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LE STATUT DE LA PRÉPOSITION DANS LES MOTS COMPOSÉS

                                                                                                         Brigitte Kampers-Manhe

                                                                                                         De Boeck Université | Travaux de linguistique

                                                                                                         2001/1 - no42-43
                                                                                                         pages 97 à 109


                                                                                                         ISSN 0082-6049




                                                                                                         Article disponible en ligne à l'adresse:
                                                                                                         --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
                                                                                                         http://www.cairn.info/revue-travaux-de-linguistique-2001-1-page-97.htm
                                                                                                         --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
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                                                                                                                                                                                                                                         Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université
                                                                                                         Pour citer cet article :
                                                                                                         --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
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                                                                                                         Travaux de linguistique, 2001/1 no42-43, p. 97-109. DOI : 10.3917/tl.042.097
                                                                                                         --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------




                                                                                                         Distribution électronique Cairn.info pour De Boeck Université.
                                                                                                         © De Boeck Université. Tous droits réservés pour tous pays.


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                                                                                                         France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.
Le statut de la préposition dans les mots composés

                                                                                                                     LE STATUT DE LA PRÉPOSITION
                                                                                                                      DANS LES MOTS COMPOSÉS

                                                                                                                                 Brigitte KAMPERS-MANHE*

                                                                                                                                  Université de Groningen




                                                                                                         0.    Introduction
                                                                                                         Le rôle de la préposition dans les mots composés du type sans-abri, par
                                                                                                         opposition à contre-culture, a été examiné par le passé (cf., notamment,
                                                                                                         Zwanenburg, 1990), tandis que celui qu’elle assume dans les déverbaux du
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                                                                                                         type gardien de prison ou les simples synapsies (Benveniste, 1974) du type




                                                                                                                                                                                                  Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université
                                                                                                         pommes de terre, robe à fleurs, n’a pas reçu l’attention qu’il mérite. La
                                                                                                         plupart des morphologues (générativistes) considèrent même que ces derniers
                                                                                                         mots ne sont pas de véritables composés parce qu’ils ne sont pas conformes
                                                                                                         aux règles de réécriture morphologiques. Cet article vise à montrer que ce
                                                                                                         sont bien des composés réguliers, dans lesquels la préposition est insérée,
                                                                                                         contrairement à celle des mots considérés comme de véritables composés,
                                                                                                         dans le but de légitimer le complément qui la suit.
                                                                                                                Après avoir présenté, dans la section 1, notre cadre théorique (Bok-
                                                                                                         Bennema & Kampers-Manhe, 2000), nous montrerons comment il permet
                                                                                                         de rendre compte de la structure des mots du type sans-abri et contre-culture
                                                                                                         et du statut de leur préposition respective (section 2). Nous en dériverons
                                                                                                         ensuite, dans la section 3, celle des composés du type gardien de prison, en
                                                                                                         l’opposant à celle des composés germaniques correspondants du type can-
                                                                                                         opener. Nous montrerons que l’analyse présentée permet de généraliser le
                                                                                                         rôle de la préposition dans les binominaux où elle figure et d’expliquer
                                                                                                         l’existence de contre-exemples apparents du type robe-fleurs.
                                                                                                         1.    Le cadre théorique
                                                                                                         Selon Bok-Bennema & Kampers-Manhe (2000), la composante
                                                                                                         morphologique suit les mêmes principes que la composante syntaxique.
                                                                                                         *     Département des Langues et Cultures Romanes/Centre for Language and Cognition
                                                                                                               Groningen – Université de Groningen – Adresse: RTC Faculteit der Letteren Oude
                                                                                                               Kijk in’t Jatstraat 26, Postbus 716 – 9700AS Groningen (Pays-Bas) – Tél. :
                                                                                                               31503637537 – Tél. pers. : 01512383266 – e-mail : Kampers@let.rug.nl


                                                                                                                                                                                            97
Brigitte KAMPERS -MANHE

                                                                                                         Nous envisageons cette dernière comme conforme au modèle développé
                                                                                                         par Kayne (1995). Selon lui, toute structure syntaxique comporte une position
                                                                                                         de spécificateur/adjoint, de tête et de complément, dans cet ordre fixe et
                                                                                                         universel. Tout ordre de surface déviant de cet ordre de base est dû à
                                                                                                         l’application de déplacements : ainsi, dans cette optique, la structure de base
                                                                                                         de la phrase d’une langue SVO (français) ne diffère pas de celle de la phrase
                                                                                                         d’une langue SOV par exemple (néerlandais). La différence entre les deux
                                                                                                         langues résulte d’un déplacement de l’objet vers la gauche pour les langues
                                                                                                         SOV, et non plus d’ un ordre de base différent.
                                                                                                                 Pour nous, la structure morphologique comporte donc, tout comme
                                                                                                         la structure syntaxique, une position de spécificateur/d’adjoint et une position
                                                                                                         de complément, à côté de celle de la tête. Tout comme dans la phrase, l’ordre
                                                                                                         universel des constituants morphologiques est l’ordre Spécificateur/Adjoint-
                                                                                                         Tête-Complément. Les différences visibles dans l’ordre linéaire de ces
                                                                                                         constituants sont dues au déplacement de certains d’entre eux, tout comme
                                                                                                         en syntaxe. Ainsi, les composés endocentriques dont la tête est modifiée
                                                                                                         par un substantif, comme homme-grenouille ou frogman ou un adjectif,
                                                                                                         comme bleu ciel ou sky blue, présentent une structure d’adjonction, et ont
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                                                                                                                                                                                             Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université
                                                                                                         la même structure dans les langues romanes que dans les langues
                                                                                                         germaniques :

                                                                                                                 [1]   (a)                           (b)
                                                                                                                               NP                             AP

                                                                                                                        NP          NP                       NP          AP

                                                                                                                                    N                                    A

                                                                                                                  frog/grenouille man/homme                sky/ciel   blue/bleu

                                                                                                         Cette structure de base reflète les relations sémantiques entre les constituants,
                                                                                                         tandis que la structure dérivée peut en être différente, certains constituants
                                                                                                         devant être déplacés pour des raisons phonologiques. Pour obtenir l’ordre
                                                                                                         correct des constituants dans les langues romanes, et en français en
                                                                                                         particulier, il faut supposer qu’un déplacement a lieu, ce qui fait qu’on obtient
                                                                                                         respectivement homme-grenouille et bleu ciel. Comme les déplacements se
                                                                                                         font à gauche en Grammaire Générative, c’est la tête qui se déplace. Nous
                                                                                                         reviendrons sur ce déplacement.
                                                                                                                La structure des composés apparemment exocentriques du type coupe-
                                                                                                         pluie ou scarecrow est celle de la complémentation, comme [3], dans laquelle
                                                                                                         le substantif est le complément du verbe :




                                                                                                         98
Le statut de la préposition dans les mots composés

                                                                                                               [3]
                                                                                                                                            VP

                                                                                                                                    V            NP

                                                                                                                            Scare/coupe crow/pluie
                                                                                                         De même, il est couramment admis que la structure des mots dérivés relève
                                                                                                         de la complémentation, les suffixes sélectionnant leur complément. Ainsi
                                                                                                         -ier en français et -ian en anglais sont des suffixes nominaux qui sélectionnent
                                                                                                         un radical substantival. Ce dernier doit être incorporé à ce suffixe par
                                                                                                         mouvement de tête à tête (par adjonction d’une tête à gauche d’une autre),
                                                                                                         comme l’illustre (4) :
                                                                                                               [4]
                                                                                                                               NP                                       NP

                                                                                                                                        NP                        N               NP
                                                                                                                     N
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                                                                                                                                                                                                           Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université
                                                                                                                                        N                 N               N

                                                                                                                     -ier        pomm-                 pomm- i          -ier                ti

                                                                                                         En effet, un affixe étant un morphème lié, il doit se fondre avec un radical.
                                                                                                         Pour expliquer ceci formellement, on peut attribuer ce déplacement au fait
                                                                                                         que l’affixe possède un trait fort (Chomsky, 1995) [+i], qui doit être vérifié
                                                                                                         visiblement par déplacement de son complément, le radical, lui-même
                                                                                                         porteur du trait [-i] (pour une analyse détaillée, voir Bok-Bennema &
                                                                                                         Kampers-Manhe (2000)).
                                                                                                                 Reste à préciser ce qui déclenche le déplacement de la tête des
                                                                                                         composés présentant la structure de [1] dans les langues romanes. Pour ce
                                                                                                         faire, il convient d’examiner la structure des mots simples dans ces langues.
                                                                                                         Lorsqu’un mot est utilisé comme base pour former un dérivé, il prend une
                                                                                                         forme différente de celle qu’il a lorsqu’il fonctionne dans une phrase. Cette
                                                                                                         différence est visible à l’écrit et à l’oral dans les langues romanes, en
                                                                                                         particulier en espagnol. Comparez ainsi niño ‘enfant’ à niñ-ería
                                                                                                         ‘enfantillage’. Considérant cette alternance, à l’instar de Harris (1991), nous
                                                                                                         admettons qu’un mot n’est qu’un radical qui ne peut fonctionner comme
                                                                                                         unité prosodique que si on y ajoute un suffixe flexionnel, un ensemble de
                                                                                                         traits [+/- masc], [+/-sing], par exemple, qui sera phonétiquement réalisé ou
                                                                                                         non. Seul le radical est utilisé en combinaison avec un suffixe dérivationnel,
                                                                                                         comme le montre le contraste entre niñ-o et niñ-eria.




                                                                                                                                                                                                     99
Brigitte KAMPERS -MANHE

                                                                                                                 En français, la présence de ces suffixes flexionnels est visible à l’écrit,
                                                                                                         mais peu à l’oral. Le seul marqueur phonétiquement réalisé est le schwa.
                                                                                                         On relève ainsi le même contraste qu’en espagnol entre dout-e et dout-eux.
                                                                                                         C’est la présence du schwa qui empêche le [t] de tomber dans la
                                                                                                         prononciation de doute. Cet affixe flexionnel ne diffère en rien de l’affixe
                                                                                                         dérivationnel : il sélectionne un radical et doit se fondre avec lui. La structure
                                                                                                         d’un mot complet est donc la même que celle d’un dérivé, comme l’illustre
                                                                                                         [5a]. L’affixe flexionnel est la tête d’une projection flexionnelle (= un mot
                                                                                                         complet). Le complément est incorporé à l’affixe flexionnel, comme à
                                                                                                         l’affixe dérivationnel et pour les mêmes raisons, avec cette différence que
                                                                                                         les traits catégoriels du complément percolent vers la projection maximale,
                                                                                                         la flexion n’ayant pas de statut catégoriel : on obtient un substantif fléchi,
                                                                                                         complet. [5b] représente la structure dérivée du mot grenouille :
                                                                                                                [5] (a)                                             (b)      InflP/NP
                                                                                                                              InflP

                                                                                                                       Infl           NP                            Infl/N              NP
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                                                                                                                                                                                               Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université
                                                                                                                                      N                   N                    Infl     N

                                                                                                                      e/o      grenouill-/niñ-   grenouill-/niñ-i              e/o      ti


                                                                                                         Ce mot est alors utilisable en syntaxe, comme une nouvelle tête
                                                                                                         substantivale : nous dirons qu’il est recyclé. Notons que les mots ont la
                                                                                                         même structure de base dans les langues germaniques, bien que l’affixe
                                                                                                         flexionnel ne soit pas visible. Nous attribuons l’ordre différent des
                                                                                                         constituants des mots composés du type homme-grenouille au déplacement
                                                                                                         de la tête déclenché par le fait qu’en matière de composition l’unité de base
                                                                                                         est le radical dans les langues romanes. D’après cette hypothèse, un mot
                                                                                                         comme sac-poubelle en français, hombre rana ‘homme grenouille’ en
                                                                                                         espagnol, aura la structure de (6a) : le radical nominal, l’unité de base sac et
                                                                                                         hombr-, respectivement, est modifié par un substantif complet poubelle,
                                                                                                         rana, respectivement. La projection nominale ainsi formée est sélectionnée
                                                                                                         par un affixe flexionnel lui permettant de fonctionner comme mot. La tête
                                                                                                         nominale est ensuite incorporée à l’affixe flexionnel, son trait catégoriel
                                                                                                         percole et on obtient un substantif complet. Ce déplacement rend compte
                                                                                                         de la position linéaire de la tête, à gauche du modificateur. Ceci est illustré
                                                                                                         dans [6b] :




                                                                                                         100
Le statut de la préposition dans les mots composés

                                                                                                                [6]   (a)                                 (b)      InflP/NP
                                                                                                                             InflP
                                                                                                                      Infl           NP                   Infl/N                  NP

                                                                                                                             NP           NP         N          Infl    NP             NP
                                                                                                                                           N                                           N

                                                                                                                      0 poubelle          sac    sac-i             0   poubelle        ti

                                                                                                         Quant aux langues germaniques, nous supposons que leurs composés ont
                                                                                                         pour tête un mot. La structure de base d’un mot comme frogman sera donc
                                                                                                         celle de [7] : le substantif complet est modifié par un autre qui lui est adjoint.
                                                                                                         Aucun mouvement de tête n’est déclenché, ce qui explique que l’ordre de
                                                                                                         base soit conservé.
                                                                                                                [7]
                                                                                                                               InflP/NP

                                                                                                                       NP                 InflP/NP
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                                                                                                                                                                                                          Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université
                                                                                                                      frog                 man
                                                                                                         Pour plus de détails sur les prédictions qui découlent de cette hypothèse, en
                                                                                                         particulier les différences entre les composés français et néerlandais, voir
                                                                                                         Kampers-Manhe (2000).
                                                                                                                Nous allons considérer comment le modèle ainsi présenté dans ses
                                                                                                         grandes lignes permet de rendre compte de la structure des composés
                                                                                                         comportant une préposition. Nous commencerons par les composés les plus
                                                                                                         étudiés par le passé.

                                                                                                         2.     Les composés du type Préposition + substantif
                                                                                                         Considérons les mots suivants
                                                                                                                [8]     Sans-papier, sans-cervelle, contre-poison, après-communisme, pour-
                                                                                                                        compte

                                                                                                         La relation entre la préposition et le substantif dans les mots de [8] est celle
                                                                                                         de la complémentation, la même que dans la structure syntaxique
                                                                                                         correspondante : un sans-papier est un homme qui n’a pas de papiers. La
                                                                                                         préposition a donc une valeur référentielle, celle qu’elle a dans les syntagmes
                                                                                                         prépositionnels en syntaxe. Cette construction modifie une tête substantivale
                                                                                                         non réalisée phonétiquement, mais comportant des traits syntaxiques et
                                                                                                         sémantiques : ces traits rendent compte du genre du mot (masculin), de sa
                                                                                                         catégorie (substantif), et de son sens, ‘personne sans cervelle’, par exemple,


                                                                                                                                                                                                  101
Brigitte KAMPERS -MANHE

                                                                                                         pour sans-cervelle. L’idée de la présence d’un élément nominal zéro n’est
                                                                                                         pas nouvelle : elle est déjà suggérée dans Rohrer (1977) pour les composés
                                                                                                         apparemment exocentriques du type coupe-pluie et elle a été souvent reprise,
                                                                                                         notamment par Zwanenburg (1990). Cette projection nominale est elle-même
                                                                                                         le complément d’une projection flexionnelle, qui lui permet de fonctionner
                                                                                                         comme mot ; on obtient ainsi [9] :
                                                                                                                [9]
                                                                                                                                   InflP

                                                                                                                        Infl                      NP
                                                                                                                                                               NP
                                                                                                                                           PP
                                                                                                                                                                           N
                                                                                                                               P                  NP

                                                                                                                        0 sans                  cervelle                   0
                                                                                                         Comme dans la structure [6b], la tête nominale non réalisée phonétiquement
                                                                                                         est ensuite incorporée à l’affixe flexionnel.
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                                                                                                                                                                                                                       Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université
                                                                                                                Les prépositions référentielles que l’on trouve dans les composés du
                                                                                                         type [10] :
                                                                                                                [10]     contre-culture, sous-consommation, surhomme, avant-pont, arrière-
                                                                                                                         pays

                                                                                                         n’ont pas le statut de tête puisque le composé désigne une sous-classe des
                                                                                                         référents de l’élément de droite : une contre-culture est une sorte de culture ;
                                                                                                         nous les considérons comme des modificateurs, suivant Zwanenburg (1990),
                                                                                                         qui oppose les mots du type sous-bois à ceux du type avant-bras, et nous
                                                                                                         envisageons la structure de ces mots comme une structure d’adjonction.
                                                                                                         Cependant, dans ces mots, la préposition a également son sens plein. Le
                                                                                                         statut de la préposition est donc le même que dans les composés précédents,
                                                                                                         seule la relation sémantique avec la tête nominale change. Adaptant selon
                                                                                                         notre théorie la structure proposée par Zwanenburg (1990), nous accordons
                                                                                                         à ces mots la structure de base [11a], qui reflète bien cette relation :
                                                                                                                [11]     (a)                                     (b)           InflP
                                                                                                                               InflP                                                            InflP
                                                                                                                                                             P
                                                                                                                        Infl           NP                                           Infl                     NP

                                                                                                                               P                NP         contre j       N                Infl         P         NP

                                                                                                                        -e contre           cultur-                    cultur i -           e           tj        ti




                                                                                                         102
Le statut de la préposition dans les mots composés

                                                                                                         Le substantif est ensuite incorporé à l’affixe flexionnel et la préposition est
                                                                                                         adjointe à la position Spec-InflP (cf. [11b]). Pour une explication détaillée
                                                                                                         de ce déplacement des éléments « légers », voir Bok-Bennema & Kampers-
                                                                                                         Manhe (2000).
                                                                                                                 Les deux structures présentées ici rendent bien compte du statut
                                                                                                         référentiel de la préposition : tête ou modificateur, elle a la même valeur
                                                                                                         référentielle que dans les syntagmes prépositionnels en syntaxe. Qu’en est-
                                                                                                         il de la préposition qui figure dans les composés binominaux déverbaux ?

                                                                                                         3.    Les binominaux déverbaux
                                                                                                         Les binominaux déverbaux du type gardien de prison ou gobeur d’huîtres
                                                                                                         s’opposent à leurs équivalents germaniques du type can-opener par la
                                                                                                         présence de la préposition et la place du complément du verbe dont est
                                                                                                         dérivé le substantif. Leur structure est cependant partiellement la même. En
                                                                                                         effet, un gardien de prison est une personne qui garde la prison, comme un
                                                                                                         can-opener est un instrument qui permet d’ouvrir les boîtes. Ainsi, on a
                                                                                                         affaire dans les deux cas à la combinaison d’un verbe et de son complément,
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                                                                                                                                                                                                              Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université
                                                                                                         comme dans les composés apparemment exocentriques illustrés sous [12] :
                                                                                                               [12]    coupe-vent , sèche-linge, taille-haie, essuie-tout, protège-nez, protège-
                                                                                                                       slip

                                                                                                         Considérons la structure de ces composés. Ils se retrouvent dans les langues
                                                                                                         romanes, en particulier en italien et en espagnol (pour une liste des déverbaux
                                                                                                         dans ces langues, voir Bok-Bennema & Kampers-Manhe (2000)). La tête
                                                                                                         verbale est un mot complet, témoin le e final, que nous considérons comme
                                                                                                         un affixe flexionnel et qui a la même forme que la troisième personne du
                                                                                                         singulier de l’indicatif. Dans la structure de base de ces mots le radical
                                                                                                         verbal prend donc pour complément un NP pour former un VP, lui-même
                                                                                                         complément d’un affixe flexionnel. Le radical verbal est incorporé à l’affixe
                                                                                                         flexionnel, ce qui donne la structure [13] :
                                                                                                               [13]
                                                                                                                                              InflP/VP

                                                                                                                                  Infl                     VP

                                                                                                                        V                Infl        V          NP

                                                                                                                      protèg- i          -e         ti          slip

                                                                                                         Notons que cette structure est incomplète. Comme dans la structure [9],
                                                                                                         cette projection verbale fléchie modifie une tête nominale non réalisée


                                                                                                                                                                                                      103
Brigitte KAMPERS -MANHE

                                                                                                         phonétiquement mais qui comporte le trait catégoriel nominal, des traits
                                                                                                         syntaxiques, parmi lesquels le genre du composé, et sémantiques, qui font
                                                                                                         qu’il fournit le référent de la classe entière dont fait partie le référent du mot
                                                                                                         entier, ici « objet hygiénique » ; il lie le rôle sémantique externe du verbe.
                                                                                                         Ce qui nous intéresse ici c’est la légitimation du complément slip après
                                                                                                         incorporation de la tête verbale à l’affixe flexionnel. En effet, si les principes
                                                                                                         qui valent pour la syntaxe valent aussi en morphologie, le complément doit
                                                                                                         être légitimé selon les mêmes conditions. En syntaxe, comme en
                                                                                                         morphologie, la condition suivante est valable :
                                                                                                                [14]     YP est légitimé par X dans la configuration [XP X YP] si X= [-N]

                                                                                                         C’est ce principe qui rend compte de l’agrammaticalité de *La peur la mort,
                                                                                                         *un homme fier son fils, puisque ni le substantif peur ni l’adjectif fier ne
                                                                                                         possèdent le trait [-N], qui permet de légitimer un complément. Dans les
                                                                                                         deux cas, on peut « sauver » la structure en insérant une préposition, ce qui
                                                                                                         fait qu’on obtient la peur de la mort et un homme fier de son fils. Cela
                                                                                                         revient à dire qu’un complément doit être légitimé par une préposition ou
                                                                                                         un verbe, les seules catégories capables de le faire. Dans [13], le NP
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                                                                                                                                                                                               Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université
                                                                                                         complément se trouve légitimé par la trace verbale, puisque l’affixe
                                                                                                         flexionnel est transparent à la percolation des traits de la tête (ici la catégorie
                                                                                                         verbale).
                                                                                                                 Que se passe-t-il si le suffixe nominal n’est plus le suffixe flexionnel,
                                                                                                         mais un suffixe dérivationnel comme -ien, qui, comme tous les suffixes
                                                                                                         français, sélectionne un radical ? Le radical verbal prend pour complément
                                                                                                         un NP, comme dans le cas de [13], la projection maximale est alors le
                                                                                                         complément d’un suffixe nominal, auquel sa tête s’incorpore. Cette fois,
                                                                                                         les traits de la tête verbale ne peuvent percoler vers la projection maximale,
                                                                                                         le verbe perd pour ainsi dire son statut de verbe, et il ne peut plus légitimer
                                                                                                         le complément par l’intermédiaire de sa trace. La structure est mal formée,
                                                                                                         le mot qui y correspond agrammatical, *gardien prison :
                                                                                                                [15]
                                                                                                                                   NP                                      NP

                                                                                                                          N                  VP                 N                    VP

                                                                                                                                        V         NP     V           N          V         NP

                                                                                                                         -ien       gard -    prison gard - i       -ien        ti    prison


                                                                                                         Comme en syntaxe, la seule configuration possible pour sauver cette structure
                                                                                                         est d’insérer une préposition : gardien de prison.


                                                                                                         104
Le statut de la préposition dans les mots composés

                                                                                                                En anglais, on peut avoir la même structure que dans [15] si on utilise
                                                                                                         le suffixe -er, qui sélectionne une racine verbale, cf. [16a]. Le résultat de
                                                                                                         l’incorporation de V au suffixe nominal est également agrammatical,
                                                                                                         *opener-can, le verbe perdant son statut de verbe. Pourtant, le complément
                                                                                                         peut être légitimé dans la position d’adjoint à la position maximale, ici NP.
                                                                                                         Cette position n’offre pas cette possibilité en français. Le déplacement du
                                                                                                         NP can sauve la structure, comme le montre [16b] :
                                                                                                               [16] 1]      (a)                       (b)


                                                                                                                                  NP                                NP

                                                                                                                       N                   VP           NP                         NP

                                                                                                                                       V        NP                       N                   VP

                                                                                                                                                                V            N          V         NP
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                                                                                                                                                                                                        Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université
                                                                                                                      -er          open     can        can- j open- i        -er        ti        tj

                                                                                                         Notons qu’en syntaxe également, la position Spec-NP est une position
                                                                                                         légitime pour un syntagme nominal complément d’un nom dérivé d’un verbe
                                                                                                         en anglais. Comparez ainsi the city’s destruction «la destruction de la ville »
                                                                                                         à *the destruction city.
                                                                                                                L’anglais dispose également de la possibilité de légitimer le
                                                                                                         complément par une préposition, comme les langues romanes, en syntaxe
                                                                                                         comme en morphologie. En effet, un mot comme opener of can n’est pas
                                                                                                         exclu, même s’il est moins naturel que can-opener.
                                                                                                                On peut donc conclure que la préposition de est un simple moyen de
                                                                                                         légitimer un complément et qu’elle est donc insérée à un stade ultérieur de
                                                                                                         la dérivation, comme en syntaxe, ce qui rend aussi compte de son manque
                                                                                                         de valeur référentielle. Qu’en est-il de la préposition insérée entre deux
                                                                                                         noms ? Est-ce le même cas, ou a-t-on affaire à un autre type de préposition ?

                                                                                                         4.    La structure des binominaux non déverbaux
                                                                                                         La principale différence entre les composés déverbaux et les composés du
                                                                                                         type [17] réside dans le fait que la préposition de alterne avec la préposition
                                                                                                         à dans les derniers :
                                                                                                               [17]     a. pomme de terre, boîte de vitesse, gant de boxe, chaussures de
                                                                                                                           marche
                                                                                                                        b. sac à dos, verre à pied, robe à fleurs, coffre à jouets


                                                                                                                                                                                                  105
Brigitte KAMPERS -MANHE

                                                                                                         Pour une argumentation en faveur du statut de mots complexes pour ce type
                                                                                                         de mots, nous renvoyons, entre autres, à Bosredon & Tamba (1991). Le
                                                                                                         choix de la préposition semble être guidé par la relation à exprimer entre les
                                                                                                         deux substantifs : de pour l’origine (pomme de terre), à pour le but (sac à
                                                                                                         dos) ou les caractéristiques (robe à fleurs). De plus, la préposition à a des
                                                                                                         propriétés différentes selon qu’elle équivaut à avec ou à pour (cf. Cadiot
                                                                                                         1993, qui met en évidence ces différences de comportement, notamment la
                                                                                                         plus grande autonomie de à = avec + N par rapport au N qui précède).
                                                                                                                Ceci pourrait nous inciter à admettre que la préposition des
                                                                                                         binominaux de ce type a un statut différent de celui qu’elle a dans les
                                                                                                         binominaux déverbaux, puisqu’elle semble avoir une valeur référentielle.
                                                                                                         Cependant, elle est différente des prépositions comme sans, qu’on rencontre
                                                                                                         dans les composés étudiés dans la section 2. En effet, comme le dit Cadiot
                                                                                                         (1991), la préposition à est une préposition « incolore » même dans les
                                                                                                         expressions comme nourrir au biberon. En effet, elle ne peut pas référer
                                                                                                         mais sert à obtenir des noms qui désignent une sous-classe du mot tête.
                                                                                                         Pour Bosredon & Tamba (1991 : 44), les mots formés à l’aide de à et de
                                                                                                         sont aussi des mots complexes sous-classifiants, et les prépositions des
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                                                                                                                                                                                            Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université
                                                                                                         « opérateurs de couplage ». Ces opérateurs sont les deux transcriptions
                                                                                                         graphiques de l’opérateur zéro qu’on trouve dans papier-calque. Ainsi, on
                                                                                                         a papier de verre, papier à dessin et papier-calque. On retrouve cette idée
                                                                                                         chez Bartning (1993), qui cite Cadiot (1989) : « Alors que les prépositions
                                                                                                         incolores ont pour fonction dominante de vectoriser une relation qu’elles
                                                                                                         ne codent pas (mais qu’elles empruntent au contexte linguistique ou dont
                                                                                                         elles héritent à partir de la représentation sémantique du référent), les
                                                                                                         prépositions « sémantiques » ont en principe une organisation argumentale
                                                                                                         qui leur est propre, qu’elles codent lexicalement… » (Barting, 1993 : 164).
                                                                                                                Le choix des prépositions est donc guidé par la relation sémantique à
                                                                                                         signifier ; fonctionnellement, elles sont équivalentes. Ceci explique les
                                                                                                         hésitations qu’on a à interpréter le sens des mots complexes ; ainsi, comme
                                                                                                         le disent Bosredon & Tamba (1991), si le sens est relativement motivé dans
                                                                                                         verre à pied, « qui a un pied », il n’est pas toujours facile à reconnaître dans
                                                                                                         poste à essence, « qui délivre, qui fournit, qui a » (cf. Anscombre, 1990
                                                                                                         pour plus d’exemples.). Plusieurs arguments prouvent que ces prépositions
                                                                                                         ne sont pas porteuses de sens. Tout d’abord, en cas de troncation, la
                                                                                                         préposition disparaît, alors qu’elle est maintenue si elle est référentielle :
                                                                                                         ainsi, Bosredon & Tamba (1991) opposent mes chaussures à talons, qui
                                                                                                         devient mes talons, à téléphone sans fil, dont téléphone peut être supprimé,
                                                                                                         avec maintien de la préposition ; de même dans les sigles la préposition
                                                                                                         vectorielle disparaît : HLM, alors que la préposition référentielle est
                                                                                                         maintenue, comme dans TSF, avec le S de sans. De plus, on a souvent noté
                                                                                                         les hésitations à employer l’une ou l’autre des prépositions :


                                                                                                         106
Le statut de la préposition dans les mots composés

                                                                                                               [18]   Papier de/à musique, instrument de/à musique, épingle à/de nourrice

                                                                                                         L’idée que ces prépositions n’ont pas véritablement de contenu est soutenue
                                                                                                         par le fait qu’elles semblent pouvoir être supprimées sans que cela nuise à
                                                                                                         l’interprétation du mot composé. Ainsi, on trouve à côté des synapsies sous
                                                                                                         (19), des mots composés du type [20] :
                                                                                                               [19]   stylo à plume, stylo à feutre, stylo à bille, robe à fleurs, sac de poubelle,
                                                                                                                          sac à dos
                                                                                                               [20]   stylo-plume, stylo-feutre, stylo-bille, robe-fleurs, sac-poubelle, étui-
                                                                                                                          sac

                                                                                                         Ceci est aussi noté par Goosse (1975), qui signale que le complément de
                                                                                                         nom tend à se passer de préposition. Il oppose coin-couture à coin-bureau
                                                                                                         et coin-jardin, synthèmes formés de façon plus classique, selon lui.
                                                                                                                Ces arguments nous font opter pour une structure du type (21), dans
                                                                                                         laquelle le constituant de droite, que nous considérons comme un
                                                                                                         complément modifiant, occupe la position de complément, suivant Larson
                                                                                                         (1988). La préposition est insérée, comme dans les déverbaux de la section
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                                                                                                         précédente, pour légitimer le complément, en fonction de la relation à




                                                                                                                                                                                                      Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université
                                                                                                         exprimer, mais n’a pas de véritable contenu référentiel.

                                                                                                               [21]              InflP

                                                                                                                         Infl                  NP
                                                                                                                                          N                PP
                                                                                                                                                      P         N
                                                                                                                         e               pomm-/verr-de/à   terre/pied

                                                                                                         Les mots du type [20] semblent constituer des contre-exemples à l’hypothèse
                                                                                                         avancée, vu le manque de préposition. Il n’en est rien cependant : ces mots
                                                                                                         présentent la structure d’adjonction donnée sous [6]. Contrairement à Goosse
                                                                                                         (1975), nous ne faisons pas de différence entre les nouvelles créations,
                                                                                                         comme sac-poubelle, et ce qu’il appelle les synthèmes formés de façon
                                                                                                         plus classique. Le français dispose donc des deux possibilités pour unir
                                                                                                         deux noms dans un composé : soit par la complémentation, avec emploi
                                                                                                         obligatoire d’une préposition, soit par adjonction d’un modificateur, avec
                                                                                                         une tendance actuelle à préférer cette solution. Ceci explique pourquoi on
                                                                                                         ne peut trouver, à côté de mots tels que machine à laver des mots comme
                                                                                                         *machine laver, le verbe fléchi ne pouvant s’employer comme adjoint. La
                                                                                                         solution possible est lave-linge, qui présente une structure identique à celle
                                                                                                         de coupe-pluie (cf. [3] et [13]).



                                                                                                                                                                                              107
Brigitte KAMPERS -MANHE

                                                                                                         5.      Conclusion
                                                                                                         Nous avons montré dans cette contribution que la préposition que l’on trouve
                                                                                                         dans les synapsies n’a pas de statut référentiel, qu’elle ne sert qu’à légitimer
                                                                                                         le complément d’un verbe dont la catégorie n’est plus visible par suite de
                                                                                                         son incorporation à un suffixe dérivationnel, ou d’un substantif, dont les
                                                                                                         traits catégoriels ne permettent pas de légitimer le complément. Nous avons
                                                                                                         également souligné que l’absence de préposition entre deux substantifs ne
                                                                                                         contredit pas cette hypothèse puisque dans ce cas on a affaire à une structure
                                                                                                         d’adjonction, dans laquelle le constituant de droite est un modificateur, selon
                                                                                                         la régularité de la composition dans les langues romanes. Nous avons ainsi
                                                                                                         pu rendre compte de la structure de ces mots composés et de la différence
                                                                                                         de statut entre les prépositions dites référentielles et les prépositions dites
                                                                                                         incolores dans la mesure où les premières ont un statut lexical, les secondes
                                                                                                         uniquement la fonction de légitimer le complément.


                                                                                                                                        RÉFÉRENCES
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                                                                                                                                                                                                Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université
                                                                                                         ANSCOMBRE J.C., 1990, « Pourquoi un moulin à vent n’est pas un ventilateur »,
                                                                                                             Langue française, 86, p. 103-125.
                                                                                                         B ENVENISTE E., 1974, Problèmes de linguistique générale II, Paris, Gallimard.
                                                                                                         B ARTNING I., 1993, « La préposition de, essai d’approche cognitive », Lexique, 11,
                                                                                                             p. 163-191.
                                                                                                         B OK-BENNEMA R. et B. KAMPERS-MANHE, 2000, Romance Compounding and the
                                                                                                             Theory of Morphology, manuscrit.
                                                                                                         B OSREDON B. et I. TAMBA , 1991, « Verre à pied et moule à gaufres, préposition et
                                                                                                             noms composés de sous-classe », Langue française, 91, p. 40-57.
                                                                                                         C ADIOT P., 1989, « La préposition : interprétation par codage et interprétation par
                                                                                                             inférence », Cahiers de Grammaire, 14, Université de Toulouse-Le Mirail,
                                                                                                             p. 25-50.
                                                                                                         CADIOT P., 1991, « À la hache ou avec la hache ? Représentation mentale, expérience
                                                                                                             située et donation du référent », Langue française, 91, p. 7-23.
                                                                                                         C ADIOT P., 1993, « À entre deux noms : vers la composition nominale », in A.-M.
                                                                                                             BERTHONNEAU et P. CADIOT Lexique, 11 : Les prépositions : méthodes d’analyse,
                                                                                                             p. 193- 240.
                                                                                                         C HOMSKY N., The Minimalist Program, Cambridge, MIT Press.
                                                                                                         GOOSSE A., 1975, La néologie française aujourd’hui, Paris, Conseil national de la
                                                                                                             langue française.
                                                                                                         KAMPERS-MANHE B., 2000, « La composition en français et en néerlandais »,
                                                                                                             Leuvense Bijdragen, 89, Leuven, p. 157-172.
                                                                                                         KAYNE R., 1995, The Antisymmetry of Syntax, Cambridge, MIT Press.
                                                                                                         LARSON R., 1988, « On the Double Object construction », Linguistic Inquiry, 19,
                                                                                                             p. 335-391.



                                                                                                         108
Le statut de la préposition dans les mots composés

                                                                                                         ROHRER C., 1977, Die Wortzusammensetzung im modernen Französisch, Tübingen,
                                                                                                           TBL Verlag Gunter Narr.
                                                                                                         ZWANENBURG Z., 1990, « Argument structure in Derivation and Compounding »,
                                                                                                           Recherches de linguistique française et romane d’Utrecht, 9, p. 37-42.
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Le statut de la préposition dans les mots composés

  • 1. LE STATUT DE LA PRÉPOSITION DANS LES MOTS COMPOSÉS Brigitte Kampers-Manhe De Boeck Université | Travaux de linguistique 2001/1 - no42-43 pages 97 à 109 ISSN 0082-6049 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-travaux-de-linguistique-2001-1-page-97.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Kampers-Manhe Brigitte , « Le statut de la préposition dans les mots composés » , Travaux de linguistique, 2001/1 no42-43, p. 97-109. DOI : 10.3917/tl.042.097 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour De Boeck Université. © De Boeck Université. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.
  • 2. Le statut de la préposition dans les mots composés LE STATUT DE LA PRÉPOSITION DANS LES MOTS COMPOSÉS Brigitte KAMPERS-MANHE* Université de Groningen 0. Introduction Le rôle de la préposition dans les mots composés du type sans-abri, par opposition à contre-culture, a été examiné par le passé (cf., notamment, Zwanenburg, 1990), tandis que celui qu’elle assume dans les déverbaux du Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université type gardien de prison ou les simples synapsies (Benveniste, 1974) du type Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université pommes de terre, robe à fleurs, n’a pas reçu l’attention qu’il mérite. La plupart des morphologues (générativistes) considèrent même que ces derniers mots ne sont pas de véritables composés parce qu’ils ne sont pas conformes aux règles de réécriture morphologiques. Cet article vise à montrer que ce sont bien des composés réguliers, dans lesquels la préposition est insérée, contrairement à celle des mots considérés comme de véritables composés, dans le but de légitimer le complément qui la suit. Après avoir présenté, dans la section 1, notre cadre théorique (Bok- Bennema & Kampers-Manhe, 2000), nous montrerons comment il permet de rendre compte de la structure des mots du type sans-abri et contre-culture et du statut de leur préposition respective (section 2). Nous en dériverons ensuite, dans la section 3, celle des composés du type gardien de prison, en l’opposant à celle des composés germaniques correspondants du type can- opener. Nous montrerons que l’analyse présentée permet de généraliser le rôle de la préposition dans les binominaux où elle figure et d’expliquer l’existence de contre-exemples apparents du type robe-fleurs. 1. Le cadre théorique Selon Bok-Bennema & Kampers-Manhe (2000), la composante morphologique suit les mêmes principes que la composante syntaxique. * Département des Langues et Cultures Romanes/Centre for Language and Cognition Groningen – Université de Groningen – Adresse: RTC Faculteit der Letteren Oude Kijk in’t Jatstraat 26, Postbus 716 – 9700AS Groningen (Pays-Bas) – Tél. : 31503637537 – Tél. pers. : 01512383266 – e-mail : Kampers@let.rug.nl 97
  • 3. Brigitte KAMPERS -MANHE Nous envisageons cette dernière comme conforme au modèle développé par Kayne (1995). Selon lui, toute structure syntaxique comporte une position de spécificateur/adjoint, de tête et de complément, dans cet ordre fixe et universel. Tout ordre de surface déviant de cet ordre de base est dû à l’application de déplacements : ainsi, dans cette optique, la structure de base de la phrase d’une langue SVO (français) ne diffère pas de celle de la phrase d’une langue SOV par exemple (néerlandais). La différence entre les deux langues résulte d’un déplacement de l’objet vers la gauche pour les langues SOV, et non plus d’ un ordre de base différent. Pour nous, la structure morphologique comporte donc, tout comme la structure syntaxique, une position de spécificateur/d’adjoint et une position de complément, à côté de celle de la tête. Tout comme dans la phrase, l’ordre universel des constituants morphologiques est l’ordre Spécificateur/Adjoint- Tête-Complément. Les différences visibles dans l’ordre linéaire de ces constituants sont dues au déplacement de certains d’entre eux, tout comme en syntaxe. Ainsi, les composés endocentriques dont la tête est modifiée par un substantif, comme homme-grenouille ou frogman ou un adjectif, comme bleu ciel ou sky blue, présentent une structure d’adjonction, et ont Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université la même structure dans les langues romanes que dans les langues germaniques : [1] (a) (b) NP AP NP NP NP AP N A frog/grenouille man/homme sky/ciel blue/bleu Cette structure de base reflète les relations sémantiques entre les constituants, tandis que la structure dérivée peut en être différente, certains constituants devant être déplacés pour des raisons phonologiques. Pour obtenir l’ordre correct des constituants dans les langues romanes, et en français en particulier, il faut supposer qu’un déplacement a lieu, ce qui fait qu’on obtient respectivement homme-grenouille et bleu ciel. Comme les déplacements se font à gauche en Grammaire Générative, c’est la tête qui se déplace. Nous reviendrons sur ce déplacement. La structure des composés apparemment exocentriques du type coupe- pluie ou scarecrow est celle de la complémentation, comme [3], dans laquelle le substantif est le complément du verbe : 98
  • 4. Le statut de la préposition dans les mots composés [3] VP V NP Scare/coupe crow/pluie De même, il est couramment admis que la structure des mots dérivés relève de la complémentation, les suffixes sélectionnant leur complément. Ainsi -ier en français et -ian en anglais sont des suffixes nominaux qui sélectionnent un radical substantival. Ce dernier doit être incorporé à ce suffixe par mouvement de tête à tête (par adjonction d’une tête à gauche d’une autre), comme l’illustre (4) : [4] NP NP NP N NP N Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université N N N -ier pomm- pomm- i -ier ti En effet, un affixe étant un morphème lié, il doit se fondre avec un radical. Pour expliquer ceci formellement, on peut attribuer ce déplacement au fait que l’affixe possède un trait fort (Chomsky, 1995) [+i], qui doit être vérifié visiblement par déplacement de son complément, le radical, lui-même porteur du trait [-i] (pour une analyse détaillée, voir Bok-Bennema & Kampers-Manhe (2000)). Reste à préciser ce qui déclenche le déplacement de la tête des composés présentant la structure de [1] dans les langues romanes. Pour ce faire, il convient d’examiner la structure des mots simples dans ces langues. Lorsqu’un mot est utilisé comme base pour former un dérivé, il prend une forme différente de celle qu’il a lorsqu’il fonctionne dans une phrase. Cette différence est visible à l’écrit et à l’oral dans les langues romanes, en particulier en espagnol. Comparez ainsi niño ‘enfant’ à niñ-ería ‘enfantillage’. Considérant cette alternance, à l’instar de Harris (1991), nous admettons qu’un mot n’est qu’un radical qui ne peut fonctionner comme unité prosodique que si on y ajoute un suffixe flexionnel, un ensemble de traits [+/- masc], [+/-sing], par exemple, qui sera phonétiquement réalisé ou non. Seul le radical est utilisé en combinaison avec un suffixe dérivationnel, comme le montre le contraste entre niñ-o et niñ-eria. 99
  • 5. Brigitte KAMPERS -MANHE En français, la présence de ces suffixes flexionnels est visible à l’écrit, mais peu à l’oral. Le seul marqueur phonétiquement réalisé est le schwa. On relève ainsi le même contraste qu’en espagnol entre dout-e et dout-eux. C’est la présence du schwa qui empêche le [t] de tomber dans la prononciation de doute. Cet affixe flexionnel ne diffère en rien de l’affixe dérivationnel : il sélectionne un radical et doit se fondre avec lui. La structure d’un mot complet est donc la même que celle d’un dérivé, comme l’illustre [5a]. L’affixe flexionnel est la tête d’une projection flexionnelle (= un mot complet). Le complément est incorporé à l’affixe flexionnel, comme à l’affixe dérivationnel et pour les mêmes raisons, avec cette différence que les traits catégoriels du complément percolent vers la projection maximale, la flexion n’ayant pas de statut catégoriel : on obtient un substantif fléchi, complet. [5b] représente la structure dérivée du mot grenouille : [5] (a) (b) InflP/NP InflP Infl NP Infl/N NP Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université N N Infl N e/o grenouill-/niñ- grenouill-/niñ-i e/o ti Ce mot est alors utilisable en syntaxe, comme une nouvelle tête substantivale : nous dirons qu’il est recyclé. Notons que les mots ont la même structure de base dans les langues germaniques, bien que l’affixe flexionnel ne soit pas visible. Nous attribuons l’ordre différent des constituants des mots composés du type homme-grenouille au déplacement de la tête déclenché par le fait qu’en matière de composition l’unité de base est le radical dans les langues romanes. D’après cette hypothèse, un mot comme sac-poubelle en français, hombre rana ‘homme grenouille’ en espagnol, aura la structure de (6a) : le radical nominal, l’unité de base sac et hombr-, respectivement, est modifié par un substantif complet poubelle, rana, respectivement. La projection nominale ainsi formée est sélectionnée par un affixe flexionnel lui permettant de fonctionner comme mot. La tête nominale est ensuite incorporée à l’affixe flexionnel, son trait catégoriel percole et on obtient un substantif complet. Ce déplacement rend compte de la position linéaire de la tête, à gauche du modificateur. Ceci est illustré dans [6b] : 100
  • 6. Le statut de la préposition dans les mots composés [6] (a) (b) InflP/NP InflP Infl NP Infl/N NP NP NP N Infl NP NP N N 0 poubelle sac sac-i 0 poubelle ti Quant aux langues germaniques, nous supposons que leurs composés ont pour tête un mot. La structure de base d’un mot comme frogman sera donc celle de [7] : le substantif complet est modifié par un autre qui lui est adjoint. Aucun mouvement de tête n’est déclenché, ce qui explique que l’ordre de base soit conservé. [7] InflP/NP NP InflP/NP Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université frog man Pour plus de détails sur les prédictions qui découlent de cette hypothèse, en particulier les différences entre les composés français et néerlandais, voir Kampers-Manhe (2000). Nous allons considérer comment le modèle ainsi présenté dans ses grandes lignes permet de rendre compte de la structure des composés comportant une préposition. Nous commencerons par les composés les plus étudiés par le passé. 2. Les composés du type Préposition + substantif Considérons les mots suivants [8] Sans-papier, sans-cervelle, contre-poison, après-communisme, pour- compte La relation entre la préposition et le substantif dans les mots de [8] est celle de la complémentation, la même que dans la structure syntaxique correspondante : un sans-papier est un homme qui n’a pas de papiers. La préposition a donc une valeur référentielle, celle qu’elle a dans les syntagmes prépositionnels en syntaxe. Cette construction modifie une tête substantivale non réalisée phonétiquement, mais comportant des traits syntaxiques et sémantiques : ces traits rendent compte du genre du mot (masculin), de sa catégorie (substantif), et de son sens, ‘personne sans cervelle’, par exemple, 101
  • 7. Brigitte KAMPERS -MANHE pour sans-cervelle. L’idée de la présence d’un élément nominal zéro n’est pas nouvelle : elle est déjà suggérée dans Rohrer (1977) pour les composés apparemment exocentriques du type coupe-pluie et elle a été souvent reprise, notamment par Zwanenburg (1990). Cette projection nominale est elle-même le complément d’une projection flexionnelle, qui lui permet de fonctionner comme mot ; on obtient ainsi [9] : [9] InflP Infl NP NP PP N P NP 0 sans cervelle 0 Comme dans la structure [6b], la tête nominale non réalisée phonétiquement est ensuite incorporée à l’affixe flexionnel. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université Les prépositions référentielles que l’on trouve dans les composés du type [10] : [10] contre-culture, sous-consommation, surhomme, avant-pont, arrière- pays n’ont pas le statut de tête puisque le composé désigne une sous-classe des référents de l’élément de droite : une contre-culture est une sorte de culture ; nous les considérons comme des modificateurs, suivant Zwanenburg (1990), qui oppose les mots du type sous-bois à ceux du type avant-bras, et nous envisageons la structure de ces mots comme une structure d’adjonction. Cependant, dans ces mots, la préposition a également son sens plein. Le statut de la préposition est donc le même que dans les composés précédents, seule la relation sémantique avec la tête nominale change. Adaptant selon notre théorie la structure proposée par Zwanenburg (1990), nous accordons à ces mots la structure de base [11a], qui reflète bien cette relation : [11] (a) (b) InflP InflP InflP P Infl NP Infl NP P NP contre j N Infl P NP -e contre cultur- cultur i - e tj ti 102
  • 8. Le statut de la préposition dans les mots composés Le substantif est ensuite incorporé à l’affixe flexionnel et la préposition est adjointe à la position Spec-InflP (cf. [11b]). Pour une explication détaillée de ce déplacement des éléments « légers », voir Bok-Bennema & Kampers- Manhe (2000). Les deux structures présentées ici rendent bien compte du statut référentiel de la préposition : tête ou modificateur, elle a la même valeur référentielle que dans les syntagmes prépositionnels en syntaxe. Qu’en est- il de la préposition qui figure dans les composés binominaux déverbaux ? 3. Les binominaux déverbaux Les binominaux déverbaux du type gardien de prison ou gobeur d’huîtres s’opposent à leurs équivalents germaniques du type can-opener par la présence de la préposition et la place du complément du verbe dont est dérivé le substantif. Leur structure est cependant partiellement la même. En effet, un gardien de prison est une personne qui garde la prison, comme un can-opener est un instrument qui permet d’ouvrir les boîtes. Ainsi, on a affaire dans les deux cas à la combinaison d’un verbe et de son complément, Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université comme dans les composés apparemment exocentriques illustrés sous [12] : [12] coupe-vent , sèche-linge, taille-haie, essuie-tout, protège-nez, protège- slip Considérons la structure de ces composés. Ils se retrouvent dans les langues romanes, en particulier en italien et en espagnol (pour une liste des déverbaux dans ces langues, voir Bok-Bennema & Kampers-Manhe (2000)). La tête verbale est un mot complet, témoin le e final, que nous considérons comme un affixe flexionnel et qui a la même forme que la troisième personne du singulier de l’indicatif. Dans la structure de base de ces mots le radical verbal prend donc pour complément un NP pour former un VP, lui-même complément d’un affixe flexionnel. Le radical verbal est incorporé à l’affixe flexionnel, ce qui donne la structure [13] : [13] InflP/VP Infl VP V Infl V NP protèg- i -e ti slip Notons que cette structure est incomplète. Comme dans la structure [9], cette projection verbale fléchie modifie une tête nominale non réalisée 103
  • 9. Brigitte KAMPERS -MANHE phonétiquement mais qui comporte le trait catégoriel nominal, des traits syntaxiques, parmi lesquels le genre du composé, et sémantiques, qui font qu’il fournit le référent de la classe entière dont fait partie le référent du mot entier, ici « objet hygiénique » ; il lie le rôle sémantique externe du verbe. Ce qui nous intéresse ici c’est la légitimation du complément slip après incorporation de la tête verbale à l’affixe flexionnel. En effet, si les principes qui valent pour la syntaxe valent aussi en morphologie, le complément doit être légitimé selon les mêmes conditions. En syntaxe, comme en morphologie, la condition suivante est valable : [14] YP est légitimé par X dans la configuration [XP X YP] si X= [-N] C’est ce principe qui rend compte de l’agrammaticalité de *La peur la mort, *un homme fier son fils, puisque ni le substantif peur ni l’adjectif fier ne possèdent le trait [-N], qui permet de légitimer un complément. Dans les deux cas, on peut « sauver » la structure en insérant une préposition, ce qui fait qu’on obtient la peur de la mort et un homme fier de son fils. Cela revient à dire qu’un complément doit être légitimé par une préposition ou un verbe, les seules catégories capables de le faire. Dans [13], le NP Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université complément se trouve légitimé par la trace verbale, puisque l’affixe flexionnel est transparent à la percolation des traits de la tête (ici la catégorie verbale). Que se passe-t-il si le suffixe nominal n’est plus le suffixe flexionnel, mais un suffixe dérivationnel comme -ien, qui, comme tous les suffixes français, sélectionne un radical ? Le radical verbal prend pour complément un NP, comme dans le cas de [13], la projection maximale est alors le complément d’un suffixe nominal, auquel sa tête s’incorpore. Cette fois, les traits de la tête verbale ne peuvent percoler vers la projection maximale, le verbe perd pour ainsi dire son statut de verbe, et il ne peut plus légitimer le complément par l’intermédiaire de sa trace. La structure est mal formée, le mot qui y correspond agrammatical, *gardien prison : [15] NP NP N VP N VP V NP V N V NP -ien gard - prison gard - i -ien ti prison Comme en syntaxe, la seule configuration possible pour sauver cette structure est d’insérer une préposition : gardien de prison. 104
  • 10. Le statut de la préposition dans les mots composés En anglais, on peut avoir la même structure que dans [15] si on utilise le suffixe -er, qui sélectionne une racine verbale, cf. [16a]. Le résultat de l’incorporation de V au suffixe nominal est également agrammatical, *opener-can, le verbe perdant son statut de verbe. Pourtant, le complément peut être légitimé dans la position d’adjoint à la position maximale, ici NP. Cette position n’offre pas cette possibilité en français. Le déplacement du NP can sauve la structure, comme le montre [16b] : [16] 1] (a) (b) NP NP N VP NP NP V NP N VP V N V NP Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université -er open can can- j open- i -er ti tj Notons qu’en syntaxe également, la position Spec-NP est une position légitime pour un syntagme nominal complément d’un nom dérivé d’un verbe en anglais. Comparez ainsi the city’s destruction «la destruction de la ville » à *the destruction city. L’anglais dispose également de la possibilité de légitimer le complément par une préposition, comme les langues romanes, en syntaxe comme en morphologie. En effet, un mot comme opener of can n’est pas exclu, même s’il est moins naturel que can-opener. On peut donc conclure que la préposition de est un simple moyen de légitimer un complément et qu’elle est donc insérée à un stade ultérieur de la dérivation, comme en syntaxe, ce qui rend aussi compte de son manque de valeur référentielle. Qu’en est-il de la préposition insérée entre deux noms ? Est-ce le même cas, ou a-t-on affaire à un autre type de préposition ? 4. La structure des binominaux non déverbaux La principale différence entre les composés déverbaux et les composés du type [17] réside dans le fait que la préposition de alterne avec la préposition à dans les derniers : [17] a. pomme de terre, boîte de vitesse, gant de boxe, chaussures de marche b. sac à dos, verre à pied, robe à fleurs, coffre à jouets 105
  • 11. Brigitte KAMPERS -MANHE Pour une argumentation en faveur du statut de mots complexes pour ce type de mots, nous renvoyons, entre autres, à Bosredon & Tamba (1991). Le choix de la préposition semble être guidé par la relation à exprimer entre les deux substantifs : de pour l’origine (pomme de terre), à pour le but (sac à dos) ou les caractéristiques (robe à fleurs). De plus, la préposition à a des propriétés différentes selon qu’elle équivaut à avec ou à pour (cf. Cadiot 1993, qui met en évidence ces différences de comportement, notamment la plus grande autonomie de à = avec + N par rapport au N qui précède). Ceci pourrait nous inciter à admettre que la préposition des binominaux de ce type a un statut différent de celui qu’elle a dans les binominaux déverbaux, puisqu’elle semble avoir une valeur référentielle. Cependant, elle est différente des prépositions comme sans, qu’on rencontre dans les composés étudiés dans la section 2. En effet, comme le dit Cadiot (1991), la préposition à est une préposition « incolore » même dans les expressions comme nourrir au biberon. En effet, elle ne peut pas référer mais sert à obtenir des noms qui désignent une sous-classe du mot tête. Pour Bosredon & Tamba (1991 : 44), les mots formés à l’aide de à et de sont aussi des mots complexes sous-classifiants, et les prépositions des Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université « opérateurs de couplage ». Ces opérateurs sont les deux transcriptions graphiques de l’opérateur zéro qu’on trouve dans papier-calque. Ainsi, on a papier de verre, papier à dessin et papier-calque. On retrouve cette idée chez Bartning (1993), qui cite Cadiot (1989) : « Alors que les prépositions incolores ont pour fonction dominante de vectoriser une relation qu’elles ne codent pas (mais qu’elles empruntent au contexte linguistique ou dont elles héritent à partir de la représentation sémantique du référent), les prépositions « sémantiques » ont en principe une organisation argumentale qui leur est propre, qu’elles codent lexicalement… » (Barting, 1993 : 164). Le choix des prépositions est donc guidé par la relation sémantique à signifier ; fonctionnellement, elles sont équivalentes. Ceci explique les hésitations qu’on a à interpréter le sens des mots complexes ; ainsi, comme le disent Bosredon & Tamba (1991), si le sens est relativement motivé dans verre à pied, « qui a un pied », il n’est pas toujours facile à reconnaître dans poste à essence, « qui délivre, qui fournit, qui a » (cf. Anscombre, 1990 pour plus d’exemples.). Plusieurs arguments prouvent que ces prépositions ne sont pas porteuses de sens. Tout d’abord, en cas de troncation, la préposition disparaît, alors qu’elle est maintenue si elle est référentielle : ainsi, Bosredon & Tamba (1991) opposent mes chaussures à talons, qui devient mes talons, à téléphone sans fil, dont téléphone peut être supprimé, avec maintien de la préposition ; de même dans les sigles la préposition vectorielle disparaît : HLM, alors que la préposition référentielle est maintenue, comme dans TSF, avec le S de sans. De plus, on a souvent noté les hésitations à employer l’une ou l’autre des prépositions : 106
  • 12. Le statut de la préposition dans les mots composés [18] Papier de/à musique, instrument de/à musique, épingle à/de nourrice L’idée que ces prépositions n’ont pas véritablement de contenu est soutenue par le fait qu’elles semblent pouvoir être supprimées sans que cela nuise à l’interprétation du mot composé. Ainsi, on trouve à côté des synapsies sous (19), des mots composés du type [20] : [19] stylo à plume, stylo à feutre, stylo à bille, robe à fleurs, sac de poubelle, sac à dos [20] stylo-plume, stylo-feutre, stylo-bille, robe-fleurs, sac-poubelle, étui- sac Ceci est aussi noté par Goosse (1975), qui signale que le complément de nom tend à se passer de préposition. Il oppose coin-couture à coin-bureau et coin-jardin, synthèmes formés de façon plus classique, selon lui. Ces arguments nous font opter pour une structure du type (21), dans laquelle le constituant de droite, que nous considérons comme un complément modifiant, occupe la position de complément, suivant Larson (1988). La préposition est insérée, comme dans les déverbaux de la section Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université précédente, pour légitimer le complément, en fonction de la relation à Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université exprimer, mais n’a pas de véritable contenu référentiel. [21] InflP Infl NP N PP P N e pomm-/verr-de/à terre/pied Les mots du type [20] semblent constituer des contre-exemples à l’hypothèse avancée, vu le manque de préposition. Il n’en est rien cependant : ces mots présentent la structure d’adjonction donnée sous [6]. Contrairement à Goosse (1975), nous ne faisons pas de différence entre les nouvelles créations, comme sac-poubelle, et ce qu’il appelle les synthèmes formés de façon plus classique. Le français dispose donc des deux possibilités pour unir deux noms dans un composé : soit par la complémentation, avec emploi obligatoire d’une préposition, soit par adjonction d’un modificateur, avec une tendance actuelle à préférer cette solution. Ceci explique pourquoi on ne peut trouver, à côté de mots tels que machine à laver des mots comme *machine laver, le verbe fléchi ne pouvant s’employer comme adjoint. La solution possible est lave-linge, qui présente une structure identique à celle de coupe-pluie (cf. [3] et [13]). 107
  • 13. Brigitte KAMPERS -MANHE 5. Conclusion Nous avons montré dans cette contribution que la préposition que l’on trouve dans les synapsies n’a pas de statut référentiel, qu’elle ne sert qu’à légitimer le complément d’un verbe dont la catégorie n’est plus visible par suite de son incorporation à un suffixe dérivationnel, ou d’un substantif, dont les traits catégoriels ne permettent pas de légitimer le complément. Nous avons également souligné que l’absence de préposition entre deux substantifs ne contredit pas cette hypothèse puisque dans ce cas on a affaire à une structure d’adjonction, dans laquelle le constituant de droite est un modificateur, selon la régularité de la composition dans les langues romanes. Nous avons ainsi pu rendre compte de la structure de ces mots composés et de la différence de statut entre les prépositions dites référentielles et les prépositions dites incolores dans la mesure où les premières ont un statut lexical, les secondes uniquement la fonction de légitimer le complément. RÉFÉRENCES Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université ANSCOMBRE J.C., 1990, « Pourquoi un moulin à vent n’est pas un ventilateur », Langue française, 86, p. 103-125. B ENVENISTE E., 1974, Problèmes de linguistique générale II, Paris, Gallimard. B ARTNING I., 1993, « La préposition de, essai d’approche cognitive », Lexique, 11, p. 163-191. B OK-BENNEMA R. et B. KAMPERS-MANHE, 2000, Romance Compounding and the Theory of Morphology, manuscrit. B OSREDON B. et I. TAMBA , 1991, « Verre à pied et moule à gaufres, préposition et noms composés de sous-classe », Langue française, 91, p. 40-57. C ADIOT P., 1989, « La préposition : interprétation par codage et interprétation par inférence », Cahiers de Grammaire, 14, Université de Toulouse-Le Mirail, p. 25-50. CADIOT P., 1991, « À la hache ou avec la hache ? Représentation mentale, expérience située et donation du référent », Langue française, 91, p. 7-23. C ADIOT P., 1993, « À entre deux noms : vers la composition nominale », in A.-M. BERTHONNEAU et P. CADIOT Lexique, 11 : Les prépositions : méthodes d’analyse, p. 193- 240. C HOMSKY N., The Minimalist Program, Cambridge, MIT Press. GOOSSE A., 1975, La néologie française aujourd’hui, Paris, Conseil national de la langue française. KAMPERS-MANHE B., 2000, « La composition en français et en néerlandais », Leuvense Bijdragen, 89, Leuven, p. 157-172. KAYNE R., 1995, The Antisymmetry of Syntax, Cambridge, MIT Press. LARSON R., 1988, « On the Double Object construction », Linguistic Inquiry, 19, p. 335-391. 108
  • 14. Le statut de la préposition dans les mots composés ROHRER C., 1977, Die Wortzusammensetzung im modernen Französisch, Tübingen, TBL Verlag Gunter Narr. ZWANENBURG Z., 1990, « Argument structure in Derivation and Compounding », Recherches de linguistique française et romane d’Utrecht, 9, p. 37-42. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 86.70.44.244 - 11/10/2011 21h28. © De Boeck Université 109