2. Juridiquement, les RPS : quésako ?
• Difficultés d’appréhension juridique de ce que
l’on dénomme « risques psychosociaux au
travail»
• La notion de « risques psychosociaux »
inhomogène.
• Ne correspond pas à une catégorie juridique
• Relève des conditions et des relations de travail
(notions juridiques explicites plus restreintes)
3. Questions :
• Quid de l’effectivité du droit confronté à un
concept aussi hétérogène que les risques
psychosociaux ?
• Le droit protège-t-il/favorise-t-il le bien être au
travail ?
• Les RPS appellent-ils plus un droit de prévention
que de coercition ?
• Comment caractériser le lien de causalité avec le
travail ? Quelle réparation?
4. Cadre réglementaire concernant les
RPS en France
Sophie Fantoni-Quinton
Journée Franco - Belge, Évaluation et prévention des risques psychosociaux,
Charleroi, 27 avril 2010
5. Textes français applicables
Textes généraux = Protection de
la santé :
• Employeur :
• Obligation de sécurité de
résultat relative à la protection
de la sécurité physique et
mentale.
• Cette obligation implique de le
respect des principes généraux
de prévention énoncés par les
articles L4121-1 et suivants du
code du travail.
Textes spécifiques = Respect de la
dignité de la personne :
• GNX = Respect des libertés
individuelles et collectives,
auxquelles il ne peut être apporté
aucune restriction qui ne serait pas
justifiée par la nature de la tâche à
accomplir ni proportionnée au but
recherché.
• Ces termes définissent les « droits à
la dignité » de la personne au
travail.
• Spé = La question du harcèlement
moral et les agissements de
harcèlement sexuel s’y rattachent.
6. Harcèlement moral
– L. 1152-1 : «Aucun salarié ne doit subir les agissements
répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour
effet une dégradation des conditions de travail susceptible
de porter atteinte à ses droits et sa dignité, d’altérer sa
santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir
professionnel. »
– L. 1152-2 : « Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié
ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou
indirecte, notamment en matière de rémunération, de
formation, de reclassement, d’affectation ,de qualification,
de classification, de promotion professionnelle , de
mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi
ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement
moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les
avoir relatés ».
7. Etapes judiciaires
• Procédure : la charge de la preuve revient à la personne qui se dit harcelée, mais
charge allégée : L. 1154-1 :
– le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.
– Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont
pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs
étrangers à tout harcèlement.
– Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction
qu'il estime utiles.
• Les sanctions contre les auteurs
- sanctions disciplinaires
- sanctions pénales ( 1 an d’emprisonnement d'un an et amende de 3 750 €).
- La juridiction peut également ordonner, à titre de peine complémentaire, l'affichage du jugement
aux frais de la personne condamnée dans les conditions prévues à l'article 131-35 du code pénal et
son insertion, intégrale ou par extraits, dans les journaux qu'elle désigne. Ces frais ne peuvent
excéder le montant maximum de l'amende encourue.
• Conséquences sur le contrat de travail
Toute rupture du contrat de travail ou rupture intervenues en méconnaissance des
dispositions des articles sur HM et HS est nule
8. Evolution du droit en France
• Loi 2002 : Définition du HM + introduction de la santé mentale en
droit du travail (L4121-1 CT : L'employeur prend les mesures
nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et
mentale des travailleurs). Pas de décrets spécifiques santé mentale ni
« bien être »…
• ANI Stress au travail 2008 (à portée + pédagogique que normative)
• Accord du 26 mars 2010 sur HM et violence au travail : les partenaires
sociaux reconnaissent que certaines méthodes de gestion peuvent
entraîner des RPS
Il est resté hésitant à légiférer clairement sur les RPS (Hormis pour le
HM)…
Le juge s’est saisi de la question…
10. Evolution jurisprudentielle
• Le HM a d’abord « embolisé » le champ plus
large de la souffrance au travail et du « bien
être », occultant derrière cette spirale
« individualisante » (HM= conflit
interindividuel) les sources organisationnelles,
managériales, collectives des processus à
l’origine des RPS.
• Mais le juge en élargi les contours…
11. Evolution jurisprudentielle
• OSR 2002/2006 :
– Initialement un objectif de meilleure réparation
– Puis assise légale + un objectif de meilleure
prévention
– Arrêt du 21 juin 2006 : OSR étendue au HM
(objectif : inciter l’employeur à « informer/agir »
conformément à L4121-1 CT )
– Confirmation ensuite : l’employeur est érigé
comme responsable de tout trouble psychique
présenté comme lié au travail (arrêt 6 oct. 2010
« sentiment d’insécurité » dans une gare routière)
12. Mutation de l’OSR : de l’individuel au
collectif
• Arrêt SNECMA 2008 : Immixtion du juge dans
le pouvoir de direction de l’employeur dès lors
que la santé mentale des salariés est menacée
(primauté de la santé)
• = Contrôle des conditions de réorganisation de l’entreprise.
• La position de la haute juridiction est clairement affichée : toute
nouvelle organisation peut être suspendue dès lors qu’elle peut
avoir une incidence négative sur la santé des salariés, et ce
même si aucune infraction aux règles d’hygiène et sécurité n’est
commise dans le cadre de cette nouvelle organisation.
13. Conséquence :
• En conséquence, l’obligation de sécurité de
résultat est désormais évoquée par la
juridiction en matière de gestion collective,
et non plus exclusivement en matière de
gestion individuelle, et devrait conduire les
employeurs à redoubler de vigilance quant
à la mise en œuvre de nouvelles
organisations du travail.
14. La dégradation des conditions de
travail est prise en compte/juge
• Cour de cassation, chambre sociale, du 30 avril 2009, n°07-43.219 :
Il n’est pas exigé de lien entre l’état de santé du salarié et la
dégradation de ses conditions de travail.
Un salarié n'est tenu que d'apporter des éléments qui permettent
de présumer l'existence d'un harcèlement moral. La demande de
réparation d’un salarié ne peut être rejetée au seul motif de
l'absence de relation entre l'état de santé et la dégradation des
conditions de travail.
• Cass.soc., du 6 juillet 2010, n°09-42.557 :
Un harcèlement peut être constaté, même en l’absence d’impact
sur l’état de santé. Il serait en effet, anormal de ne pas sanctionner
l’employeur, pour raison que le salarié se révèle particulièrement
« résistant ».
15. • La cour de cassation a élargi le concept de HM
aux agissements sans intention malveillante et
à certaines méthodes managériales (arrêts du
10 novembre 2009)
• … La notion extensive de ce que peut être le
HM tend à cerner le concept de bien être au
travail
16. Quelques éléments complémentaires
de jurisprudence
• Cour de cassation, ch. sociale, arrêt du 19
octobre 2011 : l’employeur est responsable
des actes de harcèlement moral commis par
un tiers.
• Cour de cassation, ch. sociale, arrêt du 29 juin
2011 : en cas de harcèlement, l’employeur
doit sanctionner le salarié fautif rapidement.
17. Conclusion…Des questions…
• Une des réponses à la souffrance au travail = le recours à la
règle du droit… Qui pourtant ne peut tout régler.
• L’encadrement juridique est-il suffisant ?
Pour l’évaluation des RPS ? : L’obligation existe mais la
méthode n’est pas encadrée (même si des indicateurs sont
présents dans l’ANI)
Pour la prévention des RPS ? : L’obligation existe, mais son
contrôle est surtout a posteriori
Pour la réparation des RPS (Pas de tableau de MP).
• Promotion du bien être versus préservation de l’état de
santé des travailleurs?