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METAPHOTOHISTOIRE – LES ALLEGORIES DU REGARD
Stratégie d’exploration artistique et d’analyse visuelle et éducationnelle
Danut Zbarcea
MĂ©moire
présentée
au
Département d’Enseignement de l’art
comme exigence partielle au grade de
maîtrise ès Arts (Enseignement de l’art)
Université Concordia
Montréal, Québec, Canada
mai 2008
© Danut Zbarcea, 2008
2
ABRÉGÉ
METAPHOTOHISTOIRE – LES ALLEGORIES DU REGARD
Stratégie d’exploration artistique et d’analyse visuelle et éducationnelle
Danut Zbarcea
Réalisée à partir de cinq séries de photographies et de textes interrogatifs
(représentant le contexte socio-politico-culturel du monde contemporain publié sur
Internet), la présente recherche qualitative est, en fait, une exploration subjective d’une
étape de mon propre processus artistique. Dans le cadre de ce projet, chaque série a été
architecturée et amplifiée de façon répétitive à partir d’un prétexte représenté par un
moment considéré très important dans l’histoire de la photographie et de la culture
humaine en général. Il s’agit de Mo Ti, Al Hazen, Edweard Muybridge, Harold E.
Edgerton et de la photographie numérique. Ce qui fait tourner la roue critique et qui
unifie le tout est le voyage imaginaire de Marco Polo (dans un temps aléatoire) sur la
Route de la Soie du monde contemporain. Cette problématique (annoncée dans les deux
premières séries unifiées) a été réinterprétée, réinterrogée dans les autres séries, mais
d’une perspective différente.
L’objectif principal de cette recherche est d’explorer divers types de procédés de
production artistique qui permettent la mise sur pieds d’une stratégie éducationnelle
destinée au niveau d’études post-secondaires. Cette stratégie vise le développement d’un
esprit interrogatif et critique, capable de générer un comportement averti concernant
l’exploitation de la connaissance construite dans le cyberespace.
3
Introduction
En 1980, j’étais étudiant au lycée dans une petite ville de montagne en Roumanie.
À ce moment-là, la première chose que je faisais le matin était de courir jusqu’au au fond
de notre jardin pour passer les premiers moments de la journée dans une sorte de
communion secrète avec la Terre, le petit Ruisseau qui passait par là et le Soleil levant.
Je voulais vivre la rencontre de l’eau avec la lumière du matin. Je voulais entendre le
bruit et le silence de cet endroit-là. Je m’identifiais avec cet imaginaire avec lequel je
commençais une journée. Dans ce temps-là, je semblais être d’accord avec Goethe qui
disait que «L’âme de l’homme/ Est semblable à l’eau;/ C’est du ciel qu’elle vient,/ C’est
au ciel qu’elle monte,/ Et il lui faut redescendre sur terre/ En changement éternel.» (Jung
23)
Aujourd’hui, mes matins sont marqués d’une nouvelle habitude : faire courir mon
regard sur un petit espace qui s’appelle l’écran de l’ordinateur. Internet a pris la place du
petit ruisseau et le WEB s’est substitué à mon ancien jardin paradisiaque. “Internet is the
rivers that carry us with it.“ (Berger 90). À présent, toutes mes journées se déroulent
(consciemment ou non) sous le pouvoir du rythme de ce nouvel imaginaire virtuel. “A
couple of years ago I couldn’t imagine what I would do with a computer; now I can’t
imagine what I would do without one.” (Wheeler 28) Mon monde n’est qu’une
accumulation de fragments conceptuels et visuels numériques, stéréotypés et enchaînés
un après l’autre. Je ne pense même pas qu’il pourrait y avoir des connexions, des
juxtapositions, des contrastes ou de possibles contradictions. Je ne fais non plus l’effort
de penser à la structure cachée de cette architecture numérique et je fais confiance totale à
4
son architecte. Ses vérités sont mes vérités. Je laisse ma pensée s’endormir et je réalise
que c’est plus confortable de s’assumer une vérité déjà fabriquée. L’évaluation de
l’information, je ne la fais qu’en fonction de ce qui a été déjà inoculé.
Mais, il m’arrive parfois de constater que dans l’image globale de notre monde
numérique fragmenté, stéréotypé, certains individus ou communautés ethniques sont
définitivement catalogués (ou bien regardés seulement) comme des terroristes, des
criminels, des héros de sport, des stars de cinéma, des peuples bénis ou au contraire des
peuples diaboliques. Je réalise alors que, malgré tout le progrès de la connaissance, on ne
veut pas se rendre compte que le monde est plein de nuances, que des peuples avec leur
héritage et leurs particularités culturelles ont le même espoir et la même peur que nous
face aux mystères de la vie. À ce point, je me sens en parfait accord avec Abdallah al-
Ansari (d.1088/9) qui pensait que : “Man are like addicts of drink, Unaware of their own
state.“ (Baldoc 125)
Je réalise que pour devenir plus averti, il faut d’abord comprendre l’état de
confusion où l’on vit.
5
Chapitre I
Pourquoi cette recherche sur le pouvoir du numérique ?
ď‚· Parce que la transformation rapide de la photographie et de la technologie
informatique nous a fait transgresser d’un état de vie connecté au monde naturel à
un Ă©tat de vie incertain et qui a tendance Ă  se confondre avec un monde virtuel
(qui vient se superposer sur le monde réel). “The powers of photography have in
effect de-Platonized our understanding of reality, making it less and less plausible
to reflect upon our experience according to the distinction between images and
things, between copies and originals.” (Sontag 179)
 Parce qu’on parle de plus en plus d’un « non-lieu électronique/ numérique » qui
va s’ouvrir prochainement, sur un seul écran numérique, comme source
indispensable pour le rythme événementiel de notre vie et, en même temps,
comme route d’échange du dialogue ou du non-dialogue du monde contemporain.
Le WEB est devenu l’équivalent de la « Route de la Soie » (qui ne représente
maintenant qu’un « slogan politique trompeur. » (Boulnois 331) La connaissance
et la communication flottent et ont tendance à se confondre de façon
incompréhensible et incontrôlable avec cette route de la soie virtuelle
contemporaine qu’on appelle techniquement WEB. Les horizons de la
connaissance et de la communication sont en dissolution et deviennent de plus en
plus flous. “Nietzsche, nearly a century ago, already named our period the Age of
Comparisons. There were formerly horizons within which people lived and
thought and mythologized. There are now no more horizons. And with the
6
dissolution of horizons we have experienced and we are experiencing collisions,
not only of peoples but also of their mythologies.“ (Campbell 254)
 Parce que le droit à l’identité et le droit d’auteur disparaissent à l’instant même où
on se met sur la route électronique. En même temps, on s’aperçoit qu’on a la
possibilité de transformer, de créer, de manipuler l’information du WEB jusqu'à
sa disparition totale. “The Web has turned our culture inside out. One’s own web
page is not one’s own web page.” (Gate Keepers 212-213)
 Parce qu’on s’aperçoit que l’histoire peut être raisonnée, réfléchie, modifiée,
fabriquée et tournée à l’infini vers un futur qu’on s’imagine à produire. Notre
capacité de nous désinformer nous-mêmes, notre impossibilité existentielle
d’affirmer la vérité nous invitent à transformer l’histoire en pure fiction.
 Parce que la démocratisation de la manipulation de l’information ne libère pas
l’esprit humain de ses angoisses et de ses préjugés culturels. Les cent ans de l’ère
informationnelle n’ont pas apporté de grands changements dans l’attitude de l’être
humain. Laszlo Moholy-Nagy affirmait en 1925, plein de gravité: “Men still kill
one another, they have not yet understood how they live, why they live;
politicians fail to observe that the earth is an entity…” (Sontag 196)
 Parce que l’évaluation de l’information est faite, pour la plupart, à partir de et à
travers cette vaste autoroute virtuelle.
 Parce qu’aujourd’hui on est conditionné électroniquement par un nouveau type
de beauté : la virtualité autoréférentielle. “It’s hard to tell where you leave off and
the camera begins.” (Sontag 186)
7
Chapitre II
Cadre théorique
1. Le souvenir d’enfance comme base théorique de recherche
Avant d’exemplifier le cadre théorique de ce projet, je me vois presque obligé de
faire appel à ma mémoire affective qui s’avère parfois déterminante pour mes décisions
de travail. Je crois qu’on arrive dans la vie à un moment où l’on se crée sa propre archive
hiérarchique de connaissances. À ce moment-là, l’on prend conscience du fait que le
réservoir de savoir le plus fort et le plus riche en significations, c’est notre propre
mémoire des choses vécues. Toutes les connaissances apprises à l’école ne font que nous
aider à créer cette archive hiérarchique, qui suit une ligne du temps apparemment
aléatoire mais qui est fortement liée aux valeurs de la vie. Pour illustrer mes affirmations,
je raconterai une petite histoire :
J’avais environ 12 ans et je vivais avec ma famille dans une région de montagne.
Chez nous, il y avait deux sources d’eau potable : l’installation d’eau fournie par la ville
et la fontaine qu’on avait dans la cour de la maison. De temps en temps, pour des raisons
de rationalisation, l’eau fournie par la ville était coupée. Alors, nous faisions appel à
notre propre source. Mais, à cause de la forte exploitation de la pierre de la rivière qui
passait près de chez nous, le niveau de l’eau dans la fontaine était en décroissance. Et la
conséquence fut qu’un jour nous nous sommes retrouvés sans eau. Alors, mon père m’a
demandé d’aller chercher de l’eau dans le voisinage. La fontaine de notre voisin était plus
profonde que la nôtre. J’aimais les fontaines. J’avais l’habitude de regarder le ciel se
refléter dans leur fond. Mon père pensait que j’étais capable de me débrouiller. La
fontaine avait un mécanisme à manivelle qu’on devait actionner manuellement pour faire
8
ressortir le seau. Arrivé là-bas, j’ai voulu faire deux choses en même temps : regarder le
ciel dans la fontaine et faire sortir de l’eau. Mais, comme le seau était lourd et moi, je
n’étais ni grand ni fort, j’ai perdu le contrôle et la manivelle de fer, m’a frappé en plein
vissage avec toute sa force de rotation. J’ai été arraché à mon émerveillement et je me
souviens de ce que c’était la première fois que je voyais les trente-six chandelles. J’ai
compris alors que chaque chose a au moins deux aspects, deux façons de se dérouler.
Aujourd’hui, je parle de l’idée de potentialité incommensurable et
incompréhensible de la chose. Mais, ce n’est pas cette potentialité qui nous met en
danger. Ce sont nos intentions, nos actions et les finalités que nous visons.
2. Plaidoirie pour une littérature nostalgique et obsessionnelle comme contexte
Ă©largi de recherche
L’idée de ce projet de recherche est née d’un questionnement très personnel sur le
sens de la vie et de l’éducation. Tout ce questionnement est basé sur des lectures que je
considère fondamentales et qui m’ont donné le goût d’interroger et de remettre en
question mon savoir. Quand je pense au spectacle humain, je n’entends que des mots de
mes lectures auxquelles j’ai l’impression que je retourne toujours en quête de moi-même
face Ă  moi-mĂŞme. Alors, en concevant un projet de recherche interrogative sur la
modalité dont j’envisage la connaissance humaine, je me sens dès le début sous le
pouvoir de l’esprit vif et critique de Platon et de son Mythe de la caverne, de Mille et une
nuits et de son auteur anonyme, de Djeha-Hodja Nasreddin et de ses histoires de sagesse,
de Boccaccio et de son Décameron, d’Erasme de Rotterdam avec son Éloge de la folie,
de Jonathan Swift avec ses Voyages de Gulliver, d’Albert Camus et de son Mythe de
9
Sisyphe, d’Eugène Ionesco avec ses Rhinocéros, d’Italo Calvino et de ses Villes
invisibles, de William Golding et de son Roi des mouches, d’Antoine de Saint-Exupéry
avec son Le Petit Prince. C’est l’esprit innocent, interrogatif et critique de ces lectures qui
m’obsèdent que j’ai voulu imprimer à ce travail de recherche et d’analyse du visuel.
3. La littérature de spécialité comme contexte restreint de recherche
3. a. MetaPhotoHistoire – Pourquoi ce mot agglutiné ?
Parce que je crois qu’au commencement l’Histoire n’est qu’un jeu de « mots –
désirs » avec lesquels on construit des voyages fictionnels. Avant qu’on ne parte en
voyage, le désir qu’on projette dans le futur devient déjà une mémoire du passé. “Desires
are already memories.” (Calvino 8)
Une de mes premières obsessions qui a alimenté dès le début mon projet a été
l’idée de voyage au long d’une histoire réinventée, réinterprétée, présentée par Italo
Calvino dans son œuvre Les Villes Invisibles. À partir de cette œuvre, j’ai commencé un
jeu de mots et d’idées concernant l’histoire et de notre capacité de la représenter. Le
voyage à travers l’histoire est fait d’images des choses qui représentent d’autres choses.
“The eye does not see things but images of things that mean other things…” (13)
Notre mémoire imaginative n’est qu’un miroir narcissique qui répète et transforme les
choses vécues : “Memory is redundant; it repeats signs …” (19)
La peur de l’Oubli (et de la perte de nous-mêmes) nous pousse à réinventer notre
histoire. Mais le souvenir n’est composé que des souvenirs. On réinvente et on réévalue
notre histoire en la comparant à nos désirs devenus des mémoires : “At times the mirror
increases a thing’s value, at times denies it. Not everything’s that seems valuable above
10
the mirror maintains its force when mirrored.” (54) Alors, la représentation, ce n’est que
refléter le monde de façon fictionnelle. Refléter le monde, ce n’est que regarder notre
propre image multipliée (en répertoires infinis) dans une fontaine numérique qu’on
nomme WEB.
C’est donc en jouant avec les mots et leurs significations que je suis arrivé à l’idée
d’agglutiner des mots et des significations visuelles.
3. b. Terminologie
Cette section se veut une exploration ouverte de la terminologie que j’ai employée
dans le but de définir la structure du projet artistique. Chaque terme est présenté en
double sens : le sens standard présenté par le dictionnaire de la langue française et le sens
que j’ai construit spécifiquement pour ce projet artistique. L’analyse de chaque terme
vise aussi à donner une image indirecte et partielle des procédés artistiques utilisés
comme base de réflexion éducative (voir aussi l’Annexe).
histoire. (n. f. [de histoire 1 ; 1402]. 1. Récit d’actions réels ou imaginaires;)
L’Histoire représente à la fois l’étude des faits, des événements du passé et, en
même temps, l’ensemble de ces faits, de ces événements. On considère que ce nom a
pour origine les Enquêtes d’Hérodote. Mais c’est Thucydide qui lui a appliqué des
méthodes critiques, (notamment le croisement de sources différentes).
Appliqué à mon projet artistique, l’idée d’histoire prend un aspect d’amalgame de faits et
d’événements placés dans l’espace et dans le temps de façon aléatoire. Dans ce cas,
l’histoire ne signifie « qu’une suite d’images de mémoire contemporaine individuelle ou
11
collective ». (Jung 26) J’ai considéré que l’histoire devient une fiction qui se
métamorphose dans le temps et l’espace de notre mémoire en fonction des désirs qui nous
obsèdent.
métathèse. (n. f. [gr. metathesis, déplacement ; 1587]. 1. ling. Altération ;)
En sémiotique, ce terme a la signification « d’image altérée ». (Danesi 287) En
appliquant le terme métathèse à l’idée d’histoire, on peut affirmer que l’homme
représente son histoire comme une intersection de souvenirs « d’images altérées ».
métalangage. (n. m. [1963]. syn. de métalangue au sens 2. ling. et inform. Langue qui
prend pour objet une autre langue et la formalise.)
Dans mon périple terminologique, j’ai décidé d’utiliser le concept de métalangage
dans un sens dévié, en le prenant pour un moyen d’apprentissage éducationnel.
D’habitude, quand on pense à la langue, on envisage surtout son utilisation pour
dire des choses sur le monde. Mais la langue a aussi une autre fonction, qui consiste Ă 
expliquer la langue. Ainsi, par extrapolation, j’ai été rendu à l’idée de discours sur le
discours ou d’histoire qui questionne l’histoire, ce qui m’a emmené par la suite à la
métafiction.
métafiction. (n. f., Écriture ludique et autoréférentielle ;)
Ce terme est beaucoup associé à la fiction moderniste et postmoderniste, mais on
l’utilise aussi pour parler d’œuvres telles que Mille et une nuits. La définition donnée le
plus souvent est celle d’autoréférence.
12
“Postmodern art suggests that there is no presence, no external truth which
verifies or unifies but there is only self-reference. Historiographic metafiction self-
consciously suggests this, but then uses it to signal the discursive nature of all reference.”
(Hutcheon 119).
photographie. (n. f. [d’apr. l’anglais. :1836]. 1. Action, art, manière de fixer par
l’action de la lumière l’image des objets sur une surface sensible.)
L’histoire de la photographie commence en Chine antique (approx. 400 av. J.C.)
avec Mo Ti et son recherche sur la « camera obscura ». La recherche sur la « camera
obscura » continue dans le monde islamique avec Al Hazen (approx. 1000 ap. J.C.). Mais
la première image photographique du monde arrive en 1826 avec Nicéphore Niépce. En
photographiant le monde, l’homme a eu l’impression qu’il pouvait collecter, s’approprier
et consommer le monde par l’emprisonnement de toutes ses images dans sa tête. “To
collect photographs is to collect the world.” (Sontag 3-8)
Mais, consommer le monde comme image signifie consommer la métamorphose
de sa propre vision. La photographie est plutôt ce qu’avait promis en 1996 le slogan de
Kodak “Whatever you want it to be.” (Wheeler 29)
Dans ce cas, la raison d’exister qu’on donne aux choses change en fonction de
l’angle de vue et des désirs qui nous guident.
mise en abîme. (Procédé par lequel on intègre dans un récit, dans un tableau, un
élément signifiant de ce récit ou de ce tableau.)
13
Ce syntagme consiste en l’incrustation d’une image en elle-même ou, d'une
manière générale, en la représentation d’une œuvre dans une œuvre de même type. « Il
existe trois figures essentielles de l'amplitude : la réduplication simple, qui consiste en un
rapport de similitude élémentaire ; la réduplication à l'infini, dans laquelle le fragment
inclus inclut lui-même un fragment ayant cette relation de similitude ; et la réduplication
répétée ou spécieuse, dans laquelle le fragment est censé inclure l'œuvre qui l'inclut.
Quant à la portée, il existe trois sortes de mises en abyme, reflétant trois formes de
discordance entre l'ordre de l'histoire (diégèse) et celui du récit (narration) : la mise en
abyme prospective, qui « réfléchit avant terme l'histoire à venir » ; la mise en abyme
rétrospective, qui « réfléchit après coup l'histoire accomplie » ; la mise en abyme rétro-
prospective, qui « réfléchit l'histoire en découvrant les événements antérieurs et
postérieurs à son point d'ancrage dans le récit ». (DITL)
Dans mon projet, c’est « l’effet de miroir » de ce procédé qui m’intéresse. Deux
miroirs face à face se reflètent réciproquement à l’infini l’un dans l’autre. Mais pour
nous (le narrateur qui regarde) c’est quasiment impossible de regarder en même temps en
deux directions totalement opposées. Chaque direction demande une participation
créative. Le regard et les significations qui se produisent nous appartiennent.
intertextualité. (n. f., Interaction textuelle ;)
L'intertextualité est une forme de « transtextualité ». Le concept représente
l'ensemble des textes en relation (par le biais par exemple de la citation, de l'allusion, du
plagiat) dans un texte donné. « L'intertexte peut se faire par captation ; dans ce cas c'est
un intertexte facilement repérable et clair tel que le proverbe, l'illusion... Ou par
14
subversion plus difficile à reconnaître ; il s'agit de citations déformées ou la parodie par
exemple, l'écrivain joue avec le texte d'origine. » (Genette 561)
paradoxe. (n. m. [gr. paradoxos, contraire à l’opinion comune, de doxa, opinion ; 1485].
1. Opinion, chose, être qui va contre la manière de penser habituelle, qui heurte la raison
ou la logique.)
Un des paradoxes les plus connus est le paradoxe du menteur (Eubulide), dérivé
du paradoxe du Crétois (Épiménide). Sous sa forme la plus concise, on peut l’énoncer
ainsi : un homme déclare : « Je mens ». Si c'est vrai, c'est faux. Si c'est faux, c'est vrai.
L’ambiguïté naît donc de la confusion entre le langage et le métalangage. « Les
interprètes modernes ont résolu ce paradoxe en l'étalant dans l'espace. Au moment où je
dis : « Je mens toujours », ce qui implique que je ne mens pas toujours, il n'y a pas de
contradiction logique : il m'arrive de mentir, mais pas toujours ! » (Brisson 149)
allégorie. (n. f. [lat. allegoria, du gr. allêgorein, parler par images; 1119]. 1. Expression
d’une idée par une image, un tableau, un être vivant.)
Dans le monde grec « allo agoreuein » avait la signification de « dire autre
chose ». Il semble que le terme allégorie provient du temps des philosophes
pythagoriciens. Plus tard, Philon d’Alexandrie (20 av. J.C. – 50 ap. J.C.) utilise ce terme
pour nommer la doctrine de l’interprétation symbolique des textes sacrés. Plutarque de
Chéronée déclare que ce qu’on appelait autrefois « hypnoia » (sens caché) on l’appelle
aujourd’hui « allegoria » (cf. J.Pépin, Mythe et Allégorie, 87). Le stoïque Héraclite du
Pont (époque d’Auguste) disait que « l’allégorie dit une chose mais en signifie une autre
15
différente de la chose dite. » Jean Scot fait la distinction entre « allegoria facti » et «
dicti », c’est-à-dire entre allégorie de faits et de discours. (Il s’agit toujours de dire une
chose pour entendre une autre). Au Moyen Âge, le texte allégorique devient un prétexte
pour une construction didactique. Au Xe
siècle, on constate l’apparition d’un procédé
systématique de fabrication d’allégories. Mais, c’est seulement à la fin du Moyen Âge
qu’on commence à appliquer ce procédé aux images (on commence à transposer les
images parlées en images dessinées pour obtenir un effet comique et d’absurde). Pour
Goethe, « l’allégorie transforme le phénomène en un concept, le concept en image, mais
de telle sorte que le concept soit toujours saisissable dans l’image et qu’on puisse le
retenir et l’avoir et l’exprimer en elle. » (Borella 67-69) Ce type de vision on peut la
reconnaître, par exemple, dans l’allégorie photographique The Two Ways of Life,
d’Oscar Rejlander, qui (pour produire cette seule image) a combiné plus de trente images
négatives séparées. (Wheeler 15-16)
suspension volontaire d’incrédulité. (Son inventeur, Samuel Taylor Coleridge, parlait
aussi de “poetic faith” dans sa Biographia Literaria, datée 1817.)
L’expression décrit l’opération mentale qu'effectue le spectateur d'une œuvre de
fiction qui accepte, le temps de sa consultation de l'œuvre, de mettre de côté son
scepticisme.
En conclusion, à la question : « Qu’est-ce qu’on voit quand on regarde l’histoire
du monde d’aujourd’hui ? », la réponse que je donnerai est:
16
Une MetaPhotoHistoire (Histoire + Métathèse + Métalangage + Métafiction +
Photographie + Mise en abyme + Intertextualité + Paradoxe) = Allégorie du regard
Ce terme hybride que j’ai fabriqué exprime bien une des caractéristiques principales de
notre monde : l’éclectisme numérisé (Meta + Photographie + Histoire)
Dans le contexte éclectique contemporain, on a relativisé et détrôné l’image de
son piédestal de vérité. La fontaine WEB, avec son contenu amalgamé, nous fait vivre la
dématérialisation de la connaissance et de la culture. On constate que dans le séduisant
miroir WEB, chaque information qu’on cherche est reflétée à l’infini à travers d’autres
informations liées.
4. But visé
Par ce projet de recherche, j’ai eu l’intention de créer un triple
questionnement portant sur :
- le processus de création ;
- le contenu en informations employé dans ce processus ;
- les enjeux de l’éducation visuelle contemporaine.
Dans le design de la structure interne de ce questionnement, j’ai suivi quatre
aspects généraux de ce que je considère être l’environnement paradoxal de la
vie contemporaine :
4. a. Le caractère douteux/ contradictoire de la vérité
Le philosophe et enseignant sufi africain de Bandiagara, Tierno Bokar (1875-
1939) disait que « dans le monde il y a trois types de vérité : ma vérité, ta vérité et la
17
vérité ». Il s’agit d’un type « d’affirmation – désir » qui montre une possibilité infinie
d’exposer la vérité. En essayant d’appliquer cette formule au monde contemporain, on se
découvre (à l’instant même) coincé dans un jeu éternel de vérité en même temps
éphémère et absolue. Du point de vue théorique, l’expression est totalement valable.
Mais, dans la vie de tous les jours, l’expression reste inapplicable. La vérité, on l’affirme
de façon aléatoire et en hésitant. Le monde actuel repose beaucoup sur une connaissance
relative et confuse de la vérité. «La connaissance repose non seulement sur la vérité,
mais aussi sur l’erreur. » (Jung 203)
Quand je dis « monde actuel », je fais référence au monde de toujours (qu’on vit
seulement au présent). Je trouve que le passé et le futur sont deux modes fictionnels pour
nous. Ce premier aspect, je l’ai exploré comme histoire visuelle au présent, dans laquelle
on rencontre les vérités du passé et du futur mélangées dans un perpétuel présent.
4. b. L’instantanéité de la réalité irréelle et de l’irréalité réelle
Jaques Derrida parlait d’une perception tourmentée de la connaissance où l’on se
retrouve au centre et à la périphérie en même temps. “This is why classical thought
concerning structure could say that the center is, paradoxically, within the structure and
outside it.” (278-294) En extrapolant la vision de Derrida, on peut suggérer que le fait de
voyager sur les autoroutes électroniques de l’homme contemporain ressemble à un
événement qui se déroule au centre et à la périphérie en même temps. J’ai nommé ce
phénomène syndrome d’intersections. Confronté à ce monde fluide, l’homme (l’inventeur
de l’autoroute électronique) se reflète soi-même dans cet espace fluide virtuel et devient
un imitateur fidèle de cet environnement d’une façon caméléonesque. Taisen Deshimaru
18
considère que ce type de développement ne représente qu’une involution. « En fait,
l’homme ressemble de plus en plus à un animal raté. Une mauvaise éducation a fait de
son cerveau un ordinateur intellectuel et idéologique, créant ainsi des contradictions entre
le monde imaginaire et verbal de la pensée et la réalité immédiate de la vie. » (144)
Être terrorisé par l’instantanéité du centre et de la périphérie, en perdant le
contrôle de sa propre identité, c’est le deuxième aspect que j’ai exploré. Dans mon projet,
il n’y a pas de centre ou de périphérie.
4. c. L’ubiquité des repères spirituels
Confrontés à ce choix de « mille et une portes », on se sent en quête d’une autorité
fantomatique ou sous le pouvoir d’un maître surveillant malheureux, omniprésent,
transparent, mais toujours invisible. Cet état d’incertitude, d’attente figée, d’impossibilité
d’identifier une voie spirituelle valable prend dans mon projet l’aspect d’un objet non-
identifiable (aux aspects sans nombres) ou d’incertitude sacrée, au-delà de notre pouvoir
de compréhension. La langue dans laquelle on vit dans le monde contemporain est
devenue un espace de tentations étranges, un espace incertain et insécuritaire. Cette idée
(de vivre dans une langue où on se sent manipulé et surveillé en même temps par
l’imaginaire quotidien) a représenté le troisième aspect de mon projet.
4. d. L’état confus des enjeux éducationnels
À mon avis, la connaissance humaine évolue de façon synchronique. Mais, cette
évolution a un aspect paradoxal. Dans un sens métaphorique, on se voit arrivés dans un
19
lieu extatique où l’on garde un pied dans le monde du réel et l’autre dans le monde du
virtuel. Fascinés de se trouver là, on ne peut pas décider quelle voie emprunter.
Le pire dans cette situation, c’est qu’il semble que l’évolution de la connaissance
ne nous apprend rien. « Longtemps, nous avons cru que le progrès de la culture allait de
pair avec le développement de la culture. » (Finkelkraut 183)
« La barbarie a donc fini par s’emparer de la culture. À l’ombre de ce mot, l’intolérance
croit, en même temps que l’infantilisme. » (183)
En se questionnant sur le sens de l’éducation, Jean Piaget considérait que
l’éducation intellectuelle ne doit pas être seulement un savoir répété de conservation d’un
savoir des vérités toutes faites ou des demi - vérités.
Par le quatrième aspect que j’ai exploré dans mon projet de recherche visuelle,
j’ai visé la façon dont on pourrait devenir par soi-même un être conscient et averti dans le
processus de construction de la vérité.
20
Chapitre III
1. MĂ©thodologie de recherche qualitative
Pour la réalisation de mon projet, j’ai employé trois types de pratiques
méthodologiques : Projet artistique de photographie numérique et de texte manipulés ;
Journal de recherche et de route ; Réponse esthétique.
2. Projet artistique de photographie numérique et de textes manipulés comme
procédé de recherche qualitative.
Ce projet représente une tentative de déconstruction (de décodage) et de
reconstruction (de recodage) d’un savoir visuel et informatif contemporain stéréotypé
dont l’une des sources est Internet. Le projet de déconstruction et de reconstruction du
savoir à été réalisé en cinq étapes, chacune ayant à la base des histoires fictionnelles qui
ont tenté de donner un air d’histoire véridique à la photographie et au monde
contemporain en général :
a. La photographie de la route de la soie (Marco Polo en voyage de MO TI Ă  Al
Hazen)
b. L’instantané des attitudes humaines (de Edweard Muybridge à Harold E. Edgerton)
c. La photographie des syndromes contemporains
d. La photographie de la surveillance complice
e. La photographie d’un monde qui s’endort involontairement
La première histoire fictionnelle de mon projet artistique a comme acteur
principal Marco Polo (XIVe
siècle). Il est parti en voyage (mais on n’insiste pas sur un
21
point de départ ou d’arrivée) pour rencontrer Mo Ti (le premier inventeur d’une camera
obscura en 400 av. J.C., dans la Chine antique) et faire la connaissance du grand Kubilai
Khan (XIIIe
siècle) et de son grand empire qui, à ce temps-là prenait la forme d’un Non
lieu – un espace étendu du Tibet jusqu’en Perse. En quittant la Chine, Marco Polo part
pour rencontrer Al Hazen (qui continue la recherche sur la camera obscura en l’an 1000
ap. J.C., dans le monde islamique, sur le territoire de la Perse d’autrefois, l’Iran
d’aujourd’hui). Cette problématique (annoncée dans les deux premières séries unifiées) a
été réinterprétée, réinterrogée dans les autres séries, mais d’un angle de vue différent.
Dans les séries suivantes, le voyage de Marco Polo se dissipe. Il ne reste que la
problématique concernant le contexte socio-politico-culturel du monde contemporain. La
fiction suit le principe de la boule de neige. Elle continue à s’amplifier d’une façon
dissimulée parce que chaque cycle de voyage dévore et réalimente la mémoire du désir
imaginaire du voyageur. À un autre niveau, le message visuel éclectique suggéré au début
continue d’être développé par le narrateur (du temps présent) qui le regarde. Ce fait met
en évidence l’aspect multipolaire de ma fiction dans le sens que la construction de la
connaissance et l’interprétation de cette connaissance sont faites aussi par la contribution
active de ceux qui regardent. Mais, le message visuel transmis au « narrateur qui
regarde » par le monde d’aujourd’hui a un caractère paradoxal. Il joue un rôle
fondamental dans la construction de la mémoire et de la conscience sociale comme, par
exemple, Iwo Jima ou World Trade Center. (Lester xi) Il s’agit d’une création à double
sens. On donne naissance à une histoire qui, par la suite, contribue à la création de notre
mémoire et du sens de l’histoire. Dans la structure interne de cette mémoire, chaque
image et chaque fragment de texte représentent des événements qui, parfois, ont un
22
niveau d’émotivité très élevé et qui exercent une influence forte et de longue durée sur
notre façon de penser le monde d’aujourd’hui ou des temps passés. L’efficacité de ce
message visuel contemporain est donnée aussi par son design, par sa structure interne et
externe. Le message véhiculé par ce monde en manque de temps et placé sous le pouvoir
de la vitesse et de la peur est fragmenté et stéréotypé. Ce type de message est de plus en
plus semblable aux clichés multipliés d’un voyage fictionnel. L’Histoire des événements
simultanés et synchrones, je l’ai transféré dans une histoire racontée. L’idée centrale c’est
qu’en faisant le montage des clichés de cette histoire racontée, on ne peut pas parvenir à
obtenir l’image globale et réelle de notre périple visuel quotidien. On n’obtient que de
fragments d’une histoire sans fin qu’on construit et qu’on estompe d’une heure à l’autre.
Dans la réalisation du projet artistique, j’ai employé le procédé que je nomme
« Pseudo recherche historique », ce qui veut dire que pour une histoire fictionnelle j’ai
utilisé un type de recherche appropriée.
J’ai utilisé aussi des procédés de travail empruntés à la méthodologie du
photojournalisme comme : Misrepresentation, News staging, Re-creating, Re-telling,
Plagiarism. Le but principal de l’utilisation de ces tous procédés a été de créer finalement
une image générale d’ambiguïté et de séduction.
Note : Le voyage de Marco Polo n’est qu’un prétexte fictionnel lancé au début de
ce travail d’une manière semblable à la recherche d’une information sur Internet. Ce
prétexte agit à la façon d’un mot-clef qui sert à rassembler des informations liées à mon
sujet.
23
2. a. La photographie de la route de la soie (Marco Polo en voyage de MO TI Ă  Al
Hazen)
Cette série est composée de trois parties :
1. Une série de textes littéraires qui attestent les voyages de Marco Polo en Chine et en
Perse.
2. Une série d’images représentant le voyage de Marco Polo dans l’empire de Kubilai
Khan (Chine d’aujourd’hui)
3. Une série d’images représentant le voyage de Marco Polo en Perse (Iran d’aujourd’hui)
2. a. 1. Une série de textes littéraires qui attestent les voyages de Marco Polo en
Chine et en Perse.
Le texte qui suit représente un de ces transtextes autoréférentiels.
________________________________________________________________________
“Bertold Brecht noted in “The Life of Galileo” that MO TI liked to take pictures
representing bicycle, water and bubbles. “During the time of visit of Marco Polo in
Kublai Khan’s China, the Chinese people thought that riding a bicycle on water or
playing with bubbles can destroy completely the feeling of self-importance and can erase
from their memories their own “personal history— so that to attain humility.”
________________________________________________________________________
Analyse et réponse esthétique En lisant ce texte, le « narrateur qui regarde » doit
tomber dans le piège d’une ambiguïté séduisante. Le texte a une architecture logique avec
certains éléments qui sont vrais et d’autres qui sont faux. Pour donner l’impression de
véridicité et de conformité, le texte suit la logique du monde qu’on connaît. Quelques
24
éléments sont vrais pour la réalité du monde qu’on connaît (Mo Ti, Marco Polo, Chine,
etc.) ; d’autres éléments sont vrais seulement pour une réalité fictionnelle.
Donc, le texte raconte une histoire qui peut ĂŞtre autant vraie que fausse. Il joue
avec l’idée d’oubli et de distorsion. Le texte met en question la capacité de l’être humain
d’avoir une connaissance stable en ce qui concerne l’histoire. Après une ou deux lectures,
on commence à douter. On n’est pas sûr de la conformité de ce texte à l’écriture de B.
Brecht. On n’est sûr non plus de la véridicité de l’histoire racontée. Mais on est sûr de
l’ambiguïté de cette histoire autosuffisante à elle-même. Elle peut vivre toute seule, sans
avoir besoin d’être soutenue par des images. Elle est basée sur l’imaginaire enraciné dans
la mémoire collective. Elle est conçue pour évoquer cet imaginaire et le remettre en
question en jetant aussi le doute sur elle-mĂŞme.
________________________________________________________________________
2. a. 2. Une série d’images représentant le voyage de Marco Polo dans l’empire de
Kubilai Khan (la Chine d’aujourd’hui)
« Peuple, vélo et eau » ; photo : Mo Ti, publiée par Flickr en 2007
25
« Peuple, vélo et eau » ; photo : Mo Ti, publiée par Flickr en 2007
________________________________________________________________________
Procédés techniques utilisés:
Note : Cette série d’images a été produite à partir d’images qu’on trouve publiées sur le
site Internet Flickr (http://www.flickr.com/)
Première étape : En utilisant le mot-clé « Chine », j’ai fait une recherche d’images sur le
site mentionné, suivie d’une sélection. J’ai enregistré dans mon ordinateur des images
capables de contribuer à la construction d’une fiction visuelle à structure aléatoire et
ambiguë.
Deuxième étape : En utilisant un simple logiciel HP de traitement d’image, j’ai modifié
la chromatique des images (effet de couleur intense ou effet de couleur faible en
intensité).
Troisième étape : J’ai photographié chaque image avec une caméra numérique Canon de
3 méga pixels. Devant l’écran de l’ordinateur, j’ai placé une bougie. Au centre de l’écran
26
j’ai accroché un ruban de soie rouge. J’ai agrandi l’image à la dimension de l’écran. En
prenant des photos de cette manière, j’ai obtenu tous les éléments intégrés de façon
harmonieuse dans un seul cadre.
________________________________________________________________________
« Mo Ti » (en 400 av. J.C.) photo: Marco Polo, publié par Flickr en 2007
________________________________________________________________________
Réponse esthétique I
« Hier une caméra était nécessaire pur créer de l’image en respectant le réel.
Aujourd’hui un ordinateur et un logiciel approprié suffisent pour créer une image
calculée sur le virtuel. » (Media-Défense 17)
1. En changeant la chromatique des photos, j’ai essayé de donner l’impression
d’une atemporalité douteuse.
27
2. Le ruban de soie rouge, je l’ai ancré au centre de l’image pour suggérer l’axe
vertical de l’image. R. Barthes parle de la capacité de l’image « à ancrer » quelque chose
à autre chose. (Manghani 109-115) Mais, cette colonne verticale n’appartient pas à la
structure interne de l’image ; elle est superposée pour parler de la Route de la Soie
comme chemin de la tolérance multiculturelle et de la connaissance d’autrefois ou
comme route du conflit qui détruit l’unité fragile du monde contemporain et le partage en
morceaux intenables.
3. La bougie, je l’ai utilisée comme signe de lumière, d’espoir, mais aussi comme
signe funéraire. La lumière, c’est la condition de la vue, de la photographie, de la
connaissance et de la vie. L’espoir, on l’associe à l’avenir. Le funéraire, on l’associe à
l’histoire du passé.
Réponse esthétique II
1. Au premier degré, toutes les photos que j’ai photographiées pour la série
« Chine » surprennent des instants de vie (qui servent de couverture pour nos gestes
catastrophiques) qui mettent en évidence la beauté éternelle de la vie tels que : prendre
une photo, voyager à vélo, faire des bulles de savon, voyager en ballon sur l’eau, faire
voler un chapeau comme une soucoupe volante, regarder le ciel, se faire photographier.
2. Mais, au deuxième degré, chaque photo parle de l’emprisonnement de la réalité
dans notre pensée, des enjeux sociopolitiques et spirituels (aussi éphémères) du monde
contemporain : l’éveil, l’ubiquité et l’orgueil de la Chine, l’injustice envers le Tibet, la
lassitude de l’opinion publique internationale.
28
3. Au troisième degré, l’ensemble de ces images parle de la photo comme signe
transcendent. Chaque image représente la photographie des relations existant entre les
choses. Il s’agit ici de l’idée d’égalité discursive qui se traduit par l’habilité de l’image
de parler de la souffrance humaine au-delà des barrières culturelles et linguistiques.
Michel Foucault définit l’image comme « une figure de connaissance » (Manghani 179-
183) qui garde le monde ensemble. L’image représente un ordre des choses capable de
transcender le relativisme culturel.
Réponse esthétique III
Sur les modalités de produire et d’utiliser les photos : D’habitude « le privé »
implique l’expérience personnelle, ce qui a été directement expérimenté, tandis que « le
public » c’est la photo de la photo ; cela ne nous appartient pas.
Dans mon projet, le privé et le public se mélangent pour créer un effet de proche
impersonnel. L’image est une simulation de la réalité. « Le public », c’est l’expérience
inconnue ou qui reste Ă  distance de nous, qui ne nous touche pas, qui ne nous concerne
pas. En regardant ces photos, on peut facilement constater qu’il y a une sorte de
proximité ambiguë. Les photos que j’ai photographiées semblent être des photos de
famille mais en même temps elles sont publiques, inconnues. Alors, l’image que j’ai
employée se veut un symbole tangible de l’esprit du monde contemporain en mouvement.
Le monde devient un lieu photographique vu de très près. L’environnement humain
devient un lieu photographique. Le monde est une mise en scène du rapprochement, de la
domesticité suspendue, de l’hybridité, du regard aveugle, de l’amoralité, de la banalité, de
l’inhabilité, de l’amnésie culturelle, de l’immédiateté, de l’instantanéité, de l’altérité, de
29
la vulnérabilité, de la spécificité des sites, de la négociation, de la transgression, de la
transcendance. La réalité a été transférée dans un spectacle nostalgique photographié qui
n’a pas de lieu ou d’espace précises.
Réponse esthétique IV
L’image est autoréférentielle. On n’aperçoit que la photo elle-même. L’image
photographiée cache l’absence de la réalité ; elle devient une icône stéréotypée. Ainsi, on
est situé en dehors de la relation complice de la société civile et de son contrôle
idéologique. On ne s’aperçoit que d’un état de joie et d’attente impersonnelle. Notre
perception visuelle affecte la modalité dont on se comprend soi-même, les autres et le
monde.
________________________________________________________________________
« Enfants du Tibet » ; photo : Mo Ti, publiée par Flickr en 2007
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« Soucoupe volante » ; photo : Mo Ti, publiée par Flickr en 2007
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« Bulles de savon » ; photo : Mo Ti, publiée par Flickr en 2007
31
«Voyage en ballon » ; photo : Mo Ti, publiée par Flickr en 2007
________________________________________________________________________
2. a. 3. Une série d’images représentant le voyage de Marco Polo en Perse (Iran
d’aujourd’hui)
Procédées techniques utilisés:
Note : Toutes les images de cette série proviennent du site Flickr.
Pour la réalisation de cette série, j’ai appliqué deux procédés :
Première étape : consiste en l’utilisation d’une bougie et de son reflet sur l’écran de
l’ordinateur. J’ai interposé la bougie entre l’espace qui sépare l’objectif de la camera et
l’écran de l’ordinateur. J’ai pris les photos sans avoir fait aucune manipulation antérieure
des images photographiées. Cependant, j’ai fait de petites interventions sur les photos
32
créées : j’ai modifié l’intensité chromatique et j’ai fait des coupures des parties des
photos pour que la bougie soit perçue comme faisant partie de la structure racontée par
les images.
Deuxième étape : suit le procédé utilisé pour la création de la série « Chine », mais, à la
place du ruban de soie j’ai utilisé une page d’agrandissement. J’ai disposé la bougie
devant l’écran et la page d’agrandissement devant la bougie. Dans le but de mettre en
évidence l’idée de distorsion, j’ai utilisé une page d’agrandissement que j’ai trouvé sur le
marché de produits chinois Dollarama. Les photos finales sont donc des prises de vues à
travers cet appareil rudimentaire.
________________________________________________________________________
« Al Hazen » (en 1000 ap. J.C.); photo: Marco Polo, publiée par Flickr en 2007
33
« Al Hazen dans sa bibliothèque à Tabriz » (en 1000 ap. J.C.); photo : Marco Polo, publiée par Flickr en 2007
Réponse esthétique I
Il y a plusieurs façons de percevoir le monde de manière anamorphosique :
1. La distorsion involontaire (manque de données suffisantes dû au hasard).
2. La distorsion volontaire. Chez Aristote, l’œil humain se comportait comme un
caméléon. Il changeait la façon de percevoir les choses en fonction de l’environnement
regardé. Dans le temps d’Al Hazen, on s’est beaucoup questionné sur le mystère de la
lumière. La lumière était la source unique de toute connaissance. Il y avait trois axiomes
interconnectés qui servaient de guide dans la recherche empirique : a.) Tout changement
d’intensité changeait l’apparence des choses ; b.) Tout changement d’angle de vue
changeait la capacité à juger de la chose ; c.) Tout phénomène de distorsion de lumière
générait des distorsions de la connaissance.
34
Dans mon histoire fictionnelle, ce type de jugement pseudo scientifique du monde
islamique est devenu désuet. L’environnement dans lequel on vit aujourd’hui repose
beaucoup plus sur des concepts préfabriqués et stéréotypés sur mesure. La distorsion est
intentionnelle. On pose sur le monde le regard qui nous intéresse. Ce qui ne peut pas être
aperçu ou modifié à la mesure de nos intérêts, est rejeté. La lumière, (dite de la
connaissance), on l’utilise seulement pour diviser les choses.
Aussi, on vit « deux mouvements tendanciels contradictoires : d’un côté la
mondialisation du tout informationnel par le biais du tout numérique et l’ultra
concentration qui en découle, et de l’autre les réactions intégristes, les réactions
fondamentalistes, les nationalismes ethniques, les populismes de gauche ou de droite. »
(Media-Défence 306) L’environnement dominé par la simultanéité et par la syncronicité
est devenu un espace raconté, marqué par une attitude de peur, d’attente incertaine.
____________________________________________________________________________________________________________
« Inquiétude et attente » ; 11 septembre 2008 ; photo: Al Hazen, publiée par Flickr en 2007
35
Dans une de ses phrases mémorables, le romancier américain J. G. Ballard nommait cet
environnement un grand roman. “Given that external reality is a fiction, the writer's role
is almost superfluous. He does not need to invent the fiction because it is already there.”
Mais, à partir de cette fiction on doit réinventer la réalité. Mais quelle réalité ?
________________________________________________________________________
« Marco Polo et Al Hazen » ( en 1000 ap. J.C.) ; photo : anonyme, publiée par Flickr en 2007
________________________________________________________________________
“Jorge Louis Borges noted in “The Library of Babel”: “When Marco Polo came to visit
from Kabul, over Noruz holidays, in 1012, he went with Ibn al-Haytham to Yanan Dagh
(Burning Mountain). The side of the hill is perpetually on fire from natural gas reserves
underground. He remembered that Kublai Khan told him that a long time ago this was a
Zoroastrian holy site.
36
« Marco Polo à Yanan Dagh » (montagne sacrée en Iran) ; photo : Marco Polo, publiée par Flickr en 2007
________________________________________________________________________
« Effets de lumière à Isfahan » ; photo: Al Hazen, publiée par Flickr en 2007
37
« Derviches tourneurs à Téhéran » ; 11 septembre 2008 ; photo: Al Hazen, publiée par Flickr en 2007
________________________________________________________________________
« Le livre de Al Hazan sur la science optique » ; photo : Marco Polo, publié par Flickr en 2007
38
Conclusion provisoire La photographie de la route de la soie ou Marco Polo en
voyage de MO TI à Al Hazen constitue un prétexte.
Parler des enjeux visuels contemporains comme la Chine, le Tibet et l’Iran par le
biais de la déconstruction et la reconstruction esthétique de l’information visuelle et
textuelle provenue d’Internet représente le côté subversif du projet.
Inventer des procédés artistiques qui peuvent soutenir un discours éducationnel
critique, c’est l’objectif du projet dans son ensemble.
39
b. 2. L’instantané des attitudes humaines (de Edweard Muybridge à Harold E.
Edgerton)
Dans cette deuxième partie du projet, l’histoire de Marco Polo n’existe plus. Ce
qui continue de se développer, c’est la problématique lancée et la curiosité d’essayer un
nouvel angle de vue et des nouveaux procédés artistiques d’interprétation de l’histoire du
monde contemporain. L’attitude de l’être humain face au mystère de la vie est explorée
par l’acte de photographier de petits univers d’objets installés. Notre regard se déplace
vers l’idée de concubinage, de relations inattendues qui existent entre les choses. Le
voyage de Marco Polo, on l’a regardé de loin pour mieux comprendre des fragments de
notre vie quotidienne. Ici, on se concentre sur la vie artificielle d’un microcosme, sur « le
proche » pour mieux comprendre les relations qui se nouent au « loin ».
Procédés techniques utilisés:
Note : Pour cette étape, j’ai utilisé des images du site Internet Flickr et des images que
j’ai produites il y a quelques années.
J’ai exploré deux procédés :
Dans un premier temps, j’ai choisi des objets et des photos pour pouvoir créer de petites
compositions, de petites installations. Après, j’ai placé par terre les images et les objets
pour obtenir de petits îlots de connaissance, de signification. J’ai créé plusieurs
photographies Ă  partir de ces petits mondes des objets.
Dans un deuxième temps, j’ai imprimé des images considérées iconiques au XXe
siècle
telles que la révolte des étudiants en Chine (Tiananmen, 1989), Kim Puch dans la guerre
de Vietnam (1972), une séquence de relation de vie entre la mère et sa petite fille
40
photographiées par Edweard Muybridge et une fraction de seconde où une balle traverse
une ampoule, photographiée par Harold Edgerton. Après, j’ai placé de petites billes
colorées sur la surface d’un numériseur. Au-dessus de ces petites, billes j’ai placé les
photos que je voulais transformer. De cette manière, j’ai obtenu une série de photos
manipulées à l’aide d’un numériseur.
Réponse esthétique
La relation est une chose qui ne peut pas être photographiée. Pour comprendre
une relation entre les choses, on peut faire des recherches et des analyses de cas, on peut
Ă©crire ou on peut parler de ce sujet mais on ne peut pas obtenir une image en la
photographiant. Pour « arrêter » l’image des relations, j’ai fait des mises en scène ; j’ai
placé les objets de sorte à créer des relations arbitraires entre eux. Pour rendre ma
démarche plus claire, je ferai un court inventaire des choses intégrées à mes
compositions.
Premier procédé. Par exemple : un livre sur la technique photographique de H.
Edgerton (Je l’ai ouvert à la page où on présente l’image en noir et blanc de l’ampoule
traversée par la balle.) ; une couverture de disque vinyle illustrée en couleurs avec une
œuvre religieuse de Stefan Lochner. La couverture fait référence à l’œuvre de Mozart
intitulée « Coronation Mass ») ; une de mes photographies en noir et blanc qui date de
1995 sur la thème « vanité » ( l’image représente un crâne illuminé par une lampe de
bureau et reflété dans un miroir en arrière) ; des pétales de fleurs rouges, des billes de
verre ; un cube de verre qui emprisonne une montre démontée ; la moitié d’une noix ; une
page d’agrandissement ; une photo de la guerre d’Irak en infrarouge, quatre de mes
41
photos qui datent de 2006, placées dans un cadre (deux photos du cimetière Mont Royal
dans lesquelles je suis présent, deux photos de l’Oratoire Saint Joseph : une représente
l’effet de lumière sur une civière blanche ; l’autre, l’effet de lumière colorée, filtrée par
un vitrail, sur le pavement).
Cette description donne l’impression d’un musée de curiosités qui, de par son
design, force les choses à vivre dans un contexte de concubinage impossible. Ce n’est
qu’une apparence des choses. En regardant les images, on peut découvrir assez
facilement des relations logiques. Dans le premier exemple visuel, je parle d’une ampoule
« tuée » par une balle ; dans le voisinage il y a un crâne illuminé par une lampe de bureau
et reflété par un miroir ; à coté il y a l’image de la Vierge, de l’enfant et des anges.
________________________________________________________________________
« Relations I »
42
« Relations II »
________________________________________________________________________
Dans le deuxième exemple, il y a le cimetière dans lequel je suis présent, il y a mon reflet
sur la surface d’une pierre tombale en marbre noir, il y a la civière, la lumière colorée sur
le pavement de l’église et l’image reflétée de la bibliothèque ; il y a la photo en
infrarouge d’une nuit de la guerre d’Irak ; il y a le cube de verre qui contient la montre
démontée.
Deuxième procédé : de petites billes colorées placées dans un sac de plastique ont été
superposées sur l’image à caractère iconique de l’étudiant anonyme qui affronte « la
machine totalitaire » (La Place Tiananmen, Chine, 1989, AP, Jeff Widener) et sur l’image
iconique de la petite fille Kim Phuc, brulée au napalm pendant la guerre du Vietnam (AP,
Nick Ut, 1972).
43
« Ancrage »
________________________________________________________________________
Le résultat que j’ai obtenu, c’est un monde en morceaux de privé et de public mis
ensemble. L’image d’Harold Edgerton parle de l’expérience à la balle qui traverse
l’ampoule et de sa performance photographique en même temps. Mais dans mon projet,
ce fragment d’image parle de la potentialité de la chose, doublée de l’intentionnalité
qu’on lui imprime. Une balle traverse une ampoule et fait s’éteindre une lumière. Une
balle anéantit la vie. Cette image placée à côté de la couverture du disque de musique de
Mozart amplifie le message; on associe l’expérience à la condition humaine. On ouvre un
questionnement en parallèle sur la mort, la vie et la justice. (Mozart, on l’a jeté dans une
fosse commune.) Il s’agit d’un regard subversif posé de près pour suggérer « le loin »
qui nous obsède et qu’on veut oublier. Les choses sont représentées dans leurs relations
44
inattendues mais complices; J’ai intégré mon image dans ces petites installations pour
mettre l’accent sur le fait qu’il ne faut pas oublier l’histoire qu’on vit. Au contraire, il faut
l’assumer pour la comprendre et la valoriser. Les relations arbitraires établies entre les
choses photographiées parlent d’autres choses.
« Quand la tension internationale augmente, lorsque la guerre gronde et que les dépêches
d’agences défilent, alors s’installe une nouvelle situation : une brusque inflation du
besoin de voir, du désir de savoir, un goût du spectacle… » (Thiery Nouel, Le montage
d’un monde en morceau) (Media-Défense 74)
Conclusion provisoire. L’instantané des attitudes humaines (de Edweard
Muybridge à Harold E. Edgerton) constitue un prétexte.
Parler des relations inattendues entre des choses morcelées (pour exprimer les
enjeux visuels contemporains par le biais de la déconstruction et de la reconstruction
esthétique de l’information visuelle et textuelle provenues en principal d’Internet)
représente le coté subversif du projet.
Inventer des procédés artistiques qui peuvent soutenir un discours éducationnel
critique, c’est le but du projet dans son ensemble.
45
3. La photographie des syndromes contemporains
Cette troisième partie est la plus illustrative étape de la métaphore « refléter le
monde ». On retrouve dans cette étape des idées comme fontaine, reflet, miroitement,
fontaine WEB, réseau global, information, public, privé, circulation, manipulation,
séduction, tentation. L’exploration avance vers un imaginaire marqué par les événements
qui sont arrivés après le 11 septembre 2001. À partir de ce moment, on a vécu dans une
société citée et récitée visuellement. La société humaine de l’Occident est retournée sur la
Route de la Soie, mais dans une vision contemporaine. L’explosion de l’emploi de
l’appareil photo numérique dans un contexte numérique globalisé a transformé le monde
dans une histoire de citations racontées à l’infini en ligne. Les tentations de celui qui
manipule l’information visuelle ou textuelle sont beaucoup plus accentuées. Ces
conditions ont eu comme effet une extrême labilité, malléabilité et précarité de
l’information et de ses significations. Le réemploi de l’information implique toujours un
déplacement des significations. Chaque action produit une rétroaction sans que l’on
puisse prévoir l’ensemble des effets qui suivent. « Our modern mediated world is indeed
a two-edged sword. » (Danesi 27)
Procédés techniques utilisés:
Note : J’ai utilisé des images du site Internet Flickr et quelques-unes de mes photos
produites pendant cette période.
À cette phase du projet, j’ai employé un seul procédé artistique. Premièrement,
j’ai collecté des images (qui répondent à la problématique visuelle développée jusqu'ici).
L’inventaire de cette collection est constitué de photos telles que : des moines du Tibet en
46
prière, des images que j’ai prises à Montréal, près de l’aéroport Dorval ou des images
d’Afghanistan (l’armée canadienne en guerre - l’arrivée de Père Noël), etc. Pour
manipuler les photos de ce cycle, j’ai utilisé un miroir. J’ai couvert la partie gauche de
l’écran de l’ordinateur avec ce miroir, après j’ai photographié les images une après
l’autre. En fait, j’ai photographié l’écran de mon ordinateur.
Réponse esthétique I
En utilisant ainsi ce procédé, j’ai obtenu un effet de reflet des images. À ce point
j’ai essayé d’imaginer le WEB comme une fontaine infinie (semblable à l’image de la
fontaine de mon enfance), mais qui n’est capable à refléter le monde contemporain dans
son image globale. J’ai obtenu des fragments visuels des mondes publics, juxtaposés à
une seule image d’espace intime, répétée chaque fois. En ayant comme but l’idée
d’exprimer l’invasion, j’ai déplacé les formes et leurs significations. Dans ces photos
l’espace public occupe de façon agressive l’espace privé. Par exemple, nous ne pouvons
pas parler de guerre en dehors de notre maison. Ce syndrome du monde contemporain se
glisse à l’improvise par le biais du réseau WEB. Tout est déterritorialisé et transformé en
virtuel. Mais, il s’agit d’une invasion que je nomme « extatique ». C’est une invasion
volontaire et contrôlée en partie par nous-mêmes. C’est une invasion basée sur notre
capacité d’être séduits. « Car nous vivons de la séduction mais nous mourons dans la
fascination. » (Baudrillard 215) La juxtaposition « Privé-Public » a comme résultante une
ligne verticale qui, dans ce cas, parle de la séparation. On ne peut plus réconcilier les
choses dans leur essence profonde. C’est la maladie du monde contemporain « conçue
métaphoriquement ». (Susan Sontag 153-180).
47
« Séparation I »
________________________________________________________________________
Marcel Danesi soutient que dans l’ordre des significations il reste toujours des
choses manquantes à cause desquelles on ne peut pas avoir l’image globale de la réalité.
« Lewis Carroll invented his own language (“jabberwocly”) to show that the English
language, as constituted, does not tell all there is to tell about reality. » (32)
Par extrapolation, j’ai élaboré des pseudo-définitions de syndromes contemporains pour
illustrer les maladies métaphoriques et pour signaler le flux fragmenté la pensée du
monde actuel.
________________________________________________________________________
“Amygdalohippocampectomy is a form of human hysteria, called also Amafufunyane in
Ngumi languages. During this period a person is invaded by Santa Claus Syndrome that
in social occidental psychology is called Altruism.” (Oxford Dictionary of Psychology)
48
“Amygdalohippocampectomy”
________________________________________________________________________
“Hysteria”
49
Conclusion provisoire. La photographie des syndromes contemporains ne constitue
pas un prétexte.
Parler de syndromes contemporains pour exprimer les enjeux visuels
contemporains (par le biais de la déconstruction et de la reconstruction esthétique de
l’information visuelle et textuelle provenues en principal d’Internet) représente le côté
subversif du projet.
Inventer des procédés artistiques qui peuvent soutenir un discours éducationnel
critique, c’est le but du projet dans son ensemble.
50
4. La photographie de la surveillance complice
Jean Baudrillard soutient de façon apocalyptique que le système de présentation
de l’information, basé sur la séduction, l’imitation et la simulation de la réalité, finit par
neutraliser tout finalité.
“Happiness”
________________________________________________________________________
De même manière apocalyptique, il affirme que toute production de la
connaissance est contrôlée. Dans ces circonstances, la vérité ne survivrait qu’au niveau
des apparences. Ce qui reste de toute intentionnalité, c’est l’apparence des choses.
51
« The more one nears truth, the more it retreats towards the omega point. » (Baudrillard
73) La vérité prend la forme un objet non-identifiable à mille aspects.
“Omega point”
________________________________________________________________________
Procédés techniques utilisés:
Note : À cette étape, j’ai utilisé des images des sites Internet Yahoo. Com, Flickr et
quelques-unes de mes des photos produites pendant cette période.
Ici, un seul procédé artistique a été employé.
Dans un premier temps, j’ai collecté des images (qui représentent des constantes
visuelles de tout ce que j’ai développé jusqu’à présent). L’inventaire de cette collection
est représenté par des photos telles que : une image de la guerre d’Iraq, une image du
52
cimetière Mont Royal, Montréal, une image manipulé du Tibet, qui imite les photos
d’Edweard Muybridge et Harold Edgerton, une image représentant une inauguration d’un
navire militaire aux États-Unis, une image de la guerre d’Iraq en contre jour, des images
d’objets volants non identifiés, etc.
Dans un deuxième temps, j’ai fait de petites retouches chromatiques sur les photos pour
obtenir des surfaces blanches. Finalement, sur une partie blanche de chaque photo, j’ai
introduit un objet volant non identifié. Pour réaliser cette partie du projet, j’ai utilisé le
logiciel Word Windows.
________________________________________________________________________
« Faire taire, faire croire et faire oublier »
53
Réponse esthétique I
Depuis toujours, la connaissance de la vérité a été basée sur l’apparence des
choses. Jean Baudrillard a raison d’affirmer que le système des procédés qui servent à la
construction de la vérité est totalement contrôlé. On contrôle notre modalité de penser à
tous les niveaux possibles, mais d’une façon confuse, distorsionée. Le contrôle le plus
fort est celui exercé par notre langue. Tous les conditionnements de notre vie sont semés
dans notre langue. Mircea Eliade affirmait que nous vivons dans notre langue. C’est dans
la langue que nous installons nos barrières de pensée – nos stéréotypes, nos désirs
impossibles, nos préjugés. Alors, on veut tout savoir, on surveille tout jusqu’au
paroxysme et on donne une impression de transparence totale aux choses. Jaques Attali
nommait ceci « faire taire, faire croire et faire oublier ». La marque la plus importante de
notre système de surveillance est l’ubiquité, dans le sens qu’il est présent partout et nulle
part.
Jean Guinel dans son article « Internet et les services secrets », en faisant
référence à ce phénomène obsessif et omniprésent, remarque : « On dit avec beaucoup
d’insistance que le grand service technique de renseignements américain, la National
Security Agency, dispose de moyens permettant de surveiller presque tout ce se qui se
passe sur Internet. Même s’il y a une part d’exagération, telle est la réalité. » (Media –
DĂ©fense 181)
À cette étape du projet, j’ai mélangé une vision tragique avec une vision
humoristique et ironique, mais j’ai gardé en même temps la tendance d’installer une
marque de séduction et d’ambiguïté. J’ai mis aussi l’accent sur l’idée de l’apparence des
choses. C’est la raison pour laquelle l’imaginaire de cette phase de travail est interprété
54
de loin, de proche, du côté privé ou du côté public. Dans ma vision, ce sont les contrastes
en connexion (que nous sommes capables de voir) qui nous aident Ă  comprendre le
monde. Dans le but d’attirer l’attention du « narrateur qui regarde » par le biais de
situations bizarres, j’ai introduit dans l’imaginaire banal de tous les jours des objets non
identifiables qui, sur la toile WEB ont une vie bien réelle.
________________________________________________________________________
« L’Apocalypse du banal »
55
« Narrateur qui regarde »
________________________________________________________________________
Conclusion provisoire. La photographie de la surveillance complice ne constitue pas
un prétexte.
Parler de la surveillance comme forme de penser (pour exprimer les enjeux
visuels contemporains par le biais de la déconstruction et de la reconstruction esthétique
de l’information visuelle et textuelle provenues en principal d’Internet), représente le côté
subversif du projet.
Inventer des procédés artistiques qui peuvent soutenir un discours éducationnel
critique, c’est le but du projet dans son ensemble.
56
5. La photographie d’un monde qui s’endort involontairement
En essayant de nous sauver de l’Oubli, nous avons divisé la vérité du monde en
images et textes et nous l’avons mise en ligne dans un réseau global. Mais, contrairement
à l’inquiétude de Nietzsche et à celle de Baudelaire, nous avons mis peu d’âme pour ne
pas mourir de trop de vérité. En échange, c’est la fatigue compassionnelle qui nous
maintiendra emprisonnés dans l’Oubli.
________________________________________________________________________________________________
« Fatigue compassionnelle I»
57
Procédés techniques utilisés:
Note : À cette dernière étape, j’ai utilisé des images des sites Internet Yahoo. Com, Flickr
et quelques-unes de mes des photos produites pendant cette période.
J’ai appliqué un seul procédé artistique.
Premièrement, j’ai collecté des images qui représentaient des personnes endormies et
anonymes. Je n’ai fait aucune intervention sur ces photos.
Après, j’ai placé un miroir à l’horizontale devant l’écran de mon ordinateur. Au milieu
du miroir, j’ai placé une petite chandelle et j’ai pris une photo de chaque image reflétée
dans le miroir.
________________________________________________________________________
« Fatigue compassionnelle II »
58
« Fatigue compassionnelle III »
________________________________________________________________________
Réponse esthétique : Les images obtenues donnent l’impression que les images
photographiées se reflètent et qu’elles sont intégrées dans le monde du miroir. La
chandelle illumine un état d’inconscience douloureux. Elle est le témoin d’un signal
d’alarme semblable au message de Goya sur le sommeil de la raison. J’ai voulu donner
cet effet de reflet pour suggérer un état de sommeil maladif. Dominé par une fatigue
compassionnelle (indifférence aux besoins des autres), tout le monde est tombé dans un
sommeil lourd, abyssal, sans rêves et conscience. Personne n’est à la maison. Chacun
s’est endormi à son lieu de travail.
59
« Fatigue compassionnelle IV »
________________________________________________________________________
Trop de vérité sans âme nous fait tomber dans le sommeil de l’indifférence et de
l’irresponsabilité envers notre sens sur la Terre.
60
Conclusion
METAPHOTOHISTOIRE - LES ALLÉGORIES DU REGARD comme stratégie
d’exploration artistique et d’analyse visuelle et éducationnelle ne constitue pas un
prétexte.
1. Parler de la Route de la Soie comme symbole d’un monde contemporain qui devient
fictionnel, des relations inattendues qui existent entre les choses, des maladies
métaphoriques, de surveillance linguistique et de fatigue compassionnelle pour exprimer
les enjeux visuels contemporains (par le biais de la déconstruction et de la reconstruction
esthétique de l’information visuelle et textuelle provenue en principal d’Internet)
représente le côté subversif du projet.
En fait, ce projet est une plaidoirie pour réapprendre à voir, ce qui signifie à
réinventer l’outil de la réflexion pour pouvoir échapper à l’emprisonnement de la fiction
créée chaque jour.
Réapprendre à voir signifie ne pas accepter de regarder le monde seulement d’un
côté parce que l’autre côté risque de rester toujours obscur.
Mais comment apprendre à identifier l’autre coté d’un réseau omniprésent qu’on
appelle WEB ?
On devrait peut-être commencer par apprendre à accepter qu’on peut se tromper
dans notre processus de construction et d’interprétation de la connaissance. Le simple fait
de regarder une image ne signifie ni voir, ni comprendre, ni croire.
61
2. Inventer des procédés artistiques qui peuvent soutenir un discours éducationnel
critique, c’était le but du projet dans son ensemble.
Produire une image signifie, dès le début, une manipulation qui implique plusieurs
étapes. Il s’agit de la manipulation de la lumière - la source de la vie et de la
connaissance. Parler de la manipulation de la photographie doit commencer par
l’affirmation de cette vérité. La photographie ne représente pas la vérité absolue.
Aujourd’hui, la version altérée de l’image est devenue la nouvelle réalité.
Photographier ne signifie ni voir, ni comprendre, ni croire. Premièrement il faut
décortiquer le mécanisme de l’erreur pour mieux le comprendre.
Donc, accepter qu’on peut se tromper pourrait représenter un point de départ dans
l’élaboration d’une stratégie d’éducation artistique pour le niveau post-secondaire.
Les principes de base qui régissent cette stratégie sont simples :
a. Mettre l’accent sur une éducation visuelle critique à long terme, basée sur des
valeurs universelles comme le respect de l’autre, le respect de soi-même et le
respect dans les interactions avec les autres.
b. Mettre l’accent sur le développement des habilités perceptuelles pour pouvoir
faire la distinction entre ce qui est authentique et ce qui est faux.
c. Penser les choses dans le sens de l’écologie du réel et du visuel en même temps;
cette attitude peut contribuer au développement d’un esprit averti concernant
l’impact du visuel sur tout ce que l’homme pense et entreprend.
62
3. Remettre en question la validité de ce type de processus de création et de
recherche constitue un point de départ et une ouverture pour d’autres prochaines
recherches.
Ma recherche ne représente qu’une tentative d’exploration visuelle critique très
modeste et imparfaite de ce qu’on a nommé « mécanisme virtuel de construction de la
connaissance ». J’ai pensé à travers des images enracinées dans ma mémoire. J’ai pensé à
travers des images enracinées dans notre mémoire. J’ai pensé à travers des images
photographiées. J’ai pensé à travers des images virtuelles. J’ai pensé à travers des images
virtuelles que j’ai photographiées, manipulées et interprétées en plusieurs étapes pour
prouver la facilité de ce processus. On a créé l’outil du désir, ce qui veut dire qu’on a
créé la photographie pour être ensuite créés par la photographie. On a commencé par
regarder avec fascination le monde et on a fini par ĂŞtre presque aveugles. Alors, mon
projet de recherche n’est qu’une mise en garde pour qu’on ne devienne pas totalement
aveugles. J’ai dit des mensonges pour tenter d’illustrer la vérité et j’ai dit des vérités pour
exprimer des mensonges. J’ai voyagé par intuition parmi les effets du Passé et les causes
de l’Avenir.
63
Bibliographie
Baldock, John, The Essence of Sufism, Toronto, Capella, 2004.
Baudrillard, Jean, De la séduction, Paris, Éditions Galilée, 1979.
Baudrillard, Jean, The ecstasy of Communication, N.Y. Semiotext (e), 1988.
Berger, Arthur Asa, Media & Society-A Critical Perspective, Rowman & Littlefield
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Borela, Jean, Le Mystère Du Signe, Paris, Éditions Maisonneuve & Larose, 1989.
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29 avril 2008.
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http://atilf.atilf.fr/academie9.htm, consulté le 28 mai 2008
64
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65
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100.
66
Vivian, John, The Media of Mass Communication, Boston, Allyn & Bacon, 1995.
67
Annexe
Dictionnaire explicatif de termes clefs
Je comprends l’utilité de ce petit dictionnaire dans le sens qu’il sert de guide
conceptuel et de lecture de ce travail. Ainsi, chaque concept employé constitue un indice
de l’aspect interne de ma recherche, c’est-à-dire de la problématique abordée et des
procédés de travail utilisés.
absence. Cette notion est définie par opposition au terme « présence ». L’absence dénote
parfois une existence « in absentia », ce qui renvoie à l’idée d’existence virtuelle. Par
exemple, le terme « la mort » implique l’absence de la vie. Le concept « la vie » va être
présent « in absentia » quand on fait référence à la mort.
achronie. Ce terme met l’accent sur la nature temporale des structures logico-
sémantiques. Une histoire est achronique et non-achronique en même temps. Son niveau
le plus profond implique un ordre/ désordre social. Ses relations intérieures et sa
dynamique ne constituent pas de sujets sous le pouvoir du temps.
allusion. L’Évocation d’une chose sans l’exprimer directement par des mots ou par des
images.
anachronisme. Le fait de placer un événement (ou une scène, une personne, un objet)
dans une autre période historique que celle où l’événement a réellement eu lieu
Autrement dit, l’anachronisme consiste à faire intentionnellement des erreurs sur
certaines dates. Le terme désigne aussi toute manipulation et restructuration du temps ; il
s’agit de différences en ce qui concerne l’ordre chronologique des événements et l’ordre
dont on les raconte.
68
anamnésis historiographique. Signifie l’effort de révéler la mémoire des événements
en dehors du mouvement historique.
anticipation. Dans le déroulement narratif on insère une scène qui va avoir lieu plus tard.
chaîne connotative. Enchaînement de significations.
débrayage. Dans le métalangage sémiotique, ce terme signifie le fait de glisser de
l’histoire énoncée au début du discours à une autre histoire dont le temps, l’espace et le
sens sont différents.
diaphore visuelle. Répétition d’une image déjà utilisée, dans le but de lui donner une
nouvelle nuance de signification.
double lecture. Possibilité de faire plusieurs lectures simultanément.
Ă©quivoque. Par une modification, graphique ou autre, on introduit, dans une phrase qui
avait déjà un sens complet, un deuxième sens, distinct et complet lui aussi.
exténuation. Substituer à la véritable idée de la chose dont on parle, une idée du même
genre, mais moins forte.
hyperbole. Augmenter ou diminuer excessivement la vérité des choses.
hypertextualité. Système de connexion d’images et de textes sur Internet.
incohérence. Métaphore qui réunit deux images incompatibles.
inventaire. J’envisage l’inventaire comme l’action de saisir les actes irréparables de
l’homme.
ironie. Il s’agit d’un procédé rhétorique par lequel on essaie d’altérer un message afin de
le remettre en question. L’utilisation d’un mot ou d’une image pour créer un sens
différent ou contraire au sens acceptée littéralement.
isomorphisme. Identité formelle entre deux ou plusieurs messages.
69
jeu de mots. On joue sur le signifiant ou sur le signifié.
l’Effet Othello. Dans la sémiotique des medias, l’effet d’Othello est défini comme
l’action de mentir pour renforcer la vérité.
message ouvert. Message qui permet plus d’une interprétation.
métabole visuelle. Accumulation de plusieurs images pour exprimer la même idée.
métonymie. Procédé qui consiste à désigner une chose par une autre qui a un rapport
logique facilement identifiable avec la première.
mystification. Tromper afin d’offrir une image séduisante de la réalité.
pensée sophistique. Raisonnement faux qui présente une apparente vérité.
pseudo-diachronie. Présentation en ordre historique aléatoire mais qui semble être
l’ordre réel.
pseudo-simulation. Simulation Ă©vidente, qui ne se cache pas.
rhétorique. Méthode d’expression de la pensée par l’utilisation de l’allégorie, de la
métaphore, de l’inversion, de l’hyperbole et d’autres procédés. Noam Chomsky, dans
« Le langage et la pensée » affirme que « Le langage humain peut être utilisé pour
informer ou pour tromper, pour clarifier ou pour jouer. »
séduction. Action qui vise à attirer l’attention d’une façon irrésistible.
sériation. Classement par séries.
signification. Un message peut avoir plus d’un sens ou plusieurs messages peuvent avoir
la mĂŞme signification.
simulacre. Image de quelque chose qui n’existe pas. La théorie sémiotique considère
que la production des simulacres est la modalité par laquelle l’homme essaie de donner
un sens au monde.
70
stéréotype. Simplification extrême, inadéquate d’un message textuel ou visuel. Roland
Barthes, dans Le plaisir du texte définit le stéréotype comme une « impossibilité
nauséeuse (…) ; c’est l’interminable et l’intenable, c’est un principe d’instabilité absolue,
qui ne respecte rien. »
sténographie. Capacité à communiquer de manière à masquer l’existence même de la
communication.
syllepse de sens. Procédé par lequel un message est employé à la fois au sens propre et
au sens figuré.
synesthésie. Évocation d’un sens par un autre.
synecdoque. Utilisation d’une partie pour une chose entière.
synchronicité. Déroulement de plusieurs événements en même temps.
truisme. On explicite des contenus sous-entendus qui étaient déjà parfaitement évidents.

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DanutZbarcea- MasterThesis 2008

  • 1. 1 METAPHOTOHISTOIRE – LES ALLEGORIES DU REGARD StratĂ©gie d’exploration artistique et d’analyse visuelle et Ă©ducationnelle Danut Zbarcea MĂ©moire prĂ©sentĂ©e au DĂ©partement d’Enseignement de l’art comme exigence partielle au grade de maĂ®trise ès Arts (Enseignement de l’art) UniversitĂ© Concordia MontrĂ©al, QuĂ©bec, Canada mai 2008 © Danut Zbarcea, 2008
  • 2. 2 ABRÉGÉ METAPHOTOHISTOIRE – LES ALLEGORIES DU REGARD StratĂ©gie d’exploration artistique et d’analyse visuelle et Ă©ducationnelle Danut Zbarcea RĂ©alisĂ©e Ă  partir de cinq sĂ©ries de photographies et de textes interrogatifs (reprĂ©sentant le contexte socio-politico-culturel du monde contemporain publiĂ© sur Internet), la prĂ©sente recherche qualitative est, en fait, une exploration subjective d’une Ă©tape de mon propre processus artistique. Dans le cadre de ce projet, chaque sĂ©rie a Ă©tĂ© architecturĂ©e et amplifiĂ©e de façon rĂ©pĂ©titive Ă  partir d’un prĂ©texte reprĂ©sentĂ© par un moment considĂ©rĂ© très important dans l’histoire de la photographie et de la culture humaine en gĂ©nĂ©ral. Il s’agit de Mo Ti, Al Hazen, Edweard Muybridge, Harold E. Edgerton et de la photographie numĂ©rique. Ce qui fait tourner la roue critique et qui unifie le tout est le voyage imaginaire de Marco Polo (dans un temps alĂ©atoire) sur la Route de la Soie du monde contemporain. Cette problĂ©matique (annoncĂ©e dans les deux premières sĂ©ries unifiĂ©es) a Ă©tĂ© rĂ©interprĂ©tĂ©e, rĂ©interrogĂ©e dans les autres sĂ©ries, mais d’une perspective diffĂ©rente. L’objectif principal de cette recherche est d’explorer divers types de procĂ©dĂ©s de production artistique qui permettent la mise sur pieds d’une stratĂ©gie Ă©ducationnelle destinĂ©e au niveau d’études post-secondaires. Cette stratĂ©gie vise le dĂ©veloppement d’un esprit interrogatif et critique, capable de gĂ©nĂ©rer un comportement averti concernant l’exploitation de la connaissance construite dans le cyberespace.
  • 3. 3 Introduction En 1980, j’étais Ă©tudiant au lycĂ©e dans une petite ville de montagne en Roumanie. Ă€ ce moment-lĂ , la première chose que je faisais le matin Ă©tait de courir jusqu’au au fond de notre jardin pour passer les premiers moments de la journĂ©e dans une sorte de communion secrète avec la Terre, le petit Ruisseau qui passait par lĂ  et le Soleil levant. Je voulais vivre la rencontre de l’eau avec la lumière du matin. Je voulais entendre le bruit et le silence de cet endroit-lĂ . Je m’identifiais avec cet imaginaire avec lequel je commençais une journĂ©e. Dans ce temps-lĂ , je semblais ĂŞtre d’accord avec Goethe qui disait que «L’âme de l’homme/ Est semblable Ă  l’eau;/ C’est du ciel qu’elle vient,/ C’est au ciel qu’elle monte,/ Et il lui faut redescendre sur terre/ En changement Ă©ternel.» (Jung 23) Aujourd’hui, mes matins sont marquĂ©s d’une nouvelle habitude : faire courir mon regard sur un petit espace qui s’appelle l’écran de l’ordinateur. Internet a pris la place du petit ruisseau et le WEB s’est substituĂ© Ă  mon ancien jardin paradisiaque. “Internet is the rivers that carry us with it.“ (Berger 90). Ă€ prĂ©sent, toutes mes journĂ©es se dĂ©roulent (consciemment ou non) sous le pouvoir du rythme de ce nouvel imaginaire virtuel. “A couple of years ago I couldn’t imagine what I would do with a computer; now I can’t imagine what I would do without one.” (Wheeler 28) Mon monde n’est qu’une accumulation de fragments conceptuels et visuels numĂ©riques, stĂ©rĂ©otypĂ©s et enchaĂ®nĂ©s un après l’autre. Je ne pense mĂŞme pas qu’il pourrait y avoir des connexions, des juxtapositions, des contrastes ou de possibles contradictions. Je ne fais non plus l’effort de penser Ă  la structure cachĂ©e de cette architecture numĂ©rique et je fais confiance totale Ă 
  • 4. 4 son architecte. Ses vĂ©ritĂ©s sont mes vĂ©ritĂ©s. Je laisse ma pensĂ©e s’endormir et je rĂ©alise que c’est plus confortable de s’assumer une vĂ©ritĂ© dĂ©jĂ  fabriquĂ©e. L’évaluation de l’information, je ne la fais qu’en fonction de ce qui a Ă©tĂ© dĂ©jĂ  inoculĂ©. Mais, il m’arrive parfois de constater que dans l’image globale de notre monde numĂ©rique fragmentĂ©, stĂ©rĂ©otypĂ©, certains individus ou communautĂ©s ethniques sont dĂ©finitivement cataloguĂ©s (ou bien regardĂ©s seulement) comme des terroristes, des criminels, des hĂ©ros de sport, des stars de cinĂ©ma, des peuples bĂ©nis ou au contraire des peuples diaboliques. Je rĂ©alise alors que, malgrĂ© tout le progrès de la connaissance, on ne veut pas se rendre compte que le monde est plein de nuances, que des peuples avec leur hĂ©ritage et leurs particularitĂ©s culturelles ont le mĂŞme espoir et la mĂŞme peur que nous face aux mystères de la vie. Ă€ ce point, je me sens en parfait accord avec Abdallah al- Ansari (d.1088/9) qui pensait que : “Man are like addicts of drink, Unaware of their own state.“ (Baldoc 125) Je rĂ©alise que pour devenir plus averti, il faut d’abord comprendre l’état de confusion oĂą l’on vit.
  • 5. 5 Chapitre I Pourquoi cette recherche sur le pouvoir du numĂ©rique ? ď‚· Parce que la transformation rapide de la photographie et de la technologie informatique nous a fait transgresser d’un Ă©tat de vie connectĂ© au monde naturel Ă  un Ă©tat de vie incertain et qui a tendance Ă  se confondre avec un monde virtuel (qui vient se superposer sur le monde rĂ©el). “The powers of photography have in effect de-Platonized our understanding of reality, making it less and less plausible to reflect upon our experience according to the distinction between images and things, between copies and originals.” (Sontag 179) ď‚· Parce qu’on parle de plus en plus d’un « non-lieu Ă©lectronique/ numĂ©rique » qui va s’ouvrir prochainement, sur un seul Ă©cran numĂ©rique, comme source indispensable pour le rythme Ă©vĂ©nementiel de notre vie et, en mĂŞme temps, comme route d’échange du dialogue ou du non-dialogue du monde contemporain. Le WEB est devenu l’équivalent de la « Route de la Soie » (qui ne reprĂ©sente maintenant qu’un « slogan politique trompeur. » (Boulnois 331) La connaissance et la communication flottent et ont tendance Ă  se confondre de façon incomprĂ©hensible et incontrĂ´lable avec cette route de la soie virtuelle contemporaine qu’on appelle techniquement WEB. Les horizons de la connaissance et de la communication sont en dissolution et deviennent de plus en plus flous. “Nietzsche, nearly a century ago, already named our period the Age of Comparisons. There were formerly horizons within which people lived and thought and mythologized. There are now no more horizons. And with the
  • 6. 6 dissolution of horizons we have experienced and we are experiencing collisions, not only of peoples but also of their mythologies.“ (Campbell 254) ď‚· Parce que le droit Ă  l’identitĂ© et le droit d’auteur disparaissent Ă  l’instant mĂŞme oĂą on se met sur la route Ă©lectronique. En mĂŞme temps, on s’aperçoit qu’on a la possibilitĂ© de transformer, de crĂ©er, de manipuler l’information du WEB jusqu'Ă  sa disparition totale. “The Web has turned our culture inside out. One’s own web page is not one’s own web page.” (Gate Keepers 212-213) ď‚· Parce qu’on s’aperçoit que l’histoire peut ĂŞtre raisonnĂ©e, rĂ©flĂ©chie, modifiĂ©e, fabriquĂ©e et tournĂ©e Ă  l’infini vers un futur qu’on s’imagine Ă  produire. Notre capacitĂ© de nous dĂ©sinformer nous-mĂŞmes, notre impossibilitĂ© existentielle d’affirmer la vĂ©ritĂ© nous invitent Ă  transformer l’histoire en pure fiction. ď‚· Parce que la dĂ©mocratisation de la manipulation de l’information ne libère pas l’esprit humain de ses angoisses et de ses prĂ©jugĂ©s culturels. Les cent ans de l’ère informationnelle n’ont pas apportĂ© de grands changements dans l’attitude de l’être humain. Laszlo Moholy-Nagy affirmait en 1925, plein de gravitĂ©: “Men still kill one another, they have not yet understood how they live, why they live; politicians fail to observe that the earth is an entity…” (Sontag 196) ď‚· Parce que l’évaluation de l’information est faite, pour la plupart, Ă  partir de et Ă  travers cette vaste autoroute virtuelle. ď‚· Parce qu’aujourd’hui on est conditionnĂ© Ă©lectroniquement par un nouveau type de beautĂ© : la virtualitĂ© autorĂ©fĂ©rentielle. “It’s hard to tell where you leave off and the camera begins.” (Sontag 186)
  • 7. 7 Chapitre II Cadre thĂ©orique 1. Le souvenir d’enfance comme base thĂ©orique de recherche Avant d’exemplifier le cadre thĂ©orique de ce projet, je me vois presque obligĂ© de faire appel Ă  ma mĂ©moire affective qui s’avère parfois dĂ©terminante pour mes dĂ©cisions de travail. Je crois qu’on arrive dans la vie Ă  un moment oĂą l’on se crĂ©e sa propre archive hiĂ©rarchique de connaissances. Ă€ ce moment-lĂ , l’on prend conscience du fait que le rĂ©servoir de savoir le plus fort et le plus riche en significations, c’est notre propre mĂ©moire des choses vĂ©cues. Toutes les connaissances apprises Ă  l’école ne font que nous aider Ă  crĂ©er cette archive hiĂ©rarchique, qui suit une ligne du temps apparemment alĂ©atoire mais qui est fortement liĂ©e aux valeurs de la vie. Pour illustrer mes affirmations, je raconterai une petite histoire : J’avais environ 12 ans et je vivais avec ma famille dans une rĂ©gion de montagne. Chez nous, il y avait deux sources d’eau potable : l’installation d’eau fournie par la ville et la fontaine qu’on avait dans la cour de la maison. De temps en temps, pour des raisons de rationalisation, l’eau fournie par la ville Ă©tait coupĂ©e. Alors, nous faisions appel Ă  notre propre source. Mais, Ă  cause de la forte exploitation de la pierre de la rivière qui passait près de chez nous, le niveau de l’eau dans la fontaine Ă©tait en dĂ©croissance. Et la consĂ©quence fut qu’un jour nous nous sommes retrouvĂ©s sans eau. Alors, mon père m’a demandĂ© d’aller chercher de l’eau dans le voisinage. La fontaine de notre voisin Ă©tait plus profonde que la nĂ´tre. J’aimais les fontaines. J’avais l’habitude de regarder le ciel se reflĂ©ter dans leur fond. Mon père pensait que j’étais capable de me dĂ©brouiller. La fontaine avait un mĂ©canisme Ă  manivelle qu’on devait actionner manuellement pour faire
  • 8. 8 ressortir le seau. ArrivĂ© lĂ -bas, j’ai voulu faire deux choses en mĂŞme temps : regarder le ciel dans la fontaine et faire sortir de l’eau. Mais, comme le seau Ă©tait lourd et moi, je n’étais ni grand ni fort, j’ai perdu le contrĂ´le et la manivelle de fer, m’a frappĂ© en plein vissage avec toute sa force de rotation. J’ai Ă©tĂ© arrachĂ© Ă  mon Ă©merveillement et je me souviens de ce que c’était la première fois que je voyais les trente-six chandelles. J’ai compris alors que chaque chose a au moins deux aspects, deux façons de se dĂ©rouler. Aujourd’hui, je parle de l’idĂ©e de potentialitĂ© incommensurable et incomprĂ©hensible de la chose. Mais, ce n’est pas cette potentialitĂ© qui nous met en danger. Ce sont nos intentions, nos actions et les finalitĂ©s que nous visons. 2. Plaidoirie pour une littĂ©rature nostalgique et obsessionnelle comme contexte Ă©largi de recherche L’idĂ©e de ce projet de recherche est nĂ©e d’un questionnement très personnel sur le sens de la vie et de l’éducation. Tout ce questionnement est basĂ© sur des lectures que je considère fondamentales et qui m’ont donnĂ© le goĂ»t d’interroger et de remettre en question mon savoir. Quand je pense au spectacle humain, je n’entends que des mots de mes lectures auxquelles j’ai l’impression que je retourne toujours en quĂŞte de moi-mĂŞme face Ă  moi-mĂŞme. Alors, en concevant un projet de recherche interrogative sur la modalitĂ© dont j’envisage la connaissance humaine, je me sens dès le dĂ©but sous le pouvoir de l’esprit vif et critique de Platon et de son Mythe de la caverne, de Mille et une nuits et de son auteur anonyme, de Djeha-Hodja Nasreddin et de ses histoires de sagesse, de Boccaccio et de son DĂ©cameron, d’Erasme de Rotterdam avec son Éloge de la folie, de Jonathan Swift avec ses Voyages de Gulliver, d’Albert Camus et de son Mythe de
  • 9. 9 Sisyphe, d’Eugène Ionesco avec ses RhinocĂ©ros, d’Italo Calvino et de ses Villes invisibles, de William Golding et de son Roi des mouches, d’Antoine de Saint-ExupĂ©ry avec son Le Petit Prince. C’est l’esprit innocent, interrogatif et critique de ces lectures qui m’obsèdent que j’ai voulu imprimer Ă  ce travail de recherche et d’analyse du visuel. 3. La littĂ©rature de spĂ©cialitĂ© comme contexte restreint de recherche 3. a. MetaPhotoHistoire – Pourquoi ce mot agglutinĂ© ? Parce que je crois qu’au commencement l’Histoire n’est qu’un jeu de « mots – dĂ©sirs » avec lesquels on construit des voyages fictionnels. Avant qu’on ne parte en voyage, le dĂ©sir qu’on projette dans le futur devient dĂ©jĂ  une mĂ©moire du passĂ©. “Desires are already memories.” (Calvino 8) Une de mes premières obsessions qui a alimentĂ© dès le dĂ©but mon projet a Ă©tĂ© l’idĂ©e de voyage au long d’une histoire rĂ©inventĂ©e, rĂ©interprĂ©tĂ©e, prĂ©sentĂ©e par Italo Calvino dans son Ĺ“uvre Les Villes Invisibles. Ă€ partir de cette Ĺ“uvre, j’ai commencĂ© un jeu de mots et d’idĂ©es concernant l’histoire et de notre capacitĂ© de la reprĂ©senter. Le voyage Ă  travers l’histoire est fait d’images des choses qui reprĂ©sentent d’autres choses. “The eye does not see things but images of things that mean other things…” (13) Notre mĂ©moire imaginative n’est qu’un miroir narcissique qui rĂ©pète et transforme les choses vĂ©cues : “Memory is redundant; it repeats signs …” (19) La peur de l’Oubli (et de la perte de nous-mĂŞmes) nous pousse Ă  rĂ©inventer notre histoire. Mais le souvenir n’est composĂ© que des souvenirs. On rĂ©invente et on rĂ©Ă©value notre histoire en la comparant Ă  nos dĂ©sirs devenus des mĂ©moires : “At times the mirror increases a thing’s value, at times denies it. Not everything’s that seems valuable above
  • 10. 10 the mirror maintains its force when mirrored.” (54) Alors, la reprĂ©sentation, ce n’est que reflĂ©ter le monde de façon fictionnelle. ReflĂ©ter le monde, ce n’est que regarder notre propre image multipliĂ©e (en rĂ©pertoires infinis) dans une fontaine numĂ©rique qu’on nomme WEB. C’est donc en jouant avec les mots et leurs significations que je suis arrivĂ© Ă  l’idĂ©e d’agglutiner des mots et des significations visuelles. 3. b. Terminologie Cette section se veut une exploration ouverte de la terminologie que j’ai employĂ©e dans le but de dĂ©finir la structure du projet artistique. Chaque terme est prĂ©sentĂ© en double sens : le sens standard prĂ©sentĂ© par le dictionnaire de la langue française et le sens que j’ai construit spĂ©cifiquement pour ce projet artistique. L’analyse de chaque terme vise aussi Ă  donner une image indirecte et partielle des procĂ©dĂ©s artistiques utilisĂ©s comme base de rĂ©flexion Ă©ducative (voir aussi l’Annexe). histoire. (n. f. [de histoire 1 ; 1402]. 1. RĂ©cit d’actions rĂ©els ou imaginaires;) L’Histoire reprĂ©sente Ă  la fois l’étude des faits, des Ă©vĂ©nements du passĂ© et, en mĂŞme temps, l’ensemble de ces faits, de ces Ă©vĂ©nements. On considère que ce nom a pour origine les EnquĂŞtes d’HĂ©rodote. Mais c’est Thucydide qui lui a appliquĂ© des mĂ©thodes critiques, (notamment le croisement de sources diffĂ©rentes). AppliquĂ© Ă  mon projet artistique, l’idĂ©e d’histoire prend un aspect d’amalgame de faits et d’évĂ©nements placĂ©s dans l’espace et dans le temps de façon alĂ©atoire. Dans ce cas, l’histoire ne signifie « qu’une suite d’images de mĂ©moire contemporaine individuelle ou
  • 11. 11 collective ». (Jung 26) J’ai considĂ©rĂ© que l’histoire devient une fiction qui se mĂ©tamorphose dans le temps et l’espace de notre mĂ©moire en fonction des dĂ©sirs qui nous obsèdent. mĂ©tathèse. (n. f. [gr. metathesis, dĂ©placement ; 1587]. 1. ling. AltĂ©ration ;) En sĂ©miotique, ce terme a la signification « d’image altĂ©rĂ©e ». (Danesi 287) En appliquant le terme mĂ©tathèse Ă  l’idĂ©e d’histoire, on peut affirmer que l’homme reprĂ©sente son histoire comme une intersection de souvenirs « d’images altĂ©rĂ©es ». mĂ©talangage. (n. m. [1963]. syn. de mĂ©talangue au sens 2. ling. et inform. Langue qui prend pour objet une autre langue et la formalise.) Dans mon pĂ©riple terminologique, j’ai dĂ©cidĂ© d’utiliser le concept de mĂ©talangage dans un sens dĂ©viĂ©, en le prenant pour un moyen d’apprentissage Ă©ducationnel. D’habitude, quand on pense Ă  la langue, on envisage surtout son utilisation pour dire des choses sur le monde. Mais la langue a aussi une autre fonction, qui consiste Ă  expliquer la langue. Ainsi, par extrapolation, j’ai Ă©tĂ© rendu Ă  l’idĂ©e de discours sur le discours ou d’histoire qui questionne l’histoire, ce qui m’a emmenĂ© par la suite Ă  la mĂ©tafiction. mĂ©tafiction. (n. f., Écriture ludique et autorĂ©fĂ©rentielle ;) Ce terme est beaucoup associĂ© Ă  la fiction moderniste et postmoderniste, mais on l’utilise aussi pour parler d’œuvres telles que Mille et une nuits. La dĂ©finition donnĂ©e le plus souvent est celle d’autorĂ©fĂ©rence.
  • 12. 12 “Postmodern art suggests that there is no presence, no external truth which verifies or unifies but there is only self-reference. Historiographic metafiction self- consciously suggests this, but then uses it to signal the discursive nature of all reference.” (Hutcheon 119). photographie. (n. f. [d’apr. l’anglais. :1836]. 1. Action, art, manière de fixer par l’action de la lumière l’image des objets sur une surface sensible.) L’histoire de la photographie commence en Chine antique (approx. 400 av. J.C.) avec Mo Ti et son recherche sur la « camera obscura ». La recherche sur la « camera obscura » continue dans le monde islamique avec Al Hazen (approx. 1000 ap. J.C.). Mais la première image photographique du monde arrive en 1826 avec NicĂ©phore NiĂ©pce. En photographiant le monde, l’homme a eu l’impression qu’il pouvait collecter, s’approprier et consommer le monde par l’emprisonnement de toutes ses images dans sa tĂŞte. “To collect photographs is to collect the world.” (Sontag 3-8) Mais, consommer le monde comme image signifie consommer la mĂ©tamorphose de sa propre vision. La photographie est plutĂ´t ce qu’avait promis en 1996 le slogan de Kodak “Whatever you want it to be.” (Wheeler 29) Dans ce cas, la raison d’exister qu’on donne aux choses change en fonction de l’angle de vue et des dĂ©sirs qui nous guident. mise en abĂ®me. (ProcĂ©dĂ© par lequel on intègre dans un rĂ©cit, dans un tableau, un Ă©lĂ©ment signifiant de ce rĂ©cit ou de ce tableau.)
  • 13. 13 Ce syntagme consiste en l’incrustation d’une image en elle-mĂŞme ou, d'une manière gĂ©nĂ©rale, en la reprĂ©sentation d’une Ĺ“uvre dans une Ĺ“uvre de mĂŞme type. « Il existe trois figures essentielles de l'amplitude : la rĂ©duplication simple, qui consiste en un rapport de similitude Ă©lĂ©mentaire ; la rĂ©duplication Ă  l'infini, dans laquelle le fragment inclus inclut lui-mĂŞme un fragment ayant cette relation de similitude ; et la rĂ©duplication rĂ©pĂ©tĂ©e ou spĂ©cieuse, dans laquelle le fragment est censĂ© inclure l'Ĺ“uvre qui l'inclut. Quant Ă  la portĂ©e, il existe trois sortes de mises en abyme, reflĂ©tant trois formes de discordance entre l'ordre de l'histoire (diĂ©gèse) et celui du rĂ©cit (narration) : la mise en abyme prospective, qui « rĂ©flĂ©chit avant terme l'histoire Ă  venir » ; la mise en abyme rĂ©trospective, qui « rĂ©flĂ©chit après coup l'histoire accomplie » ; la mise en abyme rĂ©tro- prospective, qui « rĂ©flĂ©chit l'histoire en dĂ©couvrant les Ă©vĂ©nements antĂ©rieurs et postĂ©rieurs Ă  son point d'ancrage dans le rĂ©cit ». (DITL) Dans mon projet, c’est « l’effet de miroir » de ce procĂ©dĂ© qui m’intĂ©resse. Deux miroirs face Ă  face se reflètent rĂ©ciproquement Ă  l’infini l’un dans l’autre. Mais pour nous (le narrateur qui regarde) c’est quasiment impossible de regarder en mĂŞme temps en deux directions totalement opposĂ©es. Chaque direction demande une participation crĂ©ative. Le regard et les significations qui se produisent nous appartiennent. intertextualitĂ©. (n. f., Interaction textuelle ;) L'intertextualitĂ© est une forme de « transtextualitĂ© ». Le concept reprĂ©sente l'ensemble des textes en relation (par le biais par exemple de la citation, de l'allusion, du plagiat) dans un texte donnĂ©. « L'intertexte peut se faire par captation ; dans ce cas c'est un intertexte facilement repĂ©rable et clair tel que le proverbe, l'illusion... Ou par
  • 14. 14 subversion plus difficile Ă  reconnaĂ®tre ; il s'agit de citations dĂ©formĂ©es ou la parodie par exemple, l'Ă©crivain joue avec le texte d'origine. » (Genette 561) paradoxe. (n. m. [gr. paradoxos, contraire Ă  l’opinion comune, de doxa, opinion ; 1485]. 1. Opinion, chose, ĂŞtre qui va contre la manière de penser habituelle, qui heurte la raison ou la logique.) Un des paradoxes les plus connus est le paradoxe du menteur (Eubulide), dĂ©rivĂ© du paradoxe du CrĂ©tois (ÉpimĂ©nide). Sous sa forme la plus concise, on peut l’énoncer ainsi : un homme dĂ©clare : « Je mens ». Si c'est vrai, c'est faux. Si c'est faux, c'est vrai. L’ambiguĂŻtĂ© naĂ®t donc de la confusion entre le langage et le mĂ©talangage. « Les interprètes modernes ont rĂ©solu ce paradoxe en l'Ă©talant dans l'espace. Au moment oĂą je dis : « Je mens toujours », ce qui implique que je ne mens pas toujours, il n'y a pas de contradiction logique : il m'arrive de mentir, mais pas toujours ! » (Brisson 149) allĂ©gorie. (n. f. [lat. allegoria, du gr. allĂŞgorein, parler par images; 1119]. 1. Expression d’une idĂ©e par une image, un tableau, un ĂŞtre vivant.) Dans le monde grec « allo agoreuein » avait la signification de « dire autre chose ». Il semble que le terme allĂ©gorie provient du temps des philosophes pythagoriciens. Plus tard, Philon d’Alexandrie (20 av. J.C. – 50 ap. J.C.) utilise ce terme pour nommer la doctrine de l’interprĂ©tation symbolique des textes sacrĂ©s. Plutarque de ChĂ©ronĂ©e dĂ©clare que ce qu’on appelait autrefois « hypnoia » (sens cachĂ©) on l’appelle aujourd’hui « allegoria » (cf. J.PĂ©pin, Mythe et AllĂ©gorie, 87). Le stoĂŻque HĂ©raclite du Pont (Ă©poque d’Auguste) disait que « l’allĂ©gorie dit une chose mais en signifie une autre
  • 15. 15 diffĂ©rente de la chose dite. » Jean Scot fait la distinction entre « allegoria facti » et « dicti », c’est-Ă -dire entre allĂ©gorie de faits et de discours. (Il s’agit toujours de dire une chose pour entendre une autre). Au Moyen Ă‚ge, le texte allĂ©gorique devient un prĂ©texte pour une construction didactique. Au Xe siècle, on constate l’apparition d’un procĂ©dĂ© systĂ©matique de fabrication d’allĂ©gories. Mais, c’est seulement Ă  la fin du Moyen Ă‚ge qu’on commence Ă  appliquer ce procĂ©dĂ© aux images (on commence Ă  transposer les images parlĂ©es en images dessinĂ©es pour obtenir un effet comique et d’absurde). Pour Goethe, « l’allĂ©gorie transforme le phĂ©nomène en un concept, le concept en image, mais de telle sorte que le concept soit toujours saisissable dans l’image et qu’on puisse le retenir et l’avoir et l’exprimer en elle. » (Borella 67-69) Ce type de vision on peut la reconnaĂ®tre, par exemple, dans l’allĂ©gorie photographique The Two Ways of Life, d’Oscar Rejlander, qui (pour produire cette seule image) a combinĂ© plus de trente images nĂ©gatives sĂ©parĂ©es. (Wheeler 15-16) suspension volontaire d’incrĂ©dulitĂ©. (Son inventeur, Samuel Taylor Coleridge, parlait aussi de “poetic faith” dans sa Biographia Literaria, datĂ©e 1817.) L’expression dĂ©crit l’opĂ©ration mentale qu'effectue le spectateur d'une Ĺ“uvre de fiction qui accepte, le temps de sa consultation de l'Ĺ“uvre, de mettre de cĂ´tĂ© son scepticisme. En conclusion, Ă  la question : « Qu’est-ce qu’on voit quand on regarde l’histoire du monde d’aujourd’hui ? », la rĂ©ponse que je donnerai est:
  • 16. 16 Une MetaPhotoHistoire (Histoire + MĂ©tathèse + MĂ©talangage + MĂ©tafiction + Photographie + Mise en abyme + IntertextualitĂ© + Paradoxe) = AllĂ©gorie du regard Ce terme hybride que j’ai fabriquĂ© exprime bien une des caractĂ©ristiques principales de notre monde : l’éclectisme numĂ©risĂ© (Meta + Photographie + Histoire) Dans le contexte Ă©clectique contemporain, on a relativisĂ© et dĂ©trĂ´nĂ© l’image de son piĂ©destal de vĂ©ritĂ©. La fontaine WEB, avec son contenu amalgamĂ©, nous fait vivre la dĂ©matĂ©rialisation de la connaissance et de la culture. On constate que dans le sĂ©duisant miroir WEB, chaque information qu’on cherche est reflĂ©tĂ©e Ă  l’infini Ă  travers d’autres informations liĂ©es. 4. But visĂ© Par ce projet de recherche, j’ai eu l’intention de crĂ©er un triple questionnement portant sur : - le processus de crĂ©ation ; - le contenu en informations employĂ© dans ce processus ; - les enjeux de l’éducation visuelle contemporaine. Dans le design de la structure interne de ce questionnement, j’ai suivi quatre aspects gĂ©nĂ©raux de ce que je considère ĂŞtre l’environnement paradoxal de la vie contemporaine : 4. a. Le caractère douteux/ contradictoire de la vĂ©ritĂ© Le philosophe et enseignant sufi africain de Bandiagara, Tierno Bokar (1875- 1939) disait que « dans le monde il y a trois types de vĂ©ritĂ© : ma vĂ©ritĂ©, ta vĂ©ritĂ© et la
  • 17. 17 vĂ©ritĂ© ». Il s’agit d’un type « d’affirmation – dĂ©sir » qui montre une possibilitĂ© infinie d’exposer la vĂ©ritĂ©. En essayant d’appliquer cette formule au monde contemporain, on se dĂ©couvre (Ă  l’instant mĂŞme) coincĂ© dans un jeu Ă©ternel de vĂ©ritĂ© en mĂŞme temps Ă©phĂ©mère et absolue. Du point de vue thĂ©orique, l’expression est totalement valable. Mais, dans la vie de tous les jours, l’expression reste inapplicable. La vĂ©ritĂ©, on l’affirme de façon alĂ©atoire et en hĂ©sitant. Le monde actuel repose beaucoup sur une connaissance relative et confuse de la vĂ©ritĂ©. «La connaissance repose non seulement sur la vĂ©ritĂ©, mais aussi sur l’erreur. » (Jung 203) Quand je dis « monde actuel », je fais rĂ©fĂ©rence au monde de toujours (qu’on vit seulement au prĂ©sent). Je trouve que le passĂ© et le futur sont deux modes fictionnels pour nous. Ce premier aspect, je l’ai explorĂ© comme histoire visuelle au prĂ©sent, dans laquelle on rencontre les vĂ©ritĂ©s du passĂ© et du futur mĂ©langĂ©es dans un perpĂ©tuel prĂ©sent. 4. b. L’instantanĂ©itĂ© de la rĂ©alitĂ© irrĂ©elle et de l’irrĂ©alitĂ© rĂ©elle Jaques Derrida parlait d’une perception tourmentĂ©e de la connaissance oĂą l’on se retrouve au centre et Ă  la pĂ©riphĂ©rie en mĂŞme temps. “This is why classical thought concerning structure could say that the center is, paradoxically, within the structure and outside it.” (278-294) En extrapolant la vision de Derrida, on peut suggĂ©rer que le fait de voyager sur les autoroutes Ă©lectroniques de l’homme contemporain ressemble Ă  un Ă©vĂ©nement qui se dĂ©roule au centre et Ă  la pĂ©riphĂ©rie en mĂŞme temps. J’ai nommĂ© ce phĂ©nomène syndrome d’intersections. ConfrontĂ© Ă  ce monde fluide, l’homme (l’inventeur de l’autoroute Ă©lectronique) se reflète soi-mĂŞme dans cet espace fluide virtuel et devient un imitateur fidèle de cet environnement d’une façon camĂ©lĂ©onesque. Taisen Deshimaru
  • 18. 18 considère que ce type de dĂ©veloppement ne reprĂ©sente qu’une involution. « En fait, l’homme ressemble de plus en plus Ă  un animal ratĂ©. Une mauvaise Ă©ducation a fait de son cerveau un ordinateur intellectuel et idĂ©ologique, crĂ©ant ainsi des contradictions entre le monde imaginaire et verbal de la pensĂ©e et la rĂ©alitĂ© immĂ©diate de la vie. » (144) ĂŠtre terrorisĂ© par l’instantanĂ©itĂ© du centre et de la pĂ©riphĂ©rie, en perdant le contrĂ´le de sa propre identitĂ©, c’est le deuxième aspect que j’ai explorĂ©. Dans mon projet, il n’y a pas de centre ou de pĂ©riphĂ©rie. 4. c. L’ubiquitĂ© des repères spirituels ConfrontĂ©s Ă  ce choix de « mille et une portes », on se sent en quĂŞte d’une autoritĂ© fantomatique ou sous le pouvoir d’un maĂ®tre surveillant malheureux, omniprĂ©sent, transparent, mais toujours invisible. Cet Ă©tat d’incertitude, d’attente figĂ©e, d’impossibilitĂ© d’identifier une voie spirituelle valable prend dans mon projet l’aspect d’un objet non- identifiable (aux aspects sans nombres) ou d’incertitude sacrĂ©e, au-delĂ  de notre pouvoir de comprĂ©hension. La langue dans laquelle on vit dans le monde contemporain est devenue un espace de tentations Ă©tranges, un espace incertain et insĂ©curitaire. Cette idĂ©e (de vivre dans une langue oĂą on se sent manipulĂ© et surveillĂ© en mĂŞme temps par l’imaginaire quotidien) a reprĂ©sentĂ© le troisième aspect de mon projet. 4. d. L’état confus des enjeux Ă©ducationnels Ă€ mon avis, la connaissance humaine Ă©volue de façon synchronique. Mais, cette Ă©volution a un aspect paradoxal. Dans un sens mĂ©taphorique, on se voit arrivĂ©s dans un
  • 19. 19 lieu extatique oĂą l’on garde un pied dans le monde du rĂ©el et l’autre dans le monde du virtuel. FascinĂ©s de se trouver lĂ , on ne peut pas dĂ©cider quelle voie emprunter. Le pire dans cette situation, c’est qu’il semble que l’évolution de la connaissance ne nous apprend rien. « Longtemps, nous avons cru que le progrès de la culture allait de pair avec le dĂ©veloppement de la culture. » (Finkelkraut 183) « La barbarie a donc fini par s’emparer de la culture. Ă€ l’ombre de ce mot, l’intolĂ©rance croit, en mĂŞme temps que l’infantilisme. » (183) En se questionnant sur le sens de l’éducation, Jean Piaget considĂ©rait que l’éducation intellectuelle ne doit pas ĂŞtre seulement un savoir rĂ©pĂ©tĂ© de conservation d’un savoir des vĂ©ritĂ©s toutes faites ou des demi - vĂ©ritĂ©s. Par le quatrième aspect que j’ai explorĂ© dans mon projet de recherche visuelle, j’ai visĂ© la façon dont on pourrait devenir par soi-mĂŞme un ĂŞtre conscient et averti dans le processus de construction de la vĂ©ritĂ©.
  • 20. 20 Chapitre III 1. MĂ©thodologie de recherche qualitative Pour la rĂ©alisation de mon projet, j’ai employĂ© trois types de pratiques mĂ©thodologiques : Projet artistique de photographie numĂ©rique et de texte manipulĂ©s ; Journal de recherche et de route ; RĂ©ponse esthĂ©tique. 2. Projet artistique de photographie numĂ©rique et de textes manipulĂ©s comme procĂ©dĂ© de recherche qualitative. Ce projet reprĂ©sente une tentative de dĂ©construction (de dĂ©codage) et de reconstruction (de recodage) d’un savoir visuel et informatif contemporain stĂ©rĂ©otypĂ© dont l’une des sources est Internet. Le projet de dĂ©construction et de reconstruction du savoir Ă  Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© en cinq Ă©tapes, chacune ayant Ă  la base des histoires fictionnelles qui ont tentĂ© de donner un air d’histoire vĂ©ridique Ă  la photographie et au monde contemporain en gĂ©nĂ©ral : a. La photographie de la route de la soie (Marco Polo en voyage de MO TI Ă  Al Hazen) b. L’instantanĂ© des attitudes humaines (de Edweard Muybridge Ă  Harold E. Edgerton) c. La photographie des syndromes contemporains d. La photographie de la surveillance complice e. La photographie d’un monde qui s’endort involontairement La première histoire fictionnelle de mon projet artistique a comme acteur principal Marco Polo (XIVe siècle). Il est parti en voyage (mais on n’insiste pas sur un
  • 21. 21 point de dĂ©part ou d’arrivĂ©e) pour rencontrer Mo Ti (le premier inventeur d’une camera obscura en 400 av. J.C., dans la Chine antique) et faire la connaissance du grand Kubilai Khan (XIIIe siècle) et de son grand empire qui, Ă  ce temps-lĂ  prenait la forme d’un Non lieu – un espace Ă©tendu du Tibet jusqu’en Perse. En quittant la Chine, Marco Polo part pour rencontrer Al Hazen (qui continue la recherche sur la camera obscura en l’an 1000 ap. J.C., dans le monde islamique, sur le territoire de la Perse d’autrefois, l’Iran d’aujourd’hui). Cette problĂ©matique (annoncĂ©e dans les deux premières sĂ©ries unifiĂ©es) a Ă©tĂ© rĂ©interprĂ©tĂ©e, rĂ©interrogĂ©e dans les autres sĂ©ries, mais d’un angle de vue diffĂ©rent. Dans les sĂ©ries suivantes, le voyage de Marco Polo se dissipe. Il ne reste que la problĂ©matique concernant le contexte socio-politico-culturel du monde contemporain. La fiction suit le principe de la boule de neige. Elle continue Ă  s’amplifier d’une façon dissimulĂ©e parce que chaque cycle de voyage dĂ©vore et rĂ©alimente la mĂ©moire du dĂ©sir imaginaire du voyageur. Ă€ un autre niveau, le message visuel Ă©clectique suggĂ©rĂ© au dĂ©but continue d’être dĂ©veloppĂ© par le narrateur (du temps prĂ©sent) qui le regarde. Ce fait met en Ă©vidence l’aspect multipolaire de ma fiction dans le sens que la construction de la connaissance et l’interprĂ©tation de cette connaissance sont faites aussi par la contribution active de ceux qui regardent. Mais, le message visuel transmis au « narrateur qui regarde » par le monde d’aujourd’hui a un caractère paradoxal. Il joue un rĂ´le fondamental dans la construction de la mĂ©moire et de la conscience sociale comme, par exemple, Iwo Jima ou World Trade Center. (Lester xi) Il s’agit d’une crĂ©ation Ă  double sens. On donne naissance Ă  une histoire qui, par la suite, contribue Ă  la crĂ©ation de notre mĂ©moire et du sens de l’histoire. Dans la structure interne de cette mĂ©moire, chaque image et chaque fragment de texte reprĂ©sentent des Ă©vĂ©nements qui, parfois, ont un
  • 22. 22 niveau d’émotivitĂ© très Ă©levĂ© et qui exercent une influence forte et de longue durĂ©e sur notre façon de penser le monde d’aujourd’hui ou des temps passĂ©s. L’efficacitĂ© de ce message visuel contemporain est donnĂ©e aussi par son design, par sa structure interne et externe. Le message vĂ©hiculĂ© par ce monde en manque de temps et placĂ© sous le pouvoir de la vitesse et de la peur est fragmentĂ© et stĂ©rĂ©otypĂ©. Ce type de message est de plus en plus semblable aux clichĂ©s multipliĂ©s d’un voyage fictionnel. L’Histoire des Ă©vĂ©nements simultanĂ©s et synchrones, je l’ai transfĂ©rĂ© dans une histoire racontĂ©e. L’idĂ©e centrale c’est qu’en faisant le montage des clichĂ©s de cette histoire racontĂ©e, on ne peut pas parvenir Ă  obtenir l’image globale et rĂ©elle de notre pĂ©riple visuel quotidien. On n’obtient que de fragments d’une histoire sans fin qu’on construit et qu’on estompe d’une heure Ă  l’autre. Dans la rĂ©alisation du projet artistique, j’ai employĂ© le procĂ©dĂ© que je nomme « Pseudo recherche historique », ce qui veut dire que pour une histoire fictionnelle j’ai utilisĂ© un type de recherche appropriĂ©e. J’ai utilisĂ© aussi des procĂ©dĂ©s de travail empruntĂ©s Ă  la mĂ©thodologie du photojournalisme comme : Misrepresentation, News staging, Re-creating, Re-telling, Plagiarism. Le but principal de l’utilisation de ces tous procĂ©dĂ©s a Ă©tĂ© de crĂ©er finalement une image gĂ©nĂ©rale d’ambiguĂŻtĂ© et de sĂ©duction. Note : Le voyage de Marco Polo n’est qu’un prĂ©texte fictionnel lancĂ© au dĂ©but de ce travail d’une manière semblable Ă  la recherche d’une information sur Internet. Ce prĂ©texte agit Ă  la façon d’un mot-clef qui sert Ă  rassembler des informations liĂ©es Ă  mon sujet.
  • 23. 23 2. a. La photographie de la route de la soie (Marco Polo en voyage de MO TI Ă  Al Hazen) Cette sĂ©rie est composĂ©e de trois parties : 1. Une sĂ©rie de textes littĂ©raires qui attestent les voyages de Marco Polo en Chine et en Perse. 2. Une sĂ©rie d’images reprĂ©sentant le voyage de Marco Polo dans l’empire de Kubilai Khan (Chine d’aujourd’hui) 3. Une sĂ©rie d’images reprĂ©sentant le voyage de Marco Polo en Perse (Iran d’aujourd’hui) 2. a. 1. Une sĂ©rie de textes littĂ©raires qui attestent les voyages de Marco Polo en Chine et en Perse. Le texte qui suit reprĂ©sente un de ces transtextes autorĂ©fĂ©rentiels. ________________________________________________________________________ “Bertold Brecht noted in “The Life of Galileo” that MO TI liked to take pictures representing bicycle, water and bubbles. “During the time of visit of Marco Polo in Kublai Khan’s China, the Chinese people thought that riding a bicycle on water or playing with bubbles can destroy completely the feeling of self-importance and can erase from their memories their own “personal history— so that to attain humility.” ________________________________________________________________________ Analyse et rĂ©ponse esthĂ©tique En lisant ce texte, le « narrateur qui regarde » doit tomber dans le piège d’une ambiguĂŻtĂ© sĂ©duisante. Le texte a une architecture logique avec certains Ă©lĂ©ments qui sont vrais et d’autres qui sont faux. Pour donner l’impression de vĂ©ridicitĂ© et de conformitĂ©, le texte suit la logique du monde qu’on connaĂ®t. Quelques
  • 24. 24 Ă©lĂ©ments sont vrais pour la rĂ©alitĂ© du monde qu’on connaĂ®t (Mo Ti, Marco Polo, Chine, etc.) ; d’autres Ă©lĂ©ments sont vrais seulement pour une rĂ©alitĂ© fictionnelle. Donc, le texte raconte une histoire qui peut ĂŞtre autant vraie que fausse. Il joue avec l’idĂ©e d’oubli et de distorsion. Le texte met en question la capacitĂ© de l’être humain d’avoir une connaissance stable en ce qui concerne l’histoire. Après une ou deux lectures, on commence Ă  douter. On n’est pas sĂ»r de la conformitĂ© de ce texte Ă  l’écriture de B. Brecht. On n’est sĂ»r non plus de la vĂ©ridicitĂ© de l’histoire racontĂ©e. Mais on est sĂ»r de l’ambiguĂŻtĂ© de cette histoire autosuffisante Ă  elle-mĂŞme. Elle peut vivre toute seule, sans avoir besoin d’être soutenue par des images. Elle est basĂ©e sur l’imaginaire enracinĂ© dans la mĂ©moire collective. Elle est conçue pour Ă©voquer cet imaginaire et le remettre en question en jetant aussi le doute sur elle-mĂŞme. ________________________________________________________________________ 2. a. 2. Une sĂ©rie d’images reprĂ©sentant le voyage de Marco Polo dans l’empire de Kubilai Khan (la Chine d’aujourd’hui) « Peuple, vĂ©lo et eau » ; photo : Mo Ti, publiĂ©e par Flickr en 2007
  • 25. 25 « Peuple, vĂ©lo et eau » ; photo : Mo Ti, publiĂ©e par Flickr en 2007 ________________________________________________________________________ ProcĂ©dĂ©s techniques utilisĂ©s: Note : Cette sĂ©rie d’images a Ă©tĂ© produite Ă  partir d’images qu’on trouve publiĂ©es sur le site Internet Flickr (http://www.flickr.com/) Première Ă©tape : En utilisant le mot-clĂ© « Chine », j’ai fait une recherche d’images sur le site mentionnĂ©, suivie d’une sĂ©lection. J’ai enregistrĂ© dans mon ordinateur des images capables de contribuer Ă  la construction d’une fiction visuelle Ă  structure alĂ©atoire et ambiguĂ«. Deuxième Ă©tape : En utilisant un simple logiciel HP de traitement d’image, j’ai modifiĂ© la chromatique des images (effet de couleur intense ou effet de couleur faible en intensitĂ©). Troisième Ă©tape : J’ai photographiĂ© chaque image avec une camĂ©ra numĂ©rique Canon de 3 mĂ©ga pixels. Devant l’écran de l’ordinateur, j’ai placĂ© une bougie. Au centre de l’écran
  • 26. 26 j’ai accrochĂ© un ruban de soie rouge. J’ai agrandi l’image Ă  la dimension de l’écran. En prenant des photos de cette manière, j’ai obtenu tous les Ă©lĂ©ments intĂ©grĂ©s de façon harmonieuse dans un seul cadre. ________________________________________________________________________ « Mo Ti » (en 400 av. J.C.) photo: Marco Polo, publiĂ© par Flickr en 2007 ________________________________________________________________________ RĂ©ponse esthĂ©tique I « Hier une camĂ©ra Ă©tait nĂ©cessaire pur crĂ©er de l’image en respectant le rĂ©el. Aujourd’hui un ordinateur et un logiciel appropriĂ© suffisent pour crĂ©er une image calculĂ©e sur le virtuel. » (Media-DĂ©fense 17) 1. En changeant la chromatique des photos, j’ai essayĂ© de donner l’impression d’une atemporalitĂ© douteuse.
  • 27. 27 2. Le ruban de soie rouge, je l’ai ancrĂ© au centre de l’image pour suggĂ©rer l’axe vertical de l’image. R. Barthes parle de la capacitĂ© de l’image « Ă  ancrer » quelque chose Ă  autre chose. (Manghani 109-115) Mais, cette colonne verticale n’appartient pas Ă  la structure interne de l’image ; elle est superposĂ©e pour parler de la Route de la Soie comme chemin de la tolĂ©rance multiculturelle et de la connaissance d’autrefois ou comme route du conflit qui dĂ©truit l’unitĂ© fragile du monde contemporain et le partage en morceaux intenables. 3. La bougie, je l’ai utilisĂ©e comme signe de lumière, d’espoir, mais aussi comme signe funĂ©raire. La lumière, c’est la condition de la vue, de la photographie, de la connaissance et de la vie. L’espoir, on l’associe Ă  l’avenir. Le funĂ©raire, on l’associe Ă  l’histoire du passĂ©. RĂ©ponse esthĂ©tique II 1. Au premier degrĂ©, toutes les photos que j’ai photographiĂ©es pour la sĂ©rie « Chine » surprennent des instants de vie (qui servent de couverture pour nos gestes catastrophiques) qui mettent en Ă©vidence la beautĂ© Ă©ternelle de la vie tels que : prendre une photo, voyager Ă  vĂ©lo, faire des bulles de savon, voyager en ballon sur l’eau, faire voler un chapeau comme une soucoupe volante, regarder le ciel, se faire photographier. 2. Mais, au deuxième degrĂ©, chaque photo parle de l’emprisonnement de la rĂ©alitĂ© dans notre pensĂ©e, des enjeux sociopolitiques et spirituels (aussi Ă©phĂ©mères) du monde contemporain : l’éveil, l’ubiquitĂ© et l’orgueil de la Chine, l’injustice envers le Tibet, la lassitude de l’opinion publique internationale.
  • 28. 28 3. Au troisième degrĂ©, l’ensemble de ces images parle de la photo comme signe transcendent. Chaque image reprĂ©sente la photographie des relations existant entre les choses. Il s’agit ici de l’idĂ©e d’égalitĂ© discursive qui se traduit par l’habilitĂ© de l’image de parler de la souffrance humaine au-delĂ  des barrières culturelles et linguistiques. Michel Foucault dĂ©finit l’image comme « une figure de connaissance » (Manghani 179- 183) qui garde le monde ensemble. L’image reprĂ©sente un ordre des choses capable de transcender le relativisme culturel. RĂ©ponse esthĂ©tique III Sur les modalitĂ©s de produire et d’utiliser les photos : D’habitude « le privĂ© » implique l’expĂ©rience personnelle, ce qui a Ă©tĂ© directement expĂ©rimentĂ©, tandis que « le public » c’est la photo de la photo ; cela ne nous appartient pas. Dans mon projet, le privĂ© et le public se mĂ©langent pour crĂ©er un effet de proche impersonnel. L’image est une simulation de la rĂ©alitĂ©. « Le public », c’est l’expĂ©rience inconnue ou qui reste Ă  distance de nous, qui ne nous touche pas, qui ne nous concerne pas. En regardant ces photos, on peut facilement constater qu’il y a une sorte de proximitĂ© ambiguĂ«. Les photos que j’ai photographiĂ©es semblent ĂŞtre des photos de famille mais en mĂŞme temps elles sont publiques, inconnues. Alors, l’image que j’ai employĂ©e se veut un symbole tangible de l’esprit du monde contemporain en mouvement. Le monde devient un lieu photographique vu de très près. L’environnement humain devient un lieu photographique. Le monde est une mise en scène du rapprochement, de la domesticitĂ© suspendue, de l’hybriditĂ©, du regard aveugle, de l’amoralitĂ©, de la banalitĂ©, de l’inhabilitĂ©, de l’amnĂ©sie culturelle, de l’immĂ©diatetĂ©, de l’instantanĂ©itĂ©, de l’altĂ©ritĂ©, de
  • 29. 29 la vulnĂ©rabilitĂ©, de la spĂ©cificitĂ© des sites, de la nĂ©gociation, de la transgression, de la transcendance. La rĂ©alitĂ© a Ă©tĂ© transfĂ©rĂ©e dans un spectacle nostalgique photographiĂ© qui n’a pas de lieu ou d’espace prĂ©cises. RĂ©ponse esthĂ©tique IV L’image est autorĂ©fĂ©rentielle. On n’aperçoit que la photo elle-mĂŞme. L’image photographiĂ©e cache l’absence de la rĂ©alitĂ© ; elle devient une icĂ´ne stĂ©rĂ©otypĂ©e. Ainsi, on est situĂ© en dehors de la relation complice de la sociĂ©tĂ© civile et de son contrĂ´le idĂ©ologique. On ne s’aperçoit que d’un Ă©tat de joie et d’attente impersonnelle. Notre perception visuelle affecte la modalitĂ© dont on se comprend soi-mĂŞme, les autres et le monde. ________________________________________________________________________ « Enfants du Tibet » ; photo : Mo Ti, publiĂ©e par Flickr en 2007
  • 30. 30 « Soucoupe volante » ; photo : Mo Ti, publiĂ©e par Flickr en 2007 ______________________________________________________________________ « Bulles de savon » ; photo : Mo Ti, publiĂ©e par Flickr en 2007
  • 31. 31 «Voyage en ballon » ; photo : Mo Ti, publiĂ©e par Flickr en 2007 ________________________________________________________________________ 2. a. 3. Une sĂ©rie d’images reprĂ©sentant le voyage de Marco Polo en Perse (Iran d’aujourd’hui) ProcĂ©dĂ©es techniques utilisĂ©s: Note : Toutes les images de cette sĂ©rie proviennent du site Flickr. Pour la rĂ©alisation de cette sĂ©rie, j’ai appliquĂ© deux procĂ©dĂ©s : Première Ă©tape : consiste en l’utilisation d’une bougie et de son reflet sur l’écran de l’ordinateur. J’ai interposĂ© la bougie entre l’espace qui sĂ©pare l’objectif de la camera et l’écran de l’ordinateur. J’ai pris les photos sans avoir fait aucune manipulation antĂ©rieure des images photographiĂ©es. Cependant, j’ai fait de petites interventions sur les photos
  • 32. 32 crĂ©Ă©es : j’ai modifiĂ© l’intensitĂ© chromatique et j’ai fait des coupures des parties des photos pour que la bougie soit perçue comme faisant partie de la structure racontĂ©e par les images. Deuxième Ă©tape : suit le procĂ©dĂ© utilisĂ© pour la crĂ©ation de la sĂ©rie « Chine », mais, Ă  la place du ruban de soie j’ai utilisĂ© une page d’agrandissement. J’ai disposĂ© la bougie devant l’écran et la page d’agrandissement devant la bougie. Dans le but de mettre en Ă©vidence l’idĂ©e de distorsion, j’ai utilisĂ© une page d’agrandissement que j’ai trouvĂ© sur le marchĂ© de produits chinois Dollarama. Les photos finales sont donc des prises de vues Ă  travers cet appareil rudimentaire. ________________________________________________________________________ « Al Hazen » (en 1000 ap. J.C.); photo: Marco Polo, publiĂ©e par Flickr en 2007
  • 33. 33 « Al Hazen dans sa bibliothèque Ă  Tabriz » (en 1000 ap. J.C.); photo : Marco Polo, publiĂ©e par Flickr en 2007 RĂ©ponse esthĂ©tique I Il y a plusieurs façons de percevoir le monde de manière anamorphosique : 1. La distorsion involontaire (manque de donnĂ©es suffisantes dĂ» au hasard). 2. La distorsion volontaire. Chez Aristote, l’œil humain se comportait comme un camĂ©lĂ©on. Il changeait la façon de percevoir les choses en fonction de l’environnement regardĂ©. Dans le temps d’Al Hazen, on s’est beaucoup questionnĂ© sur le mystère de la lumière. La lumière Ă©tait la source unique de toute connaissance. Il y avait trois axiomes interconnectĂ©s qui servaient de guide dans la recherche empirique : a.) Tout changement d’intensitĂ© changeait l’apparence des choses ; b.) Tout changement d’angle de vue changeait la capacitĂ© Ă  juger de la chose ; c.) Tout phĂ©nomène de distorsion de lumière gĂ©nĂ©rait des distorsions de la connaissance.
  • 34. 34 Dans mon histoire fictionnelle, ce type de jugement pseudo scientifique du monde islamique est devenu dĂ©suet. L’environnement dans lequel on vit aujourd’hui repose beaucoup plus sur des concepts prĂ©fabriquĂ©s et stĂ©rĂ©otypĂ©s sur mesure. La distorsion est intentionnelle. On pose sur le monde le regard qui nous intĂ©resse. Ce qui ne peut pas ĂŞtre aperçu ou modifiĂ© Ă  la mesure de nos intĂ©rĂŞts, est rejetĂ©. La lumière, (dite de la connaissance), on l’utilise seulement pour diviser les choses. Aussi, on vit « deux mouvements tendanciels contradictoires : d’un cĂ´tĂ© la mondialisation du tout informationnel par le biais du tout numĂ©rique et l’ultra concentration qui en dĂ©coule, et de l’autre les rĂ©actions intĂ©gristes, les rĂ©actions fondamentalistes, les nationalismes ethniques, les populismes de gauche ou de droite. » (Media-DĂ©fence 306) L’environnement dominĂ© par la simultanĂ©itĂ© et par la syncronicitĂ© est devenu un espace racontĂ©, marquĂ© par une attitude de peur, d’attente incertaine. ____________________________________________________________________________________________________________ « InquiĂ©tude et attente » ; 11 septembre 2008 ; photo: Al Hazen, publiĂ©e par Flickr en 2007
  • 35. 35 Dans une de ses phrases mĂ©morables, le romancier amĂ©ricain J. G. Ballard nommait cet environnement un grand roman. “Given that external reality is a fiction, the writer's role is almost superfluous. He does not need to invent the fiction because it is already there.” Mais, Ă  partir de cette fiction on doit rĂ©inventer la rĂ©alitĂ©. Mais quelle rĂ©alitĂ© ? ________________________________________________________________________ « Marco Polo et Al Hazen » ( en 1000 ap. J.C.) ; photo : anonyme, publiĂ©e par Flickr en 2007 ________________________________________________________________________ “Jorge Louis Borges noted in “The Library of Babel”: “When Marco Polo came to visit from Kabul, over Noruz holidays, in 1012, he went with Ibn al-Haytham to Yanan Dagh (Burning Mountain). The side of the hill is perpetually on fire from natural gas reserves underground. He remembered that Kublai Khan told him that a long time ago this was a Zoroastrian holy site.
  • 36. 36 « Marco Polo Ă  Yanan Dagh » (montagne sacrĂ©e en Iran) ; photo : Marco Polo, publiĂ©e par Flickr en 2007 ________________________________________________________________________ « Effets de lumière Ă  Isfahan » ; photo: Al Hazen, publiĂ©e par Flickr en 2007
  • 37. 37 « Derviches tourneurs Ă  TĂ©hĂ©ran » ; 11 septembre 2008 ; photo: Al Hazen, publiĂ©e par Flickr en 2007 ________________________________________________________________________ « Le livre de Al Hazan sur la science optique » ; photo : Marco Polo, publiĂ© par Flickr en 2007
  • 38. 38 Conclusion provisoire La photographie de la route de la soie ou Marco Polo en voyage de MO TI Ă  Al Hazen constitue un prĂ©texte. Parler des enjeux visuels contemporains comme la Chine, le Tibet et l’Iran par le biais de la dĂ©construction et la reconstruction esthĂ©tique de l’information visuelle et textuelle provenue d’Internet reprĂ©sente le cĂ´tĂ© subversif du projet. Inventer des procĂ©dĂ©s artistiques qui peuvent soutenir un discours Ă©ducationnel critique, c’est l’objectif du projet dans son ensemble.
  • 39. 39 b. 2. L’instantanĂ© des attitudes humaines (de Edweard Muybridge Ă  Harold E. Edgerton) Dans cette deuxième partie du projet, l’histoire de Marco Polo n’existe plus. Ce qui continue de se dĂ©velopper, c’est la problĂ©matique lancĂ©e et la curiositĂ© d’essayer un nouvel angle de vue et des nouveaux procĂ©dĂ©s artistiques d’interprĂ©tation de l’histoire du monde contemporain. L’attitude de l’être humain face au mystère de la vie est explorĂ©e par l’acte de photographier de petits univers d’objets installĂ©s. Notre regard se dĂ©place vers l’idĂ©e de concubinage, de relations inattendues qui existent entre les choses. Le voyage de Marco Polo, on l’a regardĂ© de loin pour mieux comprendre des fragments de notre vie quotidienne. Ici, on se concentre sur la vie artificielle d’un microcosme, sur « le proche » pour mieux comprendre les relations qui se nouent au « loin ». ProcĂ©dĂ©s techniques utilisĂ©s: Note : Pour cette Ă©tape, j’ai utilisĂ© des images du site Internet Flickr et des images que j’ai produites il y a quelques annĂ©es. J’ai explorĂ© deux procĂ©dĂ©s : Dans un premier temps, j’ai choisi des objets et des photos pour pouvoir crĂ©er de petites compositions, de petites installations. Après, j’ai placĂ© par terre les images et les objets pour obtenir de petits Ă®lots de connaissance, de signification. J’ai crĂ©Ă© plusieurs photographies Ă  partir de ces petits mondes des objets. Dans un deuxième temps, j’ai imprimĂ© des images considĂ©rĂ©es iconiques au XXe siècle telles que la rĂ©volte des Ă©tudiants en Chine (Tiananmen, 1989), Kim Puch dans la guerre de Vietnam (1972), une sĂ©quence de relation de vie entre la mère et sa petite fille
  • 40. 40 photographiĂ©es par Edweard Muybridge et une fraction de seconde oĂą une balle traverse une ampoule, photographiĂ©e par Harold Edgerton. Après, j’ai placĂ© de petites billes colorĂ©es sur la surface d’un numĂ©riseur. Au-dessus de ces petites, billes j’ai placĂ© les photos que je voulais transformer. De cette manière, j’ai obtenu une sĂ©rie de photos manipulĂ©es Ă  l’aide d’un numĂ©riseur. RĂ©ponse esthĂ©tique La relation est une chose qui ne peut pas ĂŞtre photographiĂ©e. Pour comprendre une relation entre les choses, on peut faire des recherches et des analyses de cas, on peut Ă©crire ou on peut parler de ce sujet mais on ne peut pas obtenir une image en la photographiant. Pour « arrĂŞter » l’image des relations, j’ai fait des mises en scène ; j’ai placĂ© les objets de sorte Ă  crĂ©er des relations arbitraires entre eux. Pour rendre ma dĂ©marche plus claire, je ferai un court inventaire des choses intĂ©grĂ©es Ă  mes compositions. Premier procĂ©dĂ©. Par exemple : un livre sur la technique photographique de H. Edgerton (Je l’ai ouvert Ă  la page oĂą on prĂ©sente l’image en noir et blanc de l’ampoule traversĂ©e par la balle.) ; une couverture de disque vinyle illustrĂ©e en couleurs avec une Ĺ“uvre religieuse de Stefan Lochner. La couverture fait rĂ©fĂ©rence Ă  l’œuvre de Mozart intitulĂ©e « Coronation Mass ») ; une de mes photographies en noir et blanc qui date de 1995 sur la thème « vanitĂ© » ( l’image reprĂ©sente un crâne illuminĂ© par une lampe de bureau et reflĂ©tĂ© dans un miroir en arrière) ; des pĂ©tales de fleurs rouges, des billes de verre ; un cube de verre qui emprisonne une montre dĂ©montĂ©e ; la moitiĂ© d’une noix ; une page d’agrandissement ; une photo de la guerre d’Irak en infrarouge, quatre de mes
  • 41. 41 photos qui datent de 2006, placĂ©es dans un cadre (deux photos du cimetière Mont Royal dans lesquelles je suis prĂ©sent, deux photos de l’Oratoire Saint Joseph : une reprĂ©sente l’effet de lumière sur une civière blanche ; l’autre, l’effet de lumière colorĂ©e, filtrĂ©e par un vitrail, sur le pavement). Cette description donne l’impression d’un musĂ©e de curiositĂ©s qui, de par son design, force les choses Ă  vivre dans un contexte de concubinage impossible. Ce n’est qu’une apparence des choses. En regardant les images, on peut dĂ©couvrir assez facilement des relations logiques. Dans le premier exemple visuel, je parle d’une ampoule « tuĂ©e » par une balle ; dans le voisinage il y a un crâne illuminĂ© par une lampe de bureau et reflĂ©tĂ© par un miroir ; Ă  cotĂ© il y a l’image de la Vierge, de l’enfant et des anges. ________________________________________________________________________ « Relations I »
  • 42. 42 « Relations II » ________________________________________________________________________ Dans le deuxième exemple, il y a le cimetière dans lequel je suis prĂ©sent, il y a mon reflet sur la surface d’une pierre tombale en marbre noir, il y a la civière, la lumière colorĂ©e sur le pavement de l’église et l’image reflĂ©tĂ©e de la bibliothèque ; il y a la photo en infrarouge d’une nuit de la guerre d’Irak ; il y a le cube de verre qui contient la montre dĂ©montĂ©e. Deuxième procĂ©dĂ© : de petites billes colorĂ©es placĂ©es dans un sac de plastique ont Ă©tĂ© superposĂ©es sur l’image Ă  caractère iconique de l’étudiant anonyme qui affronte « la machine totalitaire » (La Place Tiananmen, Chine, 1989, AP, Jeff Widener) et sur l’image iconique de la petite fille Kim Phuc, brulĂ©e au napalm pendant la guerre du Vietnam (AP, Nick Ut, 1972).
  • 43. 43 « Ancrage » ________________________________________________________________________ Le rĂ©sultat que j’ai obtenu, c’est un monde en morceaux de privĂ© et de public mis ensemble. L’image d’Harold Edgerton parle de l’expĂ©rience Ă  la balle qui traverse l’ampoule et de sa performance photographique en mĂŞme temps. Mais dans mon projet, ce fragment d’image parle de la potentialitĂ© de la chose, doublĂ©e de l’intentionnalitĂ© qu’on lui imprime. Une balle traverse une ampoule et fait s’éteindre une lumière. Une balle anĂ©antit la vie. Cette image placĂ©e Ă  cĂ´tĂ© de la couverture du disque de musique de Mozart amplifie le message; on associe l’expĂ©rience Ă  la condition humaine. On ouvre un questionnement en parallèle sur la mort, la vie et la justice. (Mozart, on l’a jetĂ© dans une fosse commune.) Il s’agit d’un regard subversif posĂ© de près pour suggĂ©rer « le loin » qui nous obsède et qu’on veut oublier. Les choses sont reprĂ©sentĂ©es dans leurs relations
  • 44. 44 inattendues mais complices; J’ai intĂ©grĂ© mon image dans ces petites installations pour mettre l’accent sur le fait qu’il ne faut pas oublier l’histoire qu’on vit. Au contraire, il faut l’assumer pour la comprendre et la valoriser. Les relations arbitraires Ă©tablies entre les choses photographiĂ©es parlent d’autres choses. « Quand la tension internationale augmente, lorsque la guerre gronde et que les dĂ©pĂŞches d’agences dĂ©filent, alors s’installe une nouvelle situation : une brusque inflation du besoin de voir, du dĂ©sir de savoir, un goĂ»t du spectacle… » (Thiery Nouel, Le montage d’un monde en morceau) (Media-DĂ©fense 74) Conclusion provisoire. L’instantanĂ© des attitudes humaines (de Edweard Muybridge Ă  Harold E. Edgerton) constitue un prĂ©texte. Parler des relations inattendues entre des choses morcelĂ©es (pour exprimer les enjeux visuels contemporains par le biais de la dĂ©construction et de la reconstruction esthĂ©tique de l’information visuelle et textuelle provenues en principal d’Internet) reprĂ©sente le cotĂ© subversif du projet. Inventer des procĂ©dĂ©s artistiques qui peuvent soutenir un discours Ă©ducationnel critique, c’est le but du projet dans son ensemble.
  • 45. 45 3. La photographie des syndromes contemporains Cette troisième partie est la plus illustrative Ă©tape de la mĂ©taphore « reflĂ©ter le monde ». On retrouve dans cette Ă©tape des idĂ©es comme fontaine, reflet, miroitement, fontaine WEB, rĂ©seau global, information, public, privĂ©, circulation, manipulation, sĂ©duction, tentation. L’exploration avance vers un imaginaire marquĂ© par les Ă©vĂ©nements qui sont arrivĂ©s après le 11 septembre 2001. Ă€ partir de ce moment, on a vĂ©cu dans une sociĂ©tĂ© citĂ©e et rĂ©citĂ©e visuellement. La sociĂ©tĂ© humaine de l’Occident est retournĂ©e sur la Route de la Soie, mais dans une vision contemporaine. L’explosion de l’emploi de l’appareil photo numĂ©rique dans un contexte numĂ©rique globalisĂ© a transformĂ© le monde dans une histoire de citations racontĂ©es Ă  l’infini en ligne. Les tentations de celui qui manipule l’information visuelle ou textuelle sont beaucoup plus accentuĂ©es. Ces conditions ont eu comme effet une extrĂŞme labilitĂ©, mallĂ©abilitĂ© et prĂ©caritĂ© de l’information et de ses significations. Le rĂ©emploi de l’information implique toujours un dĂ©placement des significations. Chaque action produit une rĂ©troaction sans que l’on puisse prĂ©voir l’ensemble des effets qui suivent. « Our modern mediated world is indeed a two-edged sword. » (Danesi 27) ProcĂ©dĂ©s techniques utilisĂ©s: Note : J’ai utilisĂ© des images du site Internet Flickr et quelques-unes de mes photos produites pendant cette pĂ©riode. Ă€ cette phase du projet, j’ai employĂ© un seul procĂ©dĂ© artistique. Premièrement, j’ai collectĂ© des images (qui rĂ©pondent Ă  la problĂ©matique visuelle dĂ©veloppĂ©e jusqu'ici). L’inventaire de cette collection est constituĂ© de photos telles que : des moines du Tibet en
  • 46. 46 prière, des images que j’ai prises Ă  MontrĂ©al, près de l’aĂ©roport Dorval ou des images d’Afghanistan (l’armĂ©e canadienne en guerre - l’arrivĂ©e de Père NoĂ«l), etc. Pour manipuler les photos de ce cycle, j’ai utilisĂ© un miroir. J’ai couvert la partie gauche de l’écran de l’ordinateur avec ce miroir, après j’ai photographiĂ© les images une après l’autre. En fait, j’ai photographiĂ© l’écran de mon ordinateur. RĂ©ponse esthĂ©tique I En utilisant ainsi ce procĂ©dĂ©, j’ai obtenu un effet de reflet des images. Ă€ ce point j’ai essayĂ© d’imaginer le WEB comme une fontaine infinie (semblable Ă  l’image de la fontaine de mon enfance), mais qui n’est capable Ă  reflĂ©ter le monde contemporain dans son image globale. J’ai obtenu des fragments visuels des mondes publics, juxtaposĂ©s Ă  une seule image d’espace intime, rĂ©pĂ©tĂ©e chaque fois. En ayant comme but l’idĂ©e d’exprimer l’invasion, j’ai dĂ©placĂ© les formes et leurs significations. Dans ces photos l’espace public occupe de façon agressive l’espace privĂ©. Par exemple, nous ne pouvons pas parler de guerre en dehors de notre maison. Ce syndrome du monde contemporain se glisse Ă  l’improvise par le biais du rĂ©seau WEB. Tout est dĂ©territorialisĂ© et transformĂ© en virtuel. Mais, il s’agit d’une invasion que je nomme « extatique ». C’est une invasion volontaire et contrĂ´lĂ©e en partie par nous-mĂŞmes. C’est une invasion basĂ©e sur notre capacitĂ© d’être sĂ©duits. « Car nous vivons de la sĂ©duction mais nous mourons dans la fascination. » (Baudrillard 215) La juxtaposition « PrivĂ©-Public » a comme rĂ©sultante une ligne verticale qui, dans ce cas, parle de la sĂ©paration. On ne peut plus rĂ©concilier les choses dans leur essence profonde. C’est la maladie du monde contemporain « conçue mĂ©taphoriquement ». (Susan Sontag 153-180).
  • 47. 47 « SĂ©paration I » ________________________________________________________________________ Marcel Danesi soutient que dans l’ordre des significations il reste toujours des choses manquantes Ă  cause desquelles on ne peut pas avoir l’image globale de la rĂ©alitĂ©. « Lewis Carroll invented his own language (“jabberwocly”) to show that the English language, as constituted, does not tell all there is to tell about reality. » (32) Par extrapolation, j’ai Ă©laborĂ© des pseudo-dĂ©finitions de syndromes contemporains pour illustrer les maladies mĂ©taphoriques et pour signaler le flux fragmentĂ© la pensĂ©e du monde actuel. ________________________________________________________________________ “Amygdalohippocampectomy is a form of human hysteria, called also Amafufunyane in Ngumi languages. During this period a person is invaded by Santa Claus Syndrome that in social occidental psychology is called Altruism.” (Oxford Dictionary of Psychology)
  • 49. 49 Conclusion provisoire. La photographie des syndromes contemporains ne constitue pas un prĂ©texte. Parler de syndromes contemporains pour exprimer les enjeux visuels contemporains (par le biais de la dĂ©construction et de la reconstruction esthĂ©tique de l’information visuelle et textuelle provenues en principal d’Internet) reprĂ©sente le cĂ´tĂ© subversif du projet. Inventer des procĂ©dĂ©s artistiques qui peuvent soutenir un discours Ă©ducationnel critique, c’est le but du projet dans son ensemble.
  • 50. 50 4. La photographie de la surveillance complice Jean Baudrillard soutient de façon apocalyptique que le système de prĂ©sentation de l’information, basĂ© sur la sĂ©duction, l’imitation et la simulation de la rĂ©alitĂ©, finit par neutraliser tout finalitĂ©. “Happiness” ________________________________________________________________________ De mĂŞme manière apocalyptique, il affirme que toute production de la connaissance est contrĂ´lĂ©e. Dans ces circonstances, la vĂ©ritĂ© ne survivrait qu’au niveau des apparences. Ce qui reste de toute intentionnalitĂ©, c’est l’apparence des choses.
  • 51. 51 « The more one nears truth, the more it retreats towards the omega point. » (Baudrillard 73) La vĂ©ritĂ© prend la forme un objet non-identifiable Ă  mille aspects. “Omega point” ________________________________________________________________________ ProcĂ©dĂ©s techniques utilisĂ©s: Note : Ă€ cette Ă©tape, j’ai utilisĂ© des images des sites Internet Yahoo. Com, Flickr et quelques-unes de mes des photos produites pendant cette pĂ©riode. Ici, un seul procĂ©dĂ© artistique a Ă©tĂ© employĂ©. Dans un premier temps, j’ai collectĂ© des images (qui reprĂ©sentent des constantes visuelles de tout ce que j’ai dĂ©veloppĂ© jusqu’à prĂ©sent). L’inventaire de cette collection est reprĂ©sentĂ© par des photos telles que : une image de la guerre d’Iraq, une image du
  • 52. 52 cimetière Mont Royal, MontrĂ©al, une image manipulĂ© du Tibet, qui imite les photos d’Edweard Muybridge et Harold Edgerton, une image reprĂ©sentant une inauguration d’un navire militaire aux États-Unis, une image de la guerre d’Iraq en contre jour, des images d’objets volants non identifiĂ©s, etc. Dans un deuxième temps, j’ai fait de petites retouches chromatiques sur les photos pour obtenir des surfaces blanches. Finalement, sur une partie blanche de chaque photo, j’ai introduit un objet volant non identifiĂ©. Pour rĂ©aliser cette partie du projet, j’ai utilisĂ© le logiciel Word Windows. ________________________________________________________________________ « Faire taire, faire croire et faire oublier »
  • 53. 53 RĂ©ponse esthĂ©tique I Depuis toujours, la connaissance de la vĂ©ritĂ© a Ă©tĂ© basĂ©e sur l’apparence des choses. Jean Baudrillard a raison d’affirmer que le système des procĂ©dĂ©s qui servent Ă  la construction de la vĂ©ritĂ© est totalement contrĂ´lĂ©. On contrĂ´le notre modalitĂ© de penser Ă  tous les niveaux possibles, mais d’une façon confuse, distorsionĂ©e. Le contrĂ´le le plus fort est celui exercĂ© par notre langue. Tous les conditionnements de notre vie sont semĂ©s dans notre langue. Mircea Eliade affirmait que nous vivons dans notre langue. C’est dans la langue que nous installons nos barrières de pensĂ©e – nos stĂ©rĂ©otypes, nos dĂ©sirs impossibles, nos prĂ©jugĂ©s. Alors, on veut tout savoir, on surveille tout jusqu’au paroxysme et on donne une impression de transparence totale aux choses. Jaques Attali nommait ceci « faire taire, faire croire et faire oublier ». La marque la plus importante de notre système de surveillance est l’ubiquitĂ©, dans le sens qu’il est prĂ©sent partout et nulle part. Jean Guinel dans son article « Internet et les services secrets », en faisant rĂ©fĂ©rence Ă  ce phĂ©nomène obsessif et omniprĂ©sent, remarque : « On dit avec beaucoup d’insistance que le grand service technique de renseignements amĂ©ricain, la National Security Agency, dispose de moyens permettant de surveiller presque tout ce se qui se passe sur Internet. MĂŞme s’il y a une part d’exagĂ©ration, telle est la rĂ©alitĂ©. » (Media – DĂ©fense 181) Ă€ cette Ă©tape du projet, j’ai mĂ©langĂ© une vision tragique avec une vision humoristique et ironique, mais j’ai gardĂ© en mĂŞme temps la tendance d’installer une marque de sĂ©duction et d’ambiguĂŻtĂ©. J’ai mis aussi l’accent sur l’idĂ©e de l’apparence des choses. C’est la raison pour laquelle l’imaginaire de cette phase de travail est interprĂ©tĂ©
  • 54. 54 de loin, de proche, du cĂ´tĂ© privĂ© ou du cĂ´tĂ© public. Dans ma vision, ce sont les contrastes en connexion (que nous sommes capables de voir) qui nous aident Ă  comprendre le monde. Dans le but d’attirer l’attention du « narrateur qui regarde » par le biais de situations bizarres, j’ai introduit dans l’imaginaire banal de tous les jours des objets non identifiables qui, sur la toile WEB ont une vie bien rĂ©elle. ________________________________________________________________________ « L’Apocalypse du banal »
  • 55. 55 « Narrateur qui regarde » ________________________________________________________________________ Conclusion provisoire. La photographie de la surveillance complice ne constitue pas un prĂ©texte. Parler de la surveillance comme forme de penser (pour exprimer les enjeux visuels contemporains par le biais de la dĂ©construction et de la reconstruction esthĂ©tique de l’information visuelle et textuelle provenues en principal d’Internet), reprĂ©sente le cĂ´tĂ© subversif du projet. Inventer des procĂ©dĂ©s artistiques qui peuvent soutenir un discours Ă©ducationnel critique, c’est le but du projet dans son ensemble.
  • 56. 56 5. La photographie d’un monde qui s’endort involontairement En essayant de nous sauver de l’Oubli, nous avons divisĂ© la vĂ©ritĂ© du monde en images et textes et nous l’avons mise en ligne dans un rĂ©seau global. Mais, contrairement Ă  l’inquiĂ©tude de Nietzsche et Ă  celle de Baudelaire, nous avons mis peu d’âme pour ne pas mourir de trop de vĂ©ritĂ©. En Ă©change, c’est la fatigue compassionnelle qui nous maintiendra emprisonnĂ©s dans l’Oubli. ________________________________________________________________________________________________ « Fatigue compassionnelle I»
  • 57. 57 ProcĂ©dĂ©s techniques utilisĂ©s: Note : Ă€ cette dernière Ă©tape, j’ai utilisĂ© des images des sites Internet Yahoo. Com, Flickr et quelques-unes de mes des photos produites pendant cette pĂ©riode. J’ai appliquĂ© un seul procĂ©dĂ© artistique. Premièrement, j’ai collectĂ© des images qui reprĂ©sentaient des personnes endormies et anonymes. Je n’ai fait aucune intervention sur ces photos. Après, j’ai placĂ© un miroir Ă  l’horizontale devant l’écran de mon ordinateur. Au milieu du miroir, j’ai placĂ© une petite chandelle et j’ai pris une photo de chaque image reflĂ©tĂ©e dans le miroir. ________________________________________________________________________ « Fatigue compassionnelle II »
  • 58. 58 « Fatigue compassionnelle III » ________________________________________________________________________ RĂ©ponse esthĂ©tique : Les images obtenues donnent l’impression que les images photographiĂ©es se reflètent et qu’elles sont intĂ©grĂ©es dans le monde du miroir. La chandelle illumine un Ă©tat d’inconscience douloureux. Elle est le tĂ©moin d’un signal d’alarme semblable au message de Goya sur le sommeil de la raison. J’ai voulu donner cet effet de reflet pour suggĂ©rer un Ă©tat de sommeil maladif. DominĂ© par une fatigue compassionnelle (indiffĂ©rence aux besoins des autres), tout le monde est tombĂ© dans un sommeil lourd, abyssal, sans rĂŞves et conscience. Personne n’est Ă  la maison. Chacun s’est endormi Ă  son lieu de travail.
  • 59. 59 « Fatigue compassionnelle IV » ________________________________________________________________________ Trop de vĂ©ritĂ© sans âme nous fait tomber dans le sommeil de l’indiffĂ©rence et de l’irresponsabilitĂ© envers notre sens sur la Terre.
  • 60. 60 Conclusion METAPHOTOHISTOIRE - LES ALLÉGORIES DU REGARD comme stratĂ©gie d’exploration artistique et d’analyse visuelle et Ă©ducationnelle ne constitue pas un prĂ©texte. 1. Parler de la Route de la Soie comme symbole d’un monde contemporain qui devient fictionnel, des relations inattendues qui existent entre les choses, des maladies mĂ©taphoriques, de surveillance linguistique et de fatigue compassionnelle pour exprimer les enjeux visuels contemporains (par le biais de la dĂ©construction et de la reconstruction esthĂ©tique de l’information visuelle et textuelle provenue en principal d’Internet) reprĂ©sente le cĂ´tĂ© subversif du projet. En fait, ce projet est une plaidoirie pour rĂ©apprendre Ă  voir, ce qui signifie Ă  rĂ©inventer l’outil de la rĂ©flexion pour pouvoir Ă©chapper Ă  l’emprisonnement de la fiction crĂ©Ă©e chaque jour. RĂ©apprendre Ă  voir signifie ne pas accepter de regarder le monde seulement d’un cĂ´tĂ© parce que l’autre cĂ´tĂ© risque de rester toujours obscur. Mais comment apprendre Ă  identifier l’autre cotĂ© d’un rĂ©seau omniprĂ©sent qu’on appelle WEB ? On devrait peut-ĂŞtre commencer par apprendre Ă  accepter qu’on peut se tromper dans notre processus de construction et d’interprĂ©tation de la connaissance. Le simple fait de regarder une image ne signifie ni voir, ni comprendre, ni croire.
  • 61. 61 2. Inventer des procĂ©dĂ©s artistiques qui peuvent soutenir un discours Ă©ducationnel critique, c’était le but du projet dans son ensemble. Produire une image signifie, dès le dĂ©but, une manipulation qui implique plusieurs Ă©tapes. Il s’agit de la manipulation de la lumière - la source de la vie et de la connaissance. Parler de la manipulation de la photographie doit commencer par l’affirmation de cette vĂ©ritĂ©. La photographie ne reprĂ©sente pas la vĂ©ritĂ© absolue. Aujourd’hui, la version altĂ©rĂ©e de l’image est devenue la nouvelle rĂ©alitĂ©. Photographier ne signifie ni voir, ni comprendre, ni croire. Premièrement il faut dĂ©cortiquer le mĂ©canisme de l’erreur pour mieux le comprendre. Donc, accepter qu’on peut se tromper pourrait reprĂ©senter un point de dĂ©part dans l’élaboration d’une stratĂ©gie d’éducation artistique pour le niveau post-secondaire. Les principes de base qui rĂ©gissent cette stratĂ©gie sont simples : a. Mettre l’accent sur une Ă©ducation visuelle critique Ă  long terme, basĂ©e sur des valeurs universelles comme le respect de l’autre, le respect de soi-mĂŞme et le respect dans les interactions avec les autres. b. Mettre l’accent sur le dĂ©veloppement des habilitĂ©s perceptuelles pour pouvoir faire la distinction entre ce qui est authentique et ce qui est faux. c. Penser les choses dans le sens de l’écologie du rĂ©el et du visuel en mĂŞme temps; cette attitude peut contribuer au dĂ©veloppement d’un esprit averti concernant l’impact du visuel sur tout ce que l’homme pense et entreprend.
  • 62. 62 3. Remettre en question la validitĂ© de ce type de processus de crĂ©ation et de recherche constitue un point de dĂ©part et une ouverture pour d’autres prochaines recherches. Ma recherche ne reprĂ©sente qu’une tentative d’exploration visuelle critique très modeste et imparfaite de ce qu’on a nommĂ© « mĂ©canisme virtuel de construction de la connaissance ». J’ai pensĂ© Ă  travers des images enracinĂ©es dans ma mĂ©moire. J’ai pensĂ© Ă  travers des images enracinĂ©es dans notre mĂ©moire. J’ai pensĂ© Ă  travers des images photographiĂ©es. J’ai pensĂ© Ă  travers des images virtuelles. J’ai pensĂ© Ă  travers des images virtuelles que j’ai photographiĂ©es, manipulĂ©es et interprĂ©tĂ©es en plusieurs Ă©tapes pour prouver la facilitĂ© de ce processus. On a crĂ©Ă© l’outil du dĂ©sir, ce qui veut dire qu’on a crĂ©Ă© la photographie pour ĂŞtre ensuite crĂ©Ă©s par la photographie. On a commencĂ© par regarder avec fascination le monde et on a fini par ĂŞtre presque aveugles. Alors, mon projet de recherche n’est qu’une mise en garde pour qu’on ne devienne pas totalement aveugles. J’ai dit des mensonges pour tenter d’illustrer la vĂ©ritĂ© et j’ai dit des vĂ©ritĂ©s pour exprimer des mensonges. J’ai voyagĂ© par intuition parmi les effets du PassĂ© et les causes de l’Avenir.
  • 63. 63 Bibliographie Baldock, John, The Essence of Sufism, Toronto, Capella, 2004. Baudrillard, Jean, De la sĂ©duction, Paris, Éditions GalilĂ©e, 1979. Baudrillard, Jean, The ecstasy of Communication, N.Y. Semiotext (e), 1988. Berger, Arthur Asa, Media & Society-A Critical Perspective, Rowman & Littlefield Publishers Inc., 2007. Boulnois, Luce, La route de la Soie, Genève, Éditions OLIZANE, 1992. Borela, Jean, Le Mystère Du Signe, Paris, Éditions Maisonneuve & Larose, 1989. Brisson, Luc, « Les Socratiques », in Philosophie grecque, Paris, PUF, 1997. Bronwen Martin & Ringham Feluzitas, Key Terms In Semiotics, N.Y., Continuum, 2006. Calvino, Italo, Invisible Cities, N.Y., Harcourt Brace & Company, 1974. Campbel, Joseph, Myths To Live BY, N.Y., Penguin Book, 1966. Chomsky, Noam, Le langage et la pensĂ©e, Paris, Payot, 1970. Cole, Ardra L. & Gary J. Knowles, Lives in Context, Oxford, ALTAMIRA Press, 2001. Danesi, Marcel, Understanding Media Semiotics, N.Y., Oxford University Press, 2002. Danesi, Marcel, Sign, Thought & Culture, Toronto, Canadian Scholars’ Press, 1998. Derrida, Jacques. "Structure, Sign and Play in the Discourse of the Human Sciences" Writing and Difference, Chicago, University Chicago Press, 1978. Deshimaru, Taisen, Zen, Paris, Albin Michel, 1993. DITL/ Dictionnaire International des Termes LittĂ©raires, http://www.ditl.info/, consultĂ© le 29 avril 2008. Dictionnaire de l'AcadĂ©mie française, neuvième Ă©dition, Version informatisĂ©e, http://atilf.atilf.fr/academie9.htm, consultĂ© le 28 mai 2008
  • 64. 64 Dictionnaire de la langue française lexis, Paris, Larousse, 1994 Eco, Umberto, Les Limites de l’interprĂ©tation, Paris, Grasset, 1992. Eliade, Mircea, Aspects du Mythe, Paris, Gallimard, 1963. Finkelkraut, Alain, La dĂ©faite de la pensĂ©e, Paris, Gallimard, 1997. Fuery Patrick & Kelli Fuery, Visual Cultures And Critical Theory, London, Arnold, 2003. Genette, GĂ©rard, Palimpsestes, La littĂ©rature au second degrĂ©, Paris, Éditions du Seuil, 1982. Gross, Larry, John Stuart Katz & Jay Ruby, Image Ethics In Digital Age, Minneapolis, University Of Minnesota Press, 2003. Hutcheon, Linda, A Poetics of Postmodernism: History, Theory, Fiction, N.Y., 1988. Jung, C.G., L’Âme et la vie, Paris, BUCHET/CASTEL, 2006. Kress, Gunter and Theo van Leeuwen, Reading Images - The Grammar of Visual Design, London, Routledge, 2006. Krishnamurti, Jidu, Le sens du bonheur, Paris, Stock, 2006. Kristeva, Julia, Desire in Language: A Semiotic Approach to Literature and Art, N. Y., Columbia University Press, 1980. Lachapelle, Richard, “Comparing the Aesthetic Responses of Expert and Non-Expert Viewers”, Canadian Review of Art Education 26.1 (1999): 5-21. Lester, Paul Martin and Susan Dente Ross, Images That Injure, Westport, Preaeger Publishers, 2003. Levenson, Claude B., Tibet, un peuple en sursis, Lyon, Actes Sud/ Centre D’Histoire de la RĂ©sistance et de la DĂ©portation, 2000.
  • 65. 65 Lymburner, Julie, “Interwoven Threads, Theory, Practice, and Research Coming Together”, Vancouver: Pacific Educational Press. 3 (2004): 75-88. Manguel, Alberto, Une histoire de la lecture, Paris, Édition Acte Sud, 1998. McLuhan, Marshall, Understanding Media, N.Y., Mentor Book, 1964. Newton, H. Julianne, The Burden Of Visual Truth, London, Lawrence Erlbaum Associates Inc., 2001. “Photography’s Storied History “, N.Y., U.S. News & World Report July 9/July 16 2001: 48-49. Piaget, Jean, OĂą va l’éducation ? , Paris, DenoĂ«l/ Gonthier, 1972. Poole, Steven, “UNSPAK” [How Words Become Weapons, How Weapons Become A Message, And How That Message Becomes Realty], N.Y., Grove Press, 2006. Manghani, Sunil, Arthur Piper & Jon Simons, Images : A reader, London, Sage Publications, 2006. Fondation pour les Études de DĂ©fense, Les manipulations de l’image et du son, Rencontres Internationales Media - DĂ©fense ’95- Imagina, Paris, Hachete, 1996. Rose, Gillian, Visual Methodologies, London, Sage Publication, 2007. Sklaroff, Sara, “The Timelles Moment”, N.Y. U.S. News & Worl Report, July 9/ July 16 2001: 24-25. Sontag, Susan, On Photography, N.Y., Penguin Books, 1977. The New Gate Keepers, N.Y., Columbia University, 2003. Wheeler, Thomas H., Phototruth or Photofiction, New Jersey, LEA, 2002. Watrin, Ronda, “Art as Research”, Canadian Review of Art Education, 26.2 (1999): 92- 100.
  • 66. 66 Vivian, John, The Media of Mass Communication, Boston, Allyn & Bacon, 1995.
  • 67. 67 Annexe Dictionnaire explicatif de termes clefs Je comprends l’utilitĂ© de ce petit dictionnaire dans le sens qu’il sert de guide conceptuel et de lecture de ce travail. Ainsi, chaque concept employĂ© constitue un indice de l’aspect interne de ma recherche, c’est-Ă -dire de la problĂ©matique abordĂ©e et des procĂ©dĂ©s de travail utilisĂ©s. absence. Cette notion est dĂ©finie par opposition au terme « prĂ©sence ». L’absence dĂ©note parfois une existence « in absentia », ce qui renvoie Ă  l’idĂ©e d’existence virtuelle. Par exemple, le terme « la mort » implique l’absence de la vie. Le concept « la vie » va ĂŞtre prĂ©sent « in absentia » quand on fait rĂ©fĂ©rence Ă  la mort. achronie. Ce terme met l’accent sur la nature temporale des structures logico- sĂ©mantiques. Une histoire est achronique et non-achronique en mĂŞme temps. Son niveau le plus profond implique un ordre/ dĂ©sordre social. Ses relations intĂ©rieures et sa dynamique ne constituent pas de sujets sous le pouvoir du temps. allusion. L’Évocation d’une chose sans l’exprimer directement par des mots ou par des images. anachronisme. Le fait de placer un Ă©vĂ©nement (ou une scène, une personne, un objet) dans une autre pĂ©riode historique que celle oĂą l’évĂ©nement a rĂ©ellement eu lieu Autrement dit, l’anachronisme consiste Ă  faire intentionnellement des erreurs sur certaines dates. Le terme dĂ©signe aussi toute manipulation et restructuration du temps ; il s’agit de diffĂ©rences en ce qui concerne l’ordre chronologique des Ă©vĂ©nements et l’ordre dont on les raconte.
  • 68. 68 anamnĂ©sis historiographique. Signifie l’effort de rĂ©vĂ©ler la mĂ©moire des Ă©vĂ©nements en dehors du mouvement historique. anticipation. Dans le dĂ©roulement narratif on insère une scène qui va avoir lieu plus tard. chaĂ®ne connotative. EnchaĂ®nement de significations. dĂ©brayage. Dans le mĂ©talangage sĂ©miotique, ce terme signifie le fait de glisser de l’histoire Ă©noncĂ©e au dĂ©but du discours Ă  une autre histoire dont le temps, l’espace et le sens sont diffĂ©rents. diaphore visuelle. RĂ©pĂ©tition d’une image dĂ©jĂ  utilisĂ©e, dans le but de lui donner une nouvelle nuance de signification. double lecture. PossibilitĂ© de faire plusieurs lectures simultanĂ©ment. Ă©quivoque. Par une modification, graphique ou autre, on introduit, dans une phrase qui avait dĂ©jĂ  un sens complet, un deuxième sens, distinct et complet lui aussi. extĂ©nuation. Substituer Ă  la vĂ©ritable idĂ©e de la chose dont on parle, une idĂ©e du mĂŞme genre, mais moins forte. hyperbole. Augmenter ou diminuer excessivement la vĂ©ritĂ© des choses. hypertextualitĂ©. Système de connexion d’images et de textes sur Internet. incohĂ©rence. MĂ©taphore qui rĂ©unit deux images incompatibles. inventaire. J’envisage l’inventaire comme l’action de saisir les actes irrĂ©parables de l’homme. ironie. Il s’agit d’un procĂ©dĂ© rhĂ©torique par lequel on essaie d’altĂ©rer un message afin de le remettre en question. L’utilisation d’un mot ou d’une image pour crĂ©er un sens diffĂ©rent ou contraire au sens acceptĂ©e littĂ©ralement. isomorphisme. IdentitĂ© formelle entre deux ou plusieurs messages.
  • 69. 69 jeu de mots. On joue sur le signifiant ou sur le signifiĂ©. l’Effet Othello. Dans la sĂ©miotique des medias, l’effet d’Othello est dĂ©fini comme l’action de mentir pour renforcer la vĂ©ritĂ©. message ouvert. Message qui permet plus d’une interprĂ©tation. mĂ©tabole visuelle. Accumulation de plusieurs images pour exprimer la mĂŞme idĂ©e. mĂ©tonymie. ProcĂ©dĂ© qui consiste Ă  dĂ©signer une chose par une autre qui a un rapport logique facilement identifiable avec la première. mystification. Tromper afin d’offrir une image sĂ©duisante de la rĂ©alitĂ©. pensĂ©e sophistique. Raisonnement faux qui prĂ©sente une apparente vĂ©ritĂ©. pseudo-diachronie. PrĂ©sentation en ordre historique alĂ©atoire mais qui semble ĂŞtre l’ordre rĂ©el. pseudo-simulation. Simulation Ă©vidente, qui ne se cache pas. rhĂ©torique. MĂ©thode d’expression de la pensĂ©e par l’utilisation de l’allĂ©gorie, de la mĂ©taphore, de l’inversion, de l’hyperbole et d’autres procĂ©dĂ©s. Noam Chomsky, dans « Le langage et la pensĂ©e » affirme que « Le langage humain peut ĂŞtre utilisĂ© pour informer ou pour tromper, pour clarifier ou pour jouer. » sĂ©duction. Action qui vise Ă  attirer l’attention d’une façon irrĂ©sistible. sĂ©riation. Classement par sĂ©ries. signification. Un message peut avoir plus d’un sens ou plusieurs messages peuvent avoir la mĂŞme signification. simulacre. Image de quelque chose qui n’existe pas. La thĂ©orie sĂ©miotique considère que la production des simulacres est la modalitĂ© par laquelle l’homme essaie de donner un sens au monde.
  • 70. 70 stĂ©rĂ©otype. Simplification extrĂŞme, inadĂ©quate d’un message textuel ou visuel. Roland Barthes, dans Le plaisir du texte dĂ©finit le stĂ©rĂ©otype comme une « impossibilitĂ© nausĂ©euse (…) ; c’est l’interminable et l’intenable, c’est un principe d’instabilitĂ© absolue, qui ne respecte rien. » stĂ©nographie. CapacitĂ© Ă  communiquer de manière Ă  masquer l’existence mĂŞme de la communication. syllepse de sens. ProcĂ©dĂ© par lequel un message est employĂ© Ă  la fois au sens propre et au sens figurĂ©. synesthĂ©sie. Évocation d’un sens par un autre. synecdoque. Utilisation d’une partie pour une chose entière. synchronicitĂ©. DĂ©roulement de plusieurs Ă©vĂ©nements en mĂŞme temps. truisme. On explicite des contenus sous-entendus qui Ă©taient dĂ©jĂ  parfaitement Ă©vidents.