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Le site du constructeur Bombardier à Villeneuve va bientôt livrer aux CFF les futurs Intercity
à deux étages. Au total une soixantaine de rames, composées de 436 wagons de nouvelle
génération, seront assemblés… notamment dans le Chablais vaudois, au bout du lac Léman.
Pour tester ces monstres de technologie, Bombardier vient d’y créer un réseau ferroviaire
de 2,6 km et achèvera d’ici la fin de l’année la construction d’une halle longue de 222 m.
Une halle géante pour assembler
les Intercity de demain
Site de Bombardier Transport à Villeneuve réaménagé
Pour être en mesure de répondre à la «commande du siècle» des CFF et répondre à ce défi
technologique, Bombardier a dû agrandir et remodeler son site industriel au bout du lac
Léman. Ces travaux spécifiques, lancés en 2013, doivent s’achever fin décembre. Le tout a
dû être réalisé alors même que le site industriel n’a jamais cessé ses activités.
Photos:Jean-A.Luque
Par Jean-A. Luque
Le compte à rebours est lancé. Les CFF
veulent mettre en service leurs nouveaux
Intercity TWINDEXX Swiss Express dès
fin 2016. Ce ne sont pas moins de 59
rames, composées de 436 voitures entiè-
rement climatisées qui comptent plus de
36 000 sièges, que les CFF ont commandé
au fabriquant Bombardier Transport. La
valeur totale de cette opération, considé-
rée par beaucoup comme le contrat du
siècle, s’élève à 1,8 milliards de francs.
Un contrat qui comprend également des
options pour plus de 100 trains addition-
nels. Et c’est notamment à Villeneuve
(VD) que Bombardier va assembler et tes-
ter ces trains à deux étages TWINDEXX.
Des trains qui feront jusqu’à 400 m de
long ! Ces trains nouvelle génération, plus
économes en énergie de 10 %, seront ca-
pables d’atteindre 230 km/h. Mais sur-
Le site de Villeneuve du constructeur Bombardier. En jaune, l’implantation de la nouvelle halle de 222 m pour l’assem-
blage des compositions TWINDEXX. En rouge, le nouveau réseau ferroviaire de 2,6 km. Mise en service: début 2015.
Point fort
2. 8 batimag N° 12, jeudi 18 décembre 2014 N° 12, jeudi 18 décembre 2014 batimag 9
Le sous-sol de la région de Villeneuve présente la particularité
d’être composé d’alluvions, le terrain y est particulièrement
meuble. Aussi, les fondations ont été un des aspects critiques du
travail des intervenants. Des sondages ont révélé que sous une
partie de la halle, il y a des risques de liquéfaction potentielle.
également créé un réseau de 2,6 km de
voies ferrées extérieures avec notamment
une voie d’essai électrifiée de 400 m et
deux voies de stockage de 450 m chacune.
Le tout a dû être réalisé alors même que
le site industriel n’a jamais cessé ses ac-
tivités.»
La région de Villeneuve, dans le Chablais,
présente la particularité d’être à l’embou-
chure de la vallée du Rhône. Le terrain
composé d’alluvions y est particulière-
ment meuble. «Les fondations, confirme
Danilo Marra, ont été un des aspects cri-
tiques de notre travail. Il y a bien sûr la
nature du terrain dont nous avons dû te-
nir compte, mais aussi le fait que dans
M. Danilo Marra, ingénieur civil chez
ESM-Hagin, chef de projet en charge de
la direction des travaux.
« Dans cette zone la nappe
phréatique est très proche de la
surface. Il a donc fallu imaginer et
mettre en place une gestion des eaux
particulièrement efficace.
»
cette zone la nappe phréatique est très
proche de la surface. Des sondages ont
montré que sous une partie de la halle, il
y a des risques de liquéfaction poten-
tielle.»
Vases communicants
Sur ce terrain plat, il a donc fallu imagi-
ner et mettre en place une gestion des
eaux particulièrement efficace. Pour cela,
il a été nécessaire de creuser 3 bassins de
rétention reliés entre eux de manière à
créer un système de vases communicants,
ainsi que tout un système de tranchées
drainantes et d’infiltration. L’idée est de
stocker le plus possible grâce aux bassins.
En cas de trop plein, le surplus peut se
déverser dans les cours d’eau du Pissot
au nord et de l’Eau froide au sud.
«Pour faire face à ce problème de nappe
phréatique proche de la surface, nous
avons également décidé de surélever le
plus possible la halle d’assemblage, ajoute
Danilo Marra. Compte tenu de la pente
maximale pour faire circuler les rames et
rejoindre le raccordement des voies fer-
rées extérieures, nous avons pu gagner 40
cm de hauteur. Au printemps dernier,
nous avons dû faire face à de fortes pluies.
Cela a permis de tester notre système et
de constater qu’il fonctionne très bien.»
ESM-Hagin ingénieurs SA, avec ESM-Sar-
tout, grâce à un ingénieux système de
compensation du roulis, ils pourront né-
gocier les courbes 15 % plus rapidement
tout en maximisant le confort des passa-
gers. Pour être en mesure de répondre à
ce défi technologique de pointe et à ces
dimensions hors normes, la société a dû
agrandir et remodeler son site industriel
au bout du lac Léman. Ces travaux spéci-
fiques, lancés en 2013, doivent s’achever
fin décembre. «L’élément le plus visible
du chantier en cours est la nouvelle halle
d’assemblage, explique Danilo Marra, in-
génieur civil chez ESM-Hagin, chef de
projet en charge de la direction des tra-
vaux. Cette halle de 222 m de long sur 27
de large et haute de 13 m sera mise en ser-
vice dès janvier 2015. Mais cette nouvelle
halle s’inscrit dans un réaménagement
plus global du site. En effet, nous avons
rasin ingénieurs SA et ESM-ingénieurs as-
sociés SA, forme ESM-Group qui compte
une quarantaine de collaborateurs au to-
tal. ESM-Hagin a pu faire valoir cette ex-
pertise hydraulique et environnementale
de manière plus large. En effet, la société
s’est vue mandaté entre temps par les au-
torités de Villeneuve pour élaborer un
concept général de gestion des eaux de la
zone industrielle de la commune. Un
concept qui à n’en pas douter va s’inspi-
rer du chantier Bombardier.
Forêt de pieux à refoulement
Une fois le problème de gestion des eaux
réglé, il a fallu s’attaquer aux fondations
Point fort
3. 10 batimag N° 12, jeudi 18 décembre 2014 N° 12, jeudi 18 décembre 2014 batimag 11
même de la halle. Pas moins de 343 pieux
à refoulement ont été plantés. D’un dia-
mètre de 53 cm, la majorité des pieux fait
20 m de profondeur. 140 d’entre eux sont
même nettement plus longs: 26 m. Au to-
tal, cette forêt de pieux de 7300 m a né-
cessité 100 t d’armatures. Pour le radier
et les fosses de la halle, 280 t d’acier ont
été nécessaires et 2800 m3
de béton ont
été coulés.
Deux ponts roulants
La halle métallique en elle-même est as-
sez dépouillée à l’intérieur. Elle se com-
pose de trois voies ferrées. Une toute
simple pour le stockage. Les deux autres
ont une fosse de 1,6 m de profondeur et
longue de 210 m pour l’inspection des
trains. L’une permettra de faire du testing
en statique. L’autre sera électrifiée à 15 kV
pour permettre le contrôle des CFF à la
réception du train. Un grillage de protec-
tion et un système de sécurité sera égale-
ment installé entre ces deux voies.
Deux ponts roulants seront intégrés dans
la structure métallique. Un seul niveau de
locaux techniques est prévu pour l’ins-
tant. Mais, tout est d’ores et déjà prévu
pour une extension possible de deux
étages supplémentaires.
Pour le radier et les fosses de la halle, 280 t
d’acier ont été nécessaires et 2800 m3
de
béton ont été coulés. Pas moins de 343
pieux à refoulement ont été plantés. La
majorité des pieux fait 20 m de profondeur.
Point fort
4. 12 batimag N° 12, jeudi 18 décembre 2014 N° 12, jeudi 18 décembre 2014 batimag 13
Bombardier est une multinationale avec
des représentations dans de nombreux
pays. Le projet TWINDEXX est la réunion
de nombreux savoirs faire éparpillés en
Suisse et en Europe. La gestion propre du
projet est prise en charge par le site de
Bombardier de Zurich. L’usine de Ville-
neuve - seul site de production ferroviaire
dans l’ouest de la Suisse – est elle respon-
sable de la production des véhicules, en
collaboration avec le site de Görlitz, qui
se chargera en outre du processus d’ingé-
nierie. Le site de Winterthur, quant à lui,
se chargera de la conception des bogies,
tandis que leur production aura lieu à Sie-
gen, en Allemagne. Le site de Västerås, en
Suède, est lui chargé de produire le sys-
tème de traction axé sur les très efficaces
moteurs à aimant permanent.
Gestion sismique pragmatique
Au stade du chantier, il a été envisagé un
temps qu’un bureau français gère la
construction de la halle. Une démarche
intéressante qui a toutefois mis en avant
une philosophie de travail différente entre
les systèmes français et helvétique. «Cela
a notamment été le cas dans la gestion du
risque sismique, explique Arnaud Wies-
mann du bureau AW Ingénieurs-Conseils
SA qui a travaillé en appui au maître de
l’ouvrage. En France, historiquement, no-
tamment parce qu’ils ont construit énor-
mément de centrales nucléaires, ils
partent du principe qu’une construction
industrielle doit résister à un tremblement
de terre et être capable de rester en ser-
vice sans discontinuer. En Suisse, nous
sommes beaucoup plus pragmatiques. On
accepte qu’une halle industrielle se dé-
forme et soit hors service pendant un
temps. La seule priorité, c’est de sauver
les personnes qui s’y trouvent, donc
qu’elle ne s’effondre pas. Et cela fait tota-
lement sens. Il ne s’agit pas d’un hôpital
qui doit pouvoir rester fonctionnel.» On
s’en doute ces deux approches diver-
gentes entre la France et la Suisse se tra-
duisent également par des calculs de fon-
dations totalement différents. Des coûts
aussi… Question coût justement, les tra-
vaux entrepris par Bombardier sur ce site
de Villeneuve sont estimés à 16 millions.
Dix pour la halle et la charpente. Six pour
les extérieurs qui comprennent les voies
ferrées et aiguillages, la gestion des eaux
claires, et l’agrandissement des parkings.
L’usine de Villeneuve est le seul site de
production ferroviaire dans l’ouest de la
Suisse. Le site dispose de l’expertise néces-
saire pour amener la technologie ferroviaire
suisse à son plus haut niveau.
Point fort
5. 14 batimag N° 12, jeudi 18 décembre 2014 N° 12, jeudi 18 décembre 2014 batimag 15
lES INTERVENANTS
n Direction de projet
AW Ingénieurs-Conseils SA,
1610 Oron-la-Ville
n Architecte
UNI Architectes Sàrl,
1025 Saint-Sulpice
n Ingénieur civil
ESM-Hagin Ingénieurs SA,
1802 Corseaux
n Ingénieur 15 kV et électricité
ferroviaire
Furrer + Frey SA, 1820 Monteux
n Pieux de fondation
Implenia Suisse SA,
1000 Lausanne
n Génie civil, béton armé
Gasser construction génie
civil SA, 1095 Lutry
n Maçonnerie
Raymond Durgniat Sàrl,
1844 Villeneuve
n Génie ferroviaire
Laurent Membrez SA,
1123 Aclens
n Charpente métallique
Sottas SA, 1630 Bulle
Berisha SA, 1852 Roche
HBF constructions métalliques SA,
1012 Lausanne
n Electricité basse tension
MZ Mauerhofer + Zuber SA,
1020 Renens
n Portes industrielles
Portes Brodard SA,
1070 Puidoux
n Mécanique, montage
DP électro-mécanique,
1847 Rennaz
n Bureaux provisoires
Miauton SA,
1844 Villeneuve
Point fort
6. N° 11, jeudi 27 novembre 2014 batimag 17 16 batimag N° 11, jeudi 27 novembre 2014
Les 59 nouveaux TWINDEXX Swiss Express commandés par les CFF montrent la voie menant
vers un transport régional rapide et confortable d’un nouveau niveau. Le système FLEXX
Tronic WAKO est l’un des points forts techniques du train TWINDEXX. Il compense le mou-
vement de roulis naturel des caisses pendant la conduite, ce qui améliore le confort des
passagers tout en permettant au train de prendre les virages extrêmement rapidement.
TWINDEXX Swiss Express un nouveau
niveau de vitesse et de confort
Bombardier: une expertise en matière de grande vitesse
Les 59 rames commandées par les
CFF sont une nouvelle génération
de trains à grande vitesse, à deux
niveaux, pourvus d’une technolo-
gie évoluée et qui roulent plus vite
sur une infrastructure existante.
Le contrat passé entre les CFF et
Bombardier vise la fourniture de
436 voitures à deux niveaux des-
tinées au service interurbain. La
transaction comprend des options
pour plus de 100 trains addition-
nels.
Formation maxi de 16 voitures
Une composition peut atteindre
des pointes de vitesse à 230 km/h.
Avec une «paire» de deux voitures
formant chaque unité de traction,
la configuration est aisément dis-
ponible en formations extensibles
de quatre à huit voitures, avec une
formation maximale de 16 voi-
tures.
Le système FLEXX Tronic WAKO
est l’un des points forts techniques
du train TWINDEXX. Il compense
le mouvement de roulis naturel
des caisses pendant la conduite,
ce qui permet au train de prendre
les virages plus rapidement.
Comparé aux autres systèmes, le
train oscillera seulement à un de-
gré très limité, ce qui permet aux
voyageurs de ne pas souffrir du
mal des transports ressenti dans
les trains à oscillement «normal».
La technologie mécatronique, qui
rassemble des composants tech-
niques éprouvés dans un même
système innovant, permet aux
trains interurbains à deux niveaux
d’augmenter leur vitesse jusqu’à
15% dans les virages, réduisant
ainsi considérablement les durées
des trajets.
Expertise reconnue dans le
monde entier
Pendant plus de deux décennies,
Bombardier a joué un rôle clé dans
la conception et la livraison de
presque tous les principaux trains
à grande vitesse européens ainsi
que d’autres projets significatifs
concernant la grande vitesse, avec
un portefeuille comprenant plus
de 20 produits dans le monde en-
tier. Bombardier a participé au dé-
veloppement des trains VHS les
plus prestigieux d’Europe, dont la
gamme ICE en Allemagne, l’ETR
500 en Italie ainsi que la nouvelle
génération de l’ETR 1000 et quatre
séries différentes du TGV en
France. Les commandes (avec un
partenaire de consortium), comme
les trains à grande vitesse AVE
S-102 pour les Chemins de fer na-
tionaux espagnols (RENFE),
montrent aussi l’évidence de la
compétence en matière de grande
vitesse de l’entreprise. Au-delà de
l’Europe, Bombardier a aussi été
impliqué dans le développement
du train pendulaire Acela Express,
fonctionnant entre Washington
D.C. et Boston aux États-Unis à une
vitesse atteignant les 240 km/h,
ainsi que dans celui du Xinshisu
(X2000) et du CRH1 en Chine.
Sourcedesillustrations:médiathèqueBombardier
Point fort