1. NOTE EXPLICATIVE
N° 19
LES CHEMINS RURAUX
(Première partie)
Aux termes de l'article L.161-1 du code rural, "les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux
communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie
du domaine privé de la commune."Les contestations qui peuvent être élevées par toute partie intéressée
sur la propriété ou la possession totale ou partielle des chemins ruraux sont jugées par les tribunaux de
l'ordre judiciaire" (article L.161-4 du code rural).
1. LE STATUT DES CHEMINS RURAUX
Trois critères cumulatifs permettent de qualifier un chemin de "rural".
1) Premier critère : La propriété de la commune
Lorsque le maire ne détient aucun titre de propriété, il doit prouver l'appartenance du chemin
rural à la commune :
- Soit il invoque l'affectation du chemin à l'usage du public. En effet, suivant l'article L.161-
3 du code rural, "Tout chemin affecté à l'usage du public est présumé, jusqu'à preuve du
contraire, appartenir à la commune sur le territoire de laquelle il est situé".
- Soit il réunit les éléments de preuve permettant d'établir cette propriété : inscription sur le
tableau récapitulatif des voies communales et des chemins ruraux en préfecture,
mention sur les documents cadastraux… ;
- Soit il s'appuie sur la prescription acquisitive, c'est-à-dire que lorsqu'une commune s'est
comportée en propriétaire durant trente ans, le chemin rural est réputé lui appartenir.
Cependant, la prescription trentenaire peut également être invoquée par un riverain, s'il
prouve qu'il s'est occupé de son entretien, d'autant plus si le chemin n'est plus affecté à
l'usage du public. Inversement, une personne soutenant être propriétaire d'un fonds peut
invoquer, à titre de présomption, vis-à-vis des tiers, les titres translatifs ou déclaratifs de
propriété. La preuve de la propriété est indépendante de la question de l'opposabilité des
actes aux tiers qui n'en seraient pas partie (Cour de cassation 2 juillet 1997 n°95-0.190,
Mme Eisenberg).
2. 2) Deuxième critère : L'affectation à l'usage du public
Cette affectation peut être professionnelle (agricole, forestière) ou d'agrément (randonnée,
pêche, chasse…). L'article L.161-2 du code rural prévoit que "l'affectation à l'usage du public
peut s'établir notamment :
- par la destination du chemin, jointe au fait d'une circulation générale et continue,
- ou à des actes réitérés de surveillance et de voirie de l'autorité municipale", comme par
exemple, des panneaux de signalisation ou des arrêtés municipaux limitant la circulation
à certains types de véhicules.
- "La destination du chemin peut être définie notamment par l'inscription sur le plan
départemental des itinéraires de promenade et de randonnée."
A NOTER
En cas de contestations sur l'affectation à l'usage du public, le juge conserve un pouvoir
d'appréciation et est totalement libre dans le choix des indices permettant de déterminer la
nature juridique des chemins (Cour de cassation 24 mai 1965).
NE PAS CONFONDRE
Le chemin rural ne se confond pas avec le chemin d'exploitation qui est utilisé exclusivement
pour la desserte entre divers fonds et qui est, en l'absence de titre, présumé appartenir aux
propriétaires riverains (cf article L.162-1 du code rural). Il appartient au juge de rechercher si le
chemin litigieux sert exclusivement à la communication entre les fonds ou à leur exploitation
pour se prononcer sur la nature du chemin (Cour de cassation 2 juillet 1997 n°95-16.706 Mme
Lelandais).
3) Troisième critère : L'absence de classement en voie communale
Les voies communales appartiennent au domaine public routier communal (cf article L.141-1 du
code de la voirie routière). Les chemins ne doivent pas se situer dans une zone urbanisée car,
dans ce cas, ils constituent une voie communale (CE 11 mai 1984 Epoux Arribey).
4) Les caractéristiques techniques du chemin rural
"Les caractéristiques techniques générales des chemins ruraux sont fixées de manière à
satisfaire, suivant les conditions imposées par la géographie des lieux et les structures agraires,
à la nature et à l'importance des divers courants de desserte des terres et bâtiments
d'exploitation tels qu'ils peuvent être déterminés dans le cadre d'une prévision d'ensemble des
besoins de la commune, compte tenu des cultures pratiquées et des matériels utilisés.
Le tracé, le profil en long et le profil en travers de tout chemin rural construit postérieurement au
3 décembre 1969 doivent être arrêtés en fonction des dessertes et communications à assurer
et dans le souci de le réaliser avec des caractéristiques homogènes. La chaussée et les
ouvrages d'art doivent pouvoir supporter avec un entretien normal les efforts dus aux véhicules,
matériels et modes de traction couramment utilisés dans la commune.
Sauf circonstances particulières appréciées par le conseil municipal dans une délibération
motivée, aucun chemin rural ne doit avoir une largeur de plate-forme supérieure à 7 mètres et
une largeur de chaussée supérieure à 4 mètres. Des surlargeurs doivent toutefois être
ménagées à intervalles plus ou moins rapprochés pour permettre le croisement des véhicules
et matériels lorsque, sur des sections données, la nature du trafic le justifie. Au passage sous
les ouvrages d'art, la largeur de la plate-forme doit être au moins égale à celle de la plate-forme
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3. en section courante, mais sans pouvoir dépasser le maximum de 7 mètres prévu à l'alinéa
précédent.
Le tracé des chemins ruraux doit être aussi rectiligne que possible et le rayon des courbes en
plan aussi grand que les circonstances locales le permettent. La valeur des déclivités doit être
réduite au minimum, compte tenu de la configuration des lieux. Les profils en long et en travers
doivent être établis de manière à assurer l'écoulement des eaux pluviales et l'assainissement
de la plate-forme.
Sous les ouvrages d'art qui franchissent un chemin rural, un tirant d'air d'au moins 4,30 mètres
doit être réservé sur toute la largeur de la chaussée. Les surcharges de calcul et d'épreuve des
ouvrages d'art supportant les chemins ruraux sont déterminés comme pour les voies
communales (article R.161-8 du code rural).
5) La pratique de la randonnée
Après avis des conseils municipaux intéressés, le conseil général peut établir un plan
départemental des itinéraires de promenade et de randonnée pédestre ou motorisée.
- Randonnée pédestre
Les itinéraires inscrits au niveau du plan départemental peuvent emprunter des voies publiques
existantes, des chemins relevant du domaine privé du département, les emprises de la
servitude destinée à assurer le passage des piétons sur les propriétés riveraines du domaine
public maritime. Ils peuvent également, après délibération des conseils municipaux concernés,
emprunter des chemins ruraux et, après conventions passées avec les propriétaires intéressés,
emprunter des chemins ou des sentiers appartenant à l'Etat, à d'autres personnes publiques ou
à des personnes privées. Ces conventions peuvent fixer les dépenses d'entretien et des
signalisations mises à la charge du conseil général. Suivant l'article L.361-1 du code de
l'environnement, toute aliénation d'un chemin rural susceptible d'interrompre la continuité d'un
itinéraire inscrit sur le plan départemental doit, sous peine de nullité, comporter le maintien ou le
rétablissement de cette continuité par un itinéraire de substitution. Toute opération publique
d'aménagement foncier doit aussi respecter le maintien de cette continuité.
- Randonnée motorisée
Les itinéraires inscrits à ce plan départemental doivent emprunter les voies classées dans le
domaine public routier de l'Etat, des départements et des communes, les chemins ruraux et les
voies privées ouvertes à la circulation publique des véhicules à moteur. La création et l'entretien
des itinéraires inscrits sur le plan sont à la charge du conseil général. Néanmoins, l'accès de
certaines voies peut être interdit :
- par arrêté motivé du maire, en application de ses pouvoirs de police de la circulation (cf
article L.2213-4 du CGCT) ;
- par arrêté motivé du préfet, après une mise en demeure adressée au maire et restée
sans résultat (cf article L.2215-3 du CGCT).
L'interdiction doit se justifier par le fait que la circulation est de nature à compromettre la
tranquillité publique, ou la protection des espèces animales ou végétales, ou la protection des
espaces naturels, des paysages ou des sites ou leur mise en valeur à des fins esthétiques,
écologiques, agricoles, forestières ou touristiques. Ces dispositions ne sont pas applicables aux
véhicules utilisés pour assurer une mission de service public et ne peuvent s'appliquer de façon
3
4. permanente aux véhicules utilisés à des fins professionnelles de recherche, d'exploitation ou
d'entretien des espaces naturels.
6) La protection pénale
"L'autorité municipale est chargée de la police et de la conservation des chemins ruraux" (article
L.161-5 du code rural). Cependant, il ne peut pas infliger de contraventions de voirie puisqu'ils
appartiennent au domaine privé de la commune (Cour de cassation 13 mars 1963 Labrune).
Par contre, lorsque l'infraction est constituée par une entrave à la libre circulation sur la voie
publique à laquelle sont assimilés les chemins ruraux (cf article 644-2 du code pénal), le maire
peut infliger une contravention de 4ème classe et peut ordonner la confiscation de la chose qui a
servi ou était destinée à commettre l'infraction. De plus, le maire exerce l'ensemble de ses
pouvoirs de police rurale sur les chemins ruraux, comme en cas de détérioration d'arbre ou de
dépôt de cadavre d'animaux morts.
2. LES POUVOIRS DE POLICE ET DE CONSERVATION
1) L'entretien "normal" des chemins ruraux
"La chaussée et les ouvrages d'art doivent pouvoir supporter avec un entretien normal les
efforts dus aux véhicules, matériels et modes de traction couramment utilisés dans la
commune" (article R.161-8-1 alinéa 3 du code rural). Cependant, la jurisprudence ne considère
pas qu'il s'agisse d'une obligation d'entretien mise à la charge de la commune. Pour le Conseil
d'Etat, "aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à la commune l'obligation
d'entretenir les chemins ruraux (CE 30 juillet 1997 n°160935 M.Parisse). En outre, l'article
L.2321-2-35 du CGCT ne mentionne pas l'entretien des chemins ruraux au titre des dépenses
obligatoires de la commune.
Quelques précisions doivent être apportées au principe posé par le Conseil d'Etat :
- si les communes ne sont pas responsables des dommages résultant pour les riverains et
les usagers de ce que les chemins ruraux seraient impraticables, ce n'est plus le cas
dans l'hypothèse où, postérieurement à leur incorporation dans la voirie rurale, elles
auraient exécuté des travaux destinés à en assurer ou à en améliorer la viabilité et ainsi
accepté d'en assumer l'entretien (CAA Bordeaux 8 mars 1999 n°97BX01339 Commune
d'Alos) ;
- si un évènement de force majeure est à l'origine d'un dommage, la commune ne devrait
pas voir sa responsabilité recherchée, sauf en cas de faute caractérisée dans l'exercice
des pouvoirs de police s'il est démontré que les dégâts résultent d'une carence de la
commune dans la prise des mesures préventives simples (réponse ministérielle n°4167
JO Sénat 14 juillet 1994 p.1772).
Exemples :
- Absence de responsabilité de la commune
La présence d'un produit herbicide sur le bord du chemin rural emprunté par M.X avec son
troupeau ne dépasse pas les risques auxquels les usagers de cette voie peuvent normalement
s'attendre et contre lesquels il leur appartient de se prémunir (CE 28 février 1997 n°164140
Pellier) ;
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5. Le défaut d'entretien au regard de l'état de vétusté, puis l'effondrement d'un pont faisant partie
intégrante d'un chemin rural dont il reliait les parties séparées de façon à assurer la continuité
du passage en permettant le franchissement du cours d'eau, n'engage pas la responsabilité de
la commune, celle-ci ne pouvant être engagée sur le fondement du défaut d'entretien normal
(CAA Bordeaux 26 mai 1999 n°96BX00675, Bosc).
- Partage de responsabilités avec des tiers
Malgré les risques liés à la situation naturelle des lieux, si les inondations répétées trouvent leur
origine dans l'aménagement par la commune d'un chemin rural situé en amont de ce domaine,
la commune est partiellement exonérée de la responsabilité des dommages subis par les
requérants du fait de leur comportement fautif (CE 30 décembre 1998 n°187173 M. Guion et
société civile GAEC des Espers). Dans cette affaire, le propriétaire et le locataire du domaine
ont été négligents en s'abstenant de protéger leurs terres contre les inondations par un
dispositif approprié et en entretenant, au contraire, la retenue d'eau créée à cet effet,
notamment par un bassin de filtration des eaux situé en amont de leurs fonds (CAA Lyon 13
février 1997 n°95LY0142 Commune de Sainte-Tulle).
2) Le financement de l'entretien
Les dépenses d'entretien des chemins ruraux peuvent être inscrites dans le cadre du budget
communal au titre des travaux correspondants. Dans le cas où les ressources de la commune
seraient insuffisantes, trois régimes de financement sont prévus par le code rural :
- des souscriptions volontaires en espèces et en nature peuvent être offertes aux
communes pour le financement des travaux projetés sur les chemins ruraux (article
R.161-5 du code rural). Le conseil municipal se prononce sur les propositions des
souscripteurs. La publication de la délibération vaut avis d'acceptation ou de refus de
souscription ;
- l'instauration de la taxe (article L.161-7 du code rural) qui permet de financer les travaux
et l'entretien de chemins ruraux qui, antérieurement à leur incorporation dans la voirie
rurale, étaient entretenus par une association foncière ou une association syndicale
autorisée, et ceux qui avaient été créés dans le cadre d'une opération de
remembrement. La taxe est répartie en fonction de l'intérêt de chaque propriété aux
travaux. La demande de décharge d'une taxe de remembrement et d'une indemnité en
raison d'un prétendu manque d'entretien des chemins ruraux ne peut être que rejetée si
elle est insuffisamment motivée (CAA Nancy 31 décembre 1997 n°93NC00397 M.
Bouvet) ;
- à chaque fois qu'une voie communale entretenue en état de viabilité, est habituellement
ou temporairement empruntée par des véhicules dont la circulation entraîne des
détériorations anormales, ou bien dégradée par des exploitations de mines, de carrières,
de forêts ou de toute autre entreprise, une contribution spéciale peut être imposée aux
entrepreneurs ou propriétaires (article L.161-8 du code rural). Elle peut être acquittée en
argent ou effectuée en nature. Son montant est proportionné à la dégradation causée, et,
à défaut d'accord amiable, la contribution est fixée, sur demande de la commune, par le
tribunal administratif. La participation financière demandée aux propriétaires de terrains
viticoles (afin de financer des dépenses pour la protection hydraulique du village rendues
nécessaires par les inondations et les coulées de boues facilitées par le développement
des cultures viticoles sur les coteaux environnants) ne constitue pas une contribution
spéciale dès lors qu'elle n'a pas pour objet de remédier à la dégradation des chemins
ruraux (CE 17 janvier 1996 Commune d'Hermonville).
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6. 3) Personne supportant l'entretien
Du fait de la prescription acquisitive, un riverain du chemin rural peut en devenir propriétaire si,
pendant trente ans, il en a assuré l'entretien. Par contre, le maire interrompt toute prescription
trentenaire s'il exerce ses pouvoirs de police.
Aux termes de l'article L.162-1 du code rural, "Les chemins et les sentiers d'exploitation sont
ceux qui servent exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation. Ils
sont, en l'absence de titre, présumés appartenir aux propriétaires riverains, chacun en droit soi,
mais l'usage en est commun à tous les intéressés. L'usage de ces chemins peut être interdit au
public." Par un jugement du 7 mars 2001, Commune d'Egliseneuve-d'Entraigues, la Cour de
cassation considère que "bien que la commune ait effectué des travaux partiels, et ne
concernant pas la partie du chemin qui ne desservait que les exploitations, le chemin n'était
fréquenté que par les riverains qui l'entretenaient." "Constatant qu'au-delà de la propriété du
requérant le chemin était en état d'abandon, les juges ont considéré que le chemin constituait
un chemin d'exploitation".
Si un chemin rural n'est pas entretenu par la commune, le conseil municipal doit délibérer sur la
proposition émise de se charger des travaux nécessaires pour mettre ou maintenir la voie en
état de visibilité ou la demande d'augmentation de la taxe prévue par l'article L.167-7 du code
rural, provenant :
- soit de la moitié plus un des intéressés représentant au moins les deux tiers de la
superficie des propriétés desservies par le chemin ;
- soit des deux tiers des intéressés représentant au moins les deux tiers de la superficie
des propriétés desservies par le chemin.
Le conseil municipal doit délibérer dans le mois sur cette proposition (article L.161-11 du code
rural). S'il ne l'accepte pas ou s'il ne respecte pas ces délais, les propriétaires peuvent
constituer une association syndicale. Le chemin reste ouvert au public sauf délibération
contraire du conseil municipal ou de l'assemblée générale de l'association syndicale. D'autre
part, si les chemins ruraux résultent d'une opération de remembrement, ils peuvent être
entretenus par une association foncière constituée entre les propriétaires des parcelles
remembrées (articles L.123-8, 123-9, L.133-1 et suivants du code rural).
4) La conservation et la surveillance des chemins ruraux
Il s'agit de maintenir les chemins ruraux dans un état conforme à leur utilisation et de préserver
leur intégrité matérielle. Ainsi, l'article R.161-14 du code rural prévoit qu'il "est expressément fait
défense de nuire aux chaussées des chemins ruraux et à leurs dépendances ou de
compromettre la sécurité ou la commodité de la circulation sur ces voies, notamment :
1° d'y faire circuler des catégories de véhicules et de matériels dont l'usage a été interdit par
arrêté du maire ;
2° de les dépaver, d'enlever les pierres ou autres matériaux destinés aux travaux de ces
chemins ou déjà mis en œuvre ;
3° de labourer ou de cultiver le sol dans les emprises de ces chemins et de leurs
dépendances ;
4° de faire sur l'emprise de ces chemins des plantations d'arbres ou de haies ;
5° de creuser aucune cave sous ces chemins ou leurs dépendances ;
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7. 6° de détériorer les talus, accotements, fossés, ainsi que les marques indicatives de leurs
limites ;
7° de rejeter sur ces chemins et leurs dépendances des eaux insalubres ou susceptibles de
causer des dégradations, d'entraver l'écoulement des eaux de pluie, de gêner la circulation
ou de nuire à la sécurité publique ;
8° de mettre à rouir des plantes textiles dans les fossés ;
9° de mutiler les arbres plantés sur ces chemins ;
10° de dégrader les appareils de signalisation et leurs supports, les bornes ou balises des
chemins, les plantations, les ouvrages d'art ou leurs dépendances, les revêtements des
chaussées et, d'une façon générale, tout ouvrage public situé dans les emprises du chemin,
notamment les supports de lignes téléphoniques ou de distribution d'énergie électrique ou
d'éclairage public ;
11° de faire des dessins ou inscriptions ou d'apposer des placards, papillons ou affiches sur
ces mêmes chemins ou ouvrages ;
12° de déposer sur ces chemins des objets ou produits divers susceptibles de porter atteinte
à la sécurité de la circulation, notamment d'y jeter des pierres ou autres matières, d'y
amener par des véhicules, en provenance des champs riverains, des amas de terre,
d'abandonner sur la chaussée des produits tombés de chargements mal assurés, tels que
fumiers, pulpes, graviers, gravois ;
et d'une manière générale de se livrer à tout acte portant atteinte ou de nature à porter
atteinte à l'intégrité des chemins ruraux et des ouvrages qu'ils comportent, à en modifier
l'assiette ou à y occasionner des détériorations."
De plus, l'article 322-6 du code pénal qualifie de crime puni d'une peine d'emprisonnement et
d'une amende la destruction, la dégradation et la détérioration d'un bien appartenant à autrui
par l'effet de substances explosives, d'un incendie ou tout autre moyen de nature à créer un
danger pour les personnes.
3. LA POLICE DE LA CIRCULATION
1) Les mesures générales de police
En vertu de l'article L.2212-2 du CGCT, le maire détient un pouvoir de police municipale dans la
commune, il doit veiller au maintien du bon ordre, de la sûreté, de la sécurité et de la salubrité
publiques, et notamment à la sûreté et commodité du passage sur les chemins ruraux. De
surcroît, l'article L.161-5 du code rural précise que "l'autorité municipale est chargée de la police
et de la conservation des chemins ruraux."
Ainsi, suivant l'article R.161-10 du code rural, "le maire peut, d'une manière temporaire ou
permanente, interdire l'usage de tout ou partie du réseau des chemins ruraux aux catégories de
véhicules et de matériels dont les caractéristiques sont incompatibles avec la constitution de
ces chemins, et notamment avec la résistance et la largeur de la chaussée ou des ouvrages
d'art."
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8. Exemples d'interdictions jugées légales :
- interdictions édictées par deux arrêtés municipaux, de la circulation sur la partie non
goudronnée de deux chemins ruraux aux véhicules "4 x 4" afin d'éviter la dégradation
sur cette partie non goudronnée et de préserver la sécurité et la tranquillité des riverains
(CE 29 décembre 1997 M. Fougerouse) ;
- interdiction de circulation sur un chemin des véhicules d'un poids supérieur à 17 tonnes
substituée à celle existant précédemment pour les véhicules d'un poids supérieur à 3,5
tonnes (CE 28 septembre 1994 M. Cottin) ;
Remarque :
Les chemins ruraux étant affectés à la circulation publique, les dispositions du code de la route
s'y appliquent. Les panneaux de signalisation sont posés par l'autorité municipale (article L.113-
1 du code de la voirie routière).
2) L'interdiction totale de circulation
Suivant l'article L.2213-4 du CGCT, "le maire peut, par arrêté motivé, interdire l'accès de
certaines voies ou de certaines portions de voies ou de certains secteurs de la commune aux
véhicules dont la circulation sur ces voies ou dans ces secteurs est de nature à compromettre
soit la tranquillité publique, soit la qualité de l'air, soit la protection des espèces animales ou
végétales, soit la protection des espaces naturels, des paysages ou des sites ou leur mise en
valeur à des fins esthétiques, écologiques, agricoles, forestières ou touristiques. Ces
dispositions ne s'appliquent pas aux véhicules utilisés pour assurer une mission de service
public et ne peuvent s'appliquer d'une façon permanente aux véhicules utilisés à des fins
professionnelles de recherche, d'exploitation ou d'entretien des espaces naturels."
"Le maire ne peut interdire la circulation que pour des motifs impérieux de sécurité publique (CE
6 février 1963 Association Le club du soleil). Si le chemin, compte tenu de son étroitesse et de
sa configuration, se prête mal à la circulation automobile, la commune doit invoquer une
nécessité d'intérêt général de nature à justifier la caractère général et permanent de
l'interdiction.
Jurisprudence :
- "Les juges considèrent que l'interdiction totale de circulation, sans aucune motivation,
matérialisée par la pose de bornes au milieu de la chaussée du chemin rural, est
entachée d'excès de pouvoir, d'autant plus qu'elle n'était assortie d'aucune exemption en
faveur des riverains dont les propriétés n'étaient desservies par aucune autre voie (CAA
Marseille 21 décembre 2000 Commune de Saint Jean Cap Ferrat)" ;
- Bien que le chemin rural se prête mal à la circulation automobile en raison de son
étroitesse, de sa configuration en pente sinueuse et de la fragilité de son assise, le maire
ne peut, s'agissant d'une voie publique ouverte antérieurement à la circulation, édicter
une réglementation ayant pour conséquence d'interdire à des propriétaires riverains, ne
disposant d'aucun autre accès à leur propriété, d'accéder en voiture à leur résidence.
L'arrêté municipal les avait ainsi assujettis "à des contraintes excédant celles qui
pouvaient légalement leur être imposées dans l'intérêt général (CAA Bordeaux 4
décembre 2000 M. Escure Berrou) ;
- Le maire plaide que le chemin rural ne peut supporter une circulation continue du fait de
son infrastructure et qu'il traverse la voie ferrée par un passage à niveau de deuxième
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9. catégorie occasionnant un danger permanent. Or, les pièces du dossier démontrent que
la visibilité est totalement dégagée en ce point précis, et que la protection du site n'est
pas compromise. Dès lors, les motifs allégués par le maire ne sont pas de nature à
justifier l'interdiction de circulation sur le chemin rural (CE 30 juin 1999 Mme Amadei).
3) La randonnée motorisée
Dans les espaces naturels, la circulation des véhicules à moteur est interdite en dehors des
voies classées dans le domaine public routier de l'Etat, des départements et des communes,
des chemins ruraux et des voies privées ouvertes à la circulation publique des véhicules à
moteur (article L.362-1 du code de l'environnement). Cette interdiction ne s'applique pas aux
véhicules utilisés pour assurer une mission de service public, ni aux véhicules utilisés à des fins
professionnelles de recherche, d'exploitation ou d'entretien des espaces naturels, et elle n'est
pas opposable aux propriétaires ou à leurs ayants droit circulant ou faisant circuler des
véhicules à des fins privées sur des terrains appartenant aux propriétaires.
Dans l'objectif d'assurer la protection des espaces naturels, le maire peut, par arrêté municipal,
restreindre la circulation à certains types de véhicules susceptibles d'endommager les chemins
ruraux (limitation de gabarit ou de charge), ou durant certaine période de l'année, en raison du
temps ou des raisons climatiques (période de fortes pluies ou de dégel). L'interdiction de la
circulation ne peut alors être que partielle et doit être signalée pour être opposable aux usagers.
4) La sécurité de la circulation
En matière de pouvoirs de police de la circulation, les obligations du maire sont les suivantes :
- "Lorsqu'un obstacle s'oppose à la circulation sur un chemin rural, le maire y remédie
d'urgence" (article R.161-11 du code rural). Les mesures provisoires de conservation du
chemin exigées par les circonstances sont prises sur simple sommation administrative,
aux frais et aux risques de l'auteur de l'infraction et sans préjudice des poursuites qui
peuvent être exercées contre lui ;
- le maire veille au respect de l'arrêté qu'il a édicté, prescrivant une interdiction de faire
circuler les catégories de véhicules et de matériels dont l'usage a été interdit ;
- suivant l'article R.161-14-12° du code rural, il est expressément interdit :
o de nuire aux chaussées des chemins ruraux et à leurs dépendances ou de
compromettre la sécurité ou la commodité de la circulation sur ces voies en y
déposant des objets ou produits divers susceptibles de porter atteinte à la sécurité
de la circulation, en particulier d'y jeter des pierres ou autres matières ;
o d'y amener par des véhicules, en provenance de champs riverains, des amas de
terres ;
o d'y abandonner sur la chaussée des produits tombés de chargements mal
assurés, tels que fumiers, pulpes, graviers, gravois.
L'entrave à la libre circulation sur la voie publique est également réprimée par le code pénal.
Ainsi, l'article R.644-2 dispose que "le fait d'embarrasser la voie publique en y déposant ou y
laissant sans nécessité des matériaux ou objets quelconques qui entravent ou diminuent la
liberté ou la sûreté de passage est puni de l'amende prévue pour les contraventions de 4ème
classe…" Or, toute voie de communication terrestre qui est ouverte à la circulation du public
9
10. constitue une voie publique au sens de cet article. Le chemin rural en fait partie car, bien que
relevant du domaine privé de la commune, il est affecté à la circulation publique par
détermination de la loi (Cass. 7 février 2002, n°94-83.678 pour un engin agricole stationnant sur
le chemin rural et desservant l'exploitation de son propriétaire et la propriété voisine, empiétant
sur l'assiette du passage, faisant obstacle à la progression des véhicules). Ainsi, un maire peut
prendre un arrêté enjoignant à toute personne d'ôter, dans un délai de 24 heures, tous objets et
tous obstacles situés sur un chemin de desserte sous peine d'enlèvement et de remise en état
aux frais et risques du contrevenant (CE 4 janvier 1995 n°110.211 Métras).
4.LES PLANTATIONS, CANAUX ET FOSSES DES CHEMINS RURAUX
1) Les plantations
a) Les interdictions
Aucune condition de distance ne s'impose aux plantations réalisées le long des chemins ruraux,
qu'il s'agisse d'arbres ou de haies vives.
Toutefois, l'article R.161-14 du code rural prévoit notamment l'interdiction de :
- dégrader les plantations ;
- mutiler les arbres plantés sur les chemins ruraux ;
- réaliser des plantations d'arbres ou de haies sur l'emprise des chemins ruraux ;
- réaliser des dessins ou inscriptions, d'apposer des placards, papillons ou affiches.
De plus, le code pénal prévoit que la destruction, la dégradation ou la détérioration d'un bien
appartenant à autrui dont il n'est résulté qu'un dommage léger est une contravention (article
R.635-1 du code pénal). Dès lors, le fait d'abattre ou de dégrader un arbre ne constitue une
infraction que si son auteur savait qu'il appartenait à autrui. Aussi, la destruction, la dégradation
ou la détérioration d'un bien appartenant à autrui par l'effet de substances explosives, d'un
incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes, est
considérée comme un crime par le code pénal (article 322-6).
b) Le rôle du maire
Sur le fondement de ses pouvoirs généraux de police et de conservation des chemins ruraux, il
appartient au maire de prendre les mesures propres à assurer la sûreté et la commodité du
chemin ouvert à la circulation publique :
- le maire peut désigner les chemins de sa commune le long desquels les plantations
d'arbres ou de haies vives devront être placées à des distances au plus égales à celles
prévues pour les voies communales ;
- lorsque la viabilité du chemin rend nécessaire la destruction des plantations privées
existant dans l'emprise du chemin, le maire peut édicter un arrêté mettant en demeure
les propriétaires d'avoir à les enlever dans un délai déterminé. Lorsque les plantations
ont plus de trente ans, le droit des propriétaires se résout en une indemnité réglée à
l'amiable, ou bien, à défaut, comme en matière d'expropriation ;
- les plantations privées existant dans l'emprise d'un chemin rural peuvent être conservées
lorsqu'elles ne portent pas atteinte à la sûreté ou à la commodité du passage. Par contre,
elles ne peuvent pas être renouvelées.
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11. 2) L'élagage
Suivant l'article R.161-24 du code rural, "les branches et racines de arbres qui avancent sur
l'emprise des chemins ruraux doivent être coupées, à la diligence des propriétaires ou
exploitants, dans des conditions qui sauvegardent la sûreté et la commodité du passage ainsi
que la conservation du chemin. Les haies doivent être conduites à l'aplomb de la limite des
chemins ruraux. Dans le cas où les propriétaires riverains négligeraient de se conformer à ces
prescriptions, les travaux d'élagage peuvent être effectués d'office par la commune, à leur frais,
après une mise en demeure restée sans résultat."
3) Le débroussaillement
"Les opérations de débroussaillement prévues par le code de la voirie routière s'appliquent aux
voies ouvertes à la circulation du public, malgré leur appartenance au domaine privé de la
commune." Les articles L.322-1 et suivants du code forestier prévoient :
- l'interdiction à toutes les personnes autres que les propriétaires de terrains boisés ou
non, de porter ou d'allumer du feu sur ces terrains et jusqu'à une distance de 200 mètres
des bois, forêts plantations, reboisements, landes, maquis, garrigues ;
- la possibilité pour le préfet d'édicter toute mesure de nature à assurer la prévention des
incendies de forêt.
Exemples :
* l'obligation imposée à un propriétaire ou à ses ayants droit de débroussailler son terrain
jusqu'à une distance maximum de 50 mètres des habitations, de nettoyer les coupes et les
rémanents et branchages ;
* la prescription par arrêté aux propriétaires de respecter des règles spéciales de gestion
forestière au voisinage des voies ouvertes à la circulation publique dans la bande de 50 mètres
de largeur au maximum de part et d'autre de l'emprise de ces voies…
- les communes propriétaires de voies ouvertes à la circulation du public procèdent à leur
frais au débroussaillement et au maintien en l'état débroussaillé, sur une bande dont la
largeur est fixée par le préfet et qui ne peut excéder 20 mètres de part et d'autre de
l'emprise de ces voies, dans la traversée desdits bois et massifs forestiers, et dans les
zones situées à moins de 200 mètres de terrains en nature de bois, forêts, landes,
maquis, garrigues, plantations ou reboisements. Les propriétaires ne peuvent s'opposer
à ce débroussaillement dans la limite d'une bande de terrain d'une largeur maximale de
20 mètres de part et d'autre de l'emprise de ces voies ;
- le maire, ou le préfet, peut mettre en demeure les propriétaires d'exécuter les travaux de
débroussaillement ou de maintien en état débroussaillé dans un délai qu'il fixe. Les
propriétaires qui n'ont pas procédé aux travaux prescrits par la mise en demeure à
l'expiration du délai fixé sont passibles d'une amende qui ne peut excéder 30 euros par
m2 soumis à l'obligation de débroussaillement. D'autre part, la servitude de visibilité
impose un débroussaillement par les propriétaires d'infrastructures ferroviaires. Les
gardes champêtres sont compétents pour constater les infractions aux dispositions
relatives à la protection, à la défense et à la lutte contre les incendies des bois, forêts,
landes, maquis, garrigues, plantations ou reboisements.
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12. 4) Les canaux et fossés
L'article R.161-21 du code rural stipule que "l'ouverture de fossés ou canaux le long d'un
chemin rural ne peut être autorisée à moins de 0,50 mètre de la limite du chemin. Ces fossés
ou canaux doivent avoir un talus d'un mètre de base au moins pour un mètre de hauteur." De
plus, "tout propriétaire ayant fait ouvrir des fossés ou canaux sur son terrain le long d'un chemin
rural doit les entretenir de manière à empêcher que les eaux nuisent à la viabilité du chemin. Si
les fossés ou canaux ouverts par des particuliers sur leur terrain le long d'un chemin rural ont
une profondeur telle qu'elle puisse présenter quelque danger, les propriétaires sont tenus de
prendre les dispositions qui leur sont prescrites pour assurer la sécurité de la circulation ;
injonction leur est faite à cet effet, par arrêté du maire."
a) Les autres obligations des riverains
- l'interdiction de mettre à rouir des plantes textiles dans les fossés ;
- l'interdiction de détériorer les talus, accotements et les fossés ainsi que les marques
indicatives de leurs limites ;
b) Le curage et l'entretien
L'article L.215-14 du code de l'environnement impose aux propriétaires riverains une obligation
de curage régulier pour rétablir le cours d'eau dans sa largeur et sa profondeur naturelles, et
l'entretien de la rive par élagage et recépage de la végétation arborée. Cependant, si le
propriétaire dont le fonds est séparé du cours d'eau par une voie publique ou une voie privée ne
lui appartenant pas n'est pas considéré comme un riverain (Cour d'appel Pau 15 juin 1886).
SEPTEMBRE 2003
REFERENCES :
- Code rural, Dalloz, édition 1999 ;
- Code de l'environnement ;
- Code pénal ;
- Code général des collectivités territoriales ;
- Les fiches techniques du Journal des maires, Muriel TREMEUR, mars 2002 – janvier 2003.
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