1. N°31 I BIMENSUEL I 24 décembre 2015
Régions : les chantiers de la rentrée P. 4 R Livre : «Le règne des entourages» P. 6
CourrierCABL’INFORMATION DES DÉCIDEURS DES POLITIQUES PUBLIQUES
D
extera, c’est avant tout une action col-
lective au sein de laquelle chacun pren-
dra une part active.» C’est ainsi
qu’Alexandre Mora a présenté sa candida-
ture à la tête de Dextera, la désormais
unique association de collaborateurs de ca-
binet des collectivités de la droite et du cen-
tre. Seul en lice, l’ex-président de COLLCAB
a été élu à l’unanimité le 15 décembre, pour
deux ans et va maintenant piloter la «ré-
union» effective de l’ARCOLE (fondée en
1990) et de COLLCAB (née en 2003). «Tout
s’est très très bien passé, avec de l’enthousiasme,
de l’émotion», se félicite Olivier Berlioux,
élu président d’honneur, «chargé des rela-
tions avec les partenaires» de Dextera.
Jusqu’ici président de l’ARCOLE, il mesure
le chemin parcouru : «C’est un vieux projet,
je n’irai pas jusqu’à dire que j’y ai pensé depuis
que je suis élu, mais presque.»
Si les deux «sœurs» ont mis près d’un an
à matérialiser leur rapprochement tech-
nique, l’esprit était présent de longue date.
à l’image de la vie politique de la droite,
ces deux entités ont longtemps vécu côte
à côte en formant deux familles distinctes.
Et c’est d’ailleurs très symboliquement que
deux anciens artisans décédés de ce
rapprochement (Pierre-Yves Brochand et
Catherine Rousselet) ont été élus présidents
d’honneur à titre posthume. Mais «il y avait
des cicatrices à apaiser dans l’univers des
directeurs de cabinet de droite, se souvient
Olivier Berlioux, on a alors choisi de prendre
du temps». Le temps pour lui et son acolyte
Alexandre Mora de se retrouver tous deux
présidents. «Nos relations d’amitiés ont facilité
les choses», reconnaissent les deux hommes.
Le nouveau président s’est donc attaché à
soigner les équilibres parmi les 25 membres
du conseil d’administration et au sein de
son bureau (lire page 6).
Mais il va aussi s’employer «à créer du lien
entre nous tous», affirme-t-il. Et c’est certai-
nement sur le terrain de «l’amélioration du
statut» des collaborateurs d’élus – le lieu
historique de la rencontre de l’ARCOLE et
de COLLCAB – qu’il pourra fédérer les
membres de Dextera. Les demandes sur ce
point sont anciennes et les plus récentes
n’ont pas été satisfaites. Alexandre Mora
ne cache pas son intention de «faire déposer
une proposition de loi» spécifique, dés 2016.
Il le sait, c’est par ce biais que sont nées les
évolutions statutaires de 2005, finalement
portées par un décret. En ce sens, Dextera
veut maintenir ses liens avec DIRCAB, l’as-
sociation miroir des collaborateurs d’élus
de gauche qui changera de président en
2016 (lire page 8). Si dans la négociation
serrée avec la direction générale des col-
lectivités locales l’œcuménisme facilite le
dialogue, le poids politique nouveau de
Dextera va peser. «Nous allons dépasser les
mille collaborateurs», estime Olivier Berlioux
qui voit désormais devant lui un bloc de
dircabs groupé à droite. Un influent réseau
composé de dircabs d’importantes collec-
tivités qui devrait faciliter l’écoute de l’ad-
ministration sur les doléances de ces colla-
borateurs de terrain. T JÉRÔME VALLETTE
Le 99e
congrès des maires
de France aura lieu en juin
Le 99e
congrès des maires et présidents
d’intercommunalité de France aura finale-
ment lieu du 31 mai au 2 juin 2016. Annulé
suite aux attentats du 13 novembre
à Paris, le 98e
congrès de l’Association
des maires de France (AMF) avait été
remplacé, le 18 novembre, par un rassem-
blement des édiles à Paris autour du
président de la République. Passé cet
évènement déplacé dans le calendrier
«habituel», le 100e
congrès se déroulera
à l’automne, du 20 au 23 novembre 2017.
Transports : des contrats
d’objectifs de sûreté
Les députés ont voté le 17 décembre une
proposition de loi socialiste pour amélio-
rer la sécurité dans les transports avec la
création d’un contrat d’objectif de sûreté.
Cette proposition de loi veut associer au
niveau départemental, autour des préfets,
toutes les autorités organisatrices de
transports ainsi que les exploitants qui
vont, entre autres, pouvoir se doter de leur
propre service de sûreté, placé sous le
contrôle du Conseil national des activités
privées de sécurité (CNAPS).
Couverture mobile : les élus
locaux veulent tout revoir
Huit associations d’élus locaux demandent
au Gouvernement «la remise à plat du
dispositif de couverture mobile des zones
blanches, si nécessaire par voie législa-
tive». Emmenés par l’Association des
maires de France, ces élus veulent
«l’ouverture, début 2016, [...] d’une négo-
ciation» avec toutes les parties, dont les
opérateurs, «portant sur la mise en œuvre
concrète d’un programme de couverture
mobile voix et services (à très haut débit)
des zones rurales et de montagne».
ALERTES
Dextera : une influente association de dircab est née
Après un an de travail, les associations de dircabs de droite et du centre ont réussi leur «ré-union».
Dextera devient la plus importante association de collaborateurs d’élus avec près de 1 000 membres.
«Dextera, c’est avant tout une
action collective», Alexandre Mora
2. C
’est «un mandat qui s’ouvre sur un re-
pli des investissements du bloc com-
munal de près de 20% en deux ans»,
résume l’étude Territoires et finances de
La Banque Postale et de l’Association des
maires de france (AMf). Une analyse qui
confirme la baisse des dépenses d’investis-
sement pour les communes (-7,8%) et les
groupements à fiscalité propre (-6,8%) en
2015. Une tendance qui pourrait se prolon-
ger sur la mandature, selon La Banque Pos-
tale qui évoque une baisse de 16 à 27% sur
la période 2014-2019. Si jusqu’ici le repli
des investissements était «attendu», car les
effets des cycles électoraux étaient présents,
«il est dû à une nouvelle contraction des marges
de manœuvre financières». Passée l’année des
élections, s’ouvre aujourd’hui une période
au cours de laquelle le recul des dotations
aux collectivités est pointé comme seul res-
ponsable. Ainsi, note l’institution, «l’épargne
brute des communes et groupements à fiscalité
propre diminue respectivement de 4,4% et 3,8%
en 2015», car la progression des dépenses
de fonctionnement reste plus «dynamique»
que les recettes. Celles-ci sont impactées
par la baisse des dotations et à peine com-
pensées par un levier fiscal qui a été
«actionné à hauteur de +1,6%» seulement.
Toutefois, ces recettes de fonctionnement
progresseraient encore un petit peu : +0,8%
en 2015, après leur stagnation (+0,1%) au
cours de l’année 2014. T J. V.
CourrierCABL’INFORMATION DES DÉCIDEURS DES POLITIQUES PUBLIQUES
2 i N°31 i 24 décembre 2015
L’ESSENTIEL DE LA QUINZAINE
Commission européenne : le cabinet
de Corina Cretu face aux critiques
Communes : la baisse des investissements se poursuit
L
e cabinet de la commissaire européenne à la politique régionale
traverse une forte période de turbulences. En décembre, le ma-
gazine Politico a mené une charge violente contre la commissaire,
pointant, qu’en douze mois, huit membres de son cabinet l’avaient
quitté, et relayant des accusations de comportement peu adaptés à sa
fonction, comme l’utilisation de son équipe à des fins personnelles.
Les porte-paroles de la Commission ont refusé de commenter les accusations. Nous
avions indiqué en octobre le départ de son directeur de cabinet, remplacé par Nicola
de Michelis. Celui-ci a depuis été flanqué d’une adjointe, Mihaela Maria Ciuciureanu,
chargée de suivre les dossiers roumains et bulgares et de superviser la gestion de
l’équipe. Cette nomination a renforcé l’agacement de certains hauts fonctionnaires
européens qui pointent la présence accrue dans le cabinet de membres roumains,
le pays d’origine de Corina Creţu. «les règles de composition des cabinets sont très strictes,
et le cabinet de Mme Creţu ne contrevient à aucune règle. Qu’elle s’entoure d’assistantes ou
d’experts roumains n’est pas plus critiquable que ce que font les irlandais», s’agace un haut
fonctionnaire de l’Union. La commissaire européenne a aussi été critiquée pour ses
déplacements réguliers en Roumanie, mais là aussi ces critiques sont à relativiser :
«Jean-Claude Juncker a lui-même demandé aux commissaires d’être actifs dans leurs pays d’ori-
gine, pour représenter l’action politique de l’Europe. Personne ne reproche à Pierre Moscovici
d’intervenir dans les médias français», poursuit ce fonctionnaire. à la Commission, on
s’inquiète plutôt des suites de la démission du Gouvernement de Victor Ponta, dont
Corina Creţu est proche – l’ancien Premier ministre faisant face à de graves accusations
de corruption. La commissaire européenne n’a jamais caché sa proximité avec le pou-
voir roumain, ainsi que ses ambitions nationales. Une situation qui fragilise toute
l’action de son cabinet, en charge du plus gros budget de l’Union européenne, avec
plus de 600 milliards d’euros de fonds structurels. T FABRICE POZZOLI-MONTENAY
L
es effectifs de la fonction publique
territoriale ont augmenté d’1,5% en
2014. Un rythme «moins soutenu
qu’en 2013 (+2,0%)», selon l’INSEE et «plus
marqué» pour les communes notamment à
cause des activités périscolaires. La ten-
dance devrait pourtant s’inverser selon une
enquête CSA : 82% des collectivités n'envi-
sagent pas de recruter en 2016, baisse des
dotations oblige. L’Association des petites
villes de france affirme même qu’une ma-
jorité de ses adhérents ne remplaceraient
plus totalement les départs en retraite. T
«Toxiques» : éviter
le surendettement
L’emploi dans la fonction publique
Effectifs en 2014, en milliers
Fonction publique de l'État
2 475,6
Ministères
Fonction publique hospitalière
1 183,6
Établissements
médico-sociaux
Hôpitaux
Fonction publique
territoriale
1 981,5
Secteur communal
Régions et départements
Source : Insee* hors contrats aidés : 5 431,1
Établissements publics
à caractère administratif
1 913,6
1 527,7
1 040,3
143,3
562
453,8
Ensemble*
5 640,6
Territoriale : des effectifs en hausse
D.R.
SERVICE DES CHIFFRES
20 M€
L’État lance un fonds de financement
de 20 millions d’euros pour «accélérer
le déploiement des 1 000 maisons de
services au public (MSP)» d’ici fin 2016
– 380 sont en service – pour «compléter
les financements de l’État et couvrir
50% de leurs coûts de fonctionnement».
D
ans son rapport sur la Société de
financement local (SfIL), le séna-
teur Maurice Vincent (PS) avertit
des risques pour les collectivités qui veu-
lent se libérer de leurs emprunts toxiques.
Si le fonds de soutien peut financer jusqu’à
75% de l’indemnité de remboursement an-
ticipé, «le reste à charge pour les collectivités
est très important au regard de leurs capacités
financières, ce qui engendrera soit des hausses
d’impôt, soit un endettement insoutenable».
Il invite la SfIL «à «plus de souplesse» dans
les négociations de désensibilisation. Tout
en favorisant «la réalisation du plan d’affaires
de la Sfil», l’État doit veiller à ce que ses
offres ne contribuent pas à «un surendette-
ment excessif des collectivités». Bien que l’en-
semble SfIL/La Banque Postale, créé en
2013 pour remplacer Dexia, revendique 25%
de part de marché du financement du sec-
teur public local (6,6 milliards d’euros de
prêts en trois ans), la SfIL reste déficitaire,
limitant d’autant ses marges de manoeuvre.
En trois ans, elle a réduit de 37% son
encours de toxiques (5,4 milliards d’euros
en août), détenu essentiellement par les col-
lectivités, qui devrait atteindre 4,4 milliards
d’euros fin 2016. «le sinistre de Dexia a coûté
13 milliards d’euros aux contribuables français
et 7 milliards aux Belges», précise Maurice
Vincent. T FABIENNE PROUX
¸
3. CourrierCABL’INFORMATION DES DÉCIDEURS DES POLITIQUES PUBLIQUES
N°31 i 24 décembre 2015 i 3
ILS/ELLES ONT DIT
Christian Eckert
Secrétaire d'État au
Budget : «[La question
de la baisse des dotations]
se reposera lors du projet
de loi de finances de 2017. Il n’est
pas impossible de faire évoluer
les curseurs.» (lesechos.fr, 17/12)
Édouard Philippe
Député-maire (LR) du Ha-
vre (76) : «Les gens veu-
lent que ça avance. Dans
les mairies où l’opposition
gauche-droite est beaucoup
moins forte, de nombreuses
délibérations sont approuvées à
l’unanimité.» (liberation.fr, 17/12)
Alain Fauré
Député PS de l’Ariège (09) :
«[La baisse des dotations
est] une opportunité
politique qui remet l’élu
local au centre du jeu.»
(lagazettedescommunes.fr, 18/12)
Éliane Assassi
Sénatrice PCF de Seine-
Saint-Denis (93) : «On
demande déjà depuis
un moment à ce que l’état
d’urgence soit levé. Ce n’est pas
pour le constitutionnaliser.»
(lemonde.fr, 1821/12)
DANS LA VIE POLITIQUE
AU PARLEMENT
Communes nouvelles :
délai jusqu’en juin
Les deux Chambres du Parlement étaient
d’accord pour proroger le dispositif
d’incitation à la création de communes
nouvelles. L’Assemblée nationale l’avait
fait pour trois mois, lors de la première
lecture du projet de loi de finances.
Le Sénat a poussé jusqu’à 12 mois.
Les députés ont finalement tranché pour
un délai de six mois, soit jusqu’en juin
prochain.
Le Sénat rechigne à la cantine
Marylise Lebranchu a eu beau faire une
ode à la cantine, «lieu hautement éducatif
qui s'incarne dans le fait de s'asseoir avec
d'autres autour d'une table», les séna-
teurs ont rejeté la proposition de loi visant
à garantir le droit d’accès à la restaura-
tion scolaire. Celle-ci avait été adoptée
à l’Assemblée nationale à l’initiative des
radicaux de gauche. «Cette compétence
communale est facultative, si bien que les
communes sont libres de créer le nombre
de places qu'elles souhaitent dans les
services de restauration ou d'en restrein-
dre l'accès», a fait valoir Jean-Claude
Carle rapporteur LR de la commission de
la culture. Les députés devront remettre
le couvert.
Obliger au partage
La taxe d’aménagement n’est pas suffi-
samment partagée, aux yeux de plusieurs
députés. Ceux-ci, étiquetés à droite, ont
alors déposé une proposition de loi pour
que davantage d’Établissements publics
de coopération intercommunale (EPCI)
bénéficient de ce qui n’est aujourd’hui
qu’une possibilité. Le texte vise à obliger
les communes à reverser au moins 20%
de cette taxe à leur EPCI.
La revitalisation à la loupe
La Cour des comptes a présenté devant
la commission des finances le rapport sur
les «zones de revitalisation des terri-
toires» qu’elle avait réalisé à sa demande.
Près de 120 de ces conventions, que doi-
vent notamment signer les entreprises
de plus de 1 000 salariés procédant à des
licenciements économiques collectifs,
sont signées chaque année. Si le dispositif
permet de financer des actions dans les
bassins fragilisés, la Cour des comptes
reconnaît que son efficacité est insuffi-
samment mesurée. L’institution déplore
aussi un manque de pilotage de la part
de l’État. T MATTHIEU VERRIER
RÉGIONALES PACA et Nord, comment s’entendre?
Le conseil vient de Gérard Larcher (LR). «On ne peut pas récolter un jour et battre
le blé comme bon nous semble le lendemain», dit le président du Sénat. Comprendre :
un homme de droite ne peut se faire élire grâce au désistement du candidat de
gauche et ne pas en tenir compte ensuite. Christian Estrosi (LR) et Xavier Bertrand
(LR) ont l’intention de suivre ce conseil, et non le contre-exemple d’un Jacques
Chirac peu enclin à l’ouverture en 2002. Le premier va créer, dès le premier
trimestre 2016, un “conseil territorial” consultatif où la gauche pourra émettre
des propositions. Trois anciens présidents de la région PACA sont chargés
de mettre sur pied cette structure. Le second entend réunir tous les trois mois
les parlementaires de la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie pour les associer
à ses projets. Encore faut-il que les socialistes s’entendent entre eux. Dans le
Grand Nord, le député frédéric Cuvillier (PS), très amer au soir de la décision
de retrait pour le deuxième tour, dispute le leadership à l’ex-candidat Pierre de
Saintignon (PS). T MATTHIEU VERRIER
PRATIQUES PUBLIQUES
Des Français stricts sur le cumul des mandats
L’institut Elabe a sondé, pour BfMTV, 1 003 français sur leur état d’esprit après les
élections régionales en leur soumettant des propositions d’évolution des pratiques
de la vie politique. Dans la ligne des pistes d’évolution sur la table de longue date,
91% des sondés se disent ainsi favorables à «l’interdiction du cumul des mandats
à raison d’un seul mandat – 66% y sont même «tout à fait favorables» – et 73% soutien-
nent également «l’impossibilité d’exercer plus de deux fois de suite le même mandat».
Une logique qui n’est pas isolée sur ce thème et pour laquelle les sondés se disant
«sans préférence partisane» sont les plus enclins à approuver les évolutions suggérées.
Ainsi, 83% des personnes interrogées approuvent l’abaissement à 400 du nombre
de députés (contre 577 actuellement), 82% sont favorables à l’introduction d’une
dose de proportionnelle pour les élections législatives, 78% souhaitent favoriser
le référendum d’initiative populaire et «74% se prononcent en faveur d’une division
par deux des postes de conseillers municipaux, départementaux et régionaux». Seule
exception «notable», souligne Elabe : 38% des personnes souhaitent la suppression
des départements et le transfert de leurs compétences aux Régions. 34% des sym-
pathisants de gauche approuvent la disparition de cette strate administrative,
contre 48% des sympathisants de droite. T J. V.
D.R.
D.R.D.R.
D.R.
4. 4 i N°31 i 24 décembre 2015
CourrierCABL’INFORMATION DES DÉCIDEURS DES POLITIQUES PUBLIQUES
DANS CHAQUE NUMÉRO, COURRIERCAB
FAIT LE POINT SUR LA RÉFORME TERRITORIALE
I
l y a les chantiers apparents : l’organisation administrative,
le nom de la Région, le siège du conseil… et puis les chan-
tiers de fond : en premier l’élaboration d’une stratégie
régionale en matière de formation, d’emploi et de développe-
ment économique. C’est pour mobiliser les nouveaux élus sur
ce chapitre que françois Hollande réunit les présidents de Région
courant janvier, en présence de Manuel Valls. Ce dernier a appelé
les Régions «à mettre le paquet» sur ce champ de compétences,
dont le pilotage leur revient désormais. «le schéma régional de
développement économique, d’innovation et d’internationalisation
(SRDEii) est le grand sujet de l’année», explique-t-on dans les cou-
loirs du secrétariat d’État à la Réforme territoriale. Depuis Paris
on se soucie beaucoup, en effet, de l’articulation entre les mé-
tropoles et les Régions. «la richesse se crée dans les métropoles,
il faut maintenant s’organiser pour que cette richesse infuse dans les
territoires, dans les différents bassins d’emploi.» Et pour cela, il va
falloir mobiliser les acteurs, les métropoles, les intercos, les cham-
bres de commerce. Une bonne nouvelle de ce côté : la mise
en place de puissantes intercos qui se dessine sur l’ensemble
de l’Hexagone. Le SRDEII devra être bouclé fin 2016.
Le développement économique sur toutes les lèvres
Les Régions doivent aussi élaborer en 2016 leur nouveau contrat
de plan régional de développement des formations et de l'orien-
tation professionnelles (CPRDfOP). Elles pourront, si elles le
souhaitent, assurer la coordination des acteurs du service public
de l’emploi (hors Pôle Emploi). Les nouveaux présidents de
Région semblent bien conscients de l’urgence de la mobilisation,
à l’image de Valérie Pécresse (LR), la présidente de la Région
Île-de-france, qui a annoncé, au lendemain de son élection,
la convocation d’une conférence «pour la croissance, l’emploi, la
formation et la qualité du travail». Mais, comme la plupart des
nouveaux présidents de droite, elle n’entend pas uniquement
servir de «faire-valoir» au Gouvernement et demande à ce que
des mesures soient également prises à l’échelle nationale «pour
débloquer la situation».
Transport, aménagement, écologie
Pour autant, si le développement économique, la formation,
l’apprentissage s’affichent comme les priorités des priorités, les
nouvelles Régions vont également devoir monter en puissance
dans d’autres secteurs, notamment celui des transports. Et de
ce point de vue tout n’est pas simple, il va être nécessaire d’ har-
moniser les politiques existantes, les tarifications. Il va surtout
falloir s’entendre avec les départements, entre autres en ce qui
concerne les transports scolaires. Dans ce domaine, contrairement
à d’autres secteurs, il ne sera pas possible de déléguer, la loi
n’ayant pas prévu de subdélégation. Les Régions auront, heu-
reusement, un peu plus de temps pour élaborer leur schéma ré-
gional d’aménagement, de développement durable et d’égalité
des territoires (SRADDET) puisqu’un délai de trois ans est donné
aux nouvelles assemblées pour produire ce document ambitieux
qui, outre l’aménagement du territoire, intégrera les transports,
l’énergie et la gestion des déchets.
La complexe fusion administrative
Tout cela va devoir se faire en parallèle avec la réorganisation
des services dans les nouvelles grandes Régions. Un chantier
de taille pour les équipes qui se mettent en place, même si le
travail a déjà été préparé au cours de l’année écoulée, période
durant laquelle les cabinets se sont employés à sécuriser les pre-
miers mois de 2016. Un exercice délicat, comme en témoignait
Christophe Kieffer, le directeur de cabinet du président de la
Région Alsace en mai 2015 (CourrierCab n°18), «pour que les élus
puissent très vite assurer un processus de décision politique», sans
pour autant mettre en place des choses irrémédiables. Il s’agissait
d’assurer la compatibilité des systèmes entre Régions fusionnées
et de permettre à l’assemblée élargie de siéger dès le 4 janvier.
Dans certains Hôtels de Région, il a fallu déplacer provisoirement
les cloisons en attendant que le nouveau conseil décide de la lo-
calisation définitive de son siège et de la répartition des services
entre les ex-capitales des Régions fusionnées. Mais si la question
symbolique du choix du siège, tout comme celui du nom des
futures Régions occupe beaucoup l’espace public, le véritable
chantier est ailleurs, du côté des ressources humaines. Il va falloir
se pencher sur la réorganisation des services et l’harmonisation
des statuts. En matière de réorganisation fonctionnelle, on se
montre plutôt optimiste du côté du secrétariat d’État. «l’avantage
du numérique est qu’il autorise les multipolarités. C’est une occasion
dont il faut se saisir.» Certes, mais les élus vont devoir tenir compte
de la réorganisation, en parallèle, des services de l’État, qui font
l’objet eux aussi d’une nouvelle répartition géographique,
à l’image des super-rectorats, installés à Caen pour la Normandie,
à Nancy pour le Grand Est ou à Montpellier pour la Région
Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, qui se cherche encore
un nom. André Vallini se veut souple en matière de choix des
localisations. «Je ne serais pas choqué que le préfet de Région soit
dans une ville et le président du conseil régional dans une autre»,
a-t-il déclaré mi-décembre sur LCP, la chaîne parlementaire.
Les élus ont six mois pour proposer leur nouvelle géographie,
qui devra être validée pour octobre 2016. T PHILLIPE DOSSAL
Régions : les chantiers de la rentrée
Les nouvelles Régions vont devoir relever un double défi en 2016 : gérer les fusions et élaborer leur stratégie
pour les six ans à venir. Une urgence : le développement économique et l’emploi.
5. CourrierCABL’INFORMATION DES DÉCIDEURS DES POLITIQUES PUBLIQUES
N°31 i 24 décembre 2015 i 5
CONSEIL D’ÉTAT
Étendue des pouvoirs budgétaires d’une commune
en cas de vote d’un budget en déséquilibre
En cas de vote du budget en déséquilibre, le préfet peut saisir la Chambre régionale des
comptes qui propose à la collectivité des mesures permettant de parvenir à l’équilibre.
Si la collectivité refuse de voter ces mesures, le préfet peut alors régler et rendre
exécutoire un budget et la collectivité ne peut plus prendre de décision budgétaire pour
l’année en cause. Se prononçant sur une application de ce principe, le Conseil d’État
apporte quelques précisions utiles sur l’étendue de cette interdiction et juge en l’espèce
que seules «les délibérations ayant une incidence sur le budget de l'année au titre
de laquelle la Chambre régionale des comptes a été saisie» sont concernées et que
la décision par laquelle le préfet règle, le cas échéant, le budget et le rend exécutoire
«ne peut produire d'effets qu'au titre de l'année en cause». Dès lors, les délibérations
prises par la commune pour instituer un abattement de la taxe d’habitation pour
l’année suivant celle de l’intervention du préfet sont valables. (CE, 9 décembre 2015,
Commune de Bussy Saint-Georges, req. n° 387630)
CONSEIL D’ÉTAT
Possibilité pour le maitre d’ouvrage d’engager
la responsabilité du sous-traitant
Le Conseil d’État ouvre la possibilité pour le maître d’ouvrage d’engager, sous conditions,
mais directement, la responsabilité d’un sous-traitant d’un marché de travaux sur le
terrain quasi-délictuel. En l’espèce, des désordres étaient apparus après la réception
sans réserve des travaux et le maître d’ouvrage avait saisi le juge pour obtenir la
condamnation du maître d’œuvre au titre de la garantie décennale, recours que la Cour
administrative d’appel avait rejeté. Saisi d’un pourvoi, le Conseil d’État considère «qu’il
est toutefois loisible [au maître d’ouvrage], dans le cas où la responsabilité du ou des
cocontractants ne pourrait pas être utilement recherchée, de mettre en cause, sur le
terrain quasi-délictuel, la responsabilité des participants à une opération de construction
avec lesquels il n’a pas conclu de contrat de louage d’ouvrage, mais qui sont intervenus
sur le fondement d’un contrat conclu avec l’un des constructeurs». Si la responsabilité
du sous-traitant peut être ainsi engagée au titre de «la violation des règles de l’art
ou la méconnaissance de dispositions législatives et réglementaires», elle ne peut l’être
à raison «de fautes résultant de la seule inexécution, par les personnes intéressées,
de leurs propres obligations contractuelles». Du reste, cette responsabilité ne saurait
être recherchée «pour des désordres apparus après la réception de l'ouvrage et qui
ne sont pas de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre
à sa destination». (CE, 7 décembre 2015, Commune de Bihorel, req. n° 380419)
Par Samuel Couvreur, avocat à la Cour, cabinet Seban & Associés
JURISPRUDENCE
LA QUESTION
Faut-il intégrer
les recettes des budgets
annexes ?
Un amendement rejeté au projet
de loi de finances 2016 proposait
d’inclure les recettes réelles de
fonctionnement (RRF) des budgets
annexes (BA) des services publics
autres que ceux à caractère indus-
triel et commercial (SPIC) dans
le calcul de la répartition de la
contribution au redressement des
finances publiques. Elle est actuel-
lement calculée au prorata des RRF
des budgets principaux. Pour limiter
la baisse de leurs dotations, des col-
lectivités cherchent à sortir des
recettes du budget principal en
créant des BA. L’objectif des auteurs
du texte, dont le député PS Olivier
Dussopt, est «d’être le plus juste
possible dans la répartition de l’effort,
indique-t-il. Les travaux engagés
dans le cadre de la réforme de la
DGF seront l’occasion d’examiner si
cela peut être une piste intéressante
ou pas ». Pour Christophe Michelet,
président de Partenaires finances
locales, cet amendement vise la
gestion des déchets qui peut être
soit intégrée au budget principal,
soit faire l’objet d’un budget annexe
«dans la mesure où ils sont financés
par la fiscalité (TEOM) et non par
une redevance. Car dans ce dernier
cas, il s’agit d’un SPIC». Théorique-
ment, la création des BA est limitée
aux activités industrielles et com-
merciales (eau, assainissement,
transports urbains, réseaux de télé-
com) et à celles assujetties à la TVA.
«Les intercommunalités et surtout
les communautés de communes sont
les principales concernées : elles
exercent la compétence déchets
et le poids de la TEOM peut être très
significatif dans leurs recettes»,
ajoute le consultant. L’Assemblée
des communautés de France (AdCF)
constate d’ailleurs la création d’un
certain nombre de BA dédiés aux
déchets. Pour Nicolas Portier, délégué
général de l’AdCF, «avoir une straté-
gie de BA se comprend puisqu’au
sein du bloc communal, les commu-
nautés contribuent proportionnelle-
ment davantage à l’effort». Alors
qu’elles pèsent 23% des recettes,
leur contribution a été fixée à 30%
et à 70% pour les communes. T F. P.
Le décret n°2015-1610 du 8 décembre 2015 (NOR: DEVT1520612D) supprime la notion
de périmètre de transports urbains (PTU). Ce sont désormais les caractéristiques propres
des services qui sont prises en compte, soit : «tout service de transport de personnes exécuté
de manière non saisonnière dans le ressort territorial d'une autorité organisatrice de la mobilité
(AOM), soit au moyen de véhicules de transport guidé, soit au moyen de tout véhicule terrestre
à moteur, à l'exception des autocars.»
Le décret n° 2015-1670 du 14 décembre 2015 (NOR: fCPE1510571D) «précise les disposi-
tions comptables et financières applicables aux conventions de mandat conclues par les collecti-
vités territoriales et leurs établissements publics pour l'encaissement de leurs recettes». Le champ
des recettes est étendu à celui des redevances de stationnement ou au produit des reve-
nus tirés d'un projet de financement participatif.
TEXTES OFFICIELS
DÉCRET
Convention de mandat pour l’encaissement
des recettes des collectivités territoriales
DÉCRET
Nouveaux critères des services de transport urbain
6. 6 i N°31 i 24 décembre 2015
CourrierCABL’INFORMATION DES DÉCIDEURS DES POLITIQUES PUBLIQUES
L
’année 2015 a été rude pour le sec-
teur du photovoltaïque, affecté
par des baisses de tarifs. Mais un
retour d’activité se met en place pour les
prochaines années. En effet, le Gouver-
nement a décidé de relancer la filière,
mais hésite toutefois entre deux objectifs
à l’horizon 2023 : passer à une production
d’électricité solaire de 12 ou 20 gigawatts.
Un grand pas en avant si l’on considère
que la production actuelle n’est que de
6 gigawatts. «Cela permet de changer com-
plètement de dimension, se réjouit le syndi-
cat des énergies renouvelables (SER),
de tels objectifs relanceront le développement
de la filière industrielle et de nos exporta-
tions.» De son côté, l'Assemblée nationale
a décidé que le Crédit d'impôt pour la
transition énergétique (CITE) s'appliquera
bien aux panneaux solaires hybrides.
Les énergies renouvelables font aussi par-
tie des programmes opérationnels de
nombreuses Régions et devraient béné-
ficier de fonds fEDER. La Commission
européenne considère l’efficacité énergé-
tique et le développement des énergies
renouvelables comme prioritaires pour
la période 2015-2020. La Banque euro-
péenne d’investissement (BEI) a déjà
commencé à financer les premières so-
ciétés de tiers tournées vers les particu-
liers, et les propriétaires de logements
bénéficieront de conditions de prêts at-
tractives. Cependant, l’activité s’est ef-
fondrée ces dernières années dans le ré-
sidentiel, l’agriculture ou le tertiaire, et
ne devrait pas remonter la pente avant
2017.
Des appels d’offre
pour les collectivités
Les collectivités territoriales devraient
jouer un rôle déterminant : Ségolène
Royal a annoncé un calendrier d’appels
d’offres, «qui permet enfin d’avoir une vi-
sibilité à moyen terme», estiment les indus-
triels qui soulignent la qualité du suivi
du dossier par le cabinet de la ministre
de l’Écologie, du Développement durable
et de l’Énergie. Les centrales solaires au
sol seront particulièrement favorisées,
françois Hollande ayant annoncé un
doublement des appels d’offre pour les
projets supérieurs à 250 kW. face à la pré-
sence massive de panneaux solaires asia-
tiques, le SER rappelle que «le prix n’est
pas le seul critère des appels d’offre : les émis-
sions carbone, l’intégration environnemen-
tale, l’innovation et la qualité aux normes
iSO comptent autant que les prix dans le
choix des lauréats». Et les délais sont ré-
duits : les nouvelles équipes des Régions
doivent déjà se plonger dans les cahiers
des charges, la date limite des prochains
appels d’offre étant fixée à fin juin 2017. T
FABRICE POZZOLI-MONTENAY
SONDAGES
V Les Français pour des
«propositions communes»
68% des Français pensent que des «propo-
sitions communes» venant de la gauche, de
la droite et du centre seraient «une bonne
chose», révèle un sondage Odoxa paru le
15 décembre dans Le Parisien. 31% des
sondés estiment au contraire que «les partis
perdraient leur identité» dans ce cas.
75% des sympathisants de gauche et de
droite sont favorables à ce rapprochement
sur des projets alors que 64% des proches
du Front national le refusent. L’étude montre
également que 46% des sondés, invités
à dire qui de Marine Le Pen ou de Nicolas
Sarkozy «se trouve aujourd'hui [le] plus avan-
tagé par le résultat des élections régionales»,
n'en désignent aucun. 24% citent cependant
la présidente du FN, 18% celui des Républi-
cains et 12% l'actuel chef de l'État. 60% de
Français interrogés souhaitent que François
Hollande conserve Manuel Valls à Matignon.
V Les jeunes optimistes
sur le vivre ensemble
68% des jeunes sont globalement optimistes
sur la capacité de la société à «vivre ensem-
ble» selon un sondage OpinionWay pour
Agefa PME réalisé debut décembre auprès
de 800 individus de moins de 30 ans. Une
proportion qui monte à 73% parmi les moins
de 21 ans. S’ils reconnaissent à 74% que,
pour eux, l’école a «bel et bien rempli son
rôle», ils ne sont plus qu’un sur deux à esti-
mer que l’institution remplit «bien» son rôle.
Après les attentats, 89% affirment même
que l’école «devra en faire davantage»
dans le futur. 89% reconnaissent toutefois
que l’engagement citoyen des jeunes est
«un vecteur d’une société plus unie et plus
forte». Et ce sont les associations de proxi-
mité qui recueillent le plus de suffrages
(65%), devant l’engagement solidaire huma-
nitaire (61%). 29% de ces sondés envisagent
de s’engager pour la défense nationale.
La filière photovoltaïque compte sur
de nouveaux appels d’offre pour se relancer
ÉCONOMIEPARUTION
«Le règne
des entourages»
Sous-titré «Cabinets
et conseillers
de l’exécutif»,
l’ouvrage rédigé
sous la direction
des professeurs
d’université Jean-
Michel Eymeri-Douzans, Xavier Bioy
et Stéphane Mouton, révèle au
grand jour ces «collaborateurs
de l’ombre» et leur présence dans
les sphères du pouvoir depuis
le conseil du Roi, jusqu’à la raillée
«République des conseillers».
Une fresque thématique qui balaye
l’histoire politique française,
en évoquant aussi bien la
«cabinetocratie bruxelloise»,
«la collectivisation de la fonction
ministérielle» ou les «hommes
du président» américain.
Le «phénomène générique
des entourages» est ainsi comparé
à l’échelle internationale, car on
observe une «généralisation dans
les démocraties contemporaines».
Une somme érudite, sous tous
les aspects des sciences sociales
et qui sait également s’attacher
des témoignages. Une mise
en perspective nécessaire. I
Le règne des entourages, Presses
de Sciences Po, 875 pages, 36 €
D.R.
CARRIÈRES
Le nouveau bureau
de Dextera
L’association des directeurs de cabinet de
droite Dextera est présidée par Alexandre
Mora, dircab de la ville et de la métropole
de Reims (51). Olivier Berlioux, dircab
du conseil départemental de la Charente
(16) est élu président d’honneur. À titre
posthume, Catherine Rousselet (†) et
Pierre-Yves Brochand (†) ont reçu cette
même distinction. Thomas Dubois, dircab
de Conflans-Sainte-Honorine (78) est élu
vice-président, Jean-Sébastien Tardieu,
dircab du conseil départemental
de l'Isère (38), trésorier. Christophe Le
Ciclé, dircab de l’Agglo du Pays de Dreux,
est élu secrétaire général. Il est entouré
de deux adjoints : Claire Cauchetier,
dircab et dircom de la communauté
d’agglomération Europ'Essonne (91)
et Pierre-Marc Dufraisse, dircab
de Saint-Cyprien (66).
7. N°31 i 24 décembre 2015 i 7
CourrierCABL’INFORMATION DES DÉCIDEURS DES POLITIQUES PUBLIQUES
3
2
4
FICHE SYNTHÈSE
1L’urgence ne souffre
pas de retard
Dans son essai intitulé la traversée des ca-
tastrophes (Seuil, 2010), le philosophe
Pierre Zaoui écrit : «On ne se met ordinai-
rement à penser que quand la vie s'arrête,
au moins déraille, dysfonctionne, fait trop
souffrir.» à bien des égards, la france
déraille, dysfonctionne et de nombreux
citoyens souffrent. S’est-elle mise à pen-
ser, réellement ? Après les attentats du
13 novembre, la vie «d’avant» s’est arrê-
tée. La sphère politique, toute à l’immé-
diateté de la réponse réclamée par l’opi-
nion publique, n’a pas eu le temps
d’élaborer une pensée. L’urgence, dans
son étymologie même, ne souffre pas de
retard, impose l’action rapide.
De nombreux universitaires, intellectuels,
philosophes, sociologues, ont depuis
réfléchi à la séquence et questionné la
principale réponse institutionnelle, sécu-
ritaire : l’instauration de l’état d’urgence.
Une réponse monolithique rapide, sim-
ple comme un slogan, a priori populaire
– même s’il ne faut jamais oublier la dé-
monstration de Bourdieu qui alertait, dès
1972 : «l’opinion publique n’existe pas.»
L’état d’urgence, prévu par la loi du
3 avril 1955, est une dérogation aux
droits fondamentaux qui renforce le pou-
voir policier au détriment du judiciaire,
assoit la primauté du glaive sur la
balance. Perquisitions administratives,
assignations à résidence sans débat
contradictoire basées sur les fameuses – et
parfois fumeuses – «notes blanches»…
Le bâtonnier de Paris, Pierre-Olivier Sur,
a rapidement dénoncé un «recul des
libertés publiques». Amnesty International
relève que «le spectre des personnes poten-
tiellement visées par l’état d’urgence est beau-
coup plus large que la réponse aux attaques
du 13 novembre à Paris». Les assignations
à résidence de militants écologistes,
même radicaux, en pleine COP21, ont
renforcé ces interrogations.
De la com’ ?
Interrogations d’autant plus importantes
que françois Hollande souhaite changer
la loi fondamentale pour y inscrire cet
état d’exception, et a obtenu le 18 dé-
cembre un avis favorable du Conseil
d’État. Le philosophe Marcel Gauchet
voit dans ce «pacte de sécurité», annoncé
par le président, avant tout «un pacte
télévisuel, dicté par les impératifs de la com-
munication politique». Une partie des
décisions post-attentat relèveraient ainsi
en priorité du domaine de la communi-
cation. Les experts en communication de
crise définissent parfaitement ces temps
où il faut dramatiser pour mieux rassurer
ensuite. On peut aussi se replonger avec
intérêt dans les travaux du philosophe
Jacques Ellul sur les rapports complexes
entretenus par l’information, la propa-
gande et la démocratie – la propagande
dont l’objet est bien de «provoquer l’action
sans passer par la réflexion». Mais pour
accompagner l’émotion collective, il va
probablement falloir repenser le monde
avant d’agir. Même les communicants
tirent la sonnette d’alarme. L’association
Communication publique, et ses 300 mem-
bres, la plupart directeurs de la commu-
nication et collaborateurs de cabinets,
dénonce dans son manifeste paru en
octobre «les dérives des communications
court-termistes et sans vision» et réaffirme
que «soutenir une politique publique, ce
n’est ni monter un “coup de com” ni jouer
au spin doctor».
Sécurité et effet
de simple exposition
Depuis une trentaine d’années, la sécu-
rité, cet «ogre jamais rassasié», selon
l’image de Jean-Marie Delarue, a phago-
cyté le débat. Pour ce conseiller d’État,
ce thème apparaît comme par hasard
dans le débat public concomitamment
aux ébranlements industriels des années
1980 et l’installation d’un chômage
massif. Incapables de défendre la sécurité
de l’emploi, les gouvernements succes-
sifs ont fait en sorte de déplacer l’intérêt
sur la défense de la sécurité physique
des citoyens. Par le célèbre «effet de simple
exposition» théorisé par le psychologue
Robert Zajonc, la sécurité – sans qu’on
la définisse très précisément – est deve-
nue l’une des préoccupations premières
de la population et un gimmick chez les
élus un brin déboussolés par leur inca-
pacité à reprendre la main sur le terrain
de l’emploi. à ce jeu dangereux, le front
national gagne à mesure que la crédibi-
lité dans la parole publique décroit.
Bien d’autres points mériteraient cepen-
dant que l’on décrète des états d’ur-
gence. Depuis le 13 novembre d’ailleurs,
le thème est décliné à l’envi : état d’ur-
gence environnemental, pour les parti-
cipants à la COP21 ; état d’urgence
économique, pour Pierre Gattaz ou Jean-
Luc Mélenchon, avec des objectifs bien
différents ; état d’urgence démocratique,
enfin et surtout, après les élections ré-
gionales. Les arguments de chacun sont
recevables. L’environnement, l’emploi,
la démocratie sont suffisamment mal en
point pour que l’on se penche sérieuse-
ment sur leur sort. Mais sans doute pas
dans l’urgence.
Vers une démocratie plus
participative à l’échelon local
Les solutions viendront probablement
des territoires plus que de l’État. La
Ve
République, dans sa version quin-
quennale, «personnalise à outrance la
politique», comme l’explique l’universi-
taire Paul Alliès – chaud partisan de
la VIe
République. Les écuries présiden-
tielles sont d’ailleurs déjà prêtes. Le travail
parlementaire va bien sûr se poursuivre ;
des lois seront votées, promulguées.
Mais le désamour entre les citoyens
et les élites politiques est aujourd’hui
abyssal. En revanche, la crédibilité de
l’échelon local reste forte – de 60 à 70%,
selon le baromètre de la confiance en la
parole publique. Des dynamiques y sont
impulsées en termes de développement
économique, d’attractivité. La loi sur la
transition énergétique, comme la COP21,
a démontré la pertinence de l’action
locale pour lutter contre le réchauffe-
ment climatique et promouvoir le déve-
loppement durable. Et c’est à l’échelon
local que, petit à petit, une démocratie
plus participative voit le jour, dans
un cadre urbain moins excluant. Enfin,
c’est bien localement que peuvent être
menées les politiques culturelles indis-
pensables au renforcement du lien
social. T BRUNO WALTER
LA FRANCE EN ÉTAT(S) D’URGENCE
De Charlie Hebdo au Bataclan, de la transition énergétique à la COP21, d’Uber au Front national : 2015 tire le rideau sur une
France en état(s) d’urgence sécuritaire, environnemental, démocratique et social. L’échelon territorial est probablement
celui qui offrira le plus de réponses.
8. V Louis-Marie Le Roy
CONSEIL RÉGIONAL DES PAYS DE LA LOIRE
Louis-Marie Le Roy est nommé directeur
de cabinet de Bruno Retailleau (LR),
nouveau président du conseil régional
des Pays de la Loire. Ce journaliste, ancien
directeur de la rédaction de TV Vendée (85),
fut notamment le directeur de cabinet de
Bruno Retailleau au conseil départemental
de la Vendée.
V François Ravier
CABINET DE GEORGE
PAU-LANGEVIN
Le sous-préfet François
Ravier est nommé directeur
adjoint du cabinet de la minis-
tre des Outre-mer. Il était jusque-là
directeur général des services du conseil
régional de Basse-Normandie.
V Manuel Leconte
CABINET D’ALAIN VIDALIES
Manuel Leconte est nommé conseiller
social au cabinet du secrétaire d’État
chargé des Transports, de la Mer
et de la Pêche, Alain Vidalies.
V Hélène Girardot
PRÉFECTURE DES
PYRÉNÉES-ORIENTALES
Hélène Girardot, sous-préfète
de Commercy, est nommée
directrice de cabinet de la préfète
des Pyrénées-Orientales. Elle remplace
Thomas Thiebaud.
V Grégoire Odou
CABINET D’AXELLE LEMAIRE
Grégoire Odou est nommé
conseiller startups et usages
numériques au cabinet de la
secrétaire d'État chargée du
Numérique, et Florent De Bodman, conseiller
ouverture des données et transformation
numérique de l'action publique.
V Sandrine de Guio
CABINET D’ANNICK GIRARDIN
Sandrine de Guio, directrice adjointe
de cabinet, est promue directrice de cabinet
de la secrétaire d'État chargée
du Développement et de la Francophonie.
V Yohan Philippe
FONDATION CURIE
Yohan Philippe, directeur de
cabinet et de la communica-
tion du maire du 3e
arrondis-
sement de Lyon, Thierry Philip
(PS et non LR comme nous
l’avons écrit dans notre n°28),
devient son directeur de cabi-
net adjoint à l’Institut Curie.
C’est Elsa Peysson, actuelle
directrice adjointe, qui dirigera le cabinet
de l’édile à compter du 1er
janvier.
V Stéphane Cieniewski
CABINET DE MICHEL SAPIN
Stéphane Cieniewski remplace Nicolas
Trimbour au poste de conseiller des affaires
financières bilatérales et développement
au cabinet du ministre des Finances.
Amélie Lummaux succède à Jean-Pierre
Testaud comme conseillère synthèse des
dépenses et Marie Chanchole est nommée
conseillère synthèse des recettes.
V Cécile Mexandeau
SMACL
Cécile Mexandeau, directrice
de cabinet du maire de Bondy
(93), a été nommée directrice
des relations institutionnelles et de la com-
munication externe de la Société mutuelle
d’assurance des collectivités locales
(SMACL). Elle quittera la présidence
de DIRCAB, l’association des directeurs de
cabinet des collectivités locales à direction
socialiste et républicaine, lors de la pro-
chaine assemblée générale en avril 2016.
V Mickaël Dahan
VILLE DE BONDY
Mickaël Dahan a été nommé
directeur de cabinet du maire
de Bondy (93), Sylvine
Thomassin (PS), en remplacement
de Cécile Mexandeau. Il a notamment été
directeur de cabinet du maire d'Aubervilliers
(93) après avoir été chef de cabinet du maire
du 20e
arrondissement de Paris.
8 i N°31 i 24 décembre 2015
11, rue des Olivettes – CS 41805 – 44018 Nantes Cedex 1 – France. Tél : 02 18 46 06 06 – fax : 02 40 20 60 30. redaction@courriercab.com – www.courriercab.com
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CourrierCABL’INFORMATION DES DÉCIDEURS DES POLITIQUES PUBLIQUES
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NOMINATIONS AU SEIN DES CABINETS
D.R.
I
l y a autant de directeurs de cabinet qu’il y a d’élus». à 32 ans,
Grégoire Catry, directeur de cabinet du maire d’Arras (62),
frédéric Leturque (UDI), a une vision claire de sa fonction.
Et pas mal d’expérience. Titulaire d’un master 2 en Science
Politique (Lille 2), celui qui souhaitait devenir journaliste se pas-
sionne pour la chose publique. S’il envisage une carrière universitaire, le peu de
débouchés l’en écarte. Là, un ami d’enfance l’informe que le groupe UDf du conseil
régional du Nord - Pas-de-Calais cherche un collaborateur «au regard neuf». Il se
présente face à frédéric Leturque et le «feeling» naît. Il rentre dans le grand bain :
«Ce fut très formateur, se souvient-il, j’étais le seul assistant, j’ai donc touché aussi bien
aux aspects politiques qu’aux dossiers techniques de fond.» Mais le groupe, tiraillé,
implose. frédéric Leturque lui présente le sénateur-maire d’Arras, Jean-Marie
Vanlerenberghe (MoDem), dont il devient l’assistant parlementaire. Il parcourt
alors le Pas-de-Calais, ses 900 communes et édiles, se forge un réseau et s’initie
à la mécanique municipale. Adhérent éphémère du MoDem, il se frotte aux mu-
nicipales 2008 à Saint-Omer puis aux régionales 2010, sans succès. En 2011, frédéric
Leturque devient maire d’Arras et rappelle Grégoire Catry, qui devient son dircab,
naturellement. Aujourd’hui à l’UDI, comme son élu, cadre national de premier
rang dont il suit l’activité partisane, c’est à la ville qu’il œuvre le plus. «C’est à la
fois un rôle de conseiller, de filtre pour que ne parviennent au maire que les choses impor-
tantes, et un rôle d’organisateur, parce que je n’ai pas de chef de cabinet.» Et pour faire
vivre sereinement la majorité, il est aussi la «courroie de transmission entre les élus
et le maire». Une “diplomatie“ acquise sur le terrain. I JÉRÔME VALLETTE
V Grégoire Catry
DIRECTEUR DE CABINET, VILLE D’ARRAS
EN VUED.R.
D.R.
D.R.
D.R.
D.R.
D.R.
D.R.