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Innover
Informer
Investir
Avril 2014
2
KAMITIS est une société spécialisée en expertise scientifique, en
veille stratégique et technologique et en financement de
l’innovation.
Elle opère principalement auprès des entreprises innovantes mais
également auprès des structures institutionnelles.
KAMITIS réalise pour ses clients des états de l’art technologique,
des études de marchés et des analyses technico-économiques.
Elle les aide également à identifier et à obtenir les meilleurs
financements pour leurs projets.
Lyon
6 Place Bellecour
69002
Pour plus d'informations :
contact@kamitis.com - www.kamitis.com
3
Éditorial
Une vie quantifiée
Expertise scientifique
Une guerre du virtuel bien réelle
De l’énergie sans fil
Financement
Le crowdfunding
Intelligence économique
L’Internet of Everything
Le Royaume Uni se lance dans le développement de standards pour les smart
cities
Focus
CityLab@Inria: An Inria Lab on Smart Cities fostering Environmental and Social
Sustainability
– par VALERIE ISSARNY
Le positionnement du CEA-LETI sur l’internet des objets
– par JEAN-MICHEL GOIRAN
I3
Ingénierie du virtuel : de la conception à l’application
– par SIMON RICHIR
L’information comme nouveau matériau pour le design de produits
– par PIERRICK THEBAULT
Objectif : Villes intelligentes
– par VALERIE ISSARNY
Technologies de la communication : nouvelle donne anthropologique
– par FRANCIS JAUREGUIBERRY
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Sommaire
4
Une vie quantifiée
Ce numéro aborde le monde des objets et des lieux augmentés. Autrement dit, le secteur des objets connectés et des villes
intelligentes dont le développement se fait grâce au croisement et au traitement des données récoltées partout sur le
terrain. Des "smart cities" ou "senseable cities", capables de percevoir et de penser, seront conçues pour rendre la vie plus
aisée, plus saine et plus productive. Leur déploiement prochain n’est plus un élément de l’horizon imaginaire mais bien de
celui des possibles. La question n’est donc plus de savoir dans quelle mesure ces concepts fondés sur les innovations
technologiques sont réalisables mais plutôt d’anticiper leur mise en œuvre dans nos villes.
Nos experts nous invitent aujourd’hui à un voyage au cœur d’une réalité améliorée et augmentée. Un monde connecté où
tout peut être quantifié et qualifié.
JEAN-MICHEL GOIRAN, LETI/DIR Corporate Business Development IoT, nous explique le positionnement du CEA sur
l’internet des objets ;
PIERRICK THEBAULT, chercheur au MIT (Massachusetts Institute of Technology) et spécialiste de l’informatique ubiquitaire
et de l’internet des objets, nous présente ses recherches concernant les objets et les villes du futur ;
VALERIE ISSARNY, directrice de recherche à l’Inria Paris-Roquencourt, nous décrit les efforts entrepris pour la conception et
le développement de la ville intelligente ;
SIMON RICHIR, Professeur aux Arts et Métiers ParisTech d'Angers-Laval et directeur scientifique de Laval Virtual, nous parle
de la réalité augmentée et des perspective d’un futur en relief ;
Enfin, FRANCIS JAUREGUIBERRY, Directeur du laboratoire SET (Société Environnement Territoire), nous propose une
lecture fine et nuancée des nouveaux usages que nous faisons des technologies de la communication et de la connexion. Il
nous invite à réfléchir sur les interactions à distances et la réciprocité dans la communication à travers des objets, outils ou
dispositifs techniques innovants.
Bonne lecture,
Une vie quantifiée, est-ce encore de la science-fiction ?
Pas vraiment. Nous sommes aujourd’hui entourés d’objets permettant de suivre très
précisément nos mouvements, nos interactions ainsi que nos paramètres vitaux. Ces
objets peuvent délivrer un diagnostic complet concernant notre forme, notre état de
santé, mais ils sont aussi capables de communiquer sur l’état de l’environnement
dans lequel nous évoluons. Une vie « augmentée » grâce à des capteurs et des
dispositifs intelligents disséminés un peu partout sur nous, dans nos maisons et au
cœur de nos cités. Toutes les données qui sont recueillies, analysées et partagées
sont une aubaine pour l’économie numérique et leur exploitation constitue une
nouvelle ressource pour de nouveaux modèles d’affaires.
Par Khaled Baaziz
Dirigeant de Kamitis
Éditorial
5
Une guerre du virtuel bien réelle
Voilà une actualité bien mouvementée dans l’industrie de la réalité virtuelle. L’annonce de Facebook qui vient
d’acquérir l’Oculus Rift pendant que Sony se positionne comme acteur majeur avec le projet Morpheus a fait
sensation.
Oculus Rift est un casque qui permet, grâce à des
capteurs combinés à deux écrans haute définition pour
chaque œil, une immersion dans un monde 100%
virtuel. Pour Mark Zuckerberg, l'Oculus Rift va "changer
la manière dont nous travaillons, jouons et
communiquons".
De son coté, Sony a dévoilé sa dernière innovation à
l’occasion de la dernière Game Developer Conference.
Fruit d’un travail de trois ans, le Project Morpheus est un
casque virtuel, peu encombrant, développé pour
Playstation 4. Morpheus, qui n’est encore qu’un
prototype se porte comme une paire de lunettes. Equipé
de plusieurs capteurs, il détecte et reproduit les
mouvements de la tête et de la position de l’utilisateur.
Avec une résolution d’écran de 1080p, un angle de vision
de 90 ° et un système audio qui augmente le réalisme
de l'expérience, Morpheus promet une belle expérience
d’immersion dans la réalité virtuelle. "La réalité virtuelle
est la prochaine innovation de PlayStation qui pourrait
révolutionner l'avenir des consoles" a déclaré Yoshida le
grand patron de Sony Computer Entertainment.
Considérée auparavant comme une niche pour les
passionnés de jeux vidéo, la réalité virtuelle pourrait
bien finir par s'imposer à travers ces produits innovants
qui lui donnent de la crédibilité.
De l’énergie sans fil
WiTricity pour Wireless Electricity est une entreprise américaine qui a mis au point un système de transmission de
l’électrique sans fil.
Le concept repose sur le postulat suivant : un champ
électrique oscillant produit un champ magnétique et un
champ magnétique oscillant produit un champ
électrique. Ainsi, en faisant passer un courant électrique
dans une bobine de cuivre, un champ magnétique est
généré autour de la bobine qui l’envoie dans toutes les
directions. En disposant une autre bobine réceptrice a
proximité de la première (émettrice) et sous l’action du
champ magnétique « reçu », suivant le second principe :
un champ électrique est alors produit. Ce principe
datant de 200 ans, a été optimisé par les chercheurs de
WiTricity pour atteindre une portée de plusieurs mètres.
La prochaine étape est l’intégration de cette
technologie aux appareils électriques du quotidien afin
de les rendre sans fil. Dans la même optique, des
chercheurs de l’Université Duke mènent des recherches
sur la récupération d’énergie à partir des radiations qui
nous entourent. Une énergie sans fil et gratuite. À voir !
Expertise scientifique
http://www.witricity.com/pages/application.html
http://abcnews.go.com/Technology/sony-reveals-virtual-reality-headset-project-
morpheus/story?id=22970107
6
Financement
Le crowdfunding
Un enjeu pour les entreprises
Dans le contexte de crise économique actuelle et face à l’insuffisance de financement bancaire et d’investisseurs privés,
notamment lors des phases d’amorçage des projets, les entrepreneurs et les dirigeants de TPE et PME se tournent de plus
en plus vers le crowdfunding.
Le crowdfunding constitue donc plus particulièrement une alternative possible aux capitaux familiaux, aux incubateurs et
aux fonds d’amorçage. C’est un accès à des fonds facilité par la faiblesse des montants demandés aux investisseurs,
contributeurs ou prêteurs.
Par ailleurs, ces derniers peuvent représenter un échantillon potentiel des futurs clients ou consommateurs du rendu final.
Ainsi, ils permettent de vérifier la portée des projets et leur acceptabilité et peuvent donc prévenir les possibles « flops »
technologiques.
Par ALISSA KACEM
Chargée de veille stratégique et
d’intelligence économique - Kamitis
Le crowdfunding, aussi appelé finance participative, est un mode de financement
désintermédié, né aux Etats-Unis dans les années 2000. A ses balbutiements en
France, il est considéré comme une alternative efficace quand les investisseurs
dits « classiques » (banques et capital investissement) ne veulent pas s’engager
dans un projet.
Ainsi, le crowdfunding permet de mettre en relation sur une plateforme en ligne
des entrepreneurs ou des start-ups et des investisseurs particuliers, les
internautes.
Auparavant centré sur le financement de projets artistiques et caritatifs, de plus en
plus de plateformes dédiées au numérique, à l’environnement ou aux
biotechnologies et à la santé apparaissent.
Différents modèles de financement participatifs existent : le financement par le
don (avec ou sans contrepartie), le financement par le prêt et le financement par
l’investissement.
Le McMillan gap
Les difficultés en matière de financement et de fonds
propres s’expliquent par le « gap » financier entre les
entreprises et les investisseurs ou banquiers. En effet,
l’asymétrie d’informations peut engendrer des coûts de
transactions importants. Ainsi, les dirigeants masquent
(sciemment ou non) certaines informations sur
l’entreprise et les banquiers ne connaissent pas
totalement le potentiel et la situation réelle de
l’entreprise (stratégie, structure, équipe…). Les
investisseurs et banquiers pour plus de garanties se
tournent donc plus facilement vers les grandes
entreprises ou les sociétés cotées : ce qui marginalise les
start-ups et les PME innovantes.
La théorie de la hiérarchie des
investissements de Myers
Dans un premier temps, afin de se financer, les
entreprises ont généralement recours à
l’autofinancement : on parle alors de gestion en
« bon père de famille ». Ensuite, elles
développeront des dettes à moyen et long
terme et ce n’est qu’en dernier ressort qu’elles
ouvriront leur capital et émettront des actions
en bourse.
Ainsi, face à la baisse de la capacité d’emprunt,
trouver des fonds, tout en gardant son
indépendance devient problématique.
7
Que va changer le nouveau cadre réglementaire ?
Du fait de l’expansion récente de la finance participative,
ses activités sont encore soumises aux réglementations
qui régissent les opérations bancaires et les services
d’investissement classiques. Or, ces réglementations
sont jugées trop rigides pour assurer une bonne
fluidification des échanges.
La simplification des démarches de financement
participatif, entreprise en 2013 par le gouvernement,
devrait entrer en vigueur en Juillet 2014 et s’articule
autour de deux grandes mesures.
La première, en lien avec le prêt participatif, instaure la
création du statut d’« Intermédiaire en Financement
Participatif », permettant de contourner le monopole
bancaire en matière de crédit, en autorisant les prêts
participatifs aux entreprises. Le prêt, pouvant aller
jusqu’à un million d’euros, se constituera de blocs de
1000 euros maximum. Par ailleurs, certaines obligations,
notamment publicitaires, seront allégées et la demande
d’agrément simplifiée.
La seconde mesure concerne le financement par
investissement et consiste en l’acquisition du statut de
« Conseiller en Financement participatif » pour les
plateformes. Ces dernières donneront également aux
internautes la possibilité d’investir dans une SAS et
seule une information simplifiée sera donnée pour les
projets financés pour un montant inférieur à 1 million
d’euros.
La loi prévoit d’assurer, dans tous les cas de figure, une
transparence sur les frais, les risques encourus et les
taux de défaillance des projets. De plus les plateformes
n’auront pas l’obligation de détenir un montant en fonds
propres minimum.
Le crowdfunding français en quelques chiffres
13%
61%
26%
Fonds propres
Prêts
Dons
78,3 millions : c’est la somme
récoltée en France par le
crowdfunding en 2013 (3 fois plus
qu’en 2012). La part du financement
participatif dans le capital-
investissement est aujourd’hui de 1%
environ. Le prêt participatif, qui est le
plus avancé dans son développement,
est l’activité qui collecte la majorité
(61%) des sommes (voir figure 1).
Figure 1 : la répartition des fonds collectés selon la nature de la plate-forme
330966 : c’est le nombre de
contributeurs en 2013,
sachant que depuis les
débuts du crowdfunding en
2006, ce nombre s’élève à
651000. 95% des
contributeurs utilisent les
plateformes de dons, qui sont
les plus anciennes et les plus
populaires.
Le crowdfunding en fonds
propres est la forme de
financement participatif qui
croît le plus vite. Mais, il est
aussi considéré comme étant
le plus élitiste : en 2013, le
ticket moyen d’entrée était de
3769 euros, contre 3471 euros
pour le prêt et 64 euros pour
un don.
8
Les fonds collectés par les acteurs du Crowdfunding en 2012 (en M$)
Source : Massolution © (2013). Tous droits réservés. Reproduction interdite.
La finance participative et les objets connectés
Voilà ci-dessous quelques exemples d’objets connectés financés par des plateformes de crowdfunding
La Pebble Watch : la première montre connectée.
Plateforme : Kickstarter (dons)
Fonds collectés : 7,5 millions euros (financé à 10267%)
Et ensuite ? : sortie de la Pebble Steel en 2014.
L’Occulus Rift : masque d’immersion dans un jeu vidéo.
Plateforme : Kickstarter
Fonds collectés : 2,4 millions d’euros
Et ensuite ? : Disponibilité de la version pour les
consommateurs en 2014/2015.
Ti’be : porte-clé bluetooth basse consommation.
Plateforme : Kisskissbankbank (dons)
Objectif en cours: 25000 euros (financé à 124%)
Myfeelback : solutions d'acquisition et de traitement de
données de clients contextualisées.
Plateforme : Wiseed (plateforme d’investissement)
9
Intelligence économique
L’Internet of Everything
A la croisée des chemins de la mobilité, du cloud et de la virtualisation, il est des sujets stratégiques pour lesquels
quand on a la force de frappe nécessaire, il vaut mieux être suivi que suivant ! C’est ainsi que depuis quelque temps
on voit des acteurs se positionner et des alliances se sceller autour de "l’Internet of Everything".
D’après le géant américain Cisco, "l’Internet of
Everything" représentera, dans la prochaine décennie,
un enjeu économique de 19 trillions de dollars pour les
différents secteurs d'activité en termes de technologie
et de services. Cette nouvelle évolution, dont les
moteurs de croissance sont les nouvelles technologies
de l’information (cloud computing, l’informatique
ubiquitaire, big data, …), permet aujourd’hui d’envisager
le déploiement à grande échelle de "l’Internet of
Everything".
En effet, le 24 Mars 2014, Cisco Systems a annoncé la
création du “the world’s largest global Intercloud” [1] :
un investissement d’un milliard de dollars et une
collaboration avec un certain nombre de partenaires qui
vise à réfléchir sur les problématiques liées aux nouvelles
économies des données. Pour ce nouveau projet, Cisco
qui propose des architectures et des solutions
concernant notamment les thématiques de la mobilité,
de « l’Internet of Everything », du Cloud et de la
virtualisation s’associe entre autre avec le fournisseur de
services australien Telstra, le canadien Allstream,
fournisseur de solutions de communications, ou encore
Canopy spécialisé dans le cloud-computing. Ce
positionnement inédit traduit également le besoin de
Cisco de contrer la stratégie de certains fournisseurs de
cloud qui offrent des services d'entreprise tel
qu’Amazon.
Le 27 Mars 2014, on apprenait également [2] la
formation du Consortium de l'Internet industriel (IIC).
Constitué de Cisco, AT & T, GE, IBM, ce consortium a
pour objectif de faciliter l'accès aux données
volumineuses par une meilleure intégration du monde
physique et du monde numérique. Les applications sont
nombreuses et touchent des domaines stratégiques tels
que la santé, la sécurité des données, les villes
intelligentes, le transport et les réseaux électriques.
Tous les spécialistes s’accordent à dire qu'il est
nécessaire d'établir des cadres communs et des normes
pour l'Internet du futur, et beaucoup d’acteurs
(américains) comptent aujourd’hui sur le CII pour le
faire. Le marché immense de l’internet du futur sera-t-il
dicté par une poignée d’entreprises américaines au
détriment des européens inévitablement à la traine ?
Le Royaume Uni se lance dans le développement de standards pour les smart cities
Depuis le 05 mars dernier, le Royaume-Uni est le premier pays à avoir développé des standards pour accompagner
les villes dans leur transition vers les smart-cities.
La BSI (British Standards Institution) s’est chargée de
proposer un cadre pour le déploiement des smart cities
en UK. A travers de nouvelles spécifications concernant
un langage commun pour les smart cities et visant à
stimuler la croissance dans ce secteur émergent, ces
mesures étaient vitales. En effet, au Royaume Unis, 8
personnes sur 10 vivent dans les villes. Les structures
citadines évoluant de manière de plus en plus
complexes, les mesures visent à les standardiser,
notamment en ce qui concerne l’utilisation et le partage
de données et de ressources est basé sur un vocabulaire
commun. Parler un même langage permet aux
développeurs, designers, fabricants et utilisateurs de
collaborer plus efficacement.
La standardisation mise en place doit aider les acteurs
du secteur à se développer et accompagner leur
stratégie «ville intelligente» pour se concentrer sur la
valeur de la technologie et des données associées à des
changements organisationnels.
10
Focus :
CityLab@Inria: An Inria Lab on Smart Cities fostering Environmental and Social
Sustainability
An ICT Lab on Smarter Cities Emphasizing Social Sustainability
From the more technical, ICT perspective, smart cities
are fascinating systems of systems whose component
systems and their integration greatly challenge current
ICT due to the key characteristics of connected cities
and especially their scale. Moreover, the vision of what
smart cities should be about is evolving at a fast pace in
close concert with the latest technology trends. It is
notably worth highlighting how mobile and social
Internet use have reignited citizen engagement, thereby
opening new perspectives for smart cities beyond data
analytics that have been initially one of the core foci for
smart cities technologies. Similarly, open data programs
foster the engagement of citizens in the process of
government and overall contribute to make our cities
more sustainable.
However, while environmental and economical
sustainability have been on the ICT research agenda for
some time, there is another, equally important, form of
sustainability that has so far been overlooked for smart
cities, that is, social sustainability. Indeed, cities are first
and foremost places for people, and thus building
cohesive, inclusive and flourishing communities should
be at the forefront of our research agenda. Without the
right social infrastructure in place, problems of isolation,
mental health, anti-social behaviors and crime are more
likely to arise, spiraling communities into decline.
In the above context, the Inria Project Lab
CityLab@Inria will study ICT solutions toward smart
cities that promote both social and environmental
sustainability. A strong emphasis of the Lab is on the
undertaking of a multi-disciplinary research program
through the integration of relevant scientific and
technology studies, from sensing up to analytics and
advanced applications, so as to actually enact the
foreseen smart city Systems of Systems. Obviously,
running experiments is a central concern of the Lab, so
that we are able to confront proposed approaches to
actual settings.
CityLab@Inria specifically brings together Inria project-
teams in the areas of networking (FUN and URBANET),
distributed software systems (ARLES-MiMove and
MYRIADS), data management (DICE, OAK and SMIS),
and data analytics (CLIME and WILLOW).
The world is in the midst of an immense population shift from rural to
urban areas, which has led governments, businesses and community to
rely on technologies, and in particular the Information and
Communication Technology (ICT), to overcome the challenges posed
by rapid urbanization. As a result, various academic, industrial but also
city-led ICT initiatives have been launched in the recent years in order
to build “smart urban infrastructures”, where detailed information
about the functioning of the city becomes available to both city
dwellers and businesses, thereby enabling better understanding and
consequently management of the city’s infrastructure and resources.
Dr VALERIE ISSARNY
Directrice de recherche au centre de
recherche Inria Paris-Rocquencourt.
Contact : valerie.issarny@inria.fr
11
Research Themes & Challenges
According to the above, the objective of CityLab@Inria is the study of ICT-based smart city systems from supporting
“sensing” systems up to advanced data analytics and new services for the citizens that promote social and environmental
sustainability. Toward that goal, the Lab investigates the following research questions:
 How to effectively sustain urban-scale sensing
that needs to combine both physical and social
sensing while accounting for the requirements
associated with the target network that include:
scalability, energy-efficiency and privacy
preservation? The sensing of the city pulse also
challenges the supporting data management,
which must scale-up as well as integrate highly
heterogeneous data of various qualities. The
literature is rich with papers addressing these
concerns individually. However, these are seldom
tackled together, especially while simultaneously
considering the urban scale. Our approach to
overcome these challenges lies in the study of
scalable protocols from the networking up to the
middleware layers, together with advanced
techniques for privacy enhancement and
semantic-aware data management.
 How to aggregate the data so as to understand
but also anticipate and even influence the
evolution of the city? Data analytics is at the core
of smart cities so that the “big data” that is made
available to us by way of sensing but also based on
the open data trend can indeed become useful
knowledge about the cities. Data analytics for
smart cities is a very active area of research.
However, numerous open problems remain
among which large-scale data analysis and
overcoming the uncertainty associated with
urban-scale, crowd-sourced data collection. Our
contribution in this area leverages advanced
research results on data assimilation and machine
learning.
 While city-scale sensing and data analytics are two
complementary aspects of smart city systems,
they are also inter-related as one may adequately
inform the design of the other. It is then essential
to design crosscutting architectures for smart city
systems based on the comprehensive integration
of the custom data sensing and analytics that we
will investigate.
 Last but not least, the smart city vision will come
true only if it comes along with concrete urban
services that do make our (future) cities
sustainable and agile. A number of application
areas have been put forth for a while, and include:
smart energy, smart health, smart transportation,
etc. However, we are still lacking disruptive
services that will indeed contribute to making our
cities better places to live while addressing the
central challenge of growth. One important
question is how to impact upon city governance
using city-scale sensing, and especially its social
dimension? Our research will be guided by the
study of new urban services, which will be
undertaken in close collaboration with external
partners and especially city representatives as well
as researchers from the social science field.
While the scientific focus of CityLab@Inria is broad, the Lab’s research leverages relevant effort within Inria project-teams
that is further revisited as well as integrated to meet the challenges of smart cities. In addition, CityLab@Inria research
builds upon collaborative effort at the International level, and especially collaboration in the context of the
Inria@SiliconValley program.
An International Lab
A key characteristic of the CityLab@Inria Lab is its
international dimension, which originated with the
Paris-San Francisco cooperation agreement toward
smarter cities
1
. This agreement, signed on March 20,
2013, is dedicated to developing smarter cities and
includes support for targeted research programs among
which is the Joint Inria-CITRIS CityLabs Program.
More specifically, researchers from Inria and CITRIS
(Center for Information Technology Research in the
Interest of Society, University of California) have had an
ongoing relationship for collaborative research projects
since 2010, in close relation with the Inria@SiliconValley
program. In 2013, Inria and CITRIS signed an agreement
regarding the CityLabs partnership in which they aim to
undertake cutting-edge research in the domain of
“smart cities” with a focus on gathering, analyzing, and
visualizing complex urban data.
12
In particular, the CITRIS initiative on “Data and
Democracy”
2
is directly related to the CityLab@Inria
goal of promoting social sustainability. This is for
instance illustrated by the connection established
between CityLab@Inria and the CITRIS Social Apps
Lab
3
, and especially ongoing collaboration toward the
development of the AppCivist platform for large-scale
public deliberation and civic action
4
. Similarly, strong
relations have been established with the newly created
Smart City Center at UC Berkeley, which is led by Prof.
Pozdnukhov
5
. Beyond the “Data and Democracy”
initiative, other CITRIS initiatives are of direct relevance
to the theme of “Environmental sustainability”,
especially through the development of advanced
sensors. In addition to the above, Californian cities are
strongly engaged in the open data and smart city
trends
6
, thereby opening up venues for experimenting
with the technologies emerging from CityLab@Inria’s
research at the city scale.
Last but not least, the strong focus of CITRIS and Inria
on Innovation together with the open innovation trend
are expected to favor the creation of innovation out of
the undertaken research in smart cities. This is further
supported by the accord that was signed in February
2014, between Inria, CITRIS and PRIME
7
.
References:
1
http://www.consulfrancesanfrancisco.org/spip.php?article2822
2
http://democracy.citris-uc.org/
3
http://socialappslab.com/about/
4
http://socialappslab.com/?s=appcivist
5
http://www.its.berkeley.edu/btl/2013/fall/alexey
6
http://www.youtube.com/watch?v=_SL5kdVpT4Q&feature=youtu.be
7
http://citris-uc.org/news/2014/02/18/citris_inria_and_prime_sign_accord_smart_cities_research_and_open_innovation
13
Le positionnement du CEA-LETI sur l’internet des objets
L’Internet des Objets : une nouvelle révolution industrielle qui nous attend ?
L’histoire ne se répète pas, mais elle bégaye souvent…
Il s'agit bien d'une nouvelle révolution industrielle qui
s’ouvre à nous, semblable à la révolution de l'internet
des années 1990.
C’est la cristallisation à la fois de technologies clés
(processeurs PC, processeurs graphiques, modems), de
nouveaux standards (HTML, POP, …), et d’infrastructure
(téléphone et réseau) qui a permis cette décennie de
croissance, de nouveaux services, de gains de
productivité.
La même cristallisation est en train de se produire en ce
moment pour l’internet des objets, avec des
infrastructures (des passerelles internet dans chaque
maison, le cloud, une base installée de smartphones),
des standards (autour du M2M, le RFiD, des protocoles
radio short et long range), et des technologies.
Comme pour la précédente révolution, on s’attend à de
nouveaux gains de productivité, de nouveaux services,
et surtout de nouveaux business modèles qui s’ouvriront
aux entreprises qui l'adopteront.
Crédit photo : © iStockphoto & J. Gallon
Nous définissons généralement l'IoT comme l'ensemble des technologies
permettant de connecter un ensemble d’appareils du plus simple au
plus sophistiqué. Ces composants IoT ont la capacité de capturer un
nombre croissant d'éléments de leur contexte environnemental :
température, qualité de l'Air, mouvement, présence... et aussi du
contexte des utilisateurs : préférences, intentions, statistiques...
Au-delà des avantages attendus en termes de performance ou
d'optimisation des processus, l'IoT démocratise la façon dont les
utilisateurs interagissent avec l'information, en temps réel et de manière
contextuelle. Cette intégration efficace de l'information dans les
processus existants, des usages professionnels jusqu’aux tâches
quotidiennes des citoyens, dispose d’un immense potentiel pour rendre
notre quotidien plus intelligent.JEAN-MICHEL GOIRAN
LETI/DIR Corporate Business Development IoT
14
Quels marchés adopteront l’IoT le plus vite ?
Tous les segments de marché sont concernés, mais les
premiers bénéfices de l’IoT sont attendus dans le
marché de la ville intelligente (les réseaux intelligents, le
télé-relevé, les parkings intelligents…), de la sécurité
(sécurité environnementale, des biens et des
personnes), de la santé (notamment pour le traitement
au domicile de pathologies chroniques, mais aussi avec
tous les nouveaux produits de surveillance d’activité ou
de paramètres physiologiques), sans oublier l’usine du
futur, où les technologies issues de l’IoT pourraient
apporter de nouveaux gains de productivité.
Quels sont les défis technologiques que le CEA-Leti pourrait aider à relever.
En tant que fournisseur global de technologies pour la
microélectronique, les nanotechnologies et les
technologies de l’information, le CEA-Leti peut fournir
aux OEM, aux intégrateurs des avantages compétitifs
forts pour créer des produits ou des processus plus sûrs,
plus intelligents, plus efficaces et plus connectés.
Le CEA-Leti se concentre sur les innovations et les
ruptures technologiques dans les domaines suivants :
- Les technologies pour l’électronique et les
communications RF ultra-basse consommation qui
permettront d’envisager des objets autonomes,
puissants et communicants.
- Les technologies de récupération d’énergie (en lien
avec l’institut CEA-Liten) comme les systèmes
photovoltaïques, par vibration, par thermo-
électricité, ou par systèmes piézo-électriques qui
permettront d’assurer l’indépendance et
l’intégration des objets
- Une très large offre de capteurs qui étendront les
capacités de détection et les usages des objets
communicants:
o Offre MEMS et NEMS : faible consommation
et capacité d’intégration
o Gamme complète d’Imageurs : IR, Visible,
THz, X, Gamma
o Large gamme de capteurs chimiques
o Solutions microfluidiques
o Solutions de monitoring de structure.
- Les technologies d’intégration comme les
antennes miniatures, l’intégration 3D, l’électronique
sur substrats flexibles,
- Les technologies de connectivité qui permettront
d’étendre les usages et d’intégrer ces objets avec ce
nouveau «nuage » d’objets et de services : systèmes
d’intégration de réseaux hétérogènes, protocoles
sécurisés, fusion de données, algorithmes prédictifs,
intégration avec les solutions BigData ou OpenData.
Quel est le positionnement du LETI ?
Grâce à ces solutions techniques, à son écosystème
unique, et à son expérience dans des domaines
d’applications extrêmement variés allant du spatial à
l’électronique grand public, en passant par l’agriculture
ou la santé, le CEA-Leti a pour vocation d’accompagner
ses partenaires et clients pour l’intégration de ces
technologies de ruptures. Il apportera également une
vision globale des évolutions technologiques qui seront
nécessaires pour tirer le meilleur parti de cette
révolution de l’internet des objets.
Enfin, le CEA-LETI organise sa revue annuelle
technologique des 25 et 26 Juin prochains à travers le
prisme de l’internet des objets, des capteurs au zéro-
power. Cet événement est l’opportunité d’écouter des
spécialistes des technologies, des analystes, des
industriels qui viendront présenter leur vision de ce
nouveau marché et des ruptures technologiques
attendues.
Réservez votre visite sur http://www.letidays.com/2014/
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ce sont trois interrogations pour échanger avec un expert sur l'environnement de
l'entreprise.
Nous nous intéressons dans ce numéro au monde des technologies relatives aux objets augmentés et aux "smart
cities". Des technologies qui permettent aujourd’hui à chacun d’entre nous d’expérimenter des espaces sans distances
et des temps sans délais.
Classé dans « les 100 du Numérique » par le magazine l’Usine Nouvelle en avril 2012, Simon Richir est Professeur
aux Arts et Métiers ParisTech (Ensam) et chef de rubrique réalité virtuelle pour les Techniques de l'Ingénieur. Co-
fondateur et directeur scientifique de Laval Virtual, il dirige l’équipe de recherche « Presence & innovation » et le
Master « Ingénierie du Virtuel et de l’Innovation ». Ses domaines d'enseignement et de recherche sont l’innovation
technologique, les processus de conception de produits, la conduite de projets innovants et les nouveaux usages des
nouvelles technologies comme la Réalité Virtuelle, la Réalité Augmentée, la Fabrication Additive (3D Printing).
Kamitis : Pouvez-vous nous parler de vos travaux de recherche et les applications visées?
S. RICHIR : Mes travaux de recherches concernent
l’ingénierie du virtuel et les méthodes de conception des
systèmes de réalité virtuelle et augmentée. En 1999, j’ai
eu l’opportunité de participer à la création de LAVAL
VIRTUAL : un concept proposé à François d'Aubert
(Député-Maire, Ministre de la Recherche) par le
Professeur Bernard Taravel, co-fondateur du
Futuroscope, et moi-même. Laval Virtual a eu très vite
un gros succès médiatique et populaire. Dans ce
concept, nous avons impliqué le grand public et c’était
en fait les prémices de ce que nous voyons maintenant
avec l’open innovation et les Living Lab.
C'est-à-dire que pour créer l’innovation, il faut essayer
d’impliquer l’utilisateur final le plus tôt possible dans le
processus. A Laval Virtual, nous accueillons beaucoup de
chercheurs étrangers, notamment des scientifiques
japonais de l’Université de Tokyo ou d’ailleurs qui
viennent faire tester au grand public des concepts et des
prototypes de produits (robots interactifs, écran sur
lequel on souffle, etc).
Ingénierie du virtuel : de la conception à l’application
Pr Simon RICHIR
Professeur aux Arts et Métiers ParisTech (Ensam)
Co-fondateur et directeur scientifique de Laval Virtual
" L’utilité, tout comme l’utilisabilité, l’accessibilité ou encore
l’acceptabilité sont des notions majeures dans la conception "
CONTACT: Simon.Richir@ensam.eu
http://www.laval.ensam.eu/actualites-recherche.html
http://www.laval-virtual.org/
http://3dliveproject.eu/wp/?lang=fr
Une année nous avons vu une application où on soufflait sur un écran. L’interaction homme-machine se faisait par le souffle, quelques années
après il y a eu la détection du souffle sur Nintendo DS.
L’étude des nouveaux usages se fait sur des prototypes. Ainsi nous avons accueilli par exemple au début des années 2000 un dispositif, formé
d’un ensemble de caméras face aux gens, qui capturait les mouvements puis on regardait si le « langage » des mouvements était facile à
comprendre par les utilisateurs. C’était bien avant que la Kinect ne soit lancée sur le marché.
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16
Le lien entre open innovation et technologies
émergentes est très important. Avec mon équipe, on
s’intéresse à comprendre comment une innovation, une
idée va naître et comment on arrive à l’amener jusqu’au
marché.
Nous nous intéressons plus spécifiquement aux
nouveaux usages et aux facteurs qui impactent
l’expérience utilisateur dans un environnement
immersif, en temps réel. Nous participons à ce sujet au
projet 3DLive. Ce projet vise à développer et
expérimenter une plateforme immersive de réalité
mixte permettant d’étudier la capacité des nouvelles
technologies de communication (e.g. mobile 4G) à
supporter le rendu en temps réel d’expériences
immersives. L’objectif principal de 3DLive consiste à
explorer les technologies 3D collaboratives dans des
environnements virtuels et réels pour permettre aux
utilisateurs de se sentir présents et d’interagir en temps
réel dans le cadre de pratiques sportives (ski, golf,
jogging). Nous cherchons à améliorer le partage d’une
expérience utilisateur et à aller plus loin qu’avec un
simple téléphone ! Demain, vous êtes sur le marathon
de New York, vous souhaitez partager cet instant avec
les gens qui sont restés en France, vous vous connectez
et ils auront l’impression de faire la course avec vous.
Donc là, nous brisons les premiers verrous surtout de
débit, de latence. Nous investiguons également le coté
social et l’impact de l’environnement virtuel sur les
interactions des individus. Est-ce que les relations
sociales améliorent la présence dans les
environnements virtuels ? Est-ce que le fait de partager
une expérience avec une autre personne à travers le
virtuel fera bénéficier cette personne d’une expérience
attrayante ? Voilà des interrogations auxquelles nous
cherchons à apporter des réponses.
Kamitis : Vous avez beaucoup investigué des notions comme l’utilité ou l’utilisabilité, quel est l’intérêt de ces études ?
S. RICHIR : Depuis plusieurs années, nous avons
remarqué que certains développeurs ou industriels
conçoivent des produits (des logiciels par exemple) et
viennent en tester les possibilités technologiques et
lever des verrous techniques notamment à Laval Virtual.
Bien souvent, ces solutions restent sans applications
industrielles concrètes, essentiellement parce qu’elles
n’ont pas été conçues dans un objectif de transposition
vers les entreprises. C’est la notion d’utilité qui a été
négligée !
Or l’utilité, tout comme l’utilisabilité, l’accessibilité ou
encore l’acceptabilité sont des notions majeures dans la
conception. Nous étudions les représentations des
notions d’"utilité" et de "besoin" chez les acteurs et
disciplines associées au domaine de la conception :
l’ingénierie, le design et l’ergonomie [1].
Pour cela, on s’appuie sur une équipe
pluridisciplinaire (informaticiens, designers, ergonomes,
psychologues,…) pour proposer une lecture fine et
nuancée de l’usage de ces technologies et réseaux. Ces
usages sont considérés comme des révélateurs de
nouveaux enjeux sociaux, économiques et politiques de
la société hypermoderne et connectée dans laquelle
nous sommes désormais entrés.
Kamitis : De quelle façon ces nouvelles technologies bouleverseront nos vies ?
S. RICHIR : Je pense aux générations de joueurs qui ont
l’habitude de naviguer dans des mondes 3D, et au fait
que sur Internet on évolue encore en 2D. Donc, quand
on va basculer en Web3D, il y aura un premier gap de
franchi. Le grand obstacle actuel, c’est la navigation
dans le web 3D avec ma souris. Comment intégrer des
images 3D interactives dans le web (les sites, les blogs,
…) ? Quelles solutions techniques pour que les pages
web (en 3D) soient supportées par un large éventail de
navigateurs ? Plusieurs solutions existent aujourd’hui sur
le marché, mais aucune ne s'est imposée : les
technologies, le matériel et les standards sont en
perpétuelle évolution dans ce domaine, et les choix ne
sont pas encore évidents.
Je vous laisse imaginer le stockage de fichiers sur un
écran en 3D : en profondeur comme si on rentrait dans
une bibliothèque et qu’on se baladait dans des nuages
de données ! Incomparable avec notre actuel affichage
2D avec les arborescences sur les fenêtres Windows ou
Mac (classement dans des dossiers, sous-dossiers, …).
La réalité virtuelle et augmentée est une fenêtre ouverte
sur le futur. Elle offre des perspectives immenses dans
différents domaines. Au service de l’urbanisme, elle
permet de simuler l’aménagement d’espaces et de
villes (voir l’encadré). A la croisée de l'informatique, des
sciences numériques et de la médecine, se positionne
l'imagerie médicale computationnelle. Cette dernière
offre, par exemple, de nouvelles capacités de
visualisation qui peuvent rendre le patient virtuellement
transparent (réalité augmentée) pour le guidage de
gestes complexes. Elle peut aussi faciliter
l’entrainement du praticien à travers la simulation de
gestes médicaux ou chirurgicaux (réalité virtuelle).
[1] Emilie Loup-Escande, "Vers une conception centrée sur l’utilité : Une analyse de la co-construction participative et continue des besoins dans le contexte
des technologies émergentes", Arts et Métiers ParisTech Angers, 2010.
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Les 16e Rencontres Internationales des Technologies et Usages du Virtuel se tiennent du 9 au 13 avril
2014 à Laval (Mayenne). Le salon a accueilli des professionnels, des scientifiques et des étudiants venus
présenter, tester et concrétiser leurs projets.
L’édition de cette année est marquée par la présentation de deux applications innovantes, entièrement
conçues par les chercheurs et étudiants des Arts et Métiers ParisTech (Ensam) : eLIV et AccesSim. Cette
dernière a été récompensée par l’attribution du Laval Virtual Award dans la catégorie « Transport et
Mobilité » jeudi 10 avril.
- La plateforme mobile AccesSim, un simulateur dynamique créé pour simuler l’aménagement
d’espaces adaptés à la mobilité des personnes handicapées. Très utile pour tout décideur en
urbanisme désireux d’inclure la présence d’équipements ad hoc à sa construction
d’infrastructures. Cette application permet de se mettre dans la peau d’une personne en
fauteuil roulant pour s’adapter à sa perception.
- L’application eLIV se présente comme une salle de réalité virtuelle d’un peu plus de 3 mètres
sur 3. Chaque mur est un écran géant, et chacun des sièges est équipé de capteurs déterminant
avec précision la position du spectateur. Les visiteurs auront le loisir d’expérimenter ce
dispositif interactif grâce au jeu nippon Hole in the wall, une alternative au fameux Tetris.
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Considérés comme la «troisième révolution de l'Internet», les objets augmentés vont bientôt s'imposer dans tous les
domaines de la vie quotidienne et de l'entreprise. Pierrick THEBAULT, chercheur au MIT (Massachusetts Institute of
Technology) et spécialiste de l’informatique ubiquitaire et de l’internet des objets, nous présente ses recherches
concernant les objets et les villes du futur.
Kamitis : Vous êtes spécialiste de l’informatique ubiquitaire et de l’internet des objets. Pouvez-vous nous présenter
vos travaux de recherche ?
P. THEBAULT : À l'intersection des sciences de la
conception, de l'informatique ubiquitaire et des
interactions homme-machine, mes travaux de
recherches, pendant ma thèse de doctorat [1], ont porté
sur l’étude de nouveaux types d'applications permettant
d'interopérer les services du World Wide Web avec les
produits du quotidien. Ces applications « orientées
produit », capables de représenter, contrôler ou de
compléter les fonctions d'artéfacts intégrant des
capacités de traitement de l'information, remettent en
cause les principes et conventions établies par les
métiers de la conception. Elles préfigurent en effet
l'émergence de produits, certes connectés à Internet,
mais dont l'offre fonctionnelle peut également être
améliorée et modifiée au cours du temps, après la
fabrication et la commercialisation des produits, de
manière à répondre aux besoins changeants des
utilisateurs. Avec les produits « augmentés », la fonction
devient alors une composante immatérielle et
dynamique du produit, un matériau pour le design, qui
va bouleverser le travail sur la forme et les interactions.
Ils constituent selon moi une nouvelle étape dans
l’histoire des produits, illustrée par la figure ci-dessous,
dans la mesure où ils promettent de renouveler la
manière dont nous accédons à l’information et dont
nous interagissons dans le monde physique.
Figure. Les transformations des produits au cours du temps.
L’information comme nouveau matériau pour le design de produits
Dr PIERRICK THEBAULT
Chercheur– Designer au MIT SENSEable City Lab
" Les enjeux soulevés par les technologies de l’Internet des Objets sur l’activité de
conception et plus particulièrement sur le travail du designer sont immenses."
CONTACT: PIERRICK@MIT.EDU
http://senseable.mit.edu/
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Kamitis : Vous venez de nous présenter les produits augmentés. Mais que sont donc les lieux augmentés ?
P. THEBAULT : Si certaines applications s’articulent
autour de produits spécifiques, d’autres trouvent un
ancrage plus large sur l’environnement, dont elles vont
superviser ou orchestrer les interactions. On peut ainsi
envisager les lieux comme des entités virtuelles, des
« sphères » d’information, à la fois « conscients » des
produits qu’ils hébergent et « attentifs » aux actions des
utilisateurs. Avec des chercheurs des Bell Labs, où j’ai
réalisé ma thèse, nous avons créé une architecture
logicielle [2] permettent d’agréger et de sécuriser les
données produites au sein d’un espace donné, par des
produits, capteurs ou des utilisateurs. Elle permet
notamment de créer des représentations de l’évolution
des caractéristiques des lieux telles que leur
fréquentation, leur ambiance et les contenus dont ils
font l’objet. En analysant les interactions qu’ont les
utilisateurs avec des produits connectés ou des contenus
délivrés par une sphère d’information, il est également
possible d’identifier les actions les plus caractéristiques
d’un lieu. Une fois rendues publiques et mutualisés, ces
nouveaux « descripteurs » permettraient aux utilisateurs
de découvrir de nouveaux endroits ou de décider où aller
en fonction de leurs attentes ou de leurs besoins
immédiats. De nouvelles cartes de la ville pourraient
également être établies.
Kamitis : Actuellement vos travaux de recherche au sein du MIT SENSEable City Lab portent sur la ville « sensible »
pouvez-vous nous en dire plus ?
P. THEBAULT : Les très larges corpus de données
générées par les capteurs déployés à l’échelle de ville,
les réseaux de téléphonie ou encore les terminaux
bancaires permettent aujourd’hui, une fois agrégés,
traités et analysés, de mieux comprendre les
déplacements, les pratiques et les comportements des
gens. Les technologies de l’Internet des Objets nous
permettent aujourd’hui d’avoir un regard nouveau, en
en temps réel, sur l’espace urbain. Cette capacité à
« sonder » ou à « sentir » la ville à une échelle
macroscopique ou au contraire microscopique suscite
évidemment l’intérêt des urbanistes, mais aussi des
architectes et des designers, pour qui il est possible de
créer des systèmes adaptatifs, qui « répondent » ou
« réagissent » à la présence et aux actions des habitants.
Au delà des outils de visualisations que je conçois au sein
du laboratoire, je m’intéresse également aux formes
d’articulation entre le lieu et les applications, et à la
manière de représenter de manière tangible, in-situ, les
flux d’informations et les applications qui lui sont
propres.
Kamitis : La smart city ou la ville « sensible » sera-elle le standard pour les métropoles de demain ?
P. THEBAULT : Cette ville sensible est déjà réelle dans
beaucoup de pays. Des villes comme Rio de Janeiro,
Singapour, Songdo en Corée du Sud ou encore Masdar
dans les Emirats Arabes Unis en sont les exemples
emblématiques. Je pense qu’il ne faut pas enfermer le
concept de ville intelligente uniquement dans la
dimension technologique. Certes, la ville de demain
peut être conçue comme un gigantesque tableau de
bord permettant de contrôler et d'optimiser les flux et
processus logistiques urbains, mais elle doit surtout
concilier les piliers socioculturels et environnementaux à
travers une approche systémique, qui allie gouvernance
participative et gestion optimisée des ressources.
Kamitis : Quelles sont les barrières que vous voyez pour le déploiement des produits augmentés et de la ville
intelligente ?
P. THEBAULT : Les barrières qui freinaient jusqu’à présent
l’intégration des systèmes de captation ou de
traitement de l’information dans les villes ou les produits
ont pratiquement disparues. Il est possible de déployer
des capteurs ou des systèmes embarqués de manière
discrète sinon invisible, mais c’est l’ « intelligence » dont
nous les doterons qui transformera la ville. La question
n’est plus « comment ? », mais « pour quoi faire ? ». Il
appartient donc aux concepteurs, et en particulier aux
designers, de s’assurer de l’utilité des systèmes ou des
applications qui viennent augmenter le monde
physique.
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J’ai consacré une grande partie de mes travaux à l’étude
de la perception de l’Internet des Objets par les
utilisateurs. Les produits augmentés que j’ai prototypé
pendant ma thèse résultent par exemple d’une
démarche de co-création. Il me semble en effet
nécessaire de confronter les gens à ces objets
« intermédiaires » pour qu’ils prennent conscience des
possibilités et de l’expérience qu’ils délivrent. Les
utilisateurs seront d’ailleurs acteurs de la conception de
ces produits, puisqu’ils pourront intervenir sur leurs
fonctions à postériori. Il faut donc au maximum prendre
en considération leurs attentes, leurs besoins et leurs
réactions à chaque étape du processus de conception,
sans pour autant abandonner toute prise de risque.
Kamitis : Qu’en est-il de la problématique des données personnelles et du respect de la vie privée ?
P. THEBAULT : Produits et lieux augmentés sont en effet
une source inépuisable de données, qui pourront à la fois
être utilisées pour étudier la ville ou les pratiques mais
également être employées à des fins publicitaires. Il
serait dommageable de freiner l’innovation sous couvert
du respect de la vie privée. Je crois que le principal enjeu
reste de comprendre la valeur de ces nouvelles données
et la manière dont elles peuvent améliorer la société. Ce
seront aux citoyens de débattre et d’accepter ou de
refuser l’emploi de leurs données. Je pense qu’il faut
donner l’opportunité aux gens de comprendre cette
nouvelle économie de données, puis de laisser choisir
s’ils veulent ou non y contribuer. La question de la
contrepartie sera sans doute cruciale. Verra-t-on
émerger des « donneurs » de données, acteurs de la
collectivité, où des banques de données reversant une
partie des revenus générés aux individus ?
Kamitis : Quelles solutions pouvez vous imaginer pour la protection de ces données ?
P. THEBAULT : Des acteurs politiques comme le Parti
Pirate en Allemagne considèrent que l’architecture
d’Internet n’est pas adaptée à cette nouvelle économie
de données. Ils prônent l’utilisation de réseaux « peer to
peer », visant à distribuer l’information dans des milliers
d’ordinateurs plutôt que dans quelques serveurs
appartenant à des entreprises ou à des institutions. Sans
remettre en cause l’infrastructure existante, je crois
dans le développement de serveurs locaux, intégrés ou
connectés aux « box » des opérateurs télécom. Ces
« clouds » privés, dédiés à la collecte et à l’analyse des
données générées par tous les capteurs et produits
présents dans l’environnement, constitueraient une
alternative intéressante. Les données ne
s’échapperaient pas vers des serveurs dont on ne
connaît pas la localisation ni les administrateurs, mais
resteraient confinées aux frontières physiques du lieu, et
donc sous la gouvernance de son propriétaire.
A plus court terme, je pense qu’il sera nécessaire de
mettre en place, à l’échelle d’un service ou d’un état, des
plateformes collaboratives de gestion des données. Ces
dernières permettraient non seulement aux utilisateurs
de visualiser les données les concernant, d’identifier la
manière dont ils sont utilisés, et d’accepter ou refuser
leur utilisation par des acteurs tiers. A l’instar des
plateformes de « crowdfunding », il serait intéressant de
laisser l’opportunité aux gens de partager leurs données
personnelles avec des chercheurs, institutions ou
entreprises engagées dans un projet scientifique ou
social. Je suis confiant dans la capacité des citoyens à
s’adapter aux innovations technologiques et à trouver
l’équilibre entre vie privée et bénéfice collectif !
Références :
[1] Pierrick Thebault, "La conception à l’ère de l’Internet des Objets : modèles et principes pour le design de produits aux
fonctions augmentées par des applications", LAMPA - Laboratoire Arts et Métiers ParisTech d'Angers, 2013.
[2] Pierrick Thebault, Dominique Decotter, Mathieu Boussard, Monique Lu, « Embodying services into physical places:
Toward the design of a mobile environment browser », ACM Transactions on Interactive Intelligent Systems (TiiS), 2013.
21
La "Smart city" incarne l’innovation et la technologie au service des citoyens. Qu’il s’agisse de transports, de
connectivité, de sécurité, etc., ce concept recouvre les solutions pour les métropoles du futur. VALERIE ISSARNY,
directrice de recherche à l’Inria Paris-Roquencourt, nous décrit les efforts entrepris pour la conception et le
développement de la ville intelligente.
Kamitis : Depuis plusieurs années, vous vous intéressez aux problématiques liées à l’internet du futur. Pouvez-vous
nous présenter vos travaux de recherches ?
V. ISSARNY : Les recherches des équipe-projets Inria
ARLES et MiMove qui lui succède sont centrées sur
l’étude d’architectures logicielles de systèmes distribués
exploitant les technologies de communication du futur
et particulièrement les communications mobiles.
L’objectif est de développer des méthodes et outils pour
faciliter le développement d’applications basées sur ces
technologies. Nous nous intéressons plus
spécifiquement aux applications dîtes ubiquitaires dont
la notion a été introduite dans les années 90 mais qui ne
se retrouvent dans notre quotidien que depuis
récemment. L’Internet du futur, incluant l’Internet des
objets, joue en effet un rôle essentiel dans le
développement de l’informatique ubiquitaire de par la
connectivité accrue des équipements et l’intégration des
mondes physiques et virtuels, qui sont rendues
possibles. Nos dernières recherches sont ainsi focalisées
sur l’interopérabilité des systèmes de l’Internet du futur
ou encore l’Internet des objets mobiles que nous voyons
comme une composante importante de l’Internet du
futur. Nous développons pour ce faire de nouveaux
algorithmes et protocoles pour faire face à la croissance
massive de l’hétérogénéité, de la dynamique mais
également de l’échelle des systèmes distribués
considérés. Par exemple, ne considérant que le sujet de
l’interopérabilité, nous étudions des solutions à la
traduction de protocoles à la volée.
Kamitis : Quelle est l’importance de ces recherches au niveau fondamental et au niveau applicatif ?
V. ISSARNY : Comme suggéré précédemment, les
sujets de recherche que nous étudions sont essentiels
pour un développement effectif de l’Internet du futur et
en particulier de l’Internet des objets mobiles qui est,
selon nous, appelé à devenir une composante
prépondérante de l’Internet du futur. En effet, la
diversité des systèmes constituant l’Internet du futur
requiert de repenser les solutions à l’interopérabilité car
l’approche classique basée sur les standards est trop
limitative.
Objectif : Villes intelligentes
Dr VALERIE ISSARNY
Directrice de recherche au centre de recherche Inria Paris-Rocquencourt,
Dr Valérie Issarny
Directrice de recherche au centre de recherche Inria Paris-Rocquencourt,
" Nous nous intéressons aux applications liées à la « ville intelligente »
et plus particulièrement aux applications qui impliquent le citoyen
dans la gouvernance de la cité"
CONTACT: valerie.issarny@inria.fr
https://www.rocq.inria.fr/arles/index.php/members/94-valerie-issarny
" Nous nous intéressons aux applications liées à la « ville intelligente »
et plus particulièrement aux applications qui impliquent le citoyen
dans la gouvernance de la cité"
22
De même, les infrastructures logicielles pour les
systèmes de l’Internet des objets mobiles doivent
prendre en compte le facteur d’échelle qui va bien au
delà de l’Internet que nous connaissons aujourd’hui ; il
suffit pour s’en convaincre de considérer le nombre
croissant de dispositifs mobiles et des capteurs qu’ils
embarquent. Il est également nécessaire de prendre en
compte les ressources limitées de nombreux
équipements de l’Internet des objets. Enfin, nous
considérons que les capteurs mobiles doivent être non
seulement physiques mais également sociaux, c’est-à-
dire, pouvoir refléter la perception du monde physique
par les usagers pour obtenir une information tant
qualitative que quantitative sur l’environnement. Pour
répondre à ces défis, nous étudions notamment des
protocoles probabilistes mais également une
caractérisation sémantique des systèmes pour
permettre leur composition.
Les systèmes logiciels de l’Internet du futur ouvrent la
voie à de nombreuses applications innovantes. Pour
notre part, nous nous intéressons aux applications liées
à la « ville intelligente » et plus particulièrement aux
applications qui impliquent le citoyen dans la
gouvernance de la cité, ce qui est rendu possible par
l’Internet des objets mobiles couplant capteurs
physiques et sociaux. Ces applications vont des
applications encourageant l’utilisation des transports
publics à des applications de monitorage des nuisances
urbaines ou encore des applications spécifiques
d’associations citoyennes.
Nous sommes notamment fortement impliqués dans
l’initiative Inria sur les villes numériques, appelée
CityLab@Inria, qui vise l’étude et l’intégration des
nouvelles technologies du numérique pour la ville
intelligente, des technologies réseaux aux
infrastructures logicielles distribuées et solutions à la
gestion et analyse des données collectées. Notre
contribution est plus spécifiquement axée sur l’étude
des infrastructures logicielles distribuées pour les
systèmes urbains qui intègrent nos recherches évoquées
plus haut. Nos résultats récents sur ces sujets ont été
largement développés dans le cadre de partenariats
européens grâce aux programmes cadres de la
commission et notamment FP7. Nous avons donc
développé les bases d’une nouvelle approche à
l’interopérabilité dans le cadre du projet FET CONNECT
ainsi qu’une infrastructure logicielle distribuée pour
l’Internet du futur dans le cadre du projet CHOReOS.
Kamitis : D’après vous, quels sont les enjeux et les défis que l’internet du futur pourra relever demain ?
V.ISSARNY : Nous n’en sommes qu’à l’émergence de
solutions et les verrous scientifiques et technologiques
restent nombreux. Il ne faut pas non plus négliger
l’importance des expérimentations et notamment des
expérimentations à l’échelle réelle. Si l’on prend par
exemple le domaine des villes intelligentes, nous ne
pourrons évaluer les solutions proposées que si elles
sont effectivement déployées. Ceci est également
impératif pour comprendre les évolutions nécessaires
pour répondre au mieux aux besoins du citoyen. Il ne
faut pas non plus sous-estimer les risques possibles
associés au développement des villes intelligentes
comme les atteintes au respect de la vie privée qui
peuvent en découler. Enfin, il est impératif que les
recherches se fassent en partenariat étroit avec les
différents acteurs concernés.
23
"Si nous ne voulons pas nous passer du progrès, il faut désormais savoir l’interroger". FRANCIS JAUREGUIBERRY,
Professeur de sociologie et directeur du laboratoire SET (Société Environnement Territoire), nous propose une
lecture fine et nuancée des nouvelles technologies et des usages qui les accompagnent. Il nous invite à une réflexion
autour des enjeux sociétaux et économiques de la société hypermoderne et connectée d’aujourd’hui.
Kamitis : Vos travaux de recherche concernent les usages des technologies de communication et mettent l'accent sur
la mesure des changements que ces usages ont induits notamment au niveau des règles sociales. Pouvez-vous nous
présenter vos travaux de recherches en quelques mots ?
F. JAURÉGUIBERRY : Depuis maintenant plus de vingt
ans, je travaille sur les usages de technologies de
communication ou, plus précisément, sur les gros
utilisateurs de ces technologies, ceux qui s’en servent de
façon intense. J’ai travaillé avec les premiers utilisateurs
des téléphones portables, puis des smartphones et des
tablettes ainsi qu’avec ceux qui passent beaucoup de
temps sur Internet. Ce sont des technologies dont les
applications vont plus vite que les réflexions
sociologiques, juridiques et même philosophique sur
leurs effets, sur la façon dont elles transforment notre
rapport à la vie quotidienne. C’est pour cela que j’ai
toujours employé des méthodologies très intervenantes
pour savoir ce qui était en train de changer sous nos
yeux afin d’essayer, avec les acteurs de ce changement,
d’anticiper les nouveaux enjeux qui se dégageaient.
Par exemple, il est très vite apparu que les portables
étaient des outils qui permettaient un nouveau rapport
au temps, plus rentable et efficace, dans lequel la
gestion au fil de l’eau prenait une autre dimension. Cette
entrée dans une société de l’immédiateté
télécommunicationnelle est vécue de façon très positive
au niveau économique car synonyme de
raccourcissement des délais, d’accélération des rythmes
et de généralisation de la simultanéité. Dans la guerre
économique que se livrent les acteurs de la chrono-
compétitivité, elles sont converties en de véritables
armes. Mais elles ont aussi produit des situations non
voulues, inattendues, qui se sont révélées être
négatives : accumulation incontrôlable d’informations
interdisant leur traitement efficace, dispersion au
travail, sentiment de manque de temps et que l’urgence
remplace la réflexion. Tension, stress et parfois même
anxiété apparaissent alors, conduisant certains vers des
formes de souffrance au travail, de pathologies
psychosomatiques et même de burn-out.
Technologies de la communication : nouvelle donne
anthropologique
Pr FRANCIS JAURÉGUIBERRY
Directeur du laboratoire SET (Société Environnement Territoire – CNRS UMR 5603)
Dr Valérie Issarny
Directrice de recherche au centre de recherche Inria Paris-Rocquencourt,
CONTACT: francis.jaureguiberry@univ-pau.fr
http://set.univ-pau.fr/live/ http://web.univ-pau.fr/~jauregui/
" Les terrains d’intervention nourrissent la réflexion sociologique, et le
regard éloigné du sociologue révèle très souvent des disfonctionnements
que les acteurs de l’entreprise ou du service qui sont sur le pont ne peuvent
ou ne veulent pas voir. "
24
Je ne suis pas un sociologue de bureau et j’interviens
très souvent dans des entreprises : ce n’est qu’en allant
sur le terrain que ce thème de nouvelle temporalité est
apparue. Ce n’est par exemple qu’en interwievant des
cadres, en faisant le point avec eux sur leur emploi du
temps, les taches traitées, la porosité entre vie
professionnelle et vie privée, etc. que j’ai pu,
concrètement mesurer l’individualisation de problèmes
qui devraient en fait être traités collectivement. Ça a l’air
tout bête, mais le sociologue arrive, constate que
chacun se plaint séparément de la même chose, par
exemple du flux des e-mails ou des appels téléphoniques
incessants qui les empêchent de se concentrer sur une
tâche, mais que rien n’est fait, la situation semblant leur
échapper. Les terrains d’intervention nourrissent la
réflexion sociologique, mais en retour, le regard éloigné
du sociologue révèle très souvent des
disfonctionnements que les acteurs de l’entreprise ou du
service qui sont sur le pont ou le nez dans le guidon ne
peuvent ou ne veulent pas voir. Je crois beaucoup à cet
échange entre chercheurs et entreprise dans le domaine
des sciences humaines trop souvent négligées mais dont
l’objet est pourtant notre quotidien.
Kamitis : Aujourd’hui, l’individu est assimilé à un « être numérique » interconnecté qui évolue dans un monde virtuel.
Quels sont vos constats concernant l’évolution de cet être au cœur des nouvelles logiques d’échange et d’exposition ?
F. JAURÉGUIBERRY : Je parlais à l’instant de
l’accélération du temps : les choses vont « plus vite », les
délais sont « plus courts », les flux sont « tendus » et les
gens « pressés ». Les technologies de communication
sont les outils de cette accélération. Mais elles nous
introduisent aussi, sans que nous en prenions vraiment
la mesure, dans un nouveau monde. Un monde où la
réalité ne se contente pas d’être là, face à nous, mais un
monde où, désormais, cette même réalité nous parle et
nous informe sur son état. Capteurs et puces
électroniques distribués dans notre environnement
physique, RFID collés aux objets, systèmes de
géolocalisation nous informent en temps réel sur l’état
de ce qui nous entoure, de la circulation, de la pollution
de l’air, du nombre de taxis ou de vélos disponibles dans
telle ou telle station, des services alentours. De façon
désormais banale, il est possible de savoir exactement
où l’on se situe dans une ville, combien de mètres il faut
parcourir jusqu’à la prochaine bouche de métro, où se
trouve le restaurant végétarien le plus proche ou encore
de savoir quels sont les horaires des prochaines séances
des films devant être projetés dans la demi-heure qui
suit dans un rayon de 500 mètres. Plusieurs chercheurs
du laboratoire du CNRS que je dirige (le SET) travaillent
sur ce thème, sur la géolocalisation, sur la réalité
augmentée et, là aussi, essaient d’anticiper des enjeux
sociaux avant que des situations non voulues se
convertissent en irréversibilités sur lesquelles il serait
ensuite très difficile de revenir. Par exemple, la
possibilité de faire des choix individuels synonymes
d’optimisation et d’économie à partir de données
collectives elles-mêmes basées sur la collecte et
l’interprétation des traces laissées par chacun rend nos
villes plus intelligentes. Mais dans le même temps, la
transparence à laquelle peuvent conduire ces mêmes
technologies de géolocalisation et de localisation des
activités représente un indéniable danger. Dans la
société de risque dans laquelle nous sommes, ceux liés
au détournement des données, à leurs manipulations à
des fins politiques ou commerciales sont en effet
grands. Une nouvelle inquiétude est en train de
clairement apparaitre et, si nous ne voulons pas nous
passer du progrès, il faut désormais savoir l’interroger
dans ses potentiels effets négatifs. L’avenir appartient
sans doute à ceux qui, en la matière, sauront anticiper
ces craintes et attentes en terme de droit individuel au
silence, de droit à l’opacité et à l’anonymat, et sauront
les traduire en applications, systèmes et règles.
Kamitis : Quels sont les enjeux de ces changements que vous étudiez en termes économiques, politiques
et sociaux?
Enormes, les enjeux sont énormes. Economiquement,
c’est une évidence. Mais en terme de société aussi, et je
pense même que l’on peut parler de nouvelle donne
anthropologique. Car ces technologies semblent
répondre (en partie évidemment) à un désir vieux
comme l’humanité, celui d’ubiquité, et à un fantasme
vieux comme l’individu, celui du contact permanent
avec les êtres aimés. Ubiquité, immédiateté et
permanence par-delà le principe de réalité de ce monde
qui sépare, éloigne et isole. Quel énorme changement,
effectivement ! Toute la question est de savoir
désormais non pas seulement comment on utilise ces
technologies mais comment on les maîtrise. Je viens de
coordonner une vaste recherche réunissant une
vingtaine de chercheurs appartenant à cinq laboratoires
différents sur la déconnexion. Cela peut sembler
paradoxal pour quelqu’un qui s’intéresse avant tout aux
gros utilisateurs. Et bien, justement, c’est parmi ces
mêmes gros utilisateurs qu’apparaît le plus, comme en
creux, un désir de déconnexion.
25
Le désir de déconnexion apparait dans des situations de
saturation, de trop-plein informationnel, de
débordement cognitif, de harcèlement ou de
surveillance dans lequel l’individu se sent dépassé ou
soumis. Dans les cas extrêmes de burn out, le rejet des
TIC fait partie intégrante d’une attitude de défense
ultime qui permet à l’individu de survivre quand il ne
peut plus lutter. Mais ces cas sont rares et relèvent
moins d’une déconnexion volontaire cherchant à
maîtriser des flux communicationnels que d’une
déconnexion mécanique visant à ne pas se laisser
emporter par un afflux ingérable. À l’image d’un
disjoncteur qui saute lorsque l’intensité électrique
devient trop importante, la déconnexion est ici
purement réactive. Les conduites de déconnexion
volontaires se situent toutes en deçà de telles réactions
extrêmes. Elles visent précisément à éviter de rentrer
dans la zone rouge du burn out et de subir des situations
de surcharge informationnelle insupportables. Face à un
nombre d’e-mails ou de SMS manifestement trop grand
pour être raisonnablement gérés, à un nombre d’appels
téléphoniques trop fréquents pour ne pas être
perturbateurs, à la dimension trop chronophage de
l’entretien des réseaux sociaux sur Internet, des
tactiques de réajustement visant à reprendre la main
dans la gestion de son temps et de ses occupations
apparaissent. Ces pratiques ne sont pas synonymes
d’une déconnexion totale ou d’un rejet global des TIC,
loin de là, mais d’une déconnexion ponctuelle, partielle
et située gage de leur maîtrise et de leur usage raisonné.
Mais la possibilité même d’adopter ces conduites est
nettement inégalitaire. Il y a des situations
(professionnelles mais aussi existentielles) où certains
n’ont justement pas la possibilité de se déconnecter ne
serait que pour quelques minutes, mais doivent au
contraire répondre immédiatement. Dit autrement :
certains ont le pouvoir de se débrancher et d’autres ont le
devoir de rester branchés. L’obligation de rester branché,
et donc de subir la tension d’une urgence potentielle,
conduit à poser l’hypothèse de l’apparition d’une
« nouvelle richesse » et d’une « nouvelle pauvreté »
parmi les branchés. Les nouveaux pauvres des
télécommunications sont ceux qui ne peuvent pas
échapper à l’obligation de répondre immédiatement, et
qui doivent donc vivre dans l’urgence et dans
l’interpellation continue, et les nouveaux riches sont
ceux qui ont la possibilité de filtrer et d’instaurer de la
distance vis-à-vis de cette interpellation.
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La vie quantifiée - Publication Kamitis avril 2014

  • 2. 2 KAMITIS est une société spécialisée en expertise scientifique, en veille stratégique et technologique et en financement de l’innovation. Elle opère principalement auprès des entreprises innovantes mais également auprès des structures institutionnelles. KAMITIS réalise pour ses clients des états de l’art technologique, des études de marchés et des analyses technico-économiques. Elle les aide également à identifier et à obtenir les meilleurs financements pour leurs projets. Lyon 6 Place Bellecour 69002 Pour plus d'informations : contact@kamitis.com - www.kamitis.com
  • 3. 3 Éditorial Une vie quantifiée Expertise scientifique Une guerre du virtuel bien réelle De l’énergie sans fil Financement Le crowdfunding Intelligence économique L’Internet of Everything Le Royaume Uni se lance dans le développement de standards pour les smart cities Focus CityLab@Inria: An Inria Lab on Smart Cities fostering Environmental and Social Sustainability – par VALERIE ISSARNY Le positionnement du CEA-LETI sur l’internet des objets – par JEAN-MICHEL GOIRAN I3 Ingénierie du virtuel : de la conception à l’application – par SIMON RICHIR L’information comme nouveau matériau pour le design de produits – par PIERRICK THEBAULT Objectif : Villes intelligentes – par VALERIE ISSARNY Technologies de la communication : nouvelle donne anthropologique – par FRANCIS JAUREGUIBERRY 4 4 5 5 5 6 6 9 9 10 11 11 14 16 16 19 22 24 Sommaire
  • 4. 4 Une vie quantifiée Ce numéro aborde le monde des objets et des lieux augmentés. Autrement dit, le secteur des objets connectés et des villes intelligentes dont le développement se fait grâce au croisement et au traitement des données récoltées partout sur le terrain. Des "smart cities" ou "senseable cities", capables de percevoir et de penser, seront conçues pour rendre la vie plus aisée, plus saine et plus productive. Leur déploiement prochain n’est plus un élément de l’horizon imaginaire mais bien de celui des possibles. La question n’est donc plus de savoir dans quelle mesure ces concepts fondés sur les innovations technologiques sont réalisables mais plutôt d’anticiper leur mise en œuvre dans nos villes. Nos experts nous invitent aujourd’hui à un voyage au cœur d’une réalité améliorée et augmentée. Un monde connecté où tout peut être quantifié et qualifié. JEAN-MICHEL GOIRAN, LETI/DIR Corporate Business Development IoT, nous explique le positionnement du CEA sur l’internet des objets ; PIERRICK THEBAULT, chercheur au MIT (Massachusetts Institute of Technology) et spécialiste de l’informatique ubiquitaire et de l’internet des objets, nous présente ses recherches concernant les objets et les villes du futur ; VALERIE ISSARNY, directrice de recherche à l’Inria Paris-Roquencourt, nous décrit les efforts entrepris pour la conception et le développement de la ville intelligente ; SIMON RICHIR, Professeur aux Arts et Métiers ParisTech d'Angers-Laval et directeur scientifique de Laval Virtual, nous parle de la réalité augmentée et des perspective d’un futur en relief ; Enfin, FRANCIS JAUREGUIBERRY, Directeur du laboratoire SET (Société Environnement Territoire), nous propose une lecture fine et nuancée des nouveaux usages que nous faisons des technologies de la communication et de la connexion. Il nous invite à réfléchir sur les interactions à distances et la réciprocité dans la communication à travers des objets, outils ou dispositifs techniques innovants. Bonne lecture, Une vie quantifiée, est-ce encore de la science-fiction ? Pas vraiment. Nous sommes aujourd’hui entourés d’objets permettant de suivre très précisément nos mouvements, nos interactions ainsi que nos paramètres vitaux. Ces objets peuvent délivrer un diagnostic complet concernant notre forme, notre état de santé, mais ils sont aussi capables de communiquer sur l’état de l’environnement dans lequel nous évoluons. Une vie « augmentée » grâce à des capteurs et des dispositifs intelligents disséminés un peu partout sur nous, dans nos maisons et au cœur de nos cités. Toutes les données qui sont recueillies, analysées et partagées sont une aubaine pour l’économie numérique et leur exploitation constitue une nouvelle ressource pour de nouveaux modèles d’affaires. Par Khaled Baaziz Dirigeant de Kamitis Éditorial
  • 5. 5 Une guerre du virtuel bien réelle Voilà une actualité bien mouvementée dans l’industrie de la réalité virtuelle. L’annonce de Facebook qui vient d’acquérir l’Oculus Rift pendant que Sony se positionne comme acteur majeur avec le projet Morpheus a fait sensation. Oculus Rift est un casque qui permet, grâce à des capteurs combinés à deux écrans haute définition pour chaque œil, une immersion dans un monde 100% virtuel. Pour Mark Zuckerberg, l'Oculus Rift va "changer la manière dont nous travaillons, jouons et communiquons". De son coté, Sony a dévoilé sa dernière innovation à l’occasion de la dernière Game Developer Conference. Fruit d’un travail de trois ans, le Project Morpheus est un casque virtuel, peu encombrant, développé pour Playstation 4. Morpheus, qui n’est encore qu’un prototype se porte comme une paire de lunettes. Equipé de plusieurs capteurs, il détecte et reproduit les mouvements de la tête et de la position de l’utilisateur. Avec une résolution d’écran de 1080p, un angle de vision de 90 ° et un système audio qui augmente le réalisme de l'expérience, Morpheus promet une belle expérience d’immersion dans la réalité virtuelle. "La réalité virtuelle est la prochaine innovation de PlayStation qui pourrait révolutionner l'avenir des consoles" a déclaré Yoshida le grand patron de Sony Computer Entertainment. Considérée auparavant comme une niche pour les passionnés de jeux vidéo, la réalité virtuelle pourrait bien finir par s'imposer à travers ces produits innovants qui lui donnent de la crédibilité. De l’énergie sans fil WiTricity pour Wireless Electricity est une entreprise américaine qui a mis au point un système de transmission de l’électrique sans fil. Le concept repose sur le postulat suivant : un champ électrique oscillant produit un champ magnétique et un champ magnétique oscillant produit un champ électrique. Ainsi, en faisant passer un courant électrique dans une bobine de cuivre, un champ magnétique est généré autour de la bobine qui l’envoie dans toutes les directions. En disposant une autre bobine réceptrice a proximité de la première (émettrice) et sous l’action du champ magnétique « reçu », suivant le second principe : un champ électrique est alors produit. Ce principe datant de 200 ans, a été optimisé par les chercheurs de WiTricity pour atteindre une portée de plusieurs mètres. La prochaine étape est l’intégration de cette technologie aux appareils électriques du quotidien afin de les rendre sans fil. Dans la même optique, des chercheurs de l’Université Duke mènent des recherches sur la récupération d’énergie à partir des radiations qui nous entourent. Une énergie sans fil et gratuite. À voir ! Expertise scientifique http://www.witricity.com/pages/application.html http://abcnews.go.com/Technology/sony-reveals-virtual-reality-headset-project- morpheus/story?id=22970107
  • 6. 6 Financement Le crowdfunding Un enjeu pour les entreprises Dans le contexte de crise économique actuelle et face à l’insuffisance de financement bancaire et d’investisseurs privés, notamment lors des phases d’amorçage des projets, les entrepreneurs et les dirigeants de TPE et PME se tournent de plus en plus vers le crowdfunding. Le crowdfunding constitue donc plus particulièrement une alternative possible aux capitaux familiaux, aux incubateurs et aux fonds d’amorçage. C’est un accès à des fonds facilité par la faiblesse des montants demandés aux investisseurs, contributeurs ou prêteurs. Par ailleurs, ces derniers peuvent représenter un échantillon potentiel des futurs clients ou consommateurs du rendu final. Ainsi, ils permettent de vérifier la portée des projets et leur acceptabilité et peuvent donc prévenir les possibles « flops » technologiques. Par ALISSA KACEM Chargée de veille stratégique et d’intelligence économique - Kamitis Le crowdfunding, aussi appelé finance participative, est un mode de financement désintermédié, né aux Etats-Unis dans les années 2000. A ses balbutiements en France, il est considéré comme une alternative efficace quand les investisseurs dits « classiques » (banques et capital investissement) ne veulent pas s’engager dans un projet. Ainsi, le crowdfunding permet de mettre en relation sur une plateforme en ligne des entrepreneurs ou des start-ups et des investisseurs particuliers, les internautes. Auparavant centré sur le financement de projets artistiques et caritatifs, de plus en plus de plateformes dédiées au numérique, à l’environnement ou aux biotechnologies et à la santé apparaissent. Différents modèles de financement participatifs existent : le financement par le don (avec ou sans contrepartie), le financement par le prêt et le financement par l’investissement. Le McMillan gap Les difficultés en matière de financement et de fonds propres s’expliquent par le « gap » financier entre les entreprises et les investisseurs ou banquiers. En effet, l’asymétrie d’informations peut engendrer des coûts de transactions importants. Ainsi, les dirigeants masquent (sciemment ou non) certaines informations sur l’entreprise et les banquiers ne connaissent pas totalement le potentiel et la situation réelle de l’entreprise (stratégie, structure, équipe…). Les investisseurs et banquiers pour plus de garanties se tournent donc plus facilement vers les grandes entreprises ou les sociétés cotées : ce qui marginalise les start-ups et les PME innovantes. La théorie de la hiérarchie des investissements de Myers Dans un premier temps, afin de se financer, les entreprises ont généralement recours à l’autofinancement : on parle alors de gestion en « bon père de famille ». Ensuite, elles développeront des dettes à moyen et long terme et ce n’est qu’en dernier ressort qu’elles ouvriront leur capital et émettront des actions en bourse. Ainsi, face à la baisse de la capacité d’emprunt, trouver des fonds, tout en gardant son indépendance devient problématique.
  • 7. 7 Que va changer le nouveau cadre réglementaire ? Du fait de l’expansion récente de la finance participative, ses activités sont encore soumises aux réglementations qui régissent les opérations bancaires et les services d’investissement classiques. Or, ces réglementations sont jugées trop rigides pour assurer une bonne fluidification des échanges. La simplification des démarches de financement participatif, entreprise en 2013 par le gouvernement, devrait entrer en vigueur en Juillet 2014 et s’articule autour de deux grandes mesures. La première, en lien avec le prêt participatif, instaure la création du statut d’« Intermédiaire en Financement Participatif », permettant de contourner le monopole bancaire en matière de crédit, en autorisant les prêts participatifs aux entreprises. Le prêt, pouvant aller jusqu’à un million d’euros, se constituera de blocs de 1000 euros maximum. Par ailleurs, certaines obligations, notamment publicitaires, seront allégées et la demande d’agrément simplifiée. La seconde mesure concerne le financement par investissement et consiste en l’acquisition du statut de « Conseiller en Financement participatif » pour les plateformes. Ces dernières donneront également aux internautes la possibilité d’investir dans une SAS et seule une information simplifiée sera donnée pour les projets financés pour un montant inférieur à 1 million d’euros. La loi prévoit d’assurer, dans tous les cas de figure, une transparence sur les frais, les risques encourus et les taux de défaillance des projets. De plus les plateformes n’auront pas l’obligation de détenir un montant en fonds propres minimum. Le crowdfunding français en quelques chiffres 13% 61% 26% Fonds propres Prêts Dons 78,3 millions : c’est la somme récoltée en France par le crowdfunding en 2013 (3 fois plus qu’en 2012). La part du financement participatif dans le capital- investissement est aujourd’hui de 1% environ. Le prêt participatif, qui est le plus avancé dans son développement, est l’activité qui collecte la majorité (61%) des sommes (voir figure 1). Figure 1 : la répartition des fonds collectés selon la nature de la plate-forme 330966 : c’est le nombre de contributeurs en 2013, sachant que depuis les débuts du crowdfunding en 2006, ce nombre s’élève à 651000. 95% des contributeurs utilisent les plateformes de dons, qui sont les plus anciennes et les plus populaires. Le crowdfunding en fonds propres est la forme de financement participatif qui croît le plus vite. Mais, il est aussi considéré comme étant le plus élitiste : en 2013, le ticket moyen d’entrée était de 3769 euros, contre 3471 euros pour le prêt et 64 euros pour un don.
  • 8. 8 Les fonds collectés par les acteurs du Crowdfunding en 2012 (en M$) Source : Massolution © (2013). Tous droits réservés. Reproduction interdite. La finance participative et les objets connectés Voilà ci-dessous quelques exemples d’objets connectés financés par des plateformes de crowdfunding La Pebble Watch : la première montre connectée. Plateforme : Kickstarter (dons) Fonds collectés : 7,5 millions euros (financé à 10267%) Et ensuite ? : sortie de la Pebble Steel en 2014. L’Occulus Rift : masque d’immersion dans un jeu vidéo. Plateforme : Kickstarter Fonds collectés : 2,4 millions d’euros Et ensuite ? : Disponibilité de la version pour les consommateurs en 2014/2015. Ti’be : porte-clé bluetooth basse consommation. Plateforme : Kisskissbankbank (dons) Objectif en cours: 25000 euros (financé à 124%) Myfeelback : solutions d'acquisition et de traitement de données de clients contextualisées. Plateforme : Wiseed (plateforme d’investissement)
  • 9. 9 Intelligence économique L’Internet of Everything A la croisée des chemins de la mobilité, du cloud et de la virtualisation, il est des sujets stratégiques pour lesquels quand on a la force de frappe nécessaire, il vaut mieux être suivi que suivant ! C’est ainsi que depuis quelque temps on voit des acteurs se positionner et des alliances se sceller autour de "l’Internet of Everything". D’après le géant américain Cisco, "l’Internet of Everything" représentera, dans la prochaine décennie, un enjeu économique de 19 trillions de dollars pour les différents secteurs d'activité en termes de technologie et de services. Cette nouvelle évolution, dont les moteurs de croissance sont les nouvelles technologies de l’information (cloud computing, l’informatique ubiquitaire, big data, …), permet aujourd’hui d’envisager le déploiement à grande échelle de "l’Internet of Everything". En effet, le 24 Mars 2014, Cisco Systems a annoncé la création du “the world’s largest global Intercloud” [1] : un investissement d’un milliard de dollars et une collaboration avec un certain nombre de partenaires qui vise à réfléchir sur les problématiques liées aux nouvelles économies des données. Pour ce nouveau projet, Cisco qui propose des architectures et des solutions concernant notamment les thématiques de la mobilité, de « l’Internet of Everything », du Cloud et de la virtualisation s’associe entre autre avec le fournisseur de services australien Telstra, le canadien Allstream, fournisseur de solutions de communications, ou encore Canopy spécialisé dans le cloud-computing. Ce positionnement inédit traduit également le besoin de Cisco de contrer la stratégie de certains fournisseurs de cloud qui offrent des services d'entreprise tel qu’Amazon. Le 27 Mars 2014, on apprenait également [2] la formation du Consortium de l'Internet industriel (IIC). Constitué de Cisco, AT & T, GE, IBM, ce consortium a pour objectif de faciliter l'accès aux données volumineuses par une meilleure intégration du monde physique et du monde numérique. Les applications sont nombreuses et touchent des domaines stratégiques tels que la santé, la sécurité des données, les villes intelligentes, le transport et les réseaux électriques. Tous les spécialistes s’accordent à dire qu'il est nécessaire d'établir des cadres communs et des normes pour l'Internet du futur, et beaucoup d’acteurs (américains) comptent aujourd’hui sur le CII pour le faire. Le marché immense de l’internet du futur sera-t-il dicté par une poignée d’entreprises américaines au détriment des européens inévitablement à la traine ? Le Royaume Uni se lance dans le développement de standards pour les smart cities Depuis le 05 mars dernier, le Royaume-Uni est le premier pays à avoir développé des standards pour accompagner les villes dans leur transition vers les smart-cities. La BSI (British Standards Institution) s’est chargée de proposer un cadre pour le déploiement des smart cities en UK. A travers de nouvelles spécifications concernant un langage commun pour les smart cities et visant à stimuler la croissance dans ce secteur émergent, ces mesures étaient vitales. En effet, au Royaume Unis, 8 personnes sur 10 vivent dans les villes. Les structures citadines évoluant de manière de plus en plus complexes, les mesures visent à les standardiser, notamment en ce qui concerne l’utilisation et le partage de données et de ressources est basé sur un vocabulaire commun. Parler un même langage permet aux développeurs, designers, fabricants et utilisateurs de collaborer plus efficacement. La standardisation mise en place doit aider les acteurs du secteur à se développer et accompagner leur stratégie «ville intelligente» pour se concentrer sur la valeur de la technologie et des données associées à des changements organisationnels.
  • 10. 10 Focus : CityLab@Inria: An Inria Lab on Smart Cities fostering Environmental and Social Sustainability An ICT Lab on Smarter Cities Emphasizing Social Sustainability From the more technical, ICT perspective, smart cities are fascinating systems of systems whose component systems and their integration greatly challenge current ICT due to the key characteristics of connected cities and especially their scale. Moreover, the vision of what smart cities should be about is evolving at a fast pace in close concert with the latest technology trends. It is notably worth highlighting how mobile and social Internet use have reignited citizen engagement, thereby opening new perspectives for smart cities beyond data analytics that have been initially one of the core foci for smart cities technologies. Similarly, open data programs foster the engagement of citizens in the process of government and overall contribute to make our cities more sustainable. However, while environmental and economical sustainability have been on the ICT research agenda for some time, there is another, equally important, form of sustainability that has so far been overlooked for smart cities, that is, social sustainability. Indeed, cities are first and foremost places for people, and thus building cohesive, inclusive and flourishing communities should be at the forefront of our research agenda. Without the right social infrastructure in place, problems of isolation, mental health, anti-social behaviors and crime are more likely to arise, spiraling communities into decline. In the above context, the Inria Project Lab CityLab@Inria will study ICT solutions toward smart cities that promote both social and environmental sustainability. A strong emphasis of the Lab is on the undertaking of a multi-disciplinary research program through the integration of relevant scientific and technology studies, from sensing up to analytics and advanced applications, so as to actually enact the foreseen smart city Systems of Systems. Obviously, running experiments is a central concern of the Lab, so that we are able to confront proposed approaches to actual settings. CityLab@Inria specifically brings together Inria project- teams in the areas of networking (FUN and URBANET), distributed software systems (ARLES-MiMove and MYRIADS), data management (DICE, OAK and SMIS), and data analytics (CLIME and WILLOW). The world is in the midst of an immense population shift from rural to urban areas, which has led governments, businesses and community to rely on technologies, and in particular the Information and Communication Technology (ICT), to overcome the challenges posed by rapid urbanization. As a result, various academic, industrial but also city-led ICT initiatives have been launched in the recent years in order to build “smart urban infrastructures”, where detailed information about the functioning of the city becomes available to both city dwellers and businesses, thereby enabling better understanding and consequently management of the city’s infrastructure and resources. Dr VALERIE ISSARNY Directrice de recherche au centre de recherche Inria Paris-Rocquencourt. Contact : valerie.issarny@inria.fr
  • 11. 11 Research Themes & Challenges According to the above, the objective of CityLab@Inria is the study of ICT-based smart city systems from supporting “sensing” systems up to advanced data analytics and new services for the citizens that promote social and environmental sustainability. Toward that goal, the Lab investigates the following research questions:  How to effectively sustain urban-scale sensing that needs to combine both physical and social sensing while accounting for the requirements associated with the target network that include: scalability, energy-efficiency and privacy preservation? The sensing of the city pulse also challenges the supporting data management, which must scale-up as well as integrate highly heterogeneous data of various qualities. The literature is rich with papers addressing these concerns individually. However, these are seldom tackled together, especially while simultaneously considering the urban scale. Our approach to overcome these challenges lies in the study of scalable protocols from the networking up to the middleware layers, together with advanced techniques for privacy enhancement and semantic-aware data management.  How to aggregate the data so as to understand but also anticipate and even influence the evolution of the city? Data analytics is at the core of smart cities so that the “big data” that is made available to us by way of sensing but also based on the open data trend can indeed become useful knowledge about the cities. Data analytics for smart cities is a very active area of research. However, numerous open problems remain among which large-scale data analysis and overcoming the uncertainty associated with urban-scale, crowd-sourced data collection. Our contribution in this area leverages advanced research results on data assimilation and machine learning.  While city-scale sensing and data analytics are two complementary aspects of smart city systems, they are also inter-related as one may adequately inform the design of the other. It is then essential to design crosscutting architectures for smart city systems based on the comprehensive integration of the custom data sensing and analytics that we will investigate.  Last but not least, the smart city vision will come true only if it comes along with concrete urban services that do make our (future) cities sustainable and agile. A number of application areas have been put forth for a while, and include: smart energy, smart health, smart transportation, etc. However, we are still lacking disruptive services that will indeed contribute to making our cities better places to live while addressing the central challenge of growth. One important question is how to impact upon city governance using city-scale sensing, and especially its social dimension? Our research will be guided by the study of new urban services, which will be undertaken in close collaboration with external partners and especially city representatives as well as researchers from the social science field. While the scientific focus of CityLab@Inria is broad, the Lab’s research leverages relevant effort within Inria project-teams that is further revisited as well as integrated to meet the challenges of smart cities. In addition, CityLab@Inria research builds upon collaborative effort at the International level, and especially collaboration in the context of the Inria@SiliconValley program. An International Lab A key characteristic of the CityLab@Inria Lab is its international dimension, which originated with the Paris-San Francisco cooperation agreement toward smarter cities 1 . This agreement, signed on March 20, 2013, is dedicated to developing smarter cities and includes support for targeted research programs among which is the Joint Inria-CITRIS CityLabs Program. More specifically, researchers from Inria and CITRIS (Center for Information Technology Research in the Interest of Society, University of California) have had an ongoing relationship for collaborative research projects since 2010, in close relation with the Inria@SiliconValley program. In 2013, Inria and CITRIS signed an agreement regarding the CityLabs partnership in which they aim to undertake cutting-edge research in the domain of “smart cities” with a focus on gathering, analyzing, and visualizing complex urban data.
  • 12. 12 In particular, the CITRIS initiative on “Data and Democracy” 2 is directly related to the CityLab@Inria goal of promoting social sustainability. This is for instance illustrated by the connection established between CityLab@Inria and the CITRIS Social Apps Lab 3 , and especially ongoing collaboration toward the development of the AppCivist platform for large-scale public deliberation and civic action 4 . Similarly, strong relations have been established with the newly created Smart City Center at UC Berkeley, which is led by Prof. Pozdnukhov 5 . Beyond the “Data and Democracy” initiative, other CITRIS initiatives are of direct relevance to the theme of “Environmental sustainability”, especially through the development of advanced sensors. In addition to the above, Californian cities are strongly engaged in the open data and smart city trends 6 , thereby opening up venues for experimenting with the technologies emerging from CityLab@Inria’s research at the city scale. Last but not least, the strong focus of CITRIS and Inria on Innovation together with the open innovation trend are expected to favor the creation of innovation out of the undertaken research in smart cities. This is further supported by the accord that was signed in February 2014, between Inria, CITRIS and PRIME 7 . References: 1 http://www.consulfrancesanfrancisco.org/spip.php?article2822 2 http://democracy.citris-uc.org/ 3 http://socialappslab.com/about/ 4 http://socialappslab.com/?s=appcivist 5 http://www.its.berkeley.edu/btl/2013/fall/alexey 6 http://www.youtube.com/watch?v=_SL5kdVpT4Q&feature=youtu.be 7 http://citris-uc.org/news/2014/02/18/citris_inria_and_prime_sign_accord_smart_cities_research_and_open_innovation
  • 13. 13 Le positionnement du CEA-LETI sur l’internet des objets L’Internet des Objets : une nouvelle révolution industrielle qui nous attend ? L’histoire ne se répète pas, mais elle bégaye souvent… Il s'agit bien d'une nouvelle révolution industrielle qui s’ouvre à nous, semblable à la révolution de l'internet des années 1990. C’est la cristallisation à la fois de technologies clés (processeurs PC, processeurs graphiques, modems), de nouveaux standards (HTML, POP, …), et d’infrastructure (téléphone et réseau) qui a permis cette décennie de croissance, de nouveaux services, de gains de productivité. La même cristallisation est en train de se produire en ce moment pour l’internet des objets, avec des infrastructures (des passerelles internet dans chaque maison, le cloud, une base installée de smartphones), des standards (autour du M2M, le RFiD, des protocoles radio short et long range), et des technologies. Comme pour la précédente révolution, on s’attend à de nouveaux gains de productivité, de nouveaux services, et surtout de nouveaux business modèles qui s’ouvriront aux entreprises qui l'adopteront. Crédit photo : © iStockphoto & J. Gallon Nous définissons généralement l'IoT comme l'ensemble des technologies permettant de connecter un ensemble d’appareils du plus simple au plus sophistiqué. Ces composants IoT ont la capacité de capturer un nombre croissant d'éléments de leur contexte environnemental : température, qualité de l'Air, mouvement, présence... et aussi du contexte des utilisateurs : préférences, intentions, statistiques... Au-delà des avantages attendus en termes de performance ou d'optimisation des processus, l'IoT démocratise la façon dont les utilisateurs interagissent avec l'information, en temps réel et de manière contextuelle. Cette intégration efficace de l'information dans les processus existants, des usages professionnels jusqu’aux tâches quotidiennes des citoyens, dispose d’un immense potentiel pour rendre notre quotidien plus intelligent.JEAN-MICHEL GOIRAN LETI/DIR Corporate Business Development IoT
  • 14. 14 Quels marchés adopteront l’IoT le plus vite ? Tous les segments de marché sont concernés, mais les premiers bénéfices de l’IoT sont attendus dans le marché de la ville intelligente (les réseaux intelligents, le télé-relevé, les parkings intelligents…), de la sécurité (sécurité environnementale, des biens et des personnes), de la santé (notamment pour le traitement au domicile de pathologies chroniques, mais aussi avec tous les nouveaux produits de surveillance d’activité ou de paramètres physiologiques), sans oublier l’usine du futur, où les technologies issues de l’IoT pourraient apporter de nouveaux gains de productivité. Quels sont les défis technologiques que le CEA-Leti pourrait aider à relever. En tant que fournisseur global de technologies pour la microélectronique, les nanotechnologies et les technologies de l’information, le CEA-Leti peut fournir aux OEM, aux intégrateurs des avantages compétitifs forts pour créer des produits ou des processus plus sûrs, plus intelligents, plus efficaces et plus connectés. Le CEA-Leti se concentre sur les innovations et les ruptures technologiques dans les domaines suivants : - Les technologies pour l’électronique et les communications RF ultra-basse consommation qui permettront d’envisager des objets autonomes, puissants et communicants. - Les technologies de récupération d’énergie (en lien avec l’institut CEA-Liten) comme les systèmes photovoltaïques, par vibration, par thermo- électricité, ou par systèmes piézo-électriques qui permettront d’assurer l’indépendance et l’intégration des objets - Une très large offre de capteurs qui étendront les capacités de détection et les usages des objets communicants: o Offre MEMS et NEMS : faible consommation et capacité d’intégration o Gamme complète d’Imageurs : IR, Visible, THz, X, Gamma o Large gamme de capteurs chimiques o Solutions microfluidiques o Solutions de monitoring de structure. - Les technologies d’intégration comme les antennes miniatures, l’intégration 3D, l’électronique sur substrats flexibles, - Les technologies de connectivité qui permettront d’étendre les usages et d’intégrer ces objets avec ce nouveau «nuage » d’objets et de services : systèmes d’intégration de réseaux hétérogènes, protocoles sécurisés, fusion de données, algorithmes prédictifs, intégration avec les solutions BigData ou OpenData. Quel est le positionnement du LETI ? Grâce à ces solutions techniques, à son écosystème unique, et à son expérience dans des domaines d’applications extrêmement variés allant du spatial à l’électronique grand public, en passant par l’agriculture ou la santé, le CEA-Leti a pour vocation d’accompagner ses partenaires et clients pour l’intégration de ces technologies de ruptures. Il apportera également une vision globale des évolutions technologiques qui seront nécessaires pour tirer le meilleur parti de cette révolution de l’internet des objets. Enfin, le CEA-LETI organise sa revue annuelle technologique des 25 et 26 Juin prochains à travers le prisme de l’internet des objets, des capteurs au zéro- power. Cet événement est l’opportunité d’écouter des spécialistes des technologies, des analystes, des industriels qui viendront présenter leur vision de ce nouveau marché et des ruptures technologiques attendues. Réservez votre visite sur http://www.letidays.com/2014/
  • 15. 15 I3 ce sont trois interrogations pour échanger avec un expert sur l'environnement de l'entreprise. Nous nous intéressons dans ce numéro au monde des technologies relatives aux objets augmentés et aux "smart cities". Des technologies qui permettent aujourd’hui à chacun d’entre nous d’expérimenter des espaces sans distances et des temps sans délais. Classé dans « les 100 du Numérique » par le magazine l’Usine Nouvelle en avril 2012, Simon Richir est Professeur aux Arts et Métiers ParisTech (Ensam) et chef de rubrique réalité virtuelle pour les Techniques de l'Ingénieur. Co- fondateur et directeur scientifique de Laval Virtual, il dirige l’équipe de recherche « Presence & innovation » et le Master « Ingénierie du Virtuel et de l’Innovation ». Ses domaines d'enseignement et de recherche sont l’innovation technologique, les processus de conception de produits, la conduite de projets innovants et les nouveaux usages des nouvelles technologies comme la Réalité Virtuelle, la Réalité Augmentée, la Fabrication Additive (3D Printing). Kamitis : Pouvez-vous nous parler de vos travaux de recherche et les applications visées? S. RICHIR : Mes travaux de recherches concernent l’ingénierie du virtuel et les méthodes de conception des systèmes de réalité virtuelle et augmentée. En 1999, j’ai eu l’opportunité de participer à la création de LAVAL VIRTUAL : un concept proposé à François d'Aubert (Député-Maire, Ministre de la Recherche) par le Professeur Bernard Taravel, co-fondateur du Futuroscope, et moi-même. Laval Virtual a eu très vite un gros succès médiatique et populaire. Dans ce concept, nous avons impliqué le grand public et c’était en fait les prémices de ce que nous voyons maintenant avec l’open innovation et les Living Lab. C'est-à-dire que pour créer l’innovation, il faut essayer d’impliquer l’utilisateur final le plus tôt possible dans le processus. A Laval Virtual, nous accueillons beaucoup de chercheurs étrangers, notamment des scientifiques japonais de l’Université de Tokyo ou d’ailleurs qui viennent faire tester au grand public des concepts et des prototypes de produits (robots interactifs, écran sur lequel on souffle, etc). Ingénierie du virtuel : de la conception à l’application Pr Simon RICHIR Professeur aux Arts et Métiers ParisTech (Ensam) Co-fondateur et directeur scientifique de Laval Virtual " L’utilité, tout comme l’utilisabilité, l’accessibilité ou encore l’acceptabilité sont des notions majeures dans la conception " CONTACT: Simon.Richir@ensam.eu http://www.laval.ensam.eu/actualites-recherche.html http://www.laval-virtual.org/ http://3dliveproject.eu/wp/?lang=fr Une année nous avons vu une application où on soufflait sur un écran. L’interaction homme-machine se faisait par le souffle, quelques années après il y a eu la détection du souffle sur Nintendo DS. L’étude des nouveaux usages se fait sur des prototypes. Ainsi nous avons accueilli par exemple au début des années 2000 un dispositif, formé d’un ensemble de caméras face aux gens, qui capturait les mouvements puis on regardait si le « langage » des mouvements était facile à comprendre par les utilisateurs. C’était bien avant que la Kinect ne soit lancée sur le marché. I3
  • 16. 16 Le lien entre open innovation et technologies émergentes est très important. Avec mon équipe, on s’intéresse à comprendre comment une innovation, une idée va naître et comment on arrive à l’amener jusqu’au marché. Nous nous intéressons plus spécifiquement aux nouveaux usages et aux facteurs qui impactent l’expérience utilisateur dans un environnement immersif, en temps réel. Nous participons à ce sujet au projet 3DLive. Ce projet vise à développer et expérimenter une plateforme immersive de réalité mixte permettant d’étudier la capacité des nouvelles technologies de communication (e.g. mobile 4G) à supporter le rendu en temps réel d’expériences immersives. L’objectif principal de 3DLive consiste à explorer les technologies 3D collaboratives dans des environnements virtuels et réels pour permettre aux utilisateurs de se sentir présents et d’interagir en temps réel dans le cadre de pratiques sportives (ski, golf, jogging). Nous cherchons à améliorer le partage d’une expérience utilisateur et à aller plus loin qu’avec un simple téléphone ! Demain, vous êtes sur le marathon de New York, vous souhaitez partager cet instant avec les gens qui sont restés en France, vous vous connectez et ils auront l’impression de faire la course avec vous. Donc là, nous brisons les premiers verrous surtout de débit, de latence. Nous investiguons également le coté social et l’impact de l’environnement virtuel sur les interactions des individus. Est-ce que les relations sociales améliorent la présence dans les environnements virtuels ? Est-ce que le fait de partager une expérience avec une autre personne à travers le virtuel fera bénéficier cette personne d’une expérience attrayante ? Voilà des interrogations auxquelles nous cherchons à apporter des réponses. Kamitis : Vous avez beaucoup investigué des notions comme l’utilité ou l’utilisabilité, quel est l’intérêt de ces études ? S. RICHIR : Depuis plusieurs années, nous avons remarqué que certains développeurs ou industriels conçoivent des produits (des logiciels par exemple) et viennent en tester les possibilités technologiques et lever des verrous techniques notamment à Laval Virtual. Bien souvent, ces solutions restent sans applications industrielles concrètes, essentiellement parce qu’elles n’ont pas été conçues dans un objectif de transposition vers les entreprises. C’est la notion d’utilité qui a été négligée ! Or l’utilité, tout comme l’utilisabilité, l’accessibilité ou encore l’acceptabilité sont des notions majeures dans la conception. Nous étudions les représentations des notions d’"utilité" et de "besoin" chez les acteurs et disciplines associées au domaine de la conception : l’ingénierie, le design et l’ergonomie [1]. Pour cela, on s’appuie sur une équipe pluridisciplinaire (informaticiens, designers, ergonomes, psychologues,…) pour proposer une lecture fine et nuancée de l’usage de ces technologies et réseaux. Ces usages sont considérés comme des révélateurs de nouveaux enjeux sociaux, économiques et politiques de la société hypermoderne et connectée dans laquelle nous sommes désormais entrés. Kamitis : De quelle façon ces nouvelles technologies bouleverseront nos vies ? S. RICHIR : Je pense aux générations de joueurs qui ont l’habitude de naviguer dans des mondes 3D, et au fait que sur Internet on évolue encore en 2D. Donc, quand on va basculer en Web3D, il y aura un premier gap de franchi. Le grand obstacle actuel, c’est la navigation dans le web 3D avec ma souris. Comment intégrer des images 3D interactives dans le web (les sites, les blogs, …) ? Quelles solutions techniques pour que les pages web (en 3D) soient supportées par un large éventail de navigateurs ? Plusieurs solutions existent aujourd’hui sur le marché, mais aucune ne s'est imposée : les technologies, le matériel et les standards sont en perpétuelle évolution dans ce domaine, et les choix ne sont pas encore évidents. Je vous laisse imaginer le stockage de fichiers sur un écran en 3D : en profondeur comme si on rentrait dans une bibliothèque et qu’on se baladait dans des nuages de données ! Incomparable avec notre actuel affichage 2D avec les arborescences sur les fenêtres Windows ou Mac (classement dans des dossiers, sous-dossiers, …). La réalité virtuelle et augmentée est une fenêtre ouverte sur le futur. Elle offre des perspectives immenses dans différents domaines. Au service de l’urbanisme, elle permet de simuler l’aménagement d’espaces et de villes (voir l’encadré). A la croisée de l'informatique, des sciences numériques et de la médecine, se positionne l'imagerie médicale computationnelle. Cette dernière offre, par exemple, de nouvelles capacités de visualisation qui peuvent rendre le patient virtuellement transparent (réalité augmentée) pour le guidage de gestes complexes. Elle peut aussi faciliter l’entrainement du praticien à travers la simulation de gestes médicaux ou chirurgicaux (réalité virtuelle). [1] Emilie Loup-Escande, "Vers une conception centrée sur l’utilité : Une analyse de la co-construction participative et continue des besoins dans le contexte des technologies émergentes", Arts et Métiers ParisTech Angers, 2010.
  • 17. 17 Les 16e Rencontres Internationales des Technologies et Usages du Virtuel se tiennent du 9 au 13 avril 2014 à Laval (Mayenne). Le salon a accueilli des professionnels, des scientifiques et des étudiants venus présenter, tester et concrétiser leurs projets. L’édition de cette année est marquée par la présentation de deux applications innovantes, entièrement conçues par les chercheurs et étudiants des Arts et Métiers ParisTech (Ensam) : eLIV et AccesSim. Cette dernière a été récompensée par l’attribution du Laval Virtual Award dans la catégorie « Transport et Mobilité » jeudi 10 avril. - La plateforme mobile AccesSim, un simulateur dynamique créé pour simuler l’aménagement d’espaces adaptés à la mobilité des personnes handicapées. Très utile pour tout décideur en urbanisme désireux d’inclure la présence d’équipements ad hoc à sa construction d’infrastructures. Cette application permet de se mettre dans la peau d’une personne en fauteuil roulant pour s’adapter à sa perception. - L’application eLIV se présente comme une salle de réalité virtuelle d’un peu plus de 3 mètres sur 3. Chaque mur est un écran géant, et chacun des sièges est équipé de capteurs déterminant avec précision la position du spectateur. Les visiteurs auront le loisir d’expérimenter ce dispositif interactif grâce au jeu nippon Hole in the wall, une alternative au fameux Tetris.
  • 18. 18 Considérés comme la «troisième révolution de l'Internet», les objets augmentés vont bientôt s'imposer dans tous les domaines de la vie quotidienne et de l'entreprise. Pierrick THEBAULT, chercheur au MIT (Massachusetts Institute of Technology) et spécialiste de l’informatique ubiquitaire et de l’internet des objets, nous présente ses recherches concernant les objets et les villes du futur. Kamitis : Vous êtes spécialiste de l’informatique ubiquitaire et de l’internet des objets. Pouvez-vous nous présenter vos travaux de recherche ? P. THEBAULT : À l'intersection des sciences de la conception, de l'informatique ubiquitaire et des interactions homme-machine, mes travaux de recherches, pendant ma thèse de doctorat [1], ont porté sur l’étude de nouveaux types d'applications permettant d'interopérer les services du World Wide Web avec les produits du quotidien. Ces applications « orientées produit », capables de représenter, contrôler ou de compléter les fonctions d'artéfacts intégrant des capacités de traitement de l'information, remettent en cause les principes et conventions établies par les métiers de la conception. Elles préfigurent en effet l'émergence de produits, certes connectés à Internet, mais dont l'offre fonctionnelle peut également être améliorée et modifiée au cours du temps, après la fabrication et la commercialisation des produits, de manière à répondre aux besoins changeants des utilisateurs. Avec les produits « augmentés », la fonction devient alors une composante immatérielle et dynamique du produit, un matériau pour le design, qui va bouleverser le travail sur la forme et les interactions. Ils constituent selon moi une nouvelle étape dans l’histoire des produits, illustrée par la figure ci-dessous, dans la mesure où ils promettent de renouveler la manière dont nous accédons à l’information et dont nous interagissons dans le monde physique. Figure. Les transformations des produits au cours du temps. L’information comme nouveau matériau pour le design de produits Dr PIERRICK THEBAULT Chercheur– Designer au MIT SENSEable City Lab " Les enjeux soulevés par les technologies de l’Internet des Objets sur l’activité de conception et plus particulièrement sur le travail du designer sont immenses." CONTACT: PIERRICK@MIT.EDU http://senseable.mit.edu/
  • 19. 19 Kamitis : Vous venez de nous présenter les produits augmentés. Mais que sont donc les lieux augmentés ? P. THEBAULT : Si certaines applications s’articulent autour de produits spécifiques, d’autres trouvent un ancrage plus large sur l’environnement, dont elles vont superviser ou orchestrer les interactions. On peut ainsi envisager les lieux comme des entités virtuelles, des « sphères » d’information, à la fois « conscients » des produits qu’ils hébergent et « attentifs » aux actions des utilisateurs. Avec des chercheurs des Bell Labs, où j’ai réalisé ma thèse, nous avons créé une architecture logicielle [2] permettent d’agréger et de sécuriser les données produites au sein d’un espace donné, par des produits, capteurs ou des utilisateurs. Elle permet notamment de créer des représentations de l’évolution des caractéristiques des lieux telles que leur fréquentation, leur ambiance et les contenus dont ils font l’objet. En analysant les interactions qu’ont les utilisateurs avec des produits connectés ou des contenus délivrés par une sphère d’information, il est également possible d’identifier les actions les plus caractéristiques d’un lieu. Une fois rendues publiques et mutualisés, ces nouveaux « descripteurs » permettraient aux utilisateurs de découvrir de nouveaux endroits ou de décider où aller en fonction de leurs attentes ou de leurs besoins immédiats. De nouvelles cartes de la ville pourraient également être établies. Kamitis : Actuellement vos travaux de recherche au sein du MIT SENSEable City Lab portent sur la ville « sensible » pouvez-vous nous en dire plus ? P. THEBAULT : Les très larges corpus de données générées par les capteurs déployés à l’échelle de ville, les réseaux de téléphonie ou encore les terminaux bancaires permettent aujourd’hui, une fois agrégés, traités et analysés, de mieux comprendre les déplacements, les pratiques et les comportements des gens. Les technologies de l’Internet des Objets nous permettent aujourd’hui d’avoir un regard nouveau, en en temps réel, sur l’espace urbain. Cette capacité à « sonder » ou à « sentir » la ville à une échelle macroscopique ou au contraire microscopique suscite évidemment l’intérêt des urbanistes, mais aussi des architectes et des designers, pour qui il est possible de créer des systèmes adaptatifs, qui « répondent » ou « réagissent » à la présence et aux actions des habitants. Au delà des outils de visualisations que je conçois au sein du laboratoire, je m’intéresse également aux formes d’articulation entre le lieu et les applications, et à la manière de représenter de manière tangible, in-situ, les flux d’informations et les applications qui lui sont propres. Kamitis : La smart city ou la ville « sensible » sera-elle le standard pour les métropoles de demain ? P. THEBAULT : Cette ville sensible est déjà réelle dans beaucoup de pays. Des villes comme Rio de Janeiro, Singapour, Songdo en Corée du Sud ou encore Masdar dans les Emirats Arabes Unis en sont les exemples emblématiques. Je pense qu’il ne faut pas enfermer le concept de ville intelligente uniquement dans la dimension technologique. Certes, la ville de demain peut être conçue comme un gigantesque tableau de bord permettant de contrôler et d'optimiser les flux et processus logistiques urbains, mais elle doit surtout concilier les piliers socioculturels et environnementaux à travers une approche systémique, qui allie gouvernance participative et gestion optimisée des ressources. Kamitis : Quelles sont les barrières que vous voyez pour le déploiement des produits augmentés et de la ville intelligente ? P. THEBAULT : Les barrières qui freinaient jusqu’à présent l’intégration des systèmes de captation ou de traitement de l’information dans les villes ou les produits ont pratiquement disparues. Il est possible de déployer des capteurs ou des systèmes embarqués de manière discrète sinon invisible, mais c’est l’ « intelligence » dont nous les doterons qui transformera la ville. La question n’est plus « comment ? », mais « pour quoi faire ? ». Il appartient donc aux concepteurs, et en particulier aux designers, de s’assurer de l’utilité des systèmes ou des applications qui viennent augmenter le monde physique.
  • 20. 20 J’ai consacré une grande partie de mes travaux à l’étude de la perception de l’Internet des Objets par les utilisateurs. Les produits augmentés que j’ai prototypé pendant ma thèse résultent par exemple d’une démarche de co-création. Il me semble en effet nécessaire de confronter les gens à ces objets « intermédiaires » pour qu’ils prennent conscience des possibilités et de l’expérience qu’ils délivrent. Les utilisateurs seront d’ailleurs acteurs de la conception de ces produits, puisqu’ils pourront intervenir sur leurs fonctions à postériori. Il faut donc au maximum prendre en considération leurs attentes, leurs besoins et leurs réactions à chaque étape du processus de conception, sans pour autant abandonner toute prise de risque. Kamitis : Qu’en est-il de la problématique des données personnelles et du respect de la vie privée ? P. THEBAULT : Produits et lieux augmentés sont en effet une source inépuisable de données, qui pourront à la fois être utilisées pour étudier la ville ou les pratiques mais également être employées à des fins publicitaires. Il serait dommageable de freiner l’innovation sous couvert du respect de la vie privée. Je crois que le principal enjeu reste de comprendre la valeur de ces nouvelles données et la manière dont elles peuvent améliorer la société. Ce seront aux citoyens de débattre et d’accepter ou de refuser l’emploi de leurs données. Je pense qu’il faut donner l’opportunité aux gens de comprendre cette nouvelle économie de données, puis de laisser choisir s’ils veulent ou non y contribuer. La question de la contrepartie sera sans doute cruciale. Verra-t-on émerger des « donneurs » de données, acteurs de la collectivité, où des banques de données reversant une partie des revenus générés aux individus ? Kamitis : Quelles solutions pouvez vous imaginer pour la protection de ces données ? P. THEBAULT : Des acteurs politiques comme le Parti Pirate en Allemagne considèrent que l’architecture d’Internet n’est pas adaptée à cette nouvelle économie de données. Ils prônent l’utilisation de réseaux « peer to peer », visant à distribuer l’information dans des milliers d’ordinateurs plutôt que dans quelques serveurs appartenant à des entreprises ou à des institutions. Sans remettre en cause l’infrastructure existante, je crois dans le développement de serveurs locaux, intégrés ou connectés aux « box » des opérateurs télécom. Ces « clouds » privés, dédiés à la collecte et à l’analyse des données générées par tous les capteurs et produits présents dans l’environnement, constitueraient une alternative intéressante. Les données ne s’échapperaient pas vers des serveurs dont on ne connaît pas la localisation ni les administrateurs, mais resteraient confinées aux frontières physiques du lieu, et donc sous la gouvernance de son propriétaire. A plus court terme, je pense qu’il sera nécessaire de mettre en place, à l’échelle d’un service ou d’un état, des plateformes collaboratives de gestion des données. Ces dernières permettraient non seulement aux utilisateurs de visualiser les données les concernant, d’identifier la manière dont ils sont utilisés, et d’accepter ou refuser leur utilisation par des acteurs tiers. A l’instar des plateformes de « crowdfunding », il serait intéressant de laisser l’opportunité aux gens de partager leurs données personnelles avec des chercheurs, institutions ou entreprises engagées dans un projet scientifique ou social. Je suis confiant dans la capacité des citoyens à s’adapter aux innovations technologiques et à trouver l’équilibre entre vie privée et bénéfice collectif ! Références : [1] Pierrick Thebault, "La conception à l’ère de l’Internet des Objets : modèles et principes pour le design de produits aux fonctions augmentées par des applications", LAMPA - Laboratoire Arts et Métiers ParisTech d'Angers, 2013. [2] Pierrick Thebault, Dominique Decotter, Mathieu Boussard, Monique Lu, « Embodying services into physical places: Toward the design of a mobile environment browser », ACM Transactions on Interactive Intelligent Systems (TiiS), 2013.
  • 21. 21 La "Smart city" incarne l’innovation et la technologie au service des citoyens. Qu’il s’agisse de transports, de connectivité, de sécurité, etc., ce concept recouvre les solutions pour les métropoles du futur. VALERIE ISSARNY, directrice de recherche à l’Inria Paris-Roquencourt, nous décrit les efforts entrepris pour la conception et le développement de la ville intelligente. Kamitis : Depuis plusieurs années, vous vous intéressez aux problématiques liées à l’internet du futur. Pouvez-vous nous présenter vos travaux de recherches ? V. ISSARNY : Les recherches des équipe-projets Inria ARLES et MiMove qui lui succède sont centrées sur l’étude d’architectures logicielles de systèmes distribués exploitant les technologies de communication du futur et particulièrement les communications mobiles. L’objectif est de développer des méthodes et outils pour faciliter le développement d’applications basées sur ces technologies. Nous nous intéressons plus spécifiquement aux applications dîtes ubiquitaires dont la notion a été introduite dans les années 90 mais qui ne se retrouvent dans notre quotidien que depuis récemment. L’Internet du futur, incluant l’Internet des objets, joue en effet un rôle essentiel dans le développement de l’informatique ubiquitaire de par la connectivité accrue des équipements et l’intégration des mondes physiques et virtuels, qui sont rendues possibles. Nos dernières recherches sont ainsi focalisées sur l’interopérabilité des systèmes de l’Internet du futur ou encore l’Internet des objets mobiles que nous voyons comme une composante importante de l’Internet du futur. Nous développons pour ce faire de nouveaux algorithmes et protocoles pour faire face à la croissance massive de l’hétérogénéité, de la dynamique mais également de l’échelle des systèmes distribués considérés. Par exemple, ne considérant que le sujet de l’interopérabilité, nous étudions des solutions à la traduction de protocoles à la volée. Kamitis : Quelle est l’importance de ces recherches au niveau fondamental et au niveau applicatif ? V. ISSARNY : Comme suggéré précédemment, les sujets de recherche que nous étudions sont essentiels pour un développement effectif de l’Internet du futur et en particulier de l’Internet des objets mobiles qui est, selon nous, appelé à devenir une composante prépondérante de l’Internet du futur. En effet, la diversité des systèmes constituant l’Internet du futur requiert de repenser les solutions à l’interopérabilité car l’approche classique basée sur les standards est trop limitative. Objectif : Villes intelligentes Dr VALERIE ISSARNY Directrice de recherche au centre de recherche Inria Paris-Rocquencourt, Dr Valérie Issarny Directrice de recherche au centre de recherche Inria Paris-Rocquencourt, " Nous nous intéressons aux applications liées à la « ville intelligente » et plus particulièrement aux applications qui impliquent le citoyen dans la gouvernance de la cité" CONTACT: valerie.issarny@inria.fr https://www.rocq.inria.fr/arles/index.php/members/94-valerie-issarny " Nous nous intéressons aux applications liées à la « ville intelligente » et plus particulièrement aux applications qui impliquent le citoyen dans la gouvernance de la cité"
  • 22. 22 De même, les infrastructures logicielles pour les systèmes de l’Internet des objets mobiles doivent prendre en compte le facteur d’échelle qui va bien au delà de l’Internet que nous connaissons aujourd’hui ; il suffit pour s’en convaincre de considérer le nombre croissant de dispositifs mobiles et des capteurs qu’ils embarquent. Il est également nécessaire de prendre en compte les ressources limitées de nombreux équipements de l’Internet des objets. Enfin, nous considérons que les capteurs mobiles doivent être non seulement physiques mais également sociaux, c’est-à- dire, pouvoir refléter la perception du monde physique par les usagers pour obtenir une information tant qualitative que quantitative sur l’environnement. Pour répondre à ces défis, nous étudions notamment des protocoles probabilistes mais également une caractérisation sémantique des systèmes pour permettre leur composition. Les systèmes logiciels de l’Internet du futur ouvrent la voie à de nombreuses applications innovantes. Pour notre part, nous nous intéressons aux applications liées à la « ville intelligente » et plus particulièrement aux applications qui impliquent le citoyen dans la gouvernance de la cité, ce qui est rendu possible par l’Internet des objets mobiles couplant capteurs physiques et sociaux. Ces applications vont des applications encourageant l’utilisation des transports publics à des applications de monitorage des nuisances urbaines ou encore des applications spécifiques d’associations citoyennes. Nous sommes notamment fortement impliqués dans l’initiative Inria sur les villes numériques, appelée CityLab@Inria, qui vise l’étude et l’intégration des nouvelles technologies du numérique pour la ville intelligente, des technologies réseaux aux infrastructures logicielles distribuées et solutions à la gestion et analyse des données collectées. Notre contribution est plus spécifiquement axée sur l’étude des infrastructures logicielles distribuées pour les systèmes urbains qui intègrent nos recherches évoquées plus haut. Nos résultats récents sur ces sujets ont été largement développés dans le cadre de partenariats européens grâce aux programmes cadres de la commission et notamment FP7. Nous avons donc développé les bases d’une nouvelle approche à l’interopérabilité dans le cadre du projet FET CONNECT ainsi qu’une infrastructure logicielle distribuée pour l’Internet du futur dans le cadre du projet CHOReOS. Kamitis : D’après vous, quels sont les enjeux et les défis que l’internet du futur pourra relever demain ? V.ISSARNY : Nous n’en sommes qu’à l’émergence de solutions et les verrous scientifiques et technologiques restent nombreux. Il ne faut pas non plus négliger l’importance des expérimentations et notamment des expérimentations à l’échelle réelle. Si l’on prend par exemple le domaine des villes intelligentes, nous ne pourrons évaluer les solutions proposées que si elles sont effectivement déployées. Ceci est également impératif pour comprendre les évolutions nécessaires pour répondre au mieux aux besoins du citoyen. Il ne faut pas non plus sous-estimer les risques possibles associés au développement des villes intelligentes comme les atteintes au respect de la vie privée qui peuvent en découler. Enfin, il est impératif que les recherches se fassent en partenariat étroit avec les différents acteurs concernés.
  • 23. 23 "Si nous ne voulons pas nous passer du progrès, il faut désormais savoir l’interroger". FRANCIS JAUREGUIBERRY, Professeur de sociologie et directeur du laboratoire SET (Société Environnement Territoire), nous propose une lecture fine et nuancée des nouvelles technologies et des usages qui les accompagnent. Il nous invite à une réflexion autour des enjeux sociétaux et économiques de la société hypermoderne et connectée d’aujourd’hui. Kamitis : Vos travaux de recherche concernent les usages des technologies de communication et mettent l'accent sur la mesure des changements que ces usages ont induits notamment au niveau des règles sociales. Pouvez-vous nous présenter vos travaux de recherches en quelques mots ? F. JAURÉGUIBERRY : Depuis maintenant plus de vingt ans, je travaille sur les usages de technologies de communication ou, plus précisément, sur les gros utilisateurs de ces technologies, ceux qui s’en servent de façon intense. J’ai travaillé avec les premiers utilisateurs des téléphones portables, puis des smartphones et des tablettes ainsi qu’avec ceux qui passent beaucoup de temps sur Internet. Ce sont des technologies dont les applications vont plus vite que les réflexions sociologiques, juridiques et même philosophique sur leurs effets, sur la façon dont elles transforment notre rapport à la vie quotidienne. C’est pour cela que j’ai toujours employé des méthodologies très intervenantes pour savoir ce qui était en train de changer sous nos yeux afin d’essayer, avec les acteurs de ce changement, d’anticiper les nouveaux enjeux qui se dégageaient. Par exemple, il est très vite apparu que les portables étaient des outils qui permettaient un nouveau rapport au temps, plus rentable et efficace, dans lequel la gestion au fil de l’eau prenait une autre dimension. Cette entrée dans une société de l’immédiateté télécommunicationnelle est vécue de façon très positive au niveau économique car synonyme de raccourcissement des délais, d’accélération des rythmes et de généralisation de la simultanéité. Dans la guerre économique que se livrent les acteurs de la chrono- compétitivité, elles sont converties en de véritables armes. Mais elles ont aussi produit des situations non voulues, inattendues, qui se sont révélées être négatives : accumulation incontrôlable d’informations interdisant leur traitement efficace, dispersion au travail, sentiment de manque de temps et que l’urgence remplace la réflexion. Tension, stress et parfois même anxiété apparaissent alors, conduisant certains vers des formes de souffrance au travail, de pathologies psychosomatiques et même de burn-out. Technologies de la communication : nouvelle donne anthropologique Pr FRANCIS JAURÉGUIBERRY Directeur du laboratoire SET (Société Environnement Territoire – CNRS UMR 5603) Dr Valérie Issarny Directrice de recherche au centre de recherche Inria Paris-Rocquencourt, CONTACT: francis.jaureguiberry@univ-pau.fr http://set.univ-pau.fr/live/ http://web.univ-pau.fr/~jauregui/ " Les terrains d’intervention nourrissent la réflexion sociologique, et le regard éloigné du sociologue révèle très souvent des disfonctionnements que les acteurs de l’entreprise ou du service qui sont sur le pont ne peuvent ou ne veulent pas voir. "
  • 24. 24 Je ne suis pas un sociologue de bureau et j’interviens très souvent dans des entreprises : ce n’est qu’en allant sur le terrain que ce thème de nouvelle temporalité est apparue. Ce n’est par exemple qu’en interwievant des cadres, en faisant le point avec eux sur leur emploi du temps, les taches traitées, la porosité entre vie professionnelle et vie privée, etc. que j’ai pu, concrètement mesurer l’individualisation de problèmes qui devraient en fait être traités collectivement. Ça a l’air tout bête, mais le sociologue arrive, constate que chacun se plaint séparément de la même chose, par exemple du flux des e-mails ou des appels téléphoniques incessants qui les empêchent de se concentrer sur une tâche, mais que rien n’est fait, la situation semblant leur échapper. Les terrains d’intervention nourrissent la réflexion sociologique, mais en retour, le regard éloigné du sociologue révèle très souvent des disfonctionnements que les acteurs de l’entreprise ou du service qui sont sur le pont ou le nez dans le guidon ne peuvent ou ne veulent pas voir. Je crois beaucoup à cet échange entre chercheurs et entreprise dans le domaine des sciences humaines trop souvent négligées mais dont l’objet est pourtant notre quotidien. Kamitis : Aujourd’hui, l’individu est assimilé à un « être numérique » interconnecté qui évolue dans un monde virtuel. Quels sont vos constats concernant l’évolution de cet être au cœur des nouvelles logiques d’échange et d’exposition ? F. JAURÉGUIBERRY : Je parlais à l’instant de l’accélération du temps : les choses vont « plus vite », les délais sont « plus courts », les flux sont « tendus » et les gens « pressés ». Les technologies de communication sont les outils de cette accélération. Mais elles nous introduisent aussi, sans que nous en prenions vraiment la mesure, dans un nouveau monde. Un monde où la réalité ne se contente pas d’être là, face à nous, mais un monde où, désormais, cette même réalité nous parle et nous informe sur son état. Capteurs et puces électroniques distribués dans notre environnement physique, RFID collés aux objets, systèmes de géolocalisation nous informent en temps réel sur l’état de ce qui nous entoure, de la circulation, de la pollution de l’air, du nombre de taxis ou de vélos disponibles dans telle ou telle station, des services alentours. De façon désormais banale, il est possible de savoir exactement où l’on se situe dans une ville, combien de mètres il faut parcourir jusqu’à la prochaine bouche de métro, où se trouve le restaurant végétarien le plus proche ou encore de savoir quels sont les horaires des prochaines séances des films devant être projetés dans la demi-heure qui suit dans un rayon de 500 mètres. Plusieurs chercheurs du laboratoire du CNRS que je dirige (le SET) travaillent sur ce thème, sur la géolocalisation, sur la réalité augmentée et, là aussi, essaient d’anticiper des enjeux sociaux avant que des situations non voulues se convertissent en irréversibilités sur lesquelles il serait ensuite très difficile de revenir. Par exemple, la possibilité de faire des choix individuels synonymes d’optimisation et d’économie à partir de données collectives elles-mêmes basées sur la collecte et l’interprétation des traces laissées par chacun rend nos villes plus intelligentes. Mais dans le même temps, la transparence à laquelle peuvent conduire ces mêmes technologies de géolocalisation et de localisation des activités représente un indéniable danger. Dans la société de risque dans laquelle nous sommes, ceux liés au détournement des données, à leurs manipulations à des fins politiques ou commerciales sont en effet grands. Une nouvelle inquiétude est en train de clairement apparaitre et, si nous ne voulons pas nous passer du progrès, il faut désormais savoir l’interroger dans ses potentiels effets négatifs. L’avenir appartient sans doute à ceux qui, en la matière, sauront anticiper ces craintes et attentes en terme de droit individuel au silence, de droit à l’opacité et à l’anonymat, et sauront les traduire en applications, systèmes et règles. Kamitis : Quels sont les enjeux de ces changements que vous étudiez en termes économiques, politiques et sociaux? Enormes, les enjeux sont énormes. Economiquement, c’est une évidence. Mais en terme de société aussi, et je pense même que l’on peut parler de nouvelle donne anthropologique. Car ces technologies semblent répondre (en partie évidemment) à un désir vieux comme l’humanité, celui d’ubiquité, et à un fantasme vieux comme l’individu, celui du contact permanent avec les êtres aimés. Ubiquité, immédiateté et permanence par-delà le principe de réalité de ce monde qui sépare, éloigne et isole. Quel énorme changement, effectivement ! Toute la question est de savoir désormais non pas seulement comment on utilise ces technologies mais comment on les maîtrise. Je viens de coordonner une vaste recherche réunissant une vingtaine de chercheurs appartenant à cinq laboratoires différents sur la déconnexion. Cela peut sembler paradoxal pour quelqu’un qui s’intéresse avant tout aux gros utilisateurs. Et bien, justement, c’est parmi ces mêmes gros utilisateurs qu’apparaît le plus, comme en creux, un désir de déconnexion.
  • 25. 25 Le désir de déconnexion apparait dans des situations de saturation, de trop-plein informationnel, de débordement cognitif, de harcèlement ou de surveillance dans lequel l’individu se sent dépassé ou soumis. Dans les cas extrêmes de burn out, le rejet des TIC fait partie intégrante d’une attitude de défense ultime qui permet à l’individu de survivre quand il ne peut plus lutter. Mais ces cas sont rares et relèvent moins d’une déconnexion volontaire cherchant à maîtriser des flux communicationnels que d’une déconnexion mécanique visant à ne pas se laisser emporter par un afflux ingérable. À l’image d’un disjoncteur qui saute lorsque l’intensité électrique devient trop importante, la déconnexion est ici purement réactive. Les conduites de déconnexion volontaires se situent toutes en deçà de telles réactions extrêmes. Elles visent précisément à éviter de rentrer dans la zone rouge du burn out et de subir des situations de surcharge informationnelle insupportables. Face à un nombre d’e-mails ou de SMS manifestement trop grand pour être raisonnablement gérés, à un nombre d’appels téléphoniques trop fréquents pour ne pas être perturbateurs, à la dimension trop chronophage de l’entretien des réseaux sociaux sur Internet, des tactiques de réajustement visant à reprendre la main dans la gestion de son temps et de ses occupations apparaissent. Ces pratiques ne sont pas synonymes d’une déconnexion totale ou d’un rejet global des TIC, loin de là, mais d’une déconnexion ponctuelle, partielle et située gage de leur maîtrise et de leur usage raisonné. Mais la possibilité même d’adopter ces conduites est nettement inégalitaire. Il y a des situations (professionnelles mais aussi existentielles) où certains n’ont justement pas la possibilité de se déconnecter ne serait que pour quelques minutes, mais doivent au contraire répondre immédiatement. Dit autrement : certains ont le pouvoir de se débrancher et d’autres ont le devoir de rester branchés. L’obligation de rester branché, et donc de subir la tension d’une urgence potentielle, conduit à poser l’hypothèse de l’apparition d’une « nouvelle richesse » et d’une « nouvelle pauvreté » parmi les branchés. Les nouveaux pauvres des télécommunications sont ceux qui ne peuvent pas échapper à l’obligation de répondre immédiatement, et qui doivent donc vivre dans l’urgence et dans l’interpellation continue, et les nouveaux riches sont ceux qui ont la possibilité de filtrer et d’instaurer de la distance vis-à-vis de cette interpellation.
  • 26. 26