1. 1
PLUSSMART CITIES
Relever
le défi de la
gestion des
cités du futur
Dans un monde marqué par le
déplacement géographique
de la puissance économique,
la démographie galopante et
les pressions qui pèsent sur la
disponibilité des ressources naturelles,
les villes concentrent une part de plus
en plus importante de la population
mondiale. Leur capacité à influer sur
la qualité de vie, à façonner l’activité
économique et à stimuler une
croissance durable est aujourd’hui plus
évidente que jamais. Ainsi deviennent-
elles des lieux privilégiés d’action et de
transformation.
Les villes rivalisant entre elles pour
attirer citoyens, entreprises et
investissements dans un monde
multipolaire et interdépendant,
leurs besoins se font également
plus pressants. Tant en termes de
moyens que de structures, mais aussi
d’aptitudes. Pour relever ces défis, les
pouvoirs publics locaux cherchent à
se positionner. Sur fond d’évolution
technologique, où l’omniprésence
de l’internet, des communications
mobiles et du « cloud computing »
modifie radicalement la façon dont
les citoyens envisagent leurs modes
de vie et de travail. Le concept de
« centricité citoyenne » revêt une
importance croissante à mesure que
l’interconnectivité entre les citoyens
et les prestataires de services devient
plus immédiate — et qu’un plus grand
besoin de réactivité, de transparence
et de maniabilité se fait sentir.
Les contraintes d’une planète aux
ressources limitées et la volonté
de préserver la viabilité de notre
environnement appellent au
changement et à l’instauration de
meilleurs niveaux d’efficacité et
d’innovation. Les marchés citadins des
pays émergents croissent à une vitesse
vertigineuse et beaucoup s’efforcent
d’instaurer de nouveaux modèles du
jour au lendemain ; dans le monde
développé en revanche, les exigences
d’intégration, de connectivité et
d’adaptabilité doivent être appliquées
aux infrastructures existantes.
( Lire la suite en page 11 )
Les villes abritent plus de la moitié de la
populationmondialeetcetteconcentration
urbaineatteindra70%en2050.Pourrester
attractives, elles devront être capables
d’assurer bien-être social, prospérité éco-
nomique et environnement sain à leurs
citoyens. Une question de survie, qui passe
par le développement de nouveaux types
d’infrastructures innovantes susceptibles
de révolutionner nos modes de vie et de
consommation. Certaines ont commencé.
«
Aujourd’hui, quand vous devez vous rendre
d’un point A à un point B, vous pouvez déter-
miner le trajet optimal sur votre ordinateur.
Demain, votre smartphone vous permettra non
seulement de calculer le meilleur trajet en tenant
compte du trafic et des travaux, mais il vous
indiquera aussi s’il vaut mieux y aller en voiture
partagée, sauter dans le taxi qui arrive ou em-
prunter le prochain bus qui passe à tel moment
précis. »
Ce scénario évoqué par un futurologue français
n’est qu’une des multiples applications possibles
de la rencontre entre les nouvelles technologies
de l’information et de la communication et les
systèmes de transport. Il s’agit là de mobilité,
mais l’on pourrait tout aussi bien évoquer l’éner-
gie, l’environnement, la gestion de l’eau, des
déchets et des immeubles, la santé, l’agriculture,
les services publics, l’éducation et la culture....
En Asie, en Europe, aux Etats-Unis, au Moyen-
Orient, nombreuses sont les villes qui parient sur
les nouvelles technologies – qu’elles les déploient
elles-mêmes ou encouragent le secteur privé à le
faire - pour améliorer significativement la qualité
et l’efficacité des services délivrés à la population
et aux entreprises. On parle de communications
mobiles, d’internet des objets, de compteurs, de
réseaux et d’immeubles intelligents, de domo-
tique, télématique, lecture optique, de puces
RFYD, d’éclairage LED, de voitures sans pilote…
Mais le plus souvent, ces technologies certes
innovantes sont mises en œuvre de façon isolée,
dans un domaine plutôt qu’un autre, sans vision
à long terme ni souci d’intégration. A l’instar
de Singapour, d’Amsterdam ou de Yokohama,
seules quelques villes « modèles » ont compris
aujourd’hui qu’elles ne pourront assurer leur
développement durable qu’en combinant toutes
ces technologies entre elles. En s’appuyant sur des
plateformes intégrées, capables de délivrer dans
tous les domaines un service optimal en temps
réel – c’est-à-dire au moment où les usagers en ont
effectivement besoin.
Telles sont les « smart cities », les villes intelli-
gentes qui commencent à émerger aujourd’hui
et déploieront tout leur potentiel dans les années
à venir. Pour le plus grand bien-être de leurs
citoyens. A condition bien sûr que ceux-ci soient
associés de près à cette évolution.
Ce supplément spécial du Soir, réalisé avec l’aide
de la division Stratégie et Développement durable
d’Accenture, n’a d’autre ambition que d’ébaucher
le plus concrètement possible, à travers un grand
nombre d’exemples, ce à quoi pourrait ressembler
l’avenir des villes qui seront – et sont déjà – les
premières à parier sur l’intelligence. Et cet avenir,
c’est déjà demain.
Philippe Berkenbaum
L’enjeu de la mobilité
Vers la fin
du tout à l’auto
P. 2 & 3
Fernand Dimidschstein,
managing director Accenture Consulting
France-Benelux
Thomas Froehlicher, doyen de HEC-ULg
Didier Hamann, directeur-rédacteur en
chef du Soir
L’enjeu énergétique
L’énergie en pilotage
automatique
P. 4 & 5
L’enjeu du vivant
Sous les pavés,
la terre
P. 8 & 9
Retrouvez dès aujourd’hui le blog
des villes intelligentes
www.lesoir.be/smartcities
Singapour, ville du futur
Rendre nos villes
plus intelligentes
Le tour du monde
des meilleures
idées pour gérer
les métropoles
de demain!
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3
en plus d’applications permettent de planifier
son trajet sur un mode alternatif et plus dura-
ble, de comparer l’empreinte carbone de diffé-
rents moyens de déplacement. Via leur GSM, les
usagers peuvent suivre l’itinéraire d’un tram en
temps réel, obtenir des informations sur les per-
turbations et même acheter un ticket de bus par
SMS. Ces nouvelles technologies encouragent les
gens à se passer de leur voiture en améliorant
l’information sur les offres alternatives et leurs
avantages. »
En matière de transports collectifs, les systèmes
de billetterie intégrée font également leur che-
min. Lentement mais sûrement – toujours cette
multiplicité d’acteurs ! Le principe : une seule
carte, un portefeuille virtuel, permet de prendre
le train, le bus ou le métro, de louer une voiture
partagée voire un vélo en libre service. Au niveau
individuel, les métropoles tentent aussi, de plus
en plus, de limiter l’accès à leur centre. Certaines
ont mis en place un péage urbain, comme Lon-
dres, Stockholm ou Oslo. « Un moyen de contrô-
ler efficacement la circulation urbaine, de réduire
la congestion du trafic tout en générant des reve-
nus », constate Accenture.
« Les villes sont très imaginatives, confirme Va-
nessa Holve. La Commission européenne vou-
drait harmoniser certains systèmes mis en place.
Mais de manière générale, force est de constater
que chaque métropole est différente et devrait
pouvoir adapter les mesures selon sa propre géo-
graphie, sa situation économique ou sa popula-
tion. A Vienne, par exemple, une politique de
stationnement très coûteuse ayant été mise en
place, les citoyens privilégient les transports en
commun. Le résultat est le même qu’avec les péa-
ges urbains, mais la mesure est plus facile à faire
passer politiquement. »
Repenser l’offre
Dans un monde qui s’urbanise jour après jour,
« la ville de l’avenir devra fermement poursuivre
deux objectifs : la gestion des ressources dans une
perspective durable et la création d’un environne-
ment économique et social attractif dans lequel
citoyens, entreprises et gouvernement peuvent
vivre, travailler et interagir », prédit Accenture.
Pour le consultant, les villes intelligentes doivent
repenser globalement leur offre de mobilité en
développant et en promouvant des alternatives et
en fournissant aux citoyens de nouveaux modes
de transport. « Chaque ville étant différente, il n’y
a pas une bonne façon de s’y prendre pour dé-
velopper les capacités nécessaires. Une manière
courante de débuter est de se fixer un point de
départ, selon la situation économique, politique
et géographique de la ville. Et de là, évaluer diffé-
rents scénarios en fonction de leurs coûts projetés
et de leurs impacts, pour commencer à planifier la
technologie, la stratégie, les processus, la forma-
tion, la gouvernance et les aspects de la gestion
d’un programme de développement », considère
Adrien Kirschfink. Qui conclut : « Il est d’ailleurs
essentiel que les villes, les autorités, les entrepri-
ses et les citoyens réfléchissent ensemble et tra-
vaillent main dans la main sur la définition de la
mobilité de demain. Les solutions de télétravail
et de flexibilité ne doivent pas être négligées : la
réduction des besoins de mobilité a aussi un rôle
à jouer dans la stratégie globale. »
Anne-Catherine De Bast
Quelque 700.000 trajets ont lieu chaque jour
entre 6 et 10 heures du matin à Bruxelles. Le
service de navigation GPS TomTom a démontré
que les automobilistes vivant à 30 minutes de la
capitale et s’y rendant tous les jours perdent 101
heures par an dans les bouchons. Un trajet en
voiture à Bruxelles prend en moyenne 31,8 % de
plus que nécessaire vu la congestion du trafic…
La mobilité à Bruxelles sera-t-elle plus fluide dans
10 ans ? « L’objectif global est de réduire le trafic
de 20 % d’ici 2018 par rapport à 2001, indique
Accenture. 62,5% des déplacements quotidiens
à Bruxelles concernent des trajets de moins
de 5 km, et dans 25% des cas, de moins d’un
kilomètre. Ces distances pourraient facilement
être parcourues via des moyens de transport
alternatifs », souligne Adrien Kirschfink. Tant
à la Ville qu’à la Région, on étudie la question.
« Mais 2020, c’est quasi demain, constate Michel
Hubert, professeur de sociologie aux Facultés
universitairesSaint-Louis.Ilnefautpass’attendre
à de grands bouleversements, on va vers la
continuation des projets en cours. » Sur la table :
une mobilité plus intermodale, l’introduction d’un
système de guidage par GPS vers les parkings,
le contournement du centre et des quartiers
résidentiels pour le trafic de transit, la mise en
place d’un réseau de bornes de rechargement pour
véhicules électriques ou l’installation de feux de
signalisation intelligents pour fluidifier le trafic.
Des projets en cours visent aussi à prolonger les
lignes de métro, à poursuivre la « tramification »
du réseau, à aménager des parkings pour les
navetteurs ou encore à mettre en service des bus
hybrides. En 2012, la Stib a effectué 350 millions
de trajets. En 2025, elle en prévoit 550 millions.
Côté car-sharing, les opérateurs Cambio et
Zen Car totalisent actuellement 9000 clients
et 270 véhicules. La ministre bruxelloise des
Transports Brigitte Grouwels (CD&V) compte
faire grimper ces chiffres à 25.000 utilisateurs
et 800 véhicules d’ici 2020. Le réseau de vélos
en libre service Villo ! est en cours d’extension.
Et la Région développe un « plan marche », qui
vise à revaloriser les zones piétonnes et à les
équiper en mobilier urbain…D’autres villes belges
ne sont pas en reste. C’est notamment le cas de
Liège, réputée pour ses problèmes de mobilité et
classée ville la plus embouteillée de Wallonie avec
une moyenne de 200.000 voitures transitant au
quotidien par son centre urbain. Les autorités
viennent de lancer le chantier du futur tram,
qui reliera d’ici 2017 une vingtaine de stations
sur 12 km. Plusieurs voiries sont également en
cours d’aménagement pour limiter l’invasion
automobile au cœur de la ville. La circulation sera
ralentie, plus de place laissée à la mobilité douce
(vélo, marche à pied) et davantage d’espaces verts
vont être aménagés. Côté stationnement, deux
parkings souterrains verront prochainement le
jour. Un plan communal cyclable a également été
établi en 2011 et Liège a été élue dans la foulée
« Ville Pilote Wallonie Cyclable ».
Enfin, deux projets développés avec des étudiants
dans le cadre de la chaire Accenture - HEC
ULg pour une Stratégie durable (lire en p12)
ont également été sélectionnés par la ville.
Electricity vise à stimuler l’utilisation de véhicules
électriques en leur réservant notamment des
places de parking gratuites et à atteindre 20 % de
bus hybrides et électriques au sein de la flotte des
TEC ; Intelligent Deliveries est une e-plateforme
intelligente, accessible via smartphone et visant à
gérer en temps réel les aires de livraison en ville
pour fluidifier le trafic et améliorer la mobilité.
A-C.dB et Ph.B.
Bruxelles et Liège
mobiles en 2020
Singapour,
ville modèle
Singapour, 648 km2, 5,3 millions
d’habitants !... Autant dire que la gestion de
la mobilité de tout ce petit monde se doit
d’être irréprochable. La cité-État du sud-est
asiatique planche en permanence sur la
question, à tel point qu’elle est devenue un
modèle pour les systèmes qu’elle a mis en
place afin de réduire la congestion du trafic
et limiter la pollution. Un modèle, même si
la croissance permanente de la population
rend le réseau proche de la saturation.
En 1975, la métropole a lancé le premier
péage urbain au monde, via le contrôle visuel
d’une vignette par la police.
Un nouveau système a été déployé en
1998, l’« Electronic Road Pricing » (ERP). Il
définit de manière électronique différents
tarifs selon le type de véhicule, l’heure et
la distance parcourue via 80 portiques, en
temps réel. Différentes villes se sont depuis
inspirées de ce modèle, comme Londres qui
l’a intégré depuis 2003.
Parallèlement au péage urbain, Singapour
a développé des méthodes visant à limiter
le nombre de véhicules en circulation. Elle
a notamment porté les taxes d’importation
et d’enregistrement des véhicules à des
niveaux prohibitifs, ainsi que le prix de la
licence permettant de les utiliser. Tout cela
n’empêche pourtant pas les problèmes de
circulation de s’intensifier sur son minuscule
territoire. Singapour compte améliorer
encore l’ERP et développe aujourd’hui un
système permettant de mesurer le trafic par
GPS pour mieux le réguler.
Infos en temps réel
Du côté des transports collectifs, la cité-État
propose à ses habitants trains, métros, bus
et taxis. Un réseau multimodal extrêmement
efficace, qui devrait encore se développer
grâce, notamment, à la création de nouvelles
lignes de métro et la mise en service de bus
supplémentaires. « Déjà leader mondial dans
l’utilisation des transports publics, Singapour
s’est fixée un objectif : en 2020, les résidents
effectueront 70 % des trajets matinaux
aux heures de pointe en transports publics,
et plus de 85% des navetteurs boucleront
leur trajet en moins de 60 minutes », relève
Adrien Kirschfink chez Accenture. Bus et
métros sont payables par la même carte
à puce sans contact, l’EZ-Link card, un
porte-monnaie électronique rechargeable
débité automatiquement en fonction de la
distance parcourue. Améliorer la mobilité
passe également par l’information des
usagers. La métropole l’a bien compris, en
plantant aux quatre coins de la ville des
panneaux informatisés diffusant en temps
réel des renseignements sur le réseau et
son éventuelle congestion. Ces infos sont
également disponibles sur le réseau mobile.
Tant les automobilistes que les usagers des
transports en commun peuvent ainsi adapter
leur parcours et limiter les embouteillages.
A.-C.dB
programme analyse la conduite d’un automobiliste et lui propose
de choisir la voiture propre qui lui convient ou l’encourage à faire
usage d’autres types de transports pour certains trajets.
Les voitures
électriques ont
envahi Oslo
Oslo est devenue la capitale
mondiale de la voiture
électrique. La Norvège
s’est fixée des objectifs
climatiques ambitieux, avec
une réduction d’au moins 30 % de ses émissions de CO2 d’ici
2020, et elle parie notamment sur le développement rapide des
voitures vertes pour y parvenir. Fin 2012, plus de 4.000 véhicules
électriques sillonnaient les routes de la capitale et de ses environs
et ce pays d’à peine 5 millions d’habitants en est le deuxième
marché mondial, après la France et devant l’Allemagne. En plus
d’une fiscalité très avantageuse pour les voitures électriques et à
pile à combustible, ces véhicules peuvent emprunter les couloirs
de bus et sont exemptés de péages urbains. Ils peuvent stationner
gratuitement sur les parkings publics où des bornes permettent
de recharger leurs batteries. Oslo s’est également dotée d’un
vaste réseau de bornes de rechargement : elle en comptait
500 fin 2012, dont 65 pour la recharge rapide. Des subventions
incitent d’ailleurs les entreprises et centres commerciaux à en
installer de nouvelles. Et, cerise sur le gâteau, les propriétaires
de véhicules électriques bénéficient d’un tarif préférentiel pour
leur électricité. Non seulement pour leur voiture mais également
pour leur consommation domestique ! Il faut dire que la voiture
électrique s’inscrit parfaitement dans le développement des
réseaux de distribution d’électricité intelligents. Car sa batterie
peut servir de stockage tampon quand la voiture est à l’arrêt. En
d’autres termes, stocker l’électricité en cas de surproduction et en
libérer une partie en cas de surconsommation. Le développement
du véhicule électrique basé sur un réseau de charge intelligent
pourrait ainsi s’intégrer dans un environnement de production
d’énergie renouvelable.
La logistique durable s’installe à Hasselt
Amsterdam, qui vise à réduire sa production de CO2 de 40
% d’ici 2025, a travaillé avec Accenture pour concrétiser
cette ambition. La capitale néerlandaise compte notamment
augmenter le nombre de véhicules plus écologiques et faire
évoluer les comportements. En matière de logistique, elle a
lancé une initiative visant à limiter le transit dans le centre-ville.
Concrètement, les marchandises sont centralisées dans un dépôt
situé en périphérie, puis livrées aux entreprises par véhicules
électriques. Sur le chemin du retour, ils ramassent les déchets
propres. En Belgique, la société de distribution urbaine durable
D-via a lancé un projet pilote similaire à Hasselt et à Gand. Elle a
fondé CityDepot, un centre urbain de distribution intelligente, où
des camions électriques viennent deux fois par jour chercher les
marchandises à livrer aux entreprises.
Les crédits mobilité s’écoulent
à Gênes
A Gênes, en Italie, chaque citoyen
reçoit chaque année un nombre égal
de crédits mobilité, à utiliser pour se
déplacer librement dans les limites de la
ville. La vitesse à laquelle s’épuisent les
crédits dépend de l’heure et du mode de
transport choisi. L’usage d’une voiture
privée en heure de pointe consommera
plus de crédits qu’un déplacement en bus
en heure creuse. Des crédits peuvent être
échangés ou achetés si nécessaire. Les autorités communales
ont notamment travaillé avec Accenture pour mettre ce système
en place. Il vise à protéger l’environnement tout en préservant la
liberté fondamentale des personnes à se déplacer avec le moyen
de transport de leur choix.
Ph.B et A.-C.dB
5. 5
sont déjà nombreuses. Depuis l’an dernier, Livermore et Dublin,
en Caroline du Nord, tournent totalement le dos aux lampes à
mercure. Objectif : réduire la consommation électrique de moitié
et financer la rénovation de leurs installations avec les économies
réalisées. Si l’expérience se révèle concluante, elle pourrait être
étendue à d’autres villes phares des Etats-Unis où l’amortissement
du coût énergétique annuel pourrait atteindre jusqu’à 40 %.
Un modèle à suivre quand on sait qu’à l’horizon 2015, l’Europe
interdira l’usage de nos lampadaires actuels particulièrement
énergivores.
Constructions et rénovations
vertes à Bruxelles et Chicago
L’efficacité énergétique des villes ne peut
être dissociée de celle de leurs parcs
immobiliers. Priorité aux constructions
vertes ou durables, aux matériaux moins
polluants et gages de gains énergétiques,
ainsi qu’à la rénovation en ce sens du
bâti existant. A Séoul, les nouvelles
constructions devront avoir un certificat
vert en 2030, idem pour 80 % d’entre
elles à Singapour. Chicago s’est fixé pour
objectif de moderniser 400 000 logements résidentiels pour
réduire leur empreinte carbone. Entre 2004 et 2008, la rénovation
des espaces de bureaux s’y était déjà traduite par une économie
de 6 millions de dollars sur la facture énergétique. A Bruxelles,
toute nouvelle construction devra être passive à partir de 2015, au
risque de sanctions financières et pénales
Technologie vehicle-to-grid à Horsens
Dans la famille smart, on demande la voiture électrique ! La
technologie V2G doit rentrer en scène cette année à Horsens,
petite ville du Jutland danois. Le V2G utilise les véhicules
électriques comme des réserves tampon d’énergie. Utilisés en
moyenne 5 % du temps, ils présentent en effet des capacités
de stockage énergétique importantes. L’idée consiste à injecter
ce surplus d’énergie sur le réseau électrique du pays lorsque
le véhicule est à l’arrêt. Une production que le conducteur se
voit rémunérer et un moyen pour le Danemark de combler sa
production d’énergie intermittente vu son recours massif aux
énergies renouvelables.
Les smart grids au service de Malaga
Située en Andalousie, la ville espagnole de 570 000 habitants
entend réduire sa consommation d’énergie de près de 40 %
en recourant notamment aux dispositifs intelligents. La ville
expérimente de nouveaux modèles de gestion de la demande et
de production d’électricité décentralisée, via l’implantation de
« smart grids » ou réseaux évolués. Le contrôle de ces systèmes
est prévu par un centre dédié, équipé d’un dispositif de monitoring
comprenant 21 indicateurs, qui synthétise les informations
provenant de plus d’une centaine de sources. Grâce à cette
plateforme de contrôle, qui fournit les données en temps réel, tous
les comportements du réseau électrique sont détectés et peuvent
être rapidement modifiés. Smart City Malaga constitue une des
premières initiatives d’application intégrée de réseaux intelligents
dans un environnement urbain en Europe et fait figure de référent.
Production décentralisée à
Sydney
Prévu dans le plan Sydney 2030 comme
une alternative verte à la combustion du
charbon dont use abusivement la ville, le
projet Green Transformers se présente
sous la forme de « corridors verts »,
répartis autour de la cité australienne
et de ses quartiers. Leur rôle est de
produire de l’électricité par le biais du gaz
naturel partiellement issu de la biomasse
et d’alimenter une grande partie des
habitations avec cette énergie verte. La chaleur résiduelle associée
à la production d’électricité est utilisée pour chauffer l’eau. Ces
centrales à gaz peuvent générer 330 MW d’électricité et l’objectif
est qu’elles fournissent 70 % des besoins de la ville en 2030. Avec
les Green Transformers, les Australiens ont leur système d’énergie
décentralisé et se protègent des éventuels « blackout ».
F.J.
immeuble, d’une usine, mais aussi d’un quartier,
d’une ville, de tout un territoire. Ces nouvelles
technologies « peuvent être étendues à l’ensem-
ble des services urbains, qu’il s’agisse de gérer la
production d’énergie ou d’optimiser la consom-
mation d’eau, de gaz et d’électricité. Les réseaux
évolués permettent d’améliorer cette production,
ainsi que les réseaux de télécommunications à
haut débit, qui assurent la liaison entre tous les
services connexes auprès de la municipalité, des
citoyens et des entreprises », confirme Cédric
Vatier, Managing Director du pôle Infrastructu-
res et Transport d’Accenture. En rendant leurs
réseaux plus communicants, les villes s’assurent
un approvisionnement énergétique plus flexible,
efficace et économique.
Partenariats public-privé
Dans de nombreux pays industrialisés, les in-
frastructures sont âgées et les budgets limités. Si
l’intelligence parvient à prolonger leur existence
sinon à leur donner une nouvelle vie, c’est autant
d’argent public épargné pour de meilleurs usages.
En octobre, Barcelone lançait avec GDF SUEZ le
développement d’une plateforme urbaine intelli-
gente, un outil informatique unique permettant
la collecte, l’analyse et l’utilisation optimale des
données disponibles sur la ville dans les do-
maines des énergies, de l’eau, du trafic, etc. De
quoi permettre à la fois de suivre et développer
la politique territoriale de la ville, de piloter ses
infrastructures, d’alerter, prévoir et gérer les évé-
nements et d’optimiser les investissements.
À Bruxelles, c’est à l’échelle d’un quartier d’Uc-
cle que l’ULB a développé un programme baptisé
Smart City Block. Objectif : faciliter la rénova-
tion d’îlots urbains transformés en éco-quartiers,
dans le respect ou le contrôle de paramètres tels
que les économies d’énergie, la diminution de la
pollution, la mobilité durable et même la convi-
vialité... Si les réseaux intelligents trouvent à s’ap-
pliquer dans de nombreux domaines, celui des
‘utilities’ et en particulier de l’électricité sont les
plus prometteurs. Pour une raison simple : on va
d’un système où la production était centralisée et
la consommation passive vers un système où elle
est décentralisée et même aléatoire, avec l’impor-
tance croissante des énergies renouvelables.
Le consommateur devient lui-même producteur
d’énergie avec ses panneaux photovoltaïques,
ses éoliennes, sa géothermie ou sa cogénéra-
tion. Sans parler des voitures électriques, dont
les batteries pourront stocker l’électricité. Alors
que ces nouveaux outils n’en sont qu’à leurs bal-
butiements, se pose la question du coût de leur
déploiement massif. Les technologies smart in-
duisent de nouveaux modèles économiques. Si
les villes financent en partie leurs projets, l’en-
vergure des investissements exige une trésorerie
supplémentaire. D’où le développement rapide
des partenariats public-privé (PPP) : entre 1999
à 2009, plus de 1400 PPP ont ainsi été signés au
sein de l’UE pour promouvoir le développement
des villes intelligentes, pour plus de 350 milliards
d’euros. De quoi permettre aux municipalités de
bénéficier des capacités d’investissement et du
savoir-faire technologique des entreprises, tout
en offrant à ces dernières de nouveaux marchés
générateurs de croissance et d’emploi.
Philippe Berkenbaum et
Frédérique Jacquemin
Durable. Voilà le qualificatif qu’Amsterdam
affectionne par-dessus tout. Celui qu’elle
souhaitetoujoursmieuxattribueràsesprincipaux
champs d’actions : mode de vie, travail, mobilité,
espaces publics... Durable, mais aussi rentable,
de façon à devenir, comme elle l’ambitionne, la
première « Smart City » d’Europe. En endossant
ce statut de ville intelligente en 2009, la cité
batave entendait surtout honorer son Amsterdam
Climate Program et mener à bien les trois
grandes missions qui s’y dessinent : réduire,
d’ici à 2025, ses émissions de CO2 de 40 % par
rapport à 1999, soit le double de l’objectif fixé
par l’Union Européenne ; satisfaire, avant 2025,
20 % de ses besoins énergétiques grâce à des
énergies renouvelables; et parvenir, à l’horizon
2015, à la neutralité carbone. Quatre ans plus
tard, la voilà rebaptisée Amsmarterdam. Le
lancement du programme Amsterdam Smart
City (ASC), vaste projet collaboratif et plateforme
ouverte où s’associent entreprises, centres de
recherche, pouvoirs publics et Amstellodamois
pour expérimenter de manière collaborative les
technologies intelligentes, l’a en effet transformée
en véritable incubateur de projets estampillés
smart. Et ce, dans quatre domaines prioritaires :
la vie quotidienne, le travail, la mobilité et l’espace
public. La ville cherche, essaie, tâtonne.
Par étapes, favorisant leur montée en puissance,
de façon à atteindre progressivement ses
objectifs : installation d’un premier réseau
électrique intelligent, placement de compteurs
intelligents, système de collecte durable au cœur
d’Utrechtsestraat, la célèbre rue commerçante,
arrêts de tramway conçus pour produire et non
plus seulement consommer de l’énergie, soutien
au développement des véhicules électriques,
promotion des smart buildings pour augmenter
l’efficacité énergétique des bâtiments tertiaires
et résidentiels, généralisation de l’éclairage
économique… Autant d’initiatives qui ont modifié
la morphologie de la cité. Elle innove aussi et sert
de modèle : ses « smart work centers », ou centres
de travail intelligents, se déploient aujourd’hui
progressivement ailleurs dans le monde.
Les premiers résultats sont encore médiocres.
En 2012, ils n’ont satisfait qu’à 0,5 % de ses
objectifs de réduction des émissions de CO2.
Pour autant, ASC, qui n’est pas un porteur de
projets en soi mais un accélérateur d’initiatives
et un levier d’appel aux fonds privés, présente
une démarche de gouvernance intéressante
pour donner le jour à des projets portés par des
groupes d’acteurs : entreprises, organismes
publics, services municipaux, etc. Et c’est bien
dans cette direction-là qu’Amsterdam, comme
toutes les autres villes du futur, devra se tourner
demain : les innovations à venir ne pourront se
contenter de n’être le fruit que de la technologie.
Elles devront aussi être l’affaire de stratégies, de
processus et de personnes.
F.J.
Amsterdam,
ville modèle
Comment
devenir
une ville
intelligente ?
1. Changer les formes
d’organisation et les structures
de gouvernance
Les dirigeants de la vie publique et
économique citadine doivent s’entendre et
s’appuyer mutuellement pour plébisciter le
concept de « ville intelligente », en attirant
l’attention de tous sur les enjeux et sur les
avancées concrètes.
2. Fédérer toutes les parties
prenantes
Il faut inciter les divers secteurs de la
vie citadine — municipalité, entreprises
et citoyens — à se concerter en vue de
rapprocher leurs intérêts et objectifs et
chercher activement à adapter leur propre
fonctionnement au profit de la communauté
entière.
3. Se doter d’infrastructures
ouvertes et intelligentes
En explorant les technologies et les concepts
qui sous-tendent de telles infrastructures
pour acquérir des connaissances, via des
échanges avec les intégrateurs et fournisseurs
technologiques concernés. Grâce à des
projets pilotes, limités à des domaines ciblés
comme les transports ou l’énergie, les villes
peuvent tirer des enseignements de leurs
plans d’action mutuels.
4. Adapter les modèles
financiers aux opportunités et
enjeux à venir
Les dépenses d’infrastructure requièrent
de nouveaux modèles et approches, aptes
à exploiter des technologies matures,
comme les compteurs intelligents, pour
étudier d’autres aspects de l’infrastructure
intelligente. Il faut encourager les partenariats
public-privé et inciter l’adoption de nouveaux
modes opérationnels et économiques
par le biais d’actions concertées et bien
coordonnées.
5
8. 9
Une meilleure gestion des
ressources
D’après la Banque mondiale, la moitié de
la population mondiale manquera d’eau de
manière chronique d’ici 2025. Devenues très
boulimiques, les villes en sont les premières
consommatrices. D’ici cette date, la
consommation d’eau dans les grandes villes
des pays émergents augmentera de 80.000
milliards de mètres cubes. Les solutions
mises en œuvre comme le recyclage des eaux
usées ne pallient qu’une partie des carences,
sans traiter le problème à son origine : le non
renouvellement des réserves naturelles.
Comment les « villes intelligentes » peuvent-
elles améliorer la gestion de cette ressource
vitale ? Quelques exemples fleurissent
aux quatre coins du monde : à Malte, qui
importe son eau potable par bateau, 250
000 compteurs d’eau intelligents mesurent
les flux et communiquent leurs données
via un réseau radio. L’intérêt de ces suivis
chiffrés : afficher en temps réel la demande
des collectivités, identifier les fuites liées
à des surconsommations et mieux gérer
les pénuries. Résultat : une réduction des
consommations d’eau de 20 % à 30 %.
À Singapour, les stratégies de lutte contre
la raréfaction de l’eau sont devenues une
arme économique en devenant source
d’innovation. La cité insulaire est une des
plus avancées technologiquement en matière
de recyclage des eaux de pluie, de traitement
des eaux usées et de désalinisation de l’eau
de mer.
En 2007, Singapour a créé dans sa baie le
Waterhub, point de convergence pour tous
les acteurs de l’eau aux portes de l’Asie. Buts
affichés : doubler le nombre d’emplois d’ici
à 2015 dans l’environnement et l’eau en
particulier, et développer une industrie de
pointe. En quelques années, cette plateforme
de recherche a réussi à attirer toutes les
entreprises du secteur, y compris l’IWA,
l’association internationale de l’eau. Un des
avantages : les entreprises qui rallient le
Waterhub gardent la propriété intellectuelle
d’une technologie si elles la manufacturent
sur l’île. Les investissements dans des usines
de dessalement, la réparation des fuites
des tuyaux et d’autres efforts signifient que
l’état insulaire est en voie d’atteindre son
prochain objectif. Car d’ici 2030, les eaux
usées traitées pourront répondre à 30 % de
ses besoins en eau.
Capture et stockage du CO2
Autre cheval de bataille : la pollution
atmosphérique. Les villes sont déjà
responsables de 80 % des émissions de
CO2 et consomment à elles seules 75 %
de l’énergie mondiale. Si des capteurs
environnementaux permettent de mesurer
la qualité de l’air, certaines métropoles se
parent de technologies décarbonées. Ainsi,
Londres prévoit de favoriser la construction
de centrales thermiques dotées de systèmes
de captage et de stockage de CO2 (CSC). Une
des méthodes retenues est l’oxycombustion,
qui consiste à brûler du charbon dans de
l’oxygène pur pour obtenir des fumées
concentrées en CO2 à 90 %. Celui-ci sera
ainsi capturé et transporté par pipeline
jusqu’à la mer du Nord en vue de son stockage
permanent dans les fonds marins.
La ville connectée du futur générera une
multitude de mesures concernant l’évolution
de ses flux de ressources (eau, gaz, etc.)
et de ses données environnementales
(pollution, géolocalisation, etc.). Elle se
dotera de systèmes de pilotage en temps
réel des réseaux d’eau et d’assainissement
et de solutions de télérelève multi-fluide
(smart metering sur l’eau, le gaz, etc.).
Pour créer une distribution intelligente des
ressources naturelles à l’échelle de la ville, les
métiers auparavant cloisonnés de l’énergie,
du bâtiment ou de l’informatique et des
réseaux doivent fusionner. La vie urbaine
peut en ressortir plus sûre et plus saine, avec
une qualité de l’air et de l’eau accrue ainsi
qu’une optimisation des consommations
énergétiques.
Rafal Naczyk
Dans la région liégeoise, marquée par le
déclin de l’activité industrielle sidérurgique,
l’agriculture urbaine offre une opportunité de
relance pour des activités économiques non
délocalisables. Actuellement à l’essai, le projet
VERDIR, pour « valorisation de l’environnement
par la réhabilitation durable et l’innovation
responsable », vise à remplacer les friches
industrielles par des terrains dédiés à l’agriculture
urbaine.
Remplacer les friches industrielles désertées par
des cultures et utiliser la Meuse pour transporter
la récolte en ville, tel est le pari de ce projet porté
par l’ULg et Gembloux Agro-Bio Tech. Objectif :
combiner zones de production éco-intensive et
lieux de travail. « Depuis sa mise sur les rails,
nous avons identifié 12 friches industrielles à
proximité du fleuve et de terres cultivables peu
ou pas polluées », explique Eric Haubruge, vice-
recteurdelafacultédesSciencesagronomiquesde
Gembloux (Gembloux Agro-Bio Tech). Parmi ces
premiers bâtiments, un ancien hall de stockage
de 125 mètres sur 25 situé à Flémalle sera équipé
durant l’année 2013, afin de pouvoir lancer les
cultures dès 2014.
Au sein de chaque friche industrielle, plusieurs
structures, en forme de cube, seront disposées.
« Certains de ces cubes abriteront des entreprises,
des PME et des spin-off, qui travailleront en
réseau », explique Eric Haubruge. Au sein de
chaque collectivité de sociétés, un cube, au
moins, sera consacré à la production de matières
biologiques, maraîchères ou riches en composants
pharmaceutiques. Son rôle ? « Il fonctionnera en
tant que ‘puits carbone’, capable de capter et de
réincorporer les émissions de CO2 liées à l’activité
humaine des entreprises. »
Deux technologies y seront privilégiées.
L’hydroponie, qui consiste à cultiver des plantes
hors sol en milieu confiné. « Elle permet
d’accélérer le processus de maturation des fruits
et légumes. De récolter plusieurs fois par an, toute
l’année », détaille Eric Haubruge. Et l’aquaponie,
qui associe la culture de plantes hors sol à l’élevage
de poissons. « Dans un cycle de l’eau fermé, nous
utilisons la symbiose de la nature. Les éléments
nutritifs de l’élevage des poissons servent d’engrais
naturels pour les plantes. Les plantes nettoient
ensuite l’eau pour les poissons. »
L’écosystème ainsi créé alimente les plantes avec
les excréments des poissons qui se nourrissent en
retour des rejets des plantes. D’autres projets sont
à l’étude : « Nous menons des recherches pour
associer aux plantes des cultures de bactéries
capables de produire de l’électricité », affirme le
vice-recteur. Pour l’ULg, le site de Flémalle sera
également une vitrine technologique. « Mais
l’objectif est bel et bien, au travers du projet, de
développer de nouveaux moyens pour nourrir
une population citadine qui est demanderesse
d’un accès aux produits frais », souligne Eric
Haubruge.
A terme, VERDIR pourrait aussi créer de
nombreux jobs et compenser, au moins en partie,
les pertes d’emplois liées aux fermetures des
usines. « Après 4 ans de fonctionnement, un seul
cube peut créer 50 à 60 emplois directs », précise
Eric Haubruge. Signe d’évolution : le projet a
réussi à fédérer plusieurs acteurs publics et privés
clés, dont la SPI, le Pôle de compétitivité Mécatech
et la Région Wallonne.
RNK
Reconversion verte
pour le bassin liégeois
Les insectes au
menu quotidien
En 2050, la demande de
protéines animales aura
augmenté de 70 à 80
% alors que les terres
cultivables se seront
raréfiées. La solution ?
Des vers croustillants, des brochettes de criquets, des grillons
assaisonnés, des fourmis caramélisées... Dans nos assiettes.
Selon la FAO, certains insectes contiennent deux fois plus de
protéines que le poisson et la viande crus, et d’autres, surtout au
stade de larve, ont aussi une forte teneur en graisses, vitamines
et minéraux. Par ailleurs, la distance génétique entre l’homme
et l’insecte est plus importante qu’entre l’homme et le bovin,
par exemple. Autrement dit, les risques de voir se développer
des maladies de type vache folle sont moindres. Leur croissance
nécessite nettement moins de végétaux, de terres et d’eau que
celle des grosses bêtes et donc moins de pesticides et d’énergie.
Cerise sur la fourmilière, leur production rejette moins de gaz à
effet de serre et d’ammoniac. Ils sont, surtout, déjà consommés
par près de 2,5 milliards de personnes, estime la FAO, qui
encourage leur élevage dans les pays du Sud. L’idée commence
également à prendre corps dans ceux du Nord. En 2011, l’UE
investissait 3 millions d’euros dans la recherche sur des insectes
à destination de l’alimentation. La même année, le gouvernement
britannique chargeait son agence de l’alimentation de populariser
la consommation d’insectes – ou entomophagie. Aux Pays-Bas
le ministère de l’Agriculture a financé un projet de recherche de 1
million d’euros sur quatre ans afin d’intégrer les insectes dans le
menu quotidien.
L’agriculture en circuit fermé à Anderlecht
Dans ce système de production, il s’agit de recycler les déchets
en matières premières, l’accent est mis sur le lombri-compostage,
le biogaz ou l’élevage de poissons dont les déjections produisent
de l’engrais pour les végétaux cultivés qui, en retour, purifient
l’eau des bacs piscicoles. Pilotée par l’asbl Eco Innovation,
une installation de ce type pourrait voir le jour à Anderlecht.
Ancienne zone industrielle, Cureghem est victime de nombreux
maux : pollution du sol, déstructuration de l’espace urbain,
manque de cohésion entre une population très jeune touchée
à 45 % par le chômage et une autre plus âgée, insécurité... Les
efforts sont orientés vers trois pôles : le développement socio-
économique, sanitaire et écologique. Le défi principal consiste en
l’aménagement d’un plan de gestion des eaux pluviales ainsi que
de 3500 m2 de potagers collectifs. Ceux-ci approvisionneront,
entre autres, les 400 couverts d’un futur « restaurant de
quartier ».
La permaculture pour les villes en transition
La permaculture est d’abord une éthique visant à prendre soin
de la terre et des êtres vivants. Dans la
méthode, elle copie la nature, puisqu’elle
repose sur l’interaction des éléments qui
y sont présents (eau, arbres, légumes,
plantes, animaux…). Les plantes sont
regroupées en fonction de leurs synergies
naturelles : certaines retiennent l’eau,
d’autres nourrissent les sols. Les plantes
s’irriguent, se protègent et se fertilisent
ainsi mutuellement. Contrairement à
l’agriculture industrielle, qui fait pousser
des plantes sur des substrats morts,
enrichis chimiquement, la permaculture
repose donc sur l’utilisation de sols vivants, enrichis par les
dépôts organiques (feuilles, rejets animaux, champignons…) et
les agents naturels. C’est la do-nothing agriculture, car sur ces
sols vivants, le travail n’est plus nécessaire. Née en Australie
dans les années 70, cette approche se diffuse petit à petit
dans les villes. Notamment à travers le réseau des Villes en
transition, un mouvement qui compte 1000 initiatives dans
une vingtaine de pays. Leur objectif ? Réduire la consommation
d’énergie fossile, reconstruire une économie locale vigoureuse et
relocaliser tout ce qui peut l’être. La ville de Totnes, dans le sud-
ouest de l’Angleterre, est devenue la première ville en transition
énergétique au monde, ambitionnant d’abandonner le pétrole et
ses dérivés d’ici 2030. R.N.K.
11. 12
Entretien
« La ville est
un levier
extraordinaire »
Avec environ 261 000 employés dans le
monde, au service de clients établis dans
120 pays, Accenture est le leader du conseil
et des services (Conseil en Stratégie et en
Management, Technologies, Externalisation).
En 2012, la société réalisait un chiffre d’affaires
de 28 milliards $. Au sein du Groupe, plus de
3 000 consultants forment la division Accenture
Strategy & Sustainability Services. Tous sont
experts des problématiques de stratégie et de
développement durable.
Citons, parmi leurs domaines d’expertise :
> la stratégie durable (stratégie smartcity,
stratégie de croissance durable…)
> l’excellence opérationnelle durable
(Sustainable Supply Chain, Green Six Sigma…)
> le développement des infrastructures
intelligentes (transport intelligent, Smart
Buildings…)
> le pilotage de la performance durable
(Sustainability Performance Management…)
En tant qu’acteur Strategy & Sustainability,
Accenture emploie en Belgique 60 consultants
experts sur les problématiques de stratégie et
de développement durable. Elle est également
partenaire de HEC ULg, où elle a créé en 2010
la Chaire en Stratégie durable, et promeut
différents projets : VERDIR, stratégie de
développement de nouvelles mobilités…
Accenture est ainsi devenu le partenaire des
villes dans leur développement durable. Elle met
son expérience et son savoir-faire au service de
la gestion des projets Smart City et a contribué
à de nombreux projets de villes durables
particulièrement ambitieux. Notamment pour
l’agence de développement de Londres, la région
de Madrid, la région Nord-Pas-de-Calais, la ville
d’Amsterdam, celle de Yokohama… Plusieurs
ont été récompensés. C’est par exemple le cas
pour « Amsterdam Smart City » et « City of
Yokohama », qui ont été primés ces derniers mois
au Smartcity Expo de Barcelone.
Pour approfondir encore son savoir-faire,
Accenture a développé des alliances avec ce qui
forme l’écosystème des ville intelligentes :
> des institutions académiques et laboratoires
technologiques, tels que : LSE, MIT, HEC ULg…
> des acteurs clés du financement de l’économie
verte, tels que : Barclays, SDCL, la Banque
mondiale, United Nations Foundation…
> des architectes et sociétés d’ingénierie, telles
que : Atkins, Bre, Arup…
> des organisations non gouvernementales,
telles que : World Economic Forum, The Climate
Group, Carbon Disclosure Project, Global
Compact Cities Program…
Cédric Vatier
Managing Director Strategy & Sustainability
France et Benelux
Accenture
Strategy &
Sustainability
Services,
partenaire
des villes
intelligentes
Tho
m
asFroehlicher
Ferna
ndDimidschstein
Qu’est-ce qu’une ville intelligente ?
Quelles tendances verra-t-on
se développer dans les prochaines
années ? Regards croisés de Fernand
Dimidschstein, Managing Director
Accenture Consulting France-
Benelux, et de Thomas Froehlicher,
Doyen de HEC-ULg. L’école de
gestion de l’Université de Liège
accueille depuis décembre 2010
la Chaire Accenture pour la Stratégie
Durable.
Quels sont les enjeux
liés aux villes durables ?
Fernand Dimidschstein : Chez Accenture, nous constatons une
concentration urbaine de plus en plus marquée. En Belgique, plus de 80 %
de la population vit dans un centre urbain. A l’échelle mondiale, on prévoit
que 70 % des citoyens seront des citadins en 2050. Nous remarquons
deux mouvements. D’abord, les villes deviennent concurrentielles au
niveau de leur capacité à attirer et retenir les entreprises. Ensuite, les villes
redeviennent des enjeux politiques, d’image et de pouvoir importants.
Thomas Froehlicher : Au moment de lancer la Chaire Accenture, nous
avons constaté que le phénomène métropolitain devenait un levier
extraordinaire. La métropole devient le centre névralgique de tous les
changements des 20 prochaines années. Grâce aux hautes technologies,
les villes ont maintenant de nouvelles capacités pour gérer des
problématiques telles que la mobilité.
Quelle est l’origine du partenariat entre
Accenture et l’Université de Liège et quels en sont
les objectifs ?
Fernand Dimidschstein : Ce partenariat est né du lien qui unit plusieurs
employés d’Accenture, moi compris, à l’ULg dont nous sommes des
anciens. Nous étions régulièrement invités à donner des conférences au
sein de l’université. Il y a trois ans, l’ULg nous a offert la possibilité de
matérialiser ce partenariat par la création de cette chaire, qui met l’accent
sur le concept de « sustainability ». Nous organisons des conférences,
nous donnons la parole à des interlocuteurs externes. Nous participons
également à des projets comme VERDIR, menés par les autorités
académiques, qui envisagent la réhabilitation du bassin sidérurgique
liégeois (lire aussi en page 9 du supplément).
Thomas Froehlicher : Au sein d’HEC-ULg, il y a quatre ans, nous pensions
restructurer complètement l’apprentissage de la stratégie. L’idée de se
rapprocher d’un leader mondial du conseil avait son sens. La dimension
de « sustainability » nous donne la possibilité de réfléchir au business
modal et à l’organisation de la métropole. Notre partenariat se traduit par
la tenue d’un séminaire important, en janvier. Nous avons pu réfléchir à
la question de la métropole durable en nous rapprochant d’autres facultés
et des pôles de compétitivité wallons. Grâce à la chaire, nous sommes
au cœur d’un réseau mondial de centres de compétences et reconnus
dans un environnement de business schools. Nous sommes au contact
de projets menés par des villes comme Amsterdam ou Singapour. Nous
avons amené le monde à HEC-ULg, et nous pouvons montrer à Liège
quelles sont les meilleures pratiques.
Quels projets avez-vous menés,
par exemple ?
Fernand Dimidschstein : Nous avons travaillé avec les étudiants d’HEC-
ULg sur la mobilité à Liège, au travers d’un séminaire sur la mobilité
durable. Les étudiants ont proposé des solutions pour la mobilité liégeoise,
dont les meilleures ont été présentées aux forces vives locales. Nous nous
sommes aperçus qu’il y avait un intérêt de la part des autorités. Les villes
doivent pouvoir s’appuyer sur les universités en matière de recherche.
Nous avons proposé à Liège de s’appuyer sur HEC-ULg sur la question
de business cases durables.
Thomas Froehlicher : Traditionnellement, les masters en management
se clôturent par des business cases fictifs. Ici, nous avons lié le travail
au territoire. A tel point qu’aujourd’hui les équipes d’étudiants sont
contactées par des forces vives de la métropole liégeoise et que les projets
ont des chances d’être mis en œuvre. Dans ces propositions issues du
monde académique et musclées par l’accompagnement d’Accenture, il y a
une liberté de conception que le monde politique est heureux de trouver.
En quoi Accenture est-il le partenaire naturel
des villes durables ?
Fernand Dimidschstein : La vision d’Accenture est celle d’une plateforme
technologique interopérable, autour de laquelle rayonnent des modes
de transport intelligents, une bonne gestion de l’eau ou encore de la
consommation d’énergie. Nous étudions la mise en place de stratégies
pour des villes comme Amsterdam, Londres, Liège, Paris ou Marseille.
Nous travaillons notamment à l’élaboration du plan stratégique 2020
de la région Nord-Pas-de-Calais, en France, avec Jeremy Rifkin, l’auteur
de « La troisième révolution industrielle ». Il y désigne une révolution
industrielle basée sur le développement des énergies renouvelables et
de la communication en réseau pour quitter l’ère carbone. L’idée est de
définir une stratégie d’ensemble des acteurs pour tendre vers un concept
plus large que celui d’une ville intelligente : une région intelligente.
ThomasFroehlicher:Ceconceptpeutêtreélargiàladémarched’HEC-ULg,
très actif dans le cadre du programme Creative Wallonia. Nous préparons
un événement en novembre, réunissant ce qu’on appelle les quartiers de
l’innovation. L’objectif est de poursuivre un travail entamé à Montréal,
auquel collaborent les entreprises, les forces vives, les universités, et dont
le but est de redessiner complètement le territoire.
Propos recueillis par Anne-Catherine De Bast