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Note stratégique – LCEC – Charles Deffrennes – Automne 2014
Comment mieux accompagner les municipalités
libanaises dans le développement des énergies propres ?
Le Liban fait face à une situation énergétique critique : son énergie est coûteuse et polluante,
le pays dépend quasi exclusivement de ses importations énergétiques, la production est
structurellement inférieure à la demande et le secteur peine à se réformer et à investir.
Parallèlement, le gouvernement s'est engagé à développer les énergies renouvelables à hauteur de
12 % de la production d'ici 2020. Le défi est de taille. Mais même si les évolutions sont discrètes et
progressives, le secteur énergétique libanais amorce sa transition énergétique.
Alors que le premier National Energy Efficiency Action Plan for Lebanon (NEEAP) arrive
bientôt à échéance, l’État libanais prépare le second volet de sa politique pour les énergies propres :
le NEEAP1 – pour l'efficacité énergétique - et le NREAP – pour l'énergie renouvelable – 2015/2020.
Au sein de ce document structurant pour les cinq prochaines années, le LCEC2 souhaite mettre en
valeur et mieux accompagner l'échelon local du développement des énergies propres. C'est dans
cette réflexion que s'inscrit ce papier qui s'intéresse aux rôles et aux potentiels des municipalités
dans le développement des énergies propres au Liban. Dans un premier temps, nous discuterons des
nombreux blocages qui expliquent le rôle encore marginal des municipalités libanaises sur les
enjeux énergétiques. Dans un deuxième temps, nous aborderons le potentiel du local dans le
développement des énergies propres, et proposerons des pistes de réflexion pour mieux
accompagner les municipalités dans leurs initiatives énergétiques. Ce document se nourrit
d'entretiens menés avec des élus et des experts de cet enjeu, d'un travail documentaire et de mon
expérience de quatre mois au sein du LCEC.
I. De nombreux blocages qui expliquent le rôle encore marginal des
municipalités sur les enjeux énergétiques.
A. Un engagement marginal des municipalités, malgré quelques exceptions.
Un premier constat s'impose : la question énergétique n'est pas encore à l'agenda politique
des municipalités libanaises. Même si les élus rencontrés se disent sensibles à ces questions, ils ont
actuellement d'autres priorités et les blocages budgétaires, politiques et institutionnels sont jugés,
pour l'instant, difficilement surmontables.
Des projets d' énergie propre existent tout de même, mais ceux-ci sont très souvent mis en
place directement depuis Beyrouth et la municipalité n'en est que bénéficiaire. Ceux-ci voient le
jour grâce à un don du ministère ou du LCEC, d'une ONG3, d'une ambassade ou d'une organisation
1 NEEAP : National Energy Efficiency Action Plan / NREAP : National Renewable Energy Action Plan
2 LCEC : Lebanese Center for Energy Conservation
3 ONG : Organisation non gouvernementale
internationale comme CEDRO4. Ce dernier a ainsi installé 126 projets d'énergie propre au Liban
depuis sa création en 2007 grâce au soutien du PNUD et de l'Union Européenne, mais l'impulsion,
la coordination et le financement étaient presque systématiquement gérés directement par CEDRO.
Dès lors, certaines municipalités ont des projets d'énergie propre sur leurs territoires
(principalement des chauffe-eaux solaires et des ampoules à basse consommation pour l'efficacité
énergétique, et d'éclairage public avec panneaux solaires et des installations de panneaux
photovoltaïques pour les renouvelables), mais ceux-ci sont principalement le fruit de l'initiative
privée ou de donateurs nationaux et internationaux.
Les projets énergétiques mis en place par une initiative municipale restent l'exception, mais
existent tout de même, sous des formes variées (cette liste est non-exhaustive):
- La municipalité d'Arab Salim a lancé en 2011 une campagne A Solar Water Heater for Every
House afin de promouvoir les chauffe-eaux solaires au sein de sa population. Cette campagne
comprend un volet de sensibilisation-promotion des SWH auprès des habitants, un prêt à taux zéro
(mécanisme NEEREA) pour échelonner le paiement et une subvention municipale de 100$ couplé à
une réduction de 100$ offerte par l'installateur, ce qui a permit de faire baisser le prix de 600 à
400$.
- Le projet européen CES-MED5 accompagne trois municipalités dans la définition, l'écriture et la
mise en place de leur Plan d'Action en faveur de l’Énergie Durable : Beyrouth, la capitale ; Qabb
Elias, la ville industrielle en pleine croissance économique et démographique ; Baakline, la petite
ville rurale. Ces plans ont pour objectif d'identifier et de planifier les actions de réduction des
émissions de gaz à effet de serre de la ville à horizon 2020. Le CES-MED, un projet de l'Union
Européenne à destination des pays de la rive sud de la méditerranée, les accompagne
techniquement, légalement et politiquement dans cette démarche et vise, dans un second temps, à
généraliser de tels plans stratégiques.
- La municipalité de Jezzine a mis en place un mécanisme financier (NEEREA) pour inciter ses
habitants à investir dans l'isolation de leurs bâtiments.
- L'Union de Municipalités de Sour travaille actuellement sur l'écriture de son Strategic
Sustainable Regional Development Plan (SSRDP). Ce plan stratégique vise à définir une vision
politique du territoire pour les 20 prochaines années et comprends notamment un volet énergétique.
- La municipalité de Kornet Chehwan, dans la région du Metn, a décidé de promouvoir l'efficacité
énergétique pour les nouvelles constructions sur son territoire. Avant de signer le permis de
construire, la municipalité exige que le nouveau bâtiment prévoit un chauffe eau solaire.
- CEDRO a lancé une compétition, Madinat Khadraa Renewable Energy Competition for
Municipalities, qui avait pour but de stimuler et supporter des projets municipaux d'énergie propre.
Trois municipalités ont été accompagnées dans leurs projets : Aley et son projet d'installation de
SWH et de panneaux solaires sur une prison ; Qbayet et son projet d'éclairage public solaire, de
sensibilisation et d'installation de 1000 lampes à basse consommation ; Roumin et son projet
4 CEDRO : un projet lancé en 2007 par le United Nations Development Program (UNDP) qui travaille sur l'énergie
renouvelable et l'efficacité énergétique au Liban.
5 CES-MED : Cleaner Energy Savings MEDiterranean cities. Un projet financé par l'Union Européenne qui travaille
sur la promotion de l'énergie renouvelable et de l'efficacité énergétique auprès des municipalités du sud de la
méditerranée.
d'éclairage public à faible consommation.
Ces municipalités ont réussi à mener à bien leurs initiatives énergétiques et à s'affranchir des
nombreux obstacles budgétaires, politiques et institutionnels. Néanmoins, ces blocages limitent
encore lourdement l'écrasante majorité des municipalités libanaises dans leurs politiques
énergétiques.
B. Le blocage budgétaire
Lors de mes entretiens, l'argument le plus récurent et indépassable pour expliquer l'inaction
des municipalités sur les politiques énergétiques fut l'obstacle financier. Quasi-systématiquement, à
l'exception notable de l'union des municipalités de Tyre, les personnes rencontrées ont décrit des
budgets municipaux trop faibles et le manque de marges de manœuvre pour mettre en place des
politiques publiques énergétiques. Les municipalités sont coincées dans la gestion des affaires
courantes et ne disposent pas de budgets suffisants pour investir sur le long terme et mettre en place
une vision politique.
Les élus pointent les rentrés d'argent trop faibles de leurs municipalités, le manque de
maîtrise sur l'argent collectée et les manquements de l’État central dans sa mission de redistribution
budgétaire. De nombreuses lenteurs, opacités, détournements et non versements sont en effet
dénoncés : les municipalités ne touchent pas l'ensemble du revenu des taxes qui leur sont dues,
certaines sont détournées ou tout simplement impayées. Enfin, le budget de la Caisse Municipale
Autonome est redistribué selon les décomptes démographiques de 1978 qui ne tiennent pas compte
des évolutions démographiques récentes et des réfugiés. Ces trop nombreuses failles dans la
redistribution étatique envers les municipalités fragilisent les budgets municipaux et l'action
publique locale. Par ailleurs, comme le montre le graphique ci-dessous, la part des revenus directs
des municipalités tend à se réduire, alors que les revenus indirects (issus de la redistribution de
l’État) augmentent, ce qui réduit d'autant l'autonomie budgétaire des municipalités. Face à de telles
difficultés budgétaires, les investissements sur le long terme et l'élaboration de visions politiques
sont donc bien souvent un luxe de grandes et riches municipalités ou de certaines unions de
municipalités.
Le cas de Sukleen est symptomatique du manque d'autonomie budgétaire des municipalités
libanaises. En charge d'une responsabilité municipale, Sukleen est une entreprise privée qui gère la
collecte et la gestion des déchets au Liban. Son contrat avec l’État a été signé par le Conseil du
Développement et de la Reconstruction (CDR) mais c'est bien les municipalités qui payent la
prestation, indirectement et sans contrôle sur le prix à travers une retenue sur leur part des revenus
de la Caisse Autonome des Municipalités. Dans cet arrangement, les municipalités ont perdu toute
indépendance institutionnelle et budgétaire sur la gestion des déchets, ce qui peut peser très lourd
sur leurs finances locales.
C. La faiblesse institutionnelle des municipalités
Les élus rencontrés se sont souvent plaints de leurs trop faibles pouvoirs institutionnels
limitant leurs projets et visions politiques pour leurs villes. Ils pointaient notamment le manque de
décentralisation dans le pays, le poids du pouvoir central sur les décisions municipales, une
bureaucratie lourde et le manque de soutien de la part du Ministère de l'intérieur et des
municipalités.
Paradoxalement, la loi sur les municipalités de 1977 confère de larges pouvoirs aux
municipalités : « tout acte ayant un caractère public ou d’utilité publique, dans les limites du
territoire municipal relève du conseil municipal ». Celle-ci site comme responsabilités municipales,
« sans que l'énumération ne soit limitative » : les finances municipales, les travaux publics,
l'organisation de la circulation, le nettoyage, les affaires sanitaires, les projets d'eau et d'éclairage,
les affaires sanitaires, la gestion des bâtiments publics (écoles, hôpitaux, piscines, musées,
stades…), les logements sociaux, l'éducation, le soutien aux associations et la création des jardins.
Cette longue liste montre l’ampleur des prérogatives municipales qui, si elles étaient respectées,
embrasseraient presque tous les services publics à l'exception de la politique extérieur, la défense
nationale et la sécurité.
Néanmoins, dans les faits, le Liban demeure un pays fortement centralisé où l'action des
municipalités est sous l'étroit contrôle du pouvoir central, de ses ministères et de ses représentants
en région. Les trois représentants de l’autorité de tutelle du pouvoir central sont le Qaimaqam
(Sous-préfet), le Mohafez (Préfet) et le Ministre de l’intérieur et des municipalités. Ces trois
niveaux institutionnels exercent leur contrôle administratif sur les décisions du conseil municipal.
Leur pouvoir de contrôle sur les actions municipales est large et se répartit selon le montant du
projet et son domaine d'action. Leur droit de regard s'étend des noms des rues jusqu'aux indemnités
du président de municipalité en passant par les règles d'urbanisme et de construction ou l'allocation
des dépenses municipales au-delà d'un certain seuil. Mieux, le pouvoir central a le droit de
suspendre, quand il le souhaite, l'exécution de tout arrêté municipal. De facto, et malgré un texte de
loi avantageux pour les municipalités, ce strict contrôle administratif limite fortement
l'indépendance des municipalités.
Les présidents de municipalités ont donc une faible marge de manœuvre pour lancer leurs
initiatives et restent bien souvent bloqués dans la gestion des affaires courantes de leurs villes. Ils
sont limités dans leurs projets par les contrôles administratifs du ministère de l’intérieur et des
municipalités, un ministère qui est pour l'instant très peu investi dans les projets d'énergie propre.
Les initiatives énergétiques locales sont donc souvent confrontées à des ministères paralysés, une
inertie institutionnelle et des blocages politiques lourds.
Par ailleurs, l'énergie n'est pas une prérogative des élus locaux. Ce sujet est donc bien
souvent un impensé pour les municipalités. Celles-ci ont d'autres priorités que l'énergie qui, de toute
façon, a toujours été une responsabilité centralisée (Ministère de l'Energie, Électricité du Liban…) :
« We don't have enough money and authority to play the role of ministries and the central State on
water, energy supply and main infrastructures » (Interview of the union of municipalities of Jbeil).
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Les fiefs politiques
Les municipalités disposent d’une marge d’action financière et réglementaire réduite et
dépendent pour leur bon fonctionnement de la bienveillance de leur ministère de tutelle, le
ministère de l’intérieur et des municipalités. Néanmoins, certaines d'entre elles profitent du poids
politique de leurs représentants pour gagner en autonomie, trouver des fonds et s'émanciper de la
tutelle du pouvoir central. C'est notamment le cas dans le Metn, fief de la famille Murr : le père et
le fils ont successivement occupé le ministère de l’intérieur et la fille préside l'Union des
municipalités. C'est également le cas pour les villages chrétiens du Sud, région de Nabih Berri qui
gère les financement du Conseil du Sud ; et pour les municipalités chiites du Sud qui profitent de
l'aura politique et de l'indépendance financière du Hezbollah et d'Amal. Enfin, les municipalités du
Chouf profitent de la stature politique nationale de Walid Joumblatt qui gère notamment la Caisse
des Déplacés.
Profitant de la stature politique de leurs représentants, ces fiefs politiques parviennent à
contourner les blocages institutionnels et à mobiliser des fonds pour leurs projets de
développement. Ce constat s'est retrouvé lors de mon interview à l'union de municipalités de Sour
où, à la différence du reste du pays, mon interlocuteur a reconnu avoir une forte indépendance
institutionnelle et financière et souhaitait seulement un accompagnement technique de la part du
LCEC.
Cette solution pose évidemment des problèmes importants puisque les politiques de soutien
aux énergies propres risquent d'être accaparées par les municipalités ayant déjà une situation
politique et financière privilégiée. Ne réfléchir qu'en terme d'efficacité de mise en œuvre du projet
risque dès lors d'exacerber les inégalités territoriales.
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D. Des élus et fonctionnaires municipaux sensibles à ces enjeux, mais qui
manquent de formations solides.
Les élus locaux rencontrés lors de mes interviews se sont tous présentés comme sensibles et
concernés par les questions d'énergie. Ils semblent avoir conscience que cette question est
importante pour le développement économique, la résilience de leur territoire et la qualité de vie de
leur population.
Mais, comme le souligne Jessica Obeid, ingénieure chez CEDRO, les élus et fonctionnaires
locaux manquent souvent de connaissances solides sur ce sujet complexe et qui évolue rapidement.
Les connaissances techniques leur manquent pour appréhender ces questions complexes et pour
assurer la maintenance du matériel. Comme le révèle l'expérience de CEDRO, la sous-estimation
des coûts des installations et le manque de suivi du matériel sur le long terme sont deux facteurs
fréquents d'échec pour les projets énergétiques.
Par ailleurs, un problème souvent rencontré est le manque d'interlocuteurs fixes et
compétents au sein des municipalités pour mener à bien des projets énergétiques. Ce problème est
exacerbé par le manque de moyens humains des municipalités et le turn-over politique. Cet enjeu de
ressources humaines qualifiées est d'ailleurs source d’inégalités entre les grandes et les petites
municipalités. Lorsque les premières ont suffisamment de fonds pour avoir un service d'ingénieurs
qualifiés capable de répondre aux appels à projets de bailleurs de fonds, les secondes ne comptent
que sur une équipe municipale extrêmement réduite accaparés par la gestion des affaires courantes.
II. Les initiatives locales sont pourtant une échelle d'action
pertinente et gagneraient à être mieux accompagnées.
A. L'échelon local, un acteur clef dans la transition énergétique du pays.
Bien que le Liban, et a fortiori son système de production énergétique, soit fortement
centralisé et laisse peu d'autonomie aux municipalités, les institutions locales sont une échelle
d'action pertinente pour la transition énergétique du pays.
Les municipalités ont en effet une connaissance fine des enjeux locaux, des potentiels de
leurs territoires et des besoins énergétiques de leurs populations. Ces institutions sont probablement
les mieux placées pour adapter des projets énergétiques aux spécificités de leurs territoires. Leur
ancrage local semble également être un atout pour mener des campagnes efficaces de sensibilisation
de la population aux enjeux de l'énergie. Enfin, les municipalités qui s'engagent sur les questions
d'énergie ont la capacité d'adopter une stratégie transversale couvrant chacune de ses responsabilités
(construction, gestion de l'éclairage public, mobilité, gestion des bâtiments publics, développement
économique, qualité de vie…) afin de gagner en cohérence et en efficacité. Favoriser et supporter
l'engagement des municipalités sur ces questions est, sans aucun doute, un levier efficace pour
enraciner les considérations environnementales dans le pays et pour démultiplier l'action du
gouvernement en faveur des énergies propres.
Parallèlement, les municipalités gagneraient à s'investir dans les énergies renouvelables.
Même si pour certains la situation géopolitique, sociale et financière actuelle des municipalités
libanaises fait passer le développement des énergies renouvelables pour un luxe de pays riche ; il est
indéniable que l'énergie est un enjeu essentiel, quotidien et vital pour les populations et le
développement du pays. L'énergie est une question de subsistance. Un système énergétique robuste,
propre et efficace est nécessaire pour le développement du territoire, son activité économique et
pour la qualité de vie de ses habitant. Mener une politique énergétique municipale volontariste est
donc bien nécessaire, stratégique et légitime pour les collectivités territoriales, d'autant plus que le
système énergétique actuel n'est ni efficace ni bon marché.
Enfin, les budgets des municipalités sont faibles, or l'énergie est particulièrement chère au
Liban et pèse lourd dans les finances publiques locales. Investir dans l'efficacité énergétique et dans
certains projets d'énergie renouvelable est un moyen efficace pour les municipalités de réduire leurs
factures énergétiques tout en améliorant la qualité du service public rendu. De tels investissements
dans les énergies propres sont donc bien des moyens de dégager des ressources pour d'autres
projets, de créer de nouvelles marges de manœuvre et de réduire le poids de l'énergie sur les
finances publiques locales. Ce sont des opportunités pour gagner en autonomie par rapport aux
institutions centrales (gouvernement, EDL, le ministère…) et aux importations énergétiques.
Un vrai potentiel existe au niveau local pour participer à la transition énergétique du pays, et
de nombreuses initiatives locales ont déjà prouvé l'intérêt de certaines municipalités pour cette
question. Le LCEC se doit d'être en mesure de répondre à cet intérêt et de soutenir les initiatives
énergétiques municipales. Si le LCEC se dote des bons outils pour accompagner ces initiatives, ce
sera un levier d'action important pour le développement des énergies propres dans le pays.
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Les unions de municipalités sont-elles un échelon pertinent pour mener une politique
énergétique ?
Depuis 1977, les municipalités libanaises qui le souhaitent peuvent se regrouper au sein d'une
union de municipalités pour fédérer certaines de leurs ressources et missions. Le pays compte
désormais 48 unions, représentant 660 municipalités et les deux tiers de la population libanaise.
Celles-ci présentent de nombreux avantages pour mener les politiques énergétiques sur un
territoire :
- Elles ont une vision d'ensemble du territoire et de ses enjeux, ce qui est nécessaire pour bon
nombre de politiques publiques énergétiques (mobilité, gestion des déchets, production d'énergie
renouvelable…). Cette vision globale du territoire permet de construire une stratégie plus
cohérente, structurée et ambitieuse qu'une accumulation de plans énergétiques municipaux.
- Elles ont un pouvoir en terme d'aménagement du territoire et de règles d'urbanisme, ce qui
représente un bon levier pour insuffler des normes d'efficacité énergétique pour les nouvelles
constructions.
- Fédérant plusieurs municipalités, elles ont la capacité d'avoir des ressources humaines qualifiées
pour gérer des projets techniques ambitieux, ce qui est rarement le cas des petites municipalités.
- En mutualisant les ressources humaines et financières, les unions de municipalités permettent
d'inclure les petites municipalités dans le développement des énergies propres.
- Elles offrent un interlocuteur unique pour toucher l'ensemble des municipalités qu'elles
représentent.
- Elles permettent d'assurer une certaine pérennité des projets en limitant leurs vulnérabilités aux
changements de majorités politiques.
Cependant, ces arguments restent parfois théoriques et ne se retrouvent pas toujours sur le terrain.
Les unions de municipalités souffrent en effet de difficultés financières, de blocages institutionnels
et de faibles ressources humaines qui limitent leur efficacité. Les présidents de municipalités
rencontrés ne donnent d'ailleurs qu'un faible crédit aux unions.
Celles-ci peuvent donc être le bon échelon pour mettre en place une politique énergétique sur un
territoire, mais cela dépendra du contexte local, de son efficacité et de son poids politique et
institutionnel. Une étude au cas par cas est nécessaire.
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B. Des initiatives qui doivent être mieux stimulées et accompagnées par l’État
Suite à cette étude et aux entretiens menés, plusieurs pistes se profilent pour mieux
accompagner les municipalités dans leurs initiatives énergétiques. Certes la situation actuelle des
municipalités libanaises est tendue : elles font face à d'importants blocages institutionnels,
budgétaires et de ressources humaines. Mais des leviers d'action existent et il est possible de les
stimuler et de les accompagner dans leurs projets énergétiques. Comme le souligne Serge Yazigi,
expert pour le projet CES-MED : « En attendant la décentralisation, en attendant le renforcement
politique, en attendant plus de budget, il faut trouver des moyens humains et financiers pour faire
avancer les enjeux énergétiques locaux ».
Voici 8 pistes proposées à la suite de mon étude qui pourront permettre au LCEC de soutenir
les municipalités libanaises dans le développement des énergies propres.
Piste n°1 : Mettre en place des projets d'énergie propre directement sur le terrain
Pour l'instant, la majorité des projets d'énergie propre locaux ont été pilotés et financés
depuis Beyrouth, par don d'une ambassade, l'action d'une ONG, ou le projet du ministère ou de
CEDRO.
De telles subventions et initiatives du pouvoir central sont nécessaires pour initier une
dynamique dans le pays et faire apparaître les énergies renouvelables sur l'agenda politique de
certaines municipalités. Elles sont également nécessaires pour essayer, créer une expertise et mettre
en place des projets pilotes avant de pouvoir généraliser ses méthodes. Enfin, elles matérialisent les
avantages des politiques énergétiques locales et servent d'argument et d'illustration pour convaincre
d'autres municipalités.
Néanmoins, les municipalités restent ici dans un statut de bénéficiaire passif, ce qui limite
l'appropriation des enjeux et du matériel installé. De telles pratiques semblent donc nécessaires dans
un premier temps mais pas suffisantes à moyen terme pour accompagner durablement les
municipalités dans le développement des énergies propres dans le pays.
Piste n°2 : Former les élus et fonctionnaires
Même si les élus et fonctionnaires rencontrés étaient relativement sensibilisés aux enjeux
environnementaux et énergétiques, leurs connaissances de ces sujets complexes restent souvent
superficielles. Un travail de formation est nécessaire pour les aider à prendre conscience des
opportunités d'une politique municipale énergétique, pour identifier les potentiels du territoire et les
leviers d'action à disposition (cahier des charges des appels d'offre, actions simples et peu
coûteuses, aides des bailleurs de fonds, projets et soutiens du ministère, projets d'ONG…). Des
formations sont également nécessaires pour permettre aux fonctionnaires de gérer un projet qui se
met en place, en contrôler la qualité et pouvoir assurer la maintenance du matériel.
Le LCEC pourrait participer à ce travail de formation. S'inspirant des documents publiés
pour sensibiliser les particuliers, il serait bénéfique de proposer des brochures et publications à
destination des municipalités. Enfin, si le LCEC dispose de suffisamment de ressources humaines,
des workshops et ateliers de sensibilisation/formation à destination des élus et fonctionnaires
municipaux seraient nécessaires.
Piste n°3 : Aider les municipalités à construire leurs stratégies énergétiques territoriales
Certains territoires libanais ont déjà commencé à établir une vision énergétique pour leurs
territoires et à construire leur stratégie d'action. Avec l'aide de bailleurs de fonds et épaulée par un
cabinet de conseil, l'union des municipalités de Tyre travaille actuellement sur son Strategic
Sustainable Regional Development Plan (SSRDP). Ce plan stratégique a vocation à donner une
vision cohérente, structurée et transversale au développement du territoire de Tyre. Il propose une
vision à 20 ans du territoire sur ses enjeux urbains, sociaux, économiques, environnementaux et de
mobilité. L'énergie est également prise en compte, notamment pour le développement des panneaux
solaires et de la méthanisation.
Par ailleurs, le CES-MED accompagne trois villes dans l'élaboration de leur Plan d'Action
pour l'Energie Durable (PAED) pour réduire de 20% leurs émissions de dioxyde de carbone (CO2)
d'ici 2020 : Beyrouth, Qabb Elias et Baakline. Ce projet européen mis en place dans tout le sud de la
méditerranée propose un accompagnement technique à ces trois villes pour établir leur PAED,
identifier puis mener à bien les actions de réduction des émissions, mais plus globalement, il vise à
promouvoir les énergies propres auprès des municipalités méditerranéennes.
Construire un document et une vision stratégique est essentiel pour un territoire qui souhaite
s'engager sur ses enjeux énergétiques. Un tel plan est précieux pour établir l'état des lieux
énergétique du territoire, les potentiels d'amélioration et la liste des actions à entreprendre. Mais
surtout, un plan stratégique est un levier politique puissant pour mobiliser les acteurs d'un territoire.
Si le portage politique est suffisant, celui-ci est capable de mobiliser la municipalité, la population,
les acteurs économiques et les associations de la municipalité. Construire un projet stratégique
cohérent avec des actions ciblées est également un gage de sérieux et d'efficacité propice à attirer
les fonds nationaux et internationaux.
Plan d'action pour une énergie durable, plan stratégique pour l'énergie, vision territoriale
pour l'énergie propre... Peu importe son nom, un tel plan est bel et bien un levier d'action capable
d'établir une vision politique, de mobiliser un territoire sur ces enjeux et de trouver des
financements.
C'est le parti pris de CES-MED qui souhaite développer l'outil des PAED au Liban et mieux
accompagner les municipalités dans l'élaboration de leurs stratégies énergétiques. Son bureau
libanais, géré par Serge Yazigi, propose une expertise et de nombreux documents6 pour sensibiliser,
informer et accompagner les municipalités libanaises dans cette démarche. C'est un acteur clef au
Liban pour les questions énergétiques des municipalités qui souhaite collaborer avec le LCEC.
Dans sa stratégie d'accompagnement des municipalités, le LCEC gagnerait à les aider dans
l'élaboration de leurs stratégies énergétiques territoriales. En coordination avec le CES-MED, le
LCEC pourrait proposer son expertise technique, ses conseils en politiques publiques et un cadre
d'action clair pour donner les clefs nécessaires aux municipalités afin de s'investir sur les questions
énergétiques.
Piste n°4 : Accompagnement technique et juridique pour améliorer les normes de
construction.
Le secteur résidentiel est un gros consommateur d'énergie. Agir sur les règles de
construction et d'urbanisme est donc un levier efficace et peu coûteux pour l’État pour promouvoir
de nouvelles normes d'efficacité énergétique. Imposer de meilleures normes d''isolation des
bâtiments, institutionnaliser le double vitrage, rendre obligatoire le SWH ou les panneaux solaires,
voilà autant de pistes que peuvent promouvoir des règles de construction plus ambitieuses.
Au Liban, une demande de permis de construire passe tout d'abord par l'Union de
municipalité – s'il y en a une, ou par le bureau de l'aménagement urbain, une agence
gouvernementale. Cependant, la signature finale vient de la municipalité. C'est donc une
responsabilité partagée entre l'échelon local et le gouvernement. Les municipalités peuvent décider
de normes locales incitatrices ou obligatoires pour promouvoir l'énergie propre, mais cela doit être
fait en coordination avec les autres échelons décisionnaires.
C'est le cas de Kornet Chehwan, dans la région du Metn, qui a décidé de promouvoir
l'efficacité énergétique dans les nouvelles constructions sur son territoire. Avant de signer le permis
de construire, la municipalité exige que le nouveau bâtiment prévoie un chauffe-eau solaire.
Un accompagnement juridique et technique du LCEC auprès des municipalités libanaises
pourrait permettre de diffuser cet exemple de Kornet Chehwan dans le pays et promouvoir, à
moindre frais, l’efficacité énergétique dans le pays.
6 Le CES-MED va publier vers février 2015 un tool-kit de sensibilisation pour les municipalités. Il a également
produit un guide : Comment développer un Plan d'Action en faveur d'une Energie Durable (PAED) dans les villes
du sud de la méditerrannée en français, anglais et arabe. Tous ces documents sont d'excellente qualité et sont
utilisables par les municipalité et le LCEC.
Piste n°5 : Accompagner techniquement les initiatives municipales
Certaines limites qui sont ressorties des entretiens sont le manque de savoir-faire des équipes
municipales et la qualité parfois hasardeuse du matériel sur le marché. Sur ce dernier point, le
LCEC a déjà entrepris d'établir des standards pour le marché national et de certifier les
professionnels formés, il peut être bénéfique de communiquer sur cette démarche auprès des
municipalités. Un accompagnement technique semble être bénéfique pour accompagner au mieux
les municipalités volontaires dans la conception et la mise en place de projets énergétiques solides.
Ceci peut prendre la forme de workshops à destination des employés municipaux concernés, de
brochures de formation ou d'intervention au cas par cas par des ingénieurs du LCEC pour conseiller
les élus et fonctionnaires. Cet accompagnement technique, bien qu'exigeant en ressources
humaines, est un moyen efficace pour rassurer les municipalités dans leur investissement, garantir
la qualité des projets et leur pérennité dans le temps.
Piste n°6 : Mettre en place un prêt subventionné
Le mécanisme NEEREA, en offrant aux particuliers des prêts subventionnés à taux
avantageux, a permis de stimuler le développement des projets d'énergie renouvelable au Liban. Un
tel mécanisme étendu aux municipalités serait sans aucun doute une réponse adéquate aux faibles
ressources publiques locales et un outil capable de stimuler les projets municipaux d'énergie
renouvelable et d'efficacité énergétique.
Plus que l'argument écologique, c'est bien les arguments financier et d'amélioration des
infrastructures du territoire qui attisent l'intérêt des élus locaux. Dès lors, le meilleur outil semble
être un prêt subventionné qui permette aux municipalités de lisser leur investissement sur le long
terme tout en profitant rapidement du nouveau projet et d'économies d'énergétique. Les économies
d'énergie permettraient ainsi de compenser les mensualités du prêt.
Piste n°7 : Promouvoir les partenariats public-privé (PPP)
Pour trouver une solution à la faiblesse des finances publiques, une solution souvent avancée
est le partenariat public-privé. Ce mode de financement permet à une autorité publique de faire
appel à un prestataire privé pour financer et gérer un équipement assurant un service public. Le
partenaire privé reçoit en contrepartie un paiement de l'autorité publique et/ou des usagers du
service qu'il gère.
Ce mécanisme peut être une solution pour financer certains gros projets (ferme solaire,
éoliennes, incinération, barrages…), mais les PPP sont également vivement critiqués. Ses
détracteurs y voient un risque de privatisation du service public, dénoncent le coût élevé pour la
collectivité et l'ingérence d'intérêts privés dans une mission de service public. Choisir les PPP est
une décision politique importante et doit se faire avec précaution, notamment dans la robustesse du
contrat signé avec le prestataire privé.
Piste n°8 : Aider les municipalités dans leurs campagnes de sensibilisation
Puisque proches de la population et investies dans la vie scolaire et associative de leurs
territoires, les municipalités sont des acteurs pertinents pour mener des campagnes de
sensibilisation. En organisant des ateliers dans les écoles, une semaine de l'environnement ou des
réunions publiques, celles-ci peuvent permettre de donner des clefs de compréhension et des astuces
aux citoyens pour réduire leurs consommations énergétiques, et donc leurs factures.
LCEC devrait pouvoir fournir un kit de sensibilisation et une expertise pour armer les
municipalités pour de telles missions. Ce serait un moyen, certes long, mais efficace et peu coûteux
pour LCEC afin d'enraciner les préoccupations environnementales et les gestes éco-citoyens auprès
de la population.
_____________________________Conclusions_____________________________
Le Liban amorce sa transition énergétique. La route sera encore longue pour construire un
système énergétique robuste, propre et efficace, mais le pays s'est déjà saisi de l'enjeu.
L'investissement du gouvernement (par le LCEC), des institutions internationales (par CEDRO ou
les programmes de l'Union Européenne), et de certaines municipalités et associations ont déjà
permis de développer de nombreux projets d'efficacité énergétique et d'énergie renouvelable dans le
pays.
Bien réel mais encore marginal, le dynamisme des municipalités est un potentiel important
pour le développement des énergies propres dans le pays. Celui-ci doit être stimulé et accompagné
par le pouvoir central. En parallèle d'une très progressive décentralisation des institutions libanaises,
il est donc nécessaire de supporter techniquement, politiquement et financièrement les initiatives
énergétiques municipales. Un échelon local dynamique sur les enjeux énergétiques peut devenir un
formidable accélérateur du développement des énergies propres dans le pays, et aidera à enraciner
les considérations énergétiques et environnementales au sein de la classe politique et de la
population.
Dans la conception de ces politiques publiques de soutien aux municipalités, il faudra
néanmoins prendre soin à conserver une équité entre les territoires. Il y a en effet un risque
d'exacerber les inégalités territoriales : les grandes villes dotées de ressources humaines qualifiées
risquent d'accaparer les efforts aux dépends des municipalités plus modestes ; les fiefs politiques
efficaces et bien organisés risquent d'attirer l'essentiel des fonds au détriment des municipalités
moins performantes. Stimuler l'initiative municipale dans les énergies propres tout en conservant un
certain équilibre territorial, voilà un défi de taille, stimulant et nécessaire, pour un pays comme le
Liban.

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Comment mieux accompagner les municipalités libanaises dans le développement des énergies propres - C.Deffrennes

  • 1. Note stratégique – LCEC – Charles Deffrennes – Automne 2014 Comment mieux accompagner les municipalités libanaises dans le développement des énergies propres ? Le Liban fait face à une situation énergétique critique : son énergie est coûteuse et polluante, le pays dépend quasi exclusivement de ses importations énergétiques, la production est structurellement inférieure à la demande et le secteur peine à se réformer et à investir. Parallèlement, le gouvernement s'est engagé à développer les énergies renouvelables à hauteur de 12 % de la production d'ici 2020. Le défi est de taille. Mais même si les évolutions sont discrètes et progressives, le secteur énergétique libanais amorce sa transition énergétique. Alors que le premier National Energy Efficiency Action Plan for Lebanon (NEEAP) arrive bientôt à échéance, l’État libanais prépare le second volet de sa politique pour les énergies propres : le NEEAP1 – pour l'efficacité énergétique - et le NREAP – pour l'énergie renouvelable – 2015/2020. Au sein de ce document structurant pour les cinq prochaines années, le LCEC2 souhaite mettre en valeur et mieux accompagner l'échelon local du développement des énergies propres. C'est dans cette réflexion que s'inscrit ce papier qui s'intéresse aux rôles et aux potentiels des municipalités dans le développement des énergies propres au Liban. Dans un premier temps, nous discuterons des nombreux blocages qui expliquent le rôle encore marginal des municipalités libanaises sur les enjeux énergétiques. Dans un deuxième temps, nous aborderons le potentiel du local dans le développement des énergies propres, et proposerons des pistes de réflexion pour mieux accompagner les municipalités dans leurs initiatives énergétiques. Ce document se nourrit d'entretiens menés avec des élus et des experts de cet enjeu, d'un travail documentaire et de mon expérience de quatre mois au sein du LCEC. I. De nombreux blocages qui expliquent le rôle encore marginal des municipalités sur les enjeux énergétiques. A. Un engagement marginal des municipalités, malgré quelques exceptions. Un premier constat s'impose : la question énergétique n'est pas encore à l'agenda politique des municipalités libanaises. Même si les élus rencontrés se disent sensibles à ces questions, ils ont actuellement d'autres priorités et les blocages budgétaires, politiques et institutionnels sont jugés, pour l'instant, difficilement surmontables. Des projets d' énergie propre existent tout de même, mais ceux-ci sont très souvent mis en place directement depuis Beyrouth et la municipalité n'en est que bénéficiaire. Ceux-ci voient le jour grâce à un don du ministère ou du LCEC, d'une ONG3, d'une ambassade ou d'une organisation 1 NEEAP : National Energy Efficiency Action Plan / NREAP : National Renewable Energy Action Plan 2 LCEC : Lebanese Center for Energy Conservation 3 ONG : Organisation non gouvernementale
  • 2. internationale comme CEDRO4. Ce dernier a ainsi installé 126 projets d'énergie propre au Liban depuis sa création en 2007 grâce au soutien du PNUD et de l'Union Européenne, mais l'impulsion, la coordination et le financement étaient presque systématiquement gérés directement par CEDRO. Dès lors, certaines municipalités ont des projets d'énergie propre sur leurs territoires (principalement des chauffe-eaux solaires et des ampoules à basse consommation pour l'efficacité énergétique, et d'éclairage public avec panneaux solaires et des installations de panneaux photovoltaïques pour les renouvelables), mais ceux-ci sont principalement le fruit de l'initiative privée ou de donateurs nationaux et internationaux. Les projets énergétiques mis en place par une initiative municipale restent l'exception, mais existent tout de même, sous des formes variées (cette liste est non-exhaustive): - La municipalité d'Arab Salim a lancé en 2011 une campagne A Solar Water Heater for Every House afin de promouvoir les chauffe-eaux solaires au sein de sa population. Cette campagne comprend un volet de sensibilisation-promotion des SWH auprès des habitants, un prêt à taux zéro (mécanisme NEEREA) pour échelonner le paiement et une subvention municipale de 100$ couplé à une réduction de 100$ offerte par l'installateur, ce qui a permit de faire baisser le prix de 600 à 400$. - Le projet européen CES-MED5 accompagne trois municipalités dans la définition, l'écriture et la mise en place de leur Plan d'Action en faveur de l’Énergie Durable : Beyrouth, la capitale ; Qabb Elias, la ville industrielle en pleine croissance économique et démographique ; Baakline, la petite ville rurale. Ces plans ont pour objectif d'identifier et de planifier les actions de réduction des émissions de gaz à effet de serre de la ville à horizon 2020. Le CES-MED, un projet de l'Union Européenne à destination des pays de la rive sud de la méditerranée, les accompagne techniquement, légalement et politiquement dans cette démarche et vise, dans un second temps, à généraliser de tels plans stratégiques. - La municipalité de Jezzine a mis en place un mécanisme financier (NEEREA) pour inciter ses habitants à investir dans l'isolation de leurs bâtiments. - L'Union de Municipalités de Sour travaille actuellement sur l'écriture de son Strategic Sustainable Regional Development Plan (SSRDP). Ce plan stratégique vise à définir une vision politique du territoire pour les 20 prochaines années et comprends notamment un volet énergétique. - La municipalité de Kornet Chehwan, dans la région du Metn, a décidé de promouvoir l'efficacité énergétique pour les nouvelles constructions sur son territoire. Avant de signer le permis de construire, la municipalité exige que le nouveau bâtiment prévoit un chauffe eau solaire. - CEDRO a lancé une compétition, Madinat Khadraa Renewable Energy Competition for Municipalities, qui avait pour but de stimuler et supporter des projets municipaux d'énergie propre. Trois municipalités ont été accompagnées dans leurs projets : Aley et son projet d'installation de SWH et de panneaux solaires sur une prison ; Qbayet et son projet d'éclairage public solaire, de sensibilisation et d'installation de 1000 lampes à basse consommation ; Roumin et son projet 4 CEDRO : un projet lancé en 2007 par le United Nations Development Program (UNDP) qui travaille sur l'énergie renouvelable et l'efficacité énergétique au Liban. 5 CES-MED : Cleaner Energy Savings MEDiterranean cities. Un projet financé par l'Union Européenne qui travaille sur la promotion de l'énergie renouvelable et de l'efficacité énergétique auprès des municipalités du sud de la méditerranée.
  • 3. d'éclairage public à faible consommation. Ces municipalités ont réussi à mener à bien leurs initiatives énergétiques et à s'affranchir des nombreux obstacles budgétaires, politiques et institutionnels. Néanmoins, ces blocages limitent encore lourdement l'écrasante majorité des municipalités libanaises dans leurs politiques énergétiques. B. Le blocage budgétaire Lors de mes entretiens, l'argument le plus récurent et indépassable pour expliquer l'inaction des municipalités sur les politiques énergétiques fut l'obstacle financier. Quasi-systématiquement, à l'exception notable de l'union des municipalités de Tyre, les personnes rencontrées ont décrit des budgets municipaux trop faibles et le manque de marges de manœuvre pour mettre en place des politiques publiques énergétiques. Les municipalités sont coincées dans la gestion des affaires courantes et ne disposent pas de budgets suffisants pour investir sur le long terme et mettre en place une vision politique. Les élus pointent les rentrés d'argent trop faibles de leurs municipalités, le manque de maîtrise sur l'argent collectée et les manquements de l’État central dans sa mission de redistribution budgétaire. De nombreuses lenteurs, opacités, détournements et non versements sont en effet dénoncés : les municipalités ne touchent pas l'ensemble du revenu des taxes qui leur sont dues, certaines sont détournées ou tout simplement impayées. Enfin, le budget de la Caisse Municipale Autonome est redistribué selon les décomptes démographiques de 1978 qui ne tiennent pas compte des évolutions démographiques récentes et des réfugiés. Ces trop nombreuses failles dans la redistribution étatique envers les municipalités fragilisent les budgets municipaux et l'action publique locale. Par ailleurs, comme le montre le graphique ci-dessous, la part des revenus directs des municipalités tend à se réduire, alors que les revenus indirects (issus de la redistribution de l’État) augmentent, ce qui réduit d'autant l'autonomie budgétaire des municipalités. Face à de telles difficultés budgétaires, les investissements sur le long terme et l'élaboration de visions politiques sont donc bien souvent un luxe de grandes et riches municipalités ou de certaines unions de municipalités.
  • 4. Le cas de Sukleen est symptomatique du manque d'autonomie budgétaire des municipalités libanaises. En charge d'une responsabilité municipale, Sukleen est une entreprise privée qui gère la collecte et la gestion des déchets au Liban. Son contrat avec l’État a été signé par le Conseil du Développement et de la Reconstruction (CDR) mais c'est bien les municipalités qui payent la prestation, indirectement et sans contrôle sur le prix à travers une retenue sur leur part des revenus de la Caisse Autonome des Municipalités. Dans cet arrangement, les municipalités ont perdu toute indépendance institutionnelle et budgétaire sur la gestion des déchets, ce qui peut peser très lourd sur leurs finances locales. C. La faiblesse institutionnelle des municipalités Les élus rencontrés se sont souvent plaints de leurs trop faibles pouvoirs institutionnels limitant leurs projets et visions politiques pour leurs villes. Ils pointaient notamment le manque de décentralisation dans le pays, le poids du pouvoir central sur les décisions municipales, une bureaucratie lourde et le manque de soutien de la part du Ministère de l'intérieur et des municipalités. Paradoxalement, la loi sur les municipalités de 1977 confère de larges pouvoirs aux municipalités : « tout acte ayant un caractère public ou d’utilité publique, dans les limites du territoire municipal relève du conseil municipal ». Celle-ci site comme responsabilités municipales, « sans que l'énumération ne soit limitative » : les finances municipales, les travaux publics, l'organisation de la circulation, le nettoyage, les affaires sanitaires, les projets d'eau et d'éclairage, les affaires sanitaires, la gestion des bâtiments publics (écoles, hôpitaux, piscines, musées, stades…), les logements sociaux, l'éducation, le soutien aux associations et la création des jardins. Cette longue liste montre l’ampleur des prérogatives municipales qui, si elles étaient respectées, embrasseraient presque tous les services publics à l'exception de la politique extérieur, la défense nationale et la sécurité. Néanmoins, dans les faits, le Liban demeure un pays fortement centralisé où l'action des municipalités est sous l'étroit contrôle du pouvoir central, de ses ministères et de ses représentants en région. Les trois représentants de l’autorité de tutelle du pouvoir central sont le Qaimaqam (Sous-préfet), le Mohafez (Préfet) et le Ministre de l’intérieur et des municipalités. Ces trois niveaux institutionnels exercent leur contrôle administratif sur les décisions du conseil municipal. Leur pouvoir de contrôle sur les actions municipales est large et se répartit selon le montant du projet et son domaine d'action. Leur droit de regard s'étend des noms des rues jusqu'aux indemnités du président de municipalité en passant par les règles d'urbanisme et de construction ou l'allocation des dépenses municipales au-delà d'un certain seuil. Mieux, le pouvoir central a le droit de suspendre, quand il le souhaite, l'exécution de tout arrêté municipal. De facto, et malgré un texte de loi avantageux pour les municipalités, ce strict contrôle administratif limite fortement l'indépendance des municipalités. Les présidents de municipalités ont donc une faible marge de manœuvre pour lancer leurs initiatives et restent bien souvent bloqués dans la gestion des affaires courantes de leurs villes. Ils sont limités dans leurs projets par les contrôles administratifs du ministère de l’intérieur et des
  • 5. municipalités, un ministère qui est pour l'instant très peu investi dans les projets d'énergie propre. Les initiatives énergétiques locales sont donc souvent confrontées à des ministères paralysés, une inertie institutionnelle et des blocages politiques lourds. Par ailleurs, l'énergie n'est pas une prérogative des élus locaux. Ce sujet est donc bien souvent un impensé pour les municipalités. Celles-ci ont d'autres priorités que l'énergie qui, de toute façon, a toujours été une responsabilité centralisée (Ministère de l'Energie, Électricité du Liban…) : « We don't have enough money and authority to play the role of ministries and the central State on water, energy supply and main infrastructures » (Interview of the union of municipalities of Jbeil). ________________________________________________________________________________ Les fiefs politiques Les municipalités disposent d’une marge d’action financière et réglementaire réduite et dépendent pour leur bon fonctionnement de la bienveillance de leur ministère de tutelle, le ministère de l’intérieur et des municipalités. Néanmoins, certaines d'entre elles profitent du poids politique de leurs représentants pour gagner en autonomie, trouver des fonds et s'émanciper de la tutelle du pouvoir central. C'est notamment le cas dans le Metn, fief de la famille Murr : le père et le fils ont successivement occupé le ministère de l’intérieur et la fille préside l'Union des municipalités. C'est également le cas pour les villages chrétiens du Sud, région de Nabih Berri qui gère les financement du Conseil du Sud ; et pour les municipalités chiites du Sud qui profitent de l'aura politique et de l'indépendance financière du Hezbollah et d'Amal. Enfin, les municipalités du Chouf profitent de la stature politique nationale de Walid Joumblatt qui gère notamment la Caisse des Déplacés. Profitant de la stature politique de leurs représentants, ces fiefs politiques parviennent à contourner les blocages institutionnels et à mobiliser des fonds pour leurs projets de développement. Ce constat s'est retrouvé lors de mon interview à l'union de municipalités de Sour où, à la différence du reste du pays, mon interlocuteur a reconnu avoir une forte indépendance institutionnelle et financière et souhaitait seulement un accompagnement technique de la part du LCEC. Cette solution pose évidemment des problèmes importants puisque les politiques de soutien aux énergies propres risquent d'être accaparées par les municipalités ayant déjà une situation politique et financière privilégiée. Ne réfléchir qu'en terme d'efficacité de mise en œuvre du projet risque dès lors d'exacerber les inégalités territoriales. ________________________________________________________________________________ D. Des élus et fonctionnaires municipaux sensibles à ces enjeux, mais qui manquent de formations solides. Les élus locaux rencontrés lors de mes interviews se sont tous présentés comme sensibles et
  • 6. concernés par les questions d'énergie. Ils semblent avoir conscience que cette question est importante pour le développement économique, la résilience de leur territoire et la qualité de vie de leur population. Mais, comme le souligne Jessica Obeid, ingénieure chez CEDRO, les élus et fonctionnaires locaux manquent souvent de connaissances solides sur ce sujet complexe et qui évolue rapidement. Les connaissances techniques leur manquent pour appréhender ces questions complexes et pour assurer la maintenance du matériel. Comme le révèle l'expérience de CEDRO, la sous-estimation des coûts des installations et le manque de suivi du matériel sur le long terme sont deux facteurs fréquents d'échec pour les projets énergétiques. Par ailleurs, un problème souvent rencontré est le manque d'interlocuteurs fixes et compétents au sein des municipalités pour mener à bien des projets énergétiques. Ce problème est exacerbé par le manque de moyens humains des municipalités et le turn-over politique. Cet enjeu de ressources humaines qualifiées est d'ailleurs source d’inégalités entre les grandes et les petites municipalités. Lorsque les premières ont suffisamment de fonds pour avoir un service d'ingénieurs qualifiés capable de répondre aux appels à projets de bailleurs de fonds, les secondes ne comptent que sur une équipe municipale extrêmement réduite accaparés par la gestion des affaires courantes. II. Les initiatives locales sont pourtant une échelle d'action pertinente et gagneraient à être mieux accompagnées. A. L'échelon local, un acteur clef dans la transition énergétique du pays. Bien que le Liban, et a fortiori son système de production énergétique, soit fortement centralisé et laisse peu d'autonomie aux municipalités, les institutions locales sont une échelle d'action pertinente pour la transition énergétique du pays. Les municipalités ont en effet une connaissance fine des enjeux locaux, des potentiels de leurs territoires et des besoins énergétiques de leurs populations. Ces institutions sont probablement les mieux placées pour adapter des projets énergétiques aux spécificités de leurs territoires. Leur ancrage local semble également être un atout pour mener des campagnes efficaces de sensibilisation de la population aux enjeux de l'énergie. Enfin, les municipalités qui s'engagent sur les questions d'énergie ont la capacité d'adopter une stratégie transversale couvrant chacune de ses responsabilités (construction, gestion de l'éclairage public, mobilité, gestion des bâtiments publics, développement économique, qualité de vie…) afin de gagner en cohérence et en efficacité. Favoriser et supporter l'engagement des municipalités sur ces questions est, sans aucun doute, un levier efficace pour enraciner les considérations environnementales dans le pays et pour démultiplier l'action du gouvernement en faveur des énergies propres. Parallèlement, les municipalités gagneraient à s'investir dans les énergies renouvelables. Même si pour certains la situation géopolitique, sociale et financière actuelle des municipalités libanaises fait passer le développement des énergies renouvelables pour un luxe de pays riche ; il est indéniable que l'énergie est un enjeu essentiel, quotidien et vital pour les populations et le développement du pays. L'énergie est une question de subsistance. Un système énergétique robuste,
  • 7. propre et efficace est nécessaire pour le développement du territoire, son activité économique et pour la qualité de vie de ses habitant. Mener une politique énergétique municipale volontariste est donc bien nécessaire, stratégique et légitime pour les collectivités territoriales, d'autant plus que le système énergétique actuel n'est ni efficace ni bon marché. Enfin, les budgets des municipalités sont faibles, or l'énergie est particulièrement chère au Liban et pèse lourd dans les finances publiques locales. Investir dans l'efficacité énergétique et dans certains projets d'énergie renouvelable est un moyen efficace pour les municipalités de réduire leurs factures énergétiques tout en améliorant la qualité du service public rendu. De tels investissements dans les énergies propres sont donc bien des moyens de dégager des ressources pour d'autres projets, de créer de nouvelles marges de manœuvre et de réduire le poids de l'énergie sur les finances publiques locales. Ce sont des opportunités pour gagner en autonomie par rapport aux institutions centrales (gouvernement, EDL, le ministère…) et aux importations énergétiques. Un vrai potentiel existe au niveau local pour participer à la transition énergétique du pays, et de nombreuses initiatives locales ont déjà prouvé l'intérêt de certaines municipalités pour cette question. Le LCEC se doit d'être en mesure de répondre à cet intérêt et de soutenir les initiatives énergétiques municipales. Si le LCEC se dote des bons outils pour accompagner ces initiatives, ce sera un levier d'action important pour le développement des énergies propres dans le pays. ________________________________________________________________________________ Les unions de municipalités sont-elles un échelon pertinent pour mener une politique énergétique ? Depuis 1977, les municipalités libanaises qui le souhaitent peuvent se regrouper au sein d'une union de municipalités pour fédérer certaines de leurs ressources et missions. Le pays compte désormais 48 unions, représentant 660 municipalités et les deux tiers de la population libanaise. Celles-ci présentent de nombreux avantages pour mener les politiques énergétiques sur un territoire : - Elles ont une vision d'ensemble du territoire et de ses enjeux, ce qui est nécessaire pour bon nombre de politiques publiques énergétiques (mobilité, gestion des déchets, production d'énergie renouvelable…). Cette vision globale du territoire permet de construire une stratégie plus cohérente, structurée et ambitieuse qu'une accumulation de plans énergétiques municipaux. - Elles ont un pouvoir en terme d'aménagement du territoire et de règles d'urbanisme, ce qui représente un bon levier pour insuffler des normes d'efficacité énergétique pour les nouvelles constructions. - Fédérant plusieurs municipalités, elles ont la capacité d'avoir des ressources humaines qualifiées pour gérer des projets techniques ambitieux, ce qui est rarement le cas des petites municipalités. - En mutualisant les ressources humaines et financières, les unions de municipalités permettent d'inclure les petites municipalités dans le développement des énergies propres. - Elles offrent un interlocuteur unique pour toucher l'ensemble des municipalités qu'elles représentent.
  • 8. - Elles permettent d'assurer une certaine pérennité des projets en limitant leurs vulnérabilités aux changements de majorités politiques. Cependant, ces arguments restent parfois théoriques et ne se retrouvent pas toujours sur le terrain. Les unions de municipalités souffrent en effet de difficultés financières, de blocages institutionnels et de faibles ressources humaines qui limitent leur efficacité. Les présidents de municipalités rencontrés ne donnent d'ailleurs qu'un faible crédit aux unions. Celles-ci peuvent donc être le bon échelon pour mettre en place une politique énergétique sur un territoire, mais cela dépendra du contexte local, de son efficacité et de son poids politique et institutionnel. Une étude au cas par cas est nécessaire. ________________________________________________________________________________ B. Des initiatives qui doivent être mieux stimulées et accompagnées par l’État Suite à cette étude et aux entretiens menés, plusieurs pistes se profilent pour mieux accompagner les municipalités dans leurs initiatives énergétiques. Certes la situation actuelle des municipalités libanaises est tendue : elles font face à d'importants blocages institutionnels, budgétaires et de ressources humaines. Mais des leviers d'action existent et il est possible de les stimuler et de les accompagner dans leurs projets énergétiques. Comme le souligne Serge Yazigi, expert pour le projet CES-MED : « En attendant la décentralisation, en attendant le renforcement politique, en attendant plus de budget, il faut trouver des moyens humains et financiers pour faire avancer les enjeux énergétiques locaux ». Voici 8 pistes proposées à la suite de mon étude qui pourront permettre au LCEC de soutenir les municipalités libanaises dans le développement des énergies propres. Piste n°1 : Mettre en place des projets d'énergie propre directement sur le terrain Pour l'instant, la majorité des projets d'énergie propre locaux ont été pilotés et financés depuis Beyrouth, par don d'une ambassade, l'action d'une ONG, ou le projet du ministère ou de CEDRO. De telles subventions et initiatives du pouvoir central sont nécessaires pour initier une dynamique dans le pays et faire apparaître les énergies renouvelables sur l'agenda politique de certaines municipalités. Elles sont également nécessaires pour essayer, créer une expertise et mettre en place des projets pilotes avant de pouvoir généraliser ses méthodes. Enfin, elles matérialisent les avantages des politiques énergétiques locales et servent d'argument et d'illustration pour convaincre d'autres municipalités. Néanmoins, les municipalités restent ici dans un statut de bénéficiaire passif, ce qui limite l'appropriation des enjeux et du matériel installé. De telles pratiques semblent donc nécessaires dans un premier temps mais pas suffisantes à moyen terme pour accompagner durablement les
  • 9. municipalités dans le développement des énergies propres dans le pays. Piste n°2 : Former les élus et fonctionnaires Même si les élus et fonctionnaires rencontrés étaient relativement sensibilisés aux enjeux environnementaux et énergétiques, leurs connaissances de ces sujets complexes restent souvent superficielles. Un travail de formation est nécessaire pour les aider à prendre conscience des opportunités d'une politique municipale énergétique, pour identifier les potentiels du territoire et les leviers d'action à disposition (cahier des charges des appels d'offre, actions simples et peu coûteuses, aides des bailleurs de fonds, projets et soutiens du ministère, projets d'ONG…). Des formations sont également nécessaires pour permettre aux fonctionnaires de gérer un projet qui se met en place, en contrôler la qualité et pouvoir assurer la maintenance du matériel. Le LCEC pourrait participer à ce travail de formation. S'inspirant des documents publiés pour sensibiliser les particuliers, il serait bénéfique de proposer des brochures et publications à destination des municipalités. Enfin, si le LCEC dispose de suffisamment de ressources humaines, des workshops et ateliers de sensibilisation/formation à destination des élus et fonctionnaires municipaux seraient nécessaires. Piste n°3 : Aider les municipalités à construire leurs stratégies énergétiques territoriales Certains territoires libanais ont déjà commencé à établir une vision énergétique pour leurs territoires et à construire leur stratégie d'action. Avec l'aide de bailleurs de fonds et épaulée par un cabinet de conseil, l'union des municipalités de Tyre travaille actuellement sur son Strategic Sustainable Regional Development Plan (SSRDP). Ce plan stratégique a vocation à donner une vision cohérente, structurée et transversale au développement du territoire de Tyre. Il propose une vision à 20 ans du territoire sur ses enjeux urbains, sociaux, économiques, environnementaux et de mobilité. L'énergie est également prise en compte, notamment pour le développement des panneaux solaires et de la méthanisation. Par ailleurs, le CES-MED accompagne trois villes dans l'élaboration de leur Plan d'Action pour l'Energie Durable (PAED) pour réduire de 20% leurs émissions de dioxyde de carbone (CO2) d'ici 2020 : Beyrouth, Qabb Elias et Baakline. Ce projet européen mis en place dans tout le sud de la méditerranée propose un accompagnement technique à ces trois villes pour établir leur PAED, identifier puis mener à bien les actions de réduction des émissions, mais plus globalement, il vise à promouvoir les énergies propres auprès des municipalités méditerranéennes. Construire un document et une vision stratégique est essentiel pour un territoire qui souhaite s'engager sur ses enjeux énergétiques. Un tel plan est précieux pour établir l'état des lieux énergétique du territoire, les potentiels d'amélioration et la liste des actions à entreprendre. Mais surtout, un plan stratégique est un levier politique puissant pour mobiliser les acteurs d'un territoire. Si le portage politique est suffisant, celui-ci est capable de mobiliser la municipalité, la population, les acteurs économiques et les associations de la municipalité. Construire un projet stratégique cohérent avec des actions ciblées est également un gage de sérieux et d'efficacité propice à attirer
  • 10. les fonds nationaux et internationaux. Plan d'action pour une énergie durable, plan stratégique pour l'énergie, vision territoriale pour l'énergie propre... Peu importe son nom, un tel plan est bel et bien un levier d'action capable d'établir une vision politique, de mobiliser un territoire sur ces enjeux et de trouver des financements. C'est le parti pris de CES-MED qui souhaite développer l'outil des PAED au Liban et mieux accompagner les municipalités dans l'élaboration de leurs stratégies énergétiques. Son bureau libanais, géré par Serge Yazigi, propose une expertise et de nombreux documents6 pour sensibiliser, informer et accompagner les municipalités libanaises dans cette démarche. C'est un acteur clef au Liban pour les questions énergétiques des municipalités qui souhaite collaborer avec le LCEC. Dans sa stratégie d'accompagnement des municipalités, le LCEC gagnerait à les aider dans l'élaboration de leurs stratégies énergétiques territoriales. En coordination avec le CES-MED, le LCEC pourrait proposer son expertise technique, ses conseils en politiques publiques et un cadre d'action clair pour donner les clefs nécessaires aux municipalités afin de s'investir sur les questions énergétiques. Piste n°4 : Accompagnement technique et juridique pour améliorer les normes de construction. Le secteur résidentiel est un gros consommateur d'énergie. Agir sur les règles de construction et d'urbanisme est donc un levier efficace et peu coûteux pour l’État pour promouvoir de nouvelles normes d'efficacité énergétique. Imposer de meilleures normes d''isolation des bâtiments, institutionnaliser le double vitrage, rendre obligatoire le SWH ou les panneaux solaires, voilà autant de pistes que peuvent promouvoir des règles de construction plus ambitieuses. Au Liban, une demande de permis de construire passe tout d'abord par l'Union de municipalité – s'il y en a une, ou par le bureau de l'aménagement urbain, une agence gouvernementale. Cependant, la signature finale vient de la municipalité. C'est donc une responsabilité partagée entre l'échelon local et le gouvernement. Les municipalités peuvent décider de normes locales incitatrices ou obligatoires pour promouvoir l'énergie propre, mais cela doit être fait en coordination avec les autres échelons décisionnaires. C'est le cas de Kornet Chehwan, dans la région du Metn, qui a décidé de promouvoir l'efficacité énergétique dans les nouvelles constructions sur son territoire. Avant de signer le permis de construire, la municipalité exige que le nouveau bâtiment prévoie un chauffe-eau solaire. Un accompagnement juridique et technique du LCEC auprès des municipalités libanaises pourrait permettre de diffuser cet exemple de Kornet Chehwan dans le pays et promouvoir, à moindre frais, l’efficacité énergétique dans le pays. 6 Le CES-MED va publier vers février 2015 un tool-kit de sensibilisation pour les municipalités. Il a également produit un guide : Comment développer un Plan d'Action en faveur d'une Energie Durable (PAED) dans les villes du sud de la méditerrannée en français, anglais et arabe. Tous ces documents sont d'excellente qualité et sont utilisables par les municipalité et le LCEC.
  • 11. Piste n°5 : Accompagner techniquement les initiatives municipales Certaines limites qui sont ressorties des entretiens sont le manque de savoir-faire des équipes municipales et la qualité parfois hasardeuse du matériel sur le marché. Sur ce dernier point, le LCEC a déjà entrepris d'établir des standards pour le marché national et de certifier les professionnels formés, il peut être bénéfique de communiquer sur cette démarche auprès des municipalités. Un accompagnement technique semble être bénéfique pour accompagner au mieux les municipalités volontaires dans la conception et la mise en place de projets énergétiques solides. Ceci peut prendre la forme de workshops à destination des employés municipaux concernés, de brochures de formation ou d'intervention au cas par cas par des ingénieurs du LCEC pour conseiller les élus et fonctionnaires. Cet accompagnement technique, bien qu'exigeant en ressources humaines, est un moyen efficace pour rassurer les municipalités dans leur investissement, garantir la qualité des projets et leur pérennité dans le temps. Piste n°6 : Mettre en place un prêt subventionné Le mécanisme NEEREA, en offrant aux particuliers des prêts subventionnés à taux avantageux, a permis de stimuler le développement des projets d'énergie renouvelable au Liban. Un tel mécanisme étendu aux municipalités serait sans aucun doute une réponse adéquate aux faibles ressources publiques locales et un outil capable de stimuler les projets municipaux d'énergie renouvelable et d'efficacité énergétique. Plus que l'argument écologique, c'est bien les arguments financier et d'amélioration des infrastructures du territoire qui attisent l'intérêt des élus locaux. Dès lors, le meilleur outil semble être un prêt subventionné qui permette aux municipalités de lisser leur investissement sur le long terme tout en profitant rapidement du nouveau projet et d'économies d'énergétique. Les économies d'énergie permettraient ainsi de compenser les mensualités du prêt. Piste n°7 : Promouvoir les partenariats public-privé (PPP) Pour trouver une solution à la faiblesse des finances publiques, une solution souvent avancée est le partenariat public-privé. Ce mode de financement permet à une autorité publique de faire appel à un prestataire privé pour financer et gérer un équipement assurant un service public. Le partenaire privé reçoit en contrepartie un paiement de l'autorité publique et/ou des usagers du service qu'il gère. Ce mécanisme peut être une solution pour financer certains gros projets (ferme solaire, éoliennes, incinération, barrages…), mais les PPP sont également vivement critiqués. Ses détracteurs y voient un risque de privatisation du service public, dénoncent le coût élevé pour la collectivité et l'ingérence d'intérêts privés dans une mission de service public. Choisir les PPP est une décision politique importante et doit se faire avec précaution, notamment dans la robustesse du contrat signé avec le prestataire privé. Piste n°8 : Aider les municipalités dans leurs campagnes de sensibilisation
  • 12. Puisque proches de la population et investies dans la vie scolaire et associative de leurs territoires, les municipalités sont des acteurs pertinents pour mener des campagnes de sensibilisation. En organisant des ateliers dans les écoles, une semaine de l'environnement ou des réunions publiques, celles-ci peuvent permettre de donner des clefs de compréhension et des astuces aux citoyens pour réduire leurs consommations énergétiques, et donc leurs factures. LCEC devrait pouvoir fournir un kit de sensibilisation et une expertise pour armer les municipalités pour de telles missions. Ce serait un moyen, certes long, mais efficace et peu coûteux pour LCEC afin d'enraciner les préoccupations environnementales et les gestes éco-citoyens auprès de la population. _____________________________Conclusions_____________________________ Le Liban amorce sa transition énergétique. La route sera encore longue pour construire un système énergétique robuste, propre et efficace, mais le pays s'est déjà saisi de l'enjeu. L'investissement du gouvernement (par le LCEC), des institutions internationales (par CEDRO ou les programmes de l'Union Européenne), et de certaines municipalités et associations ont déjà permis de développer de nombreux projets d'efficacité énergétique et d'énergie renouvelable dans le pays. Bien réel mais encore marginal, le dynamisme des municipalités est un potentiel important pour le développement des énergies propres dans le pays. Celui-ci doit être stimulé et accompagné par le pouvoir central. En parallèle d'une très progressive décentralisation des institutions libanaises, il est donc nécessaire de supporter techniquement, politiquement et financièrement les initiatives énergétiques municipales. Un échelon local dynamique sur les enjeux énergétiques peut devenir un formidable accélérateur du développement des énergies propres dans le pays, et aidera à enraciner les considérations énergétiques et environnementales au sein de la classe politique et de la population. Dans la conception de ces politiques publiques de soutien aux municipalités, il faudra néanmoins prendre soin à conserver une équité entre les territoires. Il y a en effet un risque d'exacerber les inégalités territoriales : les grandes villes dotées de ressources humaines qualifiées risquent d'accaparer les efforts aux dépends des municipalités plus modestes ; les fiefs politiques efficaces et bien organisés risquent d'attirer l'essentiel des fonds au détriment des municipalités moins performantes. Stimuler l'initiative municipale dans les énergies propres tout en conservant un certain équilibre territorial, voilà un défi de taille, stimulant et nécessaire, pour un pays comme le Liban.