des documents physiques s’est imposée avec son cortège
d’adaptations organisationnelles. Il s’agit de quitter l’ère du
papier, de favoriser les échanges électroniques et de stocker et
retrouver rapidement l’information. La dématérialisation
des flux entrants / sortants permet de réduire les coûts de
traitement et de rationaliser les processus métiers (article 1).
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L’ère du numérique, vers unL’ère du numérique, vers un
nouveau business model...nouveau business model...
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DDOOSSSSIIEERR
Qualitique n°252 - Mail 2014 - www.qualitique.com10
- les moyens technologiques mis à la disposition
du plus grand nombre continueront à se développer selon
un algorithme bien connu (miniaturisation, accroisse-
ment des capacités, et baisse des coûts induite dans les
domaines du traitement, de l’interface homme machine,
du stockage de données et des modes de communication) ;
- les idées nouvelles et le transfert d’usages actuels
indispensables deviendront de plus en plus faciles à met-
tre en œuvre (article 7).
Il reste à inventer cet avenir et c’est peut-être l’occasion
d’associer des objectifs jusqu’ici divergents :
- nouvelle économie moins destructrice, moins polluante ;
- découverte du vivant et protection des espèces ;
- …
Enfin, le très haut débit, la miniaturisation des compo-
sants, la réduction des coûts de stockage, la mondialisa-
tion des idées et des usages sont autant de facteurs
permettant le déploiement de la société de l’intelligence
numérique.
Dossier réalisé par :
Alain Boyer, Directeur d’Homo Numer Management.
Philippe Gros, Ingénieur, manager commercial infor-
matique et télécom.
Jean-Charles Leynadier, consultant partner du cabinet
de conseil Pragmaty.
Gilles Polart-Donat, Ingénieur Institut Mines-Telecom.
Joël Quéré, Directeur d’Optimaliste.
Jean-Luc Laffargue, Directeur de la publication.
La dématérialisation est une priorité pour les adminis-
trations qui traitent d’énormes volumes d’information et
s’impose comme la solution innovante optimum et pro-
tectrice de l’environnement. C’est également une pro-
fonde évolution des méthodes de travail (article 2).
L’impact du numérique n’est pas seulement technique ou
organisationnel, il remet en cause un ordre juridique
établit sur le papier, l’écrit ou la signature (article 3).
Le numérique natif s’est imposé avec la mise en œuvre
de moyens tels que les GED et les workflow. C’est un
vecteur de simplification des processus et le support d’une
évolution importante de l’organisation des entreprises.
Les organisations doivent s’adapter et tout particulière-
ment la DSI soumise à des attentes de plus en plus fortes
de la part des utilisateurs « nés » dans le numérique (ar-
ticle 4).
Puis, nous nous intéressons à l’influence des technologies
numériques sur les modes de travail. Les technologies du
Web 2.0 impactent profondément les modes d’interaction
entre les personnes et raccourcissent les distances. Du
point de vue des entreprises, elles font émerger de nou-
velles opportunités, qu’il s’agisse de l’apparition de nou-
veaux secteurs d’activités, comme les objets et
applications liés à la tendance du Quantified Self, ou de
modifications d’activités, comme l’accès à de nouveaux
modes de financement par les plateformes de crowdfun-
ding (article 5).
Les « besoins de l’utilisateur puis du grand public »,
d’abord pilotés par les industriels, explosent grâce aux
technologies mises à la disposition de chacun et génèrent
de nouvelles attentes et de nouveaux usages. L’opérabilité
des systèmes favorise la multiplication des objets connec-
tés. On commence à penser que tout objet sera un jour
connecté et les projets commencent à fleurir. Les conjonc-
tions possibles actuellement entre différentes technologies
et les attentes démultipliées du grand public ouvrent des
possibilités quasi infinies (article 6).
A l’aune de cette échelle les business models évoluent :
- les besoins en dématérialisation iront en dé-
croissant du fait du numérique natif et du développe-
ment d’une culture de plus en plus admise de l’échange
numérique ;
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
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La dématérialisation
L
es évolutions économiques,
légales et environnemen-
tales poussent l’entreprise
à une dématérialisation documen-
taire. Celle-ci s’applique soit :
AVANT-PROPOS
La dématérialisation des flux entrants /
sortants de l’entreprise permet leur auto-
matisation. L’automatisation des flux en-
trants / sortants (processus d’intégration
et de génération des échanges) permet de générer une
forte économie ; ceci s’explique par le gain de temps en
classement et en recherche de l’information utiles au
moment du traitement des documents qui sont deux
activités à faible valeur ajoutée. L’organisation du trai-
tement est modifiée par ce passage au numérique.
La dématérialisation des fonds documentaires s’ap-
plique tout particulièrement pour répondre à des obli-
gations légales de conservation d’information. Elle
permet aussi de mettre à disposition d’utilisateur un
grand nombre d’informations plus facile à retrouver, à
analyser, à corréler et à interpréter.
Les motivations des organisations qui dématérialisent
leurs courriers et documents sont généralement :
- l’amélioration du partage de l’information et de
la fluidité des échanges ;
- un gain de temps lié à une évolution des organi-
sations ;
- la réduction des coûts de traitement entre les diffé-
rents services ou sites de l’organisation ;
- une meilleure traçabilité des courriers et documents
concernés ;
- l’amélioration de la réactivité dans le traitement des
opérations métier.
La mise en place d’une solution de dématérialisation
des flux entrants / sortants nécessite :
- la description claire du besoin à travers les ob-
jectifs recherchés, les moyens à mettre en œuvre,
la description d’une organisation d’exploitation
quotidienne de la solution choisie ;
- la définition d’une démarche (un projet) de construc-
tion.
L’objectif de cet article est de présenter schématique-
ment : les différentes techniques et organisations per-
mettant l’acquisition et le traitement des documents
entrants d’une entreprise ; les spécifications de l’orga-
nisation de la production de numérisation des flux en-
trants et sortants.
Ce document est rédigé dans une approche de traite-
ment des flux de documents reçus dans le cadre d’une
relation client, source d’activité pour l’entreprise. Une
transposition aux documents internes de l’entreprise
(gestion de la qualité, gestion ressources humaines …)
peut être directement établie.
- aux flux entrants et sortants
(courriers) dans le but de réduire
les coûts de traitement et de ratio-
naliser les processus métier ;
- à un fonds documentaire c'est-à-
dire à un ensemble de documents
existants dans le but de recueillir
et de structurer l’information et de
réduire l’utilisation des documents
physiques.
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
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QUELQUES DÉFINITIONS
Voici quelques définitions qui aideront à la compréhen-
sion du texte.
Capture : le terme est communément employé pour dé-
signer les activités d’acquisition d’une image (représen-
tation numérique) d’un document physique
accompagnée de ses métadonnées.
Dématérialisation : Remplacement d’un document ori-
ginal papier par une représentation numérique incluant
généralement une image numérique du document et
ses métadonnées. Le terme dématérialisation devrait
être réservé aux cas où l’on n’accorde plus de valeur au
document physique. Il est détruit ou archivé par pré-
caution.
Document/feuille/page : Un document physique est
composé de feuilles de différents formats (du post-it
jusqu’au plan). Chaque feuille peut être numérisée en
recto/verso pour générer plusieurs images correspon-
dant aux pages. L’ensemble des images d’un document
peut être regroupées en un seul fichier ou être séparé
en autant de fichiers que de pages ou de feuilles (for-
mats multipages).
Image : Fichier informatique contenant la prise de vue
d’un document, par un smartphone, un scanner ou
peut être composée nativement par voie numérique.
Les images peuvent être en noir et blanc, en teintes de
gris ou en couleurs. Elles peuvent être compressées
avec différents algorithmes (CCITT G4, JPEG,
JPEG2000, …). La résolution de prise de vue est fonc-
tion de l’usage et du matériel utilisé (généralement
entre 200 dpi et 300 dpi). Le format du fichier incluant
les images peut également varier (PDF, TIF, JPG, PNG,
GIF, …)
RAD (Reconnaissance Automatique de Document) :
Techniques de classification automatique de document.
Les pages numérisées sont classifiées en combinant dif-
férentes techniques de reconnaissance (taille, allure gé-
nérale de la page, présence de mot clé, détection de
logo…). On obtient ainsi des documents typés : facture,
bon de commande, page de contrat, justificatif d’iden-
tité, …
LAD (Lecture Automatique de Document) : utilisation
de moteur de reconnaissance pour extraire une infor-
mation informatique d’une image issue de la scannéri-
sation d’un document. Cette extraction peut s’appliquer
à des documents très normés ou structuré (formulaire)
ou moins standardisé tel que des factures ou même des
courriers libres.
OCR (Optical Character Recognition = Reconnais-
sance Optique de Caractères) : technique de reconnais-
sance appliquée à des impressions typographiques.
L’utilisation d’un logiciel de reconnaissance OCR per-
met le passage d’une image de texte à un fichier texte.
Code à barre, QR code, datamatrix : différentes évolu-
tions d’un codage imprimé d’une information. La lec-
ture est sécurisée par l’adjonction d’éléments de
contrôle et de redondance d’informations.
Indexation manuelle : Saisie des informations non lues
automatiquement ou ne répondant pas aux règles de
cohérences nécessaires.
Métadonnées : Informations associées à un document
ou une partie d’un document. L’information peut être
issue du document (champ de formulaire, annotation
manuscrite, présence de signature) ou peut correspon-
dre à des éléments de contexte (émetteur, date de ré-
ception, date et heure de capture, données GPS, nom
de l’auteur, numéro de série du capteur, …). Ces infor-
mations peuvent être lues, saisies ou être issues d’un
référentiel.
Empreinte/signature/clé/certificat : Pour différents be-
soins pratiques de comparaison, le fichier image peut
être résumé par un calcul d’empreinte ou hachage
(MD5, SHA1, SHA-256, SHA-512, …). L’algorithme de
calcul vise à obtenir une quantité d’information de taille
arbitraire non proportionnelle au fichier d’origine.
L’empreinte peut ensuite être signée par un système de
chiffrage asymétrique à clé publique. Cette clé est dis-
tribuée sous la forme d’un certificat numérique délivré
par un tiers de confiance.
Valeur probatoire : Elément permettant de justifier
l’authenticité de l’origine du document et l’intégrité du
document électronique lors de sa capture et sa conser-
vation. La loi du 13 mars 2000 précise :
« L'écrit sous forme électronique est admis en preuve
au même titre que l'écrit sur support papier, sous ré-
serve que puisse être dûment identifiée la personne
dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des
conditions de nature à en garantir l'intégrité », Code
Civil, article 1316-1.
FLUX ENTRANTS
Le processus de numérisation de flux entrant com-
prend globalement: la capture, la gestion du workflow,
les technologies de reconnaissance de documents, la
mise en conformité des informations extraites, l’archi-
vage physique et l’archivage logique à valeur proba-
toire.
Point 1 : la capture
Pour simplifier notre propos nous avons identifiés 4 or-
ganisations de capture principales en fonction du nom-
bre de sites de traitement.
- Capture backoffice : Le matériel est adapté au
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
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volume traité par le centre. Il est en général
doublé pour permettre la production durant
la réparation du matériel. La performance du
matériel est définie par la capacité à traiter la
pointe de traitement en une journée sur un
seul matériel.
- Centre de service partagé : La mutua-
lisation permet au centre de consolider un volume jus-
tifiant les matériels les plus performants. L’organisation
des traitements est conçue pour optimiser le passage en
machine. En particulier, les documents sont préparés
pour éviter au maximum les arrêts machine.
- Capture distribuée : La difficulté réside dans
l’intégration de la capture au niveau du poste agence.
Les solutions de capture web permettent de simplifier
le déploiement et la gestion.
- Capture multi-canal : Les solutions doivent in-
tégrer différentes technologies mobile, web, échanger
avec les systèmes d’information, être intégrées dans les
applications à destinations des clients.
Dans une organisation commerciale, les flux de docu-
ments sont utilisés pour contractualiser une relation
avec les clients. Ils concrétisent et formalisent cette re-
lation.
Ce processus commercial peut être initialisée par la
contractualisation et la livraison du produit ou service
ou être déclenchée par la réception d’un courrier client
(réclamation, demande d’évolution et de résiliation).
Le flux documentaire peut être reçu au niveau d’un ré-
seau commercial au contact de la clientèle ou par une
boite postale du centre de traitement. Les étapes qui lui
sont généralement appliquées sont les suivantes :
- réception des courriers ;
- ouverture des enveloppes ;
- préparation des flux physiques ;
- numérisation des documents ;
- indexation des images ;
- conditionnement du physique et enregistre-
ment du logique ;
- destruction du physique.
Cas d’une capture dans un centre de traitement interne.
Cette capture est généralement réalisée sur le seul site
de traitement (c’est le cas d’une majorité de TPE et
PME) et permet d’adopter un processus de traitement
proche d’un traitement manuel. Le plus souvent ce trai-
tement utilise des ressources (techniques et humaines)
internes à l’entreprise.
Cette solution, simple à mettre en œuvre, rend l’entre-
prise indépendante de la sous-traitance mais totalement
dépendante de ses moyens. Ainsi elle est généralement
dimensionnée pour un volume « moyen » et présente
des difficultés de fonctionnement lors des phénomènes
de pointe. L’entreprise est responsable de ses investis-
sements et des évolutions technologiques de ses maté-
riels.
Cas d’une capture dans un centre de service partagé.
Un centre de services partagés (CSP) est une organisa-
tion chargée de gérer pour le compte de tiers des ser-
vices nécessaires à ces tiers. Il existe des CSP internes
ou externalisés.
Les flux peuvent être transmis directement depuis le ré-
Cette solution rend l’entreprise
indépendante de la sous-trai-
tance, mais totalement dépen-
dante de ses moyens ... »
«
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seau commercial ou passer par un niveau de regrou-
pement de collecte (impliquant généralement un délai
supplémentaire).
La boite postale peut être directement renvoyée vers le
centre de service partagé (modification de l’adresse ou
service de routage).
Le flux est traité de manière industrielle. Les étapes
sont similaires à celle du centre de traitement interne
avec quelques objectifs complémentaires :
- isolation des clients traités et des flux ;
- généricité des processus ;
- industrialisation des traitements.
L’ouverture et la préparation du courrier physique
(avant numérisation) sont des étapes clé qui consistent
en une gestion physique des documents papiers dans
la perspective des étapes ultérieures afin de:
- rendre possible les traitements de numérisa-
tion;
- standardiser, optimiser et sécuriser ces traite-
ments et leurs résultats.
Les opérations de préparation consistent à :
- ouvrir les plis postaux ;
- déplier les documents en sortie d’enveloppe ;
- désagrafer les documents ;
- effectuer les découpages si nécessaire, exemple
séparation de bons de réponse, … ;
- effectuer des traitements spécifiques dans le
cas de papiers fragiles (photocopies, ..) ;
- retirer les pièces non significatives ;
- appliquer des règles de tri complémentaires
spécifiques au client (exemple : collage des petites
pièces sur feuille blanche) ;
- opérer un tri afin d’optimiser le traitement à
opérer sur le document ;
- appliquer les règles de gestion de production
telles que :
- préparer et insérer les documents annexes :
fiches de lots, séparateurs de plis, étiquettes de boîtes
d’archives. Ces documents annexes sont porteurs d’in-
formations issues de capture ou de génération automa-
tiques (dates, compteurs);
- constituer les lots de dossiers. Un lot se définit
comme le regroupement d’un nombre déterminé de
dossiers ;
- constituer les lots de rejets qui comprennent
les documents incomplets ou hors périmètre ;
- élaborer l’éditique d’accompagnement des re-
jets (client assureur, client assuré);
- élaborer l’éditique d’accompagnement archi-
vage physique.
La solution du CSP est créée pour réaliser le traitement
de flux mutualisés sous la forme d’un service rendu
(CSP interne ou prestataire). Les investissements maté-
riels et logiciels sont facturés dans les coûts de traite-
ment. L’industrialisation du processus permet de
traiter des volumes très importants et gère les effets de
fluctuations par compensation entre plusieurs flux.
Cas d’une capture distribuée.
Dans le cas de réseau commercial largement déployé il
est pertinent de mettre en œuvre une capture distri-
buée. Des scanners sont installés au niveau du guichet
(au niveau du chargé d’accueil, en arrière du guichet,
bornes libres services, …). Les documents sont alors nu-
mérisés au fil de l’eau ou lors de la transaction client ;
on parle de dématérialisation à la source (ne pas
confondre avec le numérique natif).
La capture distribuée au niveau du réseau permet :
- de collecter les flux rapidement et de garantir
la traçabilité des documents échangés (reçus du client,
émis vers les centres de traitement ou de stockage) ;
- de traiter la qualité des images des documents
(contrôle au fil de l’eau) et de garantir l’intégrité des
images par un calcul d’empreinte.
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Il importe, pour que la capture distribuée soit
pleinement exploitée, d’inclure au niveau de
la solution centrale (regroupement des flux)
une traçabilité des flux ainsi que des outils de
pilotage adaptés. Les solutions de traitement
(en aval de la capture) doivent intégrer la pos-
sibilité de réception permanente de flux et
fonctionner en flux tendu pour que les résul-
tats de traitement soient rendus disponibles au plus tôt.
Cas d’une capture multi-canal.
L’évolution de la capture à la source se poursuit en in-
corporant le client dans le processus. Le client devient
acteur dans la complétion de son dossier. Le capteur est
un smartphone, un scanner personnel, un portail de do-
cuments numériques, etc.
Les objectifs sont nombreux :
- éviter la transmission sous forme de photocopie qui
augmente la charge de travail et dégrade la qualité de
l’information et nuit à l’environnement ;
- faire réaliser une partie du processus par le client lui-
même ce qui diminue d’autant les coûts de traitement;
- diminuer au maximum les délais de traitement ;
- rendre responsable le client de la qualité des informa-
tions transmises.
Les flux issus des bornes libres services peuvent être
collectés la nuit ou le week-end. Les solutions doivent
prendre en compte cette spécificité.
Le client est averti par différents canaux (SMS, e-mail,
…) de l’avancement de son dossier et des justificatifs
manquants. Il est de plus impliqué dans le traitement
de son dossier en renseignant les informations d’iden-
tifications et en ajoutant les pièces manquantes.
L’authentification impose de confirmer la validité des
échanges pour l’usage de différents canaux comme par
exemple l’envoi d’un mot de passe à usage unique par
SMS et la saisie sur un portail WEB, …
Point 2 : la gestion du Workflow de dématé-
rialisation
La chaîne de dématérialisation correspond à
une suite d’étapes. Entre chaque étape sont
échangés des informations ou des documents
avec généralement un changement d’état.
Le workflow de dématérialisation est consti-
tué d’une série d’activités définies par les rè-
gles de contrôle des documents. Il peut ainsi
inclure des traitements par exception ou un
contrôle qualité par échantillonnage.
Le workflow associé à des applications de sai-
sie client léger permet de répartir (partager)
les activités de complémentations ou de prise
de décision. Le processus peut ainsi être dis-
tribué en plusieurs localisations, chez un prestataire ou
en interne.
Le workflow est également chargé d’alimenter le jour-
nal de preuve qui servira de trace d’audit de toutes les
étapes réalisées. Une empreinte (hachage) complétée
d’une signature des images des documents permet de
garantir l’intégrité d’un document capturé lors des res-
titutions.
Il est évident que la capture repose principalement sur
la nature et les capacités du scanner utilisé. Ainsi il
existe différentes catégories de scanner adaptés à diffé-
rents usages.
La principale qualité du smartphone est d’être un objet
communiquant, multi-usage. La prise de photo peut
être assistée pour garantir un certain niveau de qualité
en vérifiant certains critères (orientation de la prise de
vue vis-à-vis du document, halos lumineux, éloigne-
ment excessif…). Un acquittement de la bonne prise en
compte du document par les serveurs frontaux est re-
commandé pour la bonne expérience utilisateur.
L’image est compressée dans le téléphone pour éviter
le transport d’un fichier trop volumineux.
Les particuliers disposent quelquefois d’une impri-
mante multifonction ou d’un scanner à plat. Les por-
tails web sont maintenant des occasions de capturer des
pièces complémentaires (carte d’identités, justificatifs
divers…). La prise d’image peut être opérée par le sim-
La chaîne de dématériali-
sation correspond à une
suite d’étapes ... »
«
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
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ple chargement d’un fichier préexistant ou intégrer le
pilotage du scanner personnel. Il est possible de garan-
tir l’horodatage de la capture.
Un réseau d’agences commerciales et les points de
vente sont autant d’occasion de capter les documents
clients. Les scanners d’agence sont généralement de fai-
ble encombrement, d’un coût compatible avec un dé-
ploiement important. Ils peuvent être pilotés par un
logiciel client lourd ou au travers d’une application
web.
Les scanners départementaux correspondent à un in-
vestissement modéré, de performance moyenne en
termes de vitesse, de taille de chargeur, de robustesse.
Ils nécessitent une présence importante lors de l’utili-
sation, mais sont relativement peu coûteux à l’acquisi-
tion et à l’entretien. Comme la cadence est relativement
lente, il est possible d’accepter des arrêts de production
pour saisir des informations lors de la capture (date,
type de flux, référence de lot, provenance, identifiant
d’opérateur …).
Le traitement de gros volumes associés à des
contraintes de délais de traitement amènent à utiliser
des scanners industriels. Comme les flux sont concen-
trés sur un centre de traitement important, il convient
de garantir le meilleur rendement des scanners et en
particulier limiter au minimum les arrêts de produc-
tion. Les flux sont donc préparés en amont (agrafes,
orientation des documents) pour obtenir la meilleure
productivité du scanner. L’ajout d’intercalaires est une
solution pour éviter les actions manuelles (sélection de
flux, saisie d’information).
Point 3 : les technologies de reconnaissance de
documents.
La classification. Une fois les documents numérisés, ils
peuvent être classifiés en utilisant différents critères tels
que la taille des pages, la détection de logo, la détection
de mots clés, l’analyse sémantique du résultat d’une
lecture automatique pleine page, la combinaison des
différentes techniques. Les règles de contrôles appli-
quées concernent :
- la complétude (présence de toutes les pièces
nécessaires dans un dossier) ;
- la conformité (cohérences des pièces, validité
des informations fournies par le client).
L’extraction de l’information. Ce qui intéresse les mé-
tiers, ce qui est important dans un document c’est l’in-
formation qu’il contient. Il est donc important de
pouvoir extraire de façon automatique les informations
présentes dans le document. Pour cela, différentes tech-
nologies sont utilisées en fonction des informations à
extraire :
Code à barre / patch / datamatrix permet de reconnaî-
tre immédiatement une série de caractères codés ; le
code à barre peut ainsi comprendre une libellé de pro-
duit, ou le nom d’une personne, un prix, un numéro,
une date, … ;
La lecture OCR est basée sur la reconnaissance de po-
lices normalisée telle que OCR-B ou police typogra-
phique bureautique ;
Lecture de manuscrit (précasés, écriture cursive) per-
met de transcrire les réponses et informations fournies
par le client en données informatiques pour permettre
les contrôles, l’indexation des documents et l’enrichis-
sement des bases de données.
L’analyse des données lues peut être améliorée de tech-
nique de rapprochement intelligente. Il est ainsi possi-
ble de reconstituer les informations incorrectement lues
par l’utilisation de référentiel. Ce procédé est particu-
lièrement utilisé pour reconnaître des adresses en rap-
prochant ce qui est lu d’un référentiel d’adresses grand
public ou professionnel.
Ces outils ou modules de lecture sont payants et leurs
tarifications sont variables :
- prépayées avec un crédit sur dispositif phy-
sique ;
- prépayées avec décompte sur compteurs à
fournir avec une périodicité fixe ;
- forfait par serveur, selon la puissance de calcul;
- comptage au champ présenté ;
- comptage au champ reconnu ;
- comptage au document avec tarif en fonction
du nombre de champs reconnus.
Point 4 : la mise en conformité des informations
extraites.
La première étape de traitement consiste à corriger les
informations lues depuis le document. La détection des
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
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informations à corriger est définie par différentes règles
de gestion (information non ou mal reconnue, format
incorrect, contrôle de cohérence entre plusieurs
champs, vérification règles métiers). Les mêmes
contrôles sont utilisés pour valider les corrections ap-
portées.
L’indexation. Certaines informations peuvent être sai-
sies lors de la préparation des documents pour conser-
ver la traçabilité des flux. Ces informations sont
transmises à la chaîne de numérisation sous la forme
d’intercalaire (origine du document, date de réception,
type de conditionnement reçu, identifiant du prépara-
teur). Les pages numérisées sont ainsi rapprochées des
informations de réception / préparation. De cette ma-
nière, il devient possible de s’assurer que l’ensemble
des flux reçus ont été traités.
En mettant à disposition des émetteurs de document
(agences commerciales) une application de déclaration
des flux émis, il est possible de suivre le bon traitement
jusqu’à la transmission au système de gestion ainsi que
l’envoi des flux physiques aux archives ou à leur des-
truction.
La saisie. Les reconnaissances automatiques ne recon-
naissent pas toujours l’intégralité des informations
contenues et ne permettent pas de s’affranchir d’un
traitement de vidéo-correction qui consiste en des sai-
sies, des doubles-saisies (une seconde saisie effectuée
par le même opérateur ou par un opérateur différent
est comparée à une première saisie), des corrections, le
rapprochement avec un référentiel, l’identification de
non-conformité. Elles sont réalisées au moyen d’un lo-
giciel sous différentes technologies :
Le contrôle des informations. Certaines informations
sont corrigées et validées par rapport à des référentiels.
L’objectif des référentiels est d’acquérir, tenir à jour un
ensemble de données à valeur de référence quelle que
soit leur origine. Ces référentiels interviennent en sup-
port :
- aux règles de gestion ;
- aux besoins règlementaires et légaux ;
Les référentiels les plus courants sont :
- référentiels client ;
- typologie de documents ;
- typologie d’anomalie ;
- typologie de courriers réponse ;
- référentiel postal ;
- référentiels adhérents ;
- référentiel de lettrage de factures ;
- référentiel d’éditique pour une campagne fer-
mée.
Contrôle qualité. Pour garantir le niveau de qualité du
traitement d’enrichissement, automatique ou manuel,
il importe d’incorporer dans la chaîne de traitement un
contrôle qualité. Le principe est de sélectionner un
échantillon pour opérer une vérification des données
produites. Cette vérification est une opération manuelle
effectuée sans connaissance des informations initiale-
ment saisies ou reconnues. Les deux résultats sont com-
parés pour valider le niveau de qualité global du
traitement échantillonné. Le niveau d’échantillonnage
est adapté en fonction du niveau de qualité attendu et
de la taille de la production à contrôler.
Point 5 : Archivage physique.
Une fois le passage au numérique réalisé,
il convient de conserver et de protéger les
documents physiques en prenant en
compte les exigences de l’entreprise et les
contraintes réglementaires et législatives.
Selon les processus, les documents sont
séparés en fonction de leur durée de
conservation (à recycler, à détruire,
conservation temporaire, archivage). Cer-
tains scanners apportent la capacité de
trier les pages pour extraire des pages au-
tomatiquement. Le cas le plus général ce-
pendant oblige une séparation manuelle des pages.
L’archivage peut être temporairement effectué dans un
local proche du centre de traitement (court terme) ou
être organisé pour une durée plus ou moins longue
chez un archiviste (interne ou externe).
L’archivage des pièces est effectué en suivant un pro-
cessus normalisé :
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
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- classement dans des boîtes d’archives ;
- étiquetage des boîtes d’archives avec la date, le
n° de lot, la séquence des pièces.
La destruction des documents est effectuée après la pé-
riode de rétention définie. La destruction peut être faite
avec un niveau de traçabilité garantissant le suivi des
flux détruits, en particulier pour garantir la confiden-
tialité ou être simplement détruit sans garantie.
Point 6 : Archivage logique à valeur probatoire.
L’évolution des traitements de dématérialisation per-
met de répondre à la production d’élément de preuve.
Ces éléments doivent permettre d’apprécier l’origine et
l’intégrité des documents présentés dans le cadre d’une
procédure judiciaire.
L’origine et l’intégrité des documents sont garanties en
utilisant des journaux de preuve contenant la traçabilité
des traitements, de la réception jusqu’à l’archivage et
l’utilisation des documents numérisés. Ces journaux de
preuves incluent un horodatage, l’empreinte des
images. La comparaison de l’empreinte donne une in-
dication de l’intégrité de l’image du document. Les
journaux eux mêmes sont protégés d’une altération par
un chaînage aval (chaque journal contient l’empreinte
du précédent).
La norme NF Z42-013 a été originalement utilisée pour
définir les moyens à mettre en œuvre pour garantir la
conservation et l’intégrité des documents stockés dans
un archivage électronique. Elle a été adaptée en 2009
pour remplacer la notion de support non réinscriptible
(WORM) par l’utilisation de moyens cryptographiques
(empreintes ou signature électronique). Elle est main-
tenant généralisée au niveau international avec la
norme ISO 14641-1.
La valeur probatoire des éléments issus de l’archivage
électronique est appréciée au regard des procédures de
traitement et d’exploitation et de leurs respects.
EDITIQUE ET COURRIERS SORTANTS
Les courriers sortants sont les courriers émis par l’en-
treprise. Ce sont des contrats proposés au client (rem-
plis et signés de l’entreprise), des factures, des relevés
de comptes, des supports d’offres marketing… et à ce
titre ils véhiculent l’image de l’entreprise.
L’entreprise rencontre une difficulté liée à la maturité
technologique de ses destinataires. En effet émettre des
documents « dématérialisés » donc en mode digital
natif signifie s’adresser à des interlocuteurs dotés de la
technologie réceptive. Si quasiment l’ensemble des en-
treprises réceptives sont dotées de moyens de réception
(le mail et internet) il leur faut aussi une « organisation
numérique » après la réception.
En fait, l’entreprise émettrice est tenue de maintenir
deux canaux de diffusion : l’un électronique et l’autre
physique.
La chaîne éditique prend sa source dans les systèmes
d’information en agrégeant de façon dynamique des
fonds de pages électroniques pré définis (type de page)
avec des données fixes ou des images (logo, textes lé-
gaux, coordonnées de l’entreprise, signatures, …) et des
données variables (données marketing, graphiques, ta-
bleaux de données, paragraphes conditionnels, mar-
quages optiques tels que codes-barres, marques de
pliage, identifiant courrier,…).
L’entreprise cherche à automatiser ses flux sortants car
elle structure ainsi une information qui lui est facile-
ment reconnaissable en retour. Elle incorpore des mots-
clés, des signes, des codes, … qui lui facilitent le
processus de réception et de traitement retour par re-
connaissance automatique d’informations permettant
d’initialiser voire de réaliser entièrement le traitement.
Ainsi, plus les flux sortants seront structurés, complets,
non ambigus et plus les traitements retours seront au-
tomatisés.
L’enregistrement du courrier sortant est l’équivalent de
la réception et préparation du courrier entrant. Une at-
tention toute particulière doit être portée sur la qualité
du fichier déposé sur le serveur d’édition.
La solution informatique génératrice du flux sortant
doit pouvoir offrir des fonctionnalités spécifiques telles
que :
- la mise à jour de la bibliothèque de textes ou
d’images suite à modification ;
- l’intégration de règles métier ;
- la validation des documents à éditer (avant
mise en production) se fait à travers des processus col-
laboratifs (workflow) ;
- le suivi et le contrôle / optimisation de flux
(contrôle de charge des imprimantes, interaction sur les
travaux en attente, possibilité de relance de traitement,
…) ;
- la fourniture d’un calendrier d’exploitation as-
socié à un CRM permettant d’associer des dates d’opé-
ration associées au document (envoi, plage de retour) ;
- la tenues des listes émises (reconnaissance par
code-barres / datamatrix dans la fenêtre d’adresse) ;
- le suivi des dépenses postales ;
- le planning des retours attendus ;
- le suivi des PnD (ex NPAI).
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 19
QUELQUES REMARQUES
Remarque 1 : sécurité des plateformes.
L’architecture doit répondre aux engagements de conti-
nuité d’activité et de reprise d’activité dépendant du ni-
veau de criticité et des contraintes règlementaires
(Sarbanes-Oxley, CRBF 97-2 pour prestation de service
essentiel externalisée).
La plate-forme principale de traitement peut être
conçue pour supporter une défaillance d’un élément
unique. On évite tous les éléments uniques dans l’ar-
chitecture (principe du SPOF, single point of failure).
Cela se traduit par des alimentations redondantes, baie
de disques redondées, serveurs en cluster capable de
basculer les traitements en cas de panne (principe de
failover). Le plus haut niveau de sécurité est assuré par
du clustering géographiquement réparti.
L’ensemble des mécanismes de continuité d’activité
sont formalisés dans un plan de continuité d’activité
(PCA)
Cette plate-forme principale peut être secourue par un
site de secours ou de reprise d’activité. Le traitement
peut être assuré en restaurant les données sauvegar-
dées du site principal et en retraitant les flux reçus ul-
térieurement avec un mécanisme de dédoublonnement.
Une réplication des données au fil de l’eau permet de
minimiser l’impact de la bascule en site de secours.
La procédure de reprise doit être formalisée dans un
plan de reprise d’activité (PRA) qui prévoit l’organisa-
tion de la décision de bascule et les points de contrôle.
Un test périodique de la procédure de reprise est obli-
gatoire pour s’assurer du bon fonctionnement des sys-
tèmes et des organisations.
Remarque 2 : impact sur l’organisation interne des
processus.
Le passage au numérique n’est pas sans conséquences
pour l’organisation interne des services de l’entreprise.
En effet, l’information logique peut être partagée (ac-
cessible en lecture par de multiples utilisateurs) et ac-
cessible à distance.
Ainsi, étudions le processus de réception d’un courrier
de résiliation d’une assurance :
- Dans le cas d’un traitement « physique », le
courrier est réceptionné et dispatché en fonction de
l’adresse des services. Il est ensuite ouvert et dispatché
en fonction des missions des agents de traitement.
- Dans le cas d’un traitement « logique » la re-
connaissance du mot RESILIATION amène automati-
quement à rapprocher un numéro de sociétaire d’une
date de résiliation (exemple : trois mois avant la fin du
contrat) et à valider ou refuser le courrier.
Il apparait très clairement que des étapes à faible valeur
ajoutée pour le traitement peuvent être supprimées et
ainsi permettre de gagner de la charge et du temps de
traitement.
Remarque 3 : impact sur le workflow et prise de
décision.
Le workflow qui est un outil associé à la notion de dé-
matérialisation permet d’organiser « logiquement » le
traitement des opérations :
- enrichissement des données ;
- contrôle de cohérence ;
- validation ;
- prise de décision.
En organisant des étapes avec une gestion des flux en
mode PUSH et alerte des opérationnels en fonction de
planning. Il apparait ainsi que la prise de décision et gé-
néralement plus argumentée (fourniture des pièces
jointes, indication d’informations complémentaires et
avis, …) et surtout plus rapide.
CONCLUSION
Après pratiquement une vingtaine d’année d’amélio-
rations techniques et de déploiement de solutions, on
peut parler d’une généralisation de la dématérialisation
à partir de support physique ou nativement numé-
rique. Les bénéfices les plus évidents sont largement
couverts par les solutions mises en place.
- Optimisation des coûts par les traitements au-
tomatiques, la facilité de recherche de l’information.
- Augmentation de l’activité commerciale par la
distribution du processus, le partage d’activités.
- Amélioration de la qualité et de la conformité
par l’introduction du contrôle dans la chaîne de traite-
ments.
Les enjeux à venir tiennent en quelques points décisifs
pour permettre une plus grande efficacité.
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com20
- Améliorer les échanges entre les clients et l’en-
treprise pour plus de dynamisme et de visibilité des
traitements par le biais d’un accès web collaboratif et
l’intégration multi-canal.
- Permettre une adaptation des processus aux
évolutions de flux (nouveaux produits, nouveaux do-
cuments) à travers des plateformes informatiques
multi-flux évolutive.
- Intégrer la confiance numérique pour éviter la
conservation des documents papier en application de
normes telles que la NF Z42-013 et ISO 14641-1.
Après avoir étendu les processus à toute l’organisation
de l’entreprise (réseau d’agence, backoffice, service
clientèle, directions…), les clients sont maintenant in-
vités à participer à l’alimentation des pièces dans leur
dossier et à fournir leur consentements. Le collaboratif
se généralise pour un meilleur service et une diminu-
tion des coûts.
On peut ainsi parler d’une dématérialisation 2.0 com-
binant l’ensemble des possibilités d’échanges disponi-
bles (mobile, web, appel téléphonique, papier
(toujours), bases de données).
Alain Boyer, Directeur d’Homo Numer Management.
Joël Quéré, Directeur d’Optimaliste.
Alain Boyer
Après un doctorat de 3ème cycle en géophysique Alain
BOYER prend la responsabilité scientifique d’une sta-
tion sismique en Côte d’Ivoire et participe en tant que
consultant UNESCO au programme d’étude du risque
sismique en Afrique de l’ouest. Il occupe ensuite diffé-
rents postes (Ingénieur informaticien puis responsable
qualité, responsable avant-vente et directeur des pro-
cessus, de l’organisation et de la qualité) pour le compte
de grandes SSII et Directeur de l’organisation et de la
qualité pour un opérateur télécoms.
En 2002, il crée une société de conseil en organisation
homo numer management spécialisée en organisation
informatique et dans l’accompagnement au passage au
numérique des entreprises.
Il est le co-auteur d’un ouvrage traitant de l’organisa-
tion de l’entreprise en « période de fortes turbulences »
(Editions d’Organisation, 2000) et l’auteur d’un guide
de méthodes et d’outils destinés à la fonction commer-
ciale (Dunod, 2007).
Joël Quéré
Joël Quéré est ingénieur en architecture des composants
électroniques. Début 1990, il est responsable des archi-
tectures des logiciels embarqués et des solutions appli-
catives de l’unité de R&D d’Unisys localisée en France.
Il participe en 1994 à la création d’ATHIC, un éditeur
de logiciel spécialisé dans la dématérialisation, en tant
qu’associé et Directeur Technique. Il devient créateur
de la plateforme progicielle STARTHIC qui est adoptée
par les plus grands établissements bancaires Français
pour la dématérialisation des remises de chèques. Il se
spécialise ensuite dans la dématérialisation de docu-
ment et la confiance Numérique. En 2013, il fonde sa
société de conseil, Optimaliste, spécialisée dans la dé-
matérialisation, la confiance numérique et les moyens
de paiements.
Alain Boyer
Joël Quéré
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 21
La dématérialisation, au cœur de la
démarche de modernisation de l’Etat.
D
epuis janvier 2012, un outil unique et partagé de tenue des comptabilités assure la
production des états financiers de l’Etat. Il permet de ne pas matérialiser l’ensemble des
procédures et des actes de gestion, et induit l’évolution progressive des pratiques : les ac-
teurs sont incités à ne plus produire et échanger de documents papier. C’est une profonde évolution
des méthodes de travail.
L’Agence pour l’Informatique Financière de
l’Etat (AIFE) est un service à compétence na-
tionale rattaché au ministère des finances et
des comptes publics. Régine Diyani en est la
directrice. L’AIFE a conduit le projet de
construction de ce nouvel outil dans son rôle
de définition et de mise en œuvre de la straté-
gie informatique financière de l’Etat.
Ses principales missions sont :
- piloter l'urbanisation du système d'in-
formation financière de l'Etat ;
- promouvoir et contribuer à la transfor-
mation de la fonction financière ;
- maintenir en condition opérationnelle
le système d'information Chorus, de gestion
de la dépense, de la recette non fiscale et de la
comptabilité de l'Etat ;
- piloter de nouveaux projets interminis-
tériels ou ministériels et leur intégration dans
le système d'information Chorus ;
- accompagner le changement dans les
ministères et auprès des utilisateurs.
CONCEPTION D’UN OUTIL INTÉGRÉ
ET PARTAGÉ
La LOLF (Loi Organique relative aux Lois de
Finances), loi votée en 2001 à l’unanimité des
deux assemblées, favorise le passage d’une
culture de moyens à une culture de résultats,
en organisant la procédure budgétaire autour
d’une logique de performance de la gestion
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com22
publique et de transparence de l’information.
Elle a également introduit dans la gestion fi-
nancière de l’Etat de nouvelles règles compta-
bles, plus proches des pratiques courantes des
entreprises.
La première étape de sa mise en œuvre a été
une réingénierie des processus de gestion de
l’Etat et la redéfinition du rôle et des respon-
sabilités des différents acteurs ; tout ceci dans
un but de simplification des procédures,
d’amélioration de l’organisation des différents
services et d’optimisation de l’efficacité.
La seconde a été la construction du système
d’information financière de l’Etat, baptisé
« Chorus » au profit de tous les ministères.
Celui-ci est le fruit d’un travail de conception
interministériel qui a permis de mettre en
œuvre l’ensemble des dispositions de la LOLF
dans un outil intégré et partagé. Utilisé dans
les services centraux et déconcentrés de l’Etat
par tous les acteurs de la chaine budgétaire et
comptable, Chorus est l’outil unique et central
de pilotage de la gestion publique ; il permet
notamment de produire les comptes de l’Etat
transmis à la Cour des Comptes mais il gère
aussi l’ensemble des dépenses de l’Etat (ex-
ception faite de la paye des agents) et les re-
cettes non fiscales.
L’AIFE l’a conçu et déployé sur la base d’un
ERP (SAP) et est chargée de son bon fonction-
nement et de l’urbanisation du Système d’In-
formation Financière de l’Etat (SIFE). Le SIFE
regroupe les processus, activités, données, or-
ganisations et outils permettant de traiter et
diffuser les informations budgétaires et comp-
tables de l’État. Sa gouvernance est assurée
par une instance interministérielle : le Comité
d’Orientation Stratégique (COS) du SIFE, mis
en place lors du lancement du projet Chorus
en 2006 et qui a perduré depuis et continue de
jouer totalement son rôle. Ce comité, dans le-
quel tous les ministères (ainsi que
les directions règlementaires de
Bercy) sont représentés au plus haut
niveau, rend les arbitrages straté-
giques requis sur les aspects tech-
niques et fonctionnels.
L’éventail des fonctionnalités mises
en œuvre, le recours à des presta-
taires de service intervenus tout au
long du projet, les dimensions de l’architec-
ture et les volumes de données traitées carac-
térisent ce projet hors norme. 53.000
utilisateurs récurrents (dont 23.000 du cœur
Chorus), plus de 15.000 connexions quoti-
diennes, 400 Téra octets de données, 1000 ser-
veurs, 17 millions de documents
dématérialisés, 100 millions de pages… et d’ici
2020, 95 millions de factures fournisseurs de-
vraient être dématérialisées dans le cadre d’un
nouveau projet dont le périmètre s’élargi à la
totalité de la sphère publique.
UNE FORTE MOBILISATION
Tous les ministères ont été mobilisés au cours
de chacune des phases du projet. « La re-
cherche d’un consensus a toujours été privilé-
giée. Chorus a été construit avec eux et c’est
sans doute là, la clé du succès du projet : ce
n’est pas l’outil de Bercy ou de l’AIFE » pré-
cise Régine Diyani, mais bien l’outil de chaque
ministère, outil partagé par tous avec le même
objectif de la mise en œuvre complète de la
LOLF telle que l’avait voulue le législateur en
2001.
Lors de la conception, les besoins des maî-
trises d’ouvrage ont été spécifiés dans le cadre
de groupes de travail, pour ensuite être outil-
lés en les inscrivant dans des processus de ges-
tion normalisés.
Lors de la construction, les ministères et les di-
rections réglementaires du ministère des fi-
nances ont été étroitement associés à toutes les
phases du projet.
Pendant le déploiement, les utilisateurs au
sein de chaque ministère ont bénéficié d’un
plan de formation adapté : 40.000 personnes
formées en 3 ans par 1.079 formateurs minis-
tériels dans le cadre de 85 cursus s’appuyant
Première étape, la réingénierie des
processus de gestion de l’Etat et la
redéfinition du rôle et des respon-
sabilités des différents acteurs
...»
«
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 23
sur 218 supports de formation et 700
manuels utilisateurs.
Après le déploiement, l’AIFE a mis
en œuvre un dispositif de support
aux utilisateurs afin de répondre aux
sollicitations et assurer l’amélioration
continue de la solution applicative et
des dispositifs de déploiement et de
support.
La préoccupation de l’alignement sur
les bonnes pratiques a été constante :
avant et pendant le projet, mais aussi
actuellement. C’est ainsi que de nom-
breux recensements des bonnes pra-
tiques ont été réalisés, notamment auprès
d’établissements publics, d’autres administra-
tions à l’étranger, mais aussi d’entreprises pri-
vées et auprès du club des utilisateurs de SAP
(USF).
L’AIFE fait réaliser, par un organisme tiers
spécialisé, tous les six mois une vaste enquête
de satisfaction des utilisateurs Chorus. Les ré-
sultats sont très bons, avec un taux global
moyen de satisfaction de 87% en 2013.
LA DÉMATÉRIALISATION, UN
CHANGEMENT CULTUREL
La dématérialisation est au cœur des enjeux
de l’AIFE et du Système d’Information
Chorus :
- la dématérialisation des factures des
fournisseurs avec Chorus Factures : afin de ré-
pondre à l’obligation pour l’État d’accepter les
factures émises par ses fournisseurs sous
forme dématérialisée ;
- la dématérialisation des frais de justice
à travers un portail dit « Chorus Portail Pro »;
- la dématérialisation des marchés pu-
blics : la plateforme des achats de l’État
(PLACE) permet aux fournisseurs de téléchar-
ger les dossiers de consultation et de remettre
sous forme électronique les ré-
ponses aux appels d’offres. La pro-
cédure de marché, depuis le dépôt
du dossier de consultation des en-
treprises jusqu’à la notification, est
ainsi totalement dématérialisée ;
- le pilotage stratégique des achats avec
l’Outil Décisionnel Achats (ODA) : il doit per-
mettre aux acheteurs de disposer d’informa-
tions normalisées et partagées sur les achats,
les contrats et les fournisseurs, pour définir et
suivre des plans d’actions ;
- la gestion des déplacements tempo-
raires des agents avec Chorus Déplacements
Temporaires : outil interministériel dématéria-
lisant la gestion des états de frais et des frais
de mission.
Cette dématérialisation n’est pas seulement
une « bonne pratique » de réduction des coûts,
de diminution de l’impact environnemental
ou de simplification des contrôles et d’optimi-
sation des délais et des activités des agents.
C’est également une philosophie de la dé-
pense publique, un processus vertueux avec
un engagement juridique préalable dématéria-
lisé. Ce processus a été un véritable boulever-
sement tant aux niveaux des pratiques que
des processus. Il a fallu tout mettre « à plat ».
La dématérialisation avec le « système Cho-
rus» est une évolution profonde des méthodes
de travail et un véritable changement culturel
qui s’inscrit parfaitement dans la LOLF.
Une évolution profonde des mé-
thodes de travail et un véritable
changement culturel ... »
«
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com24
EXEMPLE DE LA FACTURATION
La dématérialisation consiste à mettre en
œuvre des moyens numériques pour effectuer
des opérations de traitement, d’échange et de
stockage d’informations sans support papier.
Avec Chorus-Factures, cela se traduit par une
dématérialisation fiscale des factures, seules
pièces faisant foi fiscalement.
Intégrée au système d’information Chorus, la
solution Chorus Factures répond aux enjeux
de la Loi de Modernisation de l'Économie
(LME), donnant obligation à l'État depuis le
1er janvier 2012, d'accepter les factures four-
nisseurs dématérialisées.
Chorus Factures traduit cette contrainte légale
en un ensemble de services rendus aux entre-
prises, leur permettant de s’engager avec
l’Etat dans la voie de la dématérialisation de «
bout en bout ».
Service web gratuit accessible sur internet, il
propose plusieurs modes de transmission des
factures en fonction des volumes et besoins
des entreprises fournisseurs ainsi qu’un suivi
de l’avancement du règlement des factures.
A travers ces services, la solution Chorus Fac-
tures contribue à atteindre un triple objectif de
développement durable, de développement
numérique et de modernisation de l’adminis-
tration.
Avec certains grands fournisseurs (d’énergie
par exemple), cela va même plus loin, par la
voie de la contractualisation à travers un
« plans de facturation », c’est-à-
dire une prévision des montants
qui seront automatiquement
payés chaque mois, puis ensuite
régularisés sur la base des
consommations effectives. Ainsi,
il n’y a même plus d’émission de
factures dans ce cas.
EN CONCLUSION
Le projet Chorus, d’une ampleur exception-
nelle, qui s’inscrit dans une transformation de
la fonction financière de l’Etat, peut légitime-
ment être considéré comme une réussite. Vé-
ritable mutation, il a demandé un travail de
re-conception des processus de la dépense et
la simplification du plan comptable de l’Etat.
Le système d’information financière de l’Etat
avec Chorus apparait comme l’un des leviers
majeurs de la modernisation dans la mesure
où il permet de gagner en temps et en effica-
cité via l’automatisation des tâches et de mu-
tualiser les applications ministérielles de
gestion, tout en garantissant fiabilité et traça-
bilité des données traitées. La dématérialisa-
tion était le corollaire indispensable de la
modernisation de l’Etat selon une logique in-
terministérielle. La dématérialisation déjà in-
trinsèque au système d’information Chorus,
va être encore appelée ces prochaines années
à se renforcer, notamment à travers la pro-
chaine obligation de dématérialisation des fac-
tures fournisseurs de l’ensemble de la sphère
publique. Mais l’objectif reste le même, une
modernisation de l’Etat dans le but de simpli-
fier et de sécuriser la relation Etat-entreprises.
Propos recueillis auprès de Régine Diyani,
directrice de l’AIFE.
Régine Diyani
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 25
Les conséquences de la dématérialisation
dans les rapports judiciaires et dans
les relations avec l’administration.
D
epuis le début du XXIème siècle, le
droit - comme le reste de la société -
vit une mutation dont les effets à long
terme sont difficiles à prévoir. L'écrit, qui est le
ferment de la civilisation, passe du support ma-
tériel et durable au support immatériel et éphé-
mère. Il en résulte d’importants changements. Si
l’écrit peut maintenant être diffusé dans le
monde entier à la vitesse de l'électron, sa conser-
vation est devenue tributaire du matériel, du lo-
giciel et de l’électricité. L'authenticité des écrits
électroniques est, quant à elle, sujette à caution
permanente.
Une technologie plus que toutes les autres accom-
pagne et favorise ce bouleversement : Internet. Ce
sont tous les rapports sociaux qui doivent être re-
visités : rapport entre employeurs et employés,
rapports entre commerçants et clients, rapports
entre pouvoirs publics et administrés, rapports
entre citoyens.
La dématérialisation de l'écrit entraîne des boule-
versements juridiques. La loi appréhende ces mu-
tations sans approche systématique. Il n’existe pas
de Code de l’écrit électronique. C’est probléma-
tique après problématique que le législateur
aborde la dématérialisation, sans cohérence. Il ne
faut pas s’en étonner. Tout comme le courrier élec-
tronique a conduit les entreprises à repenser leurs
méthodes de vente, de production, de manage-
ment, la dématérialisation conduit le législateur à
revisiter l’intégralité de notre législation.
Les dispositions législatives ou réglementaires en-
cadrant la dématérialisation se sont multipliées. Si
l’on peut regretter le manque de cohérence et de
« plan d’ensemble » entre toutes ces législations, il
faut surtout dénoncer le vocabulaire technico-
technocratique avec lequel elles sont rédigées. La
compréhension des textes en la matière n’est l’apa-
nage que d’un petit groupe de juristes spécialisés,
et encore, qui doivent également s’en remettre à
quelques techniciens. Si la loi n’est pas intelligible
pour l’ensemble de ceux qui y sont soumis, elle
manque évidemment à son objet. Pourtant, la dé-
matérialisation de l’écrit touche tous les justicia-
bles. Il ne s’agit pas d’une problématique réservée
aux grandes entreprises ou aux administrations.
Nous envisagerons les mutations qu’engendre
l’écrit électronique dans les relations contrac-
tuelles et judiciaires mais également entre l’admi-
nistration et les administrés.
LA DÉMATÉRIALISATION DE LA PREUVE
DANS LES RELATIONS DE DROIT PRIVÉ
Dans notre système juridique hérité du code na-
poléon, l’écrit, entendu comme écrit papier, a reçu
comme fonction première et essentielle de garantir
la preuve des engagements, et au premier chef,
des contrats. C’est ce que les juristes appellent les
« actes juridiques ».
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com26
L’échec de l’écrit électronique comme moyen
de preuve des actes juridiques
Les législateurs européen et français ont rapide-
ment souhaité tenir compte de l’émergence de
l’écrit électronique pour réformer le droit de la
preuve. Mais l’enfer est pavé de bonnes intentions.
L’écrit électronique, et son corolaire la signature
électronique, ont été introduits en droit français
par une la loi du 13 mars 2000, transposant une di-
rective européenne du 13 décembre 1999 sur un
cadre communautaire pour les signatures électro-
niques. Quatorze années après, le moins que l’on
puisse dire, est que l’écrit électronique n’a pas
connu le succès escompté dans notre système pro-
batoire. Il faut dire que les dispositions légales et
réglementaires inventées pour l’occasion laissent
songeur quant à leur nombre et à leur complexité.
La compréhension du dispositif légal entourant la
preuve électronique nécessite l’étude de ces textes:
la loi du 13 mars 2000, un décret du 30 mars 2001,
un décret du 18 avril 2002 et un arrêté du 26 juillet
2004.
L'admission de l'écrit électronique en tant que
mode de preuve d’un acte juridique est soumise à
trois conditions : que son auteur puisse être iden-
tifié (c'est-à-dire qu’il ait signé électroniquement
le document), que cet écrit soit établi et conservé
dans des conditions de nature à en garantir l'inté-
grité.
Ces conditions posées à l’article 1316-4 du code
civil pour l'écrit électronique existent en réalité
également depuis toujours mais de manière impli-
cite pour l’écrit papier. Un document papier,
comme un contrat, constitue une preuve si l’on
peut identifier son signataire et si celui-ci ne pré-
sente aucune marque de falsification. Mais dans le
monde papier, ces caractéristiques sont finalement
simples à réunir.
L’attention spéciale que porte le législateur à l'écrit
électronique révèle les difficultés tech-
niques importantes que pose l’électro-
nique pour que le document
électronique réunisse les mêmes condi-
tions de fiabilité que le papier.
Ainsi, la signature électronique néces-
saire à la fiabilité probatoire d’un docu-
ment électronique doit consister en
l'usage d'un procédé fiable d'identifica-
tion garantissant le lien de la signature
avec l'acte auquel elle s'attache (article 1316-4 du
Code civil). Il convient de préciser ici que la signa-
ture que l'on insère parfois automatiquement au
bas du courrier électronique n'est pas une signa-
ture électronique au sens de l'article 1316-4 du
Code civil. Il en est de même du document signé
de façon manuscrite puis scanné. Ce qui ne ressort
pas d’évidence à la lecture des textes, c’est qu'une
signature électronique est le résultat d'un algo-
rithme mathématique faisant usage des technolo-
gies de cryptographie dites asymétriques. Cette
technique garantit entre la signature et le docu-
ment signé un lien tel que toute modification ulté-
rieure de l'acte est détectable. La signature
électronique doit également reposer sur l’usage
d’un certificat électronique « qualifié ». Il s’agit
d’une sorte de carte d’identité électronique qui at-
teste de l’identité du signataire.
La réunion de l'ensemble des conditions pour dis-
poser d’une signature électronique fiable valant
preuve d’un écrit au même titre que la signature
papier s'avère en réalité fastidieuse et hors de por-
tée des justiciables. D’autant plus que les certificats
électroniques ont une durée de validité limitée
dans le temps, en général trois ans, et il est donc
nécessaire de les renouveler fréquemment.
Là où la preuve papier est simple et répandue, car
tout le monde est en mesure de signer un contrat,
un bon de commande, un reçu, etc., pourvu qu’il
soit majeur, le document électronique est quasi-
ment inexistant dans un usage quotidien et même
dans les rapports entre les entreprises s’agissant
de la preuve des actes juridiques.
Le succès de l’écrit électronique dans la
preuve des faits
A côté des engagements – des contrats – l’écrit est
également utile (mais non obligatoire) pour prou-
ver les faits. Un fait juridique est un événement
ayant des conséquences juridiques. A l’inverse des
L’admission de l’écrit électro-
nique en tant que mode de
preuve d’un acte juridique est
soumise à conditions ...»
«
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 27
contrats, pour lesquels une preuve écrite est néces-
saire au-dessus de 1 500 euros, un fait juridique
peut se prouver par tout moyen.
La dématérialisation de l’écrit provoque une
conservation presque automatique et involontaire
d’informations qui autrefois ne laissaient aucune
trace. Aujourd’hui, les entreprises sédimentent
dans leurs systèmes d’information, de messagerie
électronique notamment, des téraoctets de don-
nées qui vont être, pour leur potentiel adversaire,
mais aussi pour les autorités de contrôle comme le
fisc ou l’Autorité de la concurrence par exemple,
une sorte de réservoir de preuves quasiment iné-
puisable auquel ces adversaires ou ces autorités
ont accès.
L’autre caractéristique de ce phénomène, c’est la
quantité. On parle aujourd’hui de « big data »
pour désigner le fait que l’on produit et que l’on
stocke toujours plus d’informations.
Cela est de nature à modifier de manière considé-
rable l’organisation et le déroulement du procès
civil, en tout cas du procès commercial. Cela peut
aussi modifier de manière fondamentale, la ma-
tière litigieuse elle-même. Un litige que l’on sou-
met à un juge n’est jamais que ce que l’on est
capable de prouver : plus il y a de preuves, plus il
y a de possibilités de procès.
La facilité de cet accès à la preuve numérique et la
quantité de preuves peuvent être trompeuses et
surtout instrumentalisées.
Aujourd’hui, au fondement de l’article 145 du
code de procédure civile, une entreprise peut ob-
tenir qu’un juge autorise un huissier de justice, as-
sisté d’un expert technique, à investiguer sur le
système d’information d’un adversaire, un
concurrent par exemple, lorsque cette entreprise
soupçonne un comportement fautif à son encon-
tre. Ainsi, l'ordinateur personnel d'un ancien sala-
rié soupçonné de contrefaçon ou de concurrence
déloyale peut faire l’objet de ce type d’investiga-
tion.
A la suite de ces procédures, qui sont parfois dili-
gentées en même temps sur plusieurs sites d’une
même société, les huissiers diligentés se retrouvent
dépositaires de quantités importantes de données
(documents, mails, et autres fichiers numériques).
Cela conduit souvent les parties dans des exper-
tises techniques dans lesquelles l’huissier déposi-
taire doit veiller au respect du secret des affaires
et à la confidentialité des informations. En raison
de la quantité des informations saisies et de la dif-
ficulté d’organiser le séquestre de ces informations
par l’huissier, leur traitement probatoire conduit
souvent les parties dans des expertises longues et
onéreuses.
Sans même utiliser les ressources de l’article 145
du code de procédure civile, on constate égale-
ment que les entreprises, dans leurs relations d’af-
faires, sont amenées à échanger de plus en plus
d’informations sous forme écrite, notamment par
mail. Cela conduit également à un accroissement
considérable des informations devant être traitées
par les plaideurs et les juges lorsqu’un contentieux
est engagé.
Ainsi, au-delà des apparentes facilités de l'écrit
électronique en terme d’échange et de conserva-
tion, il est également à l'origine d'une profonde
modification du contentieux commercial de par le
champ nouveau qu’il ouvre au contentieux mais
également au regard de la lourdeur et de la com-
plexité que crée son traitement judiciaire.
STRATÉGIE ET MANAGEMENT
Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com28
L'ÉCRIT ÉLECTRONIQUE DANS LES
RELATIONS ENTRE USAGERS ET
ADMINISTRATIONS
La dématérialisation de la relation entre adminis-
trations et usagers remonte à la loi du 11 février
1994, dite loi « Madelin ». Son article 4 prévoyait
que toute déclaration d'une entreprise destinée à
une administration pouvait être faite par voie élec-
tronique sous réserve qu’un contrat soit passé
entre l’administration et l’entreprise pour fixer les
règles de cet échange dématérialisé.
C’est aujourd’hui l'ordonnance du 8 décembre
2005 relative aux échanges électroniques entre les
usagers et les autorités administratives qui consa-
cre véritablement l'entrée de l'administration dans
le monde de la dématérialisation dans ses relations
avec les administrés. Bien plus large que les « dé-
clarations » administratives prévues par la loi Ma-
delin, l'ordonnance ajoute au champ d'application
de la dématérialisation, toute demande d'informa-
tions, déclaration ou production de documents,
ainsi que les paiements opérés dans le cadre des
télé-services.
Corollairement, la légalité de l'utilisation de la si-
gnature électronique dans la sphère publique est
reconnue par cette ordonnance. Les actes des au-
torités administratives peuvent être passés sous
forme électronique, dès lors qu'une signature y est
apposée. Cette signature doit être conforme à des
prescriptions techniques figurant dans un docu-
ment intitulé le « référentiel général de sécurité »
(RGS), adopté par arrêté du 6 mai 2010. Ce réfé-
rentiel, spécifique à la sphère publique, fixe les rè-
gles auxquelles les systèmes d'information mis en
place par les administrations doivent se conformer
pour assurer la sécurité des informations échan-
gées, et notamment leur confidentialité et leur in-
tégrité, ainsi que la disponibilité, l'intégrité de ces
systèmes et l'identification de leurs utilisateurs.
Le niveau de complexité technique et juridique au-
quel aboutit le RGS est symptomatique de la diffi-
culté du pouvoir réglementaire à encadrer l’usage
des techniques de dématérialisation, notamment
la signature électronique. La procédure de passa-
tion dématérialisée des marchés publics en est un
bon exemple. La législation relative aux marchés
publics dématérialisés a fait l’objet depuis 2001 de
modifications fréquentes, instabilité juridique et
technique nuisible tant aux pouvoirs adjudicateurs
qu’aux soumissionnaires. Aujourd’hui, l’arrêté du
15 juin 2012 relatif à la signature électronique dans
les marchés publics ne prévoit pas moins de trois
catégories différentes de certificats électroniques
utilisables dans ce type de marché…
La dématérialisation des procédures administra-
tives a été instaurée dans un souci de productivité
(réduction voir disparition de l'archivage papier),
réactivité de l'administration face aux demandes
des usagers, réduction des coûts liés au traitement
du papier. Il ne faut néanmoins pas omettre les au-
tres contraintes que le processus de dématérialisa-
tion génère pour l'administration, tant
économiques qu'organisationnelles. Il suppose la
mise en place d'un système informatique perfor-
mant et fiable. Les logiciels ainsi intégrés doivent
être adaptés aux agents publics lesquels devront
nécessairement être formés à l'utilisation qu'ils en
font. Le coût et la complexité engendrés par la dé-
matérialisation ne doivent certainement pas être
minorés. Ils doivent certainement être anticipés
avec plus de circonspection qu’on ne l’a fait
jusqu’alors.
Etienne Papin, Avocat associé, Féral-Schuhl/
Sainte-Marie.
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  • 1. Responsabilité sociétale Développement durable Responsabilité sociale Environnement S é c u r i t é Q u a l i t é Ethique ISSN0767-9432 LL’’èèrree dduu nnuumméérriiqquuee,, vveerrss uunn nnoouuvveeaauu bbuussiinneessss mmooddeell...... Innovation et métamorphose numérique. page 6 La dématéria- lisation au cœur de la modernisation de l’Etat. page 21 N°252 Mai 2014LA REVUE DES MANAGERS ET DES ORGANISATIONS RESPONSABLES
  • 2. L’ère du numérique, vers un nouveau business model... Stratégie et Management 64 25 38 29 66 Dossier : L’ère du numérique, vers un nou- veau business model... SOMMAIRE N°252 • MAI 2014 Edito La révolution numérique : une lame de fond sociétale qui marquera l’histoire de l’humanité. Rencontre avec ... Philippe Letellier. Métamorphose numérique et innovation. Actualités Cybersécurité : partenariat stratégique entre Alcatel-Lucent et Thales. L’IRT Jules Verne se dote d’un Conseil Scientifique. 4 6 6 9 9 11 21 9 Sélection du mois Tendances Philippe Letellier, Directeur de l’innovation à l’Institut Mines-Télécom.. L’Internet des objets. La dématérialisation. La dématérialisation au cœur de la démarche de modernisation de l’Etat. Les conséquences de la dématérialisation dans les rapports judiciaires et dans les relations avec l’administration. Nouveaux rôles de la Fonction SI à l’ère du numérique. Natifs numériques et évolution des organisations : une exploration. Internet des objets : la gestion de projet. Internet des objets : le business model. Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 3 Rencontre avec... 43 52
  • 3. N° 252 - MAI 2014 JEAN-LUC LAFFARGUE Aujourd’hui le numérique est au cœur de tous les processus et en particulier celui de l’inno- vation : Internet et les réseaux sociaux, la géolocalisation, les smart grids, les MOOC, les objets connectés et intelligents, les jeux, le design numérique, l’impression 3D, les robots… le numé- rique nous entraine dans un véritable « big bang ». Avec lui, l’ère du tout connecté est en route. En quelques années, l’économie numérique a explosé et va encore plus révolutionner notre façon de communiquer, de consommer, de travailler, de nous soigner, de vivre et de penser. Parler de société numérique signifie que tous les aspects de la vie sociale, l’économie, l’orga- nisation du travail, les relations interindividuelles, la culture, les loisirs… se trouvent concernés par cette transformation de nos modes de communication et d’information, créant un mou- vement sociétal d’un autre type par la modification de notre rapport aux autres et au monde. Cette transformation va concerner également la structure cognitive de l’individu à la fois dans son fonctionnement et dans ses rapports avec la société. Les nouveaux usages en ligne, les nouvelles technologies de l’information et de la communi- cation font avancer l’homo-numericus avec une rapidité prodigieuse accélérant encore plus les changements et laissant sur son passage les gouvernants, managers, acteurs économiques qui, souvent dépassés, n’ont pas compris que le monde est devenu interdépendant et surtout interconnecté. Cette véritable mutation numérique est transversale ; elle n’est pas une écono- mie à part, mais bien au contraire, elle irrigue tous les domaines d’activité et tous les acteurs de l’économie. Nous parlons de 50 à 80 milliards d’objets connectés d’ici une di- zaine d’années. Il est vrai que potentielle- ment tout est connec- table. L’enjeu n’est pas seulement la création de machines dites intelligentes, tels que les systèmes embarqués, la conception d’exosquelettes ou de robots humanoïdes, mais de mettre au point des systèmes intelligents où les machines, les usines comprenant les machines et les produits issus des usines, communiquent entre eux. C’est vrai également pour la « ville numérique » ou « ville intelligente ». Le monde artificiel avec ses réalités virtuelles est en marche : c’est le cyberespace où nous al- lons devoir nous projeter. Cette mutation favorise et entraîne à la fois une évolution des modes de management et de la culture de l’entreprise. Au fil des âges, toutes les technologies ont apporté leur cortège de bouleversements auxquels il a fallu s’habituer, mais aussi maitriser, contrôler, réguler… et à chaque révolution, le temps dont l’homme dispose pour cette adaptation ne relève pas que de son temps individuel, celui que chacun de nous doit pouvoir gérer mais il relève d’un temps commun, celui que s’octroie la société pour relever ce défi sociétal et culturel. Se pose alors les questions de gouvernance et des rôles de chacun dans toutes ces démarches ainsi qu’une inévitable réflexion sur les effets secondaires et indésirables induits. Cette métamorphose peut être bienfaitrice, si elle est au service de l’humain, mais aussi encore plus prédatrice, si sa seule mission est d’attiser les ap- pétits du marché dans sa logique de marchandisation du monde. Cette métamorphose exponentielle due au numérique ne risque-t-elle pas de laisser encore plus d’humains sur le bord du chemin ? Alors allons-nous profiter de toutes ces opportunités pour, en maîtrisant notre évolution numérique, maîtriser tout simplement notre destin avec conscience, responsabilité et éthique ? Nous ne sommes pas dans un « avatar » idéologique, nous devons construire « l’économie de marché » qui satisfera les besoins vitaux des neuf milliards d’humains qui vivront demain sur notre planète. Dans ce contexte, on doit se poser la question : qu’apportera et quelle sera la contribution du numérique au développement humain ? Au-delà du flot de détails intimes que nous livrons volontairement ou non sur les réseaux so- ciaux ou les différents sites, le moindre indice de notre comportement est traqué. Ces méta- données constituent un gisement de renseignements sur nos besoins, nos envies. Ce sont des La révolution numérique : une lame de fond sociétale qui marquera l’histoire de l’humanité. E D I T O R I A L Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com4
  • 4. milliards d'informations qui permettent de nous ficher, de prévoir nos comportements et d'an- ticiper nos désirs. Cette vaste collecte numérique intéresse les géants d'Internet qui détiennent plus de 80 % des données personnelles mondiales et qui sont devenues la « poule aux œufs d’or » de ces entreprises. Dès lors, il faut penser la sécurisation des données et des échanges. L’apparition du « Cloud computing », de l’ « Open Data » ou du « Big Data » représente un nouvel Eldorado pour un certain secteur économique par essence mercantile, sans éthique et sans solidarité humaniste qui transforme depuis des décennies notre monde en un gigantesque marché et qui fait de chaque minute de la vie une occasion de produire et de consommer de la valeur marchande. Attention à ne pas perdre nos finalités humaines dans ce tourbillon verti- gineux, tant en vitesse qu’en volume. Cette transition, ce saut dans un nouvel espace, n’est pas sans danger, mais tellement porteur d’espérances pour des projets sensés, pour construire de nouvelles solidarités et pour aspirer à une société authentiquement inclusive. Avec toutes les avancées de la science (génétique, biologie, nanotechnologies, neurosciences, etc.) et des apports technologiques pourrions-nous entrevoir des objets matériels avec un cer- tain degré de conscience ? C’est le domaine de l’intelligence artificielle. Déjà, des « organismes digitaux » (comme les avidiens) sont capables de se reproduire, d’évo- luer et même de dormir ou de coopérer… le monde, aujourd’hui modelé par les avancées de la science et des apports technologiques, se caractérise par l’émergence de nouvelles formes sociétales, de complexité croissante. Afin de réaliser un développement soutenable tout en recherchant l’amélioration de la qualité de vie, trois principes serviront de fils conducteurs. Tout d’abord le principe de responsabilité orientée vers le futur lointain avec deux obligations : préserver la nature en nous, ce qui com- mande de respecter l’identité spécifique de l'être humain ; préserver la nature autour de nous, ce qui implique d’inventer une économie écologique afin de protéger la biosphère. De ce pre- mier principe de responsabilité découle celui de la solidarité envers les générations futures et envers le monde présent. Elle devra servir de guide dorénavant à nos orientations et aux choix des technologies à promouvoir. Eradication de la pauvreté et de son "mal-être" et "mal-vivre", prévention de la conflictualité naissant de l’ignorance, des déséquilibres, des frustrations, de l'intolérance, de l’injustice, approfondissement de l’intelligence de la nature en vue de sa sau- vegarde sont à inscrire à l’agenda de cette éthique. Le troisième principe sur lequel fonder la dynamique de la science est celui de la précaution. La fin des certitudes, l’accroissement de la complexité dû entre autres à la multiplication des acteurs, les risques encourus du fait même des nouveaux champs ouverts par la science exigent de gérer ses potentialités avec discerne- ment et prudence. Le numérique et ses applications doivent impérativement se fonder sur une éthique du futur et contribuer au monde que nous désirons pour demain. Il requiert un nouveau leadership managérial pour donner du sens à cette métamorphose en marche et à notre entrée dans le monde de la connexion permanente. Il ne nous restera plus qu’à réfléchir ou espérer acquérir la « richesse temporelle », celle qui correspond à un état dans lequel on dispose de suffisam- ment de temps pour faire ce que l’on doit faire et au temps qui nous reste après avoir tout fait. La culture numérique n’est donc pas réservée aux geeks ; elle correspond à un phénomène so- ciétal puissant où tout s’accélère autour de nous sans pour autant savoir où nous allons et pour quelles finalités. Cette civilisation numérique doit être avant tout celle de l’Homme averti et de bon sens où des objets, des robots vont devenir des entités quasi-animales ou quasi-hu- maines avec une certaine capacité cognitive, une part de conscience, une forme de vie artificielle intelligente… Le numérique n’est que le moyen d’atteindre des objectifs, suivre des directions, répondre à des questions. Il n’y a pas de fatalité. Seul l’homme doit conduire et raisonner son destin, pré- parer le monde de demain, ce qui demande un approfondissement des champs de l’éthique et de la morale. Ce qui est possible n’est pas forcément souhaitable. Une altérité scientifique et technologique qui peut nous aider à nous (re)penser. Nous sommes face à la meilleure ou la pire chose qui puisse arriver à l’humanité, mais surtout à l’orée d’une période qui va marquer l’histoire de l’humanité. E D I T O R I A L Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 5
  • 5. RENCONTRE AVEC... ... Philippe Letellier Métamorphose numérique et innovation. L’Institut Mines-Télécom se situe au centre de la métamor- phose numérique. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ? L’Institut Mines-Télécom se situe fondamentalement au cœur de l’écosystème de l’innovation, fait de grandes entre- prises, de PME et d’équipes de recherche. Toutes les problé- matiques sociétales d’aujourd’hui que sont le numérique, les transitions énergétiques et écologiques demandent des cher- cheurs capables de travailler de façon ouverte et transdisci- plinaire. Parallèlement aux activités de recherche disciplinaire, objet d’un consensus au niveau mondial, l’Ins- titut travaille au lancement de programmes multidiscipli- naires pour répondre aux besoins de la société concernant la ville, les réseaux numériques, l’énergie du futur, la santé, les risques et la sécurité et l’entreprise du futur. Il fait égale- ment preuve d’initiatives scientifiques sur des thématiques originales comme la coévolution homme-machine, la créa- tion industrielle, l’imaginaire et le design, la coévolution in- dustrie et environnement. Les recherches menées au sein des écoles de l’Institut Mines- Télécom conjuguent trois objectifs en synergie : mener des recherches au meilleur niveau académique, apporter un concours déterminant au développement économique et contribuer à l’excellence, à la pertinence et à la dynamique des programmes de formations d’ingénieurs et de mana- geurs. Cette spécificité se traduit dans le contenu des forma- tions, dans le choix des thématiques de recherche, dans l’intensité de la recherche partenariale, ainsi que par des ac- tions de soutien au développement des start-up, PME et ETI. L’Institut Mines-Télécom est un établissement public ratta- ché au ministère du redressement productif, dédié à l’ensei- gnement supérieur, à la recherche et à l’innovation dans les domaines de l’ingénierie et du numérique. Toutes les écoles rattachées à l’Institut répondent à des besoins industriels et sont engagées dans une mission de développement écono- mique. La bonne imbrication de leurs activités d’enseigne- ment, de recherche et d’innovation est donc capitale pour répondre à ces besoins. Qu’est-ce qui caractérise le plus ce développement numé- rique ? Ce qui caractérise le plus cette évolution du numérique est la notion d’accélération du monde et des transformations qui l’accompagnent, caractéristique de notre société mo- derne, mais aussi les fortes perturbations qu’elle engendre sur nos organisations et sur notre modèle économique. Le numérique accélère tout autour de nous. L’économie numé- rique accélère le rythme de l’innovation. Nous sommes à un moment historique où il suffit de réunir quelques personnes autour d’une table pour faire émerger trois ou quatre projets innovants avec un véritable intérêt pour les marchés. L’économie numérique se caractérise par son intensité d’in- novation : le progrès technique est l’un des facteurs de cette intensité, Internet et son modèle économique sont un autre facteur d’innovation. Le développement de l’économie numérique est porteur de progrès mais peut aussi mettre à rude épreuve les économies des grands Etats industrialisés ou « mettre à genou » cer- taines entreprises ; l’ industrie musicale qui a perdu 60% de sa valeur en est un exemple… Il est nécessaire d’accompagner cette transition et de faire en sorte que ses gains de productivité se traduisent par le dé- veloppement organique de nouvelles activités créatrices d’emploi sur le territoire. Il suffit d’observer comment cette économie du numérique accélère la diffusion des nouveaux biens et services, comment elle mobilise des investissements massifs et comment elle peut conduire à des positions do- minantes. Personne n’est protégé. Le numérique s’intéresse au client, à ses intimités, à ses désirs, à ses modes de vie, tous les besoins sont impactés. La priorité d’une entreprise nu- mérique est d’avoir une relation privilégiée avec ses utilisa- teurs. Dans ce contexte, comment vous situez-vous ? Qu’appor- tez-vous au tissu économique ? Qualitique n°252- Mai 2014 - www.qualitique.com6 Qualitique Philippe Letellier, Directeur de l’innovation à l’Institut Mines-Télécom. Qualitique Philippe Letellier Philippe Letellier Qualitique
  • 6. RENCONTRE AVEC... Les écoles de l’Institut Mines-Télécom sont classées parmi les toutes premières grandes écoles en France. Leurs activi- tés, tournées vers les acteurs économiques en matière de for- mations d’ingénieurs, managers, masters et docteurs, de travaux de recherche et d’innovation, sont reconnues au ni- veau national et international pour leur excellence. Toutes les écoles de l’Institut Mines-Télécom sont engagées dans des projets structurants, impulsés par les pouvoirs pu- blics, notamment les pôles de compétitivité, clusters, grappes d’entreprises, plateformes R&D, pôles scientifiques, pôles d’excellence et autres associations contribuant au dé- veloppement économique local. Elles investissent toutes pour insuffler à leurs diplômés une solide culture interna- tionale, avec une partie significative du cursus effectuée à l’étranger, et la possibilité offerte d’obtenir des doubles di- plômes. Ces diplômés pourront ainsi être le support du dé- veloppement international de l’entreprise qui les embauchera. L’institut Mines-Télécom représente une force de recherche de plus de 4000 chercheurs et nous sommes partenaire des entreprises du CAC 40 et de plus de 200 PME. L’Institut Mines-Télécom est actif au sein des alliances na- tionales de programmation de la recherche Allistene (l’al- liance des sciences et technologies du numérique), Aviesan (l’alliance pour les sciences de la vie et de la santé) et Athena (l’alliance nationale des sciences humaines et sociales). Par ailleurs, la qualité et l’intensité de sa recherche partenariale sont reconnues par deux labels instituts Carnot dès 2006, re- nouvelés en 2011. Le label Carnot a pour vocation la re- cherche partenariale : conduite de travaux de recherche menés par des laboratoires publics en partenariat avec des acteurs socio-économiques, principalement des entreprises en réponse à leurs besoins. Notons que chaque année, une centaine de start-up sortent des incubateurs des écoles du réseau de l’Institut Mines-Télécom. Les perspectives de développement des entreprises obligent à « jouer collectif ». Nous sommes au cœur des interactions créatrices de valeur. Notre neutralité est aussi un atout pour fédérer des alliances autour d’un projet. Et sur le plan européen et international ? Aujourd’hui, les frontières disparaissent. Le e-business n’est plus national, il nécessite une vision globale, il n’est pas ré- servé aux multinationales. Pourquoi une vision internationale ? Pour au moins deux raisons. Premièrement, si on développe un business avec une vision uniquement nationale, on est presque certain que cette idée a germé ailleurs. Et si cet « ailleurs » a une vision internatio- nale, le « business national » sera purement et simplement éliminé du marché. En effet, pour durer il faut se positionner en tête, au plus comme troisième acteur du marché ; le cin- quième sera évincé. La structuration du marché est très ra- pide et les compétiteurs sont féroces… Deuxièmement, lorsque l’on « pousse » une innovation, nous ne sommes jamais certain qu’elle satisfera le marché local, particulièrement en France. Donc il est intéressant et impératif de tester d’autres marchés. Ce n’est pas toujours évident et là encore l’Institut Mines-Télécom possède de nombreux atouts pour aider les entreprises à accéder et à se développer à l’international grâce : - au partage de réseaux innovants en Europe ; - à la recherche, à travers les partenariats structurés et les consortiums internationaux ; - à l’innovation, à travers les projets collaboratifs eu- ropéens public-privé et l’accompagnement de PME dans leur développement à l’international avec la création de hubs d’écoles en Amérique, en Asie (exemple de Shanghai en Chine). En conclusion, quels sont les grands changements induits par le développement du numérique ? Le monde a changé. C’est une évidence qu’il va falloir main- tenant intégrer. Ce monde hyper-connecté avec les big-data, open data, etc. vont redessiner notre économie. Ce nouveau monde numérique qui creuse des « traces » partout sur nos comportements, nos modes de vies, nos besoins, est le monde rêvé de tout commerçant. Il peut ainsi accéder aux données personnelles et obtenir toutes sortes de renseigne- ments sur les centres d’intérêts de son client ou futur client… tout ceci devient possible grâce à ces « traces » et aux puis- sances de calcul actuelles et qui sont nécessaires à l’analyse et au croisement des différentes données que l’on peut re- cueillir un peu partout. L’autre tendance est la « servisation » : nous vendons de plus en plus un service et de moins en moins le produit. Prenons l’exemple de Michelin, entreprise de production centenaire. Aujourd’hui, la communication ne se fait plus sur le produit (le pneu), mais plus sur les kilomètres effectués. C’est un changement de spécification du produit qui bouscule l’en- semble des entreprises traditionnelles. Nous passons d’un business modèle produit à un business modèle service. Les machines intelligentes arrivent, nous allons de plus en plus payer pour un usage et de moins en moins pour un produit. L’univers « low-cost » ajoute une pression supplémentaire sur nos entreprises traditionnelles. Le virage numérique de notre société va permettre de « re- battre » les cartes. Un exemple très récent avec l’essor des voitures de tourisme avec chauffeur (VTC) et du covoiturage qui, par l’Internet mobile, détruit le modèle économique des taxis, mais permet un enrichissement de l’offre de transport et, dans le cas du covoiturage, une utilisation plus rationnelle de la voiture in- dividuelle… Dans cette course, même si personne n’est épargné, per- sonne n’a gagné mais personne n’a perdu ! Et n’oublions pas que l’optimisme est un vecteur d’innova- tion. Qualitique n°252- Mail 2014 - www.qualitique.com 7 Philippe Letellier Philippe Letellier Qualitique Qualitique Philippe Letellier
  • 7. ACTUALITÉS Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com8 Cybersécurité : partenariat stratégique entre Alcatel-Lucent et Thales Dans le cadre du partenariat stratégique conclu entre Thales et Alcatel-Lucent, Thales acquerrait les activités Ser- vices de Cybersécurité et les activités Sécurité des Com- munications d’Alcatel-Lucent, qui offrirait des solutions de bout en bout pour la sécurisation des réseaux de télé- communications. Le partenariat entre les deux entreprises répond à l’objectif stratégique, affiché par Alcatel-Lucent dans le cadre de son plan de transformation Shift, de renforcer le volet cybersé- curité de son offre pour les réseaux de télécommunication. Pour Alcatel-Lucent, il s’agit d’offrir des solutions de bout en bout hautement sécurisées, alliant son expertise des fonctionnalités de sécurité intégrée dans les produits de té- lécommunication et les services proposés par Thales. Pour Thales, il s’agit de faire croître ses activités dans les secteurs porteurs de la cybersécurité et de consolider le sa- voir-faire et l’expertise de ses équipes, déjà au meilleur ni- veau mondial dans ce domaine. Ce partenariat ne deviendra effectif qu’après la consulta- tion des instances représentatives du personnel, la signa- ture des accords définitifs et l’obtention des autorisations nécessaires. « Cet accord concrétise un partenariat stratégique entre deux grands groupes mondiaux, proches par leurs racines, et nous fera bénéficier d’une approche partagée et cohérente des enjeux de la cybersécurité », indique Jean-Bernard Lévy, Président-direc- teur général de Thales. « Venant après les partenariats passés avec Qualcomm et Intel, ce nouveau partenariat stratégique avec Thales vient illustrer une nouvelle fois la stratégie d’Alcatel-Lucent visant à se repo- sitionner comme spécialiste des réseaux IP, du Cloud et des tech- nologies d'accès à très haut débit sécurisés. La cybersécurité est un sujet stratégique pour les réseaux et nos clients : Alcatel-Lu- cent se renforce en tant qu’acteur majeur des réseaux sécurisés. En nous alliant avec Thales pour les services associés, nous al- lons offrir à nos clients une expertise globale de classe mondiale dans les domaines de la cybersécurité et de la sécurité des com- munications », commente Michel Combes, directeur général d’Alcatel-Lucent. L’IRT Jules Verne se dote d’un Conseil Scientifique. La première réunion du Conseil Scientifique de l’IRT Jules Verne s’est tenue le mardi 29 avril 2014. Composé de 12 scien- tifiques de haut niveau, tant au plan national qu’international, il est présidé par M. Alain BRAVO, Délégué Général de l’Aca- démie des Technologies. Instance de proposition, de consultation et d’évaluation, le Conseil Scientifique s’intéressera à l’IRT Jules Verne dans toutes ses dimensions et exercera ses missions dans le cadre de ses stratégies de recherche, d’innovation et de formation. Les deux piliers de son action seront : - l’évaluation des différentes stratégies de l’IRT et no- tamment sa feuille de route scientifique et technologique et son déroulement (maturation technologique, transfert indus- triel, valorisation) ; - l’apport d’expertise scientifique et de recommanda- tions prospectives. Désignés par le conseil d’administration pour une durée de 3 ans, et issus de domaines scientifiques et techniques divers et provenant d’horizons très variés, mais en cohérence avec les filières couvertes par l’IRT et son positionnement technolo- gique et scientifique, les membres du Conseil Scientifique de l’IRT Jules VERNE sont : Olivier ALLIX, CNRS, Vice-Directeur du LMT (Laboratoire Mécanique et Technologie de Cachan). Olivier APPERT, IFPEN (Institut Français du Pétrole et des Energies Nouvelles), Président. Nadège BOUQUIN, ANRT (Agence Nationale de la Re- cherche et de la Technologie), Directrice adjointe de FutuRIS (plateforme prospective du système français de recherche et d’innovation). Alain BRAVO, Académie des Technologies, Délégué Général. Andreas BÜTER, FRAUNHOFER, General Manager de la Fraunhofer Alliance Lightweight Structures. George CHRYSSOLOURIS, Université de Patras, Professeur, Di- recteur du LMS (Laboratory for Manufacturing Systems and Au- tomation), Administrateur de l’EFFRA (European Factories of the Future Research Association). Jacques DHELLEMMES, SCILAB ENTERPRISES, Président. Clément FORTIN, CRIAQ (Consortium de recherche et d'innova- tion en aérospatiale au Québec), Président. Véronique MICHAUD, EPFL (Ecole Fédérale Polytechnique de Lausanne), Professeur au Laboratoire des Technologies des Compo- sites et Polymères. Bruno MORTAIGNE, DGA (Direction Générale de l’Armement), Responsable du domaine scientifique «Matériaux » à la MRIS (Mis- sion pour la Recherche et l’Innovation Scientifique). François PIERROT, CNRS, Directeur du LIRMM (Laboratoire d’Informatique, de Robotique et de Microélectronique de Montpel- lier). Laszlo TOTH, Université de Lorraine, Professeur, Directeur du LA- Boratoire d'Excellence DAMAS (Design des Alliages Métalliques pour Allègement de Structures).
  • 8. DDOOSSSSIIEERR L’Internet des objets. La dématérialisation. La dématérialisation au coeur de la démarche de modernisation de l’Etat. Les conséquences de la dématérialisation dans les rapports judiciaires et dans les relations avec l’administration. Nouveaux rôles de la Fonction SI à l’ère du numérique. Natifs numériques et évolution des organisations : une exploration. Internet des objets : la gestion de projet. Internet des objets : le business model. Page 9 Page 11 Page 21 Page 25 Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 9 L’Internet des objets. Depuis 1965 les technologies de l’information et des télé- coms n’ont cessé de se développer à des rythmes conformes aux lois de Moore. Du côté des entreprises, des institutions et des états, les besoins sont multiples et souvent centrés au- tour de la rationalisation des processus et des coûts. Mais depuis une trentaine d’années le numérique bouleverse nos modes de vie et nos usages en s’imposant dans tous les domaines, de notre habitat à l’accès à la connaissance en passant par les transports, la gestion de l’énergie et plus ré- cemment encore par les multiples possibilités de connexions sans fil … C’est ainsi que dans un premier temps la dématérialisation des documents physiques s’est imposée avec son cortège d’adaptations organisationnelles. Il s’agit de quitter l’ère du papier, de favoriser les échanges électroniques et de stocker et retrouver rapidement l’information. La dématérialisation des flux entrants / sortants permet de réduire les coûts de traitement et de rationaliser les processus métiers (article 1). Page 29 L’ère du numérique, vers unL’ère du numérique, vers un nouveau business model...nouveau business model... Page 38 Page 43 Page 52
  • 9. DDOOSSSSIIEERR Qualitique n°252 - Mail 2014 - www.qualitique.com10 - les moyens technologiques mis à la disposition du plus grand nombre continueront à se développer selon un algorithme bien connu (miniaturisation, accroisse- ment des capacités, et baisse des coûts induite dans les domaines du traitement, de l’interface homme machine, du stockage de données et des modes de communication) ; - les idées nouvelles et le transfert d’usages actuels indispensables deviendront de plus en plus faciles à met- tre en œuvre (article 7). Il reste à inventer cet avenir et c’est peut-être l’occasion d’associer des objectifs jusqu’ici divergents : - nouvelle économie moins destructrice, moins polluante ; - découverte du vivant et protection des espèces ; - … Enfin, le très haut débit, la miniaturisation des compo- sants, la réduction des coûts de stockage, la mondialisa- tion des idées et des usages sont autant de facteurs permettant le déploiement de la société de l’intelligence numérique. Dossier réalisé par : Alain Boyer, Directeur d’Homo Numer Management. Philippe Gros, Ingénieur, manager commercial infor- matique et télécom. Jean-Charles Leynadier, consultant partner du cabinet de conseil Pragmaty. Gilles Polart-Donat, Ingénieur Institut Mines-Telecom. Joël Quéré, Directeur d’Optimaliste. Jean-Luc Laffargue, Directeur de la publication. La dématérialisation est une priorité pour les adminis- trations qui traitent d’énormes volumes d’information et s’impose comme la solution innovante optimum et pro- tectrice de l’environnement. C’est également une pro- fonde évolution des méthodes de travail (article 2). L’impact du numérique n’est pas seulement technique ou organisationnel, il remet en cause un ordre juridique établit sur le papier, l’écrit ou la signature (article 3). Le numérique natif s’est imposé avec la mise en œuvre de moyens tels que les GED et les workflow. C’est un vecteur de simplification des processus et le support d’une évolution importante de l’organisation des entreprises. Les organisations doivent s’adapter et tout particulière- ment la DSI soumise à des attentes de plus en plus fortes de la part des utilisateurs « nés » dans le numérique (ar- ticle 4). Puis, nous nous intéressons à l’influence des technologies numériques sur les modes de travail. Les technologies du Web 2.0 impactent profondément les modes d’interaction entre les personnes et raccourcissent les distances. Du point de vue des entreprises, elles font émerger de nou- velles opportunités, qu’il s’agisse de l’apparition de nou- veaux secteurs d’activités, comme les objets et applications liés à la tendance du Quantified Self, ou de modifications d’activités, comme l’accès à de nouveaux modes de financement par les plateformes de crowdfun- ding (article 5). Les « besoins de l’utilisateur puis du grand public », d’abord pilotés par les industriels, explosent grâce aux technologies mises à la disposition de chacun et génèrent de nouvelles attentes et de nouveaux usages. L’opérabilité des systèmes favorise la multiplication des objets connec- tés. On commence à penser que tout objet sera un jour connecté et les projets commencent à fleurir. Les conjonc- tions possibles actuellement entre différentes technologies et les attentes démultipliées du grand public ouvrent des possibilités quasi infinies (article 6). A l’aune de cette échelle les business models évoluent : - les besoins en dématérialisation iront en dé- croissant du fait du numérique natif et du développe- ment d’une culture de plus en plus admise de l’échange numérique ;
  • 10. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 11 La dématérialisation L es évolutions économiques, légales et environnemen- tales poussent l’entreprise à une dématérialisation documen- taire. Celle-ci s’applique soit : AVANT-PROPOS La dématérialisation des flux entrants / sortants de l’entreprise permet leur auto- matisation. L’automatisation des flux en- trants / sortants (processus d’intégration et de génération des échanges) permet de générer une forte économie ; ceci s’explique par le gain de temps en classement et en recherche de l’information utiles au moment du traitement des documents qui sont deux activités à faible valeur ajoutée. L’organisation du trai- tement est modifiée par ce passage au numérique. La dématérialisation des fonds documentaires s’ap- plique tout particulièrement pour répondre à des obli- gations légales de conservation d’information. Elle permet aussi de mettre à disposition d’utilisateur un grand nombre d’informations plus facile à retrouver, à analyser, à corréler et à interpréter. Les motivations des organisations qui dématérialisent leurs courriers et documents sont généralement : - l’amélioration du partage de l’information et de la fluidité des échanges ; - un gain de temps lié à une évolution des organi- sations ; - la réduction des coûts de traitement entre les diffé- rents services ou sites de l’organisation ; - une meilleure traçabilité des courriers et documents concernés ; - l’amélioration de la réactivité dans le traitement des opérations métier. La mise en place d’une solution de dématérialisation des flux entrants / sortants nécessite : - la description claire du besoin à travers les ob- jectifs recherchés, les moyens à mettre en œuvre, la description d’une organisation d’exploitation quotidienne de la solution choisie ; - la définition d’une démarche (un projet) de construc- tion. L’objectif de cet article est de présenter schématique- ment : les différentes techniques et organisations per- mettant l’acquisition et le traitement des documents entrants d’une entreprise ; les spécifications de l’orga- nisation de la production de numérisation des flux en- trants et sortants. Ce document est rédigé dans une approche de traite- ment des flux de documents reçus dans le cadre d’une relation client, source d’activité pour l’entreprise. Une transposition aux documents internes de l’entreprise (gestion de la qualité, gestion ressources humaines …) peut être directement établie. - aux flux entrants et sortants (courriers) dans le but de réduire les coûts de traitement et de ratio- naliser les processus métier ; - à un fonds documentaire c'est-à- dire à un ensemble de documents existants dans le but de recueillir et de structurer l’information et de réduire l’utilisation des documents physiques.
  • 11. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com12 QUELQUES DÉFINITIONS Voici quelques définitions qui aideront à la compréhen- sion du texte. Capture : le terme est communément employé pour dé- signer les activités d’acquisition d’une image (représen- tation numérique) d’un document physique accompagnée de ses métadonnées. Dématérialisation : Remplacement d’un document ori- ginal papier par une représentation numérique incluant généralement une image numérique du document et ses métadonnées. Le terme dématérialisation devrait être réservé aux cas où l’on n’accorde plus de valeur au document physique. Il est détruit ou archivé par pré- caution. Document/feuille/page : Un document physique est composé de feuilles de différents formats (du post-it jusqu’au plan). Chaque feuille peut être numérisée en recto/verso pour générer plusieurs images correspon- dant aux pages. L’ensemble des images d’un document peut être regroupées en un seul fichier ou être séparé en autant de fichiers que de pages ou de feuilles (for- mats multipages). Image : Fichier informatique contenant la prise de vue d’un document, par un smartphone, un scanner ou peut être composée nativement par voie numérique. Les images peuvent être en noir et blanc, en teintes de gris ou en couleurs. Elles peuvent être compressées avec différents algorithmes (CCITT G4, JPEG, JPEG2000, …). La résolution de prise de vue est fonc- tion de l’usage et du matériel utilisé (généralement entre 200 dpi et 300 dpi). Le format du fichier incluant les images peut également varier (PDF, TIF, JPG, PNG, GIF, …) RAD (Reconnaissance Automatique de Document) : Techniques de classification automatique de document. Les pages numérisées sont classifiées en combinant dif- férentes techniques de reconnaissance (taille, allure gé- nérale de la page, présence de mot clé, détection de logo…). On obtient ainsi des documents typés : facture, bon de commande, page de contrat, justificatif d’iden- tité, … LAD (Lecture Automatique de Document) : utilisation de moteur de reconnaissance pour extraire une infor- mation informatique d’une image issue de la scannéri- sation d’un document. Cette extraction peut s’appliquer à des documents très normés ou structuré (formulaire) ou moins standardisé tel que des factures ou même des courriers libres. OCR (Optical Character Recognition = Reconnais- sance Optique de Caractères) : technique de reconnais- sance appliquée à des impressions typographiques. L’utilisation d’un logiciel de reconnaissance OCR per- met le passage d’une image de texte à un fichier texte. Code à barre, QR code, datamatrix : différentes évolu- tions d’un codage imprimé d’une information. La lec- ture est sécurisée par l’adjonction d’éléments de contrôle et de redondance d’informations. Indexation manuelle : Saisie des informations non lues automatiquement ou ne répondant pas aux règles de cohérences nécessaires. Métadonnées : Informations associées à un document ou une partie d’un document. L’information peut être issue du document (champ de formulaire, annotation manuscrite, présence de signature) ou peut correspon- dre à des éléments de contexte (émetteur, date de ré- ception, date et heure de capture, données GPS, nom de l’auteur, numéro de série du capteur, …). Ces infor- mations peuvent être lues, saisies ou être issues d’un référentiel. Empreinte/signature/clé/certificat : Pour différents be- soins pratiques de comparaison, le fichier image peut être résumé par un calcul d’empreinte ou hachage (MD5, SHA1, SHA-256, SHA-512, …). L’algorithme de calcul vise à obtenir une quantité d’information de taille arbitraire non proportionnelle au fichier d’origine. L’empreinte peut ensuite être signée par un système de chiffrage asymétrique à clé publique. Cette clé est dis- tribuée sous la forme d’un certificat numérique délivré par un tiers de confiance. Valeur probatoire : Elément permettant de justifier l’authenticité de l’origine du document et l’intégrité du document électronique lors de sa capture et sa conser- vation. La loi du 13 mars 2000 précise : « L'écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l'écrit sur support papier, sous ré- serve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité », Code Civil, article 1316-1. FLUX ENTRANTS Le processus de numérisation de flux entrant com- prend globalement: la capture, la gestion du workflow, les technologies de reconnaissance de documents, la mise en conformité des informations extraites, l’archi- vage physique et l’archivage logique à valeur proba- toire. Point 1 : la capture Pour simplifier notre propos nous avons identifiés 4 or- ganisations de capture principales en fonction du nom- bre de sites de traitement. - Capture backoffice : Le matériel est adapté au
  • 12. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 13 volume traité par le centre. Il est en général doublé pour permettre la production durant la réparation du matériel. La performance du matériel est définie par la capacité à traiter la pointe de traitement en une journée sur un seul matériel. - Centre de service partagé : La mutua- lisation permet au centre de consolider un volume jus- tifiant les matériels les plus performants. L’organisation des traitements est conçue pour optimiser le passage en machine. En particulier, les documents sont préparés pour éviter au maximum les arrêts machine. - Capture distribuée : La difficulté réside dans l’intégration de la capture au niveau du poste agence. Les solutions de capture web permettent de simplifier le déploiement et la gestion. - Capture multi-canal : Les solutions doivent in- tégrer différentes technologies mobile, web, échanger avec les systèmes d’information, être intégrées dans les applications à destinations des clients. Dans une organisation commerciale, les flux de docu- ments sont utilisés pour contractualiser une relation avec les clients. Ils concrétisent et formalisent cette re- lation. Ce processus commercial peut être initialisée par la contractualisation et la livraison du produit ou service ou être déclenchée par la réception d’un courrier client (réclamation, demande d’évolution et de résiliation). Le flux documentaire peut être reçu au niveau d’un ré- seau commercial au contact de la clientèle ou par une boite postale du centre de traitement. Les étapes qui lui sont généralement appliquées sont les suivantes : - réception des courriers ; - ouverture des enveloppes ; - préparation des flux physiques ; - numérisation des documents ; - indexation des images ; - conditionnement du physique et enregistre- ment du logique ; - destruction du physique. Cas d’une capture dans un centre de traitement interne. Cette capture est généralement réalisée sur le seul site de traitement (c’est le cas d’une majorité de TPE et PME) et permet d’adopter un processus de traitement proche d’un traitement manuel. Le plus souvent ce trai- tement utilise des ressources (techniques et humaines) internes à l’entreprise. Cette solution, simple à mettre en œuvre, rend l’entre- prise indépendante de la sous-traitance mais totalement dépendante de ses moyens. Ainsi elle est généralement dimensionnée pour un volume « moyen » et présente des difficultés de fonctionnement lors des phénomènes de pointe. L’entreprise est responsable de ses investis- sements et des évolutions technologiques de ses maté- riels. Cas d’une capture dans un centre de service partagé. Un centre de services partagés (CSP) est une organisa- tion chargée de gérer pour le compte de tiers des ser- vices nécessaires à ces tiers. Il existe des CSP internes ou externalisés. Les flux peuvent être transmis directement depuis le ré- Cette solution rend l’entreprise indépendante de la sous-trai- tance, mais totalement dépen- dante de ses moyens ... » «
  • 13. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com14 seau commercial ou passer par un niveau de regrou- pement de collecte (impliquant généralement un délai supplémentaire). La boite postale peut être directement renvoyée vers le centre de service partagé (modification de l’adresse ou service de routage). Le flux est traité de manière industrielle. Les étapes sont similaires à celle du centre de traitement interne avec quelques objectifs complémentaires : - isolation des clients traités et des flux ; - généricité des processus ; - industrialisation des traitements. L’ouverture et la préparation du courrier physique (avant numérisation) sont des étapes clé qui consistent en une gestion physique des documents papiers dans la perspective des étapes ultérieures afin de: - rendre possible les traitements de numérisa- tion; - standardiser, optimiser et sécuriser ces traite- ments et leurs résultats. Les opérations de préparation consistent à : - ouvrir les plis postaux ; - déplier les documents en sortie d’enveloppe ; - désagrafer les documents ; - effectuer les découpages si nécessaire, exemple séparation de bons de réponse, … ; - effectuer des traitements spécifiques dans le cas de papiers fragiles (photocopies, ..) ; - retirer les pièces non significatives ; - appliquer des règles de tri complémentaires spécifiques au client (exemple : collage des petites pièces sur feuille blanche) ; - opérer un tri afin d’optimiser le traitement à opérer sur le document ; - appliquer les règles de gestion de production telles que : - préparer et insérer les documents annexes : fiches de lots, séparateurs de plis, étiquettes de boîtes d’archives. Ces documents annexes sont porteurs d’in- formations issues de capture ou de génération automa- tiques (dates, compteurs); - constituer les lots de dossiers. Un lot se définit comme le regroupement d’un nombre déterminé de dossiers ; - constituer les lots de rejets qui comprennent les documents incomplets ou hors périmètre ; - élaborer l’éditique d’accompagnement des re- jets (client assureur, client assuré); - élaborer l’éditique d’accompagnement archi- vage physique. La solution du CSP est créée pour réaliser le traitement de flux mutualisés sous la forme d’un service rendu (CSP interne ou prestataire). Les investissements maté- riels et logiciels sont facturés dans les coûts de traite- ment. L’industrialisation du processus permet de traiter des volumes très importants et gère les effets de fluctuations par compensation entre plusieurs flux. Cas d’une capture distribuée. Dans le cas de réseau commercial largement déployé il est pertinent de mettre en œuvre une capture distri- buée. Des scanners sont installés au niveau du guichet (au niveau du chargé d’accueil, en arrière du guichet, bornes libres services, …). Les documents sont alors nu- mérisés au fil de l’eau ou lors de la transaction client ; on parle de dématérialisation à la source (ne pas confondre avec le numérique natif). La capture distribuée au niveau du réseau permet : - de collecter les flux rapidement et de garantir la traçabilité des documents échangés (reçus du client, émis vers les centres de traitement ou de stockage) ; - de traiter la qualité des images des documents (contrôle au fil de l’eau) et de garantir l’intégrité des images par un calcul d’empreinte.
  • 14. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 15 Il importe, pour que la capture distribuée soit pleinement exploitée, d’inclure au niveau de la solution centrale (regroupement des flux) une traçabilité des flux ainsi que des outils de pilotage adaptés. Les solutions de traitement (en aval de la capture) doivent intégrer la pos- sibilité de réception permanente de flux et fonctionner en flux tendu pour que les résul- tats de traitement soient rendus disponibles au plus tôt. Cas d’une capture multi-canal. L’évolution de la capture à la source se poursuit en in- corporant le client dans le processus. Le client devient acteur dans la complétion de son dossier. Le capteur est un smartphone, un scanner personnel, un portail de do- cuments numériques, etc. Les objectifs sont nombreux : - éviter la transmission sous forme de photocopie qui augmente la charge de travail et dégrade la qualité de l’information et nuit à l’environnement ; - faire réaliser une partie du processus par le client lui- même ce qui diminue d’autant les coûts de traitement; - diminuer au maximum les délais de traitement ; - rendre responsable le client de la qualité des informa- tions transmises. Les flux issus des bornes libres services peuvent être collectés la nuit ou le week-end. Les solutions doivent prendre en compte cette spécificité. Le client est averti par différents canaux (SMS, e-mail, …) de l’avancement de son dossier et des justificatifs manquants. Il est de plus impliqué dans le traitement de son dossier en renseignant les informations d’iden- tifications et en ajoutant les pièces manquantes. L’authentification impose de confirmer la validité des échanges pour l’usage de différents canaux comme par exemple l’envoi d’un mot de passe à usage unique par SMS et la saisie sur un portail WEB, … Point 2 : la gestion du Workflow de dématé- rialisation La chaîne de dématérialisation correspond à une suite d’étapes. Entre chaque étape sont échangés des informations ou des documents avec généralement un changement d’état. Le workflow de dématérialisation est consti- tué d’une série d’activités définies par les rè- gles de contrôle des documents. Il peut ainsi inclure des traitements par exception ou un contrôle qualité par échantillonnage. Le workflow associé à des applications de sai- sie client léger permet de répartir (partager) les activités de complémentations ou de prise de décision. Le processus peut ainsi être dis- tribué en plusieurs localisations, chez un prestataire ou en interne. Le workflow est également chargé d’alimenter le jour- nal de preuve qui servira de trace d’audit de toutes les étapes réalisées. Une empreinte (hachage) complétée d’une signature des images des documents permet de garantir l’intégrité d’un document capturé lors des res- titutions. Il est évident que la capture repose principalement sur la nature et les capacités du scanner utilisé. Ainsi il existe différentes catégories de scanner adaptés à diffé- rents usages. La principale qualité du smartphone est d’être un objet communiquant, multi-usage. La prise de photo peut être assistée pour garantir un certain niveau de qualité en vérifiant certains critères (orientation de la prise de vue vis-à-vis du document, halos lumineux, éloigne- ment excessif…). Un acquittement de la bonne prise en compte du document par les serveurs frontaux est re- commandé pour la bonne expérience utilisateur. L’image est compressée dans le téléphone pour éviter le transport d’un fichier trop volumineux. Les particuliers disposent quelquefois d’une impri- mante multifonction ou d’un scanner à plat. Les por- tails web sont maintenant des occasions de capturer des pièces complémentaires (carte d’identités, justificatifs divers…). La prise d’image peut être opérée par le sim- La chaîne de dématériali- sation correspond à une suite d’étapes ... » «
  • 15. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com16 ple chargement d’un fichier préexistant ou intégrer le pilotage du scanner personnel. Il est possible de garan- tir l’horodatage de la capture. Un réseau d’agences commerciales et les points de vente sont autant d’occasion de capter les documents clients. Les scanners d’agence sont généralement de fai- ble encombrement, d’un coût compatible avec un dé- ploiement important. Ils peuvent être pilotés par un logiciel client lourd ou au travers d’une application web. Les scanners départementaux correspondent à un in- vestissement modéré, de performance moyenne en termes de vitesse, de taille de chargeur, de robustesse. Ils nécessitent une présence importante lors de l’utili- sation, mais sont relativement peu coûteux à l’acquisi- tion et à l’entretien. Comme la cadence est relativement lente, il est possible d’accepter des arrêts de production pour saisir des informations lors de la capture (date, type de flux, référence de lot, provenance, identifiant d’opérateur …). Le traitement de gros volumes associés à des contraintes de délais de traitement amènent à utiliser des scanners industriels. Comme les flux sont concen- trés sur un centre de traitement important, il convient de garantir le meilleur rendement des scanners et en particulier limiter au minimum les arrêts de produc- tion. Les flux sont donc préparés en amont (agrafes, orientation des documents) pour obtenir la meilleure productivité du scanner. L’ajout d’intercalaires est une solution pour éviter les actions manuelles (sélection de flux, saisie d’information). Point 3 : les technologies de reconnaissance de documents. La classification. Une fois les documents numérisés, ils peuvent être classifiés en utilisant différents critères tels que la taille des pages, la détection de logo, la détection de mots clés, l’analyse sémantique du résultat d’une lecture automatique pleine page, la combinaison des différentes techniques. Les règles de contrôles appli- quées concernent : - la complétude (présence de toutes les pièces nécessaires dans un dossier) ; - la conformité (cohérences des pièces, validité des informations fournies par le client). L’extraction de l’information. Ce qui intéresse les mé- tiers, ce qui est important dans un document c’est l’in- formation qu’il contient. Il est donc important de pouvoir extraire de façon automatique les informations présentes dans le document. Pour cela, différentes tech- nologies sont utilisées en fonction des informations à extraire : Code à barre / patch / datamatrix permet de reconnaî- tre immédiatement une série de caractères codés ; le code à barre peut ainsi comprendre une libellé de pro- duit, ou le nom d’une personne, un prix, un numéro, une date, … ; La lecture OCR est basée sur la reconnaissance de po- lices normalisée telle que OCR-B ou police typogra- phique bureautique ; Lecture de manuscrit (précasés, écriture cursive) per- met de transcrire les réponses et informations fournies par le client en données informatiques pour permettre les contrôles, l’indexation des documents et l’enrichis- sement des bases de données. L’analyse des données lues peut être améliorée de tech- nique de rapprochement intelligente. Il est ainsi possi- ble de reconstituer les informations incorrectement lues par l’utilisation de référentiel. Ce procédé est particu- lièrement utilisé pour reconnaître des adresses en rap- prochant ce qui est lu d’un référentiel d’adresses grand public ou professionnel. Ces outils ou modules de lecture sont payants et leurs tarifications sont variables : - prépayées avec un crédit sur dispositif phy- sique ; - prépayées avec décompte sur compteurs à fournir avec une périodicité fixe ; - forfait par serveur, selon la puissance de calcul; - comptage au champ présenté ; - comptage au champ reconnu ; - comptage au document avec tarif en fonction du nombre de champs reconnus. Point 4 : la mise en conformité des informations extraites. La première étape de traitement consiste à corriger les informations lues depuis le document. La détection des
  • 16. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 17 informations à corriger est définie par différentes règles de gestion (information non ou mal reconnue, format incorrect, contrôle de cohérence entre plusieurs champs, vérification règles métiers). Les mêmes contrôles sont utilisés pour valider les corrections ap- portées. L’indexation. Certaines informations peuvent être sai- sies lors de la préparation des documents pour conser- ver la traçabilité des flux. Ces informations sont transmises à la chaîne de numérisation sous la forme d’intercalaire (origine du document, date de réception, type de conditionnement reçu, identifiant du prépara- teur). Les pages numérisées sont ainsi rapprochées des informations de réception / préparation. De cette ma- nière, il devient possible de s’assurer que l’ensemble des flux reçus ont été traités. En mettant à disposition des émetteurs de document (agences commerciales) une application de déclaration des flux émis, il est possible de suivre le bon traitement jusqu’à la transmission au système de gestion ainsi que l’envoi des flux physiques aux archives ou à leur des- truction. La saisie. Les reconnaissances automatiques ne recon- naissent pas toujours l’intégralité des informations contenues et ne permettent pas de s’affranchir d’un traitement de vidéo-correction qui consiste en des sai- sies, des doubles-saisies (une seconde saisie effectuée par le même opérateur ou par un opérateur différent est comparée à une première saisie), des corrections, le rapprochement avec un référentiel, l’identification de non-conformité. Elles sont réalisées au moyen d’un lo- giciel sous différentes technologies : Le contrôle des informations. Certaines informations sont corrigées et validées par rapport à des référentiels. L’objectif des référentiels est d’acquérir, tenir à jour un ensemble de données à valeur de référence quelle que soit leur origine. Ces référentiels interviennent en sup- port : - aux règles de gestion ; - aux besoins règlementaires et légaux ; Les référentiels les plus courants sont : - référentiels client ; - typologie de documents ; - typologie d’anomalie ; - typologie de courriers réponse ; - référentiel postal ; - référentiels adhérents ; - référentiel de lettrage de factures ; - référentiel d’éditique pour une campagne fer- mée. Contrôle qualité. Pour garantir le niveau de qualité du traitement d’enrichissement, automatique ou manuel, il importe d’incorporer dans la chaîne de traitement un contrôle qualité. Le principe est de sélectionner un échantillon pour opérer une vérification des données produites. Cette vérification est une opération manuelle effectuée sans connaissance des informations initiale- ment saisies ou reconnues. Les deux résultats sont com- parés pour valider le niveau de qualité global du traitement échantillonné. Le niveau d’échantillonnage est adapté en fonction du niveau de qualité attendu et de la taille de la production à contrôler. Point 5 : Archivage physique. Une fois le passage au numérique réalisé, il convient de conserver et de protéger les documents physiques en prenant en compte les exigences de l’entreprise et les contraintes réglementaires et législatives. Selon les processus, les documents sont séparés en fonction de leur durée de conservation (à recycler, à détruire, conservation temporaire, archivage). Cer- tains scanners apportent la capacité de trier les pages pour extraire des pages au- tomatiquement. Le cas le plus général ce- pendant oblige une séparation manuelle des pages. L’archivage peut être temporairement effectué dans un local proche du centre de traitement (court terme) ou être organisé pour une durée plus ou moins longue chez un archiviste (interne ou externe). L’archivage des pièces est effectué en suivant un pro- cessus normalisé :
  • 17. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com18 - classement dans des boîtes d’archives ; - étiquetage des boîtes d’archives avec la date, le n° de lot, la séquence des pièces. La destruction des documents est effectuée après la pé- riode de rétention définie. La destruction peut être faite avec un niveau de traçabilité garantissant le suivi des flux détruits, en particulier pour garantir la confiden- tialité ou être simplement détruit sans garantie. Point 6 : Archivage logique à valeur probatoire. L’évolution des traitements de dématérialisation per- met de répondre à la production d’élément de preuve. Ces éléments doivent permettre d’apprécier l’origine et l’intégrité des documents présentés dans le cadre d’une procédure judiciaire. L’origine et l’intégrité des documents sont garanties en utilisant des journaux de preuve contenant la traçabilité des traitements, de la réception jusqu’à l’archivage et l’utilisation des documents numérisés. Ces journaux de preuves incluent un horodatage, l’empreinte des images. La comparaison de l’empreinte donne une in- dication de l’intégrité de l’image du document. Les journaux eux mêmes sont protégés d’une altération par un chaînage aval (chaque journal contient l’empreinte du précédent). La norme NF Z42-013 a été originalement utilisée pour définir les moyens à mettre en œuvre pour garantir la conservation et l’intégrité des documents stockés dans un archivage électronique. Elle a été adaptée en 2009 pour remplacer la notion de support non réinscriptible (WORM) par l’utilisation de moyens cryptographiques (empreintes ou signature électronique). Elle est main- tenant généralisée au niveau international avec la norme ISO 14641-1. La valeur probatoire des éléments issus de l’archivage électronique est appréciée au regard des procédures de traitement et d’exploitation et de leurs respects. EDITIQUE ET COURRIERS SORTANTS Les courriers sortants sont les courriers émis par l’en- treprise. Ce sont des contrats proposés au client (rem- plis et signés de l’entreprise), des factures, des relevés de comptes, des supports d’offres marketing… et à ce titre ils véhiculent l’image de l’entreprise. L’entreprise rencontre une difficulté liée à la maturité technologique de ses destinataires. En effet émettre des documents « dématérialisés » donc en mode digital natif signifie s’adresser à des interlocuteurs dotés de la technologie réceptive. Si quasiment l’ensemble des en- treprises réceptives sont dotées de moyens de réception (le mail et internet) il leur faut aussi une « organisation numérique » après la réception. En fait, l’entreprise émettrice est tenue de maintenir deux canaux de diffusion : l’un électronique et l’autre physique. La chaîne éditique prend sa source dans les systèmes d’information en agrégeant de façon dynamique des fonds de pages électroniques pré définis (type de page) avec des données fixes ou des images (logo, textes lé- gaux, coordonnées de l’entreprise, signatures, …) et des données variables (données marketing, graphiques, ta- bleaux de données, paragraphes conditionnels, mar- quages optiques tels que codes-barres, marques de pliage, identifiant courrier,…). L’entreprise cherche à automatiser ses flux sortants car elle structure ainsi une information qui lui est facile- ment reconnaissable en retour. Elle incorpore des mots- clés, des signes, des codes, … qui lui facilitent le processus de réception et de traitement retour par re- connaissance automatique d’informations permettant d’initialiser voire de réaliser entièrement le traitement. Ainsi, plus les flux sortants seront structurés, complets, non ambigus et plus les traitements retours seront au- tomatisés. L’enregistrement du courrier sortant est l’équivalent de la réception et préparation du courrier entrant. Une at- tention toute particulière doit être portée sur la qualité du fichier déposé sur le serveur d’édition. La solution informatique génératrice du flux sortant doit pouvoir offrir des fonctionnalités spécifiques telles que : - la mise à jour de la bibliothèque de textes ou d’images suite à modification ; - l’intégration de règles métier ; - la validation des documents à éditer (avant mise en production) se fait à travers des processus col- laboratifs (workflow) ; - le suivi et le contrôle / optimisation de flux (contrôle de charge des imprimantes, interaction sur les travaux en attente, possibilité de relance de traitement, …) ; - la fourniture d’un calendrier d’exploitation as- socié à un CRM permettant d’associer des dates d’opé- ration associées au document (envoi, plage de retour) ; - la tenues des listes émises (reconnaissance par code-barres / datamatrix dans la fenêtre d’adresse) ; - le suivi des dépenses postales ; - le planning des retours attendus ; - le suivi des PnD (ex NPAI).
  • 18. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 19 QUELQUES REMARQUES Remarque 1 : sécurité des plateformes. L’architecture doit répondre aux engagements de conti- nuité d’activité et de reprise d’activité dépendant du ni- veau de criticité et des contraintes règlementaires (Sarbanes-Oxley, CRBF 97-2 pour prestation de service essentiel externalisée). La plate-forme principale de traitement peut être conçue pour supporter une défaillance d’un élément unique. On évite tous les éléments uniques dans l’ar- chitecture (principe du SPOF, single point of failure). Cela se traduit par des alimentations redondantes, baie de disques redondées, serveurs en cluster capable de basculer les traitements en cas de panne (principe de failover). Le plus haut niveau de sécurité est assuré par du clustering géographiquement réparti. L’ensemble des mécanismes de continuité d’activité sont formalisés dans un plan de continuité d’activité (PCA) Cette plate-forme principale peut être secourue par un site de secours ou de reprise d’activité. Le traitement peut être assuré en restaurant les données sauvegar- dées du site principal et en retraitant les flux reçus ul- térieurement avec un mécanisme de dédoublonnement. Une réplication des données au fil de l’eau permet de minimiser l’impact de la bascule en site de secours. La procédure de reprise doit être formalisée dans un plan de reprise d’activité (PRA) qui prévoit l’organisa- tion de la décision de bascule et les points de contrôle. Un test périodique de la procédure de reprise est obli- gatoire pour s’assurer du bon fonctionnement des sys- tèmes et des organisations. Remarque 2 : impact sur l’organisation interne des processus. Le passage au numérique n’est pas sans conséquences pour l’organisation interne des services de l’entreprise. En effet, l’information logique peut être partagée (ac- cessible en lecture par de multiples utilisateurs) et ac- cessible à distance. Ainsi, étudions le processus de réception d’un courrier de résiliation d’une assurance : - Dans le cas d’un traitement « physique », le courrier est réceptionné et dispatché en fonction de l’adresse des services. Il est ensuite ouvert et dispatché en fonction des missions des agents de traitement. - Dans le cas d’un traitement « logique » la re- connaissance du mot RESILIATION amène automati- quement à rapprocher un numéro de sociétaire d’une date de résiliation (exemple : trois mois avant la fin du contrat) et à valider ou refuser le courrier. Il apparait très clairement que des étapes à faible valeur ajoutée pour le traitement peuvent être supprimées et ainsi permettre de gagner de la charge et du temps de traitement. Remarque 3 : impact sur le workflow et prise de décision. Le workflow qui est un outil associé à la notion de dé- matérialisation permet d’organiser « logiquement » le traitement des opérations : - enrichissement des données ; - contrôle de cohérence ; - validation ; - prise de décision. En organisant des étapes avec une gestion des flux en mode PUSH et alerte des opérationnels en fonction de planning. Il apparait ainsi que la prise de décision et gé- néralement plus argumentée (fourniture des pièces jointes, indication d’informations complémentaires et avis, …) et surtout plus rapide. CONCLUSION Après pratiquement une vingtaine d’année d’amélio- rations techniques et de déploiement de solutions, on peut parler d’une généralisation de la dématérialisation à partir de support physique ou nativement numé- rique. Les bénéfices les plus évidents sont largement couverts par les solutions mises en place. - Optimisation des coûts par les traitements au- tomatiques, la facilité de recherche de l’information. - Augmentation de l’activité commerciale par la distribution du processus, le partage d’activités. - Amélioration de la qualité et de la conformité par l’introduction du contrôle dans la chaîne de traite- ments. Les enjeux à venir tiennent en quelques points décisifs pour permettre une plus grande efficacité.
  • 19. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com20 - Améliorer les échanges entre les clients et l’en- treprise pour plus de dynamisme et de visibilité des traitements par le biais d’un accès web collaboratif et l’intégration multi-canal. - Permettre une adaptation des processus aux évolutions de flux (nouveaux produits, nouveaux do- cuments) à travers des plateformes informatiques multi-flux évolutive. - Intégrer la confiance numérique pour éviter la conservation des documents papier en application de normes telles que la NF Z42-013 et ISO 14641-1. Après avoir étendu les processus à toute l’organisation de l’entreprise (réseau d’agence, backoffice, service clientèle, directions…), les clients sont maintenant in- vités à participer à l’alimentation des pièces dans leur dossier et à fournir leur consentements. Le collaboratif se généralise pour un meilleur service et une diminu- tion des coûts. On peut ainsi parler d’une dématérialisation 2.0 com- binant l’ensemble des possibilités d’échanges disponi- bles (mobile, web, appel téléphonique, papier (toujours), bases de données). Alain Boyer, Directeur d’Homo Numer Management. Joël Quéré, Directeur d’Optimaliste. Alain Boyer Après un doctorat de 3ème cycle en géophysique Alain BOYER prend la responsabilité scientifique d’une sta- tion sismique en Côte d’Ivoire et participe en tant que consultant UNESCO au programme d’étude du risque sismique en Afrique de l’ouest. Il occupe ensuite diffé- rents postes (Ingénieur informaticien puis responsable qualité, responsable avant-vente et directeur des pro- cessus, de l’organisation et de la qualité) pour le compte de grandes SSII et Directeur de l’organisation et de la qualité pour un opérateur télécoms. En 2002, il crée une société de conseil en organisation homo numer management spécialisée en organisation informatique et dans l’accompagnement au passage au numérique des entreprises. Il est le co-auteur d’un ouvrage traitant de l’organisa- tion de l’entreprise en « période de fortes turbulences » (Editions d’Organisation, 2000) et l’auteur d’un guide de méthodes et d’outils destinés à la fonction commer- ciale (Dunod, 2007). Joël Quéré Joël Quéré est ingénieur en architecture des composants électroniques. Début 1990, il est responsable des archi- tectures des logiciels embarqués et des solutions appli- catives de l’unité de R&D d’Unisys localisée en France. Il participe en 1994 à la création d’ATHIC, un éditeur de logiciel spécialisé dans la dématérialisation, en tant qu’associé et Directeur Technique. Il devient créateur de la plateforme progicielle STARTHIC qui est adoptée par les plus grands établissements bancaires Français pour la dématérialisation des remises de chèques. Il se spécialise ensuite dans la dématérialisation de docu- ment et la confiance Numérique. En 2013, il fonde sa société de conseil, Optimaliste, spécialisée dans la dé- matérialisation, la confiance numérique et les moyens de paiements. Alain Boyer Joël Quéré
  • 20. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 21 La dématérialisation, au cœur de la démarche de modernisation de l’Etat. D epuis janvier 2012, un outil unique et partagé de tenue des comptabilités assure la production des états financiers de l’Etat. Il permet de ne pas matérialiser l’ensemble des procédures et des actes de gestion, et induit l’évolution progressive des pratiques : les ac- teurs sont incités à ne plus produire et échanger de documents papier. C’est une profonde évolution des méthodes de travail. L’Agence pour l’Informatique Financière de l’Etat (AIFE) est un service à compétence na- tionale rattaché au ministère des finances et des comptes publics. Régine Diyani en est la directrice. L’AIFE a conduit le projet de construction de ce nouvel outil dans son rôle de définition et de mise en œuvre de la straté- gie informatique financière de l’Etat. Ses principales missions sont : - piloter l'urbanisation du système d'in- formation financière de l'Etat ; - promouvoir et contribuer à la transfor- mation de la fonction financière ; - maintenir en condition opérationnelle le système d'information Chorus, de gestion de la dépense, de la recette non fiscale et de la comptabilité de l'Etat ; - piloter de nouveaux projets interminis- tériels ou ministériels et leur intégration dans le système d'information Chorus ; - accompagner le changement dans les ministères et auprès des utilisateurs. CONCEPTION D’UN OUTIL INTÉGRÉ ET PARTAGÉ La LOLF (Loi Organique relative aux Lois de Finances), loi votée en 2001 à l’unanimité des deux assemblées, favorise le passage d’une culture de moyens à une culture de résultats, en organisant la procédure budgétaire autour d’une logique de performance de la gestion
  • 21. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com22 publique et de transparence de l’information. Elle a également introduit dans la gestion fi- nancière de l’Etat de nouvelles règles compta- bles, plus proches des pratiques courantes des entreprises. La première étape de sa mise en œuvre a été une réingénierie des processus de gestion de l’Etat et la redéfinition du rôle et des respon- sabilités des différents acteurs ; tout ceci dans un but de simplification des procédures, d’amélioration de l’organisation des différents services et d’optimisation de l’efficacité. La seconde a été la construction du système d’information financière de l’Etat, baptisé « Chorus » au profit de tous les ministères. Celui-ci est le fruit d’un travail de conception interministériel qui a permis de mettre en œuvre l’ensemble des dispositions de la LOLF dans un outil intégré et partagé. Utilisé dans les services centraux et déconcentrés de l’Etat par tous les acteurs de la chaine budgétaire et comptable, Chorus est l’outil unique et central de pilotage de la gestion publique ; il permet notamment de produire les comptes de l’Etat transmis à la Cour des Comptes mais il gère aussi l’ensemble des dépenses de l’Etat (ex- ception faite de la paye des agents) et les re- cettes non fiscales. L’AIFE l’a conçu et déployé sur la base d’un ERP (SAP) et est chargée de son bon fonction- nement et de l’urbanisation du Système d’In- formation Financière de l’Etat (SIFE). Le SIFE regroupe les processus, activités, données, or- ganisations et outils permettant de traiter et diffuser les informations budgétaires et comp- tables de l’État. Sa gouvernance est assurée par une instance interministérielle : le Comité d’Orientation Stratégique (COS) du SIFE, mis en place lors du lancement du projet Chorus en 2006 et qui a perduré depuis et continue de jouer totalement son rôle. Ce comité, dans le- quel tous les ministères (ainsi que les directions règlementaires de Bercy) sont représentés au plus haut niveau, rend les arbitrages straté- giques requis sur les aspects tech- niques et fonctionnels. L’éventail des fonctionnalités mises en œuvre, le recours à des presta- taires de service intervenus tout au long du projet, les dimensions de l’architec- ture et les volumes de données traitées carac- térisent ce projet hors norme. 53.000 utilisateurs récurrents (dont 23.000 du cœur Chorus), plus de 15.000 connexions quoti- diennes, 400 Téra octets de données, 1000 ser- veurs, 17 millions de documents dématérialisés, 100 millions de pages… et d’ici 2020, 95 millions de factures fournisseurs de- vraient être dématérialisées dans le cadre d’un nouveau projet dont le périmètre s’élargi à la totalité de la sphère publique. UNE FORTE MOBILISATION Tous les ministères ont été mobilisés au cours de chacune des phases du projet. « La re- cherche d’un consensus a toujours été privilé- giée. Chorus a été construit avec eux et c’est sans doute là, la clé du succès du projet : ce n’est pas l’outil de Bercy ou de l’AIFE » pré- cise Régine Diyani, mais bien l’outil de chaque ministère, outil partagé par tous avec le même objectif de la mise en œuvre complète de la LOLF telle que l’avait voulue le législateur en 2001. Lors de la conception, les besoins des maî- trises d’ouvrage ont été spécifiés dans le cadre de groupes de travail, pour ensuite être outil- lés en les inscrivant dans des processus de ges- tion normalisés. Lors de la construction, les ministères et les di- rections réglementaires du ministère des fi- nances ont été étroitement associés à toutes les phases du projet. Pendant le déploiement, les utilisateurs au sein de chaque ministère ont bénéficié d’un plan de formation adapté : 40.000 personnes formées en 3 ans par 1.079 formateurs minis- tériels dans le cadre de 85 cursus s’appuyant Première étape, la réingénierie des processus de gestion de l’Etat et la redéfinition du rôle et des respon- sabilités des différents acteurs ...» «
  • 22. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 23 sur 218 supports de formation et 700 manuels utilisateurs. Après le déploiement, l’AIFE a mis en œuvre un dispositif de support aux utilisateurs afin de répondre aux sollicitations et assurer l’amélioration continue de la solution applicative et des dispositifs de déploiement et de support. La préoccupation de l’alignement sur les bonnes pratiques a été constante : avant et pendant le projet, mais aussi actuellement. C’est ainsi que de nom- breux recensements des bonnes pra- tiques ont été réalisés, notamment auprès d’établissements publics, d’autres administra- tions à l’étranger, mais aussi d’entreprises pri- vées et auprès du club des utilisateurs de SAP (USF). L’AIFE fait réaliser, par un organisme tiers spécialisé, tous les six mois une vaste enquête de satisfaction des utilisateurs Chorus. Les ré- sultats sont très bons, avec un taux global moyen de satisfaction de 87% en 2013. LA DÉMATÉRIALISATION, UN CHANGEMENT CULTUREL La dématérialisation est au cœur des enjeux de l’AIFE et du Système d’Information Chorus : - la dématérialisation des factures des fournisseurs avec Chorus Factures : afin de ré- pondre à l’obligation pour l’État d’accepter les factures émises par ses fournisseurs sous forme dématérialisée ; - la dématérialisation des frais de justice à travers un portail dit « Chorus Portail Pro »; - la dématérialisation des marchés pu- blics : la plateforme des achats de l’État (PLACE) permet aux fournisseurs de téléchar- ger les dossiers de consultation et de remettre sous forme électronique les ré- ponses aux appels d’offres. La pro- cédure de marché, depuis le dépôt du dossier de consultation des en- treprises jusqu’à la notification, est ainsi totalement dématérialisée ; - le pilotage stratégique des achats avec l’Outil Décisionnel Achats (ODA) : il doit per- mettre aux acheteurs de disposer d’informa- tions normalisées et partagées sur les achats, les contrats et les fournisseurs, pour définir et suivre des plans d’actions ; - la gestion des déplacements tempo- raires des agents avec Chorus Déplacements Temporaires : outil interministériel dématéria- lisant la gestion des états de frais et des frais de mission. Cette dématérialisation n’est pas seulement une « bonne pratique » de réduction des coûts, de diminution de l’impact environnemental ou de simplification des contrôles et d’optimi- sation des délais et des activités des agents. C’est également une philosophie de la dé- pense publique, un processus vertueux avec un engagement juridique préalable dématéria- lisé. Ce processus a été un véritable boulever- sement tant aux niveaux des pratiques que des processus. Il a fallu tout mettre « à plat ». La dématérialisation avec le « système Cho- rus» est une évolution profonde des méthodes de travail et un véritable changement culturel qui s’inscrit parfaitement dans la LOLF. Une évolution profonde des mé- thodes de travail et un véritable changement culturel ... » «
  • 23. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com24 EXEMPLE DE LA FACTURATION La dématérialisation consiste à mettre en œuvre des moyens numériques pour effectuer des opérations de traitement, d’échange et de stockage d’informations sans support papier. Avec Chorus-Factures, cela se traduit par une dématérialisation fiscale des factures, seules pièces faisant foi fiscalement. Intégrée au système d’information Chorus, la solution Chorus Factures répond aux enjeux de la Loi de Modernisation de l'Économie (LME), donnant obligation à l'État depuis le 1er janvier 2012, d'accepter les factures four- nisseurs dématérialisées. Chorus Factures traduit cette contrainte légale en un ensemble de services rendus aux entre- prises, leur permettant de s’engager avec l’Etat dans la voie de la dématérialisation de « bout en bout ». Service web gratuit accessible sur internet, il propose plusieurs modes de transmission des factures en fonction des volumes et besoins des entreprises fournisseurs ainsi qu’un suivi de l’avancement du règlement des factures. A travers ces services, la solution Chorus Fac- tures contribue à atteindre un triple objectif de développement durable, de développement numérique et de modernisation de l’adminis- tration. Avec certains grands fournisseurs (d’énergie par exemple), cela va même plus loin, par la voie de la contractualisation à travers un « plans de facturation », c’est-à- dire une prévision des montants qui seront automatiquement payés chaque mois, puis ensuite régularisés sur la base des consommations effectives. Ainsi, il n’y a même plus d’émission de factures dans ce cas. EN CONCLUSION Le projet Chorus, d’une ampleur exception- nelle, qui s’inscrit dans une transformation de la fonction financière de l’Etat, peut légitime- ment être considéré comme une réussite. Vé- ritable mutation, il a demandé un travail de re-conception des processus de la dépense et la simplification du plan comptable de l’Etat. Le système d’information financière de l’Etat avec Chorus apparait comme l’un des leviers majeurs de la modernisation dans la mesure où il permet de gagner en temps et en effica- cité via l’automatisation des tâches et de mu- tualiser les applications ministérielles de gestion, tout en garantissant fiabilité et traça- bilité des données traitées. La dématérialisa- tion était le corollaire indispensable de la modernisation de l’Etat selon une logique in- terministérielle. La dématérialisation déjà in- trinsèque au système d’information Chorus, va être encore appelée ces prochaines années à se renforcer, notamment à travers la pro- chaine obligation de dématérialisation des fac- tures fournisseurs de l’ensemble de la sphère publique. Mais l’objectif reste le même, une modernisation de l’Etat dans le but de simpli- fier et de sécuriser la relation Etat-entreprises. Propos recueillis auprès de Régine Diyani, directrice de l’AIFE. Régine Diyani
  • 24. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 25 Les conséquences de la dématérialisation dans les rapports judiciaires et dans les relations avec l’administration. D epuis le début du XXIème siècle, le droit - comme le reste de la société - vit une mutation dont les effets à long terme sont difficiles à prévoir. L'écrit, qui est le ferment de la civilisation, passe du support ma- tériel et durable au support immatériel et éphé- mère. Il en résulte d’importants changements. Si l’écrit peut maintenant être diffusé dans le monde entier à la vitesse de l'électron, sa conser- vation est devenue tributaire du matériel, du lo- giciel et de l’électricité. L'authenticité des écrits électroniques est, quant à elle, sujette à caution permanente. Une technologie plus que toutes les autres accom- pagne et favorise ce bouleversement : Internet. Ce sont tous les rapports sociaux qui doivent être re- visités : rapport entre employeurs et employés, rapports entre commerçants et clients, rapports entre pouvoirs publics et administrés, rapports entre citoyens. La dématérialisation de l'écrit entraîne des boule- versements juridiques. La loi appréhende ces mu- tations sans approche systématique. Il n’existe pas de Code de l’écrit électronique. C’est probléma- tique après problématique que le législateur aborde la dématérialisation, sans cohérence. Il ne faut pas s’en étonner. Tout comme le courrier élec- tronique a conduit les entreprises à repenser leurs méthodes de vente, de production, de manage- ment, la dématérialisation conduit le législateur à revisiter l’intégralité de notre législation. Les dispositions législatives ou réglementaires en- cadrant la dématérialisation se sont multipliées. Si l’on peut regretter le manque de cohérence et de « plan d’ensemble » entre toutes ces législations, il faut surtout dénoncer le vocabulaire technico- technocratique avec lequel elles sont rédigées. La compréhension des textes en la matière n’est l’apa- nage que d’un petit groupe de juristes spécialisés, et encore, qui doivent également s’en remettre à quelques techniciens. Si la loi n’est pas intelligible pour l’ensemble de ceux qui y sont soumis, elle manque évidemment à son objet. Pourtant, la dé- matérialisation de l’écrit touche tous les justicia- bles. Il ne s’agit pas d’une problématique réservée aux grandes entreprises ou aux administrations. Nous envisagerons les mutations qu’engendre l’écrit électronique dans les relations contrac- tuelles et judiciaires mais également entre l’admi- nistration et les administrés. LA DÉMATÉRIALISATION DE LA PREUVE DANS LES RELATIONS DE DROIT PRIVÉ Dans notre système juridique hérité du code na- poléon, l’écrit, entendu comme écrit papier, a reçu comme fonction première et essentielle de garantir la preuve des engagements, et au premier chef, des contrats. C’est ce que les juristes appellent les « actes juridiques ».
  • 25. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com26 L’échec de l’écrit électronique comme moyen de preuve des actes juridiques Les législateurs européen et français ont rapide- ment souhaité tenir compte de l’émergence de l’écrit électronique pour réformer le droit de la preuve. Mais l’enfer est pavé de bonnes intentions. L’écrit électronique, et son corolaire la signature électronique, ont été introduits en droit français par une la loi du 13 mars 2000, transposant une di- rective européenne du 13 décembre 1999 sur un cadre communautaire pour les signatures électro- niques. Quatorze années après, le moins que l’on puisse dire, est que l’écrit électronique n’a pas connu le succès escompté dans notre système pro- batoire. Il faut dire que les dispositions légales et réglementaires inventées pour l’occasion laissent songeur quant à leur nombre et à leur complexité. La compréhension du dispositif légal entourant la preuve électronique nécessite l’étude de ces textes: la loi du 13 mars 2000, un décret du 30 mars 2001, un décret du 18 avril 2002 et un arrêté du 26 juillet 2004. L'admission de l'écrit électronique en tant que mode de preuve d’un acte juridique est soumise à trois conditions : que son auteur puisse être iden- tifié (c'est-à-dire qu’il ait signé électroniquement le document), que cet écrit soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'inté- grité. Ces conditions posées à l’article 1316-4 du code civil pour l'écrit électronique existent en réalité également depuis toujours mais de manière impli- cite pour l’écrit papier. Un document papier, comme un contrat, constitue une preuve si l’on peut identifier son signataire et si celui-ci ne pré- sente aucune marque de falsification. Mais dans le monde papier, ces caractéristiques sont finalement simples à réunir. L’attention spéciale que porte le législateur à l'écrit électronique révèle les difficultés tech- niques importantes que pose l’électro- nique pour que le document électronique réunisse les mêmes condi- tions de fiabilité que le papier. Ainsi, la signature électronique néces- saire à la fiabilité probatoire d’un docu- ment électronique doit consister en l'usage d'un procédé fiable d'identifica- tion garantissant le lien de la signature avec l'acte auquel elle s'attache (article 1316-4 du Code civil). Il convient de préciser ici que la signa- ture que l'on insère parfois automatiquement au bas du courrier électronique n'est pas une signa- ture électronique au sens de l'article 1316-4 du Code civil. Il en est de même du document signé de façon manuscrite puis scanné. Ce qui ne ressort pas d’évidence à la lecture des textes, c’est qu'une signature électronique est le résultat d'un algo- rithme mathématique faisant usage des technolo- gies de cryptographie dites asymétriques. Cette technique garantit entre la signature et le docu- ment signé un lien tel que toute modification ulté- rieure de l'acte est détectable. La signature électronique doit également reposer sur l’usage d’un certificat électronique « qualifié ». Il s’agit d’une sorte de carte d’identité électronique qui at- teste de l’identité du signataire. La réunion de l'ensemble des conditions pour dis- poser d’une signature électronique fiable valant preuve d’un écrit au même titre que la signature papier s'avère en réalité fastidieuse et hors de por- tée des justiciables. D’autant plus que les certificats électroniques ont une durée de validité limitée dans le temps, en général trois ans, et il est donc nécessaire de les renouveler fréquemment. Là où la preuve papier est simple et répandue, car tout le monde est en mesure de signer un contrat, un bon de commande, un reçu, etc., pourvu qu’il soit majeur, le document électronique est quasi- ment inexistant dans un usage quotidien et même dans les rapports entre les entreprises s’agissant de la preuve des actes juridiques. Le succès de l’écrit électronique dans la preuve des faits A côté des engagements – des contrats – l’écrit est également utile (mais non obligatoire) pour prou- ver les faits. Un fait juridique est un événement ayant des conséquences juridiques. A l’inverse des L’admission de l’écrit électro- nique en tant que mode de preuve d’un acte juridique est soumise à conditions ...» «
  • 26. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com 27 contrats, pour lesquels une preuve écrite est néces- saire au-dessus de 1 500 euros, un fait juridique peut se prouver par tout moyen. La dématérialisation de l’écrit provoque une conservation presque automatique et involontaire d’informations qui autrefois ne laissaient aucune trace. Aujourd’hui, les entreprises sédimentent dans leurs systèmes d’information, de messagerie électronique notamment, des téraoctets de don- nées qui vont être, pour leur potentiel adversaire, mais aussi pour les autorités de contrôle comme le fisc ou l’Autorité de la concurrence par exemple, une sorte de réservoir de preuves quasiment iné- puisable auquel ces adversaires ou ces autorités ont accès. L’autre caractéristique de ce phénomène, c’est la quantité. On parle aujourd’hui de « big data » pour désigner le fait que l’on produit et que l’on stocke toujours plus d’informations. Cela est de nature à modifier de manière considé- rable l’organisation et le déroulement du procès civil, en tout cas du procès commercial. Cela peut aussi modifier de manière fondamentale, la ma- tière litigieuse elle-même. Un litige que l’on sou- met à un juge n’est jamais que ce que l’on est capable de prouver : plus il y a de preuves, plus il y a de possibilités de procès. La facilité de cet accès à la preuve numérique et la quantité de preuves peuvent être trompeuses et surtout instrumentalisées. Aujourd’hui, au fondement de l’article 145 du code de procédure civile, une entreprise peut ob- tenir qu’un juge autorise un huissier de justice, as- sisté d’un expert technique, à investiguer sur le système d’information d’un adversaire, un concurrent par exemple, lorsque cette entreprise soupçonne un comportement fautif à son encon- tre. Ainsi, l'ordinateur personnel d'un ancien sala- rié soupçonné de contrefaçon ou de concurrence déloyale peut faire l’objet de ce type d’investiga- tion. A la suite de ces procédures, qui sont parfois dili- gentées en même temps sur plusieurs sites d’une même société, les huissiers diligentés se retrouvent dépositaires de quantités importantes de données (documents, mails, et autres fichiers numériques). Cela conduit souvent les parties dans des exper- tises techniques dans lesquelles l’huissier déposi- taire doit veiller au respect du secret des affaires et à la confidentialité des informations. En raison de la quantité des informations saisies et de la dif- ficulté d’organiser le séquestre de ces informations par l’huissier, leur traitement probatoire conduit souvent les parties dans des expertises longues et onéreuses. Sans même utiliser les ressources de l’article 145 du code de procédure civile, on constate égale- ment que les entreprises, dans leurs relations d’af- faires, sont amenées à échanger de plus en plus d’informations sous forme écrite, notamment par mail. Cela conduit également à un accroissement considérable des informations devant être traitées par les plaideurs et les juges lorsqu’un contentieux est engagé. Ainsi, au-delà des apparentes facilités de l'écrit électronique en terme d’échange et de conserva- tion, il est également à l'origine d'une profonde modification du contentieux commercial de par le champ nouveau qu’il ouvre au contentieux mais également au regard de la lourdeur et de la com- plexité que crée son traitement judiciaire.
  • 27. STRATÉGIE ET MANAGEMENT Qualitique n°252 - Mai 2014 - www.qualitique.com28 L'ÉCRIT ÉLECTRONIQUE DANS LES RELATIONS ENTRE USAGERS ET ADMINISTRATIONS La dématérialisation de la relation entre adminis- trations et usagers remonte à la loi du 11 février 1994, dite loi « Madelin ». Son article 4 prévoyait que toute déclaration d'une entreprise destinée à une administration pouvait être faite par voie élec- tronique sous réserve qu’un contrat soit passé entre l’administration et l’entreprise pour fixer les règles de cet échange dématérialisé. C’est aujourd’hui l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives qui consa- cre véritablement l'entrée de l'administration dans le monde de la dématérialisation dans ses relations avec les administrés. Bien plus large que les « dé- clarations » administratives prévues par la loi Ma- delin, l'ordonnance ajoute au champ d'application de la dématérialisation, toute demande d'informa- tions, déclaration ou production de documents, ainsi que les paiements opérés dans le cadre des télé-services. Corollairement, la légalité de l'utilisation de la si- gnature électronique dans la sphère publique est reconnue par cette ordonnance. Les actes des au- torités administratives peuvent être passés sous forme électronique, dès lors qu'une signature y est apposée. Cette signature doit être conforme à des prescriptions techniques figurant dans un docu- ment intitulé le « référentiel général de sécurité » (RGS), adopté par arrêté du 6 mai 2010. Ce réfé- rentiel, spécifique à la sphère publique, fixe les rè- gles auxquelles les systèmes d'information mis en place par les administrations doivent se conformer pour assurer la sécurité des informations échan- gées, et notamment leur confidentialité et leur in- tégrité, ainsi que la disponibilité, l'intégrité de ces systèmes et l'identification de leurs utilisateurs. Le niveau de complexité technique et juridique au- quel aboutit le RGS est symptomatique de la diffi- culté du pouvoir réglementaire à encadrer l’usage des techniques de dématérialisation, notamment la signature électronique. La procédure de passa- tion dématérialisée des marchés publics en est un bon exemple. La législation relative aux marchés publics dématérialisés a fait l’objet depuis 2001 de modifications fréquentes, instabilité juridique et technique nuisible tant aux pouvoirs adjudicateurs qu’aux soumissionnaires. Aujourd’hui, l’arrêté du 15 juin 2012 relatif à la signature électronique dans les marchés publics ne prévoit pas moins de trois catégories différentes de certificats électroniques utilisables dans ce type de marché… La dématérialisation des procédures administra- tives a été instaurée dans un souci de productivité (réduction voir disparition de l'archivage papier), réactivité de l'administration face aux demandes des usagers, réduction des coûts liés au traitement du papier. Il ne faut néanmoins pas omettre les au- tres contraintes que le processus de dématérialisa- tion génère pour l'administration, tant économiques qu'organisationnelles. Il suppose la mise en place d'un système informatique perfor- mant et fiable. Les logiciels ainsi intégrés doivent être adaptés aux agents publics lesquels devront nécessairement être formés à l'utilisation qu'ils en font. Le coût et la complexité engendrés par la dé- matérialisation ne doivent certainement pas être minorés. Ils doivent certainement être anticipés avec plus de circonspection qu’on ne l’a fait jusqu’alors. Etienne Papin, Avocat associé, Féral-Schuhl/ Sainte-Marie.