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Conduite à tenir lors d'oblitération nasale ovine
- 1. Le Point Vétérinaire / N° 256 / Juin 2005 /40
Se former / CONDUITE ÀTENIR /
Le syndrome d’oblitération nasale est probablement lié à l’œstrose.
Il importe de ne pas le confondre avec d’autres affections et de détecter
précocement les lésions sur l’ensemble du troupeau.
e syndrome d’oblitération nasale des
ovins (SONO) correspond aux rhinites
qui conduisent au rétrécissement plus
ou moins prononcé de l’orifice nasal,
selon un processus qui évoque une
hypersensibilité retardée, vraisemblablement
vis-à-vis des larves d’Œstrus ovis.
L’attention portée à ce syndrome date de la fin
des années 1990. Les éleveurs se plaignaient
alors que les symptômes attribués à l’œstrose
persistaient après le traitement, voire qu’ils
s’aggravaient.
La plupart des troupeaux ovins du Piémont et
des coteaux du Pays basque sont atteints de
façon plus ou moins prononcée par le SONO,
dès lors qu’ils ne transhument pas l’été.
À l’automne 1997, avec le concours de l’École
nationale vétérinaire de Toulouse (ENVT), nous
avons entrepris de rechercher systématique-
ment les œstres (L1) dans les cornets nasaux de
brebis résistantes aux traitements. Les recher-
ches se sont avérées le plus souvent infruc-
tueuses, malgré les précautions (ouverture selon
différents plans, inspection en lumière rasante,
etc.). Des points communs ont été retrouvés
entre les différents troupeaux affectés (rétrécis-
sement des orifices nasaux sans implication
directe des œstres, traitements antiparasitaires
inefficaces, zone de Piémont, aggravation avec
l’âge, etc.).
En l’état actuel des connaissances, il importe
de ne pas confondre le SONO avec d’autres
affections (diagnostic différentiel) et de détecter
précocement les lésions sur l’ensemble du
troupeau (notation et stade clinique) afin de
pouvoir envisager un éventuel traitement et de
proposer un pronostic précis. La connaissance
des facteurs étiologiques impliqués dans ce
syndrome étant encore incomplète, la préven-
tion s’inspire des mesures préventives de
l’œstrose.
Première étape :recueil
d’éléments épidémiologiques
concordants
Dans un élevage pour lequel le praticien est
appelé pour des “bruits respiratoires”, certains
paramètres concordent avec un SONO. Ils
manquent toutefois de spécificité.
1. Zone
Le SONO affecte surtout les élevages de la zone
des coteaux basques et du Piémont. Cette région
de forte concentration ovine coïncide avec celle
de répartition de l’œstrose, ainsi qu’avec celle
où sévit Pitomyces chartarum, champignon dont
la toxine est responsable des photosensibilisa-
tions de l’eczéma facial.
2. Conduite d’élevage
Le SONO est observé uniquement dans les
élevages qui ne transhument pas en altitude.
Les élevages qui pratiquent le traditionnel
pâturage nocturne en période de chaleurs
diurnes semblent épargnés.
3. Race
La race manex à tête rousse est largement
majoritaire dans la zone la plus affectée par le
SONO. Elle est moins transhumante que la race
manex à tête noire, qui passe l’été à
1 000 mètres. Des cas parfois prononcés sont
rapportés chez des basco-béarnaises, des
lacaunes, des manex à tête noire, et, ponctuel-
lement, chez diverses races à viande (Berry, Île-
de-France, etc.).
4. Âge
Dans les troupeaux qui passent l’été dans le
Piémont, la relation entre le degré d’atteinte de
SONO et l’âge augmente clairement entre un
et cinq ans, puis se stabilise en raison des
réformes.
Lorsque les ovins sont gardés sur l’exploitation
les deux premières années avant de transhu-
mer, l’atteinte se stabilise après deux ans.
5. Saison
Le SONO s’exprime avec une intensité plus forte
au début de l’automne, quand les attaques
parasitaires et la chaleur sont marquées et les
gestations avancées. Les lésions d’oblitération
nasale persistent tout l’hiver. Une recrudescence
des difficultés respiratoires a lieu en fin de
printemps, dès les premières chaleurs et à
l’époque principale des réformes. Le SONO sévit
donc toute l’année.
6. Prévalence et incidence
Dans les troupeaux qui présentent l’une des
caractéristiques épidémiologiques décrites ci-
dessus (lieu, race, etc.), 0 à 80 % des animaux
L
Conduite à tenir lors
d’oblitération nasale ovine
AFFECTIONS DES VOIES RESPIRATOIRES SUPÉRIEURES CHEZ LES OVINS
par Jean-Christophe
Natorp
Urdozekoeskola
64430 Baigorri
Étape 2 : diagnostic
différentiel
• Œstrose, tumeur des sinus,
Visna-Mædi, adénomatose
pulmonaire, pasteurellose,
bronchite vermineuse, rhinite
non spécifique d’ambiance
• Association possible avec
d’autres maladies
Étape 1 : recueil
d’éléments
épidémiologiques
• Région, race,
sans transhumance
• Plus marqué en été,
augmente avec l’âge
Étape 3 : examen clinique
• À distance : orthopnée
• Rapproché : notation
Étape 4 : examens
complémentaires
• Histologie
• Sérologies “œstrus”
• Intradermoréactions
Les étapes essentielles
Étape 5 : traitement
• AIS
• Élargissement et cicatrisants
• Réforme selon le stade
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© Le Point Vétérinaire - Reproduction interdite
- 2. sont atteints (jusqu’à 100 % pour certaines
classes d’âge). Le nombre de cas semble plus
élevé certaines années.
Deuxième étape :
diagnostic différentiel
Le syndrome d’oblitération nasale des ovins doit
être distingué d’autres affections afin de concen-
trer les efforts de lutte (voir le TABLEAU “Diagnos-
tic différentiel du syndrome d’oblitération
nasale des ovins”). La présence de plusieurs
affections dans un même troupeau est toutefois
fréquente.
1. Lien avec l’eczéma facial
À l’échelle des troupeaux, une corrélation nette
a été mise en évidence lors de la première
enquête de terrain sur ce syndrome, certains
éleveurs rapprochant même l’apparition du
SONO d’épisodes d’eczéma facial observés dans
leur élevage. Cela n’a toutefois pas été confirmé
à l’échelle des individus : recoupement des
examens à l’abattoir (nez et foies) ou dosages
sériques de gamma-glutamyl-transférase. Certes,
dans certains cas, la photosensibilisation induite
par l’eczéma facial peut conduire à une gêne
respiratoire par inflammation, donc gonflement
du naseau, mais toute relation directe entre le
SONO et l’eczéma facial semble écartée.
2. Lien avec l’œstrose
Malgré la distinction clinique essentielle (pas
d’oblitération nasale dans l’œstrose classique),
plusieurs arguments plaident pour un lien entre
le SONO et l’œstrose. En premier lieu, les aires
géographiques d’observation de ces deux
maladies se recoupent.
À l’origine, le SONO a été mis en évidence chez
des animaux qui présentent des réactions aux
traitements des œstres. La répétition des traite-
ments ou l’emploi de médicaments rémanents
n’apportaient aucune amélioration. Des essais
d’inoculation intradermique d’antigènes d’œstres,
sous la conduite du Pr Dorchies (communica-
tion personnelle), semblent aller dans le sens de
l’hypothèse suivante : un phénomène d’hyper-
sensibilité aux œstres, peut-être accentué par les
traitements, serait impliqué dans l’apparition du
SONO, d’où le lien (indirect) entre ces maladies,
mais cela reste à confirmer (conception d’outils
antigéniques adaptés, détermination des antigè-
nes impliqués, mise en évidence d’IgE, etc.).
Les produits de lyse des œstres pourraient être
particulièrement allergéniques, un peu comme
dans le cas du varron traité tardivement.
3. Lien avec le confinement du bâtiment
et les rhinites bactériennes à germes non
spécifiques
Certains troupeaux expriment le SONO dans
des bâtiments récents correctement ventilés et
d’autres ne comptent aucun cas dans des
bâtiments pourtant mal ventilés. Il semble
toutefois que de mauvaises conditions
d’ambiance aggravent un SONO, initié indépen-
damment des conditions de ventilation.
Troisième étape :examen
clinique et lésionnel
L’examen clinique permet de préciser un
diagnostic de SONO et d’estimer le degré
d’atteinte du troupeau.
1. Examen à distance
Les difficultés respiratoires dans un cheptel
s’apprécient dès l’entrée dans la bergerie.
L’observation à distance permet d’évaluer le
nombre de cas sévères : les brebis prennent une
attitude caractéristique d’un repos compensa-
teur, le menton posé sur les cornadis, sur les
murets, sur le dos, l’arrière ou l’échine d’autres
animaux, l’encolure étirée, en orthopnée. Ces
animaux respirent difficilement, en trois temps
(PHOTO 1) :
- inspiration forcée avec dépression marquée
en arrière des narines ;
!!
Clichés:J.-C.Natorp
Œstrose • Diagnostic thérapeutique et examens à l’abattoir
• Pas de modification des narines le plus souvent
Tumeur des sinus • Pas dans la race manex, contrairement au SONO
• Déformation nasale assez postérieure
Visna-Mædi Troubles pulmonaires
Adénomatose pulmonaire • Respiration discordante
• Signe de la brouette(1)
avec jetage
Pasteurellose • Toux, hyperthermie
• Jeunes plus touchés
Bronchite vermineuse • Coproscopie (Baerman)
• Auscultation
Rhinite non spécifique, • Absence de modification des narines
d’ambiance • Pas de prédisposition des classes d’âge avancé
• Affection limitée dans le temps
Diagnostic différentiel du syndrome d’oblitération nasale
des ovins
(1)
Quand les postérieurs de la brebis sont relevés, de l’eau s’écoule par les narines.
41/ N° 256 / Juin 2005 / Le Point Vétérinaire
PHOTO 1. Brebis atteinte de SONO en orthopnée : l’expiration avec formation
de bajoues à gauche et l’inspiration avec dépression marquée des fosses nasales
à droite signent une atteinte déjà avancée.
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© Le Point Vétérinaire - Reproduction interdite
- 3. - expiration forcée avec formation de bajoues ;
- récupération la bouche ouverte, halètements ;
la brebis paraît “hébétée”.
Selon la ventilation du bâtiment, les brebis les
plus atteintes peuvent être regroupées près des
ouvertures.
Les dyspnées s’observent préférentiellement et
s’aggravent dans les lots en fin de gestation, qui
peut entraîner la mort de certains animaux.
L’état corporel moyen des animaux d’un
troupeau peut être affecté lors de SONO, mais
ce critère, non spécifique, est susceptible
d’orienter le diagnostic vers d’autres maladies.
2. Examen rapproché
! Extérieur du nez
Une modification du profil de la brebis peut
survenir : le dessus du nez paraît ainsi légère-
ment en retrait lorsqu’elle est sévèrement
atteinte (PHOTO 2). Des “nez de boxeur” ont été
observés dans environ un cas pour cent brebis
atteintes. L’implication du SONO dans ces cas
n’a toutefois pas été confirmée (mais ce signe
n’a pas non plus été relié à une autre affection).
Les lésions peuvent évoquer celles du syndrome
de Wegener en médecine humaine (granulome
rhinogène).
! Inspection des orifices nasaux et notation
L’ouverture des narines est appréciée. Les
lésions précoces sont détectées par une
palpation de la muqueuse du septum nasal avec
la face palmaire d’un doigt (le majeur) (voir
l’ENCADRÉ “État de l’orifice nasal aux différents
stades lésionnels du SONO”).
Au premier stade, la dimension de l’orifice nasal
n’est pas affectée : seule la pituitaire est enflée
et dépolie. Une zone nettement circonscrite à
la limite de l’épithélium externe apparaît
blanche, souvent bordée de quelques pétéchies
visibles à condition d’éclairer convenablement
l’intérieur du nez. Les premiers stades (note “1”)
sont assez homogènes, mais passent souvent
inaperçus. Leur détection est fondamentale car
elle permet un diagnostic précoce, avec une
possibilité thérapeutique et surtout une
appréciation du SONO plus proche de la réalité
(PHOTO 3).
Il importe de récapituler les notes lésionnelles
obtenues en fonction de l’âge des brebis car
l’accroissement de la sensibilité à ce syndrome
avec le temps est un élément diagnostique.
3. Examen nécropsique et complications
Les lésions nasales observables du vivant de
l’animal sont plus facilement et plus précisé-
ment décrites après la mort.
Le tableau nécropsique des animaux affectés
parfois retrouvés morts permet en outre de
juger des complications associées au SONO :
- insuffisance cardiorespiratoire, sans lésion
pulmonaire systématique (cœur flasque,
décompensé, myocarde aminci ; liquide d’ascite
clair) ;
- les cas de pleuropneumonie du lobe apical
observés dans un contexte de SONO s’expli-
quent par de fausses déglutitions à l’occasion
d’administrations forcées de médicaments
oraux.
Quatrième étape :
examens complémentaires
Les examens complémentaires sont utiles pour
la compréhension de ce syndrome encore mal
cerné.
1. Histologie
Les lésions histologiques observées lors de
SONO sont variées : leur signification et leur
spécificité restent mal cernées.
Dans le cadre de cette étude, une dizaine de
prélèvements ont été exploités et examinés par
le laboratoire d’anatomie pathologique vétéri-
naire d’Amboise et par le laboratoire d’histo-
cytopathologie vétérinaire de Maisons-Alfort.
Dans tous les cas, une rhinite est observée
(10/10). L’inflammation de la pituitaire est le
plus souvent périvasculaire (7/10), parfois
hyperplasique (2/10) ou lichénoïde (1/10). Elle
évolue sur le mode de la chronicité, avec une
fibrose (5/10). Les lésions évoquent un proces-
sus “allergique”, d’“hypersensibilité”, “immuni-
taire” dans cinq cas sur dix, avec la présence de
microtraumatismes dans un cas (peut-être lié
aux œstres). L’absence de caractère infectieux
primaire (1/10) est stipulée dans un seul cas. Le
caractère “non spécifique” des lésions est plus
souvent souligné (3/10). Une congestion et un
œdème sont relevés deux fois, alors qu’ils sont
constants dans les lésions cliniques.
Dans deux cas, des sarcocystes sont observés
entre les fibres musculaires (2/10). Une
communication non publiée de Denis Ticoulet
lors des journées des groupements techniques
vétérinaires des Pyrénées-Atlantiques en 2005
rapporte aussi la mise en évidence de sarcospo-
ridies lors de SONO.
Se former / CONDUITE ÀTENIR /
!!
Cliché:J.-C.Natorp
PHOTO 2. Cette lésion en nez de boxeur (retrouvée chez moins d'1 % des animaux
atteints de SONO) est-elle liée au SONO ?
! Note 0 : état normal. L’orifice
nasal des brebis, quelle que soit
leur race, est suffisamment large
pour une exploration avec le
majeur. La muqueuse pituitaire
est d’aspect nacré, lisse et de
couleur rosée.
! Note 1 : stade initial. La
muqueuse est modifiée. L’orifice
nasal des brebis est suffisam-
ment large pour une explora-
tion avec le majeur. Une
congestion est observée, avec
un éventuel piqueté hémorra-
gique. Un gonflement blanchâ-
tre est noté sur une plage d’envi-
ron 5 mm de diamètre. Une
ulcération nette est constatée,
avec une sensation de “dépoli”
au toucher.
! Note 2 : le praticien peut
passer un doigt, mais avec la
sensation d’être serré.
! Note 3 : le praticien doit
rompre un tissu pour continuer
la progression.
! Note 4 : aucun doigt, aussi fin
soit-il, ne peut pénétrer l’orifice
nasal : méat à peine de l’épais-
seur d’une allumette, voire
oblitération totale (tissu fibreux).
! Note 5 : oblitération totale de
l’orifice nasal (cas rares, peu
exploitables).
État de l’orifice nasal
aux différents stades
lésionnels du SONO
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© Le Point Vétérinaire - Reproduction interdite
- 4. 43/ N° 256 / Juin 2005 / Le Point Vétérinaire
Une étude sur le SONO menée par Sophie
Alzieu en 2004 est étayée d’histologies qui
mettent en évidence une lipofibromatose
d’origine externe, probablement secondaire à
la dégénérescence glandulaire observée dans le
chorion nasal profond.
2. Sérologies“œstrose”
Moins d’un quart des animaux des troupeaux
concernés s’avèrent positifs avec un test Elisa
pour les L3 d’Œstrus ovis. Aucune corrélation
entre les lésions et les résultats sérologiques n’a
pu être mise en évidence au niveau individuel
(toutefois, à l’époque, la notation lésionnelle ne
tenait pas compte des lésions précoces de SONO).
3.Intradermoréactions
L’état d’hypersensibilité des animaux affectés par
le SONO a été testé par intradermoréactions. Les
observations préliminaires sont en faveur d’une
hyper-réactivité qui expliquerait le SONO. Cette
hyper-réactivité semblant s’aggraver au fil des
contacts avec l’“allergène”, le terme d’allergie
pourrait donc être utilisé. Des questions
demeurent toutefois : quel(s) allergène(s) précis
est (sont) en cause ? L’aspect non nécessairement
symétrique des lésions est-il compatible avec
l’hypothèse d’une origine allergique ?
! Vis-à-vis des larves d’œstres
Dans un troupeau atteint de SONO, une plus
grande réactivité des brebis vis-à-vis des antigè-
nes de L2 d’Œstrus ovis est observée par rapport
aux brebis d’un troupeau moins touché. Les
jeunes sont sensiblement moins réactifs que les
adultes. Les réactions à ces intradermo-inocula-
tions restent généralement discrètes et hétéro-
gènes : nodules, hématomes, tuméfaction, etc.
(lecture trente minutes après l’injection, puis à
quarante-huit heures).
! Vis-à-vis de la deltaméthrine
Certains éleveurs ont rapproché l’aspect des
lésions nasales de leurs brebis et les réactions
qu’eux-mêmes présentent au contact de
produits phytosanitaires telle la deltaméthrine.
Le pic d’expression des symptômes de SONO
correspond en effet parfois aux périodes où les
prairies pâturées viennent d’être traitées à la
deltaméthrine (contre le cirphis, papillon
nocturne dont la chenille détruit les plantules
de graminées, en particulier de maïs, etc.).
Pour tester l’hypothèse d’un rôle de la deltamé-
thrine dans l’étiologie du SONO, nous avons
injecté dans le derme (Dermojet®
), en arrière
du coude de six brebis, une solution très diluée
d’un produit de traitement phytosanitaire (D6®
)
à base de deltaméthrine, et de l’eau chez six
autres brebis. Aucune réaction n’a été observée
chez les animaux témoins, alors que cinq des
six brebis “deltaméthrine” ont présenté à
quarante-huit heures une réaction assez
homogène qui évoque celle observée sur le nez
des brebis atteintes de SONO, et plus nette que
celle notée après l’injection des larves d’œstres
L2 : une tuméfaction nacrée, circonscrite. Il
serait intéressant de répéter ce test, en utilisant
des méthodes statistiques et en inoculant aux
témoins l’excipient sans deltaméthrine.
4. Bactériologie
Les bactéries, en particulier Staphylococcus
aureus, joueraient le rôle de contaminants
secondaires lors de SONO. Dans cette étude,
Staphylococcus aureus (coagulase+) a été identi-
fié en culture abondante sur deux écouvillons
analysés. Pasteurella sp. et Streptococcus mitis
ont été identifiés sur un prélèvement issu d’une
biopsie nasale. Une flore variée qui inclut des
moisissures a été obtenue sur un autre prélève-
ment de biopsie.
Le traitement doit tenir compte de la présence
possible de ces germes dans les lésions.
5. Virologie
Aucune particule virale n’a été détectée sur deux
biopsies de la pituitaire pratiquées dans le cadre
de cette étude (recherche de pox et de parapox
virus en microscopie directe après coloration
négative à l’Agence française de sécurité
sanitaire des aliments, ou Afssa, site d’Alfort,
par Jean-Marie Gourreau).
Cinquième étape :
traitement
En pratique, lors de SONO, le premier traite-
ment peut être réalisé en même temps que
l’examen individuel des brebis, alors qu’elles
sont au cornadis.
1. Traitement selon le stade
! Stade 1 (lésions sans rétrécissement)
L’administration d’anti-inflammatoires stéroï-
diens, associés ou non à des anti-infectieux par
voie locale, est préférentiellement réservée à ce
stade où il n’existe pas d’effraction muqueuse.
L’application locale de cicatrisants et d’anti-
septiques (par exemple, Dermaflon®
) peut
toutefois déjà se justifier.
! Stade 2
L’élargissement de l’orifice nasal risque d’aggra-
ver les saignements, donc d’accroître le risque
infectieux, inflammatoire et cicatriciel.
Il est possible de choisir entre les mesures
conseillées au stade 1 et celles du stade 3.
! Stade 3
Il convient de rompre les adhérences en forçant
le passage lésionnel avec le doigt et de tenter de
limiter un éventuel rétrécissement cicatriciel
par l’application de pommades (par exemple,
Dermaflon®
, Vegebom®
ou préparations
extemporanées).
L’amélioration peut être spectaculaire, mais la
manœuvre doit être effectuée avec précaution
car elle est traumatisante et une mauvaise
cicatrisation secondaire peut avoir l’effet inverse
de celui attendu.
! Stades 4 ou 5
Lors d’obturation totale, trop prononcée pour
être élargie manuellement, une intervention
chirurgicale pourrait être envisagée, mais elle
est difficile à proposer dans la pratique courante !!
Cliché:J.-C.Natorp
PHOTO 3. Stade 1 de SONO :
les éleveurs doivent être
encouragés à détecter les
animaux affectés par une
inspection attentive.
❶ Congestion et pétéchies.
❷ Œdème en “vergétures”.
❸ Fibrose. ❹ Ulcère.
❺ Graisse.
En savoir plus
- Alzieu J-P, Chiarisoli O. Actualités
sur la clinique et la thérapeutique
de l’œstrose ovine. Point Vét.
1990;22(129):173-183.
- Alzieu J-P, Dorchies Ph, Donat F
et coll. Données nouvelles sur
l’épidémiologie de l’œstrose ovine.
Point Vét. 1994;26(162):363-369.
- Alzieu S. Syndrome d’obstruction
nasale des ovins : description.
Mémoire de fin d’études pour
l’obtention du titre d’ingénieur
des techniques agricoles. ENITAB.
2005:96.
- Dorchies P. Physiopathologie
de l’œstrose ovine et rappels
cliniques. Point Vét. 1997;28
(n° spécial “Parasitologie des
ruminants”):1843-1847.
- Dorchies P, Alzieu JP. L’œstrose
ovine : revue. Rev. Méd. Vét.
1997;148(7):565-574.
Congrès
- Garcia-Sanmartin J, Garcia-Perez
A, Barandika J et coll. Estertor
nasal cronico ovino (ENCO).
Descripcion clinica y
epidemiologica y su relacion con
el eczema facial ovino. Congreso
de la Societad Espanola
de ovitecnia y caprinotecnia,
septembre 2002.
❶
❷
❹
❸
❺
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© Le Point Vétérinaire - Reproduction interdite
- 5. (PHOTOS 4 ET 5). La réforme est plus logique.
Dans un cas de cette étude, l’abattage total du
troupeau a été décidé en accord avec l’éleveur
et le groupement de défense sanitaire (GDS).
2. Aspects pratiques et réglementaires
Aucun résumé des caractéristiques du produit
(RCP) ne mentionne pour une spécialité une
utilisation dans l’espèce ovine en application
intranasale et pour l’indication SONO. Le
praticien peut prescrire un traitement en respec-
tant la cascade officielle et en vérifiant l’absence
de résidus. Les résultats attendus doivent être
pesés au regard de divers éléments :
- contraintes d’administration ;
- amélioration attendue du bien-être ;
- risque de résidus ;
- précocité d’intervention possible ;
- attentes de l’éleveur.
Il convient de définir précisément le moment
idéal d’intervention, en sachant que les brebis
affectées sont toujours soit en lactation, soit en
gestation (innocuité ? risques de résidus ?).
En règle générale, il convient de privilégier les
traitements locaux, à base de spécialités pour
animaux de rente (bovins) et administrés après
la période d’agnelages.
Sixième étape :
prévention
Les mesures préventives restent arbitraires,
puisque la pathogénie de cette affection n’est
pas établie. Théoriquement, en raison des
points épidémiologiques communs, il convien-
drait de monter le troupeau en altitude à la belle
saison et de ne pas laisser vieillir les animaux…
En pratique, les mesures se résument à lutter
efficacement contre les œstres, en postulant que
ceux-ci initient ou favorisent les troubles
observés (lien indirect via l’allergie). L’aggrava-
tion des symptômes lors de traitement impose
une prévention non médicamenteuse de
l’œstrose. En outre, des mesures qui permettent
d’éviter l’aggravation de la dyspnée, les surinfec-
tions et les fausses déglutitions sont à conseiller.
1. Limiter l’agression par les œstres
En l’état actuel des connaissances, deux
mesures peuvent être conseillées :
- ne sortir les brebis que la nuit et aux heures
fraîches ;
- utiliser des répulsifs : le badigeon d’huile de
cade sur le crâne semble utile, mais sa durée
d’activité est mal connue (disparition rapide
lors du pâturage) et il peut conférer un goût
désagréable au lait. La pose de masques chez
les animaux (utilisés dans les Andes, selon Ph.
Dorchies, communication personnelle), qui
empêchent l’accès des mouches aux narines,
n’est pas simple à concevoir en pratique.
2. Limiter l’aggravation des symptômes
• Améliorer la ventilation des bâtiments d’élevage
est une mesure majeure lors de difficultés
respiratoires, notamment lors de SONO. Une
ventilation correcte ne garantit pas l’absence
de SONO, mais une ventilation déficiente
l’aggrave. Un diagnostic de bâtiment classique
précède tout conseil d’amélioration : densité
animale, différentiel d’hygrométrie intérieure/
extérieure, mouvements d’air et contaminants.
• Il convient d’éviter une lyse brutale des parasi-
tes consécutive au traitement de l’œstrose. La
lactation empêche de traiter les œstres au
moment de leur première agression estivale, ce
qui pourrait donner le temps à la relation
antigène-animal de s’installer. Le poids des
brebis à traiter doit être correctement estimé,
et les dates de traitement et l’attitude à adopter
en cas d’échec sont étudiées (recours au vétéri-
naire plutôt que la mise en œuvre d’un second
traitement).
• Les risques de pneumonie par fausse dégluti-
tion sont fréquents lors de SONO : administra-
tion forcée de médicaments par voie orale, forte
compétition à l’auge, abreuvement irrégulier.
• La fatigue cardiorespiratoire à l’approche de
l’agnelage doit être limitée : il convient d’adap-
ter l’encombrement et la densité énergétique de
la ration à la taille et au poids de la portée.
L’obstruction nasale des ovins a des points
communs avec le piétin : les éleveurs “acceptent”
ou refusent cette maladie selon leur niveau
d’exigence en matière de bien-être. Le SONO peut
aussi provoquer des pertes économiques
(mortalité lors des agnelages, abattage total de
cheptels, pertes de production laitière de l’ordre
de 20 %, etc.). Il convient d’améliorer la précocité
de la détection de cette maladie, de mieux évaluer
les possibilités thérapeutiques et leur efficacité,
et d’approfondir les connaissances épidémiolo-
giques, en particulier sur d’éventuelles spécifici-
tés de l’œstrose dans le bassin de production où
le SONO est rencontré. Pour cela, il serait
nécessaire de préciser le rythme et les modalités
d’agression par les œstres, par exemple en mettant
en évidence directement les attaques par ces
mouches, comme cela se pratique au Mexique
(J.-P. Alzieu, communication personnelle). ■
Se former / CONDUITE ÀTENIR /
!!
À lire également
- Alzieu J-P. L’œstrose ovine revient
en force cet été. Elle nécessite un
traitement précoce de l’ensemble
du troupeau. La Semaine
Vétérinaire. 2003;1105:22.
- Bouquet B. Œstrose, coccidiose
et haemonchose au menu des
réjouissances ovines. Certaines
parasitoses “résistent”
à l’éradication. La Semaine
Vétérinaire. 2002;1061:37.
- Bouquet B. Le lien œstrose-
tumeurs nasales n’est pas établi.
Cette parasitose est maîtrisée
chez les ovins, mais pas éradiquée.
La Semaine Vétérinaire.
2002;1067:62.
Cliché:J.-C.Natorp
PHOTO 4. Stade 4 de SONO : L’orifice
nasal a l’aspect d'un méat, avant
de se fermer intégralement,
dans un nombre limité de cas.
PHOTO 5. SONO stades 3 (gauche) et 4
(droite) : les adhérences responsables
du rétrecissement de l’orifice nasal sont
nettement visibles à l’autopsie, après
coupes horizontale, verticale
transversale et verticales paramédianes.
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Le Point Vétérinaire / N° 256 / Juin 2005 /44
Cliché:J.-C.Natorp
PV256_P040_044_Natorp 27/05/05 15:19 Page 44
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