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1
e-art5 – Responsable de création
Mémoire professionnel présenté par
Cyrille HERVET
Comment revaloriser le mouvement fétichiste ?
Sous la direction de Monsieur Jean-Marie Gourlot
2013-2014
e-artsup n‘endosse pas la responsabilité du contenu développé dans ce mémoire. Il appartient à son
auteur.
2
3
Plan du mémoire
Résumé 7
Summary 10
Introduction 14
Le communautarisme par le style vestimentaire 14
Le fétichisme 15
Le fétichisme africain 16
Le fétichisme sexuel 17
Le fétichisme de la marchandise 18
Le fétichisme moderne 19
Constat 19
Objectif 20
Démarches 20
Première partie 24
Les matières 24
Le cuir 24
Le vinyle 25
Le latex 25
Le secteurprofessionnel 27
La photographie 27
Le porno-chic 28
La publicité 28
4
Le clip musical 29
Les jeux vidéos 29
Les chaussures 30
La mode 30
Les jouets érotiques 31
Les créateurs 32
Seconde partie 43
Le symbolisme 43
Description 43
Analyse 44
Birth 44
Life 47
Death 49
Conclusion 50
En résumé 52
Troisième partie 54
Hypothèses 54
Corpus 56
Questionnaires 56
Débats 57
Les 26 à 35 ans 57
Les filles entre 18 à 25 ans 58
Les garçons entre 18 à 25 ans 59
Les rencontres professionnelles 61
5
Du fétichisme hypermoderne 61
Le plaisir de la matière 67
Le fétichisme, une mode 70
Interprétation 74
Quatrième partie 78
Axes de développement 78
Réalisationen plusieurs étapes 79
Coûts 80
Planning 83
Planches tendances 83
Conclusion 87
Bibliographie 92
Annexes 98
Remerciements 111
6
7
Résumé
La génération Y se distingue par sa diversité culturelle. Elle s’exprime particulièrement
dans ses choix vestimentaires. L’intérêt pour la mode remonte au temps des rois et de
l’aristocratie, où les premiers codes apparaissent pour les vêtements mais aussi le
maquillage et les chaussures. Les tendances ont évoluées et ont créées de nombreux
mouvements et divers styles vestimentaires. Depuis le milieu du XXe siècle la mode se
diversifie et chacun peut choisir de s’habiller selon son mode de vie, son état d’esprit,
voire ses convictions. Aujourd’hui la génération Y (celle qui va nous intéresser dans ce
mémoire) n’a que l’embarras du choix. Nous pouvons déduire en fonction des
vêtements portés, certains des comportements et attitudes de cette génération. Tous les
styles sont permis, des plus normés au plus marginaux. Le fétichisme est un mouvement
esthétique qui a une très forte personnalité vestimentaire. Le terme “fétichisme” renvoie
à trois définitions. La définition des anthropologues et éthnologues du XVIIIe siècle, qui
ont employé ce terme pour parler des cultes spirituels des africains. Le dictionnaire, qui
lie le fétichisme à l’adoration obsessionnelle d’un objet ou d’une personne. Enfin la
définition psychanalytique apparut avec Alfred Binet, au XIXe siècle, qui parle pour la
première fois de fétichisme sexuel, qui sera soutenu et analysé par Freud par la suite. Le
terme se retrouve aussi chez Marx, qui développe une théorie du fétichisme de la
marchandise.
Aujourd’hui, la psychanalyse tend, chez certains professionnels, à rendre le fétichisme
plus large, dans le sens où les codes du fétichisme se retrouvent partout dans notre
société. En effet, en regardant l’évolution du vêtement, les principales matières, qui sont
employées dans la confection des tenues fétichistes, ont toutes des origines extérieures
au milieu. Le cas le plus représentatif est le cuir qui est d’abord porté par les natifs
américains, puis par les pionniers américains qui s’habillent dans un style western. Le
vinyle est lui aussi un produit dont le fétichisme a hérité, il vient des mouvements rocks
et punks des années 1970. Mais ce que toutes ses matières ont en commun, c’est le
rapport avec le corps, l’impression de seconde peau qu’elles procurent quand elles sont
portées, leur aspect brillant aussi est important. Au final, elles tendent à sublimer la
plastique humaine. Cette volonté va pouvoir s’exprimer pleinement avec le média
photographique. Ce moyen permet de créer des images uniquement cadrées par le
8
photographe sur le point intéressant le fétichiste. Il va faire grandir la communauté
fétichiste, qui va pouvoir exprimer son intérêt dans des revues. De John Willie et Gilles
Berquet, en passant par Thierry Mugler, David LaChapelle et Helmut Newton, pour
arriver à Thierry Richardson, le monde de la photographie est passé de l’érotisme
au fétichisme pour arriver aujourd’hui au porno-chic, version moderne et
omniprésente du fétichisme. En outre, les photographes seuls n’ont pas marqué le
milieu. Les modèles photographiés d’abord, puis les artistes et acteurs à partir de
l’apparition du cinéma vont imprégner le milieu de noms représentant l’essence du
fétichisme. Des personnalités telles que Daryl Hannah, Marilyn Monroe, Uma
Thurman, Britney Spears, Kylie Minogue, Lady Gaga ou Miley Cyrus ont et
continuent de marquer le milieu.
L’industrie du fétichisme se retrouve partout, à la télé, dans les jeux vidéos, dans
les publicités, en photographie. La mode est imprégnée du fétichisme. En France,
Patrice Catanzaro est une figure du fétichisme à lui seul. Ses créations variées
s’adressent au hommes et aux femmes, et ses collections ravissent toute la
communauté. Son influence permet de lancer d’autres créateurs comme
Clémentine Little Doll. Ainsi il peut apporter de nouveaux univers au milieu.
Clémentine Little Doll fait partie de ses créateurs qui se sont intéressés à la
matière, au fétichisme, et qui ont comme références les grands noms de la
photographie et de la mode. Ce sont ses créateurs qui diversifient et font aussi
grandir la communauté fétichiste. Ils ouvrent le milieu au monde. Certains vendent
leurs produits aux artistes pour des clips musicaux ou des concerts. L’émergence
d’internet a également permis une ouverture non négligeable du milieu. Le partage
et la découverte se font plus facilement. Le constat final est que le fétichisme est
partout. Il fait parti de notre culture et de notre vie sociale.
Des analyses récoltées à l’aide de questionnaires mettent en avant un autre
constat. Le fétichisme est encore trop lié à une connotation sexuelle péjorative. La
population étudiée pense avant tout aux influences sadomasochistes et à la
domination et soumission sexuelle, avant de voir un milieu basé sur l’esthétisme et
le corps. Ses analyses permettent de mettre au point un fil rouge pour des débats
autour du fétichisme et pour interroger des professionnels du milieu. Ses
démarches mènent au constat que l’univers du fétichisme est mal perçu, et qu’une
9
redéfinition du milieu est nécessaire pour en montrer ses aspects les plus
attrayants. Cette redéfinition se fait à travers un projet qui va être mis en place. Ce
projet se découpe en deux étapes. La première étape est la phase d’observation du
milieu. Un public de la population ciblée assiste à un défilé fétichiste dans toute sa
diversité. Il s’agit d’un apprentissage par l’exhibition du fétichisme hors de tout
contexte sexuel. La deuxième phase est celle de l’immersion. La population ciblée
peut s’immerger dans le milieu en participant à une séance photographique durant
laquelle le modèle est une personne venant de cette population ciblée. Dans le
studio, la personne revêt une tenue blanche qui lui recouvre le corps des chevilles
au cou. Des tenues fétichistes lui sont projetées dessus. Différentes photos sont
prises du modèle dans différentes poses. Lors d’un travail de post-production, un
montage en stop motion est réalisé, avec le modèle plongé dans un univers
fétichiste. Ainsi la personne ayant participée à l’expérience reçoit une courte vidéo
d’elle-même immergée dans une ambiance fétichiste. Cette phase permet une prise
de conscience de la population cible, elle voit que les vêtements fétichistes ne sont
que des vêtements comme d’autres, et qu’ils se portent à n’importe quel moment
de la semaine comme tout autre habit. De plus les habits projetés proviennent
d’ateliers spécialisés dans le milieu. Les participants à l’expérience recevront
régulièrement des nouvelles des boutiques partenaires pour se laisser séduire par
les nombreuses créations fétichistes qui n’effraient plus alors la population cible.
Les habits auront donc une nouvelle connotation éloignée des premiers préjugés.
10
Summary
Y generation stands out with his cultural diversity. It especially makes out with its
clothing. Passion for fashion begins during the kings periods, where first rules appear
for clothes, make-up and shoes. Rules changed since that time, and they created a lot of
movements with a large variety of clothes. Fashion has a lot of diversity since the
middle of the 20th century. Everyone can put clothes according to their way of life,
behavior and convictions. Y generation has just to choose - this generation is the one
which interested us in this document. We can even can say what kind of behaviour and
convictions a person have from his clothes. Every looks are autorised from the most
standard to the most eccentric. Fetishism is an aesthetic movement, which has a huge
clothing personnality. The word ‘fetishism’ has three definitions. The first one is the
anthropologist’s and ethnologist’s definition created in the 18th century, which spoke
about africans religions and spiritualities. The definiton of dictionnary says that
fetishism is the obesionnal worship of an object or a person. The psychoanalytical
definition is the third definition. It is Alfred Binet, who speaks about it in the 19th
century, and then Freud explains it several years later. The fetishism exists in a theory
from Marx the merchandising fetishism.
Some psychoanalysts aim to say that fetishism is larger than the Freud approach,
because codes of fetishism are everywhere in our society. Moreover, main materials
made for fetishism clothes come from other movements. Indeed, leather comes from
Native Americans, then from the western style in the end of the 19th century. Vinyl
comes from the rock and punk movements beginning in the seventies. The common
thing each materials have is the relation, which exists whith the human body. They give
the feeling of a second flesh, when they are worn. The shiny side of those materials is
very important too. In fact, they enhance the human body. This expresses especially
itself with the photographic medium. It can create incredible pictures, which show only
what interested fetichistes. It also made grown the fetishist community, which could
express itself throught magazines at first. From John Willie and Gilles Berquet,
Thierry Mugler, David LaChapelle and Helmut Newton, to Thierry Richardson, the
world of photography has known eroticism, then fetishism, to know porno chic,
which is a modern and more standard kinf of fetishism. Moreover, there aren’t just
11
photogrtaphes, which enhance fetishism. Models, artists and actors engrave deep
personnalities into the fetishism, some people like Daryl Hannah, Marilyn Monroe,
Uma Thurman, Britney Spears, Kylie Minogue, Lady Gaga or Miley Cyrus had and
have a great influence on the movement.
The industry of fetishim is everywhere on tv, in video games, in advertisements, in
photography. Fashion is hardly influenced by fetishism. Patrice Catanzaro is the
french personnification of fetishism. His various creations are made both for
women and men, and are very popular in the community. His influence permits to
highlight some talented designers like Clémentine Little Doll, a french designers
working with leather and colors. Clémentine Little Doll is one of those designers
who have a great interest in material and fetishism, and who have been influenced
by great names from photography and fashion. In fact, designers are what made
the high level of diversity in the community, and what makes it growing bigger and
bigger. They connect fetishism with the whole planet. They sell their productions
for musics videos or shows. Furthermore the emergence of internet permitted a
none negligeble aperture to the world. Sharing et learning are more easy today.
The fact is that fetishism is everywhere in our regular life. It is in our culture and
our social life.
Answers from some questionnaries I created highlight another fact. Fetishism is
too linked to a sexual connotation. The aim population studied think about the
sadomasochism influences and the domination and submission sexual. It doesn’t
think about an estheticism and a body environment. Those analysises permit to
create interviews for different groups of people and for fetishistic professionals.
We find out that fetishism is thought bad. A redefinition of the movement is
necessary to highlight is good sides. That redefinition will be done throught a
project in two parts. The first one will be an observation part for the aim
population. It will see a fashion fetishist show with a large diversity of clothes. It is
a part of learning throught the exhibition of fetishists without the sexual
connotation. The second part is the part of immersion. The people can immerse
themselves throught a photo shoot. People will wear a white tunic. Fetishist
clothes are projected on the model. Different pictures are taken of the model in
different postures. Then a video is created with pictures, where the model is
12
immersed in a fetishist environment. Thus people can have a short video, where
there are a part of the fetishist world. It brings an understanding for the aim
population. It is aware that fetishist clothes are just clothes. Anyone can wear
them. Moreover, each person who takes place like a model will receive newsletters
about fetishist shops to discover the whole diversity of this movement. To sum up,
the goal to achieve is to give fetichism news connotations far away from falses first
ones.
13
14
Introduction
Le communautarisme par le style vestimentaire
La communauté est définie comme un groupe d’humain dont les membres sont unis par
un lien social. 1 La génération des 18 à 30 ans se rassemble aujourd’hui en communauté
en se basant sur le style de vie de chacun. La différenciation entre chaque communauté
va se faire par les musiques que chacune écoute, les habitudes et les attitudes, mais
surtout par leur style vestimentaire. Emo-Rockeurs, Skateurs-Surfeurs, Footeux,
Rappeurs, Tektonik-Teufeurs, Gaulois-Chanson, Studieux-Melomanes et Fashionistas,
ces 8 groupes sont statistiquement parmis les principales tribus vestimentaires qui
caractérisent cette génération Y.2 Chaque communauté a ses codes bien définis. Leurs
tendances sont reconnaissables directement. Cette frénésie vestimentaire remonte au
XIVe siècle en France. Les aristocrates se démarquaient des classes populaires au
travers de la mode. En ce temps, nous ne cherchions pas à être beau mais à être visible.
Plus nous portions de vêtement couteux, plus nous nous placions dans une position
forte. Le maquillage et le parfum commencent également à apparaître. Peu avant la
Révolution, des almanachs illustrés présentent les tendances vestimentaires parisiennes.
Le XXe siècle voit la naissance de grands couturiers tels que Cacharel et Yves-Saint-
Laurent. C’est l’industrialisation qui va populariser la mode. L’arrivée de la machine
lance la création à grande échelle des vêtements. Les boutiques font leur apparition. En
1945, les États-Unis apportent en Europe la mode fashion qui ravit la jeune génération.
Cette dernière a envie de changement, de couleurs, d’originalité. La mode va se scinder
en deux, entre les puristes de la mode européenne et la nouvelle vague plus jeune. Les
années 70 voient l’émancipation de la femme. Elle ose remonter les jupes au-dessus des
genoux, ou porter le blue jean. Les années 80 voient les tops modèles se populariser et
couvrir des premières de couvertures de presse pour adolescentes. C’est aussi à cette
période que des styles décalés voient le jour, naissant du Hard Rock. Ces styles, comme
1 Définition de la communauté : http://www.la-definition.fr/communaut%E9
2 Informations provenantes du site Locita : http://fr.locita.com/style/la-tribu-comme-element-fondateur-
de-la-generation-y-52356/#sthash.q0u9MN2N.kkr752Y7.dpbs
15
le Punk, le New Wave, le Gothique, se voient accorder des gabarits vestimentaires qui
leurs sont propres. Enfin, dans les années 2000, les marques se vendent plus que le
vêtement lui-même. Nous ne portons plus des baskets, nous portons des Nike. Ce
phénomène va voir l’émergence de nouvelles marques proposant de nouveaux
vêtements, dans des styles déjà définis mais également dans des styles différents,
originaux, dans le but de percer dans ce milieu désormais vaste qu’est la mode. Puis, ce
sont les célébrités qui vont vendre des marques, et amenent leur public à s’intéresser à
la marque qui les engage. En définitif, la mode est passée d’un système d’identification
professionnelle, régionale ou sociale à une identification personnelle. Elle permet de
coder notre appartenance à une tribu et de donner des signes de reconnaissances à
autrui.3
Le fétichisme
Ce qui nous intéresse dans ce mémoire est une communauté qui est tout aussi
reconnaissable mais moins connue, le fétichisme. Source de nombreux préjugés, ce
milieu est très riche et mérite une revalorisation. Un retour aux orignies sont nécessaire
pour faire resortir les premières valeurs du mouvement fétichiste.
Le fétichisme est défini comme étant :
1. Un ensemble de pratiques connues surtout dans l’Ouest africain, fondées sur la
croyance au pouvoir des fétiches et des esprits qui y résident.
2. Un respect poussé jusqu’à l’excès pour une personne, une idée, un principe, etc. Par
extension. Obsession, culte obsessionnel.
3. Une perversion qui lie de manière exclusive l’excitation ou la satisfaction sexuelle à
une partie du corps ou à un objet.4
3 Informations provenantes de diverses sources :
l’article du site Portail de la mode : http://www.portaildelamode.com/histoire-mode-vetement.html
l’article du site Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_mode_en_France
l’article du site Elle : http://www.elle.fr/Mode/Histoire
l’article du site Lespress : http://www.lexpress.fr/styles/mode/c-est-quoi-la-mode-en-2011_1049824.html
4 Définition du fétichisme : http://www.la-definition.fr/fétichisme
16
Le fétichisme africain
Nous ne nous attarderons pas sur la première définition qui historiquement est le
résultat d’une accusation portée sur les pratiques des populations non-occidentales par
les anthropologues et les éthnologues.
En effet, à propos des fétiches africains, éthymologiquement le terme "fétiche" vient du
portugais “feitiço” qui signifie "fabriqué", "artificiel". Ce terme vient lui-même du latin
“facticius” qui signifie “destin”. C’est le nom donné par les Portugais aux objets de
cultes africains lors de la colonisation du continent au XVe siècle. Le terme “fétiche” a
été introduit dans l’éthnologie par Charles de Brosse entre 1756 et 1760. Selon lui le
fétichisme correspond aux croyances des africains, mais il généralise le thème aux
nations faisant le culte d’animaux ou d’objets inanimés qui sont divinisés. Il lie le
fétichisme avec des croyances absurdes. En outre, il apparaît que pour les
contemporains de l’époque, le fétichisme représente des croyances dites primitives,
brutes, absurdes ou stupides.5
Quand nous nous rendons au musée du quai Branly à Paris, qui regroupe des collections
de civilisations du monde entier, dans la section africaine, aucun objet n’est lié au terme
“fétichisme”. Les statuettes présentes sont des personnifications de divinités africaines,
les masques fabriqués sont là pour rendre hommage aux défunts, des poteaux funéraires
sont érigés pour apaiser les ancêtres.
La bibliothèque du musée nous donne la définition suivant du fétiche : “Les rives du
bassin du Zaïre sont le berceau des fétiches, mot d’origine portugaise “fetiçao”,
signifiant factice mais aussi sortilège. Le fétiche capte les forces surnaturelles pour les
mettre au service des hommes. Ces forces peuvent aider sur des questions médicales,
sociales et politiques. Ils ne sont pas là pour effrayer mais comme médiateur dans les
conflits. Les fétiches à clous (les clous permettent de transmettre les forces) sont
fabriqués par des sculpteurs vilis ou kongos (Congo, Zaïre). Ils taillent dans le bois la
forme première et ajoutent des ingrédients : plumes, clous, miroirs. Des reliquaires sont
fixés à la place de leur nombril et renferment une charge magique dissimulée par un
miroir ou un coquillage. L’accumulation d’objets est poussée quelque fois à son
5 Informations tirées du Culte des Dieux Fétiches, de Charles de Brosse, 1760.
Du site wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Fétichisme
17
maximum pour renforcer son pouvoir.”6
Quand nous regardons derrière le terme “fétichisme”, nous trouvons des pratiques tels
que le Vodu ou le Boliw, avec des clans sacrés régis par des règles très strictes comme
la tribu des Legba, ou la tribu Fang avec leur culte des reliques des ancêtres protégés par
des gardiens.7
Loin de l’interprétation partiale des conquérants de l’époque, nous découvrons tout un
système politico-religieux qui régissaient les tribus de l’époque et qui se perprétue
aujourd’hui encore dans certaines régions d’Afrique.
Le fétichisme sexuel
Le fétichisme apparaît en psychiatrie pour la première fois en 1842 avec le psychiatre
Jean Esquirol. Il est repris en 1887 par Alfred Binet, qui explique le fétichisme dans
l’amour en défendant l’idée que nous sommes tous fétichistes en amour. Ce constat est
fait grâce à l’exemple d’une personne qui en courtise une autre. Temps que nous
n’avons pas la personne que nous désirons, notre attention peut se porter sur un objet ou
un accessoire qui est chère à l’être désiré.8 Le fétichisme est considéré en psychanalyse
comme une paraphilie9. C’est Sigmund Freud qui étaye la réflexion sur le fétichisme
6 Définition tirée de “100 mots pour l’art africain”, Elsa Despiney, 2003
7 Infomations tirées des “Secrets Fétiches d’Afrique”, de Catherine de Clippel, 2007
8 Informations tirées du site wikipédia et de l’artic le de Céline Cadaureille “Les scripts secrets des
fantasmes surpapier glacé”.
9 Définition de la paraphilie selon psychologie.com : Dans certaines classifications actuelles (DSM
surtout), ensemble de troubles de la préférence sexuelle caractérisés par la recherche du plaisir sexuel
auprès d'un partenaire ou d'un objet inadapté, ou dans des circonstances anormales. Ce terme générique
recouvre des anomalies telles que l'exhibitionnisme, le fétichisme, le frotteurisme, la pédophilie, le
masochisme et le sadisme sexuel, le transvestisme fétichiste ou le voyeurisme. Les paraphilies doivent
être distinguées notamment des problèmes psychiques et comportementaux associés au développement
sexuel et à l'orientation sexuelle (homosexualité p. ex., qui n'est pas, en elle-même, à considérer comme
un trouble), ou des dysfonctionnements sexuels.
18
sexuel en présentant sa théorie comme liant le fétichisme sexuel avec l’angoisse de la
castration. Selon Freud, seul l’homme peut devenir fétichiste. Cela est du à la
découverte dans son enfance de l’absence de pénis chez sa mère. Ce traumatisme va
créer en l’enfant une peur de la castration. Il comble cette peur en développant un
fétichisme qui représente une extension phallique à la femme qui remplace son absence
de pénis. À partir de ce moment, le fétichiste a besoin de voir ou de toucher un objet ou
une partie d’un corps qui lui permet d’atteindre la jouissance.
Le fétichisme de la marchandise
Karl Marx traite lui aussi le fétichisme dans sa théorie du fétichisme de la marchandise.
Il évoque un lien entre les relations sociales et la marchandise. Selon lui, le fétichisme
est une valeur indéterminée de signification permettant de faire resurgir le travail
humain. Le fétichisme est la marchandise, et c’est cette marchandise qui va définir les
liens sociaux entre les humains. Marx énonce même que les producteurs n’ont de
rapports sociaux que grâce à leur marchandise, et qu’une fois cette marchandise sur le
marché la demande fera de cette marchandise un produit qui correspond aux exigences
sociales, et définira si le mode de production correspond aux attentes sociales.
L’échange de marchandises opère une régulation de la production sociale.10
Cette pensée se ressent aujourd’hui dans certaines pensées sociologiques. C’est dans le
déterminisme technique que l’on ressent l’influence de Marx. Jacques Ellul, sociologue,
professeur d’histoire du droit et théologien protestant français, dit dans “Le système
technicien” de 1977 que “La technicisation croissante de notre société se manifeste non
seulement par l’extension du règne machinique, mais également par le développement
des techniques intellectuelles”. Le déterminisme technique veut que la société soit
soumise au bon vouloir de la technique. L’usager ne sait pas ce qu’il veut, c’est la
technique qui lui dit.11
10 Informations tirées : du site wikipédia,
de l’article “le fétichisme chez Marx : entre religion, philosophie et économie politique”,
du livre d’Émilie Notéris “Fétichisme postmoderne”.
11 Informations tirées de l’article sur le site Garage 21 : http://garage21.org/2013/12/10/les -sources-de-
linnovation-determinisme-technique-et-determinisme-social-limpossible-entente-23/
19
Le fétichisme moderne
Dans une époque où l’objet est mis en avant, où le matériel est accessible plus
facilement par l’immatériel, la définition de base du fétichisme devient de plus en plus
floue. Auparavant, le fétichisme était un cas bien spécifique en psychanalyse et nous ne
parlions que d’hommes fétichistes à travers leur fétiche. Puis avec Marx, c’est la
marchandise qui a valeur de fétiche, et qui régule les échanges sociaux.
Aujourd’hui dans notre société de commercialisation, nous pouvons voir un acte
fétichiste dans le fait de consulter régulièrement ses réseaux sociaux. En poussant plus
loin la pensée marxienne qui définit les relations humaines du capitalisme
exclusivement par l’échange de marchandise et la pensée freudienne qui veut que la
jouissance nécessitant un objet autre que le sexe de son partenaire soit de l’ordre du
fétiche, toute interaction créant un lien non direct entre deux être humains a un rapport
avec le fétichisme. Ainsi, l’utilisation d’un iphone pour communiquer avec une
personne peut créer une jouissance différente d’une conversation directe. Cette
jouissance différente est semblable au fétichiste de Freud. Mais ce qui s’applique à
l’iphone et aux liens sociaux s’applique aussi à des domaines comme les vêtements.
Avec l’arrivée de la vente de vêtement pour la marque et non plus pour le vêtement,
certaines célébrités sont utilisées pour faire vendre des produits vestimentaires. Cela va
créer une idolâtrie pour les objets vendus. Gérard Wajcman12 définit, dans sa conférence
du “Fétichisme hypermoderne”, la mode comme un exemple de fétichisme industrialisé,
et se sert de nombreux exemples actuels pour étayer son propos.
Constat
L’univers du fétichisme reste ancré à certains préjugés. Notamment lié au côté sexuel
pouvant être poussé à l’extrême dans ce milieu. Mais le fétichisme repose d’abord sur
une esthétique à la fois visuelle et tactile. Les matières utilisées dans la fabrication des
12 Gérard Wajcman est écrivain, psychanalyste, maître de conférences au département de psychanalyse de
l'Université Paris 8. Il dirige le Centre d'Etude d'Histoire et de Théorie du Regard. Auteur, notamment, de
“L'Objet du siècle” ; “Collection” ; “Fenêtre, chroniques du regard et de l'intime et de L'Œil abs olu” (paru
chez Denoël, 2010).
20
vêtements de ce style, le latex, le cuir, le vinyle, le wetlook, sont avant tout des tissus de
confection. Certaines sont même utilisées pour d’autres styles vestimentaires dans
lesquels nous ne retrouvons pas les connotations sexuelles que le fétichisme leur
apporte. Ces connotations représentent un frein important dans la connaissance et
l’appréciation de ce milieu. En effet, cela va créer un blocage qui va pousser certains à
cataloguer le mouvement fétichiste. Aucune forme d’expression portant le nom de
fétichisme ne sera tolérée. Le constat est le suivant, le fétichisme est au final une petite
communauté qui a ses règles, ses codes comme toute autre. Mais elle offre des
possibilités vestimentaires non négligeables qui peuvent intéresser la population, si le
côté dérangeant est mis de côté. Comment revaloriser le fétichisme à Paris est la
question qui va être traitée tout au long de ce document. La restriction à la capitale
française sera explicitée plus loin dans le mémoire.
Objectif
Pour répondre au mieux à ce questionnement, il faut définir les raisons du blocage. Une
fois ces raisons définies, il faut mettre en place plusieurs méthodes pour changer les
mécanismes sous-jacents aux blocages. Cela permet de changer certains points de vue
ou aprioris. Le but étant de modifier l’approche que certaines personnes ont du
fétichisme.
L’objectif va être de faire adhérer le fétichisme à un public nouveau. Pour cela, il faut
créer un intérêt pour ce milieu. Une fois l’intérêt créé, il faut susciter de la demande.
C’est cette demande qui apporte une clientèle nouvelle. Au final, il faudra mettre au
point une ou plusieurs actions pour attirer un nouveau public dans le fétichisme, ou du
moins l’intéresser à l’aspect vestimentaire du milieu. Pour aboutir à ces actions, un
cadre de travail doit être défini.
Démarche
Après avoir positionné le milieu fétichiste dans le contexte mondial actuel, des données
chiffrées viendront éclaircir les côtés positifs et négatifs du mouvement. Cela mettra en
avant les points faibles sur lesquels nous baserons la réflexion pour répondre à la
problématique. En terme méthodologique, différents moyens seront employés dans le
21
cas de ce mémoire. Tout d’abord, une recherche exploratoire va rassembler un ensemble
de documents permettant de définir la place du fétichisme dans notre société. Au travers
d’étude des styles vestimentaires actuels, des interviews et conférences données par des
professionnels, des psychanalystes et des créateurs, une base solide d’unformations et
de données va être définie. En parallèle de cela, des questionnaires et des focus groups
vont permettre d’amener une base psychosociologique sur le fétichisme d’aujourd’hui.
Une population donnée extérieure au milieu sera interrogée. Des premières données
chiffrées seront ainsi rassemblées grâce à des questionnaires anonymes fournis à un
public de 18 à 25 ans. Le but de ces questionnaires sera de définir une pensée collective
autour du fétichisme en dehors du milieu fétichiste. Cela posera des bases sur la
compréhension de la pensée sociale de ce milieu. D’autres données seront recueillies
par l’intermédiaire de débats réunissant un groupe d’hommes d’une part, un groupe de
femmes lors d’un second débat, puis un groupe mixte lors d’un troisième débat. Les
hommes et les femmes seront séparés dans un premier temps afin d’éviter le regard d’un
sexe sur l’autre lors des discussions sur un sujet hautement sexué. Ces débats
permettront aussi l’élaboration de données sur le milieu fétichiste. Ces groupes
d’individu échangent, se soutiennent ou s’opposent sur ce sujet, contrairement aux
questionnaires qui regroupent une pensée individuelle qui ne subit pas le regard ou le
jugement d’autrui. Les dernières données seront recueillies lors d’interviews de
professionnels du fétichisme, qu’ils s’agissent de gérant de boutiques fétichistes, de
psychanalyste, de créateurs. Le point de vue des professionnels viendra étayer ou
contredire les pensées collectives de la cible des 18 à 35 ans. La confrontation entre les
données des professionnels et de la population ciblée permettra de faire ressortir des
failles à travailler pour améliorer la perception du fétichisme auprès d’un public
nouveau. Enfin, des audits d’expérience utilisateur viendront confirmer toutes les
données récupérées. Cela se traduira par des rapports sur les usages et habitudes des
fétichistes lors de rassemblements, des observations de la clientèle des magasins
spécialisés, des interviews de spécialistes du milieu. Cette méthode amènera des
données qualitatives qui reflètent la pensée sociale, la réalité environnementale et
financière de la population fétichiste. Cela mettra en avant les pensées, les valeurs et les
opinions de cette population. C’est en s’immergeant dans un milieu que nous sommes à
même de le comprendre. Cette compréhension est nécessaire pour identifier tous les
mécanismes et repérer les points forts sur lesquels nous pourront nous appuyer pour
22
construire le projet et détecter les failles sur lesquelles il faudra travailler pour atteindre
notre objectif.
23
24
Première partie
Cette première partie du mémoire sert à définir le cadre professionnel et économique du
fétichisme. Bien que l’influence fétichiste soit mondiale et que ce sujet peut toucher la
communauté toute entière, nous allons nous concentrer sur son impact à Paris et ce que
la France peut récupérer comme informations sur le sujet.
Les matières
Le fétichisme agit sur plusieurs domaines. Le premier domaine, qui touche directement
le milieu, est celui du vestimentaire. Tous les vêtements en cuir, latex, vinyle et wetlook
sont des valeurs sûres du fétichisme. Les autres domaines sont la photographie, la
plublicité, la musique, les jeux vidéos, etc.
Le cuir
Le cuir est une matière qui a été empruntée à plusieurs styles. Le style western qui a vu
les pionniers américains de 1870 porter des vestes en cuir. Le style militaire des années
1930, les aviateurs de l’époque portent la veste en cuir, qui va devenir un véritable
symbole repris par Hollywood pour ses films montrant l’armée américaine. En 1935, les
pièces en peau d’élan et de daim sont véritablement populaires. Le style des bikers, qui
à la base portaient le perfecto en référence aux acteurs principaux du film “L’épopée
sauvage” Marlon Brando et Lee Marvin, sorti le 4 juillet 1953, a détrôné la veste en jean
pour imposer la veste en cuir comme l’élément symbolique de l’esprit rebelle de cette
période. Le perfecto, veste en cuir, devient ainsi dans un premier temps le symbole des
motards avant de s’élargir à l’univers du rock. C’est Elvis Presley qui va lancer le
mouvement dans les années 50. En 1986, c’est le film “Top gun” qui impose la veste en
cuir comme le vêtement des héros. Dans le sport aussi le cuir est très largement
répandu. C’est dans le milieu équestre que le cuir est le plus présent. Puis c’est grâce à
des groupes comme les Ramones que le perfecto s’intègre au milieu punk. Le perfecto
25
est le symbole de l’esprit rebelle qui ne suit ni les conventions, ni la mode.13
Le vinyle
Le mouvement punk des années 70, non content de prôner le port du Perfecto, voit ses
adhérents porter des vêtements en vinyle ou en latex, toujours dans cet esprit de
rébellion.14 Le vinyle, ou vêtement en PVC, est un vêtement brillant fabriqué à base
d’un matériau plastique dérivé du polychlorure de vinyle, le PVC. Ce type de vêtement
est associé à divers milieux. Il est ancré dans l’univers fétichiste, mais d’autres styles
ont vu en ce type de vêtement un message fort. C’est dans les années 60 que la mode
voit apparaître ses premières créations en vinyle grâce au couturier Pierre Cardin.15
Dans les années 70, la mode se tourne vers les matières brillants, les chaussures et
vêtements à la mode sont en vinyle.
Le latex
Le latex est du caoutchouc élastique élaboré à partir de la sève de l’hévéa ou synthétisé
par polymérisation16 . C’est une matière propre au fétichisme, dans le sens où le
vêtement donne véritablement l’impression d’avoir une seconde peau. Le côté sensuel
de cette matière plaît à de nombreux adeptes et reste un domaine très apprécié pour les
stylistes, comme Patrice Catanzaro17. Le latex va se populariser grâce à de nombreuses
personnalités. Thierry Mugler18 est une personnalité de la mode qui va y contribuer. Il
13 Informations sur le cuir tirées du site Brooklyn Bridge Factory :
http://www.brooklynbridgefactory.com/content/30-blouson-cuir-rebel-biker
14 Le mouvement punk se base sur la contestation de l’ordre sociologique de l’époque et s’oppose
farouchement au mouvement hippie en vogue.
15 Pierre Cardin est un couturier et homme d’affaires français d’origine italienne. Il est né Pietro Cardin à
Sant’Andrea di Barbarana, lieu-dit de la commune de San Biagio di Callalta en Italie, le 2 juillet 1922.
16 La polymérisation est l’assemblage de plusieurs molécules identiques afin d’en former une plus grosse.
17 Se référer à la page 30 et 70.
26
est une image forte du mouvement porno-chic qui voit le jour dans les années 90. Il joue
avec différentes matières : le cuir, le métal, le vinyle et le latex. Il est vite reconnu
internationnalement et est aujourd’hui une référence de la mode.19
18 Thierry Mugler est un styliste et grand couturier français né le 21 décembre 1945 à Strasbourg.
19 Informations tirées surles sites Wikipédia, La mode au fil de l’Histoire et Le Temps :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Vêtement_en_PVC
http://fr.wikipedia.org/wiki/Mode_au_XXe_siècle
http://fr.wikipedia.org/wiki/Latex_(matériau)
http://histoire-du-costume.blogspot.fr/2012/05/le-mouvement-punk.html
http://www.letemps.ch/Facet/print/Uuid/384cd008-aea6-11dd-bf59-
ad3d6140ad87/Latex_une_brève_histoire_de
27
Le secteur professionnel
La photographie
Thierry Mugler est un styliste avant tout mais aussi un photographe. Hors la
photographie est un autre domaine qui est une véritable source d’inspiration et
d’expansion pour le fétichisme. La photographie fétichiste apparaît dans la même
période que le terme “fétichisme sexuel”. Le fétiche apporte au fétichisme la
jouissance qui lui est nécessaire et la photographie rapproche le fétichiste le plus
possible de son fétiche. Dans le cadre du fétichisme psychanalytique, la
photographie permet de fragmenter l’image du corps de la femme en ne
présentant que les objets désirés des fétichistes. Nous entendons par objet le
fétiche de l’homme. Hors, quoi de mieux que la photographie pour faire de gros
plans sur les objets en masquant le reste du corps qui n’intéresse aucunement le
fétichiste. Le XXe siècle voit des revues spécialisées apparaître dans ce milieu, telles
les revues “Bizarre” et “Maniac”. Les premières publications de la revue “Bizarre”,
dirigée par John Willie, se font clandestinement dans un premier temps. Le
premier numéro sort en 1946. Elles permettent d’instaurer le fétichisme des pieds,
de la chaussure et l’art du bondage20. Ce que la photographie apporte au fétichisme
est le caractère véritable de chaque image. En effet, même si la photo n’est qu’une
mise en scène, la scène a malgré tout réellement existée pour la prise de vue. C’est
en cela que la photographie peut même devenir un fétiche. Mais il ne faut pas
confondre fétichisme et pornographie. La photographie fétichiste ne contient
aucun caractère pornographique. Elle est érotique. Elle joue sur la frustration et
sur le plaisir de la frustration. Elle donne aux yeux des spectateurs une scène qui
laisse libre cours aux interprétations, aux histoires et aux fantasmes. La
photographie fétichiste est un plaisir visuel avant tout.21 Les revues soécialisées
20 Le bondage est un anglicisme désignant la pratique érotique consistant à ligoter une personne à l’aide
de cordes,chaînes,ou tout autre accessoire.
21 Informations tirées de l’article de Céline Cadaureille “Les scripts secrets des fantasmes sur papier
glacé”.
28
inspirent de nombreux artistes et créateurs, comme le français Gilles Berquet, qui
dirige la revue “Maniac” publiée pour la première fois en 1994. C’est de la que se
base le mouvement du porno-chic des années 1990.
Le porno-chic
La photographie est le media qui a pour but de sublimer l’image de la femme dans
un premier temps, puis celle de l’homme. L’une des personnalités de ce
mouvement est Helmut Newton, ami de Thierry Mugler, et grand photographe de
la mode. Ce photographe a su s’imposer grâce à son style érotique particulier. Ses
photographies s’inspirent directement du fétichisme, comme par exemple la
photographie de l’actrice Daryl Hannah qui prend des poses tirées de l’art du
bondage.
Daryl Hannah in Santa Monica by Helmut Newton for Vanity Fair in 1984
L’amour de Newton pour la femme se retranscrit dans son travail. Il la présente souvent
nue, dans des scènes originales, comme sa série sur la nudité urbaine. Mais il ne montre
pas une femme vulnérable. Il la montre forte, belle, attirante, et fière.
La publicité
29
Une autre image forte du porno-chic est David LaChapelle, né en 1963. Photographe
initialement, il travaille un temps avec Andy Warhol qui l’avait repéré grâce à son
travail. Il se lance dans la production de clips vidéos et de publicités télévisées. La
femme est un élément central dans son travail. Il la fait évoluer dans un milieu érotisé
très coloré. Il est décrit comme un maître du kitsch surréaliste populaire. La femme tient
une position très forte et peut s’apparenter à une reine ou une divinité dans ses travaux.
Dans la publicité pour “Schweppes”, que son studio Lachapelle Studio a réalisé,
l’actrice Uma Thruman parle de manière ambiguë et érotique à un journaliste. C’est une
femme confiante, forte et sûre d’elle qui s’exprime. Elle est couverte de vêtements et
accessoires colorés, des paillettes sur la peau et un spot lumineux qui l’éclaire comme
une lumière divine. C’est un des exemples les plus récents du porno-chic dans la
publicité.
Les jeux vidéos
L’un des domaines du numérique qui a mis en avant le milieu fétichiste en premier est
celui des jeux vidéos. Ils ont permis la naissance de personnages aujourd’hui cultes,
venant tous d’univers, d’époques et d’ambiances différentes. La série des “Castlevania”,
jeux de plateforme, qui a débuté en 1986, met en avant des personnage aux tenues
brillantes rappelant le vinyle. La série des “Final Fantasy”, jeux de rôles, de Hironobu
Sakaguchi qui a débuté en 1987, met en avant des personnages dans des tenues
excentriques brillantes rappelant le cuir et le vinyle. Le personnage de Savyna du jeu de
rôle “Baten Kaitos” sorti en 2003 évolue en body en cuir. Ce ne sont que quelques
exemples de ce média qui regroupe de nombreuses références au milieu fétichiste.
Le clip musical
Dans ce média, une personnalité connue internationnalement qu’il faut mentionner est
le photographe américain Terry Richardson, autre image du porno chic. Son œuvre la
plus récente qui va nous intéresser est sa participation en tant que réalisateur au clip
vidéo “Wrecking Ball” de l’artiste Miley Cyrus, qui est une artiste de la scène populaire
très médiatisée actuellement. Son dernier clip “Wrecking Ball” est sorti en septembre
30
2013. Elle est mise en scène dans le clip en train de se balancer nue, vêtue uniquement
de bottines, sur une boule de démolition de chantier maintenue par une chaîne épaisse.
Elle est représentée comme une femme émotionnelle parce que nous la voyons pleurer,
mais l’image de la boule de démolition fait d’elle une femme forte. De plus, le fait
qu’elle dirige la boule en donnant elle même le rythme du balancier renvoie à l’image
d‘une femme stable et déterminée. Le clip est aussi très largement érotisé et l’influence
fétichiste y est flagrante. Il a accumulé plus de 450 millions de vue sur Youtube.
Les chaussures
Ce clip permet de rebondir sur un autre marché économique important du fétichisme, il
s’agit du marché de la chaussure. Les chaussures viennent embellir les tenues
fétichistes, ou simplement habiller une personne, mais elles font surtout le bonheur des
rétifistes22. Pour les chaussures c’est la marque Démonia qui est la plus représentative
du fétichisme en France. Les femmes plus particulièrement affectionnent cette marque
qui propose de nombreux escarpins, bottes, bottines et autres chaussures à talon très en
vogue dans le mouvement. Le talon est une image forte du milieu, il grandit la
personne, que le talon soit pointu ou plat il pose l’image d’une personne décidée dans
ses choix. Une autre marque de chaussures qui est prisée par les fétichistes est la
marque New Rock. Cette marque inspire certaines tenues fétiches. Elle s’adresse
pourtant à un milieux de bickers, hard rockeurs, gothiques.23
La mode
En France, la personnification du stylisme fétichiste populaire est Patrice Catanzaro. Il
22 Le rétifisme est le fétichisme de la chaussure. Le nom de cette paraphilie vient de Nicolas -Edme Rétif
(1734 - 1806) qui a décrit son attirance pour les chaussures féminines dans son roman paru en 1763 “Le
pied de Fanchette”.
23 En 1929, la famille espagnole Ortuño fait perdurer la tradition familiale de confection de chaussures.
La marque née en 1978 et se répand rapidement à travers le monde grâce à une sélection minutieuse des
matériaux de confections. La marque s’adresse aujourd’hui plus à un public gothique et punk. Cette
marque est en constante recherche d’innovation, et propose tous ses modèles avec des finitions
manuelles.
31
est décrit comme l’homme qui habille la femme. Après avoir longtemps travaillé dans le
stylisme de la fourrure et du cuir, il se lance dans la lingerie. Il cherche à sublimer la
femme avec des matériaux qui lui ouvre un vaste espace de jeu. Il finit par se consacrer
également aux hommes en voyant l’enthousiasme du public fétichiste pour ses
créations. 24 La boutique Démonia est celle regroupant le plus de choix pour
l’habillement fétichiste. Elle a un rapport qualité prix qui lui permet d’accueillir un
large panel de clients. Les vêtements présentés s’adressent à une large cible, ils sont des
plus discrets aux plus voyants. Certains magasins proposent de vendre des créations
uniques réalisées selon les demandes des clients. C’est le cas de la boutique hollandaise
Breathcatcher. Elle propose des tenues pour une élite fétichiste, dans le sens où ses
créations uniques vont avec un prix qui est très élevé. C’est une classe sociale très aisée.
Malgré le fait que nous ne nous occuperons pas de cette classe sociale, il reste quand
même intéressant de parler de toutes les différentes faces du fétichisme.
Les accessoires et jouets érotiques
Un autre domaine commercial, qui est très vendeur, est le marché des accessoires et des
jouets érotiques et sexuels. Ce domaine n’est pas un marché qui va nous intéresser dans
son ensemble dans ce mémoire, cependant il doit malgré tout être évoqué lui aussi. En
effet, tous les jeux fétichistes se basent sur l’utilisation d’accessoires annexes. Ce
marché n’est d’ailleurs pas exclusif aux fétichistes, de nombreux couples tentent de
pimenter leur relation avec ces jouets érotiques. Une différenciation se trouve dans le
choix des accessoires et des jouets choisis par les clients, en fonction du milieu social,
certains produits attirent plus que d’autres. Pour ce marché, la boutique Démonia est la
première boutique de France. Elle a le plus large choix d’articles et ses prix se situent
entre 10 à 700 euros. Cette industrie a permis la commercialisation des jeux sensuels
qui se trouvent plus largement dans les bazars et autres boutiques d’accessoires et
d’objets de décoration.
Il en va de même pour les accessories, qui apportent toujours une valeur supplémentaire
aux tenues fétichistes. Dans ce milieu, ce sont les masques qui sont le plus prisés. De
formes et couleurs diverses, cette industrie est aussi diversifiées que celle des créations
24 Informations tirées du blog officiel de Patrice Catanzaro : http://www.patricecatanzaro-leblog.com
32
de vêtements.
Les créateurs
Depuis l’émergence d’internet, la communauté fétichiste peut partager beaucoup plus sa
passion entres initiés mais aussi se faire connaître du reste du monde. Ce qui se faisait
auparavant en cachette avec des revues vendues à la sauvette se pratique maintenant
librement, sur les réseaux sociaux par exemple, tel que Facebook, premier réseau social
en France. En novembre 2013, 26 millions d’utilisateurs étaient sur Facebook, 17
millions sur mobile, dont 11 millions d’utilisateurs quotidiens.25 La communication est
bien plus aisée et nous pouvons aujourd’hui admirer les créations de tous.
En Europe de nombreux créateurs ont percés dans le fétichisme. En Espagne le site de
création en cuir de Cecilio Castillo Martinez, Leather Masks, a vendu des masques en
cuir pour des artistes telle que Byonce, pour son clip “Haunted” qui sortira en 2014.
C’est aussi cette web boutique qui a créé les tenues en cuir pour le court métrage de
Madonna “Secret Project Revolution” en octobre 2013. Le masque de cuir que porte
Tarja Turunen, ex vois du groupe finlandais Nightwish, lors de sa tournée Anteroom Of
Death de 2013, vient aussi de cette web boutique.
25 Chiffres tirés du Blog du Modérateur : http://www.blogdumoderateur.com/facebook-chiffres-
utilisation-france-et-monde/
33
Image tirée du clip de Beyonce “Haunted”,2014
Photographie de Tarja Thurunen
Une autre boutique hollandaise, Breathcatcher, propose des créations à la demande.
34
La France a aussi un bel échantillon d’amateurs qui propose des créations originales et
variées. Quentin Caffier, photographe français diplômé de l’ENS Louis Lumière, a
exploré l’univers fétichiste pour en sortir une série photographique nommée Onnagata,
pour Lash magazine, en février 2012.
35
Photographie par Quentin Caffier, 2012
36
Satina Loo Latex, une créatrice fétichiste, propose des habits en latex colorés.
37
Photographie de Satina Loo Latex
38
Une jeune créatrice révélée par Patrice Catanzaro, Clémentine Little Doll, perce
également dans l’univers du design fétichiste. D’une famille exclusivement artistique,
elle s’intéresse tôt à la couture qui lui ai apprise par sa grand-mère. Elle étudie le
stylisme à l’Atelier Chardon-Savard à Paris. Le vêtement ne lui suffisant pas, elle se
tourne vers les accessoires puis vers la coiffure afin de toujours se perfectionner. C’est
grâce à la photographie qu’elle arrive dnas l’univers fétichiste. Ses premiers pas dans ce
monde vont l’inspirer pour de nombreuses créations. C’est à son retour de la Torture
Garden à Londres qu’elle s’intéresse à la couleur qui est très présente dans l’univers
fétichiste anglais. Elle se voit proposer de faire un défilé lors de la Nuit Démonia, plus
grande soirée fétichiste française, en 2007. Ses créations très décalées sont à l’image du
fétichisme moderne, un univers vaste, complexe et coloré.
39
Les Vertugadins & Entrelacées sont un atelier de création de costume. Ils s’inspirent de
différentes époques pour leurs créations. L’atelier fonctionne sur la base de la location
et propose aussi des cours et des stages de formation. Il travaille avec diverses matières
dont le vinyle.
Photographie des Vertugadins & Entrelacées
40
Kybari est un photographe qui crée des tenues en cordes.
Photographie de Kybari
41
Une autre créatrice qui a réussi à percer, Sophie Richardoz, a créé des tenues en latex
qui ont été acheté par Lady Gaga. Sa boutique, HMS Latex, créée en 2006, propose de
nombreuses créations colorées à la demande des clients.
Photographie de HMS Latex
Il existe de très nombreux de créateurs comme Damien De Man, du Dragon De Brume,
de Help!, de Cyber Art.
42
43
Seconde partie
Après avoir étudié le fétichisme d’un point de vue concret, au travers de ses différentes
définitions, de ses nombreuses influences et conséquences sur notre société, c’est à
travers une vision plus métaphysique et philosophique que ce milieu va être présenté.
Le symbolisme
Comme tout milieu, le fétichisme est un mouvement remplit d’icônes et de symboles.
Au travers d’un exemple concret, sorti le 29 novembre 2010 pour la première fois sur
MTV, nous allons survoler quelques aspects du symbolisme dans le fétichisme. Il s’agit
du clip musical “Hurricane” du groupe américain Thirty Seconds To Mars, produit par
Bartholomew Cubbins, un pseudonyme d’un des membres du groupe, Jared Leto.
Description
Ce clip, qui prend la forme d’un court métrage de 13 minutes, met en scène les trois
membres du groupe, Jared Leto, le chanteur, Shannon Leto, le batteur et Tomo
Miličević, le guitariste. Jared Leto, leader du groupe, dira à propos de ce clip qu‘il n’a
fait que “suivre sa créativité et sa muse, et c’est là où elles l’ont menées, à la création
d’un film qui explore les lieux sombres de notre monde intérieur et de notre psyché”.26
Le clip plonge les trois protagonistes dans un monde irréel. Ils se retrouvent dans une
version de Manhattan plongée dans la violence et le sexe. Les trois hommes vont
chacun être poursuivis et attaqués par des peronnes nommées les “Gimps”27, pendant
que des flashs nous montrent un couple de lesbienne Shae et Sunisa s’adonnant à des
26 Citation provenant d’une interview donnée par AOL radio en 2010. Citation originale : “ I really was
just following my creative muse and this is where it led me, to make a film that explores some of the
things that usually live in the darker corners of our universe and our psyche”
27 Gimps est un mot anglais qui a plusieurs traductions : les handicapés considérés comme agressifs, les
éclopés, les boiteux, les idiots et les masochistes. La dernière traduction est plus compatible avec le style
du clip.
44
jeux sadomasochistes. D’autres flashs nous montrent Jared Leto pratiquer un jeu
fétichiste avec une femme. Dans le rêve, Shannon Leto poursuit une femme amoureuse
de lui qui cherche malgré tout à lui nuire. Tomo Miličević est en quête de sens. Jared
Leto est poursuivi pendant toute la vidéo par un tueur masqué muni d’une masse de
chantier qui est obsédé par l’idée d’abattre le chanteur. Le clip se déroule en trois
chapitres : “The Birth” ou la naissance, “The Life” ou la vie et “The Death” ou la mort.
De plus, la vidéo a comme sous-titre “This is not reality, this is a dream.”, qui se traduit
par “Ce n’est pas la réalité, c’est un rêve.”.
Analyse
Le sous-titre du clip donne le premier indice à la compréhension de la vidéo. Il s’agit
d’un rêve. Le rêve est un moment privilégié où notre subconscient peut s’exprimer pour
faire passer différents messages. Il se constitue en une succession d’images, d’émotions
et de sensations dont le contenu et le but sont sujets à de nombreux débats.
L’interprétation des rêves reste vague, subjective et elle varie en fonction des cultures,
des sciences, des philosphies ou des religions. Elle peut être vu d’une approche très
psychanalytique comme Freud la présente dans certains de ses livres. Elle peut aussi
être vu beaucoup plus philosophiquement. Les hindouistes considèrent que nous
sommes tous les êtres du même rêve d’un Dieu endormi pour des millénaires. Durant ce
sommeil les hommes doivent réussir à atteindre une forme de spiritualité divine, en
combattant toutes leurs émotions, leurs peurs et leurs instincts primaires, afin de renaître
comme des êtres immortels. Ce clip est à l’image de cette philosophie. Les
protagonistes vont traverser différentes épreuves et affronter des adversaires afin qu’ils
se libèrent de leur condition humaine, qu’ils atteignent “La vérité”.
Birth
Le premier chapitre débute sur des vues de la ville où une tempête orageuse commence.
La tempête représente des changements importants. La tempête arrive dès l’apparition
du titre du chapitre “naissance”, cela nous ramène à tous les grands changements que
45
l’on vit pour se construire. La naissance étant en elle-même une tempête, la souffrance
de la mère qui met au monde un être qui va apporter quelque chose de nouveau à ce
monde, aussi insignifiant que cela peut être. Tout le corps médical qui s’affaire autour
du lit, tel un gigantesque coup de vent, pour que tout se passe au mieux. Les proches de
la future mère qui sont tendus, telle la foudre qui attend d’éclater au grand jour. Puis,
l’explosion de joie quand l’enfant arrive. À cela s’ajoute la référence directe au nom du
clip “Hurricane”, qui signifie en anglais tempête, ouragan. La chanson entière tourne
autour d’un grand événement, d’un but majeur ou d’une vérité à atteindre.
La première séquence qui ne montre pas la ville est le plan d’une plaque d’égout où une
roue est représentée avec le nom de Manhattan inscrit dans ses rayons. La roue
représente le temps dans la plupart des cultures, c’est aussi l’image de la roue de la vie
(Saṅsāra or Saṃsāra). Dans les religions et philosophies asiatiques, cette roue est la
représentation du cycle de la vie, la naissance, la mort, la réincarnation. C’est le flux
continuel des choses qui ont été, sont et seront. C’est un rayon de conscience continue
où se mélangent les émotions, les passions, les désirs et les expériences. Ce symbole va
représenter la bataille interne qui anime les protagonistes face à leurs propres démons.
C’est un combat interne que le rêve peut exprimer. Il confronte la pureté et l’innocence
que l’on a à la naissance avec les enseignements sociaux, religieux et politiques qui
viennent interférer et font apparaître les ténèbres qui pèseront sur notre vie.
Deux des trois protagonistes nous sont présentés. Shannon Leto, qui conduit une moto,
traverse une ville morte à toute vitesse. Tomo Miličević se promène dans le métro, vide
également. Shannon représente les “connaissances” et Tomo représente la “liberté”. Au
début de notre vie, nous sommes insouciants et ignorants. Nous vivons plus dans
l’action que dans la connaissance, et nous fonçons tête baissée, tel le motard roulant
aussi vite que possible sur la route de la vie. Tomo lui nous ramène à l’allégorie de la
caverne. En restant dans le métro, il reste dans l’illusion des images furtives que le
monde peut lui renvoyer. Il n’y a qu’en sortant de la “caverne” qu’il pourra vraiment
apprendre et découvrir le réel.
Une rapide flash nous montre une paire de menotte, pendante et ouverte. L’image nous
renvoie à l’idée d’insouciance et d’ignorance qui nous habite à notre naissance. Il
n’existe encore aucune chaîne, aucun lien qui nous entrave.
Ensuite, nous voyons Jared Leto, endormi, dans un lit d’une chambre d’hôtel, qui se
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situe en haut d’un gratte-ciel. Jared est la représentation des “passions dormantes” de
notre subconscient. Le fait qu’il se trouve si haut symbolise son absence de contact avec
la réalité. De plus, étant endormi, il ne s’affirme pas. Il reste en retrait du subconscient.
Il se fait alors réveiller par un inconnu qui frappe à la porte de sa chambre. Une souris
blanche dans une cage se met alors à tourner dans sa roue. Ce symbole représente
l’éternel recommencement des mécanismes de notre vie. Si nous ne prenons pas
conscience de nos mécanismes internes, nous risquons de répéter les mêmes actes, les
mêmes événements. Seule une émancipation de nos barrières internes peut nous
permettre d’aller de l’avant. Jared ouvre la porte de sa chambre, ne trouve personne de
l’autre côté, mais voit des clichés pris de lui pendant son sommeil. La souris blanche se
cache dans les copeaux qui tapissent sa cage. La symbolique de cette scène renvoie au
fait que les animaux ressentent le danger avant les humains. La souris pressent
l’ouragan qui approche. Le premier coup de fouet qui va éveiller les passions dormantes
(en lien avec le premier flash montrant deux sadomasochistes en pleine action, l’un
fouettant le deuxième) est la découverte des clichés. Le second choc, représenté à
nouveau par de nouveaux flashs montrant des scènes sadomasochistes, est l’arrivée d’un
homme portant un masque sadomasochiste, cachant totalement son visage et tenant une
masse de chantier. Cette homme est l’image de nos peurs. Peurs sans visage car nous ne
les comprenons pas toujours, bien qu’elles viennent progressivement nous habiter tout
le long de note vie. L’homme s’avance vers la chambre de Jared. Ce dernier ferme sa
porte, la verrouille et tente de ne rien laisser entrer à l’intérieur. Seulement, à l’instar
des peurs qu’on ne peut empêcher de s’immiscer en nous, l’homme masqué force
l’entrée du monde des passions dormantes. C’est à ce moment de notre vie que nous
commençons à appréhender la réalité du monde qui nous entoure, on sort de notre
insouciance et nous posons les pieds sur terre. Cette image est représentée par Jared qui
saute de sa fenêtre pour échapper à son poursuivant et il tombe en chute libre jusqu’au
pied du gratte-ciel où il se pose et s’enfuit, quittant définitivement l’insouciance.
La scène suivante montre un homme et une femme sortant du métro. Les deux sont en
tenues fétichistes et la femme tient le rôle de l’esclave de l’homme. Cette femme
représente notre liberté, entravée par l’homme qui symbolise les freins de notre liberté.
Tomo sort à son tour du métro, il quitte sa caverne et l’homme dominateur l’attaque. Le
guitariste du groupe l’emporte. Il embrasse l’esclave qui lui transmet une clé lors de
leur baiser. Toute cette scène exprime que la clé pour atteindre notre liberté se trouve en
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dehors de nos premières croyances et que c’est en affrontant ce qui entrave notre liberté
que nous pourrons atteindre la véritable liberté.
En parallèle de cette scène, Shannon fonce toujours sur sa moto jusqu’à ce qu’une
personne étendue sur la route le fasse se coucher littéralement sur la route pour ne pas
écraser son obstacle. Le temps de l’insouciance se termine, et il se finit violemment,
c’est une véritable prise de conscience qui nous sort de cette insouciance.
Life
La personne étendue sur le sol est une femme qui feignait d’être inconsciente. À
l’approche de Shannon, elle se redresse et le poignarde en plein milieu du ventre. Elle
lui passe autour du cou une clé accrochée à un collier, l’embrasse et s’enfuit. Le batteur
retire le couteau et le jette. Le symbolisme de cette scène se base sur la trame
scénaristique et philosophique du film Inception de Christopher Nolan sorti en juin
2010. Le coup de couteau est l’origine (inception en anglais) de la connaissance, plus
exactement du désir de savoir. Le film de Nolan avance la théorie que la force la plus
puissante qui habite la Terre est une idée. Même une toute petite idée, une fois
implantée en nous, ne peut que croître jusqu’à nous obséder. C’est ce qui arrive à
Shannon dans cette scène. Le baiser qui suit le coup de couteau signifie le plaisir qu’il
va tirer de la réalisation de cette idée. Il doit apprendre. Il quitte définitivement
l’ignorance et l’insouciance, maintenant qu’il est né, il doit vivre.
Tomo assiste à une scène où un prêtre, un rabbin et un imam jette les livres sacrées de
chacune de leur religion respective dans un feu autour duquel ils sont rassemblés. C’est
une nouvelle étape pour le batteur dans sa quête de liberté, il s’affranchit de la religion,
représentée par les trois grands courants religieux de notre époque, dans le feu de la
liberté.
Jared découvre une clé au bas d’une porte noire métallique scellée. Cette porte est la
représentation des barrières sociales de notre époque qui contiennent nos passions
dormantes. Le chanteur arrive ensuite dans un hall d’honneur rempli de cerceuils posés
à même le sol, recouverts d’un large drap représentant le drapeau des États-Unis. Un
cercueil est ouvert et vide. Jarred s’en approche pour l’observer, quand l’homme
48
masqué arrive derrière lui et lui assène un coup de massue qui le propulse dans le
cercueil. Le fétichiste referme le cercueil qui devient alors identique à tous les autres.
L’image derrière cette scène représente l’étouffement de nos passions par le poids et
l’omniprésence de la société et de nos devoirs citoyens. Nous finissons par nous noyer
dans la masse, ne pas nous affirmer pour suivre les politiques et les codes sociaux.
Shannon retrouve la femme qui l’a poignardé, elle est assise sur un banc et l’attend. Il
s’assied à côté d’elle. Ils s’embrassent de nouveau et elle le menotte au banc sur lequel
ils sont. Elle s’enfuit et deux hommes masqués menacent Shannon. Il utilise la clé que
la femme lui a remise plus tôt pour se libérer. Il affronte les deux hommes, gagne le
combat et reprend sa recherche de cette femme. Le symbole de cette scène est
l’équivalent des moments de doutes qui nous habitent. Dans sa quête de la
connaissance, il a appris des choses, ce sont ses mêmes apprentissages qui vont à un
moment le mener dans une impasse. Mais ce sont toujours ses mêmes connaissances qui
représentent la clé pour se libérer des doutes et avancer dans notre apprentissage.
Pendant ce temps, Jared se débat dans le cercueil et tente de trouver une solution. Il
aperçoit un trou de serrure sur l’un des côtés du curcueil. Il utilise la clé qu’il a trouvé
plus tôt. Elle le délivre en le faisant tomber vers le bas. Encore une fois l’image de la
chute est à associer à une prise de conscience. La clé qu’il a trouvé est une clé
représentant le lien qui nous unit toujours à nos passions dormantes. En se rapprochant
de nous-même, en restant connecté avec nous-même, nous pouvons outrepasser les
exigences et la pression de la société afin de se rapprocher de notre être intérieur. Ce
constat s’associe à une image subliminale montrant un téléphone étant décroché, plus
tôt dans le clip quand Jared Leto s’approchait de la porte noire scellée. Le téléphone
décroché se rapporte à la représentation de l’humain connecté avec son être intérieur.
Tomo lui trouve un vieux grimoire verrouillé sur le sol, qu’il arrive à ouvrir grâce à sa
clé. À l’intérieur se trouve un parchemin, et une phrase subliminale vient s’ajouter à la
scène, où on peut lire “Find the Argus Apocraphex”28. Le grimoire est une image de la
connaissance, du savoir qui se trouve dans les écrits. L’Argus Apocraphex aurait même
un rôle en lien avec la divination, il aurait une connaissance de l’avenir. Ce parchemin
que trouve Tomo est l’écrit qui va le guider vers la compréhension et l’apréhension de
28 Traduction en français : “Trouve l’Argus Apocraphex”
L’Argus Apocraphex est selon la mythologie de Thirty Seconds To Mars un vieux document dans lequel
un lien avec le futur existerait.
49
la vérité.
Ainsi chacun des trois membres du groupe s’approche de la fin de leur voyage, bien que
cette fin reste encore inconnue.
Death
Le chapitre commence par l’arrivée de Jared dans une rue où trois enfants écrivent des
mots et dessinent des graffitis sur le sol et les murs sans laisser un espace vide. Ils
utilisent des couleurs très vives. En apercevant le chanteur, ils se lèvent, l’observent et
s’enfuient. Jared se retrouve alors tatoué sur l’ensemble de son corps, de mots et
symboles divers. Les enfants sont les anges gardiens de notre psyché et Jared s’éveille
en tant que passions. Au travers de toutes les expériences vécues et du savoir
rassemblés, les passions dormantes ne sont plus dormantes, elles se sont éveillées et
veulent s’exprimer. C’est le symbole qu’il y a derrière l’apparition des tatouages. Il ne
reste plus qu’aux passions de se confronter aux peurs et de les évincer pour toujours.
Tomo, quant à lui, arrive dans une soirée bondée de monde et de flashs provenant des
lumières de la discothèque. Il enfile des lunettes de soleil avant de pénétrer dans le lieu
et se fond dans la foule. La symbolique finale de cet aspect de notre subconscient qui a
atteint sa destination est que la liberté n’est qu’une illusion au sens propre du terme.
Elle ne s’obtient pas complètement mais il n’est pas non plus nécessaire d’être entravé
et de se laisser dévorer par notre monde chaotique. Nous pouvons rester maître de notre
vie en vivant avec les autres, c’est ce qui est symbolisé derrière les lunettes de soleil que
porte Tomo.
Shannon retrouve la femme, et c’est une étreinte passionnée qui les lie enfin. Le
symbole de cette scène est l’atteinte de la connaissance de soi-même.
Dans la dernière scène, Jared fait face à l’homme masqué, et sort victorieux du combat.
Les passions peuvent s’exprimer à présent que les peurs qui les entravaient n’existent
plus.
Conclusion
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Pendant tout le clip, les flashs où nous apercevons Jared Leto jouant avec une femme a
une forte signification également. Il commence par lui bander les yeux, puis la bouche
et enfin il la menotte. Il coupe ainsi dans leur ordre d’importance les trois principaux
sens de l’être humain qui le rationalise. C’est en se délivrant des ses assurances
matérielles que nous pouvons atteindre notre être intérieur. Alors, la découverte de la
notion de la liberté et la compréhension de notre être nous permet ainsi de triompher de
nos peurs et de dompter nos passions. En comprenant et en contrôlant ces passions,
nous pouvons nous sentir libre et exprimer notre libre arbitre. Cette réflexion recoupe ce
qu’énonce Descartes dans son livre “Les Passions de l’Âme”. Par l’intermédiaire du
fétichisme, il y a dans ce clip plusieurs niveaux de lecture qui peuvent être l’image de
bonnes comme de mauvaises choses. Nous revisitons une des plus vieilles théories
philosophiques.
51
52
En résumé
Le latex et le vinyle se retrouvent de plus en plus dans les médias (le cuir y étant depuis
très longtemps intégré), dans des films tels que les suites des Batman (1989, 1992,
1995), Matrix (1999, 2003, 2003) et Underworld (2003, 2006, 2009, 2012), avec les
personnage de Batman, Néo, Morpheus, Trinity, Selene, dans la série télévisée Alias
(2001 - 2006) avec le personnage de Sidney Bristow, certains clips d'artistes tels que
Britney Spears dans Womanizer (2009) ; Kylie Minogue dans All I See (2007) ;
Rihanna dans Umbrella (2007), Pour It Up (2013) ; Lady Gaga dans Bad Romance
(2009), Alejandro (2010), Telephone (2010), Judas (2011), Born This Way (2011) ;
Avril Lavigne dans Here’s To Never Growing Up (2013) ; 30 Seconds To Mars dans
Hurricane (2010). Le personnage de Catwoman campé par Michelle Pfeiffer dans le
film Batman, le défi, vêtu d'une combinaison en vinyl intégrale, est devenu une image
du monde fétichiste. Le vinyle et le latex se retrouvent encore dans la mode, grâce à des
créateurs tel Patrice Catanzaro ou Clémentine Little Doll. L'émergence d'Internet a
permis une popularisation de l’univers du fétichisme, notamment avec l'apparition de
vendeurs spécialisés sur des plates-formes de vente telles qu'eBay ainsi que la
popularisation de sites commerciaux proposant des créations de tenues fétichistes et des
photos ou vidéos de mannequins fétichistes. L’univers s’est largement ouvert et la
démonstration de sa popularisation se fait dans tous les domaines. Sa force symbolique
très grande, il permet l’expression de grands courants de pensées. Sa démonstration est
très large et très éloigné du seul monde sexuel que les préjugés lui ont apporter.
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54
Troisième partie
Cette partie va exposer des hypothèses qui seront vérifiées à travers un corpus de
données récoltées auprès de différentes populations ciblées. Ces populations ont été
solicitées à partir de différents médiums pour récolter des informations sur
l’appréciation du milieu fétichiste. À partir des hypothèses énoncées et des données
récoltées, la mise en place de réalisation d’un projet pour répondre à la problématique
initiale. Les populations interrogées concernent les 18 à 35 ans, des étudiants, des
jeunes actifs, des jeunes cadres. Toute une population qui a les outils sociaux pour
accepter certains aspects d’un milieu qu’elle n’intègre pas à sa vie de tous les jours s’ils
lui sont présentés avec des arguments qu’elle est en mesure de comprendre. L’étude se
cantonne à la région parisienne. Paris est connue comme étant la ville de la mode. De
grands couturiers ont été dévoilé au monde et viennent de la capitale comme Dior,
Chanl et Vuitton. Principalement présent dans le 8e arrondissement, avenue Montaigne
ou rue du Faubourg-Saint-Honoré, depuis plus d’un siècle Paris est souvent désignée
comme la ville de la mode.29 C’est le lieu idéal pour mener ce mémoire qui s’oriente sur
un mouvement lié à la mode.
Hypothèses
L’hypothèse initiale va être celle qui répond à notre problématique. Le fétichisme peut
être revalorisé par son clivage avec le côté sexuel. Les personnes auraient moins peur de
s’intéresser au milieu si la dépravation sexuelle à laquelle le milieu est tant attaché était
écartée.
Le sexe serait un aspect indispensable du fétichisme. Le fétichisme serait un
mouvement sexuel, rempli de pratiques liées au sadomasochisme et à la torture. Il
s’agirait d’une déviance sexuelle malsaine.
29 Informations surParis tirées du site :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Paris#Paris.2C_capitale_de_la_ mode_et_du_luxe
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Le fétichisme est un mouvement lié à la mode. Les couturiers maistrisent les différentes
matières et rivalisent de créativité pour présenter des tenues variées.
Le fétichisme est un mouvement très fermé, réservé aux initiés. Il reste entre initiés. Il
ne s’intègre pas à la vie des autres personnes qui ne connaissent que peu l’univers.
Le fétichisme possède une ou des valeurs sociales qui lui permettrait de se populariser.
Le milieu aurait une raison qui le pousserait à cette popularisation.
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Corpus
Questionnaires
La première population a avoir été interrogée est un groupe de jeunes étudiants hommes
et femmes entre 20 et 25 ans. Il a rempli deux questionnaires. Le premier avait pour but
de récolter l’avis le plus impartial de la population ciblée sur ce qu’est pour elle le
fétichisme. La question du fétichisme est noyée parmi plusieurs questions très générale,
de sorte que la personne qui y répond ne connaît pas le but du questionnaire. (Annexe 1)
C’est ainsi qu’à la question “Que pensez-vous du fétichisme ?” 54 % de la population
est mal à l’aise ou peu réceptive sur le sujet. 68,2 % des garçons interrogés sont peu
réceptifs quand 57,1 % des filles se montrent plus intéressées. Chaque personne
interrogée a justifier son choix. 54,25 % de la population interrogée estime que la
pratique du fétichisme est un choix qui ne concerne que les intéressés tant que les deux
parties sont consentants. 16,75 % est mal à l’aise pour parler de ce sujet. 15,75 % ne
veut pas en parler. 11,25 % est dégoutée par le sujet. 2 % de la population se montre
intéressée et ouverte à la discussion.
Le deuxième questionnaire pose des questions centrés sur le fétichisme. (Annexe 1)
Plus précisément, ces questions concernent surtout les matières les plus utilisées pour la
conception des tenues fétichistes. 82 % de la population interrogée est contre le latex, et
81 % est contre le vinyle, ces deux matières étant trop connotées par le sexe selon les
justifications. Le cuir est accepté par 66 % de la population, qui y voit plus le côté rock
et punk dans cette matière. Le harnais fétichiste et la pratique du bondage est rejetée à
92 %, la population associant automatiquement les deux à des pratiques
sadomasochistes. La dernière question du questionnaire propose à la personne
interrogée d’essayer une tenue fétichiste avec le côté sexuel du milieu complètement
absent. Sur toute la population 44, 75 % est prête à tenter l’expérience, 52,1 % sont des
filles et 47,9 % sont des garçons.
Les questionnaires ont mis en avant que les filles sont plus ouvertes au sujet et seraient
plus curieuses au point de vouloir tenter de s’immerger dans le milieu, à partir du
moment où le côté sexuel est mis de côté. Ce côté sexuel est très présent dans l’esprit de
chacun.
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Débats
Des débats ont été organisés avec différents groupes ne venant pas du milieu fétichiste.
Les débats ont duré entre 45 minutes et une heure en fonction des groupes. Le premier
groupe était composé d’un groupe de 7 personnes de sexe mixte entre 26 et 35 ans. Le
second a été un groupe de 7 filles entre 18 et 25 ans et le troisième était un groupe de 6
hommes entre 18 et 25 ans. Ces débats ont tourné autour de la mode, des jugements
estéthiques, du fétichisme et des valeurs morales et sociales qui sont véhiculées par ce
milieu. Les deux plus jeunes groupes ont été séparé par sexe pour éviter les regards
portés par le sexe opposé et éviter les blocages dûs à ces regards. Le groupe mixte a
permis de récupérer des informations avec les possibilités de regard sur l’autre sexe,
cela a permis de vérifier si les discours étaient plus réducteurs.
Les 26 à 35 ans
Ce groupe définit la mode comme un milieu important dans le sens où il permet
d’exprimer sa personnalité. Pour des questions d’identité, la mode peut avoir son
importance, cependant la limite peut être atteinte en fonction du regard des autres. Les
vêtements sont reconnus comme étant une marque identitaire pour un individu. Mais le
regard des autres peut préoccuper les individus. Dans le cadre professionnel le port d’un
uniforme est complètement intégré par le groupe, cela permet une identification du rôle
des employés. Dans le cadre privé, même si le groupe reconnaît être bien mieux habillé
qu’en tenue professionnelle, il vise plutôt des habits fonctionnels qui permettent une
liberté de mouvement plutôt que des vêtements basés sur l’esthétique. De plus, il admet
porter des tenues en fonction des situations. Pour des sorties avec d’autres personnes
peu fréquentées, le groupe porte plus une tenue plus recherchée. Avec des personnes
proches, le groupe porte des tenues dans lesquelles il est plus à l’aise.
À propos de la mode, ce groupe trouve qu’une personne suivant constamment la mode a
un souci identitaire et n’arrive pas à se trouver une personnalité. Le côté financier est
aussi un frein, comme la mode est très changeante, c’est un budget important. Le
groupe n’associe pas un ou plusieurs styles à des tenues qui sont choquantes. D’après
lui, les tenues deviennent trop choquantes quand elles sont trop en décalées même avec
leur propre mouvement.
58
Pour ce groupe, le côté sexuel peut être un gros frein à cet univers. Cependant, une fois
cet aspect écarté, la meilleure façon de mettre en avant ce milieu est de le présenter
comme une expérience innatendue à vivre, qui va surprendre les personnes qui ont des
idées préconçues sur le fétichisme. Ensuite, c’est au marketing de mettre l’accent sur
l’aspect vestimentaire pour montrer l’esthétique du milieu afin qu’il plaise. Mais la trop
forte connotation sexuelle du milieu empêcherait le fétichisme de devenir une mode
populaire. Nous passerions d’une mode où la sexualité est actuellement implicite à une
mode où la sexualité serait trop explicite.
L’aspect vestimentaire est contraignant, car il apparaît comme un handicap pour les
membres du groupe. Ils craignent une liberté de mouvement réduite. Toutefois,
certaines filles reconnaissent ne pas être gênées quand elles portent des corset parce
qu’elles ont eu l’habitude d’en mettre. De plus, les 26 à 35 ans imaginent un
mouvement où la nudité est mise en avant. Le fétichisme serait un milieu où l’on
cherche à être le moins vêtu possible.
La conclusion de ce débat est que le fétichisme est mal connue de la population. Des
idées préconçues mènent à des méfiances vis-à-vis de cet univers, mais il n’y a pas de
condamnation définitive qui est donnée. L’idée principale de ce groupe est “tant que
nous n’essayons pas, nous ne jugeons pas”.
Les filles entre 18 à 25 ans
Le groupe n’est pas très au fait de ce qui se passe dans le milieu de la mode. Les filles
s’habillent plus en fonction de ce qu’elles aiment. Elles reconnaissent que cette attitude
est assez récente, car étant plus jeunes elles s’habillaient comme les autres, par peur du
jugement fort des autres enfants dans le cas où elles portaient une tenue décalée par
rapport à la norme. Quant à elles, les looks qui leurs déplaisent sont des looks qui
ramènent à des comportements qu’elles jugent irrespectueux. Au sujet du fétichisme, les
tenues ne choquent pas le groupe, ce serait plus les comportements qui pourraient le
gêner. Si la personne en tenue fétichiste insiste dans ses propos, le mal aise apparaît.
Mais voir la personne en tenue intégrale peut au pire interroger le groupe. Les
accessoires fétichistes amènent le groupe à penser au sexe. L’exemple de la boule
baillon est donné pendant le débat, comme un accessoire pour une tenue fétichiste. Les
filles l’associent toutes à des pratiques sexuelles, sans avoir de réelles justifications pour
59
cette association. Cependant, elles avouent être capable d’avoir une relation
sentimentale avec un fétichiste. Le groupe complet reconnaît ne pas pouvoir justifier
cette relation à leurs parents, il est unanime sur le fait que ceux-ci ne seront pas assez
ouvert pour accepter ce style, ici le groupe dénonce un problème générationnel. Même
avec des personnes de leur âge, le groupe reconnaît qu'il existerait un malaise
inexpliqué fasse un individu fétichiste pratiquant. Pourtant dans l’intimité, tant que tout
est consenti entre les deux personnes, il n’y aurait pas de gènes ou de blocage. Le
groupe porte une importance pour ce qui touche à l’image et à l’intime. Il y a aussi une
importance dans ce que l'on peut faire ou ne pas faire, à savoir ne pas imposer une
vision aux autres que nous-mêmes nous n’aimerions pas voir. Cependant, sous couvert
d’un événement exceptionnel ou d’un cadre intime, les filles seraient prêtes à porter une
tenue fétichiste.
Le débat s’est ensuite orienté sur la question de la justification d’un choix de vie
fétichiste face à son enfant. Le groupe pense qu’il faudrait aborder la question en
douceur, mais ne doute pas que l’ouverture d’esprit qu’il aura transmis à leurs enfants
leurs feront accepter la situation. Là encore, dans le cadre privé, la justification se fait
plus aisément.
Ce qui ressort de ce débat, c’est que le milieu fétichiste a encore une valeur de tabou. Il
peut intéresser voir même être accepté par certaines personnes, mais l’image que cela
risque de renvoyer dérange encore.
Les garçons entre 18 à 25 ans
Ce groupe a différents points de vue sur la définition du milieu. Certains l’associent à
des relations sexuelles. D’autres voient plus en ce terme un dévouement lié à un objet,
proche d’un excès. Ceux qui voient dans le fétichisme un acte sexuel s'imagine que la
pensée collective dans notre société tend à pointer du doigt cette pratique, en la
désignant comme étant une dépravation. Ils ne condamnent pas cet univers, mais le
pense condamner par la majorité. Quant aux adeptes de l’axe de la dévotion, ils placent
les collectionneurs et les fétichistes sur une même échelle de valeurs. La différence avec
le collectionneur tiendrait d’un rapport plus intime à l’objet fétiche. Quoiqu’il en soit, le
milieu fétichiste reste un univers mal assumé en société face a des nons pratiquants. Le
parallèle est fait avec l’univers punk, qui s’est popularisé, et que l'on peut retrouver chez
60
certains jeunes sans qu'ils reçoivent de jugements sociaux ou moraux. Cela est justifié
par le groupe par la récupération et la socialisation du mouvement punk. Ce qui n’est
pas le cas du fétichisme. Un exemple de ce qui aurait pu permettre la banalisation du
mouvement punk est la musique. La musique de ce mouvement pourrait être un vecteur
de l’ouverture du punk à la société. Dans le fétichisme on ne retrouve pas ce vecteur qui
pourrait permettre une ouverture sociale, il n’y a pas de musique fétichiste. Le vecteur
artistique qui véhicule le fétichisme est celui du vêtement, de la mode. L’univers de la
mode s’est inspiré du fétichisme pour mettre en scène ses créations. De grands créateurs
comme Jean-Paul Gaultier, Thierry Mugler, Helmut Newton se sont inspirés du
fétichisme. Cependant le groupe vois mal la passerelle se faire entre mode et
popularisation. La mode a l’argument artistique pour justifier l’emploi du fétichisme,
mais si le mouvement se popularise le décalage artistique n’opèrera plus d’où un risque
d’impression de vulgarité dans les tenues fétiches. Comme les filles du groupe
précédent, les garçons s'imaginent dans une situation fétichiste sous couvert d'un
événement exceptionnel. Ils se voient mal justifier à leur famille un réel choix fétichiste.
Ils se sentiraient obligés d'expliquer à leur entourage ce même choix.
Certaines personnes du groupe s’interrogent à ce moment sur la banalisation de la
sexualité que l’on connaît actuellement, malgré que dans les années 70 et 80, le sexe
était une norme. Cette réponse est apporté par le directeur de mémoire qui était présent
lors des débats. Il annonce qu’en effet, outre la sexualité, le fétichisme lui même était
mis en avant pour que tout le monde puisse en profiter. C’était une mode reconnue dans
une époque où les jugements moraux n’étaient pas un problème de la société. Tout était
à voir, à tenter, à expérimenter. Ce qui va intervertir la tendance, c’est l’arrivée du sida
qui va créé une forte culpabilité de la société dans les années 90. Cette arrivée du virus
est ressentie comme une punition pour sa liberté sensuelle et sexuelle des années
passées. La question qui est posée alors est comment remettre en avant le fétichisme.
Une partie du groupe y répond en pensant que son retour ne serait pas possible parce
que tout mouvement émergeant ou réémergeant se voit attaqué par la critique. Une autre
partie contre argumente en parlant de la communauté geek, qui était décriée il y a une
dizaine d’années, mais qui aujourd’hui est devenue extrêmement populaire. En
regardant les séries télévisés, nous trouvons de nombreux exemples qui ont permis de
mettre en avant des communautés qui étaient mal perçues à leur début. La série NCIS a
mis en avant la communauté gothique avec le personnage d’Aby. Le Doctor House est
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un homme qui est solitaire, agressif, drogué, mais il est aimé par les téléspectateurs.
Dexter est un serial killer, mais lui aussi est aimé. L’excuse de Gregory House est qu’il
sauve des vies. Celle de Dexter, il tue les méchants. Ces personnages ont une fonction
sociale pour être apprécié par la société. Dans la vie de tous les jours, certaines
catégories de personnes ont un rôle sociale accepté, comme les prostituées qui ont
comme rôle sociale de réduire les viols selon la pensée du groupe. Il est ainsi intéressant
de se demander quel rôle social pourrait avoir le fétichisme, lui permettant d’être
accepté dans la société.
Rencontres professionnelles
Après avoir regroupé différentes opinions de la population des 18 à 35 ans, nous
étudierons les points de vue de différents professionnels du milieu fétichiste. Trois
professionnels exerçant différents métiers vont être présentés. Leur expertise et leurs
expériences vont apporter les éléments décisifs qui permettront de répondre aux
hypothèses posées au début de cette partie. La première rencontre se fait avec Gérard
Wajcamn, un écrivain, psychanalyste, maître de conférences au département de
psychanalyse de l'Université Paris 8. Il dirige le Centre d'Etude d'Histoire et de Théorie
du Regard. Il est auteur, notamment, de L'Objet du siècle ; Collection ; Fenêtre,
chroniques du regard et de l'intime et de L'Œil absolu (paru chez Denoël, 2010). La
seconde se fait avec le gérant de la boutique spécialiste du fétichisme numéro une en
France, “Démonia”, située dans le 11e arrondissement de Paris. La troisième rencontre
se fait avec Patrice Catanzaro, costumier fétichiste, reconnu comme le leader mondial
sur le marché et dans la mode fétichiste. Chacun d’entre eux va apporter une définition
du fétichisme et vont permettre de brosser le portrait de ce mouvement dans sa version
du XXIe siècle.
Du fétichisme hypermoderne
“Du fétichisme hypermoderne” est la conférence donnée le 8 novembre 2010 par
Gérard Wajcman à l’occasion de l’exposition “Brune Blonde” qui a eu lieu du 6 octobre
2010 au 16 janvier 2011. Cette conférence dure 80 minutes, pendant lesquelles le
psychanalyste soutient que la clinique ne peut plus avoir un regard sur le fétichisme car
62
le rapport lié au fétichisme de l’objet est devenu la norme sociale. Il va piocher des
exemples du cinéma pour démontrer son affirmation. Il commence la conférence en
citant André Félibien “Il en va de la poésie comme de la peinture”. André Félibien a
mis en scène dans un de ses ouvrages une brune et une blonde qui discutent de l’art.
L’une parle en prose et l’autre en vers. Le but de mettre deux femmes discutant d’art est
d’illustrer la muse. Dans toute l’histoire de l’art toutes les muses n’ont été que des
femmes. Il en va de même dans la mythologie, mis à part la peinture qui n’a pas sa
muse pour la représenter. Le cinéma aussi n’a pas de muse pour le représenter, mais à la
différence de la peinture, le cinéma est une fabrique à muse. Le cinéma possède des
muses mais également des femmes qui jouent dans les films. Les femmes sont à la fois
une cause et un objet du cinéma. La question que le psychanalyste pose alors est “les
femmes fétiches sont elles fétichistes ?”. Il y répond en mettant en avant que notre
rapport à l’objet est de plus en plus addictif, certaines personnes ont même un rapport
aux objets plus important qu’avec les autres personnes. En cela, nous sommes tous
fétichistes. Ainsi, quand nous regardons plusieurs fois un film pour admirer une actrice
qui y joue, nous agissons en fétichistes. Le cinéma peut aisément se caractériser comme
un art fétichiste. Le fétichisme se définit comme un rapport particulier avec le corps.
Hors le cinéma permet de faire des gros plan sur le corps ou des parties du corps. En
filmant seulement des parties d’un corps, celles filmées ne sont plus associées à un
corps mais à un objet indépendant détaché du corps, elle devient un fétiche. Le film
“Vertigo” d’Hitchcock en est l’exemple parfait. Le film s’attarde tout le temps sur des
parties d’un corps humain et finit par les cheveux, le fétiche d’Hitchcock. Ainsi le
cinéma présente des femmes objets, mais il a été dit plus tôt qu’elles sont aussi des
causes. Elles sont des causes en causant. La parole est un vecteur nouveau dans l’art. En
effet, le cinéma est un art qui présente des objets qui causent la parole. On parle des
femmes du cinéma. Ces femmes du cinéma ont le droit à la parole. Ce sont des causes
qui causent. Le réalisateur parfait selon Wajcman est Tarantino. C’est le réalisateur qui
fait parler les femmes et qui aime les faire parler. Que ce soit dans les films “Pulp
fiction” ou dans “Death proof” la parole est débordante. Les femmes parlent
énormément, le terme utilisé pour désigner cela est le “girl talk”. Cette parole
débordante est tel un flux, un flux incessant qui finit par rendre la parole similaire à un
acte. Ce n’est pas un acte qui va prendre la place de l’action, la parole ne va pas
remplacer tragiquement les armes comme certains réalisateurs peuvent le faire. La
63
parole est un acte du corps. L’énoncé fondateur du message de Tarantino c’est lorsque
la parole équivaut à la jouissance. Le réalisateur filme la jouissance. Dans “Death
proof”, une célébrité reconnue d’une émission de radio est filmée. Des filles roulent
souvent et longtemps sur les routes. C’est un parallèle à faire avec le flot de paroles qui
ne cessent d’être présent. Ce flot de paroles équivaut à un flot de jouissance. Dans le
film, parler de sexe est presque aussi bon que le pratiquer. Le “girl talk” revient ainsi à
dire que les femmes jouissent de parler. Ce qui fait jouir les femmes c’est la parole et
c’est différent pour les hommes. Les hommes et les femmes ne jouissent pas de la
même façon. Pour les femmes c’est l’acte du corps qui les fait jouir, pour les hommes
c’est l’action. Dans “Pulp fiction”, les hommes jouissent en tirant avec leur pistolet. La
célèbre scène du film où Vincent, l’un des deux protagonistes, parle à un homme dans
une voiture, il a un pistolet à la main et il tue l’homme en plein milieu d’une phrase. Ici,
l’action dépasse la parole. Autre exemple du film lorsque Jules, le deuxième
protagoniste, après avoir échappé à la mort par chance, pose ses armes et se consacre
uniquement au verbe. Il renonce ainsi par cet acte à la jouissance. Le film “Kill Bill”
annonce que les nouveaux héros du cinéma sont des héroïnes. C’est un préquel à “Death
proof”. “Death proof” est la théologie de la jouissance moderne. Le fétichisme y est
annoncé dès le début avec un gros plan sur les pieds d’une fille, suivi de la première
scène de “girl talk”. Les héroïnes sont des perverses. Tarantino pose en fait la question
“Qu’est-ce qui fait jouir les femmes”. Le réalisateur le montre tout au long du film. Le
fait que la parole soit abondante montre que la parole ne peut répondre à la question. Ce
qui fait jouir les femmes c’est le fait de parler. Dans le film, un groupe de filles parlent
de la conquête d’une des filles du groupe, et celle-ci dit qu’elle aime monter les
hommes. L’homme cheval est aussi une chose qui fait jouir les femmes. Les voitures le
sont aussi, bien qu’habituellement les voitures soient le truc des hommes. “Death proof”
est l’explication de ce retournement.
Le fétichisme chez les femmes est cliniquement refusé. La définition psychanalitique
définit le fétichisme comme étant la peur de la castration des hommes. De ce fait, seul
l’homme peut être cliniqué fétichiste. Freud lui-même plaisantait sur le sujet en disant
“Les femmes sont bien placées pour savoir qu’elle n’ont pas de bout.” Cependant, le
rapport entre les femmes, les chaussures et les vêtements est une preuve d’un fétichisme
ambiguë. C’est ce que raconte “Le diable s’habille en prada”. Une femme qui n’est pas
fétichiste est engagée par la prêtresse de la mode et du fétichisme du vêtement. Pour
64
accepter le fétichisme féminin, il faut partir du postulat que ce fétichisme n’est pas
l’inverse du fétichisme masculin. Cependant dans le cinéma les choses sont différentes.
La femme fétichiste existe. De plus, la femme est de plus en plus fétichiste, mais aussi
elle jette une lumière sur notre société d’objet qui est la nôtre. Le constat qui en resort
est que de nos jours la mode est le fétichisme du vêtement. La question qui se pose alors
est : est-ce que l’analyse clinique du fétichisme a encore un sens dans un monde
submergé par les objets ? Nous sommes dans le temps du fétichisme, il est généralisé.
Le fétichisme est devenu une norme dans notre société. Il ne se concentre plus que sur
une partie du corps mais il s’est étendu au produit manufacturé. Les grandes entreprises
encouragent le fétichisme comme elles encouragent les conduites addictives à l’égard
des objets. Toutes les personnes n’ont pas accès au fétichisme à proprement parlé. Mais
ce n’est pas grave car le fétichisme est devenu le marché et toutes les personnes veulent
avoir accès au marché. C’est ainsi qu’aujourd’hui le fétichisme pourrait s’appeler
“l’iPhonisme”. L’iPhone ou l’androïde est aujourd'hui le reflet du manque incurable et
de la totale dépendance que nous avons vis-à-vis de l’objet. Nous devons tous l’avoir
sur nous en permanence. C’est la perversion moderne d’un fétichisme moderne de
l’homme moderne. Le psychanalyste plaisante en disant qu’avant il y avait des maisons
pour exprimer sa perversion, maintenant il y a des boutiques à tous les coins de rue. En
ce sens, le fétichisme pourrait même être reconnu comme étant un moteur de
l’économie.
Cependant le triomphe de l’objet ne se constate pas qu’économiquement parlant. Avec
le marché des organes, les innombrables produits dopants existants, on peut affirmer
que le corps devient un produit manufacturé. On peut observer que le modèle du corps
vivant est le corps inanimé. Ceci est particulièrement frappant dans la fiction, plus
particulièrement dans les histoires policières. Aujourd’hui, c’est la médecine qui est
mise en avant, surtout les médecins des cadavres, comme le montre la série les
“Experts”. On parle de triomphe de la science, ce triomphe équivaut à parler de
triomphe de la technologie. C'est également le triomphe de l’objet. La police
scientifique est triomphante, elle tient le premier rôle. Mais c’est également donner le
premier rôle à la mort. Les policiers ne perdent plus leur temps à interroger des
suspects. Ils ne font parler que des objets ou des fibres. La technique a pris le pas sur la
parole. Les bouches ne s’ouvrent que pour récupérer de la salive. De ce fait, parler de
science revient à parler d’une dévitalisation du vivant. Le cadavre vaudrait autant qu’un
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Mémoire "La revalorisation du fétichisme"

  • 1. 1 e-art5 – Responsable de création Mémoire professionnel présenté par Cyrille HERVET Comment revaloriser le mouvement fétichiste ? Sous la direction de Monsieur Jean-Marie Gourlot 2013-2014 e-artsup n‘endosse pas la responsabilité du contenu développé dans ce mémoire. Il appartient à son auteur.
  • 2. 2
  • 3. 3 Plan du mémoire Résumé 7 Summary 10 Introduction 14 Le communautarisme par le style vestimentaire 14 Le fétichisme 15 Le fétichisme africain 16 Le fétichisme sexuel 17 Le fétichisme de la marchandise 18 Le fétichisme moderne 19 Constat 19 Objectif 20 Démarches 20 Première partie 24 Les matières 24 Le cuir 24 Le vinyle 25 Le latex 25 Le secteurprofessionnel 27 La photographie 27 Le porno-chic 28 La publicité 28
  • 4. 4 Le clip musical 29 Les jeux vidéos 29 Les chaussures 30 La mode 30 Les jouets érotiques 31 Les créateurs 32 Seconde partie 43 Le symbolisme 43 Description 43 Analyse 44 Birth 44 Life 47 Death 49 Conclusion 50 En résumé 52 Troisième partie 54 Hypothèses 54 Corpus 56 Questionnaires 56 Débats 57 Les 26 à 35 ans 57 Les filles entre 18 à 25 ans 58 Les garçons entre 18 à 25 ans 59 Les rencontres professionnelles 61
  • 5. 5 Du fétichisme hypermoderne 61 Le plaisir de la matière 67 Le fétichisme, une mode 70 Interprétation 74 Quatrième partie 78 Axes de développement 78 Réalisationen plusieurs étapes 79 Coûts 80 Planning 83 Planches tendances 83 Conclusion 87 Bibliographie 92 Annexes 98 Remerciements 111
  • 6. 6
  • 7. 7 Résumé La génération Y se distingue par sa diversité culturelle. Elle s’exprime particulièrement dans ses choix vestimentaires. L’intérêt pour la mode remonte au temps des rois et de l’aristocratie, où les premiers codes apparaissent pour les vêtements mais aussi le maquillage et les chaussures. Les tendances ont évoluées et ont créées de nombreux mouvements et divers styles vestimentaires. Depuis le milieu du XXe siècle la mode se diversifie et chacun peut choisir de s’habiller selon son mode de vie, son état d’esprit, voire ses convictions. Aujourd’hui la génération Y (celle qui va nous intéresser dans ce mémoire) n’a que l’embarras du choix. Nous pouvons déduire en fonction des vêtements portés, certains des comportements et attitudes de cette génération. Tous les styles sont permis, des plus normés au plus marginaux. Le fétichisme est un mouvement esthétique qui a une très forte personnalité vestimentaire. Le terme “fétichisme” renvoie à trois définitions. La définition des anthropologues et éthnologues du XVIIIe siècle, qui ont employé ce terme pour parler des cultes spirituels des africains. Le dictionnaire, qui lie le fétichisme à l’adoration obsessionnelle d’un objet ou d’une personne. Enfin la définition psychanalytique apparut avec Alfred Binet, au XIXe siècle, qui parle pour la première fois de fétichisme sexuel, qui sera soutenu et analysé par Freud par la suite. Le terme se retrouve aussi chez Marx, qui développe une théorie du fétichisme de la marchandise. Aujourd’hui, la psychanalyse tend, chez certains professionnels, à rendre le fétichisme plus large, dans le sens où les codes du fétichisme se retrouvent partout dans notre société. En effet, en regardant l’évolution du vêtement, les principales matières, qui sont employées dans la confection des tenues fétichistes, ont toutes des origines extérieures au milieu. Le cas le plus représentatif est le cuir qui est d’abord porté par les natifs américains, puis par les pionniers américains qui s’habillent dans un style western. Le vinyle est lui aussi un produit dont le fétichisme a hérité, il vient des mouvements rocks et punks des années 1970. Mais ce que toutes ses matières ont en commun, c’est le rapport avec le corps, l’impression de seconde peau qu’elles procurent quand elles sont portées, leur aspect brillant aussi est important. Au final, elles tendent à sublimer la plastique humaine. Cette volonté va pouvoir s’exprimer pleinement avec le média photographique. Ce moyen permet de créer des images uniquement cadrées par le
  • 8. 8 photographe sur le point intéressant le fétichiste. Il va faire grandir la communauté fétichiste, qui va pouvoir exprimer son intérêt dans des revues. De John Willie et Gilles Berquet, en passant par Thierry Mugler, David LaChapelle et Helmut Newton, pour arriver à Thierry Richardson, le monde de la photographie est passé de l’érotisme au fétichisme pour arriver aujourd’hui au porno-chic, version moderne et omniprésente du fétichisme. En outre, les photographes seuls n’ont pas marqué le milieu. Les modèles photographiés d’abord, puis les artistes et acteurs à partir de l’apparition du cinéma vont imprégner le milieu de noms représentant l’essence du fétichisme. Des personnalités telles que Daryl Hannah, Marilyn Monroe, Uma Thurman, Britney Spears, Kylie Minogue, Lady Gaga ou Miley Cyrus ont et continuent de marquer le milieu. L’industrie du fétichisme se retrouve partout, à la télé, dans les jeux vidéos, dans les publicités, en photographie. La mode est imprégnée du fétichisme. En France, Patrice Catanzaro est une figure du fétichisme à lui seul. Ses créations variées s’adressent au hommes et aux femmes, et ses collections ravissent toute la communauté. Son influence permet de lancer d’autres créateurs comme Clémentine Little Doll. Ainsi il peut apporter de nouveaux univers au milieu. Clémentine Little Doll fait partie de ses créateurs qui se sont intéressés à la matière, au fétichisme, et qui ont comme références les grands noms de la photographie et de la mode. Ce sont ses créateurs qui diversifient et font aussi grandir la communauté fétichiste. Ils ouvrent le milieu au monde. Certains vendent leurs produits aux artistes pour des clips musicaux ou des concerts. L’émergence d’internet a également permis une ouverture non négligeable du milieu. Le partage et la découverte se font plus facilement. Le constat final est que le fétichisme est partout. Il fait parti de notre culture et de notre vie sociale. Des analyses récoltées à l’aide de questionnaires mettent en avant un autre constat. Le fétichisme est encore trop lié à une connotation sexuelle péjorative. La population étudiée pense avant tout aux influences sadomasochistes et à la domination et soumission sexuelle, avant de voir un milieu basé sur l’esthétisme et le corps. Ses analyses permettent de mettre au point un fil rouge pour des débats autour du fétichisme et pour interroger des professionnels du milieu. Ses démarches mènent au constat que l’univers du fétichisme est mal perçu, et qu’une
  • 9. 9 redéfinition du milieu est nécessaire pour en montrer ses aspects les plus attrayants. Cette redéfinition se fait à travers un projet qui va être mis en place. Ce projet se découpe en deux étapes. La première étape est la phase d’observation du milieu. Un public de la population ciblée assiste à un défilé fétichiste dans toute sa diversité. Il s’agit d’un apprentissage par l’exhibition du fétichisme hors de tout contexte sexuel. La deuxième phase est celle de l’immersion. La population ciblée peut s’immerger dans le milieu en participant à une séance photographique durant laquelle le modèle est une personne venant de cette population ciblée. Dans le studio, la personne revêt une tenue blanche qui lui recouvre le corps des chevilles au cou. Des tenues fétichistes lui sont projetées dessus. Différentes photos sont prises du modèle dans différentes poses. Lors d’un travail de post-production, un montage en stop motion est réalisé, avec le modèle plongé dans un univers fétichiste. Ainsi la personne ayant participée à l’expérience reçoit une courte vidéo d’elle-même immergée dans une ambiance fétichiste. Cette phase permet une prise de conscience de la population cible, elle voit que les vêtements fétichistes ne sont que des vêtements comme d’autres, et qu’ils se portent à n’importe quel moment de la semaine comme tout autre habit. De plus les habits projetés proviennent d’ateliers spécialisés dans le milieu. Les participants à l’expérience recevront régulièrement des nouvelles des boutiques partenaires pour se laisser séduire par les nombreuses créations fétichistes qui n’effraient plus alors la population cible. Les habits auront donc une nouvelle connotation éloignée des premiers préjugés.
  • 10. 10 Summary Y generation stands out with his cultural diversity. It especially makes out with its clothing. Passion for fashion begins during the kings periods, where first rules appear for clothes, make-up and shoes. Rules changed since that time, and they created a lot of movements with a large variety of clothes. Fashion has a lot of diversity since the middle of the 20th century. Everyone can put clothes according to their way of life, behavior and convictions. Y generation has just to choose - this generation is the one which interested us in this document. We can even can say what kind of behaviour and convictions a person have from his clothes. Every looks are autorised from the most standard to the most eccentric. Fetishism is an aesthetic movement, which has a huge clothing personnality. The word ‘fetishism’ has three definitions. The first one is the anthropologist’s and ethnologist’s definition created in the 18th century, which spoke about africans religions and spiritualities. The definiton of dictionnary says that fetishism is the obesionnal worship of an object or a person. The psychoanalytical definition is the third definition. It is Alfred Binet, who speaks about it in the 19th century, and then Freud explains it several years later. The fetishism exists in a theory from Marx the merchandising fetishism. Some psychoanalysts aim to say that fetishism is larger than the Freud approach, because codes of fetishism are everywhere in our society. Moreover, main materials made for fetishism clothes come from other movements. Indeed, leather comes from Native Americans, then from the western style in the end of the 19th century. Vinyl comes from the rock and punk movements beginning in the seventies. The common thing each materials have is the relation, which exists whith the human body. They give the feeling of a second flesh, when they are worn. The shiny side of those materials is very important too. In fact, they enhance the human body. This expresses especially itself with the photographic medium. It can create incredible pictures, which show only what interested fetichistes. It also made grown the fetishist community, which could express itself throught magazines at first. From John Willie and Gilles Berquet, Thierry Mugler, David LaChapelle and Helmut Newton, to Thierry Richardson, the world of photography has known eroticism, then fetishism, to know porno chic, which is a modern and more standard kinf of fetishism. Moreover, there aren’t just
  • 11. 11 photogrtaphes, which enhance fetishism. Models, artists and actors engrave deep personnalities into the fetishism, some people like Daryl Hannah, Marilyn Monroe, Uma Thurman, Britney Spears, Kylie Minogue, Lady Gaga or Miley Cyrus had and have a great influence on the movement. The industry of fetishim is everywhere on tv, in video games, in advertisements, in photography. Fashion is hardly influenced by fetishism. Patrice Catanzaro is the french personnification of fetishism. His various creations are made both for women and men, and are very popular in the community. His influence permits to highlight some talented designers like Clémentine Little Doll, a french designers working with leather and colors. Clémentine Little Doll is one of those designers who have a great interest in material and fetishism, and who have been influenced by great names from photography and fashion. In fact, designers are what made the high level of diversity in the community, and what makes it growing bigger and bigger. They connect fetishism with the whole planet. They sell their productions for musics videos or shows. Furthermore the emergence of internet permitted a none negligeble aperture to the world. Sharing et learning are more easy today. The fact is that fetishism is everywhere in our regular life. It is in our culture and our social life. Answers from some questionnaries I created highlight another fact. Fetishism is too linked to a sexual connotation. The aim population studied think about the sadomasochism influences and the domination and submission sexual. It doesn’t think about an estheticism and a body environment. Those analysises permit to create interviews for different groups of people and for fetishistic professionals. We find out that fetishism is thought bad. A redefinition of the movement is necessary to highlight is good sides. That redefinition will be done throught a project in two parts. The first one will be an observation part for the aim population. It will see a fashion fetishist show with a large diversity of clothes. It is a part of learning throught the exhibition of fetishists without the sexual connotation. The second part is the part of immersion. The people can immerse themselves throught a photo shoot. People will wear a white tunic. Fetishist clothes are projected on the model. Different pictures are taken of the model in different postures. Then a video is created with pictures, where the model is
  • 12. 12 immersed in a fetishist environment. Thus people can have a short video, where there are a part of the fetishist world. It brings an understanding for the aim population. It is aware that fetishist clothes are just clothes. Anyone can wear them. Moreover, each person who takes place like a model will receive newsletters about fetishist shops to discover the whole diversity of this movement. To sum up, the goal to achieve is to give fetichism news connotations far away from falses first ones.
  • 13. 13
  • 14. 14 Introduction Le communautarisme par le style vestimentaire La communauté est définie comme un groupe d’humain dont les membres sont unis par un lien social. 1 La génération des 18 à 30 ans se rassemble aujourd’hui en communauté en se basant sur le style de vie de chacun. La différenciation entre chaque communauté va se faire par les musiques que chacune écoute, les habitudes et les attitudes, mais surtout par leur style vestimentaire. Emo-Rockeurs, Skateurs-Surfeurs, Footeux, Rappeurs, Tektonik-Teufeurs, Gaulois-Chanson, Studieux-Melomanes et Fashionistas, ces 8 groupes sont statistiquement parmis les principales tribus vestimentaires qui caractérisent cette génération Y.2 Chaque communauté a ses codes bien définis. Leurs tendances sont reconnaissables directement. Cette frénésie vestimentaire remonte au XIVe siècle en France. Les aristocrates se démarquaient des classes populaires au travers de la mode. En ce temps, nous ne cherchions pas à être beau mais à être visible. Plus nous portions de vêtement couteux, plus nous nous placions dans une position forte. Le maquillage et le parfum commencent également à apparaître. Peu avant la Révolution, des almanachs illustrés présentent les tendances vestimentaires parisiennes. Le XXe siècle voit la naissance de grands couturiers tels que Cacharel et Yves-Saint- Laurent. C’est l’industrialisation qui va populariser la mode. L’arrivée de la machine lance la création à grande échelle des vêtements. Les boutiques font leur apparition. En 1945, les États-Unis apportent en Europe la mode fashion qui ravit la jeune génération. Cette dernière a envie de changement, de couleurs, d’originalité. La mode va se scinder en deux, entre les puristes de la mode européenne et la nouvelle vague plus jeune. Les années 70 voient l’émancipation de la femme. Elle ose remonter les jupes au-dessus des genoux, ou porter le blue jean. Les années 80 voient les tops modèles se populariser et couvrir des premières de couvertures de presse pour adolescentes. C’est aussi à cette période que des styles décalés voient le jour, naissant du Hard Rock. Ces styles, comme 1 Définition de la communauté : http://www.la-definition.fr/communaut%E9 2 Informations provenantes du site Locita : http://fr.locita.com/style/la-tribu-comme-element-fondateur- de-la-generation-y-52356/#sthash.q0u9MN2N.kkr752Y7.dpbs
  • 15. 15 le Punk, le New Wave, le Gothique, se voient accorder des gabarits vestimentaires qui leurs sont propres. Enfin, dans les années 2000, les marques se vendent plus que le vêtement lui-même. Nous ne portons plus des baskets, nous portons des Nike. Ce phénomène va voir l’émergence de nouvelles marques proposant de nouveaux vêtements, dans des styles déjà définis mais également dans des styles différents, originaux, dans le but de percer dans ce milieu désormais vaste qu’est la mode. Puis, ce sont les célébrités qui vont vendre des marques, et amenent leur public à s’intéresser à la marque qui les engage. En définitif, la mode est passée d’un système d’identification professionnelle, régionale ou sociale à une identification personnelle. Elle permet de coder notre appartenance à une tribu et de donner des signes de reconnaissances à autrui.3 Le fétichisme Ce qui nous intéresse dans ce mémoire est une communauté qui est tout aussi reconnaissable mais moins connue, le fétichisme. Source de nombreux préjugés, ce milieu est très riche et mérite une revalorisation. Un retour aux orignies sont nécessaire pour faire resortir les premières valeurs du mouvement fétichiste. Le fétichisme est défini comme étant : 1. Un ensemble de pratiques connues surtout dans l’Ouest africain, fondées sur la croyance au pouvoir des fétiches et des esprits qui y résident. 2. Un respect poussé jusqu’à l’excès pour une personne, une idée, un principe, etc. Par extension. Obsession, culte obsessionnel. 3. Une perversion qui lie de manière exclusive l’excitation ou la satisfaction sexuelle à une partie du corps ou à un objet.4 3 Informations provenantes de diverses sources : l’article du site Portail de la mode : http://www.portaildelamode.com/histoire-mode-vetement.html l’article du site Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_mode_en_France l’article du site Elle : http://www.elle.fr/Mode/Histoire l’article du site Lespress : http://www.lexpress.fr/styles/mode/c-est-quoi-la-mode-en-2011_1049824.html 4 Définition du fétichisme : http://www.la-definition.fr/fétichisme
  • 16. 16 Le fétichisme africain Nous ne nous attarderons pas sur la première définition qui historiquement est le résultat d’une accusation portée sur les pratiques des populations non-occidentales par les anthropologues et les éthnologues. En effet, à propos des fétiches africains, éthymologiquement le terme "fétiche" vient du portugais “feitiço” qui signifie "fabriqué", "artificiel". Ce terme vient lui-même du latin “facticius” qui signifie “destin”. C’est le nom donné par les Portugais aux objets de cultes africains lors de la colonisation du continent au XVe siècle. Le terme “fétiche” a été introduit dans l’éthnologie par Charles de Brosse entre 1756 et 1760. Selon lui le fétichisme correspond aux croyances des africains, mais il généralise le thème aux nations faisant le culte d’animaux ou d’objets inanimés qui sont divinisés. Il lie le fétichisme avec des croyances absurdes. En outre, il apparaît que pour les contemporains de l’époque, le fétichisme représente des croyances dites primitives, brutes, absurdes ou stupides.5 Quand nous nous rendons au musée du quai Branly à Paris, qui regroupe des collections de civilisations du monde entier, dans la section africaine, aucun objet n’est lié au terme “fétichisme”. Les statuettes présentes sont des personnifications de divinités africaines, les masques fabriqués sont là pour rendre hommage aux défunts, des poteaux funéraires sont érigés pour apaiser les ancêtres. La bibliothèque du musée nous donne la définition suivant du fétiche : “Les rives du bassin du Zaïre sont le berceau des fétiches, mot d’origine portugaise “fetiçao”, signifiant factice mais aussi sortilège. Le fétiche capte les forces surnaturelles pour les mettre au service des hommes. Ces forces peuvent aider sur des questions médicales, sociales et politiques. Ils ne sont pas là pour effrayer mais comme médiateur dans les conflits. Les fétiches à clous (les clous permettent de transmettre les forces) sont fabriqués par des sculpteurs vilis ou kongos (Congo, Zaïre). Ils taillent dans le bois la forme première et ajoutent des ingrédients : plumes, clous, miroirs. Des reliquaires sont fixés à la place de leur nombril et renferment une charge magique dissimulée par un miroir ou un coquillage. L’accumulation d’objets est poussée quelque fois à son 5 Informations tirées du Culte des Dieux Fétiches, de Charles de Brosse, 1760. Du site wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Fétichisme
  • 17. 17 maximum pour renforcer son pouvoir.”6 Quand nous regardons derrière le terme “fétichisme”, nous trouvons des pratiques tels que le Vodu ou le Boliw, avec des clans sacrés régis par des règles très strictes comme la tribu des Legba, ou la tribu Fang avec leur culte des reliques des ancêtres protégés par des gardiens.7 Loin de l’interprétation partiale des conquérants de l’époque, nous découvrons tout un système politico-religieux qui régissaient les tribus de l’époque et qui se perprétue aujourd’hui encore dans certaines régions d’Afrique. Le fétichisme sexuel Le fétichisme apparaît en psychiatrie pour la première fois en 1842 avec le psychiatre Jean Esquirol. Il est repris en 1887 par Alfred Binet, qui explique le fétichisme dans l’amour en défendant l’idée que nous sommes tous fétichistes en amour. Ce constat est fait grâce à l’exemple d’une personne qui en courtise une autre. Temps que nous n’avons pas la personne que nous désirons, notre attention peut se porter sur un objet ou un accessoire qui est chère à l’être désiré.8 Le fétichisme est considéré en psychanalyse comme une paraphilie9. C’est Sigmund Freud qui étaye la réflexion sur le fétichisme 6 Définition tirée de “100 mots pour l’art africain”, Elsa Despiney, 2003 7 Infomations tirées des “Secrets Fétiches d’Afrique”, de Catherine de Clippel, 2007 8 Informations tirées du site wikipédia et de l’artic le de Céline Cadaureille “Les scripts secrets des fantasmes surpapier glacé”. 9 Définition de la paraphilie selon psychologie.com : Dans certaines classifications actuelles (DSM surtout), ensemble de troubles de la préférence sexuelle caractérisés par la recherche du plaisir sexuel auprès d'un partenaire ou d'un objet inadapté, ou dans des circonstances anormales. Ce terme générique recouvre des anomalies telles que l'exhibitionnisme, le fétichisme, le frotteurisme, la pédophilie, le masochisme et le sadisme sexuel, le transvestisme fétichiste ou le voyeurisme. Les paraphilies doivent être distinguées notamment des problèmes psychiques et comportementaux associés au développement sexuel et à l'orientation sexuelle (homosexualité p. ex., qui n'est pas, en elle-même, à considérer comme un trouble), ou des dysfonctionnements sexuels.
  • 18. 18 sexuel en présentant sa théorie comme liant le fétichisme sexuel avec l’angoisse de la castration. Selon Freud, seul l’homme peut devenir fétichiste. Cela est du à la découverte dans son enfance de l’absence de pénis chez sa mère. Ce traumatisme va créer en l’enfant une peur de la castration. Il comble cette peur en développant un fétichisme qui représente une extension phallique à la femme qui remplace son absence de pénis. À partir de ce moment, le fétichiste a besoin de voir ou de toucher un objet ou une partie d’un corps qui lui permet d’atteindre la jouissance. Le fétichisme de la marchandise Karl Marx traite lui aussi le fétichisme dans sa théorie du fétichisme de la marchandise. Il évoque un lien entre les relations sociales et la marchandise. Selon lui, le fétichisme est une valeur indéterminée de signification permettant de faire resurgir le travail humain. Le fétichisme est la marchandise, et c’est cette marchandise qui va définir les liens sociaux entre les humains. Marx énonce même que les producteurs n’ont de rapports sociaux que grâce à leur marchandise, et qu’une fois cette marchandise sur le marché la demande fera de cette marchandise un produit qui correspond aux exigences sociales, et définira si le mode de production correspond aux attentes sociales. L’échange de marchandises opère une régulation de la production sociale.10 Cette pensée se ressent aujourd’hui dans certaines pensées sociologiques. C’est dans le déterminisme technique que l’on ressent l’influence de Marx. Jacques Ellul, sociologue, professeur d’histoire du droit et théologien protestant français, dit dans “Le système technicien” de 1977 que “La technicisation croissante de notre société se manifeste non seulement par l’extension du règne machinique, mais également par le développement des techniques intellectuelles”. Le déterminisme technique veut que la société soit soumise au bon vouloir de la technique. L’usager ne sait pas ce qu’il veut, c’est la technique qui lui dit.11 10 Informations tirées : du site wikipédia, de l’article “le fétichisme chez Marx : entre religion, philosophie et économie politique”, du livre d’Émilie Notéris “Fétichisme postmoderne”. 11 Informations tirées de l’article sur le site Garage 21 : http://garage21.org/2013/12/10/les -sources-de- linnovation-determinisme-technique-et-determinisme-social-limpossible-entente-23/
  • 19. 19 Le fétichisme moderne Dans une époque où l’objet est mis en avant, où le matériel est accessible plus facilement par l’immatériel, la définition de base du fétichisme devient de plus en plus floue. Auparavant, le fétichisme était un cas bien spécifique en psychanalyse et nous ne parlions que d’hommes fétichistes à travers leur fétiche. Puis avec Marx, c’est la marchandise qui a valeur de fétiche, et qui régule les échanges sociaux. Aujourd’hui dans notre société de commercialisation, nous pouvons voir un acte fétichiste dans le fait de consulter régulièrement ses réseaux sociaux. En poussant plus loin la pensée marxienne qui définit les relations humaines du capitalisme exclusivement par l’échange de marchandise et la pensée freudienne qui veut que la jouissance nécessitant un objet autre que le sexe de son partenaire soit de l’ordre du fétiche, toute interaction créant un lien non direct entre deux être humains a un rapport avec le fétichisme. Ainsi, l’utilisation d’un iphone pour communiquer avec une personne peut créer une jouissance différente d’une conversation directe. Cette jouissance différente est semblable au fétichiste de Freud. Mais ce qui s’applique à l’iphone et aux liens sociaux s’applique aussi à des domaines comme les vêtements. Avec l’arrivée de la vente de vêtement pour la marque et non plus pour le vêtement, certaines célébrités sont utilisées pour faire vendre des produits vestimentaires. Cela va créer une idolâtrie pour les objets vendus. Gérard Wajcman12 définit, dans sa conférence du “Fétichisme hypermoderne”, la mode comme un exemple de fétichisme industrialisé, et se sert de nombreux exemples actuels pour étayer son propos. Constat L’univers du fétichisme reste ancré à certains préjugés. Notamment lié au côté sexuel pouvant être poussé à l’extrême dans ce milieu. Mais le fétichisme repose d’abord sur une esthétique à la fois visuelle et tactile. Les matières utilisées dans la fabrication des 12 Gérard Wajcman est écrivain, psychanalyste, maître de conférences au département de psychanalyse de l'Université Paris 8. Il dirige le Centre d'Etude d'Histoire et de Théorie du Regard. Auteur, notamment, de “L'Objet du siècle” ; “Collection” ; “Fenêtre, chroniques du regard et de l'intime et de L'Œil abs olu” (paru chez Denoël, 2010).
  • 20. 20 vêtements de ce style, le latex, le cuir, le vinyle, le wetlook, sont avant tout des tissus de confection. Certaines sont même utilisées pour d’autres styles vestimentaires dans lesquels nous ne retrouvons pas les connotations sexuelles que le fétichisme leur apporte. Ces connotations représentent un frein important dans la connaissance et l’appréciation de ce milieu. En effet, cela va créer un blocage qui va pousser certains à cataloguer le mouvement fétichiste. Aucune forme d’expression portant le nom de fétichisme ne sera tolérée. Le constat est le suivant, le fétichisme est au final une petite communauté qui a ses règles, ses codes comme toute autre. Mais elle offre des possibilités vestimentaires non négligeables qui peuvent intéresser la population, si le côté dérangeant est mis de côté. Comment revaloriser le fétichisme à Paris est la question qui va être traitée tout au long de ce document. La restriction à la capitale française sera explicitée plus loin dans le mémoire. Objectif Pour répondre au mieux à ce questionnement, il faut définir les raisons du blocage. Une fois ces raisons définies, il faut mettre en place plusieurs méthodes pour changer les mécanismes sous-jacents aux blocages. Cela permet de changer certains points de vue ou aprioris. Le but étant de modifier l’approche que certaines personnes ont du fétichisme. L’objectif va être de faire adhérer le fétichisme à un public nouveau. Pour cela, il faut créer un intérêt pour ce milieu. Une fois l’intérêt créé, il faut susciter de la demande. C’est cette demande qui apporte une clientèle nouvelle. Au final, il faudra mettre au point une ou plusieurs actions pour attirer un nouveau public dans le fétichisme, ou du moins l’intéresser à l’aspect vestimentaire du milieu. Pour aboutir à ces actions, un cadre de travail doit être défini. Démarche Après avoir positionné le milieu fétichiste dans le contexte mondial actuel, des données chiffrées viendront éclaircir les côtés positifs et négatifs du mouvement. Cela mettra en avant les points faibles sur lesquels nous baserons la réflexion pour répondre à la problématique. En terme méthodologique, différents moyens seront employés dans le
  • 21. 21 cas de ce mémoire. Tout d’abord, une recherche exploratoire va rassembler un ensemble de documents permettant de définir la place du fétichisme dans notre société. Au travers d’étude des styles vestimentaires actuels, des interviews et conférences données par des professionnels, des psychanalystes et des créateurs, une base solide d’unformations et de données va être définie. En parallèle de cela, des questionnaires et des focus groups vont permettre d’amener une base psychosociologique sur le fétichisme d’aujourd’hui. Une population donnée extérieure au milieu sera interrogée. Des premières données chiffrées seront ainsi rassemblées grâce à des questionnaires anonymes fournis à un public de 18 à 25 ans. Le but de ces questionnaires sera de définir une pensée collective autour du fétichisme en dehors du milieu fétichiste. Cela posera des bases sur la compréhension de la pensée sociale de ce milieu. D’autres données seront recueillies par l’intermédiaire de débats réunissant un groupe d’hommes d’une part, un groupe de femmes lors d’un second débat, puis un groupe mixte lors d’un troisième débat. Les hommes et les femmes seront séparés dans un premier temps afin d’éviter le regard d’un sexe sur l’autre lors des discussions sur un sujet hautement sexué. Ces débats permettront aussi l’élaboration de données sur le milieu fétichiste. Ces groupes d’individu échangent, se soutiennent ou s’opposent sur ce sujet, contrairement aux questionnaires qui regroupent une pensée individuelle qui ne subit pas le regard ou le jugement d’autrui. Les dernières données seront recueillies lors d’interviews de professionnels du fétichisme, qu’ils s’agissent de gérant de boutiques fétichistes, de psychanalyste, de créateurs. Le point de vue des professionnels viendra étayer ou contredire les pensées collectives de la cible des 18 à 35 ans. La confrontation entre les données des professionnels et de la population ciblée permettra de faire ressortir des failles à travailler pour améliorer la perception du fétichisme auprès d’un public nouveau. Enfin, des audits d’expérience utilisateur viendront confirmer toutes les données récupérées. Cela se traduira par des rapports sur les usages et habitudes des fétichistes lors de rassemblements, des observations de la clientèle des magasins spécialisés, des interviews de spécialistes du milieu. Cette méthode amènera des données qualitatives qui reflètent la pensée sociale, la réalité environnementale et financière de la population fétichiste. Cela mettra en avant les pensées, les valeurs et les opinions de cette population. C’est en s’immergeant dans un milieu que nous sommes à même de le comprendre. Cette compréhension est nécessaire pour identifier tous les mécanismes et repérer les points forts sur lesquels nous pourront nous appuyer pour
  • 22. 22 construire le projet et détecter les failles sur lesquelles il faudra travailler pour atteindre notre objectif.
  • 23. 23
  • 24. 24 Première partie Cette première partie du mémoire sert à définir le cadre professionnel et économique du fétichisme. Bien que l’influence fétichiste soit mondiale et que ce sujet peut toucher la communauté toute entière, nous allons nous concentrer sur son impact à Paris et ce que la France peut récupérer comme informations sur le sujet. Les matières Le fétichisme agit sur plusieurs domaines. Le premier domaine, qui touche directement le milieu, est celui du vestimentaire. Tous les vêtements en cuir, latex, vinyle et wetlook sont des valeurs sûres du fétichisme. Les autres domaines sont la photographie, la plublicité, la musique, les jeux vidéos, etc. Le cuir Le cuir est une matière qui a été empruntée à plusieurs styles. Le style western qui a vu les pionniers américains de 1870 porter des vestes en cuir. Le style militaire des années 1930, les aviateurs de l’époque portent la veste en cuir, qui va devenir un véritable symbole repris par Hollywood pour ses films montrant l’armée américaine. En 1935, les pièces en peau d’élan et de daim sont véritablement populaires. Le style des bikers, qui à la base portaient le perfecto en référence aux acteurs principaux du film “L’épopée sauvage” Marlon Brando et Lee Marvin, sorti le 4 juillet 1953, a détrôné la veste en jean pour imposer la veste en cuir comme l’élément symbolique de l’esprit rebelle de cette période. Le perfecto, veste en cuir, devient ainsi dans un premier temps le symbole des motards avant de s’élargir à l’univers du rock. C’est Elvis Presley qui va lancer le mouvement dans les années 50. En 1986, c’est le film “Top gun” qui impose la veste en cuir comme le vêtement des héros. Dans le sport aussi le cuir est très largement répandu. C’est dans le milieu équestre que le cuir est le plus présent. Puis c’est grâce à des groupes comme les Ramones que le perfecto s’intègre au milieu punk. Le perfecto
  • 25. 25 est le symbole de l’esprit rebelle qui ne suit ni les conventions, ni la mode.13 Le vinyle Le mouvement punk des années 70, non content de prôner le port du Perfecto, voit ses adhérents porter des vêtements en vinyle ou en latex, toujours dans cet esprit de rébellion.14 Le vinyle, ou vêtement en PVC, est un vêtement brillant fabriqué à base d’un matériau plastique dérivé du polychlorure de vinyle, le PVC. Ce type de vêtement est associé à divers milieux. Il est ancré dans l’univers fétichiste, mais d’autres styles ont vu en ce type de vêtement un message fort. C’est dans les années 60 que la mode voit apparaître ses premières créations en vinyle grâce au couturier Pierre Cardin.15 Dans les années 70, la mode se tourne vers les matières brillants, les chaussures et vêtements à la mode sont en vinyle. Le latex Le latex est du caoutchouc élastique élaboré à partir de la sève de l’hévéa ou synthétisé par polymérisation16 . C’est une matière propre au fétichisme, dans le sens où le vêtement donne véritablement l’impression d’avoir une seconde peau. Le côté sensuel de cette matière plaît à de nombreux adeptes et reste un domaine très apprécié pour les stylistes, comme Patrice Catanzaro17. Le latex va se populariser grâce à de nombreuses personnalités. Thierry Mugler18 est une personnalité de la mode qui va y contribuer. Il 13 Informations sur le cuir tirées du site Brooklyn Bridge Factory : http://www.brooklynbridgefactory.com/content/30-blouson-cuir-rebel-biker 14 Le mouvement punk se base sur la contestation de l’ordre sociologique de l’époque et s’oppose farouchement au mouvement hippie en vogue. 15 Pierre Cardin est un couturier et homme d’affaires français d’origine italienne. Il est né Pietro Cardin à Sant’Andrea di Barbarana, lieu-dit de la commune de San Biagio di Callalta en Italie, le 2 juillet 1922. 16 La polymérisation est l’assemblage de plusieurs molécules identiques afin d’en former une plus grosse. 17 Se référer à la page 30 et 70.
  • 26. 26 est une image forte du mouvement porno-chic qui voit le jour dans les années 90. Il joue avec différentes matières : le cuir, le métal, le vinyle et le latex. Il est vite reconnu internationnalement et est aujourd’hui une référence de la mode.19 18 Thierry Mugler est un styliste et grand couturier français né le 21 décembre 1945 à Strasbourg. 19 Informations tirées surles sites Wikipédia, La mode au fil de l’Histoire et Le Temps : http://fr.wikipedia.org/wiki/Vêtement_en_PVC http://fr.wikipedia.org/wiki/Mode_au_XXe_siècle http://fr.wikipedia.org/wiki/Latex_(matériau) http://histoire-du-costume.blogspot.fr/2012/05/le-mouvement-punk.html http://www.letemps.ch/Facet/print/Uuid/384cd008-aea6-11dd-bf59- ad3d6140ad87/Latex_une_brève_histoire_de
  • 27. 27 Le secteur professionnel La photographie Thierry Mugler est un styliste avant tout mais aussi un photographe. Hors la photographie est un autre domaine qui est une véritable source d’inspiration et d’expansion pour le fétichisme. La photographie fétichiste apparaît dans la même période que le terme “fétichisme sexuel”. Le fétiche apporte au fétichisme la jouissance qui lui est nécessaire et la photographie rapproche le fétichiste le plus possible de son fétiche. Dans le cadre du fétichisme psychanalytique, la photographie permet de fragmenter l’image du corps de la femme en ne présentant que les objets désirés des fétichistes. Nous entendons par objet le fétiche de l’homme. Hors, quoi de mieux que la photographie pour faire de gros plans sur les objets en masquant le reste du corps qui n’intéresse aucunement le fétichiste. Le XXe siècle voit des revues spécialisées apparaître dans ce milieu, telles les revues “Bizarre” et “Maniac”. Les premières publications de la revue “Bizarre”, dirigée par John Willie, se font clandestinement dans un premier temps. Le premier numéro sort en 1946. Elles permettent d’instaurer le fétichisme des pieds, de la chaussure et l’art du bondage20. Ce que la photographie apporte au fétichisme est le caractère véritable de chaque image. En effet, même si la photo n’est qu’une mise en scène, la scène a malgré tout réellement existée pour la prise de vue. C’est en cela que la photographie peut même devenir un fétiche. Mais il ne faut pas confondre fétichisme et pornographie. La photographie fétichiste ne contient aucun caractère pornographique. Elle est érotique. Elle joue sur la frustration et sur le plaisir de la frustration. Elle donne aux yeux des spectateurs une scène qui laisse libre cours aux interprétations, aux histoires et aux fantasmes. La photographie fétichiste est un plaisir visuel avant tout.21 Les revues soécialisées 20 Le bondage est un anglicisme désignant la pratique érotique consistant à ligoter une personne à l’aide de cordes,chaînes,ou tout autre accessoire. 21 Informations tirées de l’article de Céline Cadaureille “Les scripts secrets des fantasmes sur papier glacé”.
  • 28. 28 inspirent de nombreux artistes et créateurs, comme le français Gilles Berquet, qui dirige la revue “Maniac” publiée pour la première fois en 1994. C’est de la que se base le mouvement du porno-chic des années 1990. Le porno-chic La photographie est le media qui a pour but de sublimer l’image de la femme dans un premier temps, puis celle de l’homme. L’une des personnalités de ce mouvement est Helmut Newton, ami de Thierry Mugler, et grand photographe de la mode. Ce photographe a su s’imposer grâce à son style érotique particulier. Ses photographies s’inspirent directement du fétichisme, comme par exemple la photographie de l’actrice Daryl Hannah qui prend des poses tirées de l’art du bondage. Daryl Hannah in Santa Monica by Helmut Newton for Vanity Fair in 1984 L’amour de Newton pour la femme se retranscrit dans son travail. Il la présente souvent nue, dans des scènes originales, comme sa série sur la nudité urbaine. Mais il ne montre pas une femme vulnérable. Il la montre forte, belle, attirante, et fière. La publicité
  • 29. 29 Une autre image forte du porno-chic est David LaChapelle, né en 1963. Photographe initialement, il travaille un temps avec Andy Warhol qui l’avait repéré grâce à son travail. Il se lance dans la production de clips vidéos et de publicités télévisées. La femme est un élément central dans son travail. Il la fait évoluer dans un milieu érotisé très coloré. Il est décrit comme un maître du kitsch surréaliste populaire. La femme tient une position très forte et peut s’apparenter à une reine ou une divinité dans ses travaux. Dans la publicité pour “Schweppes”, que son studio Lachapelle Studio a réalisé, l’actrice Uma Thruman parle de manière ambiguë et érotique à un journaliste. C’est une femme confiante, forte et sûre d’elle qui s’exprime. Elle est couverte de vêtements et accessoires colorés, des paillettes sur la peau et un spot lumineux qui l’éclaire comme une lumière divine. C’est un des exemples les plus récents du porno-chic dans la publicité. Les jeux vidéos L’un des domaines du numérique qui a mis en avant le milieu fétichiste en premier est celui des jeux vidéos. Ils ont permis la naissance de personnages aujourd’hui cultes, venant tous d’univers, d’époques et d’ambiances différentes. La série des “Castlevania”, jeux de plateforme, qui a débuté en 1986, met en avant des personnage aux tenues brillantes rappelant le vinyle. La série des “Final Fantasy”, jeux de rôles, de Hironobu Sakaguchi qui a débuté en 1987, met en avant des personnages dans des tenues excentriques brillantes rappelant le cuir et le vinyle. Le personnage de Savyna du jeu de rôle “Baten Kaitos” sorti en 2003 évolue en body en cuir. Ce ne sont que quelques exemples de ce média qui regroupe de nombreuses références au milieu fétichiste. Le clip musical Dans ce média, une personnalité connue internationnalement qu’il faut mentionner est le photographe américain Terry Richardson, autre image du porno chic. Son œuvre la plus récente qui va nous intéresser est sa participation en tant que réalisateur au clip vidéo “Wrecking Ball” de l’artiste Miley Cyrus, qui est une artiste de la scène populaire très médiatisée actuellement. Son dernier clip “Wrecking Ball” est sorti en septembre
  • 30. 30 2013. Elle est mise en scène dans le clip en train de se balancer nue, vêtue uniquement de bottines, sur une boule de démolition de chantier maintenue par une chaîne épaisse. Elle est représentée comme une femme émotionnelle parce que nous la voyons pleurer, mais l’image de la boule de démolition fait d’elle une femme forte. De plus, le fait qu’elle dirige la boule en donnant elle même le rythme du balancier renvoie à l’image d‘une femme stable et déterminée. Le clip est aussi très largement érotisé et l’influence fétichiste y est flagrante. Il a accumulé plus de 450 millions de vue sur Youtube. Les chaussures Ce clip permet de rebondir sur un autre marché économique important du fétichisme, il s’agit du marché de la chaussure. Les chaussures viennent embellir les tenues fétichistes, ou simplement habiller une personne, mais elles font surtout le bonheur des rétifistes22. Pour les chaussures c’est la marque Démonia qui est la plus représentative du fétichisme en France. Les femmes plus particulièrement affectionnent cette marque qui propose de nombreux escarpins, bottes, bottines et autres chaussures à talon très en vogue dans le mouvement. Le talon est une image forte du milieu, il grandit la personne, que le talon soit pointu ou plat il pose l’image d’une personne décidée dans ses choix. Une autre marque de chaussures qui est prisée par les fétichistes est la marque New Rock. Cette marque inspire certaines tenues fétiches. Elle s’adresse pourtant à un milieux de bickers, hard rockeurs, gothiques.23 La mode En France, la personnification du stylisme fétichiste populaire est Patrice Catanzaro. Il 22 Le rétifisme est le fétichisme de la chaussure. Le nom de cette paraphilie vient de Nicolas -Edme Rétif (1734 - 1806) qui a décrit son attirance pour les chaussures féminines dans son roman paru en 1763 “Le pied de Fanchette”. 23 En 1929, la famille espagnole Ortuño fait perdurer la tradition familiale de confection de chaussures. La marque née en 1978 et se répand rapidement à travers le monde grâce à une sélection minutieuse des matériaux de confections. La marque s’adresse aujourd’hui plus à un public gothique et punk. Cette marque est en constante recherche d’innovation, et propose tous ses modèles avec des finitions manuelles.
  • 31. 31 est décrit comme l’homme qui habille la femme. Après avoir longtemps travaillé dans le stylisme de la fourrure et du cuir, il se lance dans la lingerie. Il cherche à sublimer la femme avec des matériaux qui lui ouvre un vaste espace de jeu. Il finit par se consacrer également aux hommes en voyant l’enthousiasme du public fétichiste pour ses créations. 24 La boutique Démonia est celle regroupant le plus de choix pour l’habillement fétichiste. Elle a un rapport qualité prix qui lui permet d’accueillir un large panel de clients. Les vêtements présentés s’adressent à une large cible, ils sont des plus discrets aux plus voyants. Certains magasins proposent de vendre des créations uniques réalisées selon les demandes des clients. C’est le cas de la boutique hollandaise Breathcatcher. Elle propose des tenues pour une élite fétichiste, dans le sens où ses créations uniques vont avec un prix qui est très élevé. C’est une classe sociale très aisée. Malgré le fait que nous ne nous occuperons pas de cette classe sociale, il reste quand même intéressant de parler de toutes les différentes faces du fétichisme. Les accessoires et jouets érotiques Un autre domaine commercial, qui est très vendeur, est le marché des accessoires et des jouets érotiques et sexuels. Ce domaine n’est pas un marché qui va nous intéresser dans son ensemble dans ce mémoire, cependant il doit malgré tout être évoqué lui aussi. En effet, tous les jeux fétichistes se basent sur l’utilisation d’accessoires annexes. Ce marché n’est d’ailleurs pas exclusif aux fétichistes, de nombreux couples tentent de pimenter leur relation avec ces jouets érotiques. Une différenciation se trouve dans le choix des accessoires et des jouets choisis par les clients, en fonction du milieu social, certains produits attirent plus que d’autres. Pour ce marché, la boutique Démonia est la première boutique de France. Elle a le plus large choix d’articles et ses prix se situent entre 10 à 700 euros. Cette industrie a permis la commercialisation des jeux sensuels qui se trouvent plus largement dans les bazars et autres boutiques d’accessoires et d’objets de décoration. Il en va de même pour les accessories, qui apportent toujours une valeur supplémentaire aux tenues fétichistes. Dans ce milieu, ce sont les masques qui sont le plus prisés. De formes et couleurs diverses, cette industrie est aussi diversifiées que celle des créations 24 Informations tirées du blog officiel de Patrice Catanzaro : http://www.patricecatanzaro-leblog.com
  • 32. 32 de vêtements. Les créateurs Depuis l’émergence d’internet, la communauté fétichiste peut partager beaucoup plus sa passion entres initiés mais aussi se faire connaître du reste du monde. Ce qui se faisait auparavant en cachette avec des revues vendues à la sauvette se pratique maintenant librement, sur les réseaux sociaux par exemple, tel que Facebook, premier réseau social en France. En novembre 2013, 26 millions d’utilisateurs étaient sur Facebook, 17 millions sur mobile, dont 11 millions d’utilisateurs quotidiens.25 La communication est bien plus aisée et nous pouvons aujourd’hui admirer les créations de tous. En Europe de nombreux créateurs ont percés dans le fétichisme. En Espagne le site de création en cuir de Cecilio Castillo Martinez, Leather Masks, a vendu des masques en cuir pour des artistes telle que Byonce, pour son clip “Haunted” qui sortira en 2014. C’est aussi cette web boutique qui a créé les tenues en cuir pour le court métrage de Madonna “Secret Project Revolution” en octobre 2013. Le masque de cuir que porte Tarja Turunen, ex vois du groupe finlandais Nightwish, lors de sa tournée Anteroom Of Death de 2013, vient aussi de cette web boutique. 25 Chiffres tirés du Blog du Modérateur : http://www.blogdumoderateur.com/facebook-chiffres- utilisation-france-et-monde/
  • 33. 33 Image tirée du clip de Beyonce “Haunted”,2014 Photographie de Tarja Thurunen Une autre boutique hollandaise, Breathcatcher, propose des créations à la demande.
  • 34. 34 La France a aussi un bel échantillon d’amateurs qui propose des créations originales et variées. Quentin Caffier, photographe français diplômé de l’ENS Louis Lumière, a exploré l’univers fétichiste pour en sortir une série photographique nommée Onnagata, pour Lash magazine, en février 2012.
  • 36. 36 Satina Loo Latex, une créatrice fétichiste, propose des habits en latex colorés.
  • 38. 38 Une jeune créatrice révélée par Patrice Catanzaro, Clémentine Little Doll, perce également dans l’univers du design fétichiste. D’une famille exclusivement artistique, elle s’intéresse tôt à la couture qui lui ai apprise par sa grand-mère. Elle étudie le stylisme à l’Atelier Chardon-Savard à Paris. Le vêtement ne lui suffisant pas, elle se tourne vers les accessoires puis vers la coiffure afin de toujours se perfectionner. C’est grâce à la photographie qu’elle arrive dnas l’univers fétichiste. Ses premiers pas dans ce monde vont l’inspirer pour de nombreuses créations. C’est à son retour de la Torture Garden à Londres qu’elle s’intéresse à la couleur qui est très présente dans l’univers fétichiste anglais. Elle se voit proposer de faire un défilé lors de la Nuit Démonia, plus grande soirée fétichiste française, en 2007. Ses créations très décalées sont à l’image du fétichisme moderne, un univers vaste, complexe et coloré.
  • 39. 39 Les Vertugadins & Entrelacées sont un atelier de création de costume. Ils s’inspirent de différentes époques pour leurs créations. L’atelier fonctionne sur la base de la location et propose aussi des cours et des stages de formation. Il travaille avec diverses matières dont le vinyle. Photographie des Vertugadins & Entrelacées
  • 40. 40 Kybari est un photographe qui crée des tenues en cordes. Photographie de Kybari
  • 41. 41 Une autre créatrice qui a réussi à percer, Sophie Richardoz, a créé des tenues en latex qui ont été acheté par Lady Gaga. Sa boutique, HMS Latex, créée en 2006, propose de nombreuses créations colorées à la demande des clients. Photographie de HMS Latex Il existe de très nombreux de créateurs comme Damien De Man, du Dragon De Brume, de Help!, de Cyber Art.
  • 42. 42
  • 43. 43 Seconde partie Après avoir étudié le fétichisme d’un point de vue concret, au travers de ses différentes définitions, de ses nombreuses influences et conséquences sur notre société, c’est à travers une vision plus métaphysique et philosophique que ce milieu va être présenté. Le symbolisme Comme tout milieu, le fétichisme est un mouvement remplit d’icônes et de symboles. Au travers d’un exemple concret, sorti le 29 novembre 2010 pour la première fois sur MTV, nous allons survoler quelques aspects du symbolisme dans le fétichisme. Il s’agit du clip musical “Hurricane” du groupe américain Thirty Seconds To Mars, produit par Bartholomew Cubbins, un pseudonyme d’un des membres du groupe, Jared Leto. Description Ce clip, qui prend la forme d’un court métrage de 13 minutes, met en scène les trois membres du groupe, Jared Leto, le chanteur, Shannon Leto, le batteur et Tomo Miličević, le guitariste. Jared Leto, leader du groupe, dira à propos de ce clip qu‘il n’a fait que “suivre sa créativité et sa muse, et c’est là où elles l’ont menées, à la création d’un film qui explore les lieux sombres de notre monde intérieur et de notre psyché”.26 Le clip plonge les trois protagonistes dans un monde irréel. Ils se retrouvent dans une version de Manhattan plongée dans la violence et le sexe. Les trois hommes vont chacun être poursuivis et attaqués par des peronnes nommées les “Gimps”27, pendant que des flashs nous montrent un couple de lesbienne Shae et Sunisa s’adonnant à des 26 Citation provenant d’une interview donnée par AOL radio en 2010. Citation originale : “ I really was just following my creative muse and this is where it led me, to make a film that explores some of the things that usually live in the darker corners of our universe and our psyche” 27 Gimps est un mot anglais qui a plusieurs traductions : les handicapés considérés comme agressifs, les éclopés, les boiteux, les idiots et les masochistes. La dernière traduction est plus compatible avec le style du clip.
  • 44. 44 jeux sadomasochistes. D’autres flashs nous montrent Jared Leto pratiquer un jeu fétichiste avec une femme. Dans le rêve, Shannon Leto poursuit une femme amoureuse de lui qui cherche malgré tout à lui nuire. Tomo Miličević est en quête de sens. Jared Leto est poursuivi pendant toute la vidéo par un tueur masqué muni d’une masse de chantier qui est obsédé par l’idée d’abattre le chanteur. Le clip se déroule en trois chapitres : “The Birth” ou la naissance, “The Life” ou la vie et “The Death” ou la mort. De plus, la vidéo a comme sous-titre “This is not reality, this is a dream.”, qui se traduit par “Ce n’est pas la réalité, c’est un rêve.”. Analyse Le sous-titre du clip donne le premier indice à la compréhension de la vidéo. Il s’agit d’un rêve. Le rêve est un moment privilégié où notre subconscient peut s’exprimer pour faire passer différents messages. Il se constitue en une succession d’images, d’émotions et de sensations dont le contenu et le but sont sujets à de nombreux débats. L’interprétation des rêves reste vague, subjective et elle varie en fonction des cultures, des sciences, des philosphies ou des religions. Elle peut être vu d’une approche très psychanalytique comme Freud la présente dans certains de ses livres. Elle peut aussi être vu beaucoup plus philosophiquement. Les hindouistes considèrent que nous sommes tous les êtres du même rêve d’un Dieu endormi pour des millénaires. Durant ce sommeil les hommes doivent réussir à atteindre une forme de spiritualité divine, en combattant toutes leurs émotions, leurs peurs et leurs instincts primaires, afin de renaître comme des êtres immortels. Ce clip est à l’image de cette philosophie. Les protagonistes vont traverser différentes épreuves et affronter des adversaires afin qu’ils se libèrent de leur condition humaine, qu’ils atteignent “La vérité”. Birth Le premier chapitre débute sur des vues de la ville où une tempête orageuse commence. La tempête représente des changements importants. La tempête arrive dès l’apparition du titre du chapitre “naissance”, cela nous ramène à tous les grands changements que
  • 45. 45 l’on vit pour se construire. La naissance étant en elle-même une tempête, la souffrance de la mère qui met au monde un être qui va apporter quelque chose de nouveau à ce monde, aussi insignifiant que cela peut être. Tout le corps médical qui s’affaire autour du lit, tel un gigantesque coup de vent, pour que tout se passe au mieux. Les proches de la future mère qui sont tendus, telle la foudre qui attend d’éclater au grand jour. Puis, l’explosion de joie quand l’enfant arrive. À cela s’ajoute la référence directe au nom du clip “Hurricane”, qui signifie en anglais tempête, ouragan. La chanson entière tourne autour d’un grand événement, d’un but majeur ou d’une vérité à atteindre. La première séquence qui ne montre pas la ville est le plan d’une plaque d’égout où une roue est représentée avec le nom de Manhattan inscrit dans ses rayons. La roue représente le temps dans la plupart des cultures, c’est aussi l’image de la roue de la vie (Saṅsāra or Saṃsāra). Dans les religions et philosophies asiatiques, cette roue est la représentation du cycle de la vie, la naissance, la mort, la réincarnation. C’est le flux continuel des choses qui ont été, sont et seront. C’est un rayon de conscience continue où se mélangent les émotions, les passions, les désirs et les expériences. Ce symbole va représenter la bataille interne qui anime les protagonistes face à leurs propres démons. C’est un combat interne que le rêve peut exprimer. Il confronte la pureté et l’innocence que l’on a à la naissance avec les enseignements sociaux, religieux et politiques qui viennent interférer et font apparaître les ténèbres qui pèseront sur notre vie. Deux des trois protagonistes nous sont présentés. Shannon Leto, qui conduit une moto, traverse une ville morte à toute vitesse. Tomo Miličević se promène dans le métro, vide également. Shannon représente les “connaissances” et Tomo représente la “liberté”. Au début de notre vie, nous sommes insouciants et ignorants. Nous vivons plus dans l’action que dans la connaissance, et nous fonçons tête baissée, tel le motard roulant aussi vite que possible sur la route de la vie. Tomo lui nous ramène à l’allégorie de la caverne. En restant dans le métro, il reste dans l’illusion des images furtives que le monde peut lui renvoyer. Il n’y a qu’en sortant de la “caverne” qu’il pourra vraiment apprendre et découvrir le réel. Une rapide flash nous montre une paire de menotte, pendante et ouverte. L’image nous renvoie à l’idée d’insouciance et d’ignorance qui nous habite à notre naissance. Il n’existe encore aucune chaîne, aucun lien qui nous entrave. Ensuite, nous voyons Jared Leto, endormi, dans un lit d’une chambre d’hôtel, qui se
  • 46. 46 situe en haut d’un gratte-ciel. Jared est la représentation des “passions dormantes” de notre subconscient. Le fait qu’il se trouve si haut symbolise son absence de contact avec la réalité. De plus, étant endormi, il ne s’affirme pas. Il reste en retrait du subconscient. Il se fait alors réveiller par un inconnu qui frappe à la porte de sa chambre. Une souris blanche dans une cage se met alors à tourner dans sa roue. Ce symbole représente l’éternel recommencement des mécanismes de notre vie. Si nous ne prenons pas conscience de nos mécanismes internes, nous risquons de répéter les mêmes actes, les mêmes événements. Seule une émancipation de nos barrières internes peut nous permettre d’aller de l’avant. Jared ouvre la porte de sa chambre, ne trouve personne de l’autre côté, mais voit des clichés pris de lui pendant son sommeil. La souris blanche se cache dans les copeaux qui tapissent sa cage. La symbolique de cette scène renvoie au fait que les animaux ressentent le danger avant les humains. La souris pressent l’ouragan qui approche. Le premier coup de fouet qui va éveiller les passions dormantes (en lien avec le premier flash montrant deux sadomasochistes en pleine action, l’un fouettant le deuxième) est la découverte des clichés. Le second choc, représenté à nouveau par de nouveaux flashs montrant des scènes sadomasochistes, est l’arrivée d’un homme portant un masque sadomasochiste, cachant totalement son visage et tenant une masse de chantier. Cette homme est l’image de nos peurs. Peurs sans visage car nous ne les comprenons pas toujours, bien qu’elles viennent progressivement nous habiter tout le long de note vie. L’homme s’avance vers la chambre de Jared. Ce dernier ferme sa porte, la verrouille et tente de ne rien laisser entrer à l’intérieur. Seulement, à l’instar des peurs qu’on ne peut empêcher de s’immiscer en nous, l’homme masqué force l’entrée du monde des passions dormantes. C’est à ce moment de notre vie que nous commençons à appréhender la réalité du monde qui nous entoure, on sort de notre insouciance et nous posons les pieds sur terre. Cette image est représentée par Jared qui saute de sa fenêtre pour échapper à son poursuivant et il tombe en chute libre jusqu’au pied du gratte-ciel où il se pose et s’enfuit, quittant définitivement l’insouciance. La scène suivante montre un homme et une femme sortant du métro. Les deux sont en tenues fétichistes et la femme tient le rôle de l’esclave de l’homme. Cette femme représente notre liberté, entravée par l’homme qui symbolise les freins de notre liberté. Tomo sort à son tour du métro, il quitte sa caverne et l’homme dominateur l’attaque. Le guitariste du groupe l’emporte. Il embrasse l’esclave qui lui transmet une clé lors de leur baiser. Toute cette scène exprime que la clé pour atteindre notre liberté se trouve en
  • 47. 47 dehors de nos premières croyances et que c’est en affrontant ce qui entrave notre liberté que nous pourrons atteindre la véritable liberté. En parallèle de cette scène, Shannon fonce toujours sur sa moto jusqu’à ce qu’une personne étendue sur la route le fasse se coucher littéralement sur la route pour ne pas écraser son obstacle. Le temps de l’insouciance se termine, et il se finit violemment, c’est une véritable prise de conscience qui nous sort de cette insouciance. Life La personne étendue sur le sol est une femme qui feignait d’être inconsciente. À l’approche de Shannon, elle se redresse et le poignarde en plein milieu du ventre. Elle lui passe autour du cou une clé accrochée à un collier, l’embrasse et s’enfuit. Le batteur retire le couteau et le jette. Le symbolisme de cette scène se base sur la trame scénaristique et philosophique du film Inception de Christopher Nolan sorti en juin 2010. Le coup de couteau est l’origine (inception en anglais) de la connaissance, plus exactement du désir de savoir. Le film de Nolan avance la théorie que la force la plus puissante qui habite la Terre est une idée. Même une toute petite idée, une fois implantée en nous, ne peut que croître jusqu’à nous obséder. C’est ce qui arrive à Shannon dans cette scène. Le baiser qui suit le coup de couteau signifie le plaisir qu’il va tirer de la réalisation de cette idée. Il doit apprendre. Il quitte définitivement l’ignorance et l’insouciance, maintenant qu’il est né, il doit vivre. Tomo assiste à une scène où un prêtre, un rabbin et un imam jette les livres sacrées de chacune de leur religion respective dans un feu autour duquel ils sont rassemblés. C’est une nouvelle étape pour le batteur dans sa quête de liberté, il s’affranchit de la religion, représentée par les trois grands courants religieux de notre époque, dans le feu de la liberté. Jared découvre une clé au bas d’une porte noire métallique scellée. Cette porte est la représentation des barrières sociales de notre époque qui contiennent nos passions dormantes. Le chanteur arrive ensuite dans un hall d’honneur rempli de cerceuils posés à même le sol, recouverts d’un large drap représentant le drapeau des États-Unis. Un cercueil est ouvert et vide. Jarred s’en approche pour l’observer, quand l’homme
  • 48. 48 masqué arrive derrière lui et lui assène un coup de massue qui le propulse dans le cercueil. Le fétichiste referme le cercueil qui devient alors identique à tous les autres. L’image derrière cette scène représente l’étouffement de nos passions par le poids et l’omniprésence de la société et de nos devoirs citoyens. Nous finissons par nous noyer dans la masse, ne pas nous affirmer pour suivre les politiques et les codes sociaux. Shannon retrouve la femme qui l’a poignardé, elle est assise sur un banc et l’attend. Il s’assied à côté d’elle. Ils s’embrassent de nouveau et elle le menotte au banc sur lequel ils sont. Elle s’enfuit et deux hommes masqués menacent Shannon. Il utilise la clé que la femme lui a remise plus tôt pour se libérer. Il affronte les deux hommes, gagne le combat et reprend sa recherche de cette femme. Le symbole de cette scène est l’équivalent des moments de doutes qui nous habitent. Dans sa quête de la connaissance, il a appris des choses, ce sont ses mêmes apprentissages qui vont à un moment le mener dans une impasse. Mais ce sont toujours ses mêmes connaissances qui représentent la clé pour se libérer des doutes et avancer dans notre apprentissage. Pendant ce temps, Jared se débat dans le cercueil et tente de trouver une solution. Il aperçoit un trou de serrure sur l’un des côtés du curcueil. Il utilise la clé qu’il a trouvé plus tôt. Elle le délivre en le faisant tomber vers le bas. Encore une fois l’image de la chute est à associer à une prise de conscience. La clé qu’il a trouvé est une clé représentant le lien qui nous unit toujours à nos passions dormantes. En se rapprochant de nous-même, en restant connecté avec nous-même, nous pouvons outrepasser les exigences et la pression de la société afin de se rapprocher de notre être intérieur. Ce constat s’associe à une image subliminale montrant un téléphone étant décroché, plus tôt dans le clip quand Jared Leto s’approchait de la porte noire scellée. Le téléphone décroché se rapporte à la représentation de l’humain connecté avec son être intérieur. Tomo lui trouve un vieux grimoire verrouillé sur le sol, qu’il arrive à ouvrir grâce à sa clé. À l’intérieur se trouve un parchemin, et une phrase subliminale vient s’ajouter à la scène, où on peut lire “Find the Argus Apocraphex”28. Le grimoire est une image de la connaissance, du savoir qui se trouve dans les écrits. L’Argus Apocraphex aurait même un rôle en lien avec la divination, il aurait une connaissance de l’avenir. Ce parchemin que trouve Tomo est l’écrit qui va le guider vers la compréhension et l’apréhension de 28 Traduction en français : “Trouve l’Argus Apocraphex” L’Argus Apocraphex est selon la mythologie de Thirty Seconds To Mars un vieux document dans lequel un lien avec le futur existerait.
  • 49. 49 la vérité. Ainsi chacun des trois membres du groupe s’approche de la fin de leur voyage, bien que cette fin reste encore inconnue. Death Le chapitre commence par l’arrivée de Jared dans une rue où trois enfants écrivent des mots et dessinent des graffitis sur le sol et les murs sans laisser un espace vide. Ils utilisent des couleurs très vives. En apercevant le chanteur, ils se lèvent, l’observent et s’enfuient. Jared se retrouve alors tatoué sur l’ensemble de son corps, de mots et symboles divers. Les enfants sont les anges gardiens de notre psyché et Jared s’éveille en tant que passions. Au travers de toutes les expériences vécues et du savoir rassemblés, les passions dormantes ne sont plus dormantes, elles se sont éveillées et veulent s’exprimer. C’est le symbole qu’il y a derrière l’apparition des tatouages. Il ne reste plus qu’aux passions de se confronter aux peurs et de les évincer pour toujours. Tomo, quant à lui, arrive dans une soirée bondée de monde et de flashs provenant des lumières de la discothèque. Il enfile des lunettes de soleil avant de pénétrer dans le lieu et se fond dans la foule. La symbolique finale de cet aspect de notre subconscient qui a atteint sa destination est que la liberté n’est qu’une illusion au sens propre du terme. Elle ne s’obtient pas complètement mais il n’est pas non plus nécessaire d’être entravé et de se laisser dévorer par notre monde chaotique. Nous pouvons rester maître de notre vie en vivant avec les autres, c’est ce qui est symbolisé derrière les lunettes de soleil que porte Tomo. Shannon retrouve la femme, et c’est une étreinte passionnée qui les lie enfin. Le symbole de cette scène est l’atteinte de la connaissance de soi-même. Dans la dernière scène, Jared fait face à l’homme masqué, et sort victorieux du combat. Les passions peuvent s’exprimer à présent que les peurs qui les entravaient n’existent plus. Conclusion
  • 50. 50 Pendant tout le clip, les flashs où nous apercevons Jared Leto jouant avec une femme a une forte signification également. Il commence par lui bander les yeux, puis la bouche et enfin il la menotte. Il coupe ainsi dans leur ordre d’importance les trois principaux sens de l’être humain qui le rationalise. C’est en se délivrant des ses assurances matérielles que nous pouvons atteindre notre être intérieur. Alors, la découverte de la notion de la liberté et la compréhension de notre être nous permet ainsi de triompher de nos peurs et de dompter nos passions. En comprenant et en contrôlant ces passions, nous pouvons nous sentir libre et exprimer notre libre arbitre. Cette réflexion recoupe ce qu’énonce Descartes dans son livre “Les Passions de l’Âme”. Par l’intermédiaire du fétichisme, il y a dans ce clip plusieurs niveaux de lecture qui peuvent être l’image de bonnes comme de mauvaises choses. Nous revisitons une des plus vieilles théories philosophiques.
  • 51. 51
  • 52. 52 En résumé Le latex et le vinyle se retrouvent de plus en plus dans les médias (le cuir y étant depuis très longtemps intégré), dans des films tels que les suites des Batman (1989, 1992, 1995), Matrix (1999, 2003, 2003) et Underworld (2003, 2006, 2009, 2012), avec les personnage de Batman, Néo, Morpheus, Trinity, Selene, dans la série télévisée Alias (2001 - 2006) avec le personnage de Sidney Bristow, certains clips d'artistes tels que Britney Spears dans Womanizer (2009) ; Kylie Minogue dans All I See (2007) ; Rihanna dans Umbrella (2007), Pour It Up (2013) ; Lady Gaga dans Bad Romance (2009), Alejandro (2010), Telephone (2010), Judas (2011), Born This Way (2011) ; Avril Lavigne dans Here’s To Never Growing Up (2013) ; 30 Seconds To Mars dans Hurricane (2010). Le personnage de Catwoman campé par Michelle Pfeiffer dans le film Batman, le défi, vêtu d'une combinaison en vinyl intégrale, est devenu une image du monde fétichiste. Le vinyle et le latex se retrouvent encore dans la mode, grâce à des créateurs tel Patrice Catanzaro ou Clémentine Little Doll. L'émergence d'Internet a permis une popularisation de l’univers du fétichisme, notamment avec l'apparition de vendeurs spécialisés sur des plates-formes de vente telles qu'eBay ainsi que la popularisation de sites commerciaux proposant des créations de tenues fétichistes et des photos ou vidéos de mannequins fétichistes. L’univers s’est largement ouvert et la démonstration de sa popularisation se fait dans tous les domaines. Sa force symbolique très grande, il permet l’expression de grands courants de pensées. Sa démonstration est très large et très éloigné du seul monde sexuel que les préjugés lui ont apporter.
  • 53. 53
  • 54. 54 Troisième partie Cette partie va exposer des hypothèses qui seront vérifiées à travers un corpus de données récoltées auprès de différentes populations ciblées. Ces populations ont été solicitées à partir de différents médiums pour récolter des informations sur l’appréciation du milieu fétichiste. À partir des hypothèses énoncées et des données récoltées, la mise en place de réalisation d’un projet pour répondre à la problématique initiale. Les populations interrogées concernent les 18 à 35 ans, des étudiants, des jeunes actifs, des jeunes cadres. Toute une population qui a les outils sociaux pour accepter certains aspects d’un milieu qu’elle n’intègre pas à sa vie de tous les jours s’ils lui sont présentés avec des arguments qu’elle est en mesure de comprendre. L’étude se cantonne à la région parisienne. Paris est connue comme étant la ville de la mode. De grands couturiers ont été dévoilé au monde et viennent de la capitale comme Dior, Chanl et Vuitton. Principalement présent dans le 8e arrondissement, avenue Montaigne ou rue du Faubourg-Saint-Honoré, depuis plus d’un siècle Paris est souvent désignée comme la ville de la mode.29 C’est le lieu idéal pour mener ce mémoire qui s’oriente sur un mouvement lié à la mode. Hypothèses L’hypothèse initiale va être celle qui répond à notre problématique. Le fétichisme peut être revalorisé par son clivage avec le côté sexuel. Les personnes auraient moins peur de s’intéresser au milieu si la dépravation sexuelle à laquelle le milieu est tant attaché était écartée. Le sexe serait un aspect indispensable du fétichisme. Le fétichisme serait un mouvement sexuel, rempli de pratiques liées au sadomasochisme et à la torture. Il s’agirait d’une déviance sexuelle malsaine. 29 Informations surParis tirées du site : http://fr.wikipedia.org/wiki/Paris#Paris.2C_capitale_de_la_ mode_et_du_luxe
  • 55. 55 Le fétichisme est un mouvement lié à la mode. Les couturiers maistrisent les différentes matières et rivalisent de créativité pour présenter des tenues variées. Le fétichisme est un mouvement très fermé, réservé aux initiés. Il reste entre initiés. Il ne s’intègre pas à la vie des autres personnes qui ne connaissent que peu l’univers. Le fétichisme possède une ou des valeurs sociales qui lui permettrait de se populariser. Le milieu aurait une raison qui le pousserait à cette popularisation.
  • 56. 56 Corpus Questionnaires La première population a avoir été interrogée est un groupe de jeunes étudiants hommes et femmes entre 20 et 25 ans. Il a rempli deux questionnaires. Le premier avait pour but de récolter l’avis le plus impartial de la population ciblée sur ce qu’est pour elle le fétichisme. La question du fétichisme est noyée parmi plusieurs questions très générale, de sorte que la personne qui y répond ne connaît pas le but du questionnaire. (Annexe 1) C’est ainsi qu’à la question “Que pensez-vous du fétichisme ?” 54 % de la population est mal à l’aise ou peu réceptive sur le sujet. 68,2 % des garçons interrogés sont peu réceptifs quand 57,1 % des filles se montrent plus intéressées. Chaque personne interrogée a justifier son choix. 54,25 % de la population interrogée estime que la pratique du fétichisme est un choix qui ne concerne que les intéressés tant que les deux parties sont consentants. 16,75 % est mal à l’aise pour parler de ce sujet. 15,75 % ne veut pas en parler. 11,25 % est dégoutée par le sujet. 2 % de la population se montre intéressée et ouverte à la discussion. Le deuxième questionnaire pose des questions centrés sur le fétichisme. (Annexe 1) Plus précisément, ces questions concernent surtout les matières les plus utilisées pour la conception des tenues fétichistes. 82 % de la population interrogée est contre le latex, et 81 % est contre le vinyle, ces deux matières étant trop connotées par le sexe selon les justifications. Le cuir est accepté par 66 % de la population, qui y voit plus le côté rock et punk dans cette matière. Le harnais fétichiste et la pratique du bondage est rejetée à 92 %, la population associant automatiquement les deux à des pratiques sadomasochistes. La dernière question du questionnaire propose à la personne interrogée d’essayer une tenue fétichiste avec le côté sexuel du milieu complètement absent. Sur toute la population 44, 75 % est prête à tenter l’expérience, 52,1 % sont des filles et 47,9 % sont des garçons. Les questionnaires ont mis en avant que les filles sont plus ouvertes au sujet et seraient plus curieuses au point de vouloir tenter de s’immerger dans le milieu, à partir du moment où le côté sexuel est mis de côté. Ce côté sexuel est très présent dans l’esprit de chacun.
  • 57. 57 Débats Des débats ont été organisés avec différents groupes ne venant pas du milieu fétichiste. Les débats ont duré entre 45 minutes et une heure en fonction des groupes. Le premier groupe était composé d’un groupe de 7 personnes de sexe mixte entre 26 et 35 ans. Le second a été un groupe de 7 filles entre 18 et 25 ans et le troisième était un groupe de 6 hommes entre 18 et 25 ans. Ces débats ont tourné autour de la mode, des jugements estéthiques, du fétichisme et des valeurs morales et sociales qui sont véhiculées par ce milieu. Les deux plus jeunes groupes ont été séparé par sexe pour éviter les regards portés par le sexe opposé et éviter les blocages dûs à ces regards. Le groupe mixte a permis de récupérer des informations avec les possibilités de regard sur l’autre sexe, cela a permis de vérifier si les discours étaient plus réducteurs. Les 26 à 35 ans Ce groupe définit la mode comme un milieu important dans le sens où il permet d’exprimer sa personnalité. Pour des questions d’identité, la mode peut avoir son importance, cependant la limite peut être atteinte en fonction du regard des autres. Les vêtements sont reconnus comme étant une marque identitaire pour un individu. Mais le regard des autres peut préoccuper les individus. Dans le cadre professionnel le port d’un uniforme est complètement intégré par le groupe, cela permet une identification du rôle des employés. Dans le cadre privé, même si le groupe reconnaît être bien mieux habillé qu’en tenue professionnelle, il vise plutôt des habits fonctionnels qui permettent une liberté de mouvement plutôt que des vêtements basés sur l’esthétique. De plus, il admet porter des tenues en fonction des situations. Pour des sorties avec d’autres personnes peu fréquentées, le groupe porte plus une tenue plus recherchée. Avec des personnes proches, le groupe porte des tenues dans lesquelles il est plus à l’aise. À propos de la mode, ce groupe trouve qu’une personne suivant constamment la mode a un souci identitaire et n’arrive pas à se trouver une personnalité. Le côté financier est aussi un frein, comme la mode est très changeante, c’est un budget important. Le groupe n’associe pas un ou plusieurs styles à des tenues qui sont choquantes. D’après lui, les tenues deviennent trop choquantes quand elles sont trop en décalées même avec leur propre mouvement.
  • 58. 58 Pour ce groupe, le côté sexuel peut être un gros frein à cet univers. Cependant, une fois cet aspect écarté, la meilleure façon de mettre en avant ce milieu est de le présenter comme une expérience innatendue à vivre, qui va surprendre les personnes qui ont des idées préconçues sur le fétichisme. Ensuite, c’est au marketing de mettre l’accent sur l’aspect vestimentaire pour montrer l’esthétique du milieu afin qu’il plaise. Mais la trop forte connotation sexuelle du milieu empêcherait le fétichisme de devenir une mode populaire. Nous passerions d’une mode où la sexualité est actuellement implicite à une mode où la sexualité serait trop explicite. L’aspect vestimentaire est contraignant, car il apparaît comme un handicap pour les membres du groupe. Ils craignent une liberté de mouvement réduite. Toutefois, certaines filles reconnaissent ne pas être gênées quand elles portent des corset parce qu’elles ont eu l’habitude d’en mettre. De plus, les 26 à 35 ans imaginent un mouvement où la nudité est mise en avant. Le fétichisme serait un milieu où l’on cherche à être le moins vêtu possible. La conclusion de ce débat est que le fétichisme est mal connue de la population. Des idées préconçues mènent à des méfiances vis-à-vis de cet univers, mais il n’y a pas de condamnation définitive qui est donnée. L’idée principale de ce groupe est “tant que nous n’essayons pas, nous ne jugeons pas”. Les filles entre 18 à 25 ans Le groupe n’est pas très au fait de ce qui se passe dans le milieu de la mode. Les filles s’habillent plus en fonction de ce qu’elles aiment. Elles reconnaissent que cette attitude est assez récente, car étant plus jeunes elles s’habillaient comme les autres, par peur du jugement fort des autres enfants dans le cas où elles portaient une tenue décalée par rapport à la norme. Quant à elles, les looks qui leurs déplaisent sont des looks qui ramènent à des comportements qu’elles jugent irrespectueux. Au sujet du fétichisme, les tenues ne choquent pas le groupe, ce serait plus les comportements qui pourraient le gêner. Si la personne en tenue fétichiste insiste dans ses propos, le mal aise apparaît. Mais voir la personne en tenue intégrale peut au pire interroger le groupe. Les accessoires fétichistes amènent le groupe à penser au sexe. L’exemple de la boule baillon est donné pendant le débat, comme un accessoire pour une tenue fétichiste. Les filles l’associent toutes à des pratiques sexuelles, sans avoir de réelles justifications pour
  • 59. 59 cette association. Cependant, elles avouent être capable d’avoir une relation sentimentale avec un fétichiste. Le groupe complet reconnaît ne pas pouvoir justifier cette relation à leurs parents, il est unanime sur le fait que ceux-ci ne seront pas assez ouvert pour accepter ce style, ici le groupe dénonce un problème générationnel. Même avec des personnes de leur âge, le groupe reconnaît qu'il existerait un malaise inexpliqué fasse un individu fétichiste pratiquant. Pourtant dans l’intimité, tant que tout est consenti entre les deux personnes, il n’y aurait pas de gènes ou de blocage. Le groupe porte une importance pour ce qui touche à l’image et à l’intime. Il y a aussi une importance dans ce que l'on peut faire ou ne pas faire, à savoir ne pas imposer une vision aux autres que nous-mêmes nous n’aimerions pas voir. Cependant, sous couvert d’un événement exceptionnel ou d’un cadre intime, les filles seraient prêtes à porter une tenue fétichiste. Le débat s’est ensuite orienté sur la question de la justification d’un choix de vie fétichiste face à son enfant. Le groupe pense qu’il faudrait aborder la question en douceur, mais ne doute pas que l’ouverture d’esprit qu’il aura transmis à leurs enfants leurs feront accepter la situation. Là encore, dans le cadre privé, la justification se fait plus aisément. Ce qui ressort de ce débat, c’est que le milieu fétichiste a encore une valeur de tabou. Il peut intéresser voir même être accepté par certaines personnes, mais l’image que cela risque de renvoyer dérange encore. Les garçons entre 18 à 25 ans Ce groupe a différents points de vue sur la définition du milieu. Certains l’associent à des relations sexuelles. D’autres voient plus en ce terme un dévouement lié à un objet, proche d’un excès. Ceux qui voient dans le fétichisme un acte sexuel s'imagine que la pensée collective dans notre société tend à pointer du doigt cette pratique, en la désignant comme étant une dépravation. Ils ne condamnent pas cet univers, mais le pense condamner par la majorité. Quant aux adeptes de l’axe de la dévotion, ils placent les collectionneurs et les fétichistes sur une même échelle de valeurs. La différence avec le collectionneur tiendrait d’un rapport plus intime à l’objet fétiche. Quoiqu’il en soit, le milieu fétichiste reste un univers mal assumé en société face a des nons pratiquants. Le parallèle est fait avec l’univers punk, qui s’est popularisé, et que l'on peut retrouver chez
  • 60. 60 certains jeunes sans qu'ils reçoivent de jugements sociaux ou moraux. Cela est justifié par le groupe par la récupération et la socialisation du mouvement punk. Ce qui n’est pas le cas du fétichisme. Un exemple de ce qui aurait pu permettre la banalisation du mouvement punk est la musique. La musique de ce mouvement pourrait être un vecteur de l’ouverture du punk à la société. Dans le fétichisme on ne retrouve pas ce vecteur qui pourrait permettre une ouverture sociale, il n’y a pas de musique fétichiste. Le vecteur artistique qui véhicule le fétichisme est celui du vêtement, de la mode. L’univers de la mode s’est inspiré du fétichisme pour mettre en scène ses créations. De grands créateurs comme Jean-Paul Gaultier, Thierry Mugler, Helmut Newton se sont inspirés du fétichisme. Cependant le groupe vois mal la passerelle se faire entre mode et popularisation. La mode a l’argument artistique pour justifier l’emploi du fétichisme, mais si le mouvement se popularise le décalage artistique n’opèrera plus d’où un risque d’impression de vulgarité dans les tenues fétiches. Comme les filles du groupe précédent, les garçons s'imaginent dans une situation fétichiste sous couvert d'un événement exceptionnel. Ils se voient mal justifier à leur famille un réel choix fétichiste. Ils se sentiraient obligés d'expliquer à leur entourage ce même choix. Certaines personnes du groupe s’interrogent à ce moment sur la banalisation de la sexualité que l’on connaît actuellement, malgré que dans les années 70 et 80, le sexe était une norme. Cette réponse est apporté par le directeur de mémoire qui était présent lors des débats. Il annonce qu’en effet, outre la sexualité, le fétichisme lui même était mis en avant pour que tout le monde puisse en profiter. C’était une mode reconnue dans une époque où les jugements moraux n’étaient pas un problème de la société. Tout était à voir, à tenter, à expérimenter. Ce qui va intervertir la tendance, c’est l’arrivée du sida qui va créé une forte culpabilité de la société dans les années 90. Cette arrivée du virus est ressentie comme une punition pour sa liberté sensuelle et sexuelle des années passées. La question qui est posée alors est comment remettre en avant le fétichisme. Une partie du groupe y répond en pensant que son retour ne serait pas possible parce que tout mouvement émergeant ou réémergeant se voit attaqué par la critique. Une autre partie contre argumente en parlant de la communauté geek, qui était décriée il y a une dizaine d’années, mais qui aujourd’hui est devenue extrêmement populaire. En regardant les séries télévisés, nous trouvons de nombreux exemples qui ont permis de mettre en avant des communautés qui étaient mal perçues à leur début. La série NCIS a mis en avant la communauté gothique avec le personnage d’Aby. Le Doctor House est
  • 61. 61 un homme qui est solitaire, agressif, drogué, mais il est aimé par les téléspectateurs. Dexter est un serial killer, mais lui aussi est aimé. L’excuse de Gregory House est qu’il sauve des vies. Celle de Dexter, il tue les méchants. Ces personnages ont une fonction sociale pour être apprécié par la société. Dans la vie de tous les jours, certaines catégories de personnes ont un rôle sociale accepté, comme les prostituées qui ont comme rôle sociale de réduire les viols selon la pensée du groupe. Il est ainsi intéressant de se demander quel rôle social pourrait avoir le fétichisme, lui permettant d’être accepté dans la société. Rencontres professionnelles Après avoir regroupé différentes opinions de la population des 18 à 35 ans, nous étudierons les points de vue de différents professionnels du milieu fétichiste. Trois professionnels exerçant différents métiers vont être présentés. Leur expertise et leurs expériences vont apporter les éléments décisifs qui permettront de répondre aux hypothèses posées au début de cette partie. La première rencontre se fait avec Gérard Wajcamn, un écrivain, psychanalyste, maître de conférences au département de psychanalyse de l'Université Paris 8. Il dirige le Centre d'Etude d'Histoire et de Théorie du Regard. Il est auteur, notamment, de L'Objet du siècle ; Collection ; Fenêtre, chroniques du regard et de l'intime et de L'Œil absolu (paru chez Denoël, 2010). La seconde se fait avec le gérant de la boutique spécialiste du fétichisme numéro une en France, “Démonia”, située dans le 11e arrondissement de Paris. La troisième rencontre se fait avec Patrice Catanzaro, costumier fétichiste, reconnu comme le leader mondial sur le marché et dans la mode fétichiste. Chacun d’entre eux va apporter une définition du fétichisme et vont permettre de brosser le portrait de ce mouvement dans sa version du XXIe siècle. Du fétichisme hypermoderne “Du fétichisme hypermoderne” est la conférence donnée le 8 novembre 2010 par Gérard Wajcman à l’occasion de l’exposition “Brune Blonde” qui a eu lieu du 6 octobre 2010 au 16 janvier 2011. Cette conférence dure 80 minutes, pendant lesquelles le psychanalyste soutient que la clinique ne peut plus avoir un regard sur le fétichisme car
  • 62. 62 le rapport lié au fétichisme de l’objet est devenu la norme sociale. Il va piocher des exemples du cinéma pour démontrer son affirmation. Il commence la conférence en citant André Félibien “Il en va de la poésie comme de la peinture”. André Félibien a mis en scène dans un de ses ouvrages une brune et une blonde qui discutent de l’art. L’une parle en prose et l’autre en vers. Le but de mettre deux femmes discutant d’art est d’illustrer la muse. Dans toute l’histoire de l’art toutes les muses n’ont été que des femmes. Il en va de même dans la mythologie, mis à part la peinture qui n’a pas sa muse pour la représenter. Le cinéma aussi n’a pas de muse pour le représenter, mais à la différence de la peinture, le cinéma est une fabrique à muse. Le cinéma possède des muses mais également des femmes qui jouent dans les films. Les femmes sont à la fois une cause et un objet du cinéma. La question que le psychanalyste pose alors est “les femmes fétiches sont elles fétichistes ?”. Il y répond en mettant en avant que notre rapport à l’objet est de plus en plus addictif, certaines personnes ont même un rapport aux objets plus important qu’avec les autres personnes. En cela, nous sommes tous fétichistes. Ainsi, quand nous regardons plusieurs fois un film pour admirer une actrice qui y joue, nous agissons en fétichistes. Le cinéma peut aisément se caractériser comme un art fétichiste. Le fétichisme se définit comme un rapport particulier avec le corps. Hors le cinéma permet de faire des gros plan sur le corps ou des parties du corps. En filmant seulement des parties d’un corps, celles filmées ne sont plus associées à un corps mais à un objet indépendant détaché du corps, elle devient un fétiche. Le film “Vertigo” d’Hitchcock en est l’exemple parfait. Le film s’attarde tout le temps sur des parties d’un corps humain et finit par les cheveux, le fétiche d’Hitchcock. Ainsi le cinéma présente des femmes objets, mais il a été dit plus tôt qu’elles sont aussi des causes. Elles sont des causes en causant. La parole est un vecteur nouveau dans l’art. En effet, le cinéma est un art qui présente des objets qui causent la parole. On parle des femmes du cinéma. Ces femmes du cinéma ont le droit à la parole. Ce sont des causes qui causent. Le réalisateur parfait selon Wajcman est Tarantino. C’est le réalisateur qui fait parler les femmes et qui aime les faire parler. Que ce soit dans les films “Pulp fiction” ou dans “Death proof” la parole est débordante. Les femmes parlent énormément, le terme utilisé pour désigner cela est le “girl talk”. Cette parole débordante est tel un flux, un flux incessant qui finit par rendre la parole similaire à un acte. Ce n’est pas un acte qui va prendre la place de l’action, la parole ne va pas remplacer tragiquement les armes comme certains réalisateurs peuvent le faire. La
  • 63. 63 parole est un acte du corps. L’énoncé fondateur du message de Tarantino c’est lorsque la parole équivaut à la jouissance. Le réalisateur filme la jouissance. Dans “Death proof”, une célébrité reconnue d’une émission de radio est filmée. Des filles roulent souvent et longtemps sur les routes. C’est un parallèle à faire avec le flot de paroles qui ne cessent d’être présent. Ce flot de paroles équivaut à un flot de jouissance. Dans le film, parler de sexe est presque aussi bon que le pratiquer. Le “girl talk” revient ainsi à dire que les femmes jouissent de parler. Ce qui fait jouir les femmes c’est la parole et c’est différent pour les hommes. Les hommes et les femmes ne jouissent pas de la même façon. Pour les femmes c’est l’acte du corps qui les fait jouir, pour les hommes c’est l’action. Dans “Pulp fiction”, les hommes jouissent en tirant avec leur pistolet. La célèbre scène du film où Vincent, l’un des deux protagonistes, parle à un homme dans une voiture, il a un pistolet à la main et il tue l’homme en plein milieu d’une phrase. Ici, l’action dépasse la parole. Autre exemple du film lorsque Jules, le deuxième protagoniste, après avoir échappé à la mort par chance, pose ses armes et se consacre uniquement au verbe. Il renonce ainsi par cet acte à la jouissance. Le film “Kill Bill” annonce que les nouveaux héros du cinéma sont des héroïnes. C’est un préquel à “Death proof”. “Death proof” est la théologie de la jouissance moderne. Le fétichisme y est annoncé dès le début avec un gros plan sur les pieds d’une fille, suivi de la première scène de “girl talk”. Les héroïnes sont des perverses. Tarantino pose en fait la question “Qu’est-ce qui fait jouir les femmes”. Le réalisateur le montre tout au long du film. Le fait que la parole soit abondante montre que la parole ne peut répondre à la question. Ce qui fait jouir les femmes c’est le fait de parler. Dans le film, un groupe de filles parlent de la conquête d’une des filles du groupe, et celle-ci dit qu’elle aime monter les hommes. L’homme cheval est aussi une chose qui fait jouir les femmes. Les voitures le sont aussi, bien qu’habituellement les voitures soient le truc des hommes. “Death proof” est l’explication de ce retournement. Le fétichisme chez les femmes est cliniquement refusé. La définition psychanalitique définit le fétichisme comme étant la peur de la castration des hommes. De ce fait, seul l’homme peut être cliniqué fétichiste. Freud lui-même plaisantait sur le sujet en disant “Les femmes sont bien placées pour savoir qu’elle n’ont pas de bout.” Cependant, le rapport entre les femmes, les chaussures et les vêtements est une preuve d’un fétichisme ambiguë. C’est ce que raconte “Le diable s’habille en prada”. Une femme qui n’est pas fétichiste est engagée par la prêtresse de la mode et du fétichisme du vêtement. Pour
  • 64. 64 accepter le fétichisme féminin, il faut partir du postulat que ce fétichisme n’est pas l’inverse du fétichisme masculin. Cependant dans le cinéma les choses sont différentes. La femme fétichiste existe. De plus, la femme est de plus en plus fétichiste, mais aussi elle jette une lumière sur notre société d’objet qui est la nôtre. Le constat qui en resort est que de nos jours la mode est le fétichisme du vêtement. La question qui se pose alors est : est-ce que l’analyse clinique du fétichisme a encore un sens dans un monde submergé par les objets ? Nous sommes dans le temps du fétichisme, il est généralisé. Le fétichisme est devenu une norme dans notre société. Il ne se concentre plus que sur une partie du corps mais il s’est étendu au produit manufacturé. Les grandes entreprises encouragent le fétichisme comme elles encouragent les conduites addictives à l’égard des objets. Toutes les personnes n’ont pas accès au fétichisme à proprement parlé. Mais ce n’est pas grave car le fétichisme est devenu le marché et toutes les personnes veulent avoir accès au marché. C’est ainsi qu’aujourd’hui le fétichisme pourrait s’appeler “l’iPhonisme”. L’iPhone ou l’androïde est aujourd'hui le reflet du manque incurable et de la totale dépendance que nous avons vis-à-vis de l’objet. Nous devons tous l’avoir sur nous en permanence. C’est la perversion moderne d’un fétichisme moderne de l’homme moderne. Le psychanalyste plaisante en disant qu’avant il y avait des maisons pour exprimer sa perversion, maintenant il y a des boutiques à tous les coins de rue. En ce sens, le fétichisme pourrait même être reconnu comme étant un moteur de l’économie. Cependant le triomphe de l’objet ne se constate pas qu’économiquement parlant. Avec le marché des organes, les innombrables produits dopants existants, on peut affirmer que le corps devient un produit manufacturé. On peut observer que le modèle du corps vivant est le corps inanimé. Ceci est particulièrement frappant dans la fiction, plus particulièrement dans les histoires policières. Aujourd’hui, c’est la médecine qui est mise en avant, surtout les médecins des cadavres, comme le montre la série les “Experts”. On parle de triomphe de la science, ce triomphe équivaut à parler de triomphe de la technologie. C'est également le triomphe de l’objet. La police scientifique est triomphante, elle tient le premier rôle. Mais c’est également donner le premier rôle à la mort. Les policiers ne perdent plus leur temps à interroger des suspects. Ils ne font parler que des objets ou des fibres. La technique a pris le pas sur la parole. Les bouches ne s’ouvrent que pour récupérer de la salive. De ce fait, parler de science revient à parler d’une dévitalisation du vivant. Le cadavre vaudrait autant qu’un