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Newsletter N°5
Mars 2016
Syndicat Français de l’Intelligence Économique
« Faire de l'intelligence économique un levier de croissance pour les entreprises et les territoires »
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« L'éthique comme
fondement des métiers de
l'intelligence économique »
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Newsletter N5
Mars 2016
DOSSIER THÉMATIQUE
"LES NOUVELLES MENACES PESANT SUR
LES FLEURONS INDUSTRIELS FRANÇAIS".
D'où viennent ces menaces ?
Quels secteurs sont particulièrement visés ?
Comment se défendre ? »
2. Sommaire
www.synfie.fr Page 2 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
EDITORIAL
| PAGE 3
TRIBUNE LIBRE
| PAGE 18
ACTUALITÉ DE L’IE
| PAGE 40
« LES NOUVELLES MENACES PESANT SUR
LES FLEURONS INDUSTRIELS FRANÇAIS »
D'où viennent ces menaces ?
Quels secteurs sont particulièrement visés ?
Comment se défendre ? »
DOSSIER THÉMATIQUE
| PAGE 4
LES ARTICLES DE NOS MEMBRES
05
| PAGE 37
ARTICLES
01
02
VIE DU SYNDICAT
| PAGE 33
06
| PAGE 39
ANNONCES04
| PAGE 35
NOMINATION
03
| PAGE 34
NOUVEAUX
ADHÉRENTS
EVÉNEMENTS
| PAGE 44
3. Editorial
www.synfie.fr Page 3 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Depuis plusieurs dizaines d'années, l'industrie française s'affaiblit. Sa part dans la contribution
de la richesse nationale baisse, le nombre d'emplois industriels diminue, les délocalisations se
poursuivent à un rythme élevé. Les grands succès industriels se font rares (Airbus, spatial). Plus
grave encore, des pans entiers de notre industrie sont menacés et passent sous pavillon étran-
gers : on pense ces dernières années à Arcelor, Alcatel ou plus récemment encore à la branche
énergie d'Alstom. On peut ajouter à ce froid constat un mouvement moins spectaculaire mais
tout aussi préoccupant: la prise de contrôle par des capitaux étrangers de start-ups innovantes
en pleine croissance à la recherche de moyens financiers.
Mon propos n'est pas ici de déplorer la mondialisation et ses effets sur l'économie française.
Vouloir l'empêcher n'a pas de sens. Pleurer sur son sort est un aveu d'échec. Non il s'agit plutôt
de se demander si notre pays, ses dirigeants, ses entreprises ont les outils nécessaires pour se
préparer à ses défis, les anticiper, se défendre lorsqu'on l'estime nécessaire, trouver des parte-
naires pour empêcher des attaques inamicales.
Ses préoccupations ne sont rien moins que les fondements d'une nouvelle politique industrielle
pour notre pays.
Cette re- fondation, pour autant qu'on l'a souhaite, nécessite des actions immédiates :
identification précise des secteurs stratégiques pour notre pays;
anticipation des menaces pesant sur certains secteurs où certains groupes industriels fran-
çais ;
construction de dispositifs juridiques pour se défendre des agressions juridiques ou finan-
cières d'acteurs étrangers ;
réflexion pour imaginer des dispositifs financiers adaptés aux besoins de croissance des
PME ou ETI innovantes ;
recherche de partenariats stratégiques en amont avec des pays étrangers ou des fonds
souverains.
On peut toujours dire qu'il était impossible d'empêcher telle ou telle opération hostile. On peut
toujours se retrancher derrière l'inéluctabilité de la mondialisation et de ses effets. On serait en
revanche lourdement coupable de ne pas se donner tous les moyens de l'intelligence et de l'an-
ticipation pour se prémunir des dangers.
Alexandre MEDVEDOWSKY,
Président du SYNFIE
Alexandre MEDVEDOWSKY
Président du SYNFIE,
ESL & Network
4. Editorial
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« LES NOUVELLES MENACES PESANT SUR
LES FLEURONS INDUSTRIELS FRANÇAIS »
D'où viennent ces menaces ?
Quels secteurs sont particulièrement visés ?
Comment se défendre ? »
01
DOSSIER THÉMATIQUE
5. Dossier thématique
www.synfie.fr Page 5 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
P
our illustrer notre propos, nous avons
sciemment emprunté ce titre à Michel
HOUELLEBECQ, mais cela aurait pu être éga-
lement celui de son dernier ouvrage Soumis-
sion, si nous n’y prenons pas garde compte tenu de ce
qui est évoqué ci-dessous.
En effet, une réalité s’impose, le changement de para-
digme d’un monde unipolaire basculant vers un en-
semble multipolaire, modifie profondément les rap-
ports de force et les stratégies de puissance. A ce jeu,
les Etats-Unis d’Amérique semblent vouloir conserver
leur avantage économique – et monétaire car n’ou-
blions pas que leur influence repose essentiellement
sur le dollar comme devise étalon – et retarder leur
effacement relatif face à la montée de systèmes sus-
ceptibles de contester leur rayonnement. C’est la rai-
son pour laquelle ils cherchent à conserver la supré-
matie sur l’Europe, ou à tout le moins à l’affaiblir pour
mieux asseoir son autorité. C’est la face cachée de la
mondialisation qui se traduit par une crainte affirmée,
créant un état de sujétion.
Ce faisant, les USA sont clairement passé du soft law
– choix de systèmes économiques et juridiques non
contraignants mais relevant de leur modèle (OCDE,
OMC, traités transnationaux) – au hard law, avec le
souci d’imposer leurs règles économiques et commer-
ciales adossées à un système juridique redoutable,
quitte à générer des distorsions manifestes de con-
currence, pour mieux s’en affranchir quand il s’agit de
leurs intérêts propres. Cette guerre asymétrique,
dont l’extraterritorialité du droit en est désormais
l’arme principale, est aujourd’hui une nouvelle con-
flictualité dont le Department of Justice (DOJ) en est
le bras armé.
Pour paraphraser VON CLAUSEWITZ, lequel affirmait
que la guerre est le prolongement de la politique par
d’autres moyens, nous pensons que « le droit est le
prolongement de la guerre économique, par d’autres
moyens ».
L’emprise de l’empire
C’est la raison pour laquelle, au nom d’un prétendu
messianisme originel consubstantiel à la naissance de
cet Etat, plusieurs initiatives ont été dernièrement
engagées pour asseoir davantage cette domination
juridique parmi lesquelles on peut mentionner :
La mainmise judiciaire, via leur domination financière,
sur les échanges mondiaux, sous couvert de morale.
Cette affirmation de puissance s’illustre brutalement
en matière de violation d’embargos, par la récente
affaire de la BNP PARIBAS, laquelle banque française
a été amenée à payer une amende record de 9 mil-
liards de Dollars US à l’administration américaine(1)
.
Le prétexte était une opération libellée en dollars
pour un investissement réalisé en Iran (mais aussi le
Soudan et Cuba), pays que les Etats-Unis ont mis au
ban, et ce par une banque française. Or, la compensa-
tion a été opérée par des comptes américains, seul et
unique lien de rattachement de l’affaire, en dehors de
tout acte passé sur le sol américain. A cet égard, il
faut souligner qu’il se s’agit pas d’une procédure judi-
ciaire, devant une juridiction de droit commun, mais
un cas suivi par une autorité administrative devant
laquelle BNP PARIBAS a du s’infléchir et plaider cou-
pable, pour éviter un procès qui aurait été long, dis-
pendieux et qui aurait pu être plus grave encore en
matière de réputation(2)
.
1
« BNP Paribas tremble et implore la
clémence des Américains » in Le Figaro,
13/05/2014, « La chambre de compensa-
tion, la clé de l’amende BNP » in Le
Monde 03/06/2014
2
GARAPON A. et SERVAN-SCHREIBER Dir.,
« Deals de Justice, le marché américain
de l’obéissance mondialisée », PUF, 2013
L’EXTRATERRITORIALITE OU L’EXTENSION DU DOMAINE DE LA LUTTE
6. Dossier thématique
www.synfie.fr Page 6 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Pour les mêmes raisons, et dans un contexte simi-
laire, le CREDIT AGRICOLE a été contraint de s’ac-
quitter d’une amende de 787 millions de Dollars US,
en raison des opérations passées – et compensées en
billets verts – avec l’Iran, le Soudan, le Myanmar et
Cuba entre 2003 et 2008. Cet arrangement, ou deal of
justice, a permis à l’établissement financier de con-
server son agrément bancaire sur le territoire améri-
cain et a échappé à toute sanction pénale. Cette jus-
tice négociée se pratique à l’avantage financier du
Trésor américain. La DEUTSCHE BANK, la SOCIETE GE-
NERALE et UNICREDIT seraient désormais dans le col-
limateur de l’administration américaine pour des faits
similaires.
C’est au titre des mêmes lois d’embargos que les
autorités américaines ont enjoint à PEUGEOT de se
retirer du territoire iranien en 2012, pour mieux ten-
ter de lui substituer GENERAL MOTORS (même si le
boycott s’achevant, PEUGEOT a su conserver ses posi-
tions pour mieux revenir).
Animé par cet esprit de moralisation des affaires –
sachant que les USA bannissent et stigmatisent à
juste titre certaines pratiques répréhensibles, mais
sans toutefois admettre la violence économique qu’ils
pratiquent au rang des comportements blâmables –
la corruption a été érigée en mal absolu, en mécon-
naissance parfois des cultures patrimoniales locales,
pour mieux évincer des concurrents de certains mar-
chés, ou à tout le moins des déstabiliser. C’est dans
ces conditions qu’ALSTOM a été visée par une procé-
dure américaine fondée sur le Foreign Corrupt Prac-
tice Act (FCPA), ayant conduit à la scission du groupe
industriel au bénéfice de GENERAL ELECTRIC, pour
l’activité énergie, sans d’ailleurs que l’entreprise ne
soit libérée de l’amende à laquelle elle s’expose. TO-
TAL et TECHNIP en ont également fait les frais, toutes
ses sociétés devant ensuite, comme BNP PARIBAS
jusqu’en 2019, accueillir un corporate monitor, un
déontologue, qui n’est pas l’œil de Moscou, mais bien
celui de Washington, son seul maître.
Enfin, l’affaire VOLKSWAGEN révèle une domination
d’un autre genre, où la norme permet d’affaiblir l’ad-
versaire. S’il est acquis que le constructeur automo-
bile allemand a triché, il n’en demeure pas moins que
l’orchestration de cette tromperie technique est une
opération destinée à affecter durablement l’image de
la marque, outre une ponction financière pouvant
s’élever jusqu’à 37 000 Dollars US par véhicule vendu
aux USA. En matière environnementale, l’entreprise
pétrolière BP, accusée d’être à l’origine d’une marée
noire dans le Golfe du Mexique, a pour sa part fait
l’objet d’une amende de 20,8 milliards de Dollars US.
« Loin d’être une fin en soi, ces sanctions ont donc
permis aux Etats-Unis de préserver, voire de dévelop-
per les marchés de leurs entreprises nationales, en
affaiblissant leurs concurrents, sous couvert du res-
pect de l’environnement (BP, VW) ou de la démocratie
(PSA, BNP). »
Ainsi, les américains tentent ouvertement, par le biais
du chantage au procès (dont l’issue reste inconnue),
d’obtenir la soumission des acteurs économiques,
dans le cadre de l’extraterritorialité de la loi. En
d’autres termes, en dépit de tout lien de rattache-
ment géographique, par le biais du dollar notamment
les Etats-Unis s’érigent en organe de régulation des
transactions internationales.
3
« Amende de près de 700 millions d’Eu-
ros pour le Crédit Agricole », Le Figa-
ro, 20/10/2015
4
Alstom aura droit à son surveillant
Intelligence OnLine, n°726 du 24 dé-
cembre 2014, ; BNP : le mandat de Guide-
post prolongé ? IOL, n°739, 8 juillet
2015 ; La diplomatie de la corruption,
IOL, n°698, 23 octobre 2013. Lire aus-
si :
5
« L’affaire Volkswagen relève d’une
guerre économique menée par tous les
moyens possibles », Alain Juillet sur
Francetvinfo.fr le 23/09/2015
6
« Sanctions américaines records : un
moyen pour les Etats-Unis de contrôler
leur environnement concurrentiel écono-
mique ? » par Angélique Steinbach, sur
www.portail-ie.fr, le 27/10/2015
7. Dossier thématique
www.synfie.fr Page 7 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Toutefois, en agissant de la sorte ils se placent délibé-
rément sur le terrain du hard law ce qui fait dire, à
juste titre, à Christian HARBULOT que « l’affaire BNP
PARIBAS n’est pas le révélateur de la suprématie amé-
ricaine mais plutôt l’expression d’une certaine forme
de faiblesse (…) en affichant ouvertement une dé-
marche aussi impérialiste »(7)
. En résumé, le « doux
commerce » est désormais assuré par la terreur,
autre conception de la finalité clausewitzienne de la
guerre considérée comme étant « un acte de violence
destiné à contraindre l’adversaire à exécuter notre
volonté. »
Le renforcement de la mainmise arbitrale sur les
échanges économiques et monétaires, à travers la
négociation du futur traité transatlantique de libre-
échange (TTIP ou TAFTA), visant à créer une zone
transfrontalière élargie entre l’Europe et le monde
nord-américain. Si les pourparlers sont actuellement
tenus secrets, il n’en demeure pas moins que les dis-
positions discutées contiennent le principe d’un règle-
ment des litiges commerciaux (clause ISDS) per-
mettant aux entreprises américaines d’engager des
voies de recours, non pas devant les juridictions euro-
péennes de droit commun, mais devant une instance
arbitrale ad hoc que serait le Centre International de
Règlement des Différends liés à l’Investissement
(CIRDI), dépendant de la banque mondiale, établi à
Washington et cela pour les lois d’un Etat qui seraient
contraires à leurs intérêts commerciaux.
De timides ripostes
Pour l’heure, l’Europe n’a pas encore su s’organiser
pour s’affranchir de cette pression extrajudiciaire
qu’elle a d’abord niée par naïveté probablement.
Et pourtant, plusieurs alternatives méritent d’être
étudiées.
En premier lieu, on pourrait songer à se doter d’une
institution européenne chargée elle-même d’instruire
de telles actions judiciaires, afin de ne pas se dépos-
séder de cet instrument régalien au profit des USA et
qui serait in fine l’expression d’une souveraineté juri-
dique. Cette autorité judiciaire pourrait à cet égard
devoir négocier avec GOLMAN SACHS, à l’origine des
comptes publics truqués de la Grèce lors du passage à
l’Euro, et dont les plans de relance ont affaibli les ca-
pacités monétaires de l’Europe. La sanction devrait
être le retrait de l’agrément sur tout le territoire de
l’Union Européenne, outre une amende financière
substantielle.
Cette même institution devra également être saisie
de toute affaire sensible impliquant directement ou
indirectement toute entreprise extra européenne, à
condition toutefois que cette autorité ne retourne pas
cette arme contre les sociétés européennes. En effet,
nous ne savons que trop cultiver une certaine agilité
pour pratiquer l’auto flagellation.
En second lieu, il conviendra de renforcer la loi de
blocage, cette disposition législative de 1968 qui per-
met aux autorités françaises de s’opposer à la trans-
mission de toute information sensible dans le cadre
d’un procès initié à l’étranger. Bien que mal compris
par ses compatriotes, en 2012, Bernard CARAYON
avait voulu la réformer, dans la mesure où les améri-
cains ne lui reconnaissent aucune valeur. C’est la rai-
son pour laquelle, il proposait d’en limiter le champ
d’application aux secrets d’affaires, pour lui conférer
davantage de force et d’opposabilité. Une telle dispo-
sition pourrait être étendue au niveau européen.
De même, s’agissant des prises de participations d’en-
treprises étrangères au capital de sociétés euro-
péennes œuvrant dans les secteurs stratégiques (on
voit comment ALCATEL s’est trouvée mariée de force
avec LUCENT, pour mieux l’étouffer et finalement la
diminuer techniquement), il faudra s’inspirer des dis-
positions françaises(8)
.
7
HARBULOT C., « Le Terrain miné de
l’affaire BNP », in Conflits, n°3, p. 9
8
A l’instar de l’article L. 151-3 du
Code monétaire et financier, régissant
les investissements étrangers, appelé «
Décret MONTEBOURG »
8. Dossier thématique
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Enfin, il faudra une réelle autorité politique pour
briser cette asymétrie en imposant une véritable
réciprocité et non pas un principe de subsidiarité
inversé, au détriment des intérêts européens. Ce
peut être au travers d’un équivalent du small bu-
siness act européen.
Actuellement, la réplique vient davantage des
juges européens, en matière de données person-
nelles. Les révélations du soldat MANNING(9)
ou
de l’agent SNOWDEN(10)
ont mis en évidence la
capacité technique des USA à écouter le monde
entier, à grande échelle, à leur bénéfice, et ce au
nom du Patriot Act (devenu Freedom Act) adopté
dans le cadre de leur dispositif de sécurité natio-
nale adopté après le 11 septembre 2001.
Témoignant en effet d’un regain de souveraineté
quasi inattendu, la Cour de Justice de l’Union Eu-
ropéenne (CJUE), dans sa décision C-362/14 en
date du 6 octobre 2015, a rendu un arrêt infli-
geant un camouflet aux autorités de contrôle des
données américaines. En l’espèce, un internaute
autrichien, du fait des révélations « d’espionnage
numérique » dans la foulée du scandale Snow-
den, s’inquiétait que ses données personnelles
recueillies depuis son compte Facebook, puissent
être scrutées par la NSA ou le FBI, en vertu des
lois américaines de lutte contre le terrorisme. Or,
si Facebook a effectivement son siège européen
en Irlande, les données sont quant à elles expor-
tées, conservées et traitées depuis les data cen-
ters basés aux Etats-Unis. Dès lors, elles se trou-
vent placées sous le contrôle des autorités améri-
caines (et soumises aux activités de renseigne-
ment de l’Oncle Sam), pays tiers à l’Union Euro-
péenne (UE).
Ayant introduit un recours devant les juridictions
irlandaises (non sans avoir tout d’abord essuyé
un rejet de sa requête par l’Autorité de protec-
tion de la vie privée – équivalent de la CNIL), la
High court de l’Eire (Haute Cour de justice), sai-
sissait la CJUE d’une question préjudicielle
(procès suspendu dans l’attente de l’interpréta-
tion de la règle par les instances suprêmes).
Se livrant à l’analyse des normes en vigueur
s’agissant de la protection des données person-
nelles, la CJUE devait trancher en regard de la
Directive 95/46 aux termes de laquelle, sous l’ar-
ticle 28 notamment, il est énoncé que chaque
pays membre de l’UE doit instituer une autorité
de protection des données personnelles, que des
voies de recours doivent être ouvertes aux ci-
toyens concernant l’usage et l’exploitation de
leurs données,. De même, il est prévu des moda-
lités garantissant le niveau de sécurité des don-
nées personnelles des citoyens de l’UE.
Enfin, dès lors que les données du compte Face-
book étaient centralisées sur le territoire améri-
cain, la CJUE se devait d’examiner la décision
américaine 2000/520 du 26 juillet 2000 (dite
« SAFE HARBOR ») au vu des dispositions de la
Directive 95/46 et de s’assurer qu’elle offrait les
garanties nécessaires relatives au respect des
règles de protection de la vie privée compatibles
avec les normes européennes.
Ainsi, aux termes de l’arrêt du 6 octobre 2015, la
CJUE a estimé que les Etats-Unis n’offraient pré-
cisément pas de garanties suffisantes quant à la
sécurité des données à caractère personnel des
citoyens de l’UE. Par conséquent, le « SAFE HAR-
BOUR » se voit être déclaré inopérant en regard
des règles de confidentialité européennes éri-
gées par la Directive 95/46.
9
Affaire wikileaks
10
Affaire PRISM / Echelon
9. Dossier thématique
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Depuis, il a été âprement négocié un nouvel ac-
cord « EU-US Privacy Shield » rendu public le 4
février 2016. Ce nouveau traité conclu par la
Commission européenne devra être examiné par
le G29 qui rendra son avis en avril 2016. Au vu
des éléments connus, si les données personnelles
ne pourront être librement accessibles par les
opérateurs commerciaux et/ou publics, plusieurs
exceptions demeurent, et notamment celles ren-
forçant les obligations de coopération en matière
de corruption internationale (fondée sur le
FCPA). Cela étant, la loi de blocage française,
opérant une restriction dans la communication
des informations économiques sensibles, semble
être toujours de mise.
Dans le même esprit, s’agissant de l’usage inten-
sif des « cookie » par Facebook, la CNIL a publié
une déclaration commune formulée – doublée
d’une injonction – avec quatre autres autorités
européennes, rappelant les règles de sécurité qui
s’imposent aux utilisateurs du site Internet de
publication des informations personnelles. En
l’espèce, Facebook a été condamnée en pre-
mière instance en Belgique pour avoir « traqué »
des internautes en dehors de ses pages
L’Europe, toujours, qui élabore précisément un
« paquet protection des données », destiné à
présenter un cadre efficient visant à garantir un
niveau élevé de protection des données dans
l’UE. Un règlement et une directive doivent voir
le jour après un accord Commission / Parlement
intervenu le 15 décembre 2015. Le règlement
devrait permettre aux citoyens de l’UE de maîtri-
ser leurs informations personnelles contre l’abus
de leur usage par « les sociétés internationales
actives dans le domaine d’Internet », tandis que
la directive devrait instaurer une meilleure colla-
boration technique des services de police de
l’Union dans la transmission et l’échange des fi-
chiers.
Signalons par ailleurs que le projet de loi sur le
numérique (article 22) renforce la protection du
secret des correspondances, ce qui n’est sans
doute pas vain quand tous les opérateurs
(Google, Microsoft, Yahoo, …) se trouvent tous
êtres américains.
La réponse n’est pas générale et absolue et s’en-
gage prudemment au nom de la protection des
données personnelles des citoyens européennes.
Toutefois, il existe une véritable prise de cons-
cience quant à l’usage des données tirées de la
vie privée, encore récemment renforcée par la
Cour d’appel de Paris qui s’est récemment décla-
rée compétente pour juger de la publication
d’une photo sur un compte Facebook, écartant
l’attribution des compétence américaine prévue
par les conditions d’utilisation du réseau social.
C’est donc précisément sur ce terrain que l’Eu-
rope a décidé de se placer.
Dès lors, la course est engagée, et pour finir par
une locution latine qui marque la filiation avec le
droit romano germanique : vae victis !(11)
LA REDACTION
11
Malheur aux vaincus.
10. Dossier thématique
www.synfie.fr Page 10 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Il est constant que le droit est une des armes
de l’affrontement industriel et commercial
global et actuel, notamment dans sa dimension
ayant trait à l’intelligence économique(12)
. Il est
cependant légitime de s’interroger pour savoir si
le droit n’est-il pas à son tour devenu depuis
quelques années un des champs de bataille de la
guerre économique, après en avoir été une des
composantes majeures ?
Pour rester dans le champ lexical belliciste, il
n’est pas incongru d’affirmer que le droit positif
d’un état n’est autre que la loi du vainqueur
(celle de l’envahisseur, comme celle d’une majo-
rité). Historiquement, il faut se souvenir de
quelle manière le Code civil français de 1804 a
prospéré sur le continent européen avec la pro-
gression des armées de l’Empire(13)
. Il en fut de
même, le siècle suivant, avec l’expansion colo-
niale française. Et bien auparavant, les cohortes
romaines avaient propagé le droit romain dans
les possessions conquises sur le pourtour de la
Méditerranée.
A l’heure de la mondialisation, la France serait-
elle désormais passée dans le camp des vaincus ?
En effet, de la même manière que la France a en-
registrée, en 1946, une défaite culturelle contre
les Etats-Unis d’Amérique à l’issue des accords
Blum-Barnes(14)
, un autre échec s’est plus récem-
ment inscrit en matière comptable et financière
par l’introduction des normes IFRS s’imposant à
la (re)présentation des comptes sociaux des
groupes de taille internationale, lesquelles ont
depuis lors révélé et accentué la crise financière
de 2008. Précisément, le droit, qui est une di-
mension non négligeable en matière de conquête
des marchés et de dépendance économique, ne
doit pas être relégué à un simple instrument non
efficient. Il est nécessaire d’affirmer la place du
droit dans le cadre du choc des cultures, et da-
vantage dans le choc des civilisations, notam-
ment en matière de rayonnement et de puis-
sance économique.
Le défi actuel qui appartient aux Européens ré-
side donc dans la reconnaissance et l’affirmation
du droit continental. Le droit, dans son essence
même, sert d’étalon et de norme aux entreprises
humaines et aux activités commerciales, c’est
pourquoi il met en exergue les traits saillants de
sa substance en termes de sécurité et
d’influence. Il s’agit donc bien d’une arme offen-
sive, une ogive redoutable de la guerre écono-
mique. C’est en ce sens probablement que Mau-
rice Barrès affirmât : « Où manque la force, le
droit disparaît ; où apparaît la force, le droit com-
mence de rayonner ».
12
de MAISON ROUGE O., Le droit de
l’intelligence économique – patrimoine
informationnel et secrets d’affaires,
Lamy, coll. Axe Droit, 2012
13
Ce qui lui vaut d’être aujourd’hui dé-
nommé « droit continental »
14
Accords signé le 28 mai 1946 aux
termes desquels les Etats-Unis ont con-
senti à effacer une partie de la dette
de la France en contrepartie de la fin
de l’interdiction des films américains.
LA GEOPOLITIQUE DU DROIT,
L’AUTRE CHAMP DE BATAILLE DE LA GUERRE ECONOMIQUE
Par Olivier de MAISON ROUGE
Avocat - Docteur en Droit
Membre de la commission éthique du SYNFIE
11. Dossier thématique
www.synfie.fr Page 11 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
DROIT CIVIL CONTRE COMMON LAW
Ce clivage n’est pas nouveau et d’aucuns se sont
saisis du sujet précédemment pour en analyser
les tenants et aboutissants(15)
. A cet égard, même
si le différend n’est pas toujours aussi ténu dans
les faits, on peut néanmoins aisément dégager
les lignes d’affrontement, l’opposition reposant
essentiellement sur la hiérarchie des normes.
Traditionnellement, on distingue les deux pra-
tiques dans le rapport à la Loi.
Il est couramment admis que le droit continental,
qui affirme la primauté du Code civil et ses droits
dérivés, se traduit par la prééminence de la Loi
sur la volonté des parties que l’on retrouve can-
tonnée dans le contrat(16)
. Plus largement, la loi
est perçue comme l’expression de la volonté gé-
nérale, raison pour laquelle elle a une valeur ab-
solue.
A contrario, le droit coutumier (qui est une tra-
duction du common law), fait prévaloir le Con-
trat, comme affirmation de la liberté contrac-
tuelle et de l’autonomie de la volonté des par-
ties. Par conséquent, le juge ne peut défaire ce
que les cocontractants ont voulu, tandis que le
droit continental souffre davantage l’immixtion
du juge dans le contrat, au nom de l’ordre public,
expression de l’intérêt général et supérieur.
Mais la ligne de démarcation juridique ne s’ar-
rête pas à cette seule généralité. Ayant évoqué le
rôle de juge, précisément, en matière procédu-
rale, les règles diffèrent largement. Ainsi, en droit
continental, le procès est mené sur le mode dit
« inquisitoire », ce qui laisse toute faculté au ma-
gistrat pour conduire les débats. Il est maître du
déroulement de l’audience et juge du choix des
pièces et du mode opératoire de constitution de
la preuve(17)
.
En droit coutumier, si le juge n’est pas moins un
acteur du procès, la justice étant nommée
« accusatoire », il est relégué à un statut d’obser-
vateur des moyens et pièces produits par les par-
ties, selon leur propre calendrier. Les parties – et
leurs avocats – prennent l’initiative et la direction
des débats. Cela se constate notamment dans la
procédure dite de « discovery » aux termes de
laquelle les parties au procès se mettent d’accord
par convention, sans intervention du magistrat,
sur les pièces et témoignages à présenter à ce
dernier. C’est la traduction, dans la pratique, de
la notion de droit collaboratif, récemment intro-
duite en droit positif français par la procédure
participative(18)
.
De même, la jurisprudence a une valeur supé-
rieure, à l’instar de l’absence de constitution
écrite du Royaume-Uni souvent citée à titre
d’exemple.
Le trait peut être jugé caricatural, mais néan-
moins c’est ainsi que peut se résumer la fracture
entre ces deux conceptions que tout, sinon beau-
coup, oppose. Au-delà, cette césure juridique
trouve son prolongement et se traduit par
l’influence et la place du droit en matière écono-
mique, où précisément, le droit est souvent in-
terprété en matière d’avantage concurrentiel.
15
du MANOIR de JUAYE T., « La guerre du
droit aura bien lieu », in Les robes
noires dans la guerre économique, Edi-
tions Nouveau Monde, 2011.
16
Et ce en dépit de l’article 1134 du
Code civil qui énonce que « les conven-
tions légalement formées tiennent lieu
de loi à ceux qui les ont faites ».
17
de MAISON ROUGE O. chapitre « Le Pa-
trimoine informationnel à l’épreuve du
procès – La Stratégie Juridique de pro-
tection des secrets d’affaires dans le
cadre d’une procédure contentieuse » in
Stratégies juridique des acteurs écono-
miques, Tome 2, Collectif, , Larcier ES-
SEC, 2012.
18
Article 2062 et suivants du Code ci-
vil, article 1541 et suivants du Code de
procédure civile.
12. Dossier thématique
www.synfie.fr Page 12 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
INTERDEPENDANCE, DEPENDANCE OU
INFEODATION ?
Cette lutte serait sans incidence si, effectivement,
elle ne se traduisait pas par la conquête de parts
de marché du droit. A cet égard, on peut souli-
gner l’importance de la notation annuelle établie
par la fondation Doing Business, déclassant vo-
lontairement les pays de droit continental
(affirmant que le common law offre davantage
de garantie et de sécurité juridique des actes)(19)
.
De même, l’association Transparency Internatio-
nal publie chaque année une étude qui se veut un
baromètre établi sur la perception de la corrup-
tion dans le milieu des affaires, pays par pays. La
France, à l’instar des états de droit civil, se trouve
mal notée. Ce faisant, le common law s’affirme
comme la pratique usuelle incontournable, voire
comme un modèle indépassable de la pratique
des affaires, au détriment du droit continental.
C’est l’affirmation dans le monde économique de
la loi du for que connaissent bien les praticiens
du droit international privé.
Cette bataille n’est pas neutre sur le terrain de la
globalisation des échanges, dans la mesure où le
droit est partie prenante dans la traduction des
relations commerciales.
Ainsi, il est patent de relever que :
La capacité des entreprises à exporter dé-
pend en grande partie du cadre juridique
qui les contraint dans le pays d’importation
et dans lequel elles déploient localement
leurs initiatives ;
Pour exporter du droit, il faut d’abord ex-
porter des professionnels : dans les années
70, les anglais ont favorisé l’exportation de
leurs juristes, notamment les avocats des
banques britanniques, ce qui explique
qu’aujourd’hui le droit financier internatio-
nal soit largement d’inspiration anglo-
saxonne. »(20)
En effet, autre phénomène visible et révélateur,
la présence et l’implantation des cabinets anglo-
saxons dans les pays de droit civil, qui se traduit
dans les faits par l’extension et la revendication
des pratiques issues du common law.
Il s’agit bien là de la progression du droit coutu-
mier par la pratique du soft power soutenu par
des cellules pudiquement appelées « affaires ci-
viles » et qui sont dans la réalité de véritables
lobbies, imposant des normes internationales qui
mécaniquement amenuisent la part du droit civil
au bénéfice du common law, lequel s’impose in
fine comme étant le plus petit dénominateur
commun à l’échelle universelle, certes, mais donc
plus apte à être embrassé par tous. Certains y
voient davantage un moins-disant juridique,
voire du dumping. Il est néanmoins avéré que
« la mauvaise monnaie chasse la bonne »(21)
.
REPRENDRE L’AVANTAGE ?
A défaut de répondre à cette offensive, il faut
chercher un nouveau point d’équilibre pour évi-
ter que l’influence du droit civil ne faiblisse da-
vantage, conduisant au naufrage de sa force, de
ses valeurs et de ses atouts (sans pour autant
nier ses inconvénients inhérents car chaque mé-
daille a son revers). L’ambition est d’appuyer à
l’international le rayonnement du droit civil. Cela
peut se combiner notamment avec le développe-
ment de la francophonie.
19
Ibid.
20
http ://thomastoby2012.com/la-guerre-
des-droits-une-guerre-économique 16
juillet 2012
21
Selon la loi de Gresham, du nom du
commerçant et financier anglais Thomas
Gresham (vers 1519 - 1579)
13. Dossier thématique
www.synfie.fr Page 13 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Dans cet esprit de reconquête, deux actions par-
faitement complémentaires ont d’ores et déjà été
initiées, et qu’il convient de saluer :
La Fondation pour le droit continental a été insti-
tuée en 2007, précisément pour :
« Faire valoir au plan international les qualités
des droits écrits codifiés dans le souci de mainte-
nir un équilibre entre les systèmes juridiques,
Etablir une solidarité entre les juristes de droit
continental pour mener des actions communes
de promotion de ce droit,
Mettre en œuvre une stratégie d’influence juri-
dique au plan international dans l’intérêt des
entreprises du droit continental,
Valoriser, au plan international, l’expertise des
professions du droit,
Contribuer, par la formation, à l’ouverture inter-
nationale des juristes de droit continental. »
Sans être resté au stade du vœu pieux, il faut
néanmoins admettre que, faute de moyens suffi-
samment appuyés par les pouvoirs publics, cette
contribution privée a des effets encore trop limi-
tés, en dépit de la bonne volonté de ses acteurs
et animateurs. Ceux-ci dénoncent notamment,
malgré certains succès rencontrés à l’étranger
(créations de chaires, publications, …), un
manque de prise de conscience des enjeux de
cette guerre des droits.
Ce vaste chantier ne devait toutefois pas resté
totalement ignoré puisque Nicole Bricq, ministre
du Commerce extérieur, a mandaté Claude Revel,
pour rédiger un rapport destiné à « développer
[en amont] une influence normative internatio-
nale stratégique pour la France ». Cette étude a
été rendue en janvier 2013.
En substance, faisant le constat que le choix de la
loi dans les contrats n’était par innocente, les
conclusions de l’étude invitent les juristes à réin-
vestir les institutions internationales créatrices et
prescriptives de normes et de règles, telles que
l’OMC, l’OCDE, OMS, l’OIT, ... Egalement, l’auteur
du rapport estime, dans le prolongement de l’ac-
tion entreprise par la Fondation pour le droit con-
tinental, devoir générer davantage une coopéra-
tion technique entre les acteurs et représentants
des institutions en mettant en place des straté-
gies communes. Le maître-mot en définitive étant
réciprocité et cohérence. Enfin, ces préconisa-
tions ne peuvent trouver d’écho sans faire œuvre
de sensibilisation auprès des entreprises, mais
également en amont dans les écoles d’ingénieurs
et de commerce qui forment les futurs dirigeants
d’entreprise.
Cette perspective engageante sera-t-elle la
planche de salut du droit continental ? Au moins,
permet-elle de connaître l’environnement, même
si cela demeure insuffisant. A cet égard, pour le
Préfet Rémy Pautrat « il ne suffit pas de com-
prendre, il faut surtout comprendre pour agir
vite. »(22)
En guise de conclusion provisoire, si la compéti-
tion normative est effectivement féroce, il con-
vient toutefois de relever que, selon la Fondation
pour droit de continental, les pays représentant
environ 60% du PIB ont d’ores et déjà adopté un
mode référentiel relevant du droit civil ou appro-
chant.
Par-delà, l’enjeu fondamental est désormais d’ap-
précier les grandes évolutions géopolitiques et
systémiques qui vont peser durant plusieurs dé-
cennies, en matière de pôle décisionnel et de
centre d’impulsion économique mondiale. Or, à
cet égard, ayant énoncé en propos liminaire que
le droit n’est autre que la loi du vainqueur, on
peut se satisfaire de voir que les BRICS (Brésil,
Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) ont globale-
ment adopté un système juridique de droit écrit
(cela vaut notamment en droit constitutionnel,
droit de la propriété intellectuelle, droit civil, …).
Nul n’ignore que ces pays portent actuellement
atteinte à l’hégémonie économique des pays an-
glo-saxons et ont depuis lors fait basculer le
monde dans un système multipolaire.
22
In Comprendre&Entreprendre, janvier 2013,N1
14. Dossier thématique
www.synfie.fr Page 14 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Vous entendez souvent parler des sanc-
tions conséquentes imposées par les
États-Unis aux entreprises européennes, comme
récemment l’affaire Volkswagen ou encore pour
la banque française BNP. Mais sur quoi sont réel-
lement basées ces sanctions ? Tout simplement
sur la législation américaine qui use de sa puis-
sance pour avoir une portée internationale.
FCPA, SOX, FACTA… autant de noms compliqués
faisant trembler les chefs d’entreprises, qui ne
sont pas forcément préparés à cela. "À partir des
années 60, les États-Unis ont entrepris d'extrater-
ritorialiser leur droit de la concurrence" affirme le
magistrat Charles Prats.
Sachant que 70 % du commerce international se
fait en dollars et selon Éric Denécé du Centre
français de recherche sur le renseignement
(CF2R), une grande partie du commerce interna-
tional serait entaché de corruption, l’État améri-
cain a de beaux jours devant lui.
LE JACKPOT DU FOREIGN CORRUPT PRAC-
TICES ACT
Le Foreign Corrupt Practices Act datant de 1977
ne cesse d’être utilisé par les États-Unis. Il relève
du Department of Justice (DoJ), mais peut dispo-
ser de l’aide de tout l’appareil américain en cas
de soupçon comme le Federal Bureau of Investi-
gation (FBI), la National Security Agency (NSA) ou
encore la Securities and Exchange Commission
(SEC). Ils peuvent réclamer tous les documents
qu’ils souhaitent auprès des entreprises, aussi
confidentiels soient-ils. Cette loi peut toucher
une entreprise de n’importe quelle nationalité et
de tout secteur. Par conséquent, dès qu’une
compagnie étrangère commerce en partie en
dollars, utilise un fournisseur d’accès américain
ou commerce sur le sol américain ; le départe-
ment de la justice peut utiliser le droit américain,
même si l’activité ne représente qu’une part
marginale de l’exercice général de l’entreprise.
Les poursuites judiciaires arrivent par la suite.
Le DoJ fait une veille sur les entreprises faisant
des affaires à l’international et en cas de doute,
les pratiques de veilles sont renforcées sur les-
dites organisations. Les agences américaines de
renseignements peuvent être sollicitées pour ob-
tenir davantage d’informations sur les éven-
tuelles pratiques de corruption.
Les entreprises ont toutefois la possibilité de ne
pas répondre aux sollicitations du DoJ, mais cela
est encore plus risqué, car l’État peut prononcer
des sanctions administratives, comme l’interdic-
tion d’échanger en dollars, le retrait d’une li-
cence bancaire…
LA SARBANES OXLEY ACT (SOX) SOUS
COUVERT DE LUTTE CONTRE LES SCAN-
DALES FINANCIERS
La SOX est entrée en vigueur le 30 juillet 2002 et
intensifie la répression contre les fraudes comp-
tables par des peines pénales. Cette loi vise les
sociétés cotées sur le territoire américain, améri-
caines ou non. La SOX a été mise en place pour
mettre fin aux scandales financiers ayant secoué
la société américaine (Enron) au début des an-
nées 2000, à la suite de manipulation de l’infor-
mation comptable.
CES LOIS AMERICAINES QUI FONT FREMIR LES ENTREPRISES FRANÇAISES
Par Alexandre MOUSTAFA
Etudiant à l’Ecole de Guerre Economique
15. Dossier thématique
www.synfie.fr Page 15 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Cette loi peut obliger toute entreprise à se pré-
senter devant l’Autorité américaine des marchés
financiers (SEC). La SOX a une conséquence di-
recte pour les entreprises étrangères, dans la me-
sure où cette loi concerne les entreprises pré-
sentes au New-York Stock Exchange (NYSE). Étant
donné qu’il s’agit de la principale place boursière
mondiale, de nombreuses entreprises françaises
et européennes sont concernées. L’extraterrito-
rialité et le progrès des pratiques anglo-saxonnes
s’appliquent toujours plus.
Cette loi peut faire peser de lourdes sanctions sur
les entreprises françaises cotées aux USA. Si les
états financiers ne sont pas respectés par le CEO,
ils risquent 20 ans de prison et 5 millions d’euros
d’amendes.
LA DERNIERE EN DATE : LA FATCA, L’EX-
TRATERRITORIALITE DU DROIT FISCAL
" L'ordre juridique mondial est en train de changer
à l'initiative des États-Unis. Fatca, c'est notre
glaive contre l'évasion fiscale. Celui des démocra-
ties qui veulent reprendre la main sur leurs re-
cettes en faisant payer les fraudeurs. Les pays de-
vront choisir leur camp » précise Stanley Ruchel-
man avocat fiscaliste à New-York. Fatca pour
Foreign account tax compliance act.
En juin 2014, plus de 100 pays ont signé des ac-
cords Fatca, ainsi que quelques 100 000 institu-
tions bancaires. Ainsi, les banquiers devront révé-
ler à Washington les citoyens américains fraudant
le fisc ; cela intervient à la suite des scandales de
l’UBS et du Crédit suisse. Par ailleurs, cette loi de-
mande un investissement conséquent aux institu-
tions financières pour mettre de nombreux
comptes aux normes. Les banquiers de ces éta-
blissements sont désormais au service des ser-
vices concernés de Washington.
UNE LEGISLATION AU SERVICE DES INTE-
RETS AMERICAINS ?
Sous couvert de lutte pour la transparence,
contre la corruption et contre les scandales finan-
ciers, ces lois visent à extraterritorialiser le droit
américain, qualifié par certains de « patriotisme
juridique ».
Selon Roy Rayan, associé d’un cabinet d’avocat, la
justice américaine est intègre, il précise que «les
lobbys sont capables d’acheter les politiciens,
mais pas d’acheter les juges. The law is the law et
la justice est la même pour tout le monde.»
Or, selon Edmond Tavernier, «les États-Unis font
passer leur intérêt en premier et savent utiliser
leur puissance s’ils veulent obtenir quelque chose.
Il s’agit ici de la loi du plus fort ». Il y a une situa-
tion hégémonique des Américains, ils dévelop-
pent leur droit au-delà des frontières au nom de
bons principes. De 1999 à 2013, 70 % des entre-
prises sanctionnées sont des entreprises étran-
gères, ce sont également ces dernières qui ob-
tiennent les sanctions les plus importantes.
Il est aujourd’hui de notoriété publique que la
banque américaine Goldman Sachs a truqué les
comptes de la Grèce, or cette dernière ne sera
pas poursuivi par le Département américain pour
des faits criminels. Comme le précise l’investis-
seur Ernesto Bertarelli, « les tribunaux américains
savent faire preuve d’un patriotisme dont nous
devrions nous inspirer ».
16. Dossier thématique
www.synfie.fr Page 16 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
EXTRAITS :
« La France a tellement peur des Etats-Unis que
nous avons accepté que la BNP paie une amende
de 9 milliards de dollars au Trésor américain,
alors que la BNP n’avait violé aucune loi fran-
çaise, mais financé l’exportation de produits – ni
trafic d’être humains, armes ou drogue – en pro-
venance du Soudan, de Cuba ou d’Iran. La Justice
américaine a pris prétexte que ces transactions
étaient libellées en dollars pour étendre l’applica-
tion de la loi américaine et de ses sanctions com-
merciales aux relations entre une entreprise fran-
çaise et ces pays. En 1965, De Gaulle dénonçait
« le privilège exorbitant du dollar ». Aujourd’hui
on assiste au privilège exorbitant de la justice
américaine qui prétend appliquer sa loi au
monde entier. (…) Aujourd’hui les entreprises
françaises craignent d’agir par peur de s’attirer
les foudres de la justice américaine. Elles re-
grettent que l’UE et ses Etats membres aient été
incapables de les protéger le moins du monde. »
Renaud Girard, grand reporter, Le Figaro,
31/07/2015
« (…) [l’affaire Asltom] est un scandale parce que
la plainte et l’action du Département de la Justice
américain contre Alstom pour les faits de corrup-
tion, entre autres en Indonésie, ont joué un rôle
déterminant dans cette cession à General Elec-
tric. »
Jean-Michel Quatrepoint, journaliste écono-
mique, Le Figaro, 11/09/2015
Dernier ouvrage : Alstom, scandale d’Etat, Fayard
« L’affaire Alstom souligne l’échec à la fois fran-
çais et européen : nous n’avons pas de politique
industrielle. Depuis le Traité de Rome, la concur-
rence été sanctifiée dans l’intérêt des consom-
mateurs au détriment des Etats et des entre-
prises. L’Europe est le seul territoire économique
au monde ouvert et offert à nos concurrents sans
qu’elle impose la moindre réciprocité. En matière
de marchés publics (1000 milliards d’euros par
an), le taux d’ouverture européen est de 90%
mais de 32% aux Etats-Unis, 28% au Japon et de
0% dans les « pays émergés » ! L’Europe est pour
l’essentiel soumise aux normes techniques amé-
ricaines comme à des législations protection-
nistes, nord et sud américaines, russe et chi-
noise : Bruxelles interdit ainsi les aides publiques
et les concentrations en contradiction avec tous
nos concurrents, lancés depuis longtemps dans la
constitution de géants industriels »
Bernard Carayon, ancien député, avocat, Le Figa-
ro, 15/05/2014
« (…) Snowden a révélé un système de pouvoir
réellement impérial, qui tend à assurer de fait un
empire mondial américain. (…) Le point crucial
est l’association manifeste d’une surpuissance
militaire, d’une surpuissance d’entreprise, et
d’un universalisme provincial – une province du
monde se prend pour le monde et veut imposer
partout son droit, ses normes, ses règles, ses
principes, en recrutant partout des complices ».
Hervé Juvin, économiste et essayiste, Le Figaro,
26/06/2015
Dernier ouvrage : Le mur de l’ouest n’est pas
tombé, Pierre-Guillaume de Roux
« Tous les moyens sont utilisés, à commencer par
l’arme juridique pour tuer l’adversaire. En
France, on a déjà vu cela. Rappelez-vous de
l’affaire de la BNP.
… / ...
VERBATIM SUR LES MENACES PESANT SUR LES FLEURONS EUROPEENS :
17. Dossier thématique
www.synfie.fr Page 17 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
EXTRAITS :
La banque a du plaider coupable dans un dossier
de viol d’embargo contre l’Iran, le Soudan et Cu-
ba, avec à la clé une mande de près de neuf mil-
liards de dollars. C’est colossal. De même pour le
constructeur Peugeot, qui a dû arrêter de livrer
lui aussi à l’Iran. Comme par hasard, General Mo-
tors tente de remplacer maintenant Peugeot sur
le marché iranien. Il va falloir que l’on apprenne
nous aussi à gérer le juridique comme les Améri-
cains. Les moyens classiques dont disposait Was-
hington sont maintenant moins efficaces, en par-
ticulier la puissance militaire. Le juridique est de-
venu un élément clé pour imposer le leadership
américain au niveau mondial ».
Alain Juillet, ancien HRIE, Président de l’Acadé-
mie de l’IE, sur Francetvinfo, le 23/09/2015
« Le défi actuel lancé aux Européens réside donc
dans la reconnaissance et l’affirmation de leur
droit romano-germanique. A ce titre, la négocia-
tion du traité TAFTA sonnera-t-elle le glas du
droit romano-germanique ? »
Olivier de Maison Rouge, Avocat, Docteur en
droit, L’influence normative, un enjeu fondamen-
tal de la guerre économique, IE BERCY, décembre
2015, n°45
*
* *
VERBATIM SUR LES MENACES PESANT SUR LES FLEURONS EUROPEENS :
18. www.synfie.fr Page 18 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
« LES ARTICLES DE NOS MEMBRES »
Sophie LICARI
Olivier CARDINI
Anne-Marie PAILLOLE
Amar LAKEL
02
TRIBUNE LIBRE
19. Tribune libre
www.synfie.fr Page 19 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Si toute polémique digitale n’est pas tou-
jours relayée par les médias tradition-
nels, à l’inverse toute polémique médiatique pos-
sède de nos jours une forte dimension digitale.
« Internet est devenu en quelques années le sys-
tème nerveux de nos sociétés. Elles se pensent à
travers lui. (…) Ce lieu n’est pas le parlement des
élus. Il n’est pas non plus contrôlable comme les
grands médias centralisés. Internet dédouble, en
quelque sorte, le système de la démocratie repré-
sentative(1)
. » Avec 3,7 milliards d’internautes (50
millions en France), dont 2,2 milliards d’utilisa-
teurs mensuels des réseaux sociaux, l’essor du
web 2.0 a fourni aux consommateurs, citoyens,
associations, un puissant levier pour faire pres-
sion sur les organisations de toute nature.
Chacun est émetteur, récepteur et relais ; un in-
dividu diffusant une information embarrassante
et d’apparence fiable peut déstabiliser une entre-
prise, une administration, une institution, dans
un contexte de défiance envers ces structures
traditionnelles. L’opinion s’exprime presque sans
filtre sur les réseaux sociaux, où l’information
circule à vitesse virale, favorisant la réactivité
émotionnelle plus que la dialectique, et le renfor-
cement de la sensitivité de nombreuses problé-
matiques. En cas de crise, l’effet multiplicateur
peut etre considérable, impactant l’image de
l’entreprise, voire ses coûts, ses résultats, ses
partenariats, son titre en Bourse..., la taille d’un
groupe pouvant en outre être considérée par le
public comme un facteur de culpabilité subjec-
tive. Et même si tous les « bad buzz » ne tour-
nent pas en crise, leur répétition finira par noircir
sa réputation.
Pour cet actif du patrimoine immatériel de l’en-
treprise, qui ne tient qu’à la façon dont elle
existe dans l’esprit d’autrui, les risques se sont
ainsi accrus. Les bad buzz et crises digitales pour-
raient apparaître, à courte vue, comme l’inlas-
sable reproduction d’une même chose ; or il
s’agit d’un phénomène évolutif qui conduit à un
changement progressif de paradigme : aux mains
du public, le digital s’érige en outil de contre-
pouvoir et impose ses codes.
SECTEURS ÉCONOMIQUES CONCERNÉS
L’agence Marie Muzard Conseil(2)
a réalisé un bi-
lan de 643 cas de bad buzz et crises à compo-
sante digitale repérés en 2015 sur les sphères
web francophone et anglophone, touchant di-
verses entités (grandes entreprises privées et pu-
bliques, pme, administrations, collectivités terri-
toriales, associations), pour leurs pratiques
(60,8%) ou leurs communications (39,1%). Nous
avons considéré différents paramètres : lieu
d’émergence de la polémique, thématiques en
cause, profil et secteur de l’entité, type et effica-
cité de la riposte…
… / ...
1
Assange, Philosophie Magazine, juin
2013
2
Spécialiste en communication sensible
digitale
NOUVELLES MENACES DIGITALES ET RISQUES RÉPUTATIONNELS
Par Sophie LICARI
Consultante en communication stratégique
20. Tribune libre
www.synfie.fr Page 20 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
A noter, entre autres statistiques établies, que si
une grande majorité d’organisations prennent la
parole (83,5%), seulement un peu plus de la moi-
tié de celles qui communiquent (54,1%) parvien-
nent à réduire la criticité de la polémique en allé-
geant significativement le poids des détracteurs.
Si la communication est donc une nécessité, elle
ne s’avère pas gagnante en soi indépendamment
de sa teneur et de sa disposition.
Du web 2.0 a émergé un tribunal populaire qui
exerce des jugements moraux à prétention nor-
mative, dominant le droit voire l’exactitude des
faits, et qui récuse bien souvent toute différence
entre responsabilité directe et indirecte. Il est
donc logique qu’en ce qui concerne les théma-
tiques critiques, la grande majorité des cas por-
tent sur des problématiques d’ordre éthique. De
la catégorisation que nous avons établie, il ressort
que parmi la vingtaine de sujets recensés, les cinq
qui rassemblent le plus de cas ont été, par ordre
décroissant : discrimination ethnique ou natio-
nale, mensonge ou manipulation, sexisme, discri-
mination sociale, non respect des engagements
envers clients, usagers ou citoyens.
En se limitant ici aux entreprises, les secteurs con-
cernés par notre étude sont par ordre décrois-
sant : médias, mode, industrie culturelle, restau-
ration-hôtellerie, agroalimentaire, internet-e-
commerce, informatique-électronique-télécom,
grande distribution, biens d’équipement, trans-
ports ; d’autres secteurs comme cosmétique-
hygiène, chimique-pharmaceutique, automobile,
sont plus rarement impliqués. Ce ne sont pas
donc pas forcément les secteurs les plus touchés
par les crises d’avant l’ère 2.0 qui arrivent en tête.
Il s’agit plutôt de secteurs dont les produits ou
services sont dotés d’une charge émotionnelle
aussi importante que leur fonction utilitaire, tout
en assumant une forte présence dans la vie quoti-
dienne.
En ce qui concerne les groupes privés (ou semi-
privés) français et leur filiales, 80 entités, dans
presque tous les secteurs concernés, ont été vi-
sées par une polémique (Trois Suisses, Galeries
Lafayette, Tefal, FNAC, SFR, Leclerc, Casino, Blé-
dina, BNP Paribas, Renault, Air France, Vinci, Sa-
nofi, L’Oréal, Sephora, Accor Hôtel, Canal+…), cer-
tains l’ayant été deux ou plusieurs fois dans l’an-
née (TF1, Figaro, Carrefour, Orange…). L’industrie
du luxe n’est pas épargnée (Hermès, Saint Lau-
rent, Dior…).
QUELQUES EXEMPLES EN BREF
Citons quelques exemples apportant différents
enseignements. En juin, une campagne publici-
taire Sanofi à Genève fait la promotion d’un médi-
cament contre la diarrhée, avec en visuel la place
Jemaa el-Fna de Marrakech. Sur les réseaux so-
ciaux, les Marocains s’insurgent, les officiels se
plaignent du préjudice pour l’image de leur pays,
de nombreux sites relaient. Sanofi s’excuse et re-
tire sa publicité. Le groupe aurait pu s’éviter cet
embarras – avec ses coûts économique et réputa-
tionnel - en évaluant mieux le risque d’utiliser un
stéréotype discriminatoire, fut-il allusif, à l’égard
d’une communauté nationale.
En mai, une blogueuse fustige la différence de
traitement d’une carte du monde dans les deux
versions d’un cahier parascolaire Magnard
(groupe Albin Michel) : très informative pour les
garçons, simpliste pour les filles. La polémique est
relayée par les réseaux sociaux, la sphère fémi-
niste, des médias on line majeurs. Magnard est
accusé de sexisme, qui plus est à l’égard d’en-
fants. Sur Facebook, Magnard réfute les critiques
tout en se défaussant sur l’illustrateur, ce qui ag-
grave les reproches ; il cède alors et annonce que
les cartes seront refaites. Initialement Magnard
n’a donc pas réalisé que l’inégalité de traitement
contestée était une maladresse peu défendable,
et que ne pas assumer ses responsabilités serait
mal jugé.
… / ...
21. Tribune libre
www.synfie.fr Page 21 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
En mai, le site Vegemag révèle que Bonduelle,
interrogé par ses soins, confirme la présence de
viande dans plusieurs boîtes de légumes cuisinés,
sur lesquelles cette information ne figure pas :
étant donné la très faible teneur en
viande, Bonduelle n’est pas légalement tenue de
la mentionner, mais il s’engage auprès de Ve-
gemag à la préciser sur son site web. Le sujet est
largement relayé on et off line, la page Facebook
du groupe lourdement impactée. Bonduelle as-
sure que la mention figurera sur son site, renfor-
çant la colère des internautes qui estiment la me-
sure très insuffisante ; le groupe cède, promet
que la mention apparaîtra sur les
boîtes. Bonduelle a commis une erreur straté-
gique en ne prenant pas la mesure de l’émotion
suscitée, qui plus est chez un cœur de cible, les
végétariens. Ses clients ont reproché à Bonduelle
de les avoir jusqu’ici abusés. Le fait que le groupe
était juridiquement irréprochable ne comptait
pas : le droit ne suffit pas pour restaurer la con-
fiance.
En décembre, une internaute s’indigne sur Twitter
de l’étiquette « Noël de rêve pour elle » apposée
chez Boulanger sous les fers à repasser et pèse-
personnes. Boulanger n’identifie pas le sujet sen-
sible : il répond en vantant l’étendue de son offre.
La controverse éclate, la page Facebook de Bou-
langer est inondée de critiques ; les détracteurs
s’impatientent devant son silence. Une semaine
plus tard, Boulanger annonce le retrait de l’éti-
quette : ce délai de gestion, bien trop long, était
particulièrement inadapté. Ce cas montre en
outre que l’entreprise n’a pas reconnu au départ
un élément clef des crises digitales : l’apparition
d’un signal précurseur. Savoir identifier et gérer
correctement ce signal permet souvent d’éviter
une polémique ou de la circonscrire rapidement.
Renault peut témoigner, dans un cas plus grave,
de la rapidité de diffusion des sujets critiques à
l’âge 2.0 : le 24 novembre à 9h54, l’ONG alle-
mande Deutsche Umwelthilfe publie sur son site
une étude montrant que les rejets polluants de
l'Espace dépassent la réglementation. Dès 9h59,
le sujet buzze sur Twitter ; moins d’une heure plus
tard les médias s’en sont emparés; Renault par-
vient à apaiser l’incendie par son communiqué de
l’après-midi. Mais cette affaire constituait une
sérieuse alerte, dont le constructeur aurait dû ti-
rer tous les enseignements. En effet, dans la crise
de janvier dernier, qui fait plonger son titre de
18%, Renault ne répond pas tout d’abord aux
questions des médias, ne publiant un communi-
qué qu’une heure plus tard : entre temps, le titre
poursuit sa chute vertigineuse (-23%). Dans ce
contexte hautement critique du sujet des rejets
polluants, la communication sur une péripétie
aussi sensible que des perquisitions de la DGCCRF
aurait dû être dégainée encore plus rapidement,
ce qui supposait donc une préparation préven-
tive.
En juin, l’association PETA cible Hermès en diffu-
sant une vidéo réalisée dans deux fermes d’alliga-
tors, qui montre de cruelles conditions d’abattage
des animaux. Sites internationaux et réseaux so-
ciaux relaient, la page Facebook d’Hermès est
massivement impactée. Hermès répond aux mé-
dias que ses fournisseurs respectent ses stan-
dards, ce qui n’apaise pas la polémique, au con-
traire fortement relancée lorsque Jane Birkin de-
mande que le sac iconique à son nom soit débap-
tisé. Hermès s’engage à renforcer ses contrôles,
promet des sanctions; J. Birkin revient sur sa posi-
tion. Mais les pétitions on line ont engrangé des
centaines de milliers de signatures, le pdg a dû
s’expliquer lors de la publication des résultats du
groupe, et nombre d’analystes ont souligné que
l’affaire était très fâcheuse pour l’image d’Her-
mès, souffrance animale et ultra-luxe se télesco-
pant violemment. Avec une première communi-
cation insuffisamment dimensionnée à la criticité
du sujet, Hermès a failli perdre une égérie emblé-
matique. Habitué à une communication top-
down, le groupe n’a pas traité la polémique sur
Facebook, se contentant de censurer de plus en
plus de commentaires critiques au fil des se-
maines.
… / ...
22. Tribune libre
www.synfie.fr Page 22 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Le sujet de la souffrance des animaux d’élevage
montant en puissance, de tels points de vulnéra-
bilité non traités en prévention constituent pour
les groupes concernés, y compris les plus presti-
gieux, une porte d’entrée pour des crises à répéti-
tion, alors même que le monde de l’investisse-
ment est plus sensible qu’autrefois aux probléma-
tiques éthiques.
PRÉVENTION ET GESTION
Nombre d’entreprises commettent deux sortes
d’erreurs : en amont, elles ne prennent pas assez
la mesure des risques que constituent certains
sujets, et n’identifient pas les signaux précurseurs
de polémiques lorsqu’ils émergent ou apprécient
mal le niveau de criticité de polémiques déjà lan-
cées. En aval, elles n’adoptent pas de stratégies
de gestion assez efficaces notamment sur les
plans de la tactique de réponse, de son contenu
argumentaire et langagier, du timing et des mo-
dalités de sa publication.
Les process habituels ne sont pas forcément
adaptés, et la veille, aussi performantes soient les
technologies dédiées, ne fait pas tout ; encore
faut-il y adjoindre tout le discernement néces-
saire pour en analyser les données. Pour prévenir
nombre de ces phénomènes et gérer ceux qui ad-
viennent, il convient notamment, outre diffuser la
culture de la crise digitale auprès des exécutants
comme des dirigeants, d’adopter des méthodes
et dispositifs spécifiques d’aide aux décisions.
Si elles ont généralement pris conscience de l’em-
preinte des réseaux sociaux dans le champ répu-
tationnel, les entreprises ne se sont pas encore
forcément dotées de la bonne boîte à outils pour
protéger leur réputation digitale – autrement dit,
de plus en plus, leur réputation tout court…
*
* *
23. Tribune libre
www.synfie.fr Page 23 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Les entreprises évoluent au quotidien dans
des univers complexes et versatiles dans
lequel il leur faut innover et construire. Aujour-
d’hui, la détection et l’analyse des « signaux
faibles » doivent intégrer le fonctionnement des
entreprises, car les risques sont multiples, sou-
dains et aux conséquences bien plus importantes
que par le passé. Face aux nouvelles attaques,
dans le contexte dit de la « 4ème
révolution indus-
trielle », toujours plus nombreuses et « inven-
tives », les entreprises doivent intégrer, méthodi-
quement, aussi bien l’aspect « cyber-menace »
que celui du « facteur humain » pour n’avoir ja-
mais à prononcer « trop tard » ou « si j’avais su
».
L’intelligence économique se fonde sur une com-
binaison d’actions variées et originales, visant à
déceler, provoquer et exploiter des opportunités,
ou à anticiper et neutraliser des menaces. Les
attaques, dites, de nouvelles générations, visant
les entreprises, auront des répercussions sen-
sibles en terme d’e-réputation, économique et
de compétitivité. D’un point de vue juridique, de
nouvelles responsabilités des entreprises vis-à-vis
des utilisateurs vont nécessairement apparaître
vis-à-vis des utilisateurs. « Quid » de l’entreprise
qui fabrique l’application contre laquelle le client
se retournera, ou, de l’entreprise qui aura inté-
grés ladite application dans son système ... de
toute manière, les conséquences en matière
d’image seront très importantes.
Sun Tzu, le stratège chinois du VIe siècle avant
notre ère, évoque dans « l’Art de la guerre » la «
pré-connaissance » indispensable de l’adversaire
afin de le vaincre ...Il est indispensable de mener
une réflexion sur les savoirs et savoir-faire de
l’entreprise. Pour protéger son savoir-faire, il faut
le connaître et l’identifier. Développer collective-
ment au sein de l’entreprise, une combinaison
d’actions variées, visant à déceler, anticiper et
neutraliser les menaces. Il s’agit d’être intellec-
tuellement et techniquement proactif et non ré-
actif face aux attaques.
Ainsi, l’utilisation des Smartphones donnant ac-
cès aux données personnelles et profession-
nelles, la montée de l’économie de partage, des
outils collaboratifs et des objets connectés
(comme les montres intelligentes) collaborent à
faciliter les échanges mais a contrario multiplient
les risques de plus en plus complexes à anticiper.
L’extension du « Big-Data » et le risque pour une
entreprise de perdre ou de se faire voler toutes
ses données en un temps réduit est un facteur à
prendre en compte.
… / …
PENSER L’IMPENSABLE POUR PROTÉGER L’ENTREPRISE
Par Olivier CARDINI
Dirigeant du Cabinet C.CONSULTING ASSISTANCE
24. Tribune libre
www.synfie.fr Page 24 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Des attaques se produisent en permanence et
peuvent arrêter une production, des services ...
s’en prendre aux partenaires privilégiés, aux ser-
vices juridique ou financier de l’entreprise, pro-
voquer des coupures d’énergie, perturber des
panneaux électroniques dont le texte se trans-
forme en fausse information, voire menace ...
avec toujours en toile de fond le « facteur hu-
main ».
En effet, outre l’action envisagée sur la neutrali-
sation ou perturbations des systèmes, les pirates
pour contourner les dispositifs (logiciels, applica-
tions, systèmes ...) de protection de données,
rechercheront la possibilité d’atteindre leur cible
en développant en amont leur connaissance du
milieu et de la psychologie des acteurs qui res-
tent faillibles. La conjugaison systématique de
l'intelligence économique et l'intelligence collec-
tive, c'est à dire les approches qui facilitent la
confiance, la mise en dynamique des équipes et
la performance collective. Sans oublier, la sensi-
bilisation de tous les acteurs de l’entreprise qui
reste la première mesure de prévention et de
vigilance pour protéger son savoir et ses savoir-
faire.
*
* *
25. Tribune libre
www.synfie.fr Page 25 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
La fonction Intelligence économique au
sein des entreprises est essentielle aux
projets d’acquisition des entreprises.
Elle intervient a tous les stades du projet d’acqui-
sition.
Au départ par l’analyse détaillée de l’environne-
ment marche, des concurrents et des besoins des
clients. Ensuite par l’identification de la société
cible qui permettra de garantir la croissance et
combler des besoins de clients identifies mais pas
encore satisfaits. Enfin par l’analyse de celle-ci en
détail et en particulier des données financières.
Les spécialistes de l’IE sont les yeux tournes vers
l’extérieur de l’entreprise. Leur analyse permet
de connaitre l’environnement concurrentiel en
établissant des profils des sociétés, des ben-
chmarks par pays par produits et détermine ainsi
les sociétés potentiellement intéressantes à ana-
lyser et combler les positions de la société.
La recherche des sociétés cibles potentielles doit
se faire non seulement dans l’environnement fa-
milier de l’entreprise mais aussi dans les catégo-
ries de marche adjacentes. Il est aussi essentiel
de pouvoir identifier les innovations de rupture
qui peuvent survenir et modifier la structure du
marche .
Une fois les cibles principales identifiées il con-
vient d’en faire une analyse de leurs forces et
faiblesses dans le contexte des menaces et op-
portunités des marches.
Apres cette première étape d’une analyse de
l’environnement concurrentiel détaillée, la deu-
xième étape est de faire la comparaison des so-
ciétés cibles avec l’entreprise et d’établir un ben-
chmark. Celui-ci doit être composite et porter sur
les positions relatives des sociétés dans leurs
diffèrent segments de marchés, le pays, sur les
portefeuilles produits, sur les ressources hu-
maines et bien sûr sur les éléments financiers des
entreprises. La troisième étape financière est du
ressort du département financier.
Cette fonction est un maillon des analyses straté-
giques des entreprises. Elle peut être située au
niveau corporate, en recherche, en marketing, en
finance mais elle doit fonctionner de façon trans-
versale à travers les différentes fonctions de la
société.
*
* *
L’INTELLIGENCE ECONOMIQUE AU SERVICE DES PROJECTS D’ACQUISITION
Par Anne–Marie PAILLOLE
Competitor Intelligence Manager - Bayer SAS
26. Tribune libre
www.synfie.fr Page 26 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Foreword,
Bonjour à vous,
L’ouverture des colonnes de la newsletter du SYNFIE à des publications origi-
nales, issues du monde de la recherche en IES, nous conduit à vous présen-
ter les travaux d’Amar LAKEL, responsable de projet MyWebIntelligence,
chercheur en Communication Numérique au Laboratoire MICA de l’Universi-
té Bordeaux Montaigne. Il vient de réaliser pour le CHU de Bordeaux avec le
soutien du Conseil Régional d’Aquitaine, un prototype d’analyse de l’infor-
mation médicale sur le web, débouchant sur la mise en place d’une veille de
ses influenceurs. Ce logiciel d’intelligence numérique, aujourd’hui libre et
gratuit, est développé dans une dynamique d’open source et il a vocation à
être soutenu et amélioré par la communauté de ses utilisateurs. Il permet
déjà de réaliser la cartographie de controverses numériques puis d’en faire
l’analyse graphique. L’objectif avoué de ce chercheur est de faire évoluer
notre perception d’un web « infini et discontinu » vers celle d’un « ensemble
fini d’acteurs clés ». Cette approche pourrait bien ouvrir de nouvelles pers-
pectives exploratoires de l’espace public numérique, à savoir: gouvernances,
intelligence, veille ou marketing.
http://mywebintelligence.net/outils-open-source-humanites-numeriques/
Enjoy & Share !
Thierry LAFON
MY WEB INTELLIGENCE
27. Tribune libre
www.synfie.fr Page 27 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
L’importance du web comme source
d’information essentielle n’est plus à dé-
montrer. Devenu, au fil des années, l’espace de
publication préféré des organisations et des per-
sonnes, Internet est devenu, aujourd’hui, une
bibliothèque de publication numérique qui a de-
puis longtemps fait exploser les seuils de l’archi-
vage tel qu’on l’imaginait avant la numérisation
de la communication. Mais loin d’être une au-
baine pour les chercheurs et les experts, le web
comme espace ouvert est une source d’informa-
tion plus que problématique. Enjeux du traite-
ment des datas, hétérogénéité des documents et
des situations communicationnelles, difficulté
d’identifier les sources...le web ressemble au-
jourd’hui à une gigantesque boîte aux lettres
remplies à ras bord de prospectus, d’ouvrages
savants, de catalogues de la VPC sans aucune or-
ganisation ni gestion des connaissances. Pour au-
tant, cet abîme où s’entassent toutes les prises
de parole du monde nous met face à un phéno-
mène unique dans l’histoire de l’humanité : la
possibilité, du moins pour l’instant théorique,
pour tout un chacun, d’accéder à l’immense pro-
duction des discours publics produits sur n’im-
porte quel point du globe.
Le web est donc un paradoxe. Gigantesque ar-
chive, il est toutefois très difficilement utilisable
comme source de documentation. Face à cette
infobésité, les acteurs sociaux, et en premier lieu
les professionnels de l’information, ont dû très
vite s’organiser pour développer des outils
d’intermédiation entre l’archive numérique et les
besoins des lecteurs. L’économie numérique a
été avant tout une économie d’accès à l’informa-
tion. D’abord, les moteurs de recherche, dont le
marché semble aujourd’hui stabilisé autour du
monopole de Google, n’ont eu de cesse de re-
chercher les documents (crawler) et de les clas-
ser (ranking) sur la base d’algorithmes séman-
tiques dont la complexité, enfermée dans des
brevets, fait toute la valeur de ces grands
groupes de la nouvelle économie. Sur la base
d’une requête constituée de mots-clés, l’enjeu
était de classer les documents les plus pertinents
au regard d’un questionnement. Puis c’est au
tour des “socials bookmarkers” de nous fournir
des plates-formes de gestion (de mise en mé-
moire en fait) de nos favoris, de partage de ces
favoris (on parle ici de curating) et de collabora-
tion collective permettant de s’appuyer sur
l’intelligence de la foule ... / ...
MY WEB INTELLIGENCE :
UNE PLATEFORME OPEN SOURCE AU SERVICE DES HUMANITÉS NUMÉRIQUES.
Par Amar LAKEL,
Responsable de projet MyWebIntelligence,
Chercheur en Communication Numérique au Laboratoire
MICA de l’Université Bordeaux Montaigne.
http://mywebintelligence.net
28. Tribune libre
www.synfie.fr Page 28 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
pour classer le web selon le succès de chaque do-
cument. À l'algorithmique sémantique, on ajoute
une part de crowdsourcing et de mesure d’au-
dience des documents pour définir, au-delà de la
pertinence logique, une priorisation de l’informa-
tion par son usage social. Puis vint dans un troi-
sième temps, la révolution des réseaux sociaux,
killer application de l’information, qui non con-
tents de faire descendre la granularité de la publi-
cation à la conversation de bistrot, devinrent
(Facebook, et Twitter en particulier) les plus puis-
sants outils de curating du web.
Tous ces infomédiaires du web que j'appellerai,
dans le cadre du projet My Web Intelligence,
“oracles” (car ceux sont des instances à qui on
soumet une requête et qui vous livrent une série
de réponses), ont permis dans un premier temps
d’indexer le web selon des variables sémantiques,
sociales et structurales (analyse des liens entrants
et sortants). Cette indexation est au fondement
de l’utilisabilité du web par tout un chacun. Pour
autant, les professionnels de l’information le sa-
vent bien, il faut un “travail” pour passer de la
donnée à l’information et de l’information à
l’intelligence. Le design utilisateur de ces plates-
formes favorise avant tout cette fonction d’oracle
delphique : je pose ma question, je reçois une ré-
ponse et je m’en vais. C’est dans cette limite et la
nécessité de ce “travail” que se sont développées
ces 5 dernières années des solutions de veille et
d’intelligence du web voire, plus spécialisées, des
services de social média monitoring. L’intelligence
numérique est fruit d’un traitement et d’une ges-
tion des données en ligne au service d’un travail
de recherche.
Une plateforme open-source de recherche
collaborative pour donner de l’intelligence
aux archives numériques.
C’est dans ce mouvement de recherche sur la va-
lorisation de l’information numérique que le pro-
jet de R&D My Web Intelligence, financé par le
Conseil Régional d’Aquitaine et développé au sein
du Laboratoire MICA de l’Université Bordeaux
Montaigne, a vu le jour. Il s’agit de proposer un
nouveau paradigme de gestion et de navigation
du web plus propice au travail des professionnels
de l’information. Nous avons voulu fournir un ou-
til non seulement libre et gratuit mais surtout
open-source et accessible. Il nous faut aller plus
loin que la simple démocratisation des usages.
L’open-source en licence MIT est en fait une invi-
tation pour les chercheurs, les développeurs et
les experts de l’information à se fédérer et à se
mobiliser devant un enjeu majeur: Relever le défi
de l’intelligence collective pour faire front devant
l’immensité des prises de parole en ligne. L’enjeu
est de taille. Il s’agit ici de voir, de comprendre et
de naviguer sur un web structuré et resocialisé. Le
web est invisible, certes, et par cette invisibilité, il
n’est pas un espace public accessible. Plus qu’invi-
sible, il est discontinu. Les unités information-
nelles qui résultent de nos navigations sont des
fragments isolés, déconstruits et décontextualisés
de leurs conditions de production. La liste de ré-
sultats ne permet pas une contextualisation de la
production de l’information au contraire, elle la
supprime. Rendre compréhensible le web dans sa
dynamique sociale, c’est réintroduire une com-
préhension du monde numérique à travers les
conditions de production de l’information. En
effet, les sociologies des controverses, de l’inno-
vation et de la traduction nous ont appris que
l’analyse des comportements locuteurs, de leurs
positions sociales et les savoirs produits sont in-
dissociables des jeux stratégiques. Cela nous
oblige donc, si l’on veut comprendre l’archive nu-
mérique à mettre en place des dispositifs d’ana-
lyse sur plusieurs niveaux (le niveau du docu-
ment, le niveau du métadiscours, le niveau des
locuteurs) qui puissent mettre en perspective le
contexte sociolinguistique d’une expression. L’ar-
chive numérique est le fruit d’un jeu social qui
forme le contexte de sa production mais aussi le
sens pragmatique du discours. ... / ...
29. Tribune libre
www.synfie.fr Page 29 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
La « liste » a évacué l’intelligence de l’émetteur et
du récepteur rendant inintelligible les jeux straté-
giques des prises de parole.
Pour une plate-forme d’intelligence numérique,
tel que porté par le programme My Web Intelli-
gence, l’expert doit d’abord engager la recherche
sur Internet comme une recherche de longue ha-
leine. Loin de l’interface primitive qui vise à ren-
trer quelques mots-clés dans un champ texte et
se voir asséner plusieurs centaines de réponses, il
s’agit ici d’ouvrir un projet de recherche selon des
problématiques que l’on va nourrir et enrichir au
fur et à mesure en améliorant ses requêtes primi-
tives. Les moteurs de recherche reposent sur un
scénario d’usage de la rationalité limitée : trouver
une information suffisante en un temps extrême-
ment court. Ce scénario est le fondement même
de leurs algorithmes de ranking. Dans notre pro-
jet, le travail dynamique (l’intelligence) des re-
quêtes est une des clefs de la pertinence des ré-
sultats. L’un des enjeux de My Web Intelligence
est de fournir à l’utilisateur les moyens de conce-
voir sa recherche comme un index structuré et
dynamique qui sera nourri tout au long de son
étude par la sélection des réponses les plus perti-
nentes. Nous opposons ici la pratique de l’étude à
celle de la requête. Dans une logique de machine
learning assistée, les interactions de l’utilisateur
sur le temps long aident le système de requête à
chercher et à évaluer les archives numériques
pour ne présenter que les documents les plus
pertinents. La plate-forme reprend donc toutes
les fonctionnalités d’une gestion de projets pé-
renne (compte utilisateur personnalisé, sauve-
garde et importation des annotations, mise à jour
des données, travail collaboratif et partagé, mé-
moire centralisée collective, etc.). La logique
d’usage est en réalité celle d’une construction de
son territoire numérique que ce soit seul, collecti-
vement et même assisté par des agents algorith-
miques. Mais une construction qui est toujours
pensée sur la durée. Nul territoire ne se com-
prend sur la base d’un album d’instantanés, il faut
de l’exploration, de l’errance et de la navigation. Il
faut aussi des annotations et du recul. Notre outil
se pense plus comme un dispositif archéologique
que comme une prestation de service.
My web intelligence s’appuie sur les oracles du
web pour obtenir un premier corpus de docu-
ments (qui peut vite atteindre déjà plusieurs mil-
liers d’expressions) pour démarrer la collecte
d’informations. En croisant les sources, on se li-
bère non seulement du monopole de Google (qui
finit réellement par poser question quand on sait
la part microscopique du web qu’il nous présente)
mais aussi des filtres particuliers que chaque dis-
positif a mis en place. À partir de ce corpus de
premier niveau, l’exploration continue des liens
sortants permet de s’enfoncer dans les couches
profondes du web pour obtenir le territoire nu-
mérique le plus complet au cœur de nos préoccu-
pations. Ainsi, entre crawl profond et évaluation
progressive des informations les plus pertinentes,
la plate-forme, travaillant en tâche de fond, finit
par constituer un territoire d’informations trai-
tant d’un sujet. C’est ce « my » web (qui conti-
nuera à s’enrichir avec le temps) qui formera la
base du territoire numérique mise en surveillance
voire mise en gouvernance quand il s’agira d’agir
dessus. Il nous faut donc développer un crawler,
machine à extraire les données qui de proche en
proche épuise l’extraction des données perti-
nentes. Mais il faut nécessairement l’associer à
des algorithmes d’approbation qui se doivent de
rejeter le bruit et de classer les documents dans
un ordre de priorité. ... / ...
30. Tribune libre
www.synfie.fr Page 30 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Car si le web qui correspond à mes requêtes est
fini, il n’en reste pas moins immense. Alors plutôt
que de rejeter des documents pertinents, la prio-
risation permet de laisser à chaque équipe projet
le soin de fixer la limite de son exploration.
Prendre le temps d’enrichir ses données
pour améliorer la qualité de l’analyse.
Le nettoyage de données est une étape essen-
tielle dans toute recherche. Pour autant face à la
taille des corpus, il ne peut se faire sans l’aide
d’agents algorithmiques. Dans un premier temps,
une logique d’indexation des documents doit re-
prendre non seulement la proximité sémantique
avec l’index des requêtes mais aussi l’interaction
avec les usagers et la position structurale du do-
cument dans le corpus. Ainsi, les documents les
moins pertinents sont envoyés en fin d’index et
ne seront étudiés que si les moyens humains le
permettent. À ce moment là, la possibilité d’anno-
ter humainement le document permettra de ren-
forcer son poids (que ce soit négativement ou po-
sitivement) dans l’algorithme d’approbation. Pour
autant, la plate-forme permet un rendement cu-
mulatif de l’expérience en utilisant l’intelligence
de la foule d’utilisateurs. Les ressources déjà an-
notées par d’autres seront proposées déjà pré
rempli ce qui permettra une accumulation pro-
gressive de la connaissance dans une communau-
té d’usager donné.
Chacun de ces documents va devoir subir une sé-
rie d’annotations qui viendront enrichir l’analyse
sociolinguistique de la situation de communica-
tion. Cet enrichissement va permettre d’en amé-
liorer la gestion et l’intelligence. Il s’agit de savoir
tout d’abord “qui parle ?”. À partir du document,
on retrouve le média qui le supporte. Ce dernier
est qualifié selon sa nature éditoriale (blogue, site
institutionnel, réseaux sociaux, etc.) et le type
d’acteur social qui produit cette édition. Par la
suite, l’indexation permet de classer automati-
quement le contenu du document autour des
mots-clés qui seront par la suite gérés selon un
arbre logique. Ainsi, le “de quoi ça parle ?” est
géré automatiquement avec la possibilité d’affi-
ner l’index manuellement. Ces annotations de-
vront ensuite être évaluées selon leur impor-
tance auprès des récepteurs (la date de publica-
tion, la résonance sociale, l’audience, l’autorité
par citation, etc.). En fin de compte, derrière
l’émergence d’un document, c’est toute la situa-
tion de communication qui est qualifiée (tant
dans sa production que dans sa réception).
L’enjeu du web, nous l’avons déjà souligné, c’est,
l’immensité du corpus. C'est-à-dire la capacité
d’annoter une gigantesque archive. Dans un pre-
mier temps, il faut rappeler que les projets réels
d’intelligence ne travaillent pas sur “le web”, mais
sur un sous ensemble particulier. Et plus cet en-
semble est grand et plus les ressources humaines
déployées pour son étude sont importantes.
Donc, l’enjeu idéal est bien sûr d’imaginer une
solution de qualification automatique des don-
nées les plus pertinentes possible. Si le 100%
automatique est impossible en matière d’intelli-
gence, l’analyse automatique des documents a
connu des avancées remarquables qui peuvent
permettre à très court terme une annotation du
contenu de la page totalement automatisée. Pour
autant, c’est la qualification du média dans son
inscription sociale qui parait difficile. Là encore de
gros progrès d’automatisation sont possibles,
mais c’est surtout dans la gestion de la connais-
sance collective (c'est-à-dire le crowdsourcing de
l’annotation humaine) que les possibilités sont
immenses. Il est en effet possible d’imaginer des
collectifs d’experts, autour de secteurs informa-
tionnels donnés, partager leurs ressources dans la
qualification et l’annotation de sous ensemble
sectoriel du web. Très rapidement, la communau-
té des utilisateurs de my web intelligence pourra
être amenée à collaborer à la construction
d’index sectoriel de qualification du web … / ...
31. Tribune libre
www.synfie.fr Page 31 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
sous la forme de projet open data. À terme cette
“mémoire partagée” cumulative offrira aux nou-
veaux utilisateurs une indexation sectoriellement
pertinente.
De l’intelligence du web : extraction, ana-
lyse et visualisation des données
Une fois l’extraction et la qualification des don-
nées d’une controverse achevée, My web intelli-
gence donne accès à un corpus nettoyé qui per-
met de pouvoir mette en place un ensemble de
traitements d’analyse et de traitements des don-
nées pour tirer véritablement une compréhension
de l’économie de la discussion en ligne. Le pre-
mier travail est d’utiliser la théorie des graphes et
l’analyse structurale des réseaux pour générer
des cartographies des médias qui sont à l’origine
de la controverse. En effet derrière les mots, il y a
des locuteurs aux commandes de supports mé-
diatiques. Des locuteurs situés et engagés dans un
espace public numérique. Il faut non seulement
pouvoir qualifier ces médias selon leur nature so-
ciale, leurs comportements éditoriaux, mais il faut
avant tout révéler à travers la structure de leurs
citations qualifiées, le contexte d’alliance et d’ad-
versité qu’ils tissent dans les processus de légiti-
mation mais aussi d’opposition. Dis moi qui tu
cites, quelles sont tes références et je te dirais qui
tu es. Une vision globale et structurale des ac-
teurs révèle non seulement la structure des al-
liances et des oppositions, mais elles révèlent les
communautés d’intérêts idéologiques et situe
chaque média selon un rôle social dans le débat
et au sein de sa communauté (leader d’opinion,
vigie, marginal sécant, bridge, etc.). Cette recon-
textualisation du locuteur au cœur de ses “amis”
nous informe sur la position sociale du média au
sein d’une communauté stratégique.
Mais l’analyse des expressions permet aussi, à
travers l’analyse multivariée, de dégager des pro-
fils comportementaux de locuteurs. En effet, la
nature sociale de ces locuteurs, les sujets abor-
dés, les arguments utilisés, les dates de publica-
tion, les supports médias utilisés nous permettent
de dégager des cooccurrences (par l’analyse fac-
torielle de correspondance) qui sont autant de
marqueur sur les « prises de position fré-
quentes ». Ainsi, on peut quantifier et qualifier les
prises de position types et comprendre leur évo-
lution dans le temps. Derrière un ensemble assez
conséquent de messages, il n’est pas rare de dé-
gager ainsi 3 ou 4 positions majeures qui se parta-
geant l’espace public discursif et à peine plus
d’une dizaine produisant la quasi-totalité des dis-
cours en ligne. Ainsi, si l’analyse structurale avait
“socialisé” les médias, la réduction du corpus à
quelques profils comportementaux quantifiés
permet d’avoir une vision plus claire de la structu-
ration de la controverse dans le temps.
Enfin, l’analyse des graphes peut être utilisée
pour comprendre la structuration argumentaire
latente. En effet, les prises de position visent à
construire une réalité par intervention ponctuelle.
Au final toutes ces interventions impressionnistes
forment un tableau d’ensemble qui vise à cons-
truire une réalité. S’il est très difficile (mais pas
impossible) et très coûteux de reconstruire le
graphe complet des arguments, ils est très ins-
tructifs d’analyser la coprésence d’objet du dis-
cours. La cartographie de mots-clés révèle alors
une structure de représentation collective qui est
le produit latent de la construction de la réalité
par la prise de parole dans des médias donnés.
L’utilisation des variables topologiques des
graphes nous permet de comprendre le rôle de
chaque concept dans une stratégie argumentaire
mais aussi les glissements notionnels. En réalité
les sujets qui prennent position dans une contro-
verse sont dans leur très grande majorité des
portes paroles qui habitent des discours qui leur
préexistent. La controverse est plus une prise de
position sur des arbres argumentaires existants
que véritablement la création innovante d’argu-
ment. … / …
32. Tribune libre
www.synfie.fr Page 32 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Là encore, l’analyse en graphe des arguments,
une fois qu’ils sont datés, permet d’historiciser la
construction des représentations collectives et
d’en comprendre la dynamique.
Pour conclure : une approche dynamique
et prospectiviste des débats en ligne
Les sciences sociales et humaines ont toujours
procédé par réduction de la complexité, ce n’est
pas une limite, c’est leur nature. Voir derrière la
multitude d’événements un nombre saisissable
de rôles, de comportements, de structures collec-
tives et dynamiques, voilà le fondement du travail
des experts. Sans cette réduction aucune science
mais aussi aucune gouvernance ne serait possible.
Cette réduction est constitutive, certes, mais ne
doit pas pour autant être oubliée quand on redes-
cend au niveau microscopique. Chaque individu
d’une étude (au sens statistique, c'est-à-dire ici la
prise de parole sur Internet) est plus ou moins
approximé par ces réductions conceptuelles. Il a
en lui une part qui le subsume à cet objet com-
mun et dans le même temps possède une part
irréductible, originale et unique. Les concepts de
l’étude nous servent alors de repères, de coor-
données sociologiques pour situer la prise de pa-
role dans un univers à 3 dimensions. Le document
numérique est ainsi situé dans un univers média-
tique, produit par un comportement discursif
type et active une réalité construite. On peut aus-
si prendre de la hauteur et voire l’espace numé-
rique sous son aspect global et structuré selon 3
réalités (la question d’une analyse multidimen-
sionnelle reste à venir)
Mais avec la date de publication, on entre non
seulement dans l’analyse de la dynamique passée
et présente mais aussi dans la possibilité d’une
prospective du discours, de la construction de
scénario plausible d’évolution des prises de posi-
tion. L’analyse longitudinale de la prise de parole
nous permet d’accéder à une étude empirique de
l’influence, de la viralité, des ruptures et des al-
liances. On peut imaginer que les datas sciences
appliquées aux discours numériques en viennent
à modéliser les phénomènes idéologiques pour
améliorer la qualification automatique du dis-
cours et nous permettre de gérer de plus grandes
masses de données. Mais l’étude pourrait tout
aussi bien dégager des comportements discussifs
collectifs invisibles ou inconscients. On pense au
phénomène de bashing qui relève du lynchage en
ligne mais aussi à la diffusion d’innovations ou
d’argumentations nouvelles.
En fait, Internet est une immense enquête d’opi-
nion a priori, le recensement de toutes les ré-
ponses à toutes les questions, mais avant même
de les avoir posées. L’enjeu majeur est aujour-
d’hui de formaliser un outil de collecte et d’ana-
lyse de ces réponses au regard des questions que
l’on se pose. My Web Intelligence est aujourd’hui
un prototype, mais il est surtout un programme
pour prendre au sérieux les enjeux de l’intelli-
gence numérique qui n’est autre que de l’intelli-
gence sociale. Il faut désormais la mobilisation
nécessaire, et surtout les investissements en re-
cherche et développement, pour entrer de pleins
pieds dans l’espace public numérique. Nous
sommes à l’aube du XXIème siècle dans la même
situation que la sociologie au début du siècle der-
nier, face à d’énormes enjeux mais aussi face à la
possibilité d’embrasser la complexité du monde à
venir. C’est là tout l’enjeu des humanités numé-
riques •
http://mywebintelligence.net
33. www.synfie.fr Page 33 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
NOUVEAUX ADHÉRENTS
NOMINATION
ARTICLES
ANNONCES
03
VIE DU SYNDICAT
34. Vie du Syndicat
www.synfie.fr Page 34 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
ILS ONT REJOINT LE SYNFIE
Bienvenue au SYNFIE !
Anne-Cécile HENKES
Directrice adjointe - En charge des Etudes
François VESSIERE
Partner & Director
Olivier CHAILLOT
Analyste
G•MK
Damien ROMESTANT
Consultant
Valentin HUEBER
Président Fondateur
Nathalie AUBIN
Consultant Senior Advisor to the CEO
Business Model
Transformation &
Intercultural Business
Development
Khadidja GOULAIN
Consultant
35. Vie du Syndicat
www.synfie.fr Page 35 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Administrateur du SYNFIE depuis sa création, M. Alain BARONI vient
d’être nommé Délégué Région PACA du syndicat.
Alain est Dirigeant du Cabinet de Conseil FRAMATECH basé à Mar-
seille et également Professeur Associé à l'Université Paul Cézanne au
sein du Master 2 Pro "Veille Technologique & Innovation".
Il est par ailleurs, Senior Expert Consultant auprès de la Commission
Européenne (programme EuropeAid) et la Coopération allemande.
NOMINATION
Félicitations !
Délégué Régional PACA
36. Vie du Syndicat
www.synfie.fr Page 36 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
M. Bruno ETIENNE vient d’être nommé Délégué Région ILE DE FRANCE
du syndicat.
Bruno est Président de la Société KB Crawl, éditeur français de solutions
de veille créé en 1995.
Cette société développe un outil de collecte pour surveiller et collecter
les informations stratégiques sur Internet et une plateforme collabora-
tive de veille qui permet de diffuser et partager l’information.
NOMINATION
Félicitations !
Délégué Régional ILE DE FRANCE
38. Vie du Syndicat
www.synfie.fr Page 38 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
Etude disponible !
« Perspectives de développement des
professionnels de l’Intelligence Economique »
Le constat sans doute majeur de cette étude reste que le secteur de l’IE est en devenir. La
récente refonte des services gouvernementaux annonce peut-être une nouvelle dynamique.
Sa nouvelle dénomination, sous l’intitulé « Information stratégique et sécurité économique
», pourra sans doute légitimer la profession sur la scène économique car elle participera à la
défense et à la promotion des intérêts des entreprises et des organisations.
Le secteur, principalement porté par des acteurs de petite taille, devrait évoluer dans les
prochaines années. Des cabinets généralistes, couvrant tous les aspects du domaine, de-
vraient émerger et les experts se regrouper...
Pour commander l’étude : Gumroad
« Étude sur les perspectives de développement des profes-
sionnels de l’intelligence économique 2016 » 250 € HT
(300 euros TTC) ‐ 43 pages ‐ Mars 2016.
39. Vie du Syndicat
www.synfie.fr Page 39 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
La prochaine AG du SYNFIE sera marquée par l'élection du président pour un mandat de
deux ans. Si vous souhaitez être candidat à la présidence du SYNFIE, merci d'envoyer votre
candidature à bureau@synfie.fr. Nos statuts précisent que le Président est élu directement
par l'AG et qu'il doit être issu du collège A (membres actifs).
Pour postuler, merci d'envoyer un email à bureau@synfie.fr.
Renouvellement du Poste de PRESIDENT
Renouvellement du Poste de TRESORIER
Par ailleurs, le poste de Trésorier est également ouvert à candidature. Pour postuler, merci
d'envoyer un email à bureau@synfie.fr.
Le Trésorier assure les tâches suivantes :
Tenir le fichier des adhérents avec le secrétaire général ;
Lancer les appels à cotisations ;
Rembourser les frais des bénévoles sur base des décisions du CA ;
Enregistrer les dépenses et les recettes dans le Grand Livre et le Journal de Caisse ;
Contrôler la trésorerie, classer les pièces comptables, les justificatifs de toute opération.
Opérer le rapprochement bancaire ;
Veiller à la concordance entre le budget réalisé et le budget prévisionnel, grâce à un ta-
bleau de bord qui en permettra le suivi ;
Préparer et présenter à l’AG le compte de résultat et le rapport financier ;
Participer à l’élaboration du budget prévisionnel ;
Assurer les relations avec la banque ainsi que le vérificateur aux comptes ;
Le Trésorier est naturellement membre du SYNFIE et il siège au Bureau du Syndicat.
En outre, il est rappelé que toutes les charges du SYNFIE sont
occupées à titre bénévole. Vous pouvez consulter les statuts et
le règlement intérieur sur le site du SYNFIE.
40. www.synfie.fr Page 40 sur 52Lettre d’information N°5 — T1 2016
SERVICE DE L’INFORMATION STRATÉGIQUE
ET SÉCURITÉ ÉCONOMIQUES04
ACTUALITÉ DE L’IE